Carnet de voyage

The Kuzco Project

20 étapes
27 commentaires
Voyage au Pérou, en Bolivie et au nord du Chili, dans les grands espaces de l'Altiplano!
Du 9 juillet au 31 août 2017
54 jours
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Il y a 20 étapes, chacune avec pas mal de texte, et des photos. J'y raconte ma vie, mes ressentis personnels, comment je me débrouille pour voyager, mais je mets aussi beaucoup d'explications et d'histoire sur ce que j'ai vu. On m'a fait remarquer que parfois, on s'y perdait un peu ... J'ai essayé de faire fluide en sautant des lignes, mais je m'excuse par avance.

Aussi, très important: maintenant que mon blog est fini, vous pouvez aller directement à une étape qui vous intéresse en cliquant tout en haut sur "20 étapes", il y a une petite flèche et vous avez accès directement au contenu d'une étape. Comme ce blog est long, ça vous évite de redescendre à chaque fois et perdre 10 minutes.

Vous pouvez voir les photos en plus grand en cliquant dessus.

Vous pouvez zoomer sur la carte.

Voilà, bonne lecture!

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Bienvenue sur ce nouveau carnet de voyage, qui va vous permettre de me suivre dans mes nouvelles aventures en Amérique du Sud!

Une fois n'est pas coutûme, pour un voyage de cette ampleur, je crée à nouveau un "petit" article prémilinaire pour parler des préparatifs, ce carnet ayant vocation à devenir public. Je ne vous en voudrai pas si vous lisez cet article en diagonale.

J'ai posté des messages sur des forums de voyageurs, car cette fois ci je me sentais moins de partir seule: l'Amérique du Sud, ce n'est pas l'Asie du Sud-Est, no shit Sherlock. C'est en arpentant les sujets que j'ai pris contact avec Thomas, et nous avons commencé à organiser notre voyage. Puis, Léa a posté un commentaire sur un groupe Facebook, Voyager au Féminin en sac à dos. Et trois nous fûmes. Nous allons rester ensemble jusqu'au lac Titicaca, puis je m'en irai vers les terres boliviennes tandis qu'ils resteront au Pérou.

Pas besoin de visa pour ces trois pays. En revanche, il y a des maladies et des affections communes. Allant en Amazonie, je vais devoir faire le vaccin contre la fièvre jaune, et demander de la Nivaquine ou équivalent, même si je n'y vais que brièvement. Le Chili est en droit de carrément interdire le passage de la frontière si on n'a pas ce vaccin. Un autre mal très important, probablement celui qui m'inquiète le plus - encore pire que d'avoir la dengue car il est quasi inévitable! - c'est le mal des montagnes, le soroche. Nous montons à 3 500m d'altitude, et il n'y aura que 65% d'oxygène disponible. Oui. Et là, si vous m'avez déjà vue faire du sport, vous me voyez en train de souffler fort, d'avoir du mal à reprendre ma respiration, de faire de la Ventoline, parce que oui, asthme à l'effort. Ouille ouille ouille! Mais pour m'être un peu renseignée, ce qui craint le plus est de faire de l'asthme au froid, et ensuite quelque soit la condition physique, on peut être touchés par le soroche. On a des maux de tête, on fatigue, on a des nausées, on peut même faire des oedèmes (!) mais c'est rare et il faudrait vraiment courir un marathon. Contre ça, on peut mâcher de la feuille de coca, ou se faire prescrire des diurétiques (du Diamox), et donc, boire beaucoup d'eau (le GoGirl sera hyper utile, m'est avis). Et vous l'avez deviné, quelqu'un va devoir réduire drastiquement la cigarette ... (je dis ça, mais on verra, je pense que je n'aurai pas envie vu ces symptômes). Normalement, il faut monter petit à petit pour s'habituer à la pression atmosphérique, au manque d'oxygène et refaire plein de globules rouges, mais là nous ne pouvons pas. Après, quelque chose me dit qu'ils ne feraient pas de vols directs Lima-Cuzco ou des bus de nuit Lima-Huaraz si les gens pouvaient en mourir facilement ensuite, donc bon!

Pour finir, je vous donne une petite idée de mon trajet, et à la fin on verra si je m'y suis tenue:

Pérou: Lima, Huaraz, retour sur Lima, avion vers Iquitos (Amazonie), retour sur Lima et avion pour Cuzco, Vallée Sacrée, Ollantaytambo, Machu Picchu, à nouveau Cuzco, Puno, et Taquile, lac Titicaca.

Bolivie: La Paz, Sucre, Potosi, Tupiza, Uyuni et le Sud Lipez.

Chili: San Pedro de Atacama, Calama et Arica.

Retour au Pérou: Arequipa, Nazca, Ica, Lima. Retour en Europe.

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A 11 jours du départ, je viens de trouver un nouveau compagnon de voyage. Il s'agit de Biscotte, la mascotte du CMP! Mes collègues ont eu la brillante idée de me le confier pour le prendre en photo devant des lieux d'intérêt. Il est petit et pas lourd, et il a l'air d'avoir la banane. Vous le verrez donc souvent. Bienvenue, Biscotte!

 "Youpi!"
9
juil

Le jour du départ se rapproche de plus en plus, mais paraît irréel. La vie suit son cours depuis la fin de mon contrat, et il est difficile d'imaginer que dans une semaine je suis au Pérou ... puis 5 jours ... 3 jours ...

Nous apprenons, vendredi, que le vol de Léa a été annulé à cause des conditions climatiques sur Madrid. Stupeur! Il semblerait qu'il y ait des inondations. Allons-nous avoir nos vols respectifs demain?

Et arrive le samedi. Je prends un covoiturage depuis Perpignan, et l'au revoir à la petite famille - chats inclus - sont un peu difficiles mais nécessaires.

Le passage à l'aéroport de Toulouse est anecdotique, puisque tout se déroule bien. Un orage de grêle menaçait, mais malgré la lourde chape d'humidité qui s'est abattue sur la ville, pas de pluie. Nous décollons à l'heure, sans encombre.

C'est un peu dommage que j'aie laissé Biscotte dans mon gros backpack, en soute, pour son premier voyage en avion! Tant pis, je me rattraperai.

L'auberge de jeunesse est assez jolie et confortable! Malheureusement nous sommes samedi soir dans une rue fréquentée et l'insonorisation n'est pas très bonne ...

Le lendemain, départ à 10h pour aller découvrir la capitale madrilène. Je choisis de commencer par le temple de Debod, un temple égyptien, un vrai, datant du IIe siècle avant JC! Mais que fait-il ici? Et bien en 1954, il allait être englouti à cause du barrage d'Assouan. L'Egypte a demandé de l'aide à l'UNESCO, l'Espagne y a participé, et ils l'ont remerciée de cette manière (parraine un temple!)

Le Palais Royal est proche, et finalement je m'accorde une petite visite avant midi, à travers les différentes salles aux thèmes et couleurs variables. L'exposition temporaire présente un peintre du nom de Lorenzo Tiepolo, qui aime peindre des attroupements de personnes et qui est en quelque sorte l'inventeur du photobomb! Un seul tableau, passe encore ... mais ils sont tous comme ça! On ne voit même pas les gens en entier, parfois on ne distingue qu'un oeil! Mais c'est fort original, assez pour attirer mon attention.

Vient ensuite la cathédrale Notre Dame de la Almudena, son plafond exotique et ses vitraux modernes.

Je marche jusqu'à la Plaza de España où je m'accorde une pause bien méritée après cette marche sous un soleil de plomb, bien que la température soit relativement clémente (28 degrés à ce moment là, et surtout pas d'humidité et une petite brise). Les madrilènes ont pour habitude de manger ... un sandwich au calamar. C'est original mais pas étonnant venant d'une patrie qui fait des sandwiches à la tortilla.

Je me rends ensuite à la Puerta del Sol pour voir la statue d'el Oso y el Madroño (l'ours et l'arboursier), symbole de la ville de Madrid car ce sont des éléments que l'on retrouve sur le blason héraldique.

Je retrouve ensuite Thomas, mon compagnon de voyage, devant le musée Reina Sofia, pour aller voir Guernica de Picasso, et ce gratuitement. Bon, il y avait deux entrées et évidemment ... on ne s'est pas trouvés du premier coup!

En revanche, nous avons bien ri devant les Picasso, et leurs légendes dignes d'une copie de philo d'un terminale. "Est-ce une bouche? Un nombril? Une fermeture éclair?" "Est-elle de profil ou de face?" "Elle tape au carreau de la fenêtre, à moins qu'elle ne soit à l'extérieur ..." "De toute façon qu'est ce que la beauté? Ça n'existe pas". Guernica est, cela dit, impressionnant. On n'a pas le droit de le prendre en photo. Nous voyons aussi du Dali et autres peintres surréalistes un peu spéciaux.

Nous nous promenons ensuite dans le parc du Retiro, où nous pouvons voir le palais de Cristal.

Puis nous repartons en direction du centre ville en attendant Léa ... dont l'avion est en retard à cause d'orages sur Genève. Décidément! Mais heureusement, elle finit par arriver, et me retrouve sur la terrasse de l'hostel, discutant avec des Mexicains, un Anglais de Manchester et un Ecossais, qui m'ont offert une bière. Thomas nous rejoint ensuite, et nous allons manger des tapas non loin. Il y a de la tortilla, du maquereau, une petite brochette de viande, des olives et des chips.

Nous sommes finalement contents que notre vol ait été décalé d'une journée. Mais ça y est, demain, les choses sérieuses commencent!

10
juil

Le vol Madrid-Lima est long ... très long. 12 longues heures à tenter de s'occuper comme on peut. C'est la première fois que je prends un vol aussi long! (Puisqu'avant, pour mes autres destinations, j'avais des escales)

Le repas servi à bord mérite qu'on s'y attarde, du fait de sa taille: qu'est ce que c'est, un repas de fourmis? Je veux bien que ce soit une compagnie low-cost, mais quand même! Mon ventre crie famine 4 heures plus tard. Et étonnamment, ce que je gère le mieux est l'absence de cigarette. J'ai triché avec un Nicorette, certes. Mais un seul!

Nous commençons à survoler l'Amérique du Sud que nous abordons par Georgetown, la capitale de la Guyana, vers 20h heure française. J'espère voir le paysage amazonien, mais à ma grande déception, les nuages recouvrent cette partie du continent. Oh, et il y a des turbulences. ON VA S'ÉCRASER! Ah, non, c'est passé.

Mais par chance, les nuages se dégagent par moments. À vrai dire, on ne distingue pas grand chose tout de même. Il y a un fleuve, est-ce l'Amazone? Aucune idée. La forêt s'étend à perte de vue, et cela devient un peu monotone au bout d'un moment. Les ombres des nuages ponctuent cette immensité verte. C'est comme regarder l'océan ...

Mais voilà que nous survolons une partie des Andes. Et le paysage devient magique: les rayons du soleil touchent de petits villages perchés sur de hauts plateaux, les routes grimpent et virent de tous les côtés, et le relief en lui-même est exceptionnel. Du fait de la teinte brune des montagnes, et de l'ombre des crevasses, on croirait regarder de près une peau d'éléphant. Pour couronner le tout, les montagnes semblent se jeter dans une épaisse mer de nuages bas, avec en arrière plan d'autres montagnes aux altitudes vertigineuses.

L'avion plonge à travers les nuages pour atterrir à Lima, et nous entrons alors dans un tout autre monde. Il fait gris, très très gris, les alentours de l'aéroport sont moches. Bien que ce soit le temps qui fasse cet effet là, on croirait à de la pollution, et on pourrait avoit l'impression de s'être retrouvés dans une ville d'un roman de science fiction, une ville industrielle grise post apocalyptique, tant l'effet est irréaliste après avoir survolé ces paysages de rêve! Nous n'avons pas de problèmes particuliers pour retrouver nos bagages, mais en revanche, ils commencent avec les taxis. En prenons-nous un? Nous aurions préféré prendre un bus de ville, au moins pour ne pas répondre aux sollicitations des chauffeurs qui nous agressent à la sortie - ils sont cependant moins chiants que les Vietnamiens. Mais le bus de ville est difficile à trouver, il faut 3 correspondances pour aller à Miraflores, nous avons nos gros sacs, et il est 1h du matin en France (18h ici). Nous craquons, surtout qu'en me renseignant sur Internet, les gens disaient que l'on pouvait négocier le taxi à 50 soles. C'est finalement ce que nous faisons, cela devant nous revenir à environ 5€ par personne. C'est l'occasion de se faire à la conduite liménienne! Il y a des lignes au sol mais on se demande à quoi elles servent. Il y a la police mais on se demande à quoi elle sert. Ils vont vite, se font des queues de poisson et la courtoisie, on se demande à quoi elle sert ... ils foncent, pilent à quelques centimètres des pares-chocs, s'insèrent dans des contre-allées, dans un joyeux chaos embouteillé. Si ces Péruviens voyaient notre film Taxi, ils se diraient "oui, et donc? Petit joueur, va!". Les bidonvilles de Callao font place à une banlieue plus chic, mais bien moins typique. Arrivés à Miraflores, nous nous sentons comme en Europe, un peu déçus mais je pense que les gens qui y habitent sont bien contents au vu du luxe de certains appartements qui donnent sur le Pacifique. Notre taxi nous dépose devant notre hostel, et là ... il fait la tête devant nos 50 soles. Non, il s'agissait de 50 ... dollars! Merci Internet d'avoir prévenu que ça se faisait, ça! Nous ferons plus attention la prochaine fois, mais quand même, nous nous disons que vu le trajet fait, le bordel occasionné avec les bouchons, les sacs, la perte de temps etc, ce n'est quand même pas volé, surtout à trois. Le Pérou n'est pas un pays si bon marché que cela, 1€ = 3,3 soles. Il est entre un pays comme la Thaïlande, et nous.

Nous arrivons donc à l'hostel, et là nous avons surtout de bonnes surprises. Il est aussi joli que sur les photos, les douches sont chaudes (bien qu'il y ait 3 douches collectives pour les femmes et qu'on doive se cacher derrière le rideau), la wifi est excellente, les lits sont très confortables, c'est calme, il y a peu de lumière. Nous faisons aussi connaissance avec le chien qui a donné son nom à l'hostel: "Kaclla, the Healing Dog", c'est le nom de cette race de chien andin sans poil, juste une petite touffe au dessus de la tête, qui était vénéré pour ses vertus curatives. C'est l'équivalent d'un sphinx chez les chats, quoi. Il s'appelle Pisco. Je vais ensuite acheter dans une boutique d'à côté des empañaditas, des chaussons fourrés au jambon.

NB: quand je dis "hostel", c'est le mot anglais pour "auberge de jeunesse". Il est plus court et plus facile à prononcer. Au cours du voyage j'irai aussi dans des guest houses. Il y a plus de chambres privées en guest houses, et plutôt des dortoirs et des pièces communes en hostel. Il peut aussi y avoir des dortoirs en guest house, cela dit. Apparemment, ça dépend du statut du bâtiment vis à vis du propriétaire!

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Après une bonne nuit de sommeil, nous commençons notre découverte d'une partie de Lima par Huaca Pucllana, un ensemble de ruines en adobe au beau milieu des immeubles de Miraflores. En arrivant, un taxi vient nous aborder en nous disant "c'est fermé, mais je peux vous amener voir de bien plus belles ruines" "Oui c'est ça", je réponds, mais il s'avère que le site était vraiment fermé. La paranoïa du touriste! Nous pouvons faire quand même le tour par l'extérieur et nous voyons nos premiers lamas !

Nous entrons ensuite dans le marché de Surquillo qui vend des fruits et légumes, des poissons, de la viande ... ils découpent les poulets devant nous et vendent tout, donc beaucoup d'abats. Nous sommes émerveillés par les fruits, leurs couleurs et leurs senteurs. Il y a de gros avocats, de grosses mangues, de gros cornichons, des pepinos qui sont des poires-melons, jaunes zébrées de violet ... Thomas achète des fruits de la passion, visqueux et acidulés, et nous nous promenons dans le district, qui est un quartier plus populaire que les résidences huppés de Miraflores.

Nous piquons ensuite vers le sud, pour aller voir le quartier de Barranco, ancien village de pêcheurs. Sur le chemin, nous apprenons à traverser la rue : à l'initiative! Nous arrivons sur le front de mer, mais à cause de la brume, nous ne pouvons rien distinguer, sauf des lions de mer! Ah non, en fait ce sont des surfeurs. Nous marchons encore quelque temps puis nous arrêtons manger dans une cevicheria. Nous prenons donc des ceviches, l'un des plats emblématiques du Pérou. C'est du poisson et du poulpe cru, avec du citron, beaucoup de citron! Ça pique! Mais c'est bon et ça nous donne des forces. Nous nous baladons parmi les maisons bariolées du quartier.

Comme nous avons finalement mis moins de temps que prévu, nous décidons d'aller visiter le musée Oro del Peru. Mais c'est toute une histoire car nous devons prendre le bus Metropolitano, un bus express qui a sa propre voie. Mais il faut prendre une carte, la recharger, et heureusement quelqu'un nous aide! Et ensuite à la station, nous devons prendre un combi, un minibus public bondé qui va nous amener au musée. Là aussi, quelqu'un nous aide! Même si nous sommes toujours méfiants au premier abord. 30 minutes de bouchons plus tard, nous y arrivond. La collection appartenait à un homme d'affaires, et au départ il y avait 85% de toc! Mais aujourd'hui tout est authentique. Il a une grande collection d'armes présentées de manière un peu bordélique. Il a 50 casques, il expose les 50 casques! Le musée de l'or en lui même est intéressant, et nous pouvons prendre discrètement des photos, le mec de la sécurité s'étant endormi. Il y a même des momies!

Nous reprenons les bus pour le retour, plus assurément. Nous goûtons des pommes de terre au four fourrées à la viande (laquelle?) sur le chemin. Une petite pause à l'auberge, puis un autre challenge nous attend: aller prendre le bus de nuit pour Huaraz, avec nos sacs sur le dos ...

12
juil

Le jet-lag se fait encore sentir, car nous nous endormons à moitié à l'auberge, pendant que je rédige le blog. Mais c'est un peu animé, grâce à Salvador, le petit de 3 ans du couple qui tient les lieux. Il court dans tous les sens, parle à tout le monde, "c'est tous mes copains ils sont tous chez moi!" et tout le monde rigole. Il est hypersyntonique, comme on dit chez nous. Un peu de dynamisme fait du bien aux grosses loques crevées que nous sommes. Ah, nous avons eu des parts de pizza gratuites, aussi, de la part d'un gars qui n'en voulait plus. Une chacun! C'est une Domino's, et elle est bien moins grasse qu'en France.

Il est temps de partir avec nos gros sacs sur le dos! Bizarrement le mien me paraît moins lourd, je m'habitue, certainement. Nous avons peut être marché 2km en tout, il faudra en tenir 11 bientôt!

Nous trouvons un restaurant de viandes et poulet, et c'est l'occasion de tester le poulet à la braise. On avait dit "on mange léger pour le bus" mais bon ... les frites sont trop bonnes ... le poulet a un goût un peu étrange, je ne sais pas si ce sont les poulets péruviens ou juste le leur, à tester. Il faut donner 10% de l'addition en pourboire ("propina").

Le bus de nuit est, au final, une bonne surprise: il y a relativement peu de backpackers (attendons d'être à Cuzco!), les sièges inclinables à 160 degrés sont assez confortables. Et quand nous rentrons dedans, il y a des lumières bleues et de la musique à fond, c'est un bus disco! Ça me rappelle celui du Laos. La musique s'éteint quand nous partons, bien entendu. Vu comment c'est fait, je peux dormir sur le côté, et c'est ça qui me sauve. J'ai pu dormir 6h, en pointillés certes, mais quand même c'est bien! Il faudrait pareil en avion. Il faut dire qu'on était bien crevés aussi. Mais l'un des points négatifs est bien évidemment qu'il fait nuit et que quand on se réveille, on ne voie rien dehors. La lumière de la lune permet de distinguer quelques pentes escarpées, des pics qui se découpent dans le ciel, et ça a l'air magnifique. Vivement le lever du soleil! Pour l'instant, le mal d'altitude n'arrive pas rapidement, mais on verra plus tard à Huaraz!

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Jour 1: Cordillera et chiens filous

Ĺe bus arrive un peu en avance et nous sommes alpagués par quelqu'un de la guest house dans laquelle j'avais réservé. Nous le suivons, nous installons en attendant que la chambre soit prête ... mais au final nous attendons bien trop longtemps, le propriétaire n'est pas revenu. Nous partons faire un tour dans la ville, allons encore faire un tour au marché ... Les femmes sont vêtues de costumes traditionnels, et certaines ont des cochons d'Inde dans des sacs. Non, pas des cages, des sacs. Et elles les trimballent partout, ça fait mal au coeur.

Au final, quand nous revenons à la guest house, les choses n'ont pas avancé même si le propriétaire est revenu. Mais un des employés nous parle de la seconde guest house, où l'on peut avoir une chambre triple pour moins cher. Elle est un peu plus loin ... il y aura moins de bruit.

Nous avons décidé de monter à la laguna Wilkacocha, présentée comme un bon trek d'acclimatation à l'altitude, et avec un magnifique panorama! Nous prenons donc un combi, qui nous dépose à l'endroit indiqué, et commençons notre ascension après avoir acheté 6 petits pains pour 1 sol (35 centimes environ). Les débuts ne sont pas trop mal, même si nous savons que nous aurons affaire à 600m de dénivelé pour atteindre 3 710m d'altitude. Nous ne forçons pas trop cela dit, pour éviter la venue trop rapide du mal d'altitude. Au final, pour ma part, il se sera traduit par un petit mal de tête. Mais peut être était-ce le soleil, aussi. Le coeur bat un peu plus vite, mais pas plus que d'habitude vu le cardio que j'ai fait avant mon départ, et là je monte bien moins vite. Le jeu en vaut la chandelle: dès que nous gagnons 50m, une nouvelle montagne enneigée apparaît de derrière les crêtes. C'est un magnifique panorama sur la Cordillera Blanca qui se livre à nous! Nous traversons le village de Santa Cruz, avec des maisons en terre cuite, dans lequel il y a actuellement des travaux d'assainissement pour les relier au réseau d'eau potable (pour eux) - on n'arrête pas le progrès. La végétation est surtout composée d'eucalyptus, de gros aloe veras et de blés. Le jaune se mêle à l'orangé, l'ocre de la terre, ponctuée de vert foncé. C'est magnifique. Il fait un peu chaud au soleil, mais parfois il y a un peu de vent, qui fait crisser les blés et chasse les moucherons qui nous harcèlent.

Nous peinons sur la fin de notre montée, mais nous finissons par découvrir le lac: humm, même réaction, "on voyait ça plus grand!". Cela ne nous empêche pas de nous caler à l'ombre pour manger du pain, des fruits de la passion et des bananes. Cinq chiens viennent alors autour de nous! Et l'un d'eux s'en va avec nos petits pains dans la gueule ... c'est malin.

Nous nous calons ensuite au soleil pour faire une micro sieste en bord de rive, où il fait plutôt bon. Nous allons ensuite à la rencontre du SEUL lama au bord du lac, qui est sur toutes les photos touristiques bien entendu. Puis, nous amorçons notre descente. Et nous rentrons à Huaraz, fourbus. D'ailleurs, nous voulions faire une sieste vers 18h, qui s'est transformée en nuit de sommeil de 12h! Le décalage horaire a encore frappé.

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Jour 2: Laguna Parón et GTA Perú

Le moins que l'on puisse dire, c'est que prendre un combi/colectivo, c'est plutôt folklo. Non seulement ils peuvent être bondés avec des gens qui restent debout alors que c'est un minibus avec 12 places assises, mais leurs conducteurs sont spéciaux. Les limites de vitesse? On s'en fout, même si ça se met à bipper dépassé 90km/h mais ça encore ce n'est rien ... les voitures se frôlent, ils doublent sans visibilité, ils doublent même sur des dos d'âne (RIP le code de la route et le respect), c'est à croire que doubler est une histoire de fierté. En revanche, même s'ils s'arrêtent 40 fois sur un trajet, nous trouvons appréciable que les chauffeurs s'arrêtent à la demande: c'est sympa. En plus, ce n'est pas cher: 6 soles (un peu moins de 2€) pour 2h de route. Il y a un "crieur" qui alpague les gens et annonce les arrêts. Nous passons par beaucoup de villages, il est marrant de constater que souvent, les maisons sont peintes uniquement sur la façade. Quand elles le sont. Sinon, ce sont des briques apparentes. Nous allons jusqu'à Caraz, passons au marché, et trouvons un transport pour monter à la fameuse Laguna Parón, à 4100m d'altitude. C'est une magnifique route, qui cahote un peu. Mais ça c'était avant de passer la barrière du parc Huascarán. Elle devient bien pire ensuite, et toujours avec les mêmes règles de conduite. Le trajet prend un peu plus d'une heure, et nous croisons des trekkeuses sur le chemin. À l'arrivée, c'est un choc tant c'est beau: un lac d'eau turquoise surmonté de la première montagne de la Paramount, l'Artesonraju, qui en jette carrément. Nous marchons jusqu'au bout du lac, et dégustons nos fruits qui ont du "vrai" goût, particulièrement les avocats. À notre retour, nous sommes interviewés par des étudiants péruviens qui, pour une étude, nous posent plein de questions sur notre voyage: comment on s'est renseignés, si on aime le pays, si on a mangé du cuy (du cochon d'Inde) ... et dans notre voiture, nous retrouvons les trekkeuses qui s'avèrent être des Françaises, Cynthia et Manon. Elles sont sympas, elles ont la tchatche, partagent plein d'expériences avec nous, notamment la Bolivie où "elles n'ont jamais eu aussi froid de leur vie" (c'est rassurant). Et elles ont décidé d'aller à la Laguna 69 demain, une rando assez compliquée. Je me tâte encore à la faire, mais Thomas est chaud, et finalement nous décidons de nous retrouver à Yungay demain à 7h, donc lever 5h pour nous demain.

En rentrant à Huaraz, les rues sont très animées. Nous allons au marché pour manger; en chemin nous tombons sur des picarones, des beignets au ... beignet apparemment. Mais c'est vraiment bon. J'ai appris plus tard que c'était à la patate douce. Puis je décide de goûter des brochettes, une de boeuf et une de poulet, sur des petits stands de street food. Léa et Thomas ne tentent pas, ils ont peur (chochottes! :D). Moi, je me régale, tant pis pour la digestion, ça fait partie du voyage.

Je suis toujours inquiète pour la rando de demain, surtout qu'avec une nuit dans le bus + le vol pour Iquitos ensuite, je pense que je devrais me ménager ... on verra demain?

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Jour 3: Laguna 69 et Expérience de Mort Imminente

Le titre spoile, mais du coup à 5h du matin je décide de suivre le mouvement. Direction Yungay où nous retrouvons les filles, et nous prenons un combi pour monter jusqu'au départ du trek. C'est toujours aussi beau, nous longeons la laguna Llanganuco, et il est temps de partir.

Cette rando commence à 3600m d'altitude, et finit à 4600, soit donc 1000m de dénivelé. Ils disent 2h pour monter. Je le sens mal, mais je suis. Le parcours commence tranquille, du plat au bord d'une très belle rivière. Bon ce n'est pas si terrible que ça ... hahaha! Commence la première montée. Il y a beaucoup de monde sur le trajet car c'est un défi populaire pour les touristes que de monter là haut. J'ai oublié ma Ventoline. Et ça se sent. La première montée est déjà compliquée. Je peine, je souffle, je m'arrête à chaque lacet, je me fais distancer. Pendant ce temps, des gens montent comme des fleurs. Et en haut ... un peu de faux plat. Ça paraît haut, la suite, mais il est probable que la Laguna soit au dessus du piton rocheux que l'on voit. Au passage, je taxe des feuilles de coca à des jeunes qui se sont arrêtés. Ça ne fait rien du tout. Deuxième montée .. C'est très escarpé. Je suis bien loin derrière les autres et tout le monde me double. J'ai le souffle court, mais pas plus que d'habitude en France. Par contre, j'ai la tête qui tourne, en plus nous n'avons pas mangé grand chose. Je zigzague, j'ai un peu peur de tomber dans le ravin. J'ai mal aux jambes. Je m'arrête encore à chaque lacet, mais chaque fois, je me demande si mon corps va m'obéir parce que je sens qu'il ne veut plus coopérer. Je vais crever. Mais les autres m'attendent en haut donc je ne peux pas juste mourir sur le chemin comme ça. J'arrive à monter je ne sais comment, ils m'attendaient et je m'écroule par terre, à la limite du malaise. Mais avec une pause et un peu de pain, ça va un peu mieux. Nous ne sommes pas encore arrivés, je l'avais vu sur maps.me mais les autres sont dégoûtés. Peut être est-ce du plat, maintenant? HAHA. Grossière erreur. Il y a un petit plateau avec des vaches mais il y a encore une belle montée. J'ai envie de pleurer. Mais les autres me motivent, et cette fois je suis au même rythme que Léa qui meurt à moitié aussi. Les filles me disent de regarder mes pieds et pas en haut. Je teste, je me concentre sur les pas de Léa, nous faisons les mêmes pauses, mais on n'en peut plus. Et pourtant ... on finit par arriver en haut, un peu par miracle je crois, alors que pendant ce temps, un gamin monte tranquille avec son grand père. La vie est injuste. Un peu moins une fois arrivées en haut, si ce n'est que je dérape sur les rochers! Rien de bien grave que l'eau de la lagune ne puisse soigner, heureusement. Ça serait bête de me casser la cheville, ou mon genou devenu douloureux. Au final, nous avons mis un peu plus de ... 4 heures à monter. Wahou. Bon, ça va, la lagune en elle - même est très belle, avec son eau turquoise qui scintille au soleil. On a réussi le défi touriste! Il y a plus dégueulasse pour un dernier tombeau pour les cendres de mon père que j'ai prises avec moi. Il y en a un peu plus que ce que je pensais dans la petite boîte, heureusement je les ai dispersées loin des autres touristes car ça la foutait un peu mal. Je reviens avec les autres, nous voyons une Japonaise qui avait besoin d'oxygène sur le trajet, se jeter dans l'eau glacée pour quelques secondes. Nous entendons les guides des tours crier qu'il faut repartir, c'est bien mais nous on reste un peu. J'ai pas souffert pour rester 5 minutes! Ce ne sera qu'une petite heure finalement, car nous devons descendre avant qu'il ne fasse nuit, et nous nous donnons jusqu'à 16h30 pour être en bas, soit 2h30 de descente. Ah ben, c'est beaucoup plus facile, fuck you, mountain! Mais la descente reste un peu longue quand même. En plus, on se trompe de chemin, on monte sur la piste alors qu'il fallait rester en bas. C'est malin mais nous avons une belle vue sur la vallée. Nous continuons, et un bus s'arrête à notre portée, plein de trekkers de Santa Cruz. Il nous embarque jusqu'à Yungay, assises dans le couloir, pour 10 soles chacune. Thomas, qui va faire le trek de Santa Cruz, continue de son côté. On doit le retrouver à l'aéroport de Lima le 18 juillet! Enfin on espère, surtout qu'il n'a pas acheté de réchaud ni d'allume gaz pour son trek en camping, mais "ça va il sait faire du feu". Ok, Into the Wild, on te fait confiance! Nous descendons donc jusqu'au point de départ, et heureusement que le bus était là car il n'y avait pas de combis ... ce n'est pas très confortable, il ne me manquait plus qu'une douleur au dos, mais au moins on rentre. Ils nous proposent même des caisses pour nous asseoir dessus, mais nous refusons car ça ne va pas changer grand chose.

De cette expérience, je retire que pour une asthmatique sans Vento, c'est une très belle performance.

Arrivées en bas, nous nous disons au revoir. Léa et moi repartons de notre côté, et quand on arrive à Huaraz, c'est la fête! Il y a des fanfares, des chars, des gens déguisés qui font des rondes, c'est trop cool. Fatiguées, nous partons récupérer nos sacs, mangeons une sopa de gallina dans un restaurant, et partons comater au terminal de bus. Nous allons donc prendre un bus de nuit, puis demain je prends mon avions pour Iquitos après avoir visité Lima. Pas de douche. Je pue, mes cheveux sont dans un état lamentable. Vive le voyage!

Ce sont les 15 ans d'une fille (la quinceañera), c'est un âge symbolique. 

Une dame nous aborde, elle nous parle mais nous ne comprenons rien. Elle tient la jambe à Léa qui met ses écouteurs. Elle nous épie, regarde tous nos faits et gestes, c'est un peu flippant même si elle a l'air gentille. Enfin, au terme d'une attente qui nous a paru très longue, on embarque. Pas de prises dans le bus. Au fait, les prises sont spéciales, on peut y brancher une prise comme les nôtres et une prise américaine en même temps! Cool même si ça ne tient pas forcément bien, ça fait le job. Le bus fait un peu plus vieillot qu'à l'aller, mais ils nous servent à manger. Au final, je dors moins bien que dans le premier bus ...

15
juil

À l'arrivée, nous retrouvons les klaxons de Lima avec grand déplaisir, ainsi que la femme qui nous avait abordées à Huaraz et qui nous dit d'emblée que sa mère est à l'hôpital, ok. Nous passons d'abord poser le sac de Léa à son hostel, qui a l'air sympa, dans un style début du siècle (il s'appelle d'ailleurs 1900 Backpackers). Nous nous arrêtons dans un café où les prix de Lima nous blasent, et j'en profite pour me rafraîchir comme je peux: dans les toilettes. Mais mine de rien, après avoir tant transpiré, rien que ça ca fait du bien. En mode "comme on peut".

Nous allons jusqu'à la Plaza de Armas, le vrai centre de Lima. Elle est assez petite, et entourée de bâtiments jaunes coloniaux et de la cathédrale que nous ne visitons pas car elle coûte 10 soles et que nous préférons aller voir les catacombes du Monastère San Francisco. L'église en elle même change un peu de chez nous, par les chapelles dorées et les habits dont les Saints sont vêtus. Ils sont plus festifs, mais je m'attendais à encore plus. À propos, savez-vous qui est le Saint Patron de Huaraz? Jesus Christ himself. Il y en a qui se la pètent ... nous entrons dans le monastère en lui-même mais devons attendre une visite guidée qui normalement dure 30 minutes. Oups, ça va durer jusqu'à 10h15, et je prévoyais de repartir à 10h pour aller chercher mon sac au terminal de bus, puis aller à l'aéroport! Tant pis, maintenant qu'on a payé ... Notre guide parle anglais avec une patate dans la bouche et un accent sud américain et ressemble à un croque mort, mais c'est dans le thème pour voir des ossements. Le monastère est joli, mais pas de photos permises, comme partout maintenant. Nous passons dans une bibliothèque vieille de 400 ans! Il y a un grand livre ouvert avec des rudiments de notes et 3 carreaux pour la clé de sol qui ne devait pas exister à l'époque. Il y a un tableau de Rubens, et les autres artistes locaux s'en inspirent. Les dorures, carvures et boiseries sont jolies, mais je commence à décrocher car j'ai envie de vomir à cause de l'antipaludéen que j'ai dû prendre ce matin en ne mangeant certainement pas assez. Nous partons dans les catacombes, où se trouvent 70 000 sépultures et nous pouvons en voir déjà 25 000. Il y a beaucoup de fémur, de crânes, d'omoplates et de coccyx, car ils ne gardent que les gros os. Pour la déco, ils ont dispersé certains crânes en rond. Nous voyons ensuite un tableau représentant la Cène mais autour d'une table ronde, ce qui est plutôt original. Le peinte s'est amusé à s'introduire dessus avec sa famille. Nous finissons finalement la visite à 10h30, heure à laquelle j'avais prévu d'arriver au terminal de bus. Donc non, je n'ai pas eu le temps de faire le musée du cerveau dont j'avais parlé, au retour sur Lima pour le dernier jour, j'espère! Il y a 35 minutes de marche jusqu'au terminal, et je quitte Léa un peu avant. Je vais récupérer mon sac, et à moins de 100m d'altitude, il paraît léger comme tout!

Bon, il est 11h et je vais quand même tenter le colectivo pour aller à l'aéroport, mon vol étant à 14h45. J'aime comme tout est facile. Je vais sur une grande avenue, je demande "aeropuerto" et je monte dans le premier qui passe, 0 minutes d'attente. Bon, ce n'est pas la même dans les bouchons, mais ça fait découvrir d'autres quartiers de Lima qui n'ont cela dit rien d'extraordinaire. J'ai la chance au départ d'être tout devant avec mon sac sur un siège malgré le fait que je leur demande si je devais le prendre sur moi, mais ils m'ont laissé de la place vraiment jusqu'à ce que ce ne soit plus possible, parce qu'ils sont trop gentils. Heureusement, car ensuite une fois que je l'ai pris sur moi, les boucles me rentraient dans la cage thoracique et j'avais du mal à respirer. Ce n'était que sur la dernière demi heure, il nous a fallu 1h30! Tout se passe bien pour l'enregistrement, le passage de la sécurité ... en en salle d'embarquement, une dame d'Iquitos engage la conversation parce que j'éternue, avec le traditionnel "Jesus, José, Maria, Salud, Amor" et ensuite si on continue ... c'est qu'on a un rhume. Je lui parle de Huaraz (en espagnol), elle me dit qu'on appelle les neiges éternelles "nevado". Nous embarquons en dernier, dans la dernière navette et ... attendons. L'heure du décollage passe, le stress monte. Enfin, une personne en retard finit par monter, et c'est parti. L'avion nous a attendu (ouf) et nous décollons pour Tarapoto, notre première escale. C'est la compagnie Star Perú, et bien qu'il soit 15h30, ils nous nourrissent d'un petit sandwich.

Nous passons au dessus de la Cordillère dont les pics paraissent proches, on peut même voir des lagunas ... le paysage change vite et ça y est, nous survolons la forêt. C'est encore montagneux, mais le relief s'aplatit de plus en plus. Dans l'idéal, j'aurais aimé prendre ce vol Tarapoto-Iquitos, pour visiter Kuelap. Mais depuis Huaraz, il fallait 3 ou 4 jours pour la rejoindre, c'était trop long. Nous descendons pour atterrir ... oh, des palmiers! Des bananiers! Ce n'est plus du tout le même pays! Ah, les Péruviens applaudissent quand on atterrit. Cependant ils n'attendent pas qu'on ait ralenti, ce qui veut dire que l'on pourrait très bien se scratcher dans la foulée, mais bon. Un second décollage ... et un second atterrissage alors que le soleil écarlate se couche, c'est magnifique. Ouf, mon sac a bien suivi, je me badigeonne tout de suite de spray car les moustiques et papillons de nuit sont énormes!

À la sortie, bien sûr, plein de taxis charlatans qui me racontent qu'on prend le combi à 2km alors qu'on voit la route assez proche. Mais l'un d'eux me propose le trajet à 5 soles (je précise bien en gras) en me disant même que ça ne me fait que 3 soles de plus ... un de ses collègues passe, je lui dis "3 soles?" (J'ai toujours besoin de deux ou trois soles de monnaie c'est pour ça, c'est pas pour le prix en lui même) il me répond "ok 3 soles" (j'en suis sûre sûre sûre) et nous partons en tuktuk, j'avoue que j'en avais envie. Il y en a plein d'ailleurs, avec des scooters, des motos ... avec ce climat et cette végétation, je me croirais à nouveau en Thaïlande, et ça me gonfle le coeur! Très bonne première impression, donc. Cependant au cours du trajet je m'aperçois que l'aéroport est un peu ... loin. Donc les 3 soles me paraissent bizarres et je sens vite venir le coup fourré donc je mets au point une stratégie. Je précise au fait que je ne peux retirer que 600 soles par semaine, j'ai 25 retraits gratuits et je ne peux souvent prendre que 400 soles maximum quand je suis chanceuse ... Nous arrivons donc, et comme prévu il me dit "c'est 3 dollars". Bon, ça fait 10 soles en vrai, ce n'est pas si énorme, mais là je n'aime pas le principe car il n'a carrément pas de parole. Je lui dis que je n'ai pas de monnaie, que je vais payer l'auberge avec la carte, que le mieux que je puisse faire c'est 5 soles, je lui donne ma pièce et je rentre. L'homme qui m'accueille au Flying Dog hostel est très sympathique, il me donne des conseils, m'appelle par mon prénom ... il me dit qu'Iquitos craint un peu, que je dois faire attention en étant seule. Je pose les affaires dans mon dortoir, et pour l'instant je suis seule avec un Chilien. Ceux qui ont suivi ma mésaventure avec l'Indien au Cambodge comprendront alors mon inquiétude, mêmes'il a l'air cool, je suis désolée de me méfier, monsieur. Je ne lui parle que peu, pauvrette. Je descends en bas, parle avec un Sud Africain qui vient de Colombie, et je vais m'acheter à manger. Je ne trouve pas de Juane, tant pis, j'ai pris du riz, un oeuf et des bananes, miam! Mais seule, je sens un peu d'insécurité ici - mince alors! Je rentre à l'auberge pour télécharger mes photos de Huaraz ... mais la WiFi en plein milieu de la forêt amazonienne est très très mauvaise. Même dans un cybercafé, c'est sans succès, enfin si mais c'est bien long. Je préfère donc aller prendre une DOUCHE, qu'est ce que ça fait du bien d'avoir à nouveau les cheveux propres ... et de dormir dans un lit bien confortable.

Je suis censée aller dans la jungle amazonienne ... mais pas du côté de l'Amazone, le fleuve. J'ai réfléchi et je préfère faire un ecotour à côté. Je ne verrai pas les dauphins roses mais au moins je ne perturberai pas leur écosystème déjà bien mis à mal. C'est quand même bête de ne pas voir l'Amazone, donc je vais prendre un colectivo pour le nord d'Iquitos.

Iquitos est la plus grande ville du monde qui ne soit pas accessible par voie terrestre. On n'y va que par avion ou par bateau, il y a donc un port très important.

Il faut que j'aille jusqu'à Nanay, au nord d'Iquitos. Il y a là un marché, où je peux acheter un Juane: du riz et un peu de poulet dans une feuille de bananier. Et surtout, je peux enfin voir l'Amazone! C'est un peu impresionnant de se retrouver face à ce si grand fleuve, même si je ne vais pas naviguer dessus ni nager dedans avec les dauphins roses. Il est tôt mais je prends ce petit déjeuner en y allant avec les doigts, carrément, face au fleuve. C'est délicieux. Des gens m'abordent alors pour me dire que je devrais faire attention à mes affaires, on pourrait me les voler ... je me méfie beaucoup sur le moment, je me replie, mais la personne n'est pas mal intentionnée.

Cependant, je ne tarde pas trop, il est 7h et quelques. Je prends quelques photos du marché, une dame me montre une petite tortue, je fais rapidement une photo car sait-on jamais, ça pourrait être une technique pour me voler? Mais j'ai bien fait de prendre une coque avec une dragonne. Je repars donc rapidement dans l'autre sens en colectivo pour rentrer à l'hostel, me reposer rapidement, et prendre mon sac pour marcher jusqu'à mon point de rendez-vous à 30 minutes à pied de là. J'ai le plan en tête, c'est une maison avec une façade rouge. Je marche donc, traverse un marché, plein d'épices, de poissons, de vendeurs de ceviche, et d'odeur de pourriture, mais au moment d'y arriver ... je ne trouve plus où c'est. Je tourne autour, je demande à des gens qui ne savent pas, je perds 20 minutes. Je ne suis plus sûre de rien. En montant un magnifique escalier arc-en-ciel, qui fait penser à celui qu'on peut trouver à Rio, je trouve enfin quelqu'un qui sait où c'est, et qui m'y mène! Et bien j'étais bien sûr passée devant, sauf que la façade n'est pas rouge, mais verte.

J'arrive, et il n'y a que des enfants. Ils appellent une autre jeune femme, qui descend de la douche. Elle ne comprend pas pourquoi je suis là : je devais arriver demain! Au départ c'est vrai que c'était ce qui était prévu. Mais j'avais envoyé un mail pour changer de jour, j'avais eu une réponse positive, et c'était bien comme ça. Bon qu'à cela ne tienne, elle passe des appels, me fait attendre un peu car il faut acheter la nourriture au marché, mais au final, tout se met en place. Le guide n'est pas disponible aujourd'hui et du coup c'est la jeune femme, Carmen, qui est un peu plus vieille que moi, qui va être ma guide. Elle se met en tenue "d'exploratrice" comme Dora. Je laisse mon gros sac chez eux, carrément. Et nous prenons ensuite un colectivo pour la réserve. Elle est très gentille, elle travaille en Italie à Bergame l'année et elle est revenue à Iquitos il y a deux jours. La pauvre, ne m'attendant pas, elle a fait la fête la veille et en plus elle a encore le décalage horaire, mais elle est positive et enjouée. Dommage qu'elle ne parle pas anglais, je la comprends mais je galère à parler espagnol. Nous passons devant des petits villages, et un cimetière dans lequel poussent des palmiers. Nous arrivons à notre point de départ, entre Iquitos et Nauta. Nous rencontrons des gens qu'elle appelle aussi "voisins" et j'ai l'impression que tout le monde est ses voisins. Normalement nous aurions dû marcher une heure pour arriver aux maisons, mais comme il fait grand soleil, nous prenons un tuktuk (non ils ne s'appellent toujours pas comme ça mais bon ...)

La route est difficile car il y a du sable, la moto s'enlise, nous la poussons avec un autre "voisin" de Carmen. Nous entrons plus profondément dans la selva: c'est magnifique. Il y a tous ces arbres tropicaux comme on les imagine. Enfin, nous arrivons proche des petites maisons de bois, marchons un peu. Carmen me montre différents arbres, différents fruits, nous ramassons des agujes qui sont les fruits des palmiers à eau. Elle connaît la forêt sur le bout des doigts et on sent qu'elle l'aime beaucoup. En fait, la maison où nous allons est la sienne, et j'ai un grand lit pour moi toute seule. C'est super de ne pas être en groupe, j'oublie que c'est une agence et je me sens en Couchsurfing en plein milieu de l'Amazonie. Je pose mes affaires, et en attendant que Karen cuisine notre repas, nous partons nous baigner dans l'eau couleur ... café. Elle n'est pas sale, c'est parce que beaucoup de feuilles mortes tombent dedans, elle est teintée par la chlorophylle rouge. Elle est fraîche, juste ce qu'il faut, et il y a du sable blanc. Ça fait un bien fou après avoir autant marché à Huaraz. Nous continuons à parler (laborieusement pour moi!), Carmen travaille dans une crèche à Bergame. Son mari Daniele est psychologue! Il y a une chose que je regrette, c'est de ne pas assez bien parler espagnol pour comprendre tout ce qui se dit, et Carmen ne parle pas anglais. J'aurais tant aimé partager plus avec elle, lui poser plus de questions! Mais tout me vient en anglais et c'est inutile, et le temps que je trouve comment dire en espagnol, c'est trop tard. Je déteste cela. Nous profitons pleinement de cette pause fraîcheur, puis nous posons pour écouter les bruits de la jungle, comme les cris des toucans, observer les énormes papillons bleus et verts qui virevoltent, goûter un fruit qui s'appelle palillo. Tout m'émerveille. Je ne sais pas encore si l'on pourra voir beaucoup d'animaux, mais je préfère ça qu'en voir des "spécial touristes". Autant aller dans un zoo ...

Nous allons prendre notre repas: Karen a cuisiné du poisson avec de petits légumes et un bouillon, du riz, du yukka (c'est trop bon! C'est différent d'un coeur de palmier car c'est cuit et plus sucré), des lentilles et une salade d'avocats avec je ne sais quoi d'autre. Je me régale. Nous allons ensuite nous reposer un peu, je peux me caler sous la moustiquaire car j'admets que les moustiques sont vraiment très embêtants. Et j'ai un peu peur qu'ils me filent des choses malgré le repousse. Déjà que j'ai un peu la tête qui tourne ... mais c'est probablement la fatigue et quand même les quelques piqûres mais je ne panique pas car ça m'avait fait la même chose en Thaïlande au départ. J'écoute les bruits, je respire l'odeur de la selva ... C'est fou de se dire que ces gens vivent vraiment comme ça, sans eau courante ni électricité, donc encore moins avec la Wifi! Les maisons sont ouvertes, pas de portes, pas de clés, que de la confiance.

Nous partons nous promener aux alentours pour donner les petits gâteaux aux enfants, mais ils doivent tous faire la sieste. Nous passons près des marécages et nous tombons sur un pic-vert! Un pájaro carpintor, "un oiseau charpentier" en espagnol. Nous l'entendons faire toctoctoc. Sur le chemin, nous croisons de petits chiots mignons comme tout ... premier petit coup de blues en pensant à mes minettes qui me manquent. C'est pas le moment! Je crois que cette jungle provoque des émotions trop intenses. Nous passons devant la petite école et son jardin potager, nous allons voir des ananas, c'est la première fois de ma vie que je les vois pousser. Rendez-vous compte, il faut un an pour qu'un ananas pousse! Ensuite, nous allons voir un homme de la communauté - qui s'appelle Nueva Esperanza - qui a un grand païche chez lui, le plus grand poisson d'eau douce du monde, qui peut mesurer jusqu'à 3 mètres. Nous revenons tranquillement et vers 16h30, nous installons pour admirer les oiseaux tels que de petits colibris, et de petits paucars, des oiseaux jaunes et noirs. Il faut être patientes. Carmen est toujours émerveillée, j'ai du mal à l'imaginer quitter sa selva pour partir étudier, et ensuite aller en Italie. La vie ici est si spécifique, si exceptionnelle, qu'elle doit lui manquer énormément. Ce sont vraiment deux mondes différents. Elle me dit qu'une fois, elle est tombée nez à nez avec un puma. Elle me montre un guide de l'Amazonie, avec les arbres, les araignées, les fourmis, les singes, les félins, les poissons, les papillons, les oiseaux, les serpents, et bien sûr les moustiques. Ils n'y sont quand même pas tous dans ce guide. Les Amazoniens ne prennent rien contre le paludisme (la Nivaquine défonce le foie et les reins quand on la prend trop longtemps), ils se protègent les bras et les jambes la nuit tombée, et ils ont de la chance ou pas. Ils sont vaccinés contre la fièvre jaune à partir de 7 ans. J'apprends énormément de choses et je vais certainement en oublier. Carmen me montre également un colorant naturel qui s'appelle l'achote, qui teint en rouge. J'en prends dans mon sac en souvenir, tout comme je vais prendre un aguaje. Nous allons ensuite voir les gens de la communauté qui jouent au football et les enfants à qui j'offre les gâteaux, alors que la nuit commence à tomber et qu'il fait moins chaud. Nous admirons de petits colibris qui viennent se nourrir. Le soleil n'est pas rouge aujourd'hui, mais la couleur du ciel est tout de même magnifique. Il fait un noir d'encre très rapidement, et nous nous éclairons aux lampes de poche et aux chandelles à gaz. Pour manger, ce sont les restes de midi (le poisson est de la doncella) et une salade patate carottes en plus. Et de la poudre de céréales à mélanger avec de l'eau, qui se nomme Avena, qui n'est pas mal au début mais un peu écoeurante ensuite, surtout qu'elle fait des grains comme de la Maïzena. Les enfants de Segundo, qui va nous guider dans le noir, mangent avec nous. Puis nous nous préparons pour l'excursion: on met les bottes, et le haut de pyjama à manches longues pour ne pas se faire piquer. Nous sommes surtout allés à la rencontre des insectes, notamment des termites - j'en ai assez dans la maison de mon père comme ça! - et des araignées, et des poissons. Pas de tarentule malheureusement ... ni de singe ou de paresseux qui dormirait dans les arbres. Mais la nuit donne une ambiance particulière à la marche. Il y a de petits insectes qui font des flashs de lumière dans les arbres, et non, ce ne sont pas des vers luisants. Nous nous arrêtons également pour sentir des feuilles de tabac qui ont séché au soleil: je ne trouve pas que ça sente beaucoup ... Puis, comme j'ai sué toute l'eau de mon corps, il est temps d'aller se doucher - comme au Vietnam: avec une coupelle dans un tonneau d'eau - et se coucher au beau milieu des bruits de la jungle. Je n'entends pas d'Urcututu: c'est le nom de la chouette, basé sur son cri. Comme un Pokemon.

Je pensais que j'aurais du mal à dormir avec le bruit des oiseaux, mais en fait non, j'étais trop fatiguée et j'ai plutôt bien dormi sous cette moustiquaire où je me sens en sécurité. Carmen m'avait dit que les nuits dans la selva étaient fraîches, je l'avais charriée en lui disant "quoi, vingt degrés?" et en fait, il se trouve que vers le matin, j'ai eu un peu frais, mais rien de bien grave. Nous sommes debout tôt, à 6h du matin, pour espérer voir des animaux, surtout des toucans ou des singes. Et bien pas de chance, nous n'avons fait que les entendre! Nous avons encore vu des fourmilières et termitières pendues aux arbres, une plante qui est un "hôtel à fourmis" car quand on casse ses petites bosses elles sont dedans, vu des fleurs rouges du nom de "Beso de Amazonia", ainsi qu'un arbre se nommant le Sapohacha qui permet d'apaiser les douleurs du cancer. En parlant de palmier magique, il y a aussi l'Ungurahui: son huile s'utilise pour rendre les cheveux forts, on fait des glaces et des boissons (très bonnes, j'ai goûté) avec ses fruits, qui servent aussi à lutter contre la bronchite, l'asthme et la tuberculose, les racines contre la diarrhée (que je n'ai pas eue ici soit dit en passant!) et ses feuilles servent à construire des maisons. Il y a un autre palmier, la Chambira, qui sert à faire des hamacs ... Et un autre, qui s'appelle Leche caspi, dont la sève ressemble à du lait. Je goûte et c'est très bon.

Nous passons près d'un arbre qui s'appelle le Subidor, et Segundo grimpe dessus pour faire tomber des fruits. Sur le chemin du retour, toujours pas de singes, mais un Bocholocho, un oiseau ressemblant au Paucar. Pour le petit déjeuner, nous avons de l'Avena, de l'avocat, des oeufs, une salade mandarines et bananes, et du pain toasté au feu de bois. Délicieux! Les Péruviens sont, en général, forts en pains. L'eau minérale est filtrée par un système spécial et ce sont des cailloux qui fournissent les minéraux. Ça marche bien. Nous allons ensuite faire une dernière excursion dans la jungle, toujours avec Segundo mais aussi avec un autre homme qui est plus porté sur la faune apparemment, à en juger par son aptitude à trouver une ... Grenouille venimeuse. Une Ranita Blue Jeans. Mais elle est toute petite, toute mignonne, elle n'est dangereuse que si d'autres animaux l'agressent et nous allons donc être gentils avec elle. Nous voyons un arbre immense avec lequel on fait des plats et plateaux, le Palisangre, au bois très dur. Un autre, l'Aleta, qui ressemble à une immense feuille et avec lequel on peut communiquer en tapant dessus si on est perdu car il fait caisse de résonance, et on peut s'y réfugier s'il pleut. Segundo coupe une liane, de l'eau en coule, et il me fait boire. Pas de panique, cette liane filte les impuretés de l'eau! Enfin, j'espère qu'elle le fait bien.

Nous revenons, et en attendant que le déjeuner soit prêt, nous allons nous baigner, rapidement car elle est fraîche et il fait moins chaud qu'hier. Pour le repas de midi, nous avons des pâtes cuisinées avec des légumes, du riz, des lentilles, du yucca, une salade avec des betteraves, des brocolis et d'autres choses. Ensuite, un peu de repos jusqu'à notre départ, pour profiter un maximum de la selva, du bruit du vent dans les feuilles, des odeurs avant de retrouver la décomposition d'Iquitos, des chants des oiseaux, de la tranquillité ... Un écureuil vient me rendre visite pendant que je suis installée dans mon hamac, mais il a la même tête que les nôtres.

Mais ça y est, il est temps de partir, déjà. Je dis au revoir à tout le monde avec regret, et nous sommes partis pour marcher jusqu'à la route, c'est à dire pendant une heure. Carmen et moi peinons un peu dans les montées - la Laguna 69 n'aurait donc servi à rien? Et finalement, sur la route, nous entendons de petits bruits sur notre gauche ... DES SINGES! Des pichicos. Pas le temps d'essayer de les prendre en photo, ils sont trop rapides, et vont se cacher. L'un d'eux est accroché au tronc, et il me regarde de loin, intrigué. Et hop, il est parti ... Je suis TROP contente. Tout ce qui est ara, guépard, loutre, fourmilier ... Ils sont surtout dans des zoos. Nous continuons notre chemin, hélons un colectivo pour rentrer sur Iquitos. Carmen me propose d'aller boire un verre avec moi ce soir, et j'accepte volontiers! Quand je rentre à l'hostel, je ne traîne pas, car je veux aller acheter des souvenirs. Je trouve le centre d'art artisanal à touristes, mais je n'ai que des euros et je ne sais pas si les bureaux de change sont encore ouverts. Le jeune homme de la boutique, Pedro, m'accompagne pour changer mon argent. C'est sûr qu'avec 10 soles en poche, je ne vais pas aller loin. Je veux attendre la fin de semaine pour retirer le plus d'argent possible, à Aguas Calientes probablement. Au final, je lui achète un cendrier en Palisangre, le reste étant trop lourd ou trop gros. Et une sarbacane. Je regrette et en même temps, non. Parce qu'elle va me gêner dans le sac, mais heureusement elle n'est pas très lourde. Je m'achète un juane, vais le manger à l'hostel, et déjà il est 20h30, je ne fais que me mouiller les cheveux car Carmen est déjà là. Nous allons sur le Malecón là où sont tous les bars, nous rencontrons une collègue à elle, et je goûte enfin le Pisco Sour! Ça ressemble un peu à de la tequila ... Pardon, les Péruviens. Il y a ds Français à côté de moi, et je fais la pub pour l'agence. Je rigole avec Carmen, nous regardons les jongleurs avec leurs torches enflammées, et déjà il serait grand temps d'aller se coucher car demain, debout 6h pour l'avion! Je dis au revoir à Carmen avec regret, mais nous allons rester en contact. Ces deux jours dans la communauté ont été, clairement, dans le top 3 des meilleures expériences de ma vie!


 Pour la qualité de la photo, on repassera !
18
juil

Dur de quitter Iquitos aujourd'hui! Même le ciel est contrarié car il se met à pleuvoir. Mais le vol se passe bien avec la Peruvian Airlines, malgré un avion un peu vétuste. Nous nous retrouvons à l'aéroport, je retrouve Thomas en premier, je lui souris et mes lèvres gercées par le coup de soleil de la Laguna 69 se mettent à saigner ... wow. Nous prenons ensuite la compagnie LCPeru, comme cela, j'en aurai testé quatre différentes. C'est cette dernière qui me semble la mieux.

Un peu plus d'une heure de vol pour arriver à Cuzco (ooooo) et nous frôlons les montagnes, pour atterrir en plein milieu de la ville, la localisation de l'aéroport n'étant pas banale. Bien entendu, des chauffeurs de taxi nous sautent dessus et nous ne croyons plus RIEN de ce qu'ils nous disent. Un colectivo urbain à 4 soles? Peuh! Notre moyen de transport communautaire préféré nous dépose en centre ville. Et déjà, c'est le coup de foudre: les ruelles sont pavées, la plupart des enseignes sont en fer forgé, il y a de beaux balcons de bois sculpté qui dépassent des façades blanches. Et il fait très bon. Nous n'avons pas beaucoup de mal à trouver notre auberge, Kokopelli, et quand nous y sommes, deuxième coup de foudre, elle est génialissime. Des peintures sur les murs, un bar sympa, un petit jardin, dans nos dortoirs des cabanes ... j'appelle ça des cabanes mais ce sont des lits enfoncés dans les coins des murs avec des rideaux à tirer pour se couper du monde. Avec une petite lumière, deux prises et un casier. Il y a des animations le soir, et des happy hours. Love love love! Mais la ville en elle-même nous attire beaucoup aussi, et nous commençons notre tour de fin d'après midi, donc qui sera principalement nocturne. Mais avant que la nuit ne tombe, nous avons le temps de visiter le monastère de Santo Domingo, construit sur les ruines du temple inca Qorinchanco, le Temple du Soleil, dont il ne reste que les murs de fondation. En plus nous avons fait croire que nous étions étudiants. Les églises sont très belles, la religion est omniprésente au Pérou (ils ont tous des images pieuses dans les colectivos, peut être un moyen de se protéger des accidents de la route?) mais l'Eglise et l'Etat ne sont pas séparés et c'est assez dangereux car le gouvernement est très conservateur. Un peu ironique quand Cuzco, dont l'un des emblèmes est le drapeau arc en ciel, ressemble donc à la ville la plus gay-friendly du monde.

Regardez donc le mouvement du bonhomme vert !  

Un peu d'histoire sur la ville: Cuzco (qui veut dire "nombril" en quechua) fut la capitale de l'empire Inca du 13e au 16e siècle, jusqu'à la conquête espagnole lors de la bataille de Quipaipan. Elle est désignée comme capitale historique du Pérou. Il paraîtrait qu'elle avait alors la forme d'un puma, l'un des anilaux sacrés dans la culture Inca. Nous ne sommes pas les seuls à avoir flashé sur cette ville, bien qu'elle soit bien différente maintenant: cela a aussi été le cas des Espagnols 485 ans avant nous. On y trouvait énormément de palais, agrémentés de décorations en or. Les momies des anciens Incas ("Inca" voulant en fait dire "roi", ce qui surpasse ceux qui se nomment souvent "humains" ou "hommes" dans leur langues) gisaient au Qorikancha, le Temple du Soleil. Malgré tout, cela ne les a pas empêchés de tout détruire et de construire des églisespar dessus pour imposer leur foi et la faire rayonner dans tout l'ancien Empire Inca. Mais en parlant de détruire, ironiquement, dès qu'il y a un tremblement de terre, les édifices coloniaux tremblent voire s'effondrent, alors que les pierres incas restent en place.

Elle n'en reste pas moins une petite ville cosy, une ville de hippies et de hipsters! Elle est remplie de petits cafés tous plus mignons les uns que les autres, de salles de yoga, de beaux restaurants, d'hôtels chics qui se cachent sous les arcades des rues. Il y a de l'ambiance, c'est beau, nous sommes totalement sous le charme (malgré les manifestations contre le gouvernement corrompu qui battent leur plein). Je vis un peu mal le mal d'altitude au départ, cependant! Le souffle court et la tête qui tourne vite. Il me reste une feuille de coca et je m'hydrate un peu plus. Après maintes exclamations "c'est trop beau", "putain wahou", "trop cool", nous allons prendre une bière au bar, retournons encore en ville pour manger dans un petit café restaurant que nous avions repéré qui propose un menu à 15 soles (4 euros), pour une soupe ou du maïs avec du fromage, et nous avons goûté l'alpaga! Ça a un goût un peu relevé, c'est un peu coriace, mais c'est bon. Nous revenons une fois de plus à l'auberge pour passer une bonne soirée avec des cocktails au Pisco, un billard laborieux et un babyfoot!

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La Vallée Sacrée 

Nous avons décidé de rester un jour supplémentaire à Cuzco, le 24, pour pouvoir s'offrir une journée shopping et surtout, via ferrata et tyrolienne. Après un très bon petit déjeuner, nous nous promenons encore un petit peu dans la ville, de jour, et montons jusqu'à une petite église pour avoir une vue panoramique sur la ville. Nous redescendons ensuite par les ruelles de San Blas, et allons acheter notre ticket touristique, qui va nous donner accès à quasiment tous les sites de la Vallée Sacrée. Nous devons payer le prix fort: 130 soles (35€) car les billets marchent aussi à la journée, sur deux jours, et sur dix. Et nous aurions eu besoin de 4 jours, et cette fois ci le coup des étudiants qui oublient leur carte n'a pas marché.

Nous passons prendre nos gros sacs, trouvons un colectivo et montons jusqu'à l'un des sites, Qenq'o. En pleurant un peu misère, nous pouvons laisser nos sacs pour ne pas avoir à les porter. Le site de Qenq'o en lui même est un gros rocher dans lequel il y a un autel, mais le site de Sacsayhuaman qui est juste à côté est bien plus intéressant. On y voit de grands murs incas en zigzag. construire cette forteresse permit de donner vie à la "tête " du puma. Les pierres y sont si serrées les unes contre les autres qu'on ne pourrait pas y insérer unz feuille de papier. Cette forteresse était utilisée à des fins militaires, mais aussi pour des cérémonies. Encore maintenant, les Péruviens y célèbrent Inti Raymi, le nouvel an Inca, le 24 juin. Sur le chemin du retour, nous faisons un autre temple gratuit, mais qui n'a que peu d'intérêt.

Nous reprenons le colectivo jusqu'à Pisac, en zappant Puca Pucara et Tambo Machay, que l'on voit de la route. Pisac est un petit village qui est aussi plein de hippies, où l'on peut faire des trips encadrés à l'ayahuasca, une plante hallucinogène utilisée par les chamans. C'est une ville inca qui a été érigée suite à la victoire de Pachacutec sur l'ethnie des Cuyos, vers 1440. Elle défendait l'entrée sud de la Vallée Sacrée. Il y a aussi un grand marché artisanal, que nous n'aurons pas le temps de faire. Dans un petit restaurant, nous pouvons laisser nos sacs, mais la cuisinière nous dit que nous n'aurons pas le temps de faire les ruines car elles ferment à 16h, et il est déjà 15h30. Mais grâce à un taxi, nous nous rendons sur place, tout en haut de la montagne, en 15 minutes. Et quel spectacle! Cela aurait été bête de les rater. Perchée tout en haut d'un sommet ce jour là fouetté par le vent et bordée par un canyon, l'ancienne cité inca est impressionnante. Beaucoup de maisons ont été conservées, sur une surface assez importante. Et nous pouvons descendre sur Pisac au terme d'1h30 de marche. Le sentier est étroit, le vent rend la chose un peu plus dangereuse car au bord c'est le vide et la chute de plusieurs centaines de mètres, mais tout se passe bien. Nous observons des maisons troglodytes sur la paroi d'en face, et l'écho fait que notre randonnée se déroule avec un peu de musique venant d'en bas. Le chemin passe en plein milieu de terrassements. En bas, le marché est en train d'être plié, donc pas de souvenirs. Nous croisons un groupe de trois filles que nous avions rencontrées à Lima, qui elles redescendent sur Cuzco après avoir fait le Machu Picchu. Plusieurs colectivos bondés se succèdent avant que nous ne montions dans l'un d'eux qui va, par chance, jusqu'à Ollantaytambo.

Ollantaytambo est un charmant petit village aux rues pavées qui est cependant hautement touristique, les restaurants se concentrent sur la place et coûtent plutôt cher. Nous trouvons notre bonheur ailleurs. Nous réservons ensuite à l'hôtel notre colectivo de demain, jusqu'à Hidroelectrica: 35 soles chacun! Soit 10€, ce qui est cher pour un colectivo, mais le Machu Picchu business ne pouvait pas laisser une option à seulement 10 soles ... il ne reste que 3 places, en plus. Nous aurions peut être pu faire mieux mais au moins nous sommes sûrs de pouvoir monter. Malheureusement, nous ne pourrons pas visiter le site d'Ollantaytambo demain car il y a une heure de départ qui n'est pas trop compatible avec la nôtre. Ce n'est pas si grave : le toit de l'hôtel nous permet de voir les ruines sur la montagne ... et un ciel étoilé magnifique.

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11 km à pied ...

Bien que notre hôtel soit confortable, nous sommes réveillés à 7h du matin. Aujourd'hui est en fait notre seule occasion de visiter le village, aussi partons nous finalement en excursion. Les petites ruelles pavées, les petites rigoles, les maisons blanches aux bases de pierres sculptées comme au temps des Incas donnent énormément de charme à l'endroit. Nous attaquons fort pour monter aux anciens greniers. Ils sont bien hauts, un peu inaccessibles pour plusieurs raisons: là haut, il fait frais et il y a du vent, et ensuite les ennemis avaient plus de mal à les attaquer de cette manière. En tout cas, ils nous livrent un beau panorama sur Ollanta (le nom complet signifie "auberge d'Ollantay") et ses ruines sur la montagne d'en face, que nous partons également visiter. Comme pour Pisac, la ville a été construite suite à sa conquête.

Elle défend l'entrée Nord de la Vallée Sacrée. Il y a pas mal d'escaliers. Mais je suis très surprise de constater que j'ai la forme et que je peux gravir deux grosses pentes d'affilée sans être sur les rotules. L'altitude est bien plus basse ici! Il y a un temple du Soleil qui a conservé un bas relief, dont chaque pierre pèse des tonnes et ont été traînées sur 7 kilomètres, question habituelle: COMMENT? demandent les gens, "grâce aux extraterrestres" répondront les complotistes. Les ruines touchées par le soleil semblent être dorées, mais nous ne pouvons pas trop nous y attarder, nous devons être prêts pour 9h30 car le colectivo vient nous chercher pour monter jusqu'à Hidroelectrica, petite centrale électrique en voie de devenir la plus connue du monde tant son nom est associé à celui du Machu Picchu, puisqu'aller là bas puis marcher est l'option la plus économique.

La route serpente dans la Vallée Sacrée, qui est encore un paysage typiquement andin, avec ses montagnes brunes un peu pelées et ses eucalyptus. Nous passons un col, et dansla descente, soudain, des bananiers! Des lianes! Des arbres tropicaux! C'est d'autant plus impressionnant que la différence est nette d'un versant à l'autre. La route devient piste entre deux villages, Santa Maria et Santa Teresa, dont tous les backpackers qui veulent aller au Machu Picchu sans se ruiner avec un train à 100€, connaissent les noms. Le temps devient surtout très long, mais ce ne sont pas moins de 7 colectivos qui s'y suivent à la queueleuleu. L'occasion de découvrir le nom de ce groupe qui passe partout, et, ENCORE, l'écouter pendant 1h. Il s'agit de Corazón Serrano. 4 chanteuses qui ont la même voix, des musicos, et surtout toujours les mêmes sonorités et les mêmes paroles autour de l'amour, bien mièvres. Je n'en peux plus. Mais tout à coup, un événement vient perturber cette torpeur: un incendie, carrément, au bord de la route. Ça brûle vite, ça brûle vers nous, mais nous passons quand même comme si de rien n'était, comme si cette épaisse fumée était normale. On nous avait avertis que les enseignants protestaient contre le gouvernement en mettant des rochers sur la route, mais là c'est un tout autre niveau. Ennnfin, nous sommes à Hidroelectrica, où c'est la foire aux colectivos tant il y en a, tant ils se roulent dessus. Le chauffeur explique quelque chose que nous n'avons pas compris, nous demandons aux agents de sécurité si nous pouvons marcher, et oui, c'est possible. Nous nous ferons la réflexion plus tard que ce sont les montagnes "sèches" qui brûlent et non les montagnes "tropicales", les deux se faisant face. Le Machu Picchu doit fort certainements e trouver à l'intersection de ces deux climats bien différents (un peu comme Carcassonne! Ha! Ha! Je viens vraiment de faire ça?). Nos sacs sur le dos et hop, nous ne faisons pas long feu (!). Sur tous les blogs, tout le monde vous rassure en vous disant que la marche de 11km entre Hidro et Aguas Calientes (Machu Picchu Pueblo depuis peu) est sur du plat. C'est vrai. Mais personne ne vous parle de la petite montée bâtarde tout au début pour rejoindre les rails du train! C'est pentu, c'est ardu, c'est hardcore avec 15 kilos sur le dos! Mais c'est faisable. Et enfin, nous avons accès aux rails du train, que nous allons suivre tout en contournant les montagnes du Machu Picchu. Et bien, la balade pourrait être pire! Au contraire, même, nous sommes dans la partie tropicale, donc dans la jungle, le long de la rivière Urubamba. Il y a beaucoup de monde qui fait le trajet comme nous, une vraie autoroute. Nous tenons un bon rythme, et en plus nous sommes à l'ombre. Ça et là, de petits restaurants accueillants proposent des havres de paix avec des hamacs parmi les bananiers, mais nous ne pouvons nous arrêter si longtemps pour manger et nous n'avons pas si faim que ça. Nous croisons assez souvent des trains à vapeur qui hurlent de leur klaxon strident dans nos oreilles.Nous traversons les cours d'eau en utilisant les planches des rails comme des ponts. Petite prise de risque: deux tunnels, dont le dernier a été assez juste avant que le train n'y passe.

Et puis tout à coup ... La première maison! Nous arrivons à Aguas Calientes, qui ressemble un peu à une station alpine, et qui est aussi appelée Disneyland Machu Picchu. Nous trouvons notre hôtel, une minuscule chambre triple pour 15€ par personne la nuit. Oh, et le train passant en plein milieu de la ville, les murs tremblent à chaque passage! Un avantage cependant, nous avons enfin compris le système de fermeture de la porte. Nous partons manger en essayant d'éviter les prix exorbitants de tous ces restaurants à touristes, nous trouvons une formule à 20 soles. Pour moi ce sera un avocat avec du gruyère et de la macédoine. À propos, l'avocat s'appelle "palta". Il y a aussi du lomo saltado, du poulet, de l'alpaga à la parilla mais tout sera avec des frites ... On sature. Donc ce seront des .. Spaghettis bolognaise! Et en dessert un "panqueque" (orthographe espagnole) au chocolat. Et des Piscos, 4 pour le prix d'un en happy hour, mais c'est déjà 25 soles pour un mini pisco. Et au moment de payer, surprise: 15 soles de plus de taxes! Ça nous pourrit méchamment notre groove. Quelle ville arnaque ... Mais ça la peine, pour voir l'une des 7 Merveilles du Monde demain.

21
juil

Ça y est, c'est le grand jour! Et quand je dis "grand" jour, ce n'est pas qu'au sens figuré : nous sommes debouts à 4h15! Et encore, bien que Thomas file faire la queue, il y a déjà au moins 500 personnes qui attendent, à croire que certains ont dormi là. Il fait froid ce matin, et être statique n'aide pas. Les premiers bus, enfin, partent à 5h30 du matin, et s'enchaînent plus ou moins rapidement. Évidemment, un peu plus d'attente pour que le nôtre n'arrive. Nous avions pris le ticket la veille, $12 pour la montée. Mais une fois dedans, c'est parti! La piste nous monte tout en haut, à 2400m. C'est encore bas! Et voici que nous arrivons à l'entrée. Curieusement, ça va assez rapidement! Tout le monde passe assez vite, du monde se débitant du bus par petites quantités. En revanche, les toilettes sont à l'extérieur du site, il n'y a rien sur place et nous n'avons le droit de sortir qu'une fois! Strict.

D'ailleurs, je n'ai pas encore parlé des toilettes, c'est un petit souci auquel il faut s'habituer. Elles sont comme chez nous, mais les canalisations ne supportent pas le papier. Et pas de douchette comme en Thaïlande. Il faut jeter directement le papier usagé dans la poubelle. Autant dire que c'est un peu rebutant de prime abord. Pour en revenir au sujet principal, on n'a normalement pas le droit de manger, de boire depuis une bouteille en plastique, ok ça c'est pour la pollution et pour ne pas dénaturer le site. Mais pas le droit de prendre des bâtons de randonnée ou de mettre de la crème solaire ?! Allez, entrons donc.

Il est entre 6h30 et 7h, il fait déjà jour. Mais le site est entouré d'assez hautes montagnes. Ce qui fait que la cité inca n'est éclairée que de 7h à 11h. Et nous y sommes juste avant ... donc ce n'est pas par rapport à la lumière du jour mais bien à la hauteur du soleil. Donc, n'étant pas parmi les premiers à entrer, nous avons pu profiter d'un vrai lever de soleil. Petite précision: depuis quelques mois, l'accès est limité soit au matin, soit à l'après midi. Mais nous avions réservé bien avant l'annonce de ce système donc il n'y a aucune heure notée sur notre billet. Et nous nous sommes vite aperçus qu'à la sortie du site, personne ne contrôlait non plus. En gros, maintenant, il serait plus intéressant de s'y rendre le matin. Quoiqu'il en soit, nous voici face au site, et c'est à couper le souffle. Nous restons là pendant une heure à regarder le soleil éclairer la montagne en arrière plan, le Huayna Picchu, de ses premiers rayons dorés.

"Machu Picchu" signifie "vieille montagne" en quechua, et elle a une végétation plutôt sèche. "Huayna Picchu" signifie "jeune montagne" et la végétation est tropicale. C'est en 1911 que Hiram Bingham, archéologue de Yale, reconnaît la valeur du site. Il avait été découvert auparavant mais cela n'avait pas pris de grandes proportions. Oh, une cité inca magnifique, plutôt bien conservée, que fait-on? On va taguer nos noms sur les murs! (Véridique). Le Machu Picchu était fort probablement une résidence secondaire de Pachacutec. Mais lors de la conquête espagnole, le site s'est peu à peu dépeuplé, a perdu de son intérêt, et est tombé en ruines. Aucun guide n'est d'accord sur la population, cela allant de 500 à 2000 personnes. Le Machu Picchu n'est cependant pas une "cité perdue des Incas", selon les hypothèses il s'agirait plutôt de ruines vers Vilcabamba.

La visite guidée m'apprend beaucoup de choses : en la prenant en route, le guide nous explique bien des choses sur les rituels pratiqués dans le temple principal (photo 8 ci dessous). Des lamas, des alpagas, et (bien sûr) des enfants y étaient sacrifiés. Une fille et deux garçons, de 5, 7 et 10 ans. La cruauté n'étant pas du sadisme, les prêtres donnaient à ces enfants des anesthésiants ainsi que des feuilles de coca à mâcher, l'effet combiné des deux les droguant complètement pour qu'ils ne comprennent pas ce qu'il était en train de se passer. Cependant, ces sacrifices humains n'étaient que ponctuels. Ils survenaient lors de catastrophes naturelles. Ces enfants étaient des messagers auprès des Dieux, la Pachamama représentant la Terre Mère nourricière et le Soleil Inti, et aussi Huiracocha le Dieu Créateur. Ils étaient là pour leur dire que quelque chose n'allait pas. Leurs corps étaient repliés en position foetale, car en foetus nous venons au monde, en foetus nous en repartons. Ils n'étaient pas forcément momifiés. Mais l'on pense qu'il y a encore beaucoup de momies et d'artefacts sur le site qui n'a pas fini de livrer tous ses secrets.

Remarquez aussi sur la photo 11 ci dessus (que vous pouvez agrandir, comme toutes les autres photos, en cliquant dessus ou en survolant avec la souris, ça dépend) à quel point les Incas respectaient la nature, ils construisaient en fonction de la forme des rochers, sans forcément les briser s'ils n'y sont pas obligés.

Il y a deux zones au Machu Picchu: d'abord, la zone agricole. Perché sur son promontoire, le site présente des terrasses en escaliers pour l'agriculture, ce qui permet également de tenir la montagne, et limiter les risques d'effondrements. Le maïs, les pommes de terre et divers légumes y étaient cultivés.

Dans la zone urbaine, il y avait plusieurs quartiers: le peuple, les nobles, les ecclésiastiques, comme un peu partout. Au centre, la zone Sacrée avec le Temple du Soleil, ainsi qu'un cadran solaire sacré, l'Intihuatana. La population de Machu Picchu était en fait assez variée, notamment parce que les Nobles faisaient venir leurs esclaves de Mélanésie. Et oui, ils sont allés jusque là, ils sont même allés jusqu'en Islande! Près des habitations se trouve le Temple du Condor. Comme dit précédemment, les Incas utilisaient la nature, et construisaient en fonction de ses formes. Pour le Temple du Condor, deux grands rochers le dominent, ils ont une forme d'ailes déployées. Ils n'ont eu qu'à rajouter la tête, sculptée sur un rocher plat. La Cité elle-même, dont les plans ont été dessinés par Pachacutec, a la forme d'un condor, tout comme Cuzco avait la forme d'un puma. Un autre animal sacré est le Serpent, et l'on pense que la ville qui a cette forme là n'est autre qu'El Dorado ...

Il y a un immense réseau de tunnels sous le Machu Picchu, mais ils sont inaccessibles. Les archéologues pensent que la momie de Pachacutec pourrait s'y trouver, vu que personne ne l'a encore découverte.

Nous passons aussi par une école non mixte, où les garçons apprenaient la medecine, l'architecture, l'agriculture, les sciences ... et les filles bien entendu, à cuisiner, à coudre, à s'occuper des enfants, toutes ces belles sortes de choses. Tout ceci est tellement intéressant que j'en fais dégringoler mon portable sur les terrassements, il roule sur la tranche, j'ai bien cru qu'il allait y rester, mais il a fini par s'arrêter, et sans aucun dommage, ouf. Merci Pachacutec pour cette idée ingénieuse des terrassements. Avec tout ça, il est bientôt 10h, et je retrouve les deux autres au pied du Huayna Picchu que nous allons gravir. Selon le panneau il y a seulement 300m de dénivelé, mais 300m à pic, avec des escaliers aux marches inégales qui peuvent faire la moitié de mon mollet. Ou bien être très peu profondes, et on ne peut y mettre que la pointe de pied. On peut même grimper à 4 pattes. Mais en haut, le jeu en valait la chandelle puisqu'on voit la cité et sa forme de condor d'un autre point de vue. Montée en 40 minutes au lieu d'une heure, wahou! Je m'impressionne. Nous profitons de la vue un peu plus longtemps que les autres touristes qui descendent rapidement, et le Lonely Planet nous indique l'existence d'un temple plus méconnu du grand public, sur le versant escarpé du Huayna: le temple de la Lune. Le chemin pour y aller est bloqué par une barrière, mais nous pouvons y passer à la demande. Nous rencontrons un agent de sécurité qui nous y accompagne. Encore des escaliers ... nous descendons même une échelle, c'est l'aventure. Mais cela valait le coup pour ces deux temples construits dans des cavernes! Bon, nous devons remonter, c'est comme si nous avions gravi le Huayna deux fois, je souffle beaucoup mais j'y parviens. Et l'agent de sécurité est sympa comme tout.

Nous sommes épuisés mais une bonne surprise nous attend à la sortie: un lama qui a décidé de venir voir les touristes! Donc nous lui courrons après pour avoir nos selfies avec. C'est plutôt concluant pour moi. Puis, nous nous mettons en route pour rejoinre le Pont de l'Inca, par lequel le peuple s'est échappé pour ne pas se faire tuer par les Espagnols. Sur le chemin nous rencontrons un couple de Belges que Thomas avait déjà croisés lors du trek de Santa Cruz, puis dans le bus de Cuzco . 20 minutes de marche, pour voir deux trois bouts de bois ... en fait le pont en lui même a été détruit. Les autres veulent maintenant aller à l'Intipuku, la Porte du Soleil. C'est trop haut et trop loin pour moi, je les attends en bas pour contempler encore ce magnifique panorama. Il est 16h et le soleil ne l'illumine plus, il fait un peu froid. Enfin ils reviennent, et nous redescendons à pied par des escaliers, mais je finis sur la piste car mes tendons d'Achille sont proches de se rompre. Et voilà, une autre merveille du Monde à mon actif!

22
juil
22
juil

Je ne pensais pas raconter beaucoup sur cette journée, mais au final il s'est passé des choses ! Ce sera tout de même un court article.

Il est temps que nous partions d'Aguas Calientes et ses prix aberrants, nous n'y traînons pas, nous partons dès que nous sommes prêts. Nous sommes fourbus, mais motivés pour revenir sur Cuzco, et les 11km passent assez vite puisque nous les faisons en moins de 2h. Nous avons la chance de trouver un colectivo en arrivant, mais nous attendons 1h de plus avant que deux dernières personnes ne prennent place. Mais nous sommes en fait partis pour 6h de souffrance. Je parlais un peu avant de Corazón Serrano, mais il n'y a pas que ce groupe qui massacre la musique. Pendant les 3 premières heures, nous avons eu droit à un duo avec une chanteuse à la voix suraiguë qui chantait comme une gamine de 10 ans. Les chansons se ressemblent, mais le pire, c'est qu'elles durent 50 minutes. On ne sait même pas quand ça s'arrête, si c'est toujours la même ou une nouvelle. Enfin, pour ce que ça change ... Vraiment, on n'en peut plus, le chauffeur le comprend, il change, soulagement ... De courte durée car c'est un peu la version masculine qui succède à ce massacre. Chanson toujours aussi répétitive, paroles peu recherchées, encore plus de dédicaces et de mention de son nom que dans une chanson de Pitbull. Bon, on va prendre notre mal en patience ... Ollantaytambo, puis finalement une autre route pour rentrer sur Cuzco. Nous voyons un troupeau de chevaux devant nous. Et au détour d'un virage, un bon kilomètre derrière, un homme qui leur court après, enfin, qui essaye. Il est tout suant et le chauffeur le prend en peine. Il l'amène jusqu'à ses chevaux. Mais pas devant le troupeau.Juste derrière. Car ce qui devait arriver arriva, l'homme descend, et les chevaux réaccélèrent. Ils vont lui remettre un bon kilomètre, encore. Nous sommes morts de rire. Pendant un temps, le chauffeur oublie la musique, c'est un soulagement. Mais il finit par la remettre, quelle déception. Plus qu'une heure et demie! Mais ce n'est pas fini. Nous arrivons, soulagés, aux environs de Cuzco. Quand tout à coup, un barrage de police. Ils choisissent d'arrêter notre chauffeur. Ils ont des tenues dignes des clichés des méchants flics: des lunettes de soleil, un casque, une moustache, un air patibulaire, un pantalon beige, des bottes de cuir. Il faut les appeler "jefe", chef, ça les fait se sentir puissants. En tout cas, ce "jefe" là prend un air supérieur et sadique en alignant note chauffeur pour expiration d'assurance! Il est mortifié, il en oublie de mettre la musique, nous ne sommes pas gentils car nous avons très envie de rire. Le jefe nous escorte jusqu'au commissariat, nous devons donc redescendre des hauteurs de la ville à la Plaza de Armas, mais cela nous permet de découvrir un nouveau quartier. En continuant à parler avec l'autre jeune français qui est avec nous, j'apprends qu'il vient de ... Bram. Qu'il a fait son lycée à Jean Durand à Castel. Un rappel du boulot au bout du monde ...

De notre côté, une fois rentrés, nous réservons notre excursion pour demain, la Rainbow Mountain, pour laquelle nous devons nous leverà 2h45. Du matin, oui.Nous traînons ensuite dans un quartiermoins touristique de Cuzco, où l'on a pu voir ds magasins entiers d'oeufs. Que des oeufs. Ça en fait beaucoup, des oeufs! Nous ne tardons pas trop non plus, vu la coute nuit que nous allons passer.

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Vinicunca, la montagne arc-en-ciel

Le réveil n'est pas "si" difficile que ça, surtout pour moi qui me réveille déjà trois fois dans la nuit vers ces heures là. En revanche, il fait froid. 2h de route nous emmènent prendre un petit déjeuner. Cette fois ci nous sommes les seuls français, tout le monde parle anglais. J'avais acheté de supers gants, mais je les ai oubliés, heureusement, ils en prêtent. Notre guide, qui s'appelle Darwin, ne nous laisse pas trop traîner car nous avons encore une heure de route avant d'arriver à l'entrée du parc de la Rainbow Mountain, mais tout le monde dort. Nous arrivons vers 7h, et nous pouvons louer des chevaux pour la montée jusqu'à 5000m d'altitude (ou 5200, personne ne s'accorde). Je ne prends pas le risque de mourir une seconde fois, je loue un cheval. Il est longé par un habitant, je ne le dirige pas. Le cheval s'appelle Bergo, et mon guide, Marcos ... Ou Eloy, c'est ce qu'il m'a dit. C'est plutôt agréable, il m'apprend à dire bonjour en quechua, "alilentu" en phonétique. Parfois je dois descendre de cheval et monter des pentes qui sont trop ardues pour eux, et je me sens très lourde, à cause de la fatigue et de l'altitude. On sent encore plus que l'air est rare, et en plus il fait très froid. C'est un soulagement de remonter sur le cheval, mais il faut bien le laisser sur la fin pour une dernière pente. Bizarrement, ça se fait relativement facilement, et la récompense de la Rainbow Mountain m'attend assez rapidement! J'ai un effet inédit de l'altitude: quand mon coeur bat, j'ai des flashs noirs devant les yeux. Mais ça passe au bout d'une minute. On peut voir les autres montagnes derrière, qui sont rouges. Et le pic de l'Ausangate, à plus de 6000m, mais qui de ces 5000m fait tout petit. Cependant il fait bien froid, là haut, et malgré la beauté des lieux, nous redescendons. Nous attendons le reste du groupe, puis nous pouvons partir manger. Une jeune fille se sent très mal dans le bus, elle va vomir, puis est mise sous oxygène car elle ne tient pas debout: elle fait une réaction au soroche, au mal des montagnes. Nous nous rendons dans un petit jardin ensoleillé pour le repas.J'engage la conversation avec Jessica, une américaine de Miami qui habite maintenant à Portland. Elle est très gentille. En fin de repas, nous avons droit à un jeune chanteur. Jessica n'avait pas trop fait attention à la qualité de la musique, c'était le moment. C'est comme d'habitude, une voix de fausset, un super déhanché. Les cuisiniers nous filment. Nous ne pouvons pas rigoler. Tout le monde a le regard dans le vide ou sur son assiette vide. Ouf, c'est fini! Nous regagnons finalement Cuzco assez vite, à 16h30 au lieu de 18h30.J'en profite pour acheter quelques souvenirs, et retour à l'auberge pour une petite soirée au bar où nous rencontrons Louise, une française que je retrouverai peut être à Uyuni. Plutôt cool!

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Siempre de pie, nunca de rodillas

Bon, aujourd'hui, j'ai décidé d'aller faire de la tyrolienne car ça fait 2 mois que j'en ai envie. Et dans la Vallée Sacrée, ça a une autre gueule qu'à la Cavayère. Le départ n'est pas trop tôt cette fois ci, c'est pour une demi journée, tout va bien ... Jusqu'à ce que nous arrivions à Poroy. Et là, les gens ont mis des pierres sur la route! C'est bloqué, oups! Et des deux côtés. Le chauffeur garde espoir que le passage se dégage, mais toujours rien au bout de 2 heures. Les gens crient sur la route, nous sommes descendus, je suis en plein milieu et deux files de militaires passent de chaque côté ... c'est sérieux. Un manifestant me regarde et me fait un signe "couic" sous la gorge. Euh, sympa, pourquoi? Heureusement, c'est un peu plus dégagé en sens inverse, maintenant. Nous repartons donc vers Cuzco. S'il y a tant de manifestations et de blocus, c'est pour protester contre le gouvernement. La ministre de l'Education ne réagit pas, la situation sanitaire hospitalière est critique, et ils détournent tous de l'argent. Les Péruviens sont très politisés, même les petites mamies à chapeaux. Au retour, en demandant à l'agence un remboursement, elle me propose de partir cet après midi car le barrage est maintenant terminé. J'ai de la chance, je dois être la première de mon groupe à demander. Je ne verrai donc pas les sites de Maras et Moray, tant pis pour mon billet à 130 soles. Je visite rapidement le musée régional qui est inclus dans le prix de ce dernier, mais il n'y a pas grand chose d'intéressant, des objets préhistoriques, quelques coupelles incas et des portraits religieux.

14h30 arrivent, et j'ai carrément droit à une voiture privée vu qu'ils se sont débrouillés pour que quelques personnes de ce matin puissent aussi en profiter cet après-midi. Nous partons avec un peu de retard car nous allons chercher Harry et Rita, un Anglais et une Brésilienne avec qui j'engage la conversation. Nous arrivons à Poroy, et non, personne n'a écouté la radio pour savoir si les bouchons étaient terminés comme je l'avais demandé. En fait, la foule s'est dispersée de la route, mais ils sont toujours sur les trottoirs, et surtout il y a toutes les voitures qui étaient bloquées. Notre chauffeur passe par une petite piste, mais il faut bien rejoindre la grande route. Il fait chaud mais quand on ouvre les fenêtres il y a beaucoup de poussière et surtout le nez et les yeux nous brûlent! Les policiers viennent de jeter une bombe lacrymogène. Ma première et ma dernière j'espère. Ensuite, s'en suit une série de mauvaises décisions de la part du chauffeur. Il pouvait tourner sur la piste mais reste sur la route qui est bloquée. Quand finalement il tente de revenir sur la piste après un demi-tour, elle est bloquée par un camion. Quand la file commence à avancer, il parvient à se faufiler sur la piste, mais c'est maintenant sur la route que ça avance, car il y a un pneu qui brûle sur la piste, et plein de monde ... il est 16h, c'est désespérant, on le sent mal. Nous rerejoignons la route et cette fois-ci ça y est, c'est parti. Heureusement ce n'est pas bien loin. Nous arrivons les derniers mais pas en retard. Nous nous équipons et après avoir écouté les consignes de sécurité, c'est parti! La première est assez en douceur, elle nous permet de nous habituer, à freiner notamment. Nous sommes quand même au dessus d'un beau ravin. La seconde, un peu plus longue. Pour la troisième, encore moins sage (la lirette, la lireette), le moniteur nous fait une démonstration la tête en bas. Ah, celle-ci fait bien plus de sensations! Mais la dernière s'appelle la "Superman" pour la simple et bonne raison qu'elle se fait la tête en avant. Là c'est Rita qui m'a filmée avec son portable, je dois récupérer la video plus tard, j'avertirai quand je la mettrai sur cet article. Nous avons bien peur, maintenant. C'est mon tour, je me lance et waaaahou, ça faisait longtemps que je n'avais pas eu ce genre de sensations! Le vent me fouette le visage, c'est haut, ça va viiite. Aucun souci pour l'arrivée. Contrairement aux gens après moi qui se retrouvent coincés dans le vide juste avant l'arrivée! Dont Rita.

Il commence juste à faire nuit, nous rentrons fort satisfaits de cette excursion qui après tout cela valait le coup. Je rentre à l'auberge juste en même temps que les deux autres qui étaient à Maras, aux salines. Nous partons prendre notre bus de nuit en quittant le Kokopelli, et la ville, à regrets mais prêts pour de nouvelles aventures.

25
juil

Jour 1: La San Santiago

Puno n'a pas l'air d'être une ville magnifique, surtout à 4h30 du matin. Comme beaucoup de maisons au Pérou, ces dernières sont en brique, de quelques unes sortent encore la ferraille de la charpente ... les Péruviens ne payent des taxes que lorsque leur maison est finie. Donc, ils ne les finissent jamais. Nous nous dirigeons vers le port, dans la nuit. Nous nous plaçons au bout de la jetée sous le phare minuscule. Si Puno n'est pas belle, la nature tout autour est merveilleuse. Le soleil pointe sur le lac Titicaca, pour venir nous réchauffer un peu, moi et mes deux sous-pulls. C'est un très beau spectacle. De petites boutiques ouvrent pour vendre des tickets de bateau, et nous entrons nous réchauffer très peu dans l'une d'elle pour prendre nos tickets pour Taquile.

Il y a aussi l'île d'Amantani, mais il est compliqué de s'y rendre depuis Taquile. Les deux îles se font, bien évidemment, la guerre froide. À tel point que la population de Taquile a tendance à se marier entre elle. Ainsi, les vendeurs nous disent qu'Amantani est bien moins typique, trop touristique, moins belle que Taquile. Bon, peut être ne faut-il pas les croire sur parole. J'ai appris par la suite que Taquile dépendait de la municipalité d'Amantani, ce qui n'aide pas.

Nous pouvons prendre place dans le bateau et c'est encore une maigre consolation niveau température. Il est bloqué entre deux bateaux sur les côtés, et 3 devant. Mais pas de problème. Par la force de leurs bras, ils arrivent à pousser le bateau entre les autres pour que nous puissions sortir les premiers, quelle technique! Et nous voilà partis. La température réaugmente peu à peu. Notre premier arrêt sera sur les fameuses îles flottantes d'Uros. Les Uros sont un peuple antérieurs aux Incas qui ont été persécutés par ces derniers. N'ayant nulle part où aller, ils ont au départ vécu sur leurs bateaux de roseaux. Ils ont ensuite ingénieusement mis au point leurs îles flottantes, faites de racines et de roseaux, ces plantes étant riches en oxygène pour que cela puisse flotter. Ils arriment ensuite l'île en plantant un bout de bois dans les racines et à l'endroit où le lac est le plus profond, pour ne pas qu'elles s'en aillent, ce qui serait bête. Chaque île a son président, et il y a même une école flottante. Les roseaux leur servent à beaucoup de choses: non seulement à faire leurs îles et leurs habitations, leurs meubles, mais ils ont aussi des vertus médicinales, peuvent se cuisiner en plat, bref en cas de famine ils pourraient manger leur île!

Nous apprenons beaucoup de choses sur le Lac Titicaca, qu'il faudrait prononcer Titikrakra (est-ce que c'est mieux? Pas forcément). D'abord, ce nom veut dire "puma gris", "comme la couleur de la roche". Il se trouve qu'en prenant une vue aérienne du lac, en la retournant, en plissant un peu les yeux et en ayant de l'imagination, il a la forme d'un puma! Qui chasse un lièvre! Bah, quand on le dit, oui pourquoi pas. On dirait aussi un chaton. C'est donc, à 3800m d'altitude, le plus haut lac navigable du monde, mais peut être le saviez-vous déjà. Il est partagé entre le Pérou et la Bolivie, et ces deux pays s'entendent-ils bien? Non bien sûr, ils sont aussi en concurrence! Ainsi, au Pérou, on a coûtume de dire que 55% du lac appartient aux Péruviens et 45% aux Boliviens, avec le point le plus profond, 200m et quelques, côté Pérou. En Bolivie ... oui, c'est l'inverse. Il n'y a que 6 espèces de poissons qui y vivent. Quatre sont naturelles, deux ont été introduites, dont la truite. C'est la plus grosse, la plus consommable, car tous les autres poissons sont tous petits. Ils servent à nourrir les truites. Il y a énormément de canards aussi, nous en avons vu certains détaler, presque en courant sur l'eau, à l'approche de notre bateau. L'eau est très claire et (serait?) potable (je ne vais pas m'y risquer) et elle est en permanence autour de 8°C. Le lac est alimenté par sept fleuves qui descendent de la Cordillère, et seulement un en sort, et il est côté Bolivien. Ça c'est plus dur de le nier ... En tout cas, c'est fort instructif. Nous qui n'étions pas très chauds pour cette escale d'une heure, au départ ... Les souvenirs sont chers, car ils ne vivent qu'exclusivement du tourisme, mais c'est une occasion unique. Tout comme faire 10 minutes de bateau en roseaux pour 10 soles! Je craque, finalement, et c'est assez rigolo. Une petite fille nous chante des chansons, le Président nous parle politique et blocus de villages, nous dit qu'il nous faudrait trois jours pour aller en Bolivie à la rame, et ça y est c'est déjà fini. Nous réembarquons sur notre vrai bateau pour encore deux heures de trajet jusqu'à Taquile. Je m'endors. Nous faisons un autre stop sur une péninsule du nom de Luquina Chico, puis enfin nous arrivons à Taquile, vers midi.

Si nous allons à Taquile aujourd'hui, au point de prendre un bus de nuit, c'est parce qu'il y a la Fête des Moissons, la Santiago. Les habitants de l'île se mettent en costume traditionnel, jouent de la musique, dansent, boivent, jusqu'à épuisement le jour de l'inauguration. Pour remercier la Pachamama pour les récoltes mais aussi St Jacques car il s'agit là d'un syncrétisme religieux. Et donc, cela aurait été bête de rater ça. En arrivant, premier constat: ça monte, voire même beaucoup. Mais surtout, c'est vraiment très beau. La vue sur le lac, et les montagnes enneigées tooout au loin, est enchanteresse. En plus, il fait enfin assez chaud pour enlever mon second sous pull. Nous montons jusqu'à la place principale qui est, bien évidemment, presque tout en haut de l'île, où les festivités commencent. Ils avaient l'air d'attendre les touristes. Le maire fait un discours, commente les danses. Il y a plusieurs groupes, avec plusieurs costumes différents, avec des noms comme Carnival de Taquile, Negritos de Taquile, Inka Pati de Taquile ... mais cela n'a pas l'air d'être un concours. Bon, les danses ne sont pas très élaborées. La musique, de la flûte de pan, du tambour et autres instruments à vent, est en boucle. Mais vraiment, l'ambiance est très chouette. Et surtout, les costumes sont merveilleux! Il y a beaucoup de chapeaux arc-en-ciel, de plusieurs sortes. C'est donc très divertissant. Nous mangeons au restaurant communal juste à côté : parrillade de truite. Un vrai goût de poisson. En plus de ce cadre, c'est délicieux.

Notre guide nous présente ensuite un jeune garçon de 12 ans du nom de Kléber (oui bon, pour l'orthographe, je n'en sais rien) chez qui nous allons dormir ce soir. Il nous guide au travers de petits chemins de pierres, au milieu des moutons qui bêlent. Ça descend, ça monte ... ça va être dur de repartir dans l'autre sens, mais sans les backpacks ça ira mieux. Et bien, la maison en elle-même est plutôt chouette, nous avons une chambre avec vue sur le lac. Il y a un peu d'électricité grâce aux panneaux solaires. Apparemment, c'est presque comme une chambre d'hôtes car il y a plusieurs chambres, et de toute manière il faut payer. Thomas et Léa partent alors devant moi, mais je fais marche arrière pour signaler à Kléber que nous partons. Je ne leur cours pas après, de toute manière je suis BIEN mieux sans eux ces derniers temps. Je profite beaucoup plus de ce que je vois, je traîne, je me détends. Heureusement, nous nous séparons demain. Et d'ailleurs j'ai très bien fait. Car alors qu'ils sont descendus car les danses ont cessé sur la place, j'y suis vers 14h15. Je regarde les femmes tisser, ainsi que les hommes qui tricotent, ce qui est plutôt sympathique à voir. D'ailleurs lors d'un mariage, le test du marié est de tisser un bonnet très étanche, si étanche que l'eau ne doit pas en couler pendant 3 minutes. Pour la femme c'est moins drôle, elle ne parle pas, ne souris pas, ne mange pas pendant une semaine.

Et par contre, sans transition, je dois vous parler de quelque chose qui m'intrigue: pourquoi les Péruviens sont-ils aussi mythos? Là par exemple, entendant de la musique en bas, je demande si les danseurs sont en bas (mots simples et efficaces, et mimes). Un premier homme me dit "oui ils sont tout en bas". Le temps d'aller prendre une bouteille d'eau, comme je n'entends maintenant plus rien, je demande à une jeune femme. Elle me dit qu'ils sont partis manger et qu'ils reprennent à 16h. Mais j'ai vraiment la flemme, alors je reste traîner sur la place. Et heureusement car les danseurs reprennent à 14h30. En fait je ne pense pas que ce soit de la mythomanie - sauf clairement pour les taxis qui font croire qu'il faut marcher 2km pour aller jusqu'à la route alors qu'il y a 500m - mais plutôt du passage de fausses informations, non vérifiées. Les chauffeurs d'hier affirmaient que le blocus allait s'arrêter une heure plus tard. Ou qu'ils avaient entendu à la radio que c'était terminé alors que clairement, non. Ou encore que nous serions à tel endroit à tel moment sans penser une seconde aux bouchons. Bref.

Les deux autres se sont perdus dans les petits chemins de l'île, pendant que moi, je savoure le spectacle des danses endiablées aux tonalités arc-en-ciel. Je prends des vidéos mais j'essaye de ne pas trop forcer sur l'utilisation de mon portable, n'étant pas sûre de pouvoir le recharger. Je me mets à l'ombre, mais il fait frisquet, puis au soleil mais ça tape, je prend une bière, deux bières, je suis contente, je profite. Je rencontre Sarah et Chris, qui vont aussi dormir avec nous. Puis un couple d'italiens germanophones, Pétra et Moritz, qui n'ont personne chez qui dormir, je leur dis que j'ai vu d'autres chambres, et voilà ils vont aussi dormir au même endroit que nous. En plus, ils sont tous plutôt sympathiques! Kléber vient nous chercher sur la place vers 17h et nous repartons à la maison avant la nuit qui tombe ici entre 17h30 et 18h. Malheureusement, dès qu'il fait nuit, il recommence à faire froid. Pas de douche ce soir, encore ... oups, ça fait deux jours d'affilée! Mais en prendre une dans la nuit ne me tente pas trop. Ainsi, je porte 3 couches de vêtements sur les jambes, et 4 en haut, ça ne rigole pas. Heureusement, nous avons un repas qui nous réchauffe un peu! La conversation avec tout le monde est sympathique, mais nous allons tout de même nous coucher tôt, sous les couettes, et vite!

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Jour 2: FREEDOM

Le lendemain, Léa part !! Moi, je reste tranquillement me reposer dans la maison, je prends une douche, enfin ! Il y a même un peu d'eau chaude ! Je peux prendre le déjeuner ici, avec Sarah et Chris, donc je patiente en admirant la vue sur le lac, au soleil. Le temps s'écoule doucement, calmement. Le couple s'en va après le repas, et j'en profite pour faire le tour de l'île, au son des bêlements des moutons qui s'invitent souvent sur le chemin empierré. L'eau scintille au soleil. Ce tour me prendra à peu près deux heures, le temps de retourner sur la place et de voir les danseurs, qui ont l'air bien fatigués. Ils arrêtent vers 15h30. Thomas me rejoint, et vers 16h30, nous nous retrouvons dans le stade de foot à jouer avec les enfants. Bon ... déjà que je ne suis pas très forte en foot, alors, à presque 4000m d'altitude? Je me cale dans un coin du terrain, près des buts, mais dès que je cours un peu, je m'étouffe presque. Mes actions n'ont une durée de vie que de 30 secondes! Mais c'est en tout cas un moment plutôt chouette, au plus proche des locaux, et ça fait du bien.

Le soleil va bientôt se coucher, aussi montons-nous au point culminant de l'île pour voir son coucher. L'arche qui marque ce sommet paraît bien loin, on dirait qu'on n'y arrive jamais. Je souffle beaucoup, je fais du bruit, mais c'est comme ça que je parviens à monter. Mon corps fait des choses que je ne pensais même pas possibles avant de voyager ici, c'est ce qui s'appelle vraiment repousser ses limites. D'en haut, nous voyons toute l'île, et tout le pourtour du lac. La nuit tombant vite, nous ne nous attardons pas trop. Mais il y a un peu d'éclairage public sur notre chemin, et Thomas a sa lampe frontale pour la suite. Et c'est bon, nous retrouvons le petit chemin pour rentrer à la maison!

Ce soir, nous sommes avec une famille de Lima: Ernesto Sr, Michele et Ernesto Jr. Ils sont très bavards, très gentils, très intéressants. Nous parlons de la situation au Pérou, de l'origine des différents mots, de l'influence de divers pays sur le vocabulaire des autres, comme par exemple, en Finlande, la pomme de terre est appelée peruana. Ils parlent aussi anglais, Michele étant professeur d'anglais. Elle est très enjouée et dynamique. À la fin du repas, Sylvano, notre hôte, joue d'abord d'une petite flûte à bec en bois. C'est très strident et je me retiens de rire car cela a le même son que quand on essaye de jouer de la flûte à bec en 6e. Mais ensuite, il prend la flûte de Pan, et le tambour, c'est tout de suite plus joli. Il me dit qu'il pourra m'en vendre une! Je suis toute excitée, ce serait génial! Mais par la suite, j'ai compris qu'il voulait me vendre SA flûte de Pan. Et ce n'est pas facile à faire, elle est faite exprès pour en jouer, donc au final, je ne pourrai pas accepter ... Nous finissons cette journée en regardant le ciel. Qui est wahou, juste wahou. Je n'ai jamais vu autant d'étoiles. Ernesto essaye de me montrer la Croix du Sud, cette constellation qu'on ne voit que dans cet hémisphère, mais il y a bien trop d'étoiles pour que j'arrive à la repérer. On voit même les traces nébuleuses de la Voie Lactée ...

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Jour 3: Surprises

Notre dernière matinée ici. Nous avons à nouveau droit à des pancakes, des fruits, au petit déjeuner. Clever (puisque ça y est je sais que ça s'écrit comme "intelligent" en anglais) va à l'école, je commençais à me demander quand est-ce qu'il avait cours. Nous sommes jeudi, au fait, je me perds dans les jours de la semaine.

J'ai emprunté le guide de Thomas pour fournir quelques informations supplémentaires sur Taquile : ils parlent aymara, comme à Uros. L'île a appartenu aux Incas, aux Espagnols, puis bien plus récemment a été une prison politique, avant que les Taquileños ne protestent et récupèrent leur île pour eux. Sous la présidence de Fujimori, le tourisme s'y est grandement développé. Le Président a voulu équiper les îles en électricité. À Amantani, il y a eu un générateur qui est tombé en panne au bout d'un mois. Les Taquileños ont refusé cet équipement, mais ils se sont mis d'accord pour être pourvus de panneaux solaires en 2013.

Le tissage est inscrit comme patrimoine immatériel à l'UNESCO. Les hommes portent des bonnets que vous avez pu voir sur les photos: entièrement rouges, ce sont ceux des hommes mariés. Avec du blanc, pour les célibataires. J'ai déjà parlé du mariage plus haut, les femmes mariées se doivent de porter un corsage rouge et des jupons noirs, ainsi qu'une voile noir pour tout le monde. Lors du mariage, la ceinture de l'homme va être tissée. L'homme fait les bords noirs et les lignes blanches, la femme rajoute le rouge et les dessins qui symbolisent ses désirs. Mais ce n'est pas la ceinture qu'ils portent quotidiennement.

Avec tout cela, je me dirige vers la place pour un peu plus de festivités. En chemin, une musique militaire retentit: ce sont les élèves de primaire qui tournent en rond en marchant au pas, comme de petits soldats en devenir. En continuant ma route, j'entends la répétition d'une fanfare, ce qui égaye toute cette partie de l'île. Sur la place, il n'y a qu'un groupe, car maintenant ils n'interviennent plus tous ensemble, c'est un groupe toute la journée. Ils semblent déjà fatigués, en plein soleil ... Thomas me rejoint, nous allons chercher nos sacs, dire au revoir à Ruperta, laisser un petit mot aux Liméniens que nous n'allons probablement pas recroiser, et c'est parti pour un bel effort. J'ai un peu mal à la tête ensuite. Mais ça va un peu mieux après avoir remangé notre énième soupe de quinoa et la si bonne truite. Puis, direction le port. Comme nous arrivons bien en avance, je trempe mes pieds dans le lac, dont l'eau n'est pas si froide à cette heure-ci. Les touristes arrivent et c'est un peu le bazar pour savoir sur quel bateau monter. Je parle avec deux allemands de Berlin, et une parisienne qui va voyager seule jusqu'à Ushuaïa. Je leur raconte mes mésaventures avec l'autre (ils ont demandé!), et que parfois il vaut mieux être seule que mal accompagnée.

Nous naviguons depuis environ une heure, quand ils nous demandent de changer de bateau ... en plein milieu du lac. Sympa, l'expérience. Heureusement pour moi ils s'occupent de mon sac que j'ai mis sur le toit. Mais ça bouge, avec les vagues, j'espère que ça ne va pas durer trop longtemps histoire que le mal de mer n'ait pas le temps de se manifester. Mais au final, ça va, nous repartons. Et en fait, non loin de Puno, nous prenons un autre passage et nous traversons PLEIN d'îles flottantes que nous n'avions pas vues à l'aller, difficile de les manquer. C'est en fait une vraie ville, il y a carrément des maisons de tôles dessus, l'école et les hôtels doivent être là.

Arrivés au port, les Allemands descendent du bateau, mais partent devant pour aller réserver leur bus de nuit pour Arequipa. Quel dommage. De notre côté, nous allons poser nos sacs à mon hôtel. Nous remontons l'avenue du port, où il y a un marché textile. C'est bruyant, c'est sale, ça pue, je regrette déjà Taquile. L'hôtel en lui même fait très local, il ne paye pas de mine, mais la chambre a l'air bien, même si c'est bruyant. Quelqu'un va dormir avec des boules quiès ce soir ... Nous ressortons pour nous diriger vers la Plaza de Armas, où un concert se prépare. La ville n'est vraiment pas belle, ces endroits là me dégoûtent après tant de paysages magnifiques. Heureusement, Thomas repère une rue piétonne, commerçante et touristique (tant pis/mieux). Nous trouvons un petit bar "moléculaire" ce qui est plutôt original et audacieux dans une ville comme celle ci. Je commande un Pisco Sunrise servi dans des tubes à essais, avec au fond des bulles en gelée de cactus dont je ne me souviens plus du nom. Il y avait aussi des mojitos en bulles qui éclatent sur la langue, comme chez Ferran Adria! C'était déjà l'annonce d'une soirée un peu moins pourrie que ce que nous pensions, nous qui voulions boire en désespoir de cause. Et en jetant un coup d'oeil dehors, je vois les Allemands qui regardent la carte! Je leurs cours après, et ils s'installent avec nous. Ils n'avaient pas levé la tête au départ pensant avoir affaire à quelqu'un du bar, ils ont bien failli partir ... nous prenons donc des cocktails. Je n'ai pas mon potable pour prendre des photos, il est en charge à l'hôtel, c'est donc Guido (et son pote Remo) qui vont m'en passer quelques unes. Autre surprise: je sors fumer avec des Français qui viennent DE BEZIERS. Avec un bien bel accent du Sud, entendre le mot "espanter" que Thomas ne comprends pas, me fait du bien. Par contre ils me disent que suite au tremblement de terre d'Arequipa il y a une semaine, l'un des volcans est entré en éruption! Et les garçons doivent y aller ce soir! Mais comme on leur a vendu des billets, c'est que ça doit aller, non? Ah quoique, nous sommes au Pérou ... La soirée continue au départ dans une pizzeria que nous quittons vite car le rappot quantité/prix n'a pas l'air correct, et nous finissons finalement dans un restaurant à touristes avec un menu touriste. Nous avons ravalé notre fierté car il coûte 20 soles entrée/plat/dessert. Mais c'est mon dernier soir au Pérou avant fin août donc il est temps de tester [âmes sensibles et protecteurs des animaux arrêtez de lire] ...

le cochon d'Inde. Le cuy, qu'on prononce couilles. Au four, allez. Ça me rappelle quand j'ai mangé du chien parce que nous sommes plutôt hilares. Guido me demande le nom de mes anciens cochons d'Inde. Sauf qu'aucune pitié de ma part car c'est vraiment TRÈS bon. Bon, ça me fait un peu chier de dire que Léa avait raison, on en avait mangé lors de l'excursion de la Rainbow Mountain ("hum trop bon ce poulet" avais-je dit), et une partie de moi se délecte du fait qu'elle en ait mangé sans le vouloir alors que "aaah non je peux pas", bref ... même la peau est bonne, probablement parce qu'il est au four. C'est une chair assez délicate, c'est bel et bien comme un poulet mais 100 fois meilleur et moins gras. En plus il y en a beaucoup. Par contre, je ne mange pas la tête, mais Remo s'en charge. Il mange même les yeux. On rigole beaucoup même si c'est vraiment dégoûtant, en fait. Mon problème je pense c'est que je ne pourrai plus jamais regarder un cochon d'Inde sans avoir faim, maintenant.

[Voilà vous pouvez reprendre mais zappez les photos] Mais l'heure avance et il est temps de se quitter. Thomas récupère son sac et s'en va au terminal de bus. Ça fait bizarre mais en même temps, c'est une nouvelle aventure qui commence.

28
juil

Pas si horrible que ça, ce petit hôtel péruvien ! Levée à 6h, c'est parti pour le bus direction La Paz ! Première mauvaise surprise, à 10 minutes supposées du départ du bus, il faut encore que je fasse la queue pour payer la taxe du terminal avant de partir. Il y a du monde, je stresse, une dame gentille me laisse passer. Ça n'a finalement servi à rien, le bus est parti avec 20 minutes de retard.

La route longe le Titicaca, et je me rends compte d'à quel point les Uros sont proches de la route. On voit même la "grande ville" (Disneyland Uros comme dit Guido), dont les tôles brillent au milieu du lac. De loin on dirait un campement de Roms (Oh !!). Ils nous ont quand même bien pris pour des abrutis en nous arrêtant sur une petite île isolée ... Mais c'est quand même rigolo.

Les choses sérieuses s'enclenchent, nous devons remplir nos petits formulaires pour quitter le Pérou et entrer en Bolivie. Je me demande si le passage de la frontière sera aussi folklo qu'en Asie ... Nous traversons Ilave, capitale de la culture Aymara, les cousins des Uros et des Taquileños. On peut distinguer la Isla del Sol, un des joyaux de la Bolivie que j'ai, disons le sans détour, la flemme d'aller visiter car il faut reprendre le bateau. On voit aussi mieux la Cordillère enneigée de ce côté là.

La ville où nous allons traverser s'appelle Desaguadero, du nom du seul fleuve sortant du Titicaca. Ce fleuve descend jusqu'à un lac proche d'Uyuni et s'y arrête. Aucun ne va à la mer. Le paysage change : il y a beaucoup plus de plaines. Et nous voici à la frontière : il y a un gros embouteillage ! Tout le monde est à la même enseigne. C'est ça, une vraie frontière terrestre. En tout cas il y a du monde, et nos accompagnateurs nous conseillent de laisser nos objets de valeur dans le bus et franchir la frontière "le plus rapidement possible", c'est plus sûr.

...

Voilà c'est fait, mais dans cet article il y a vraiment un "avant" et un "après".

Je m'explique : 6 HEURES POUR FRANCHIR LA FRONTIÈRE.

Je ne savais pas à quoi m'attendre, mais certainement pas à ça, c'était bien pire que le Cambodge. Heureusement dans ce malheur j'avais repéré un groupe dans le bus pour les suivre. Particulièrement un guide qui ressemble à Laurent Voulzy, c'était donc facile de le repérer. En restant derrière lui, je commence à parler avec un Anglais de Birmingham, Joseph, qui parle français et qui va dans le Jura dans deux jours. Dans son groupe organisé il est avec un couple de Canadiens et un couple d'Ecossais. Pour la suite, on parlera plutôt anglais que français pour que tout le monde puisse se comprendre. Notre attente commence côté péruvien, à 10h du matin, et il y a déjà une immense file d'attente. Laurent Voulzy, qui passe souvent la frontière, n'a jamais vu ça. C'est jour de fête nationale au Pérou mais pas en Bolivie. Sous le soleil, nous attendons 2 heures pour avoir notre tampon de sortie. Ils étaient quatre à assurer le passage. Première étape et nous étions encore bien optimistes ! Haha ... Nous franchissons le pont sur lequel le vent froid nous attaque, comme un présage, et passons du côté bolivien de la ville. Il y a donc la même file d'attente, sauf qu'un peu plus inexplicablement, elle avance BIEN moins vite. Il y a encore moins d'ombre et ce côté est encore plus sale que le côté péruvien. Nous voyons passer beaucoup de marchandises, de tuktuks tunés. Nous avançons en moyenne de 3 pas toutes les 10 minutes. Et je ne mange et ne bois quasiment rien : ce serait le plus mauvais moment du monde pour avoir mal au ventre et/ou envie de faire pipi car les toilettes sont immondes. Et ainsi nous nous relayons pour aller nous asseoir à l'ombre au milieu d'une odeur de chou. Nous perdons espoir. Mais les gens achètent des cacahuètes et des Mister Freeze dont je profite telle une miséreuse : faisant confiance aveuglément (vraiment ... Faut que j'arrête ...) aux accompagnateurs, j'avais suivi leurs consignes et n'avais pris que mon portable, ma veste et mon passeport. J'ai été chanceuse, ce matin, de mettre la monnaie de la taxe dans ma poche, sinon je n'avais vraiment rien, nothing, nada. La tête me tourne un peu donc je finis par prendre une bouteille d'eau. Après 2 heures d'attente, nous arrivons vers le milieu de la queue, nous poussons des cris de joie. Nous nous protégeons du soleil comme nous pouvons, surtout les Britanniques qui prennent des coups de soleil. Heureusement que Joseph est bavard et vraiment cool, un peu comme tout le monde dans ce groupe. Dans la file d'attente, c'est la panique pour un Américain, qui vient de se rendre compte que même si sa femme est colombienne, ses trois enfants et lui nécessitent un visa. Il lui faut des photos type passeport, un justificatif de compte, etc ... Il s'est mis en quête d'un cybercafé et nous ne l'avons pas revu depuis. Les Français, nous passons tranquilles. Petit à petit nous atteignons le poste et des gens essayent de passer sous les huées de tous les autres. À ce point, je suis prête à leur balancer des coups de pied s'ils essayent avec moi. Nous rentrons dans le poste ! Fausse joie, il y a encore une petite file d'attente. Pas à pas nous nous rapprochons du précieux sésame. Nous passons la dernière porte. C'est le tour de Joseph. Et enfin, ENFIN, le mien, c'est presque trop beau pour être vrai. Tchac, tchac, les coups de tampon. Je n'ai jamais été aussi heureuse pour un peu d'encre. Je sors, victorieuse, rejoindre les autres en criant de joie, ils m'applaudissent. En tout, 4h du côté bolivien, et il est 1h de plus qu'au Pérou ici ! Vite, on se dirige vers nos sièges qui nous tendent les bras.

Il reste deux heures de bus jusqu'à La Paz, et il y a bien plus de plaines encadrées de montagnes, le tout au soleil couchant. Ce serait un vrai paysage de rêve si la route n'était pas un tel dépotoir. Mais on s'en contente ... La nuit tombe quand nous arrivons sur El Alto, la ville qui jouxte La Paz. Elle est à 4100m alors que le bas de la capitale est à 3650, au fond de la cuvette. Enfin, il y a deux capitales en Bolivie, Sucre a le pouvoir législatif, mais La Paz en détient aussi une partie, et aussi le pouviir exécutif, et le siège du gouvernement. Ce qui fait qu'on dit souvent que La Paz est la plus haute capitale du monde, moi, ça me va. Depuis El Alto, nous surplombons la ville, qui étire ses lumières comme une constellation tentaculaire. La route descend vers le terminal de bus, à côté duquel mon hôtel est situé. En descendant, il ne fait pas (encore) si froid mais il est tout de même l'heure de se quitter. Au revoir Joseph, au revoir le groupe!

NB: J'ai rajouté la vidéo de la tyrolienne la tête en avant sur l'article "Cuzco 2".

29
juil

Quelques informations sur la Bolivie

La Bolivie est recouverte à ses deux tiers de forêt amazonienne. Pourtant, c'est l'Altiplano, la région montagneuse entre la Cordillère Royale et la Cordillère Occidentale qui est le centre névralgique du pays. C'est une terre de diversité, avec 55% d'Aymaras et de Quechuas, 30% de métis et 15% d'Européens. C'est une population très festive, depuis que je suis à La Paz, il ne se passe pas un jour sans que je n'entende une fanfare. Je trouve aussi que leurs goûts musicaux sont bien meilleurs que ceux de leurs voisins péruviens.

La culture Tiwanaku a été rayonnante, avant l'arrivée de Manko Kapak et du peuple inca. Puis comme partout, les conquistadors espagnols, l'histoire est la même. Les luttes pour l'indépendance commencent vers 1800, avec Bolivar à leur tête. La Bolivie dépendait du Pérou lui-même sous domination espagnole, elle s'en affranchit. L'Etat de Bolivar, bien plus grand qu'actuellement, est alors très riche. Le Libertador souhaiterait un état sans discrimination, avec un accès au savoir pour tous sans distinction d'ethnies, mais les élites blanches refusent et Bolivar voit son rêve s'effondrer. Après sa mort, c'est un foutoir sans nom. La Bolivie perd son accès à la mer, à Antofagasta, au profit du Chili. Puis uns succession de soulèvements, de grèves, pour revendiquer des droits fondamentaux, jusqu'en 2005 oùle Président démissionne et Evo Morales Ayma, d'origine aymara, est élu. J'ai l'impression que la Bolivie commence à aller mieux, petit à petit, depuis cette élection, au niveau des infrastructures et des campagnes sociales, notamment le téléphérique, la route des Yungas, les campagnes contre la violence faite aux femmes et la contraception ... il y a beaucoup de messages politiques tagués sur les murs, souvent pour remercier Evo. Il doit souvent y avoir des référendums car il y a marqué des "No", des "Si Evo", même des "Ni!"

Voilà, on voit que j'ai acheté un guide!

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Jour 1: Fanfares et costumes bariolés

Je suis un peu triste: j'avais demandé un dortoir dans mon hôtel, mais je me retrouve avec une chambre pour moi seule. Ça fait très bizarre, j'aurais dû choisir une auberge de backpackers ... Mais ce coup de blues s'estompe vite quand je m'aperçois qu'il y a de l'eau chaude et une bonne qualité wifi.

Le 29 juillet, c'est la rentrée universitaire folklorique de tous les étudiants, toutes les filières, toutes les promotions, de La Paz. Et ilsfêtent ça avec une célébration qui a de la gueule: ils dansent toute la journée en costumes traditionnels dans le centre de La Paz. Je ne verrai jamais le carnaval d'Oruro, mais franchement, après ça, ce n'est pas grave ... La fête commence à 8h30 du matin, il n'y a que quelques groupes mais c'est facile de se faufiler, au moins. Les gens s'incrustent pour des photos, mais la plupart ne gênent pas trop les danseurs. Comme je suis du bon côté de la barrière, je les suis jusqu'au centre ville. La fanfare est assez répétitive, et malgré les magnifiques tenues des danseuses qui doivent avoir mal aux pieds en dansant en bottes à talons, je prends un break vers 11h.

Je monte au Mirador Kili-Kili qui surplombe une partie de la ville, au gré des rues qui montent et qui descendent (bien). La Paz est une ville plutôt fatigante. Sur mon chemin, je passe par la Place Murillo, où l'on trouve le siège de l'Assemblée, dont la pendule tourne à l'envers! Je crois me souvenir que c'est une lubie d'Evo Morales, le Président. On trouve aussi beaucoup de pigeons sur cette place, ainsi que des librairies où je cherche un guide touristique,sans succès. Vers midi, je rdescends pour trouver un petit restaurant où manger, sauf que je ne connais pas le nom des plats. Au pif, je montre au cuisinier un bifsteak, qu'il fait griller et me sert avec une espèce de crème de riz avec du fromage et de la banane (sobrement nommé "arroz con queso"). C'est copieux! Mais le riz est un peu trop salé. Il y a la télé qui retransmet la parade et apparemment il y a bien plus de monde qu'auparavant! Je me dépêche de redescendre pour arriver sur l'avenue. Je me faufile entre les chaises pour voir la suite de la parade. Il y a d'autres étudiants avec de magnifiques costumes.J'essaye de trouver un peu d'ombre, surtout que les sièges sont payants. Mais c'est vraiment chouette! Un groupe porte des vêtements andins et certains sont déguisés en chèvre et en ours. Un garçon avec des cornes m'invite à danser en plein milieu de la parade! À en juger par son haleine, il a dû boire pas mal de Paceña, la bière locale. Je ne danse pas longtemps car je m'essouffle vite! Je fais des vidéos mais ce n'est jamais au bon moment, car les chorégraphies sont par moments dynamiques, ils sautent dans tous les sens mais sont plutôt synchronisés. Je fatigue un peu, donc je redescends vers le musée d'archéologie non loin. Nous sommes samedi mais ce dernier est malheureusement fermé. Je me dirige donc vers le centre-ville, en voulant passer par de petites rues moins touristiques et tortueuses. Mais l'odeur de gasoil a raison de moi, je rejoins donc les grandes artères.

 Vous pouvez toujours cliquer dessus pour agrandir.

La parade continue, mais maintenant il est plus difficile de la rejoindre car il y a des bâches partout. Je vais sur la place centrale, la Plaza Mayor, et visite le couvent San Francisco. Les Franciscains vivent toujours à l'étage, et produisent du vin dont les raisins viennent de Coroico, un village proche de la selva auquel je me rendrai lorsque je ferai la Route de la Mort en vélo. Pas de panique: le nom est resté, du temps où des voitures y circulaient. Mais maintenant, c'est surtout un lieu touristique qu'on descend en vélo. Nous voyons également des peintures religieuses, avec une Virgen de Guadalupe peinte par les indigènes. Elle a une forme de montagne, cela permettant de vénérer également la Pachamama. Nous avons un petit cours sur Nuestra Señora de La Paz, qui a rendu ses bras à une petite fille manchotte. La basilique en elle-même est fort jolie, mais comme nous sommes guidés, pas de photos permises, même discrètement. Nous montons jusqu'au clocher où nous pouvons voir une partie de la parade.

La visite terminée, je remonte la rue Sagárnaga, pleine de boutiques touristiques. Je devrais m'acheter quelque chose en alpaga pour survivre à Uyuni mais il y a trop de choix ... Je me rends alors au Mercado de las Brujas, le marché des Sorcières. Sur les devantures, des cadavres de bébés lamas ou alpagas. Je m'interroge sur leur authenticité. L'ambiance est assez ésotérique à l'intérieur, il s'y vend des encens et des infusions pour gagner de l'argent, trouver un travail, faire un bon mariage, etc ... Et quelques godemichets. En guise de souvenir, je trouve une petite bouteille remplie de semilla de Wayruru, qui pote chance à la famille. En fait ce sont des fruits d'un arbre non fécondés. J'ai cru à des oeufs de grenouille ... Pas grave, ça a un look assez étrange pour que j'en ramène.

J'ai enfin trouvé un guide! Un Petit Futé d'environ 2012-2013, un seul exemplaire, en français. À croire qu'il n'attendait que moi! Sur le retour, je prends une bière dans un pub anglais, mais je commence à être fatiguée.

Sur l'avenue, la fête bat toujours son plein, mais je prends à manger et je rentre à l'hôtel, d'où de toute manière j'entends toujours la musique qui va durer jusqu'à 22 heures. Les feux d'artifices pétaradent! Quelle ambiance! On ne ferait pas pareil en France, alors qu'ici ils célèbrent leurs coûtumes et l'éducation. C'est bien différent, c'est très festif alors que nous, nous faisons la tête à la rentrée. Cela fait 30 ans qu'ils célèbrent de cette manière.

Le seul souci que j'ai actuellement est de faire ma lessive: le week end il n'y a pas ce service, et mes vêtements puent le graillon ... Il va falloir faire avec jusqu'à lundi!

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Jour 2: Les Cholitas n'ont pas peur du sang

J'avais ajouté Judith sur Facebook, une jeune fille qui voyage seule en Bolivie, mais son itinéraire était incertain. Mais il se trouve qu'elle est arrivée hier à La Paz! Malheureusement, j'ai son message un peu tard, et elle est déjà partie du lieu de rendez-vous quand j'y arrive. Mais bon, c'est ma faute, j'ai beaucoup traîné! Je retente ma chance au musée d'archéologie, qui cette fois est ouvert. Et cela aurait été bête de le manquer! Il possède beaucoup de pièces intéressantes, de la période Tiwanaku, de la période Inca mais aussi d'autres ethnies comme les Chiripas, les Qeyas, les Pukaras ... Les pièces sont étonnamment bien restaurées!

Je remonte jusqu'à la Calle Jaén, vestige de l'époque coloniale, avec ses portes en fer forgé, ses balcons de bois sculpté, ses murs colorés et ses petits pavés. C'est un lieu clé de l'indépendance bolivienne, c'est là où vivait Murillo, le principal acteur de la révolution. Au passage, je goûte une salteña, qui est une empañada un peu plus élaborée, un peu grillée sur le côté, et d'origine argentine. Tout le monde les conseille et c'est vrai que c'est délicieux ... Mais les gens pourraient prévenir que ça coule partout! Ça brûle et ça colle! Après manger, je file vers le téléphérique : je vais monter à El Alto pour voir les catcheuses boliviennes, les Cholitas! J'ai lu que c'était à 14h sur Internet, je me dépêche donc. Mais arrivée au téléphérique ... Il y a encore une looongue file d'attente. Mais en réalité cela va bien plus vite qu'à la frontière, seulement 20 minutes d'attente. La cabine s'élance et domine La Paz avec en fond le pic de l'Illimani: c'est beau! C'est haut! C'est cool! Nous passons au dessus du cimetière de La Paz qui ressemble à des HLM pour morts.

Tout en haut c'est un peu la cohue vu qu'un marché est installé juste à la sortie de la station.Je me faufile et finis par arriver au ring: mais ce n'est pas à 14h ... C'est à 16h. Et bien je vais attendre, et rédiger en attendant. Je ne sais pas où me mettre: il fait trop chaud au soleil et trop froid à l'ombre. À cet endroit, il y a des babys foots, et tout le monde y joue.

Dans la file d'attente, je rencontre plusieurs français : Jean-Marie, Basile, Thomas et Mathilde. Jean-Marie est un vieux baroudeur qui a fait presque tous les pays du monde, qu'il parcourt à vélo. Basile a 25 ans et il vient de travailler dans le commerce du vin au Chili pendant deux ans. La porte s'ouvre vers 16h30, et le show commence vers 16h50. Au départ nous sommes un peu perplexes: ce sont des hommes qui luttent. Bon, rien à voir avec le niveau de la WWE: les costumes des hommes sont aussi cheaps que ceux de Babou et l'on voit bien que les coups sont feints, un peu trop, ça enlève la magie du catch. Il y a bien sûr beaucoup de dialogues mais c'est difficile de les comprendre et le son du micro est très mauvais. On comprend tout de même que le perdant doit se laisser couper les cheveux. Nous pensions qu'il s'agissait d'extensions mais il semblerait qu'il se soit bel et bien fait couper le mulet. Après enfin trois rounds, c'est au tour des Cholitas! Et il faut dire que ça vaut le détour, de voirces catcheuses en jupons qui virevoltent dans tous les sens. C'est bien mieux que les hommes costumés. Ça crie beaucoup, côté cholitas comme côté public. Dans le côté théâtral, l'histoire est cependant toujours la même : l'arbitre est corrompu.e et donc tout le monde le ou la hue. Dans les combats mixtes, ce sont heureusement les femmes qui gagnent, ça me tord les tripes de les voir se faire frapper. Ça finit avec les chaises, les barrières, des catcheurs jetés sur le public, du pop corn jeté sur les arbitres ... C'est rigolo mais ça finit par être trop répétitif. En plus il commence à faire sérieusement froid, vraiment très froid.

À la fin j'essaye de demander un badge mais ce sont les catcheuses elles mêmes qui les donnent et je n'ai pas le courage d'attendre dans le froid. Je ne vois plus les autres ... Ils ont dû partir. Je me hâte vers la station de Mi Teleférico et coup de chance, je les y retrouve! Ils me cherchaient aussi, je ne m'y attendais pas. Nous allons donc manger au Chifa ensemble. Mais bon, comment dire ... Question cuisine asiatique, on repassera! Le seul truc chinois sont les nouilles et, à la limite, le riz vaguement cantonais. Sinon niveau viande il y a du poulet, de la milanaise de poulet, des saucisses, du porc ... Où est la sauce soja? Nulle part. C'est une terrible escroquerie, ils n'ont de chinois que les propriétaires! Même en essayant de se conditionner en se disant que c'est différent, ça ne marche pas. À la fin du repas, ils retournent dans leur auberge où je peux les rejoindre plus tard.Je blinde pour redescendre sur Sagárnaga pour réserver pour la Route de la Mort demain, mais je n'ai pas été assez rapide ... Plus de place pour demain. Ça sera donc pour mardi, au moins ça y est c'est réservé. Je remonte vers l'Adventure Brew Hostel, je peux entrer, mais pas de chance ils ne sont pas au bar ... Pas grave maintenant que je suis là je commande une bière. Vingt minutes plus tard, Basile arrive, il pensait que je n'étais pas encore là! Et Jean-Marie est sur les ordinateurs, pensant me voir passer, et bien c'est raté. Nous avons quand même le temps de discuter un peu, avec des bières qui ne sont pas très bonnes. Ils partent tous deux demain, mais c'est le hasard de ces rencontres d'un soir qui font le charme de mes voyages.

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Jour 3 :  Un peu d'histoire

Levée un peu plus tôt car faute de Route de la Mort, je vais aller à Tiwanaku. Je vais donc prendre le bus vers le cimetière, et après 1h45 de route, il nous dépose au site archéologique, en plein milieu de la pampa aux herbes brûlées par le soleil.

Pour situer le contexte: les Tiwanaku sont une civilisation pré-inca existante depuis 800 avant JC, donc très ancienne mais plutôt calme et discrète dans ses débuts. Elle serait même encore plus ancienne selon certains archéologues. Elle connaît un plus grand essor entre le VIe et le Xe siècle, avec des conquêtes à l'Ouest et au Sud. C'est la première grande civilisation andine qui a été portée par la culture de la pomme de terre et du quinoa. Tiwanaku la capitale dominait plusieurs cités, impressionnées par la magnificence et la pratique religieuse des prêtres censés contrôler les forces surnaturelles. Mais cette civilisation a disparu mystérieusement, vers le XIe-XIIe siècle, bien avant l'arrivée des Incas qui ont trouvé une ville morte. Ils partagent avec ces derniers bon nombre de croyances: le Soleil, la Lune, la Pachamama, Wiracocha ... Les pumas, les chachapumas (tête de puma, corps d'homme), les lamas et alpagas. Les représentations graphiques sont un peu différentes, très élaborées.Je commence avec le musée des céramiques qui sont un peu comme celles que j'ai vu à La Paz. Il y a plein de pots en forme de félins, qui permettent de célébrer le Wajt'a en août, un rituel pour remercier la Pachamama. Août est le début du cycle agricole, et ce rituel permet d'éviter la perte des récoltes par gel, inondations, maladies etc. (Photos 1, 2 et 15 parce que ça ne veut pas me la déplacer). Ensuite, le musée lithique, avec des sculptures. Le clou de l'exposition est un immense monolithe représentant la Pachamama qui a été trouvé dans le temple semi-souterrain du site.

C'est très impressionant et je la prends en photo depuis l'extérieur discrètement. Elle est ornée de beaucoup de condors, elle tient un verre kero dans sa main gauche et une tablette dans la droite, utilisés pour les rituels (Photos 5 et 6). Mais il y fait très froid alors je ne tarde pas. Tant pis, je ne détaille pas les techniques d'agriculture!

Il est temps d'aller visiter le site lui-même. D'abord, la pyramide Akapana. Elle présentait sept niveaux, et de son sommet on peut voir deux entités sacrées, l'Illilmani et le lac Titicaca. Bon, ça c'était peut être avant car aujourd'hui je n'ai rien vu. La pyramide s'est en partie effondrée sur elle-même à cause d'un abruti nommé Ollaydeburo, un espagnol qui pensait y trouver de l'or (photos 7 à 10). Ensuite, la zone de Kantatallita, qui servait de calendrier astronomique, et où l'on peut voir un bas relief avec des figures humaines (photos 11 à 13). Dans le temple semi-souterrain, on peut voir plein de têtes humaines sculptées, censées représenter toutes les races humaines! Elles symbolisaient les victoires sur les peuples étrangers (photos 14, 16, 18, 19). Puis le centre du site, le temple Kalasasaya, le "Temple des pierres levées" où l'on trouve la fameuse Porte du Soleil, l'un des plus beaux monuments précolombiens de Bolivie. Dessus, on peut voir une gravure de Wiracocha qui pleure (étaient-ce des gens tristes?) entourés de petits hommes qui ont alimenté les théories du complot (DES EXTRATERRESTRES!)(photos 22 et 23 avec Biscotte). Il y a aussi plusieurs mégalithes taillés : la stèle sans tête aux attributs Pa-Ajanus, notamment des serpents, la stèle fraile qui est une ode au monde marin car taillée de crabes sur sa ceinture (photos 20, 24, 25) ... Il y a aussi une Porte de la Lune mais elle n'est pas extraordinaire.

Je sors du site, pour aller manger avant d'aller voir la pyramide du puma, mais j'ai soudain un gros coup de fatigue, et la milanaise hyper grasse n'aide pas. Finalement, je décide de ne pas aller voir la pyramide mais de rentrer directementsur La Paz pour me reposer. Je longe une looongue avenue pour aller trouver les transports en commun, le chauffeur me dit "ok pour La Paz". Je m'endors à moitié dans le colectivo qui, mauvaise surprise, stoppe en fait à El Alto. Je lui fais remarquer qu'El Alto ce n'est pas La Paz, il fallait préciser. Comme je suis toujours fatiguée, il m'emmène à la station de téléphérique. Je prends donc la ligne bleue qui surplombe El Alto, puis à nouveau la rouge, qui s'arrête en plein milieu. Ça balance, wouh, c'est mon manège préféré!

 Les maisons bizarres d'El Alto

Après un peu de repos, avec Judith nous arrivons enfin à nous mettre d'accord sur où et quand nous retrouver! Bon, j'arrive à l'heure bolivienne avec 20 minutes de retard à cause du traffic. Mais c'est chouette d'enfin la rencontrer en vrai, surtout qu'elle est très sympathique. Elle est hébergée dans une famille, qui est là avec elle. Comme elle veut s'acheter un poncho, nous remontons finalement jusqu'à Sagárnaga. Au passage nous allons dans un fast-food. Je n'en peux plus de cette nourriture grasse, ce n'est pas évident de trouver quelque chose qui ne soit pas pané ou ne baigne pas dans l'huile ... Je rêve de légumes natures ... À Sucre j'en achèterai au marché pour le soir. Nous prenons un colectivo pour remonter vers San Francisco, où nous croisons un clown. Pendant que nous attendons que l'ami de Judith, Antoine, traverse la route, il se met à côté de moi et je joue le jeu. Tout le monde rigole surtout lorsqu'il essaye de mettre sa tête sur mon épaule alors que je fais 5 bons centimètres de plus! Et pour la peine, je me hisse sur la pointe des pieds. Nous allons ensuite acheter le fameux poncho, tandis que j'essaye un pull en alpaga qui me viellit d'au moins 10 ans et me fait ressembler à une vielle bab' des montagnes mais ça ne me va pas du tout. Il y a tellement de choix que je vais essayer d'y aller au coup de foudre. Mais sinon, j'ai acheté un paquet de cigarettes pour l'équivalent de 1,80€, et les cadavres chez les sorcières sont bien vrais. Il faut les brûler pour porter chance.

La famille souhaite déjà rentrer, ce que je comprends... Au final nous avons passé peu de temps ensemble mais c'était tout de même chouette. J'ai encore oublié de prendre une photo ...

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Jour 4: Le vélo c'est mieux en descente

C'est le jour de la Route de la Mort! Je suis impatiente, ce qui est assez étrange quand on sait que je ne suis pas une grande fan du vélo. Départ à 8h15, je suis avec un couple d'Allemands et un Singapourien. L'agence nous avait promis des photos, elles commencent dès La Paz! Bon, pas d'immortalisation du moment où le chauffeur a pris un dos d'âne très vite. Et il se passe quoi quand on ne ralentit pas à 5km/h? On fait un joli vol plané! Bon, moi ça va encore ...

Notre point de départ est en dessous d'un glacier, à La Cumbre, à 4700m. Il fait froid, pour changer, et nous nous équipons avec des tenues stylées, à mettre au dessus de nos affaires. Nous avons aussi un casque, des coudières, des genouillères, et moi j'ai deux gants gauches en L. Ça commence bien, heureusement on peut m'en prêter d'autres. Mais en ce qui concerne le vélo, bien que les freins soient nickels, la selle est trop haute pour moi même baissée au minimum. Il faut que je saute dessus pour monter, et la descente est instable. Une fois sur le vélo, ça va encore. Soit disant car sinon mes protèges genoux toucheraient le guidon ... Mais non ...

La première partie est sur la route goudronnée, et le cadre est vraiment merveilleux. Je ne vais pas non plus trop vite, hein. Un homme avec un ciré jaune et en short me double, j'ai le temps de me dire "il a pas froid celui là" quand je percute un peu trop tard que c'était Jean-Marie! Bon, on va voir plus bas... Il s'est arrêté pour prendre des photos, je lui fais coucou mais je ne peux pas m'arrêter ou sinon les autres vont m'attendre. C'est génial en tout cas, quasiment pas d'efforts! Les choses se compliquent un peu lorsque nous passons sur la piste à côté du tunnel. "La Death Road sera comme ça!" Ah, oui, effectivement, c'est un peu plus sérieux vu qu'il y a des cailloux et de grosses plaques rocheuses. Ça secoue un peu plus, c'est plus facile de perdre le contrôle. C'est un interlude assez rapide, nous retrouvons l'asphalte puis faisons une petite pause snack. Et Jean-Marie arrive juste derrière nous. Lui n'a pas le privilège d'être en van tel un gringo, il va devoir se faire quelques montées. Je lui donne quelques gâteaux dont je ne veux pas, et il repart. Nous le voyons pousser le vélo dans la pente un peu plus loin, le pauvre. Nous prenons une petite piste sur la droite, et voilà, nous sommes sur la Death Road. La végétation est tropicale (cool!), ça sent la terre humide, la forêt, mais nous sommes encore un peu haut pour qu'il fasse chaud même si depuis la Cumbre, ça s'est réchauffé. Allez, les choses sérieuses commencent! Moi je ne blinde pas, je fais quelques petites accélérations par moments quand je le sens ou quand je ne peux pas freiner, sur les graviers par exemple, je me fais distancer mais c'est génial comme ça, j'ai l'impression d'être seule au monde! Ça ne dure pas bien sûr, surtout qu'il y a d'autres groupes et que notre guide s'arrête pour faire plein de photos. Le van reste juste derrière moi en général. Et c'est à ce moment là qu'en voulant remonter sur le vélo, badaboum. Oui, à l'arrêt. Mais je l'ai dit, il est TROP GRAND, là j'ai perdu l'équilibre en voulant remonter sur la selle. Pas trop de mal, bien sûr, mais je suis un peu blasée. Devant tout le monde, bien sûr, pas question de faire les choses à moitié. Allez, je râle contre ce fichu vélo et je repars. Je me fais encore distancer, mais pas grave, j'adore ce paysage. Nous passons même à un momentsous une petite cascade! Pas de dérapage, je vous le dis, du moment que je suis sur le vélo, je ne tombe pas même si par moments la roue a chassé. Et je commence à avoir sérieusement mal à la paume de la main, comme tout le monde, car il faut bien se tenir, ça secoue sévère parfois! Nous descendons, descendons, nous avons un peu de faux plat et c'est la souffrance, il commence à faire bien plus chaud. Nous prenons une autre piste, ça fait beaucoup de poussière, j'ai mes lunettes de soleil mais un masque ne serait carrément pas de trop. Et voilà que nous retrouvons la route ... Un high-five au guide et c'est fini! Franchement, j'ai adoré, ce n'était pas trop épuisant et je pensais avoir plus de mal que ça. Nous sommes à Coroico à 1400m d'altitude environ maintenant (Ouh! C'est bas!), je vous laisse faire le calcul du dénivelé. Oui, 3300m! Impressionnant!

Nous allons maintenant manger et nous relaxer dans un hôtel avec piscine. Malgré un petit vent, qu'est ce qu'il fait bon ici! Et ces fleurs! Ça prend une allure de petit paradis. Oh, et mes prières ont été exaucées car au buffet il y a des légumeeees, merci Pachamama! Je me risque dans la piscine, fraîche, mais ça le fait. Il y a des Américains de Seattle à qui je parle, je me cale sur la chaise longue au soleil, je prends une bière (j'y vais en maillot et je vois le serveur essayer de me mater mais HAHA shame on you ce ne sont que mes grosses cuisses poilues et irritées par la selle!) ... Mais mauvaise surprise, le guide vient me dire que nous partons dans 10 minutes. Je prends une douche rapidement- c'est mieux ici avec de l'eau et un climat chauds que dans mon hôtel qui caille - et voilà, la parenthèse douceur est terminée, j'en pleure presque intérieurement de retourner dans la froide La Paz. Au poste de contrôle, une ultime apparition de Jean-Marie, qui a crevé ... Je lui souhaite tout de même bonne continuation. Nous remontons toute la belle route sécurisée, qui a été construite il y a seulement 9 ans. Je suis stupéfaite. Je crois qu'elle a dû être faite sous Evo, qui devait trouver que les gens devaient peut être arrêter de mourir et que les Yungas, cette région, devaient être désenclavés car on ne pouvait pas y faire passer beaucoup de camions ... Peut être que cela favorisait le trafic de drogues? Nous avons vu des panneaux "contrôle de narcotrafic" mais personne pour les faire. Nous regrimpons dans les nuages, on se croirait à Lima. Et hop, la Cumbre, et bientôt, La Paz ...

2
août

Arrêtez tout! Je viens de découvrir un de mes aéroports préférés : El Alto, l'aéroport de La Paz. Il n'est pas très grand mais efficace, il y a des boutiques, pas d'encombrement ... et surtout tout est allé plutôt vite, aucun problème avec la Boliviana de Aviación. Nous côtoyons l'Illimani et survolons le relief accidenté de la Bolivie, entre pics enneigés, vallées et crevasses. Par contre un peu plus embêtant à l'arrivée. En fait l'aéroport de Sucre est tout petit et un peu loin de la ville, 30 minutes de bus. Heureusement ils ne sont pas difficiles à trouver. La route est bordée de cactus et de policiers. À propos, on peut remarquer une certaine mixité dans les forces de sécurité, c'est plutôt bien. Le bus nous laisse en périphérie du centre-ville mais ce n'est pas bien loin. Je trouve mon auberge facilement, mais elle s'organise autour de l'extérieur, il risque de faire froid le soir ...

Mais aujourd'hui va être une après-midi galère malgré la fatigue. Je dois m'occuper de réenvoyer une procuration pour ma tante pour la vente de la maison à cause de modifications de la clause. Cela implique d'imprimer le document et d'aller le faire signer devant le consul. Heureusement je suis dans une grande ville, et c'est ouvert à 13h. Le consul est gentil, mais à l'étranger, pour faire authentifier sa signature il faut payer 200 bolivianos! Bon soit ... je dois tout rescanner mais à l'hostel ça ne marche pas. Donc, je pars pour un petit tour du centre-ville qui n'est pas bien grand et surtout il y a bien moins de dénivelé, c'est bien moins fatigant que La Paz, et globalement plus calme.

Sucre est une ville très ... blanche, avec beaucoup d'églises, une ville coloniale par excellence. Je passe devant quelques lieux de culte, mais beaucoup sont fermés à cette heure là. La cathédrale n'est ouverte que pour les messes à 9h. Pour l'instant la seule chose que je visite est la Casa de la Libertad, anciennement un couvent jésuite, puis une université, et maintenant c'est un musée consacré à l'histoire de la Bolivie. Donc, un petit cours s'impose!

Il y a en fait trois capitales en Bolivie: La Paz est, comme je l'ai déjà dit, le siège du gouvernement et du pouvoir législatif, Santa Cruz de la Sierra est la capitale économique, et Sucre a le pouvoir législatif et reste la capitale historique. Elle a eu plusieurs noms: d'abord Choquechaca sous les Incas, puis Charcas à l'arrivée des Espagnols et sous la dépendance du Pérou, puis La Plata quand il a fallu l'annexer à Buenos Aires car il était trop compliqué pour le Pérou de la défendre, Chuquisaca sous le royaume du Rio de la Plata, et enfin Sucre au moment de l'indépendance, du nom du maréchal José Antonio de Sucre qui a combattu loyalement à la bataille d'Ayacucho. C'est très compliqué, il y a eu beaucoup de révolutions donc on ne va pas entrer dans les détails. Il y a eu aussi beaucoup de coups d'Etats: 65 Présidents de Bolivie en tout, certains ne restant que quelques mois voire jours au pouvoir car ils se faisaient assassiner quand ils proposaient des choses qui ne convenaient pas ... d'ailleurs je sais maintenant quel était le thème du dernier référendum: Evo a changé la Constitution une fois pour passer d'un mandat de 4 ans à un mandat de 5 ans, avec un maximum de trois mandats. Mais il va arriver au terme de ce dernier en 2020. Evo veut rester, il a donc demandé au peuple s'il pouvait encore changer la Constitution et demander un quatrième mandat. Le peuple a dit non. Hahahaha, c'est balot, Evo! En parlant de Constitution, on peut voir la toute première dans cette casa. La guide nous parle aussi de Juana Azurduy, une révolutionnaire badass. Elle est morte un 25 mai, date du début de la Révolution, à savoir que les Argentins ont aussi commencé à se soulever un 25 mai, et que Juana a vécu en Argentine, tout est lié. Et aujourd'hui, le 2 août, c'est le jour où un des Présidents, je ne sais plus lequel, a rendu les terres aux indigènes après qu'un autre leur ait retiré au profit de l'Etat. Chaotique, tout cela! La Bolivie a eu quatre drapeaux, et actuellement depuis Evo, le drapeau indigène, le Whupala, accompagne toujours l'officiel. La République de Bolivie s'appelle depuis peu l'Etat Plurinational de Bolivie pour reconnaître les 36 communautés indigènes comme égales entre elles.


Je continue mon petit tour de la ville par le Parque Bolivar (lui, j'en ai déjà parlé ...), je trouve qu'il y a pas mal d'espaces verts ici. Le guide dit qu'il y a une "Tour Eiffel" et effectivement ... euh ... je ne m'attendais pas à ça. C'est rouge et on dirait plus un phare qu'autre chose. Je remonte par une autre rue pour me rendre au marché, où j'achète quelques choses à manger pour ce soir, on va manger plus sain (d'ailleurs je vois bien moins de frites et poulets frits ici ... ouf ...). Je trouve que c'est un peu plus cher qu'au Pérou, pour le taux de change soles/bolivianos il faut multiplier les soles par deux, mais quand même ... je comprends mieux pourquoi il y a peu de légumes dans leurs assiettes. Je termine mes affaires administratives en faisant scanner ma procuration, puis je vais envoyer l'original à la Poste ... pfouh, enfin c'est fini. Fatiguée, je rentre à l'auberge. Je remarque aussi qu'il y a bien moins de boutiques touristiques en centre-ville qu'à La Paz ... mince.

Je passe une soirée assez tranquille, en me faisant une bonne salade de tomates, avocats, oeufs, et le délicieux pain que j'ai acheté au marché! C'est l'occasion de manger un peu plus light et éliminer toute la graisse emmagasinée à La Paz. Il fait frais le soir mais bien moins froid, et c'est agréable de rester dans le dortoir dans la matinée.

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Jour 2: La ville où tout est fermé 

Sucre est en fait une ville qui semble propice à la glandouille. Pour ne pas dire que parfois, on s'y ennuie un peu . .. La fatigue me rendant moins dynamique qu'auparavant. Mais ça fait du bien de se reposer aussi. C'est d'ailleurs comme ça que la désigne le guide, sous le terme de pascana: "une ville où on mange et on se repose". Il faut dire que si l'on fait la grasse matinée, on peut rater le coche pour visiter certains musées qui ferment à 11h30 et ne rouvrent qu'à 14h30 voire 15h. Les églises ne sont souvent ouvertes que l'après-midi aussi, ou alors elles sont en rénovation. Mais comme vous pouvez le voir sur les photos, il y en a beaucoup mais elles se ressemblent toutes. Je trouve qu'à Sucre on se "sent moins" en Bolivie du fait de son air colonial. Dans le combat entre La Paz et Sucre sur "qui est la meilleure capitale de la Bolivie", désolée mais malgré tout ce que j'ai dit dessus, je vote pour La Paz. Il y a bien plus de monde là-bas, un million d'habitants.

Je "grimpe" un peu pour atteindre le couvent de la Recoleta, entre les montagnes (enfin, après ce que j'ai vu elles font plutôt collines) Sica Sica, qui est la plus grande donc le mâle selon les habitants, et Churuquella, la femelle. La grande grille est fermée, ahhh ... Non, la petite porte à côté est ouverte. Il est 11h15 et le musée ferme à 11h30, j'y entre juste à temps. Je suis avec une famille hispanophone, et la guide nous présente les quatre patios et l'orangeraie. Joli cadre pour les Franciscains ... Il y a là un cèdre millénaire. Si on fait une fois le tour à gauche, on va faire un mariage heureux. Si on fait trois fois le tour par la droite, on porte chance à nos proches. En plus de la semilla de Wayruru, ça devrait être bon maintenant! C'est le premier couvent de Sucre, fondé en 1600, et c'est aussi là que fut assassiné le Président qui n'est resté que 5 jours au pouvoir, Pedro Blanco. Nous entrons dans la galerie des peintures religieuses, c'est un peu toujours la même chose, finalement ne visiter qu'une église ici me suffira. Il y a une tête de Christ ensanglanté, seulement la tête, qui fait une grimace horrible, et le petit garçon sursaute et va se cacher derrière sa mère! Nous montons également voir le choeur, et la chaire qui est sculptée finement, et c'est la fin de la visite.

Je file au musée des arts ethniques en espérant qu'il ne soit pas encore fermé. Ouf, il ne reste que 40 minutes ... Je suis un groupe de français pour écouter quelques éléments de la visite guidée. Il y a de magnifiques tissages de différentes ethnies, mais surtout des Jaql'a et des Yamparas. Ils représentent soit des actions de la vie quotidienne, soit des mondes psychédéliques, ou le monde des divinités. Les hommes Jaql'a tissent aussi, dans un style plus naïf que les femmes. Cela ne fait que deux ans qu'ils sont exécutés avant d'être exposés! Les animaux étranges et psychédéliques sont appelés les khurus, ils sont issus d'une ancienne tradition, mais de nouveaux sont créés au gré de l'imagination, les "nuevos khurus". Ce sont des démons qui vivent dans un monde chaotique.

J'ai enfin trouvé un pull de touriste qui va me tenir plus chaud! Enfin, il me fera une couche de plus, quoi, car il est fin mais il fait plutôt bien son job. Maintenant, après l'avoir déposé à l'auberge car rien n'est loin, je me dirige vers le cimetière qui s'apparente plus à un parc mais oh, surprise, il est fermé! Je ne m'y attendais pas ... Tout en ayant un peu d'espoir. Mais voilà qu'un bus passe, et je reconnais son numéro : il va me mener au Castillo de la Glorieta. C'est un monument assez particulier qui vaut au moins le coup d'oeil. Sa construction remonte au XIXe siècle, quand Paris était le centre d'attention des intellectuels boliviens, comme de beaucoup de monde, oooh Paris est magnifique, la Ville de l'Amour, tout ça. Donc, ils voulaient mettre un peu de Paris dans leur pays, quitte à faire un peu tâche. Vous avez vu la Tour Eiffel dans le parc, et bien les imports étaient un peu pareils, comme de la mauvaise contrefaçon chinoise. Le propriétaire de la Glorieta se nomme Don Argandona, il a bâti sa fortune sur les mines d'argent. La famille se rend en Europe, et la femme reçoit directement du pape le titre de Princesse de la Glorieta (pourquoi? Euh ..). Et donc, la construction d'un château à cette mesure commence. Sauf que ses propriétaires veulent un condensé de l'architecture européenne en un seul château! Il y a donc une tour de style roman, juste à côté une tour de style byzantin, puis un clocher de style gothique, des façades hollandaises, une galerie de la Renaissance Française ... le tout rose fuschia. Et comme si ce n'était pas assez random comme ça, il se trouve en plein sur le terrain du lycée militaire. Lycée qui n'est pas qu'un lycée car il y a de petits enfants qui y vont, habillés de tenues militaires. C'est perturbant. Bon, et le château n'ouvre qu'à 15h et bien sûr il est 13h45. De toute manière, l'intérieur ne vaut pas la peine, je ne prends des photos qu'à travers les grilles et vues de la route au dessus.

Bon et bien, avec tout ça, il me reste toute l'après -midi. Je suis sur la route d'une petite ville conseillée par mon guide, Yotala. C'est une petite station balnéaire coloniale qui date du XVIe siècle. J'attends donc au bord de la route que le colectivo passe ... Il met un peu de temps. Mais il finit par arriver, bondé.Je dois rester debout, la tête tordue car le plafond est bas, collée contre la porte, c'est évidemment bien inconfortable. Mais au bout de 3 kilomètres, quelqu'un descend et ouf, je peux prendre sa place! Surtout que nous sommes en milieu d'après-midi, je n'ai pas encore mangé et je me sens un peu nauséeuse mais ça ira. Nous passons un énième poste de contrôle, police partout justice nulle part, et nous arrivons à Yotala. C'est paisible. Très paisible.Je fais le tour en une demi-heure en marchant doucement, mais ça a fait une parenthèse de la ville.

Je repars donc assez vite pour rentrer à Sucre, reprend du pain ... J'essaye de trouver une excursion pour demain au Niñu Mayu, un cratère où il y a des empreintes de dinosaures. Mais il faut marcher 4 heures et une soudaine flemme m'assaillit. Et bien demain ce sera donc le parc des dinosaures, bien plus près de la ville, en espérant qu'il ne soit pas fermé!

Je passe la soirée à l'auberge, avec Chen de Singapour, Magda de Pologne et Adélie de Paris. Ils font à manger et comme je les aide, je mange un peu de riz et de légumes avec eux.

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Jour 3: Rien ne va plus.

Oulà ... Hier soir j'ai appris que la salmonellose sévissait dans l'auberge à cause de fraises contaminées. Alors, quand je me réveille frissonnante en pleine nuit ...Je me sentais très fatiguée hier soir, je n'ai même pas pris ma douche, je suis allée directement au lit avec les yeux qui piquaient plus que d'habitude. Et donc deux heures plus tard, malgré deux couvertures supplémentaires ... Je sens que mon corps va mal. Je grelotte beaucoup, la tête me tourne, heureusement que je suis allongée car j'ai une impression de vertige. Il est 1h du matin, je n'ai plus d'eau potable, je ne peux pas prendre de Doliprane, je me sens nauséeuse ... Aïe aïe aïe, qu'est-ce que c'est? La salmonellose? Non, je n'ai pas de crampes intestinales. Se pourrait-il que ce soit une crise de paludisme? Je suis pile dans la période où je peux le déclarer et la Nivaquine n'est pas efficace à 100%. Après tous les effets secondaires, ce serait fort énervant quand même. Quand même pas la fièvre jaune, c'est bien plus grave. Avec des recherches, je lis que les frissons dûs au paludisme s'estompent après 2 heures, puis vient une forte fièvre. Et bien oui, au bout d'un moment ça se calme, bravo les anticorps. Je finis ma nuit mais le matin j'ai tout de même du mal à bouger, je me sens vraiment fatiguée. Et bien heureusement que je n'ai pas décidé d'aller au Niñu Mayu, finalement. Un maté de coca au petit déjeuner me permet de prendre un Doliprane. Les céréales ne me remettent pas d'aplomb tout de suite. En plus pour ne rien arranger, je viens d'avoir mes règles. Je prends une douche après 30 minutes d'attente - les joies de la vie en communauté - et je reste dans mon lit jusqu'à environ midi et demie, le temps de récupérer assez d'énergie.

Je me mets donc en route pour le parc du Crétacé malgré les courbatures, mais ça va ce n'est pas paralysant. Il fait 23 degrés mais j'ai quatre couches de vêtements sur le dos, et encore je frissonne un peu. En arrivant au marché, je demande quel bus prendre, il est bondé mais c'est parti. Lorsque les gens veulent descendre, je descends aussi puisque je suis contre la porte, mais le bus manque de repartir sans moi et je m'y accroche, mais j'aurais pu me faire mal, heureusement que les gens ont prévenu le chauffeur. Et une demi-heure plus tard me voici devant Cal Orcko. C'est donc sur cette petite colline que l'on peut admirer les traces dans le ciment, car le terrain appartient à la base à l'entreprise Fancesa, qui les a découvertes en 1994. Plusieurs questions me viennent: comment les ont-ils vraiment trouvées? Elles sont comme imprimées dans le ciment, peut être l'ont-ils d'abord versé et cela les a révélées de la terre, mais ils ne les avaient pas vues avant? Et elles sont très symétriques. Je veux bien que les dinosaures se suivaient mais dans ce cas, ne devraient-elles pas se chevaucher? Bon toujours est-il qu'elles sont visibles sans entrer dans le musée, et qu'au final ce dernier va retracer l'histoire des dinosaures que je connais déjà assez, cela risque de m'ennuyer. Et puis j'ai raté la visite des empreintes de près. Il n'y avait que deux créneaux, midi ou 13h et il est 13h30. C'est de ma faute cette fois. Donc, ce fut court, mais je repars avec le premier bus qui arrive. Il met du temps dans les bouchons, mais cela n'est pas si mal, puisque nous passons par le marché campesino et c'est l'occasion de voir un peu plus d'authenticité. Ce n'est au moins pas très fatigant!

Rentrer tôt à l'auberge me permet de parler avec les gens qui y sont durant l'après-midi, c'est plutôt chouette. Il fait bon, Magda raconte beaucoup d'anecdotes de voyages, Chen galère toujours avec son espagnol ... Alex, une jeune fille de San Francisco, se joint à nous. Nous voulons aller visiter la crypte ce soir, ouverte à partir de 20h. Je vais manger bien avant eux car je n'ai rien pris ce midi à part du pain. Je m'autorise un délicieux resto thaï! Pour faire une pause de la nourriture bolivienne. Et de retour au Beehive, nous nous mettons en route pour la crypte. Sucre est animée le soir et des danseurs montrent leurs performances plutôt impressionnantes sur la place. Mais arrivés à l'endroit ... il y a une queue de 10km! Plan B: aller voir des danses traditionnelles. C'est à côté de l'auberge donc demi-tour. Un chien nous adopte, il nous suit jusque DANS l'auberge, il court dès qu'il y a des scooters ... il ne nous lâche pas. Les danses coûtent 110 bolivianos: le plan B tombe à l'eau! Nous passons au plan C: manger (pour eux) et boire un verre. Il est possible de fumer dedans, et je goûte un jus de papaye au lait, la Sureña la bière de Sucre qui est meilleure que la Paceña, et un verre de vin rouge. C'était une soirée fort sympathique!

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Jour 4 (matinée): départ en fanfare!

Demain c'est la fête de l'Indépendance de la Bolivie, mais les festivités commencent aujourd'hui. Apparemment il y avait Evo Morales en personne qui allait venir le 6, mais je dois prendre mon bus pour Potosi. Beaucoup de groupes sont représentés, des indigènes comme des militants des droits animaux, des écoles, des militaires ... Il ne s'est pas passé un jour depuis que je suis dans ce pays sans que je n'entende une fanfare. Et bien voilà, aujourd'hui c'est la grosse fanfare! Surtout pour les jeunes des lycées me semble-t-il. Ce pays semble beaucoup porté sur le militaire, sur l'ordre ... et j'ai l'impression de le vivre à travers la musique toujours festive.

Un colectivo jusqu'au terminal et voilà, il est temps de quitter Sucre. Je me suis plainte de quelques trucs mais au final il était bon de se reposer et de se connecter avec les gens. J'ai certes préféré Cuzco dans ce style de ville coloniale, mais ce séjour à Sucre me laisse tout de même un doux souvenir!

5
août


Ça commence moyennement tout ça : après avoir pourtant montré mon ticket à tous les chauffeurs présents pour trouver mon bus, après un "non c'est le prochain" du premier et un "oui c'est celui là" du second, j'avais donc pris place dans ce dernier bus ... Mais au moment de partir, la dame de la compagnie m'interpelle : finalement c'était bien dans le premier que je devais monter ...Je récupère rapidement mon sac dans le coffre et m'installe donc dans le bus premium, bien plus confortable. Soit.

C'est toujours agréable de prendre un bus de jour pour voir le paysage. Dans un bus de nuit, on s'endort à un endroit, on se réveille à un autre, alors d'accord on gagne du temps mais on rate une partie du pays, de la campagne, la vraie. Ici, la route longe une profonde vallée. Quel dommage que je sois assise du mauvais côté! Nous montons peu à peu en altitude, le relief dessine des gouffres et crevasses. Les montagnes semblent de plus en plus hautes. Ici, moins de pics enneigés se découpant sur l'azur, mais des sommets plus arrondis. La route cesse de monter, pour arriver sur un plateau avec quelques maisons disséminées ça et là, au milieu des champs de blé. Les entreprises d'énergies naturelles, voire les entreprises minières, se multiplient. Et enfin, nous arrivons à Potosi.

C'est une ville à l'histoire bien particulière, outre le fait que ce soit la plus haute ville de plus de 100 000 habitants du monde, à 4010m d'altitude, et qu'elle ait le PIB le plus bas du pays. Potosi fut poutant une ville impériale, la chouchoutte des Espagnols qui la désignaient de huitième merveille du monde. Cette renommée vient de sa montagne, le Cerro Rico, remplie d'argent. Elle a été source d'extrêmes richesses ... Jusqu'à ce que l'argent soit dévalué au profit de l'étain, pour des concurrences politiques. Potosi est aussi une capitale: celle de la "dignité nationale" pour que le peuple se souvienne qu'il ne faut plusjamais se laisser piller ses richesses. Bon, c'est peut être un peu tard ... Mais il paraît que la montagne renferme encore des trésors. Aussi, les mineurs y sont nombreux à être employés. Je prévois d'ailleurs d'aller visiter les mines.

Ce qui est bien, c'est que le bus s'arrête à deux terminaux: le nouveau plus loin de la ville avec sa horde de taxis, et l'ancien plus proche du centre. Pour une fois, je ne me sens pas trop arnaquée par une quelconque combine. Pourtant je vais quand même prendre un colectivo, parce que ça monte, pour aller dans le centre! J'ai le backpack sur le dos qui devient de plus en plus lourd, et je n'ai pas envie de tenter le diable avec l'altitude. Je trouve mon auberge, Casa Blanca, sans trop de soucis même si j'ai raté ma rue au départ. Il y a des douches bien chaudes, et surtout une très bonne wifi! Mes vidéos de 10 secondes, si courtes pour pouvoir les télécharger, sont prêtes en une minute! Je n'en espérais pas tant. Des Italiens m'offrent une tasse de maté de coca, je les remercie mais je ne leur parle pas, pour une bonne raison: l'état de ma lèvre a encore empiré aujourd'hui, peut être à force de rire, sourire et éternuer. Quand ça commence à cicatriser, atchoum, et tout est à recommencer. La plaie fendille le milieu de ma lèvre, elle s'ouvre peu à peu vers le bas. Magda m'avait fait essayer son baume miracle à la papaye, mais rien n'y fit ... Mes différentes options non plus. Dire que je traîne ça depuis la Laguna 69, mais je pensais que ça allait s'arranger, et bien non. Quelle bêtasse d'avoir oublié mon baume à lèvres! C'est pourquoi, maintenant que je n'ai que ça à faire, je m'en vais en acheter un. On va voir ce que ça donne. Au moins, je ne suis plus "sous influence" (la grippe se dit "influenza" en espagnol).

Si vous avez bien suivi l'article précédent, j'arrive donc la veille de la fête de l'Indépendance. Et bien demain, il y aura encore une belle parade, mais tout sera fermé! Qu'importe, de toute manière ce sont beaucoup de musées religieux, il y en a à tort et à travers. Je suis plus intéressée par l'architecture du centre-ville, qui m'a l'air déjà très mignon au coucher du soleil. Et ça bouge, plein de magasins modernes sont ouverts, peu de boutiques à touristes en revanche! Je peux même trouver des épingles à nourrice pour faire tenir mon sac qui commence à souffrir, déchiré d'un côté tant il est sollicité. Et puis, j'ai envie d'une pizza, alors, j'en repère une qui est bondée de locaux. Et je ne suis pas déçue, elle est énorme et délicieuse! Poutant c'est l'Espagne qui les a colonisés, pas l'Italie?

Il y a beaucoup de monde sur la place centrale, pour les premiers défilés. Ça pétarade de partout. Le maire, probablement, fait un discours sur la beauté de la Bolivie et particulièrement sur le département de Potosi, sur les mines, sur le Salar d'Uyuni, sur la fierté que doivent ressentir les habitants. Cependant, il fait bien évidemment un peu froid ... Retour à l'hôtel assez rapidement.

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Jour 1: La ville où tout est fermé, le retour

Cette fois ci, c'est à cause de la Fête Nationale, c'est une plutôt bonne excuse. Mais décider que le lundi sera aussi férié et que le plus beau musée du pays, la Casa de la Moneda, sera encore fermé, c'est un peu blasant. Ça a donc encore été une matinée à faire du rien ("et sinon, la Bolivie, c'était cool?' 'Zzzzzz ...") mais pas que, puisque j'ai rencontré pleinde gens. D'abord Isabelle, une Allemande qui vient de non loin de la frontière autrichienne. Puis toute une tripotée de Parisiens! Cindy, Jean, Arthur et Cécile, cette dernière venant de passer un an en Uruguay en ERASMUS. Cindy est une Toulousaine à la base, ça s'entend et c'est chouette d'avoir un peu de Sud. Il n'y a pas grand chose à faire aujourd'hui, à part se promener un peu dans la ville, prendre des photos des rues et des églises, ce qui est tout de même sympathique bien que fatigant à cause de l'altitude.

D'ailleurs, la lèvre va un peu mieux avec le baume, mais bien sûr quand quelque chose va mieux ... Depuis Sucre, j'ai le nez très sec, mais là ça commence à saigner à l'intérieur des narines, j'ai de petites boules de sang qui se forment et m'empêchent de respirer convenablement, surtout le matin. En rentrant en France, je ne vais pas m'extasier de retrouver un transit normal comme après l'Asie, par contre une respiration correcte ça sera le must.

Après un petit tour, nous retrouvons les Parisiens et j'ai une idée de sortie: l'Ojo del Inca. Ce sont des sources chaudes naturelles où les rois incas avaient l'habitude de se baigner à cause de leurs problèmes de peau. La cure, quoi. Nous devons prendre un bus pour nous y rendre, nous partons donc à pied car c'est le sens descente, pendant 20 minutes. Un peu d'exercice! Cela nous permet de voir des quartiers un peu moins touristiques de Potosi. Une fois dans le bus à destination de Tarapaya, qui se prend près du nouveau terminal de bus, nous avons environ 30 minutes de route à travers de magnifiques paysages sculptés par l'érosion. L'Ojo del Inca se trouve juste après le village, un panneau routier le signalant sur la gauche, il faut donc être assez attentif au moment où on va dire "Bajamos"! Un homme nous signale qu'il faut encore monter 15 minutes à pied pour arriver à l'Ojo del Inca. Et bien, après toute cette glandouille, ça va me remettre en condition! Malgré l'altitude, ce n'est pas trop compliqué. Isa galère - il faut dire qu'elle fait déjà beaucoup de vélo, en fait tout son parcours est à vélo - mais une voiture passe, elle la prend donc pour arriver en haut. Pas moi. Et une fois au point d'arrivée, des panneaux nous indiquent "Prohibido, no pasan" ... "Bon on y va quand même et on fera genre qu'on avait pas compris l'espagnol si on nous demande" "Oui et pour les barrières, les fils et les barbelés?" "On s'en fout! On y va quand même!" nous sommes tous d'accord. Oui mais arrivés à la lagune, parfaitement circulaire, nous hésitons quand même car nous avions lu qu'il n'y avait pas pied. Nous voyons des courants, et même de petites bulles s'échapper du centre du lac. Il y a quelques maisons, et il y a tout de même des gens, que nous ne pouvons pas ignorer. Finalement, on opte pour l'inverse, Cécile parlant parfaitement espagnol. Ils nous expliquent qu'on ne peut plus se baigner car il y a eu des morts, à cause des courants. Bon, c'étaient des gens bourrés, mais quand même ... Et puis c'est toujours férié aujourd'hui. Nous trempons quand même les pieds, l'eau n'est pas brûlante, mais elle est bonne, quel dommage. Cécile continue de parler avec la jeune fille présente, pendant qu'Arthur tente de faire un bateau avec mes pages de mots croisés pour voir s'il sera emporté par le courant. Mais au final même s'il parvient à le faire, nous abandonnons cette idée ... On ne va pas polluer la lagune. D'ailleurs, ce n'est pas le "vrai" Ojo del Inca, c'est celui qui est destiné aux touristes, son vrai nom est la Laguna Tarapaya. Et au bout d'un moment, l'homme nous propose quand même de nous baigner, dans une petite piscine en béton dans laquelle s'écoule l'eau de la lagune! Mais il nous dit "il faut attendre 10 minutes". Nous comprenons bien vite que c'est parce qu'il ne veut pas que d'autres personnes qui traînent aux alentours viennent aussi se joindre à nous, mais nous sentons qu'il a aussi la flemme de nettoyer la piscine, donc nous laissons tomber, c'est un peu dommage car le cadre était excellent. Nous avons le choix de payer 5 bolivianos pour le complexe thermal au bord de la route, mais ce n'est pas tant le prix, c'est plutôt que c'est une piscine couverte, avec un toboggan ... Tant pis. L'homme nous conduit tout de même au vrai Ojo del Inca, bien plus petit, bien moins circulaire, mais bien plus chaud. Nous sommes en fait au milieu d'un cratère volcanique, et les sources chaudes viennent de cette activité. Là, l'eau à 80° fume et bouillonne. Comment l'Inca s'y baignait-il? Rentrait-il dedans, était-elle moins chaude, était-il juste badass?

Après avoir profité de ce cadre sans être trop déçus de ne pas s'être baignés, nous rentrons à Potosi car Cindy et Jean veulent prendre le bus pour Uyuni.J'apprends d'Arthur qu'il faut faire un signe en dessous de l'épaule pour héler un chauffeur, sinon au dessus, c'est un ordre. En ville, nous nous perdons de vue car ils n'ont plus de monnaie, veulent marcher et nous, nous prenons le bus. Rendez-vous devant le Mercado Central ... Mais il est fermé. J'avais mal compris car ils parlaient d'une petite placette derrière le Mercado ... Dommage mais nous nous retrouvons à l'hostel. Un peu de temps passé ensemble, un peu de vin partagé et ils reprennent déjà la route. Avec Isa, nous allons donc manger ... Une pizza, encore. Je lui en ai parlé donc elle voulait tester. Toujours aussi bonne, mais plus de pizza demain. J'en avais pris une plus petite car j'avais fait un crochet au marché quand même, pour goûter cette boisson qui se prend normalement à 16h mais dont les Parisiens m'ont longuement parlé : le tojori, du lait chaud avec du maïs. Et bien c'est très bon! Au fait, je n'ai pas dû le signaler, mais ici le maïs s'appelle "choclo". Il y a encore plein de mots spécifiques à ici qui me sont inconnus.

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Jour 2: Plata o plomo

Une matinée encore somme toute assez tranquille, mais je veux surtout aller voir au terminal de bus s'il y a des départs pour Tupiza en fin de matinée. Bingo! Il y en a un qui part à 12h30 et qui arrive vers 17h. C'est un vrai coup de chance car je vais pouvoir ainsi visiter la Casa de la Moneda demain! Pour le repas, je me dirige vers le marché et je trouve des salteñas. Mais ces dernières m'écoeurent, il y a trop d'oignons dedans. Je ramène la seconde que j'ai achetée à l'hostel, je prends une glace au goût chimique, et une bière Potosina. Ce n'est pas trop mal mais de ces trois bières, la Sureña est ma préférée.

À 14h30, nous partons pour les mines. Nous sommes avec Baltazar de Madrid, qui est quelqu'un de très drôle et extraverti. Notre guide s'appelle Fernando. Nous allons d'abord nous équiper : une veste, un pantalon, des bottes, un casque avec une lampe frontale. Notre premier arrêt est au marché des mineurs, qui est surtout une boutique, où Fernando nous montre de la dynamite, et des poudres de menthe, banane, quinoa qui agissent comme catalyseurs des feuilles de coca. les mineurs en prennent 300 à 400 avant de descendre, mais beaucoup vont servir pour les offrandes à la Pachamama. Nous stoppons rapidement à un mirador, pour une belle vue de Potosi, et c'est parti pour entrer dans la mine. Il y a 400 ouvertures pour entrer dans la montagne, le Cerro Rico ou Sumaq Orcko en quechua, quisignifie "la montagne riche". Mais en aymara, elle s'appelle Huila Collo, la montagne de sang, du fait des nombreux morts. 7 500 personnes travaillent dans ces mines. Nous descendons par de petites échelles et en désescaladant la paroi, nous devons être précautionneux. Heureusement que nous avons les casques, car nous nous cognons souvent la tête, surtout quand nous devons nous accroupir pour passer dans de petits conduits. C'est un peu angoissant au départ, Fernando m'a donné un masque de papier, et j'ai parfois un peu de mal à respirer mais en reprenant ma respiration, ça va mieux. Il y a beaucoup de poussière, surchargée en fer.

Nous apprenons beaucoup sur la vénération des mineurs pour le Tio, qui est comme le mari de la Pachamama. C'est au départ un Supai, une divinité que les Espagnols ont apparenté au Diable dans le catholicisme, mais il se rapproche beaucoup de Hadès car il aide les morts à passer de l'autre côté. C'est le Dieu de l'obscurité en opposition avec la Pachamama, et maintenant il est donc issu du syncrétisme des deux religions car il est représenté avec des cornes, et aussi un pénis en érection car il représente la fertilité. Il est paré de cotillons depuis le carnaval des mineurs qui a lieu deux semaines avant la date du carnaval normal. Pour lui faire des offrandes, il faut mettre de l'alcool à 90° sur son pénis (outch ça doit piquer!) et lui donner des feuilles de coca, des cigarettes, de la bière ... Il ne lui manque que les prostituées, et c'est un gros teufeur. Mais en fait, les femmes ne travaillent pas dans cette mine. Elles portent malheur, mala suerte, qencha, comme sur un bateau. En fait le Tio en serait très content, mais pas la Pachamama. Et bon, nous sommes quand même dans ses entrailles ...

Nous prenons un autre conduit et nous arrivons sur les rails d'un train. Fernando nous montre où extraire les minéraux : surtout le fer, l'étain, le zinc, le bronze, le plomb et l'argent (plata ... O plomo!). On peut voir les cristaux d'argent briller au milieu du zinc. Les mineurs travaillent 8 heures normalement dans la mine, mais ils peuvent y rester 24 heures s'ils le souhaitent ... Pour aller à la selle, ils doivent ressortir car les gaz peuvent exploser. Les minéraux peuvent aussi être tractés vers la surface par un système d'ascenseur. Ils sont ensuite revendus aux entreprises qui trient le tout. Puis ils sont exportés dansle monde entier, et surtout à Taiwan depuis Potosi. Il y a des enfants qui travaillent, à partir de 12 ans, mais pas dans cette mine. Ensuite la retraite est normalement à 55 ans mais il y a des mineurs qui travaillent jusqu'à 80 ans car ils n'ont pas assez d'argent, classique. Après encore un peu d'escalade et avoir entendu une explosion de dynamite, nous rencontrons de loin un mineur, Paolino, qui va faire exploser un pan de mur. Au final, nous ne restons pas. Il y a peu de mineurs qui travaillent aujourd'hui puisque c'est férié. En temps normal ils travaillent tous les jours, intensément de mardi à vendredi, et ils sont un peu plus cools les autres jours, ils peuvent passer plus de temps avec leur famille.

Fernando nous raconte un mythe inca par rapport à cette montagne: l'Inca pouvait voir le sommet depuis son Ojo, et comme les très hautes montagnes sont des divinités, ils sont allés voir de plus près. Ils ont commencé à entrer dans la montagne, et ont constaté ses richesses. Ils lui ont cependant demandé la permission de les exploiter. La montagne a répondu : non, ces richesses sont pour le peuple qui arrivera après vous. Les Espagnols, donc. C'est trop injuste!

Nous allons voir plusieurs Tios. D'ailleurs, à la base ce n'est pas pour dire "oncle", c'est parce que les Espagnols ont voulu imposer leur "Dios" et les quechuas ne savent pas prononcer le D. Donc, c'est devenu "tius", puis "tios". Dans la mine il y en a plein avec des prénoms : Jorge, Salvador, José, un autre George ... Ils sont fait d'argile. Nous passons devant deux d'entre eux qui ont 60 ans, vénérés par les vieux mineurs. Il y a là une veste traditionnelle, utilisée pendant le Tincuy. C'est une tradition un peu étrange des villages environnants où les hommes se battent. D'abord en duel puis tous en même temps. Il y a au moins un mort chaque année ... Il sert de sacrifice à la Pachamama.

C'est vraiment une visite intéressante, c'est génial d'en apprendre autant. On ne se sent pas comme des touristes, déjà nous ne sommes que trois. Moi, j'ai l'impression d'être totalement immergée dans le mode de vie des mineurs, dans leurs traditions religieuses ... Il y a plein de choses que je n'ai certainement pas retranscrites tant Fernando nous en a dit. D'ailleurs il a un accent un peu spécial: il prononce certains R comme des Z. El Cezzo Zico. Il commence à faire froid, par contre. L'entrée de la mine est à 4 200m d'altitude, mais elle descend encore 500 mètres plus bas, avec un réseau de tunnels de 530km de long. En descendant dans les entrailles de la Pachamama, il peut faire jusqu'à 45 degrés.

Et voici que nous remontons à l'air libre ... Quelle expérience! Dire que 14 mineurs meurent chaque mois. Nous, nous sommes sains et saufs ... Souvent ils meurent à cause du monoxyde de carbone. C'est pour ça qu'ils ont souvent des cigarettes sur eux: la fumée leur permet de détecter les sources de gaz, ainsi que disperser la poussière.

Nous rentrons à l'auberge, voulions sortir mais tout est encore fermé. Je vais acheter une bouteille de vin rouge bolivien dans un supermarché, le premier que je trouve dans ce pays! Je prends aussi, entre autres, du chocolat au quinoa. Et ainsi, la soirée se passe bien, avec deux employés de l'auberge, Felipe du Chili et Paolo du Brésil.

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Jour 3 (matinée): Enfin, la Casa de la Moneda.

Nous avons donc consacré la matinée à cette visite, avec Isa. C'est paraît-il le plus beau musée de Bolivie selon le Petit Futé qui s'extasierait d'une poubelle, mais c'est vrai qu'il a beaucoup de cachet. C'est d'abord une fabrique de pièces en argent, témoin de la gloire passée de Potosi. La monnaie d'un pays était en quelque sorte une représentation de sa monarchie, elle devait donc être belle à regarder en plus de sa valeur pécunière. La première fut établie à Mexico en 1535, puis Lima en 1565, et enfin Potosi en 1575. Celle que nous visitons date de 1750, et est ornée dans son premier patio d'un magnifique visage de Bacchus, bien qu'un peu flippant, attribué à Eugène Moullon, un Français. Lors de la création de la République de Bolivie, la nouvelle monnaie y fut aussi frappée. Notre guide, Luis, explique d'ailleurs que le symbole du dollar $ vient du S et du I de Potosi. Il parle de manière assez animée et il peut même faire des tours de magie avec les fausses pièces de monnaie! Il nous montre les grosses presses, qui sont les plus vieilles au monde encore conservées. Elles étaient tirées en bas par des mules, qui étaient remplacées tous les trois mois suite à leur mort par épuisement ... On estime les pertes, au cours des siècles, à 8 millions de mules environ. C'est bien triste. Nous continuons la visite avec des minéraux, et aussi des réalisations en argent. Après avoir vu les mines, nous voyonsles résultats. Le bâtiment en lui-même est tout aussi joli que la collection exposée. Mais plein de pièces sont fermées. À la fin de la visite, Isa va vers la boutique, je cherche d'autres choses à visiter: il y a des peintures, je suis un groupe, mais ce sont bien évidemment des peintures religieuses dont je me lasse. Pas de chance, Isa a disparu, mais nous nous retrouvons à l'auberge. Il est temps de partir ... Isa a décidé de venir avec moi à Tupiza pour faire du cheval dans le canyon! Elle part donc avec son vélo au terminal où je la rejoins en bus, elle est allée plus vite que moi. Nous pouvons donc prendre le même bus, chouette! Elle me prête du fil et une aiguille pour recoudre mon backpack dont l'état commençait à devenir critique. Je ne sais pas combien de temps il va encore tenir... Mais on fera au fur et à mesure, pour les trois semaines restantes. Et enfin, le bus arrive. Ciao, Potosi!

8
août

Et bien décidément, toujours des contrariétés avec les bus, ou bien? Quelques minutes après notre départ du terminal, voilà que le bus s'arrête et que des mécaniciens interviennent dessus pendant 30 minutes. Bon, il vaut probablement mieux ça qu'une tuile sur la route. Mais ce qui est drôle c'est que les gens commencent à s'insurger au bout de 10 minutes, pensant déjà à réclamer un remboursement! Finalement, rien de tout cela vu que l'attente n'a pas été si longue. Nous quittons enfin Potosi et son Cerro Rico, et filons sur la route en direction de Tupiza. La végétation change assez vite quand nous descendons un peu en altitude car tout à coup, en regardant par la fenêtre, des cactus, des centaines de cactus! Et bien ça y est, la semaine "Far West" commence officiellement.

Le trajet est long: 5 heures de bus, plus l'habitude. Mais nous avons droit à des films qui mériteraient un oscar. D'abord, Major Payne, un film américain nul plein de clichés avec un doublage un peu exagéré. Quoique, si il faut, la version originale est pareille. C'est pourri mais c'est un peu addictif, surtout que le son est fort. Ça parle d'un soldat psychopathe qui aime le meurtre mais qui se fait rétrograder dans une école, à partir de là il va torturer les gamins façon sous-Full Metal Jacket, mais en fait à la fin il les aime bien, les gamins l'aiment bien, il tombe amoureux de la conseillère d'éducation qui doit avoir un problème avec son père, voilà voilà ... Et deuxième film, film d'auteur bolivien probablement, avec une chanson entêtante mais un son moisi, une histoire d'un camionneur qui prend des enfants dans son camion et va draguer des femmes dans les mariages ... Bon ok j'ai pas suivi du tout. Il fait chaud dans le bus et ça commence à être énervant. Nous faisons une petite pause pour prendre l'air et grignoter, dans un petit village au milieu de nulle part. Et puis, reprise de la route, mais il ne reste qu'une heure de trajet. Nous arrivons à Tupiza vers 17h30-18h, il fait encore jour mais le soleil s'est caché derrière les montagnes. La ville s'étend dans un écrin de canyons rougeoyants mais nous ne pouvons pas en profiter tout de suite. Le bus nous laisse dans la rue, mais l'hôtel n'est pas bien loin. C'est encore un hostal, Valle Hermoso, bien qu'il soit référencé comme auberge de jeunesse avec une possibilité de dortoirs, c'est comme à La Paz. Déjà, il n'y a pas de Wifi dans notre chambre, et nous n'en aurons même pas à la réception non plus durant la soirée. La jeune femme nous propose des prix pour faire du cheval demain, pour 3, 5 ou 7 heures. Nous allons d'abord comparer en centre ville avec d'autres agences, car elle dit que c'est moins cher ici, mais parfois il ne faut pas croire les commerçants sur parole.

Il fait déjà nuit, mais un peu plus bon qu'à Potosi, vu que l'altitude est plus basse. Tupiza est une petite ville, mais il y a plein de ... Pizzas. Avec les jeux de mots qui vont avec! Nous allons sur la place principale pour retirer de l'argent, visitons l'église, et nous retournons dans la (seule) rue principale, qui mène au terminal de bus.

En chemin, nous avons l'occasion de comparer les prix, et c'est effectivement moins cher à l'hostal, bon, soit. Nous optons pour 7 heures de cheval! Wouhou ça va brûler les cuisses! Nous allons également chercher le ticket de bus pour Uyuni, comme ça c'est fait et on a eu le temps de comparer tout en sachant à quelle heure ils partaient. Ça va encore être 5 heures de trajet! En arrivant dans l'après-midi, nous pourrons chercher des agences pour faire le Salar et le Sud Lipez. Il y a des départs depuis Tupiza, mais c'est un peu plus cher. Donc, on se déplace malgré tout, par nos propres moyens. Les restaurants sont un peu chers, et dans celui où nous allons, il n'y a plus ce que nous voulions. Bon, pas grave. Au moins il y a de l'eau chaude à l'hostal .. Même s'il y a peu de pression.

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La bonne, la brute, la truande

Nous devions partir à 9h, mais finalement, la dame de la réception vient toquer à notre porte pour nous dire que ce ne sera pas avant 10h. Nous allons récupérer Elizabetta, qui vient de Rome, et nous prenons le bus pour nous rendre à 2km au sud de Tupiza. Les chevaux sont prêts! Je vais monter une belle jument isabelle qui s'appelle Bahia, probablement lesbienne car elle préfère largement la jument d'Isa au cheval d'Elizabetta. Notre guide, Ricardo ( "Zicardo". Le R devient Z pour les 2R et le R du début), est tout jeune, il nous donne de beaux chapeaux de cowboys à défaut de bombes (au moins pas de risques de poux) et des chaps, ouf. J'ai donc dit que je n'avais pas d'expérience, et certainement que sinon vu comment j'ai monté à l'arrache, ça aurait été un peu la honte. Donc, Isa écope de la tâche de guider le groupe avec sa jument Perla, et Bahia la suit comme son ombre.

Et c'est parti.

Nous commençons entre les rails du train, pour ensuite suivre une petite piste. Et nous en prenons plein les yeux! C'est magnifique, on dirait le Far West, les cactus se mélangent à des roches ocres, grises, rouges foncées, rouges claires, parfois plus noires. Et les formes qui se découpent sont si originales! Par moments ce sont des cheminées, puis de la dentelle ... Notre premier arrêt est au canyon del Duende, où nous prenons beaucoup de photos, surtout pour l'Instagram d'Isa. Je consens à avoir quelques photos de moi devant cette porte naturelle, même si Bahia ne se tient pas tranquille. J'ai vite compris qu'il ne fallait pas trop lutter, la laisser suivre, et je me suis souvenue qu'ici les chevaux ne sont pas dressés pareil, il ne faut pas tenir les rênes trop serrées non plus. Bahia étant censée être pour débutants, il lui est un peu difficile de comprendre tous ces ordres bizarres que je lui donne. Donc au final, je prends les rênes par le bout et je tourne large, ce qui me paraît être n'importe comment. 8 ans d'équitation ... C'est pareil, quand Isa part au galop, je peine à retenir la mienne donc je laisse faire, je la laisse s'arrêter toute seule. Ricardo n'arrête pas de nous dire "Despacio" (doucement). Elisabetta a un peu peur mais je lui donne quelques conseils.

Nous marchons, marchons, à travers tous ces beaux canyons. Nous arrivons dans une petite ville au milieu de nulle part, puis quelques kilomètres plus loin ... Outch, le vent en pleine face. Beaucoup de poussière, c'est très désagréable et les chevaux n'aiment pas ça. Ils s'énervent un peu, mais nous arrivons après deux heures et demie à l'endroit où nous allons manger: Tojoroy. Nous traversons la rivière pour nous abriter pour pique-niquer sans manger de sable. Au soleil, il fait plutôt bon! Ricardo nous a amené du riz, de la viande, une patate pour chacun, du nectar de pêche, une salade de choux et tomates. Et bien, c'est simple mais plutôt bon!

Nous repartons une demi-heure plus tard, et la douleur commence à se faire un peu sentir, surtout que les chevaux ne peuvent aller qu'au pas ici. Nous traversons tout le temps la rivière, Bahia semble avoir envie de s'y rouler. Du coup, en piaffant avec son antérieur, elle éclabousse tout le monde! Les chevaux savent à peu près où aller, mais très souvent, Perla prend les devants et je ne compte plus les fois où Ricardo a dit "al otro lado, amiga!" (de l'autre côté, amie! - ils nous appellent "amie" au lieu de "gringa", c'est mieux quand même), ça nous fait bien rire. Nous croisons des gens avec des chiens qui aboient, il faut faire attention, encore plus qu'avec les voitures. Nous arrivons enfin au niveau des rails du train, mais pas de panique, il ne circule qu'à 18h. Et là, ce sont des lignes droites, sans trop de cailloux, nous pouvons galoper à fond. Isa initie et la mienne suit, mais elle met vraiment le paquet! Quel sentiment de liberté, ça m'avait manqué. Nous pouvons, en plus, galoper sur plusieurs kilomètres. Même si Bahia fonce, je lâche les mains, comme si je faisais de la voltige, et c'est vraiment chouette car j'ai l'impression de voler! Mais bien sûr toutes les bonnes choses ont une fin, même si mes cuisses me remercient. Par contre, la fille de l'agence nous l'avait vendu avec le Canyon del Inca et el Valle de los Machos, un endroit où le vent s'est amusé à sculpter des pénis dans la roche, et nous n'y sommes pas allés. Elle s'est surtout trompée, oui! Mais l'endroit où nous étions était plus naturel, moins touristique, plus beau. Et en y regardant bien, la Torre que nous avons vue est aussi pas mal phallique.

Nous passons le reste de la soirée avec Elizabetta en piquant comme nous pouvons le wifi de son hôtel, et au lit. Demain ça va faire mal.

10
août

Trois bus, trois problèmes! Il est impossible pour les chauffeurs d'entrer dans le terminal car la route est en train d'être refaite. Il faut aller un bloc plus loin, sauf qu'il y a là plein de bus différents. Ça ne va pas être évident de trouver le nôtre! Donc, je vais demander à tout le monde avec mon ticket. Pour l'instant ce ne sont que des nons ... Isabelle va demander à un homme chargé de la circulation, qui nous dit qu'il arrive de Villazon et est en retard. Oui, finalement nous attendons une demi-heure, mais il est bien là, ouf! Sauf que nous n'avons pas les bons sièges, mais ça c'est un détail car il y a de la place. C'est donc parti pour, encore, 5 heures!

5 heures qui ne se passent pas du tout de la même manière qu'à l'aller. En effet, la route est en train d'être refaite comme je l'ai dit. "En train", ce qui veut donc dire que notre gros bus passe sur de la piste caillouteuse. Et c'est presque digne de notre balade à cheval de la veille, car nous traversons carrément des cours d'eau. Et ça bouge dans tous les sens, ce qui nous fait bien rire. Le paysage est ici encore très joli, avec des canyons inédits. Encore un peu de Far West, et de cactus! Au bout d'une heure, c'est malheureusement terminé, le paysage se fait plus andin. En revanche, le vent s'est levé, et pas qu'à moitié. Nous faisons face à de furieuses tempêtes de sable qui nous empêchent de laisser la fenêtre ouverte. La route change, et nous montons en altitude, jusqu'à 4200m. Surtout, elle commence à faire de dangereux lacets. Nous avons l'impression que ce bus de route y passe tout juste. Bon, comme d'habitude, nous allons faire confiance au chauffeur, il sait ce qu'il fait ... Ouuhhh, là c'est passé juste ... Bon, on va arrêter de regarder par la fenêtre pendant un moment ... C'est beaucoup moins drôle qu'au départ, parfois nous prenons de la route goudronnée. À mi-chemin, nous nous arrêtons dans une petite ville pourrie au milieu de nulle part, Atocha. Des femmes vendent des empañadas, mais depuis les dernières, j'en suis un peu dégoûtée. Il est 14 heures mais je n'ai pas faim, dans ces bus je ne fais que grignoter en attendant de faire un vrai repas le soir, mon déjeuner se sera réduit à des crackers et du chocolat.Je ne me sens pas mal, mais je n'ai pas spécialement faim, c'est tout. Nous quittons Atocha pour commencer à redescendre un peu. Nous arrivons dans une étendue désertique, où le vent redouble de plus belle, jusqu'à créer des sortes de tempêtes de sable, nous ne voyons plus rien mais une fois encore, le chauffeur semble savoir ce qu'il fait. Nous passons quelques petits villages, on se demande pourquoi les gens ont décidé de s'établir là. Et en plein milieu ... Il y a un aéroport. Pareil, on se pose des questions. C'est un tout petit, mais tout de même, il n'y a pas grand chose ici, à part des troupeaux de lamas.

Et enfin, au terme d'une traversée qui semble toujours plus longue, nous voici à Uyuni! Enfin, on est obligées de se poser la question à deux fois tant la ville semble pourrie. Elle a surtout été construite pour le Salar et donc pour le tourisme, sous le Président Arce. J'avais vu dans un reportage qu'elle n'était pas extraordinaire, mais là, quand même ... C'est très plat et ça paraît peu entretenu. Les rues ne sont ni pavées ni goudronnées, surtout de la piste, à l'exception du petit centre-ville. Bien sûr quand nous descendons, nous nous faisons aborder par des agences qui veulent vendre leurs tours. Je les envoie balader. Après avoir récupéré les affaires, direction mon hostel, mais où Isabelle ne va pas passer la nuit: elle a trouvé un Couchsurfing avec un certain Camillo. Je vais tout de même poser mes affaires dans le dortoir, tandis qu'Isa essaye, sans succès, d'obtenir le mot de passe de la wifi, la femme de la réception ne la laissant même pas aller aux toilettes! Et en posant mon sac dans le dortoir, bonne surprise. Il y a un autre homme qui vient d'arriver, il m'entend parler français, nous engageons la conversation et ... C'est Yann, que j'avais ajouté sur Facebook avant de partir pour voir si nous pouvions faire le Salar ensemble! J'avais compris qu'il commençait le tour un jour avant moi, et nous n'avions pas prévu d'être dans le même hostel, encore moins dans le même dortoir. Quelle belle coïncidence! En plus, c'est quelqu'un de plutôt cool. Nous nous mettons en quête d'une agence, à côté de notre rue touristique. Nous essayons de comparer avec une autre que nous ne trouvons finalement pas, Maps.me nous envoyant dans une rue déserte et défoncée. Disons que ça fait tout du moins ville fantôme du Far West. Il paraît que le bureau de poste fait tout droit sorti du Pony Express, mais c'est un peu balot que je ne l'aie sû qu'après coup. Mais pas vraiment le temps non plus, malgré l'achat de cartes pour mes collègues, il semblait déjà trop tard pour y aller. Elles seront envoyées du Chili.

Au final, nous choisissons l'agence Blue Lines, qui a été recommandée par d'autres Français, en plus elle est à côté de l'hostel. Nous allons donc réserver, et comme nous savons que la deuxième nuit va être très froide, celle que je redoute le plus, nous demandons à louer des sacs de couchage en plus. Nous ne comprenons pas grand chose à ce qu'il se passe avec les prix, elle nous avait dit 800 mais c'est en fait 750, et pas 700 comme les autres car "la nourriture est meilleure". Bon ... On va y croire? (Spoiler: c'était faux, tout le monde avait la même). Il n'y a que 3% de commission en payement par carte et non 10% comme ailleurs, ça c'est une bonne nouvelle. Donc, 750 + 50 pour le sac de couchage + 50 de plus pour moi pour mon transfert pour San Pedro mais je ne paye pas tout de suite, juste 800. Ok, ça, c'est fait! Nous retrouvons Isabelle qui doit attendre que Camillo rentre à 20h, mais il est déjà 19h. Donc en attendant ... Shopping. Moi, ça y est je craque pour un bonnet qui va m'être utile dans le Salar, aussi pour cacher ma coiffure de plus en plus pourrie, et des chaussettes très douces et chaudes à l'intérieur. Je vais aussi retirer de l'argent, ce qui est toute une histoire car un distributeur m'embête en disant que je n'ai pas assez d'argent sur mon compte, je lui demande 350, il a l'air d'accord ... Tout ça pour ensuite me dire qu'il n'y a plus d'argent. Super. Dans une autre banque, il me donne 600 d'un coup ... D'accord. Je me mets en quête de cigarettes, et c'est toute une histoire mais je finis par trouver. Elles sont à 5 bolivianos plus chères ici, mais disons que le paquet est à 2€ au lieu de 1,80€, quoi ... Je rejoins mes deux compagnons vers 20h, Isabelle va chercher Camillo dont nous faisons la connaissance, et il nous emmène dans une bien bonne pizzeria. Je trouve son histoire assez similaire à la mienne: il n'est à Uyuni que depuis 6 mois, venant de La Paz. Le soir, il fait froid à Uyuni, et il n'y a rien pour sortir. Il s'ennuie, cette ville est pourrie, mais son contrat ne va durer qu'un an, après il compte bien partir ... Du coup il propose du Couchsurfing pour se sentir moins seul. Il reste car il aime son boulot ... Mais La Paz et ses amis lui manquent beaucoup. Là où les similitudes s'arrêtent, c'est qu'il ne s'entend que moyennement avec ses collègues. Moi, j'ai de la chance là-dessus !

Nous nous régalons, Camillo nous propose de boire une bière chez lui, mais je me sens vraiment fatiguée, mes yeux me piquent, je ne veux pas trop boire car nous sommes quand même à 3700m d'altitude et je pense à ma mauvaise expérience à Potosi, j'ai déjà bu une pinte et EN PLUS à l'hostel il n'y a de l'eau bien bien chaude que jusqu'à 22h30. Ce qui fait beaucoup de paramètres importants qui penchent vers un non, pareil pour Yann. Heureusement il ne sera pas tout seul puisqu'il y a Isa. À qui il faut d'ailleurs dire au revoir ... Elle va me manquer, cette "crazy german" ...

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Jour 1: But first, let me take a sel-fie.

Oh, et bien finalement, cet hostel est plutôt bien, je ne m'attendais pas à ça. La douche était vraiment chaude ce qui est bien quand on ne va pas en prendre pendant trois jours, c'était le lit le plus confortable et chaud depuis le début du voyage, le chauffage marchait, le petit déjeuner était super ... Je crois que c'est fait exprès pour les gens qui reviennent du tour. Par contre, si mon oeil piquait hier, c'est parce qu'un vaisseau sanguin a encore explosé. Je pense que c'est un effet de l'altitude, dans les yeux et dans le nez. Pas terrible, mais pas grave non plus. En revanche, ce qui est un peu plus grave, c'est que nous avons finalement pris un tour de 3 jours - pour 4 jours, 400 Bs de plus,on allait voir un autre volcan et des momies dans une grotte, qu'on m'avait conseillées mais la flemme il va faire trop froid - et que je vais arriver le 13 à San Pedro au lieu du 14 et que je n'ai aucune réservation et que je n'ai pas de wifi ici. Je vais donc en quémander en face ... 3 bolivianos. Je pensais avoir un temps illimité, la connexion est bonne, je commence à charger les photos de Tupiza et, ça s'arrête. Bon de toute manière il est 10h20 et nous devons partir à 10h30, donc branle-bas de combat. À l'agence, on nous met dans le même groupe que 3 Italiennes, Silvia Alessandra et Noemie, et Soledad du Chili. Yann, pas bête, demande avant de partir s'ils ont bien pris les sacs de couchage. "Oui c'est bon", ouf. Nous suivons Walter notre guide, et nous embarquons dans la Jeep. Nous, nous sommes derrière et le sol est haut, nous avons les genoux au niveau de la tête! Allez, c'est parti, après un petit arrêt de Walter pour faire on ne sait quoi, classique des chauffeurs boliviens. Notre premier arrêt est proche, c'est un cimetière de trains, qui n'ont que 65 ans mais sont déjà rouillés. Plusieurs constatations: outch il y a du vent, ouille il fait froid, et les filles font vraiment beaucoup de photos. C'est dur d'échanger avec elles car elles parlent mal anglais et baragouinent en espagnol. Au lieu de 15 minutes, nous en passons 30. Cet endroit est chouette, mais tout de même, en plus on s'entasse tous les uns sur les autres. On finit par en partir pour revenir sur Uyuni, et prendre une route en direction de Colchani, un village qui est la porte d'entrée du Salar. Il y a encore les mêmes boutiques, dernière chance pour acheter des pulls, mais moi j'achète plutôt du sel dans la fabrique, qui n'a pas grand chose d'extraordinaire, en plus nous ne sommes pas sûrs de tout comprendre ... Disons que quand ils récoltent le sel brut ils en font des briques, et pour le consommer il doit être cassé, purifié, réchauffé, des choses comme ça. En sortant, je croise Isabelle! Mais trop brièvement car nous devons y aller, quel dommage. Elle a l'air d'aller bien mais je m'inquiète pour sa traversée du Salar, et la photo qu'elle doit faire, vu le vent. Tous les cyclistes qui traversent Uyuni doivent y faire une photo tout nu. Je n'ai pas envie qu'elle chope la mort, surtout qu'elle prévoit déjà d'y camper.

Bon, ça y est, nous traversons le Salar, après avoir vu d'horribles sculptures de sel. Et bien, c'est blanc, à perte de vue, mais traverser tout cela en Jeep, ça a quand même de la gueule. Nous ne roulons pas forcément sur la piste déjà tracée, peut être pour ne pas trop attaquer la couche de sel de 3 à 4 mètres d'épaisseur. Et si ce Salar existe, c'est parce qu'avant il y avait l'océan qui a déposé du sel, sur une épaisse couche de lithium qui l'a retenu quand l'océan s'est retiré. C'est pour cela qu'il est si magnétique et qu'on dit que les portables s'y déchargent plus vite. Ça ne pouvait pas être l'inverse, non? Nous faisons un arrêt devant de petites flaques bouillonnantes. De ce que j'ai compris, c'est à cause du gaz des voitures. Sauf que cette eau est plein de sulfate et a des vertus curatives. Je lance l'hypothèse que les gaz des voitures ont fait remonter une poche de sulfate à la surface ... Je ne sais pas, je ne comprends pas bien. Et hop, on repart à travers la grande immensité blanche, qui n'est arrêtée parfois à l'horizon que par des montagnes qui ressemblent à des mirages. Et au beau milieu de nulle part, voici un hôtel de sel, où tout le monde va manger. Il y a un grand monument à la gloire du Dakar qui est passé l'année dernière. Les pilotes doivent en effet bien foncer ici! Après une autre séance photo, nous allons à l'abri du vent pour manger du lama et du quinoa, les quantités sont petites mais au goût c'est plutôt bon. Dans cet endroit, il faut payer 5 Bs pour des toilettes pourries. Le tourisme, quoi.

Bon, il est 14h30, il est maintenant temps d'aller faire la fameuse séance photo avec les effets de perspective. On s'arrête bien plus loin, en plein milieu du Salar, loin des autres touristes - il y a la place. D'abord, on fait une photo avec un T-rex, c'est rigolo, moi je demande des photos avec Biscotte qui sont un peu plus galères à faire que prévu, les filles font plein de poses, nous sommes en plein vent mais pour l'instant on tient le coup. C'est tout de même marrant, et ça passe assez vite!

Maintenant, direction Incahuasi, mieux connue sous le nom d'Isla del Pescado, ou encore de l'île aux cactus. On la voit de loin, mais à quelle distance est-elle? On met bien 30 bonnes minutes pour y arriver, et elle est bien plus grande que ce que j'imaginais. Les cactus peuvent atteindre 16 mètres! Et nous sommes à 3800m d'altitude. Par contre pour monter sur l'île, il faut payer 30Bs, et pour les toilettes 15Bs. Et bien nique le système, je vais faire pipi sur le côté sans qu'on ne me voie. Et je ne vais pas y monter, de toute manière il fait trop froid car le vent est encore plus fort, maintenant.Il y a un peu d'eau, le sel est plus friable donc j'en profite pour ... Graver le nom de mes chats, oui, oui. Mais ensuite je rentre vite dans la voiture. Yann a trouvé le moyen de grimper quelque part et est passé sans payer. Mais à ce stade, nous commençons à être fatigués, et nous devons commencer à nous rapprocher de la sortie. Nous traversons ce qu'il nous reste à traverser, le paysage se faisant monotone jusqu'à ce que nous arrivions de l'autre côté, proches de montagnes où le soleil va se coucher. Je ne sors pas de la voiture pour autant!

Une fois le soleil disparu, malgré une magnifique lumière nous quittons l'immense étendue qui de loin ressemble à un miroir. Nous prenons une piste en terre et cheminons jusqu'à la nuit, jusqu'à l'hôtel de sel où nous allons passer la nuit. Le guide semble cependant perdu ... Il tape plusieurs noms dans son GPS. Ce serait bête de passer la nuit là, il va faire bien froid. Il arrive dans un petit village du nom de San Juan et va demander son chemin. Aucune raison de ne pas lui faire confiance. Nous arrivons finalement à destination, et nous ne tardons pas dehors même si le ciel est une fois de plus magnifique. Nous nous installons dans les chambres, et là, devinez quoi ... Allez, vous vous en doutez. Les sacs de couchage. Ils les ont oubliés. Moi, je crois à une blague au départ, mais non, il y a bien eu un gros cafouillage. Nous gueulons et on nous donne une couverture en plus, mouais. Au final mes 50 Bs de plus sont pour San Pedro, sauf que Yann a aussi payé ce prix là et ce n'est pas normal. Il va y avoir du portage de plainte au retour sur Uyuni! Mais ça va, là il ne fait pas SI froid, c'est demain que ça risque d'être terrible. Pour dîner sur nos tables de sel, nous avons un maigre repas de soupe, poulet et frites froides. C'était quoi cette histoire de "bonne nourriture"? On ne peut faire confiance à personne. Il y a des Français à côté de nous, mais personne ne tarde. Pas de douche ce soir car pour avoir l'eau chaude il faut payer, et de toute manière ça pourrait être pire au moment de se déshabiller. Tant pis, au lit tôt, c'est bien car demain on se lève tôt aussi.

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Jour 2: J'suis pas venue ici pour souffrir, ok?

La nuit n'a pas été terrible, surtout car notre chambre était à côté des cuisines, et que l'odeur était écoeurante. Pour ce qui était du froid, ça passait encore, même si on ne pouvait pas dire qu'il faisait bien chaud. Le réveil est à 6h30 du matin, et nous allons déjeuner. Au moment d'aller faire nos sacs, nous croisons Walter qui se dépêche ... Aurait-il oublié de se réveiller? Mais ça va, nous ne partons pas trop tard.

Nous traversons d'abord le petit Salar de Tijuana, et nous arrêtons près de rails de trains. Première constatation, le vent est encore plus fort qu'hier, donc la température bien plus basse. Walter nous dit que ce temps ne va durer que trois jours. Soit le temps de notre tour, ce qui n'est vraiment, mais alors vraiment pas de chance. Nous ne tardons pas trop pour les photos, mais les Italiennes semblent particulièrement dévouées à se prendre partout en photo, quitte à risquer d'attraper la mort. Le paysage est cela dit exceptionnel, mais il est bien depuis la voiture.

Nous passons près de la frontière chilienne, en pouvant admirer le volcan Ollaguë. Il y a un mirador, mais c'est la même histoire, peu de temps à l'extérieur avant de foncer rentrer au chaud dans la Jeep. Il y a des toilettes qui coûtent 5 Bs, mais hors de question de faire pipi dehors cette fois ci. Notre arrêt suivant est à la Laguna Cañapa, qui est perchée à 4150m, déjà. L'eau est gelée et s'écoule par endroits, poussée par le vent, ce qui est somme toute assez artistique. Mais ici, pas de flamants. Nous continuons notre route vers la Laguna Hedionda, où nous pouvons apercevoir les mignonnes bêtes roses, mais de loin et vite fait. Ils ont l'air transis de froid, surtout que le vent semble encore avoir pris de la vitesse. Walter nous dit qu'il est à 65 km/h mais pour connaître la tramontane et ses tempêtes, c'est tout bonnement impossible.Je l'estime à 120, si ce n'est 140, pour vous donner une idée. Nous rentrons à l'intérieur, et c'est bondé. Walter ne semble pas avoir un grand esprit d'initiative, vu qu'il regarde dans le vide et ne réserve rien. C'est nous qui nous jetons sur une table qui se libère sans qu'un autre guide nous dise "on a réservé gnagnagna". On a aussi la nourriture, donc on met la table, on s'impose. Nous avons des pâtes froides, mais du délicieux poulet. Je demande aussi à Walter de descendre mon backpack car il faut que je rajoute une couche supplémentaire, histoire d'arriver à 5 couches de vêtements. Comme il est gentil malgré tout, il nous emmène plus près des flamants qui sont collés les uns aux autres, mais dommage, ils ne ressortent pas bien sur mes photos, peut être vais-je pouvoir récupérer les photos des filles ensuite. Nous passons près de la Laguna Negra, la Laguna Honda ... La route se fait caillouteuse et chaotique, nous sommes ballotés dans tous les sens, sans compter que nous avons l'impression de traverser une tempête de sable. Au détour d'un virage, nous tombons sur la Jeep des autres Français, le chauffeur semble avoir un problème de moteur. Walter descend et va l'aider, car il ne savait pas quoi faire, lui aussi regardait dans le vide. Walter se brûle les mains en essayant d'ouvrir le bouchon du réservoir d'eau, ça commence à fumer, il prend une bouteille d'eau vide pour ne pas que ça pète, il met une couverture dessus ... On espère que ça ne va pas exploser ... Et au final ils peuvent repartir, bravo! On dit qu'il n'est pas dégourdi mais là il a regagné des points. Nous continuons notre montée vers les hauts plateaux, jusqu'à être au niveau de la neige: 4700m. De grandes plaines désertiques, encadrées de montagnes et volcans bruns et blancs.

Et là, l'altitude sévit encore: mon oeil gauche commence à me gratter. J'espère encore que c'est une poussière, mais je frotte, frotte, rien n'y fait ... Ça fait même un peu mal. Je regarde avec mon téléphone, et oui, mon vaisseau sanguin a encore explosé. C'est une sensation comme si j'avais très très très sommeil mais que d'un oeil. Le seul moyen de me soulager est soit de fermer les deux yeux, soit d'appuyer dessus et continuer à voir le paysage avec l'oeil droit. Je trouve un système en mettant le pompom de mon bonnet entre mon oeil et mes lunettes de soleil, et ça passe, mais c'est temporaire. Quand nous arrivons à l'Arbol de Piedra, formation géologique plutôt jolie et donc en forme d'arbre, ce n'est pas mieux, ça gratte toujours. Et pour terminer, nous voici à la Laguna Colorada! Cette fois ci j'enlève tout, et je vois carrément flou, heureusement ça compense avec le droit. La Laguna est bleue, blanche et rouge du fait des minéraux que l'on y trouve. Walter nous dit qu'il y a des vigognes (vicuñas), les petits lamas maigres et craintifs qui normalement s'éloignent des humains et dont la laine est la plus chère car ils sont plus rares. Donc, je n'y crois pas, je me dis qu'il nous raconte des craques. Ensuite, nous devons aller payer 150 Bs notre droit d'entrée dans la réserve Avaroa, qui vante sa faune se résumant à des lapins, des flamants et ... Ah oui ce sont bien des vigognes. C'est très cher quand même, mais nous n'avons pas le choix!

Nous arrivons à l'hôtel où nous allons passer la nuit, c'est le moment de vérité. Et bien oui, il fait bien froid, et il ne fait pas encore nuit. Nous héritons de la chambre la plus exposée au vent, la plus froide, encore à côté des cuisines, mais après vérification il n'y a pas de courants d'air. Quand je dis qu'il fait froid la nuit, c'est dans les -15 degrés. Pas de chauffage ni de douches, et ça se dit hostel. Nous croisons les Français, qui viennent de s'en faire virer. On leur avait au depart donné la chambre que nous allons occuper, ils ont gueulé, les autres étant réservées ... Mais les guides d'Uyuni ne réservent que dalle apparemment, seulement les guides chiliens dont le tour commence de San Pedro. Ça n'a pas plus aux tenants de l'hostel, on ne peut même pas dire qu'on nous prend pour des cons, donc. Surtout que ce groupe avait réservé le tour à l'avance, n'ont pas eu le guide qu'ils voulaient même si on leur a dit "oui oui" comme d'habitude, et ils sont partis avec une Jeep sans chauffage, avec une vitre cassée, sans GPS, sans musique alors que nous, c'est quand même bien confort. Pas étonnant qu'ils pètent un câble, ça devient de la torture, pour un tour payé 100€. Ils ont trouvé à côté, heureusement. Mais on les sent quand même maltraités, ce n'est pas parce que nous sommes de jeunes touristes qu'il faut nous prendre pour des vaches à lait et nous mettre à l'épreuve de l'hypothermie.

Au repas, nous avons un peu de spaghettis bolognaise, avec des pâtes pas bonnes. Et une bouteille de vin rouge offerte, mais bon. On ne demande pas notre reste, on va au lit tôt, et j'ai actuellement 6 couches en haut: un pull polaire, deux sous pulls, mon haut de pyjama chaud, mon sweat en alpaga, ma polaire. En bas, collant chaud, chaussettes de sport, bas de pyjama chaud, jogging, chaussettes chaudes. On va voir ce que ça donne. Et aussi 3 couvertures, et un plaid. J'entends des gens rire dans le hall où le vent s'infiltre, comment font-ils? Je me fais une petite tente avec les couvertures pour avoir moins froid, et c'est parti.

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Jour 3: Vite, la civilisation!

Nuit un peu moins rude que ce à quoi je m'attendais grâce à mon système de survie, mais loin d'être agréable. En plein milieu de mon rêve, je me suis réveillée en grelottant violemment, mes couvertures étaient tombées. Il est 23h30. Soledad sort de la chambre à ce moment là, elle est en train de faire une crise de panique. Nous laissons donc la lumière allumée, que Yann va éteindre vers minuit.Je cherche une bonne position, je regarde l'heure, il est maintenant 1h. Ça ne passe pas vite. Je me rendors un peu, jusqu'à 4h. Mon oeil me gratte. Tant pis, je me cale sous la couette et retouche les multiples photos jusqu'à 5h30, où le gérant de l'hôtel entre et nous dit qu'il faut se réveiller, et direction la sortie, un truc comme ça, pour mettre de bonne humeur le matin. Quelques minutes plus tard, Walter vient s'enquérir de notre état, nous avons survécu. Maintenant il faut sortir de sous les couvertures, c'est plus dur mais des pancakes nous attendent. Nous ne tardons pas, et partons vers 6h30, ce qui nous permet de voir le lever de soleil. Nous cheminons jusqu'à arriver aux fumerolles, qui sentent l'oeuf pourri, donc c'est du soufre. La fumée sort de la terre comme d'un petit volcan. Au moment de partir ... La vitre est bloquée, on ne peut la remonter.

Heureusement, ce petit contretemps est rapide. Maintenant, nous allons jusqu'aux sources chaudes, où la température est un peu plus acceptable car il n'y a plus de vent. Mais est-ce assez pour se baigner? Je ne veux pas trop tenter. Je vais aux toilettes mais quand je reviens, tout le groupe est dans l'eau. Bon ... Allez je me dépêche et je saute dedans. Ça va on ne sentait pas trop le froid. Mais j'ai si bien fait ... C'est très agréable. Elle est à une très bonne température. Pour moi c'est un peu plus court mais c'est déjà ça! C'est déjà l'heure de ressortir, vite on se dépêche pour ne pas avoir trop froid. Mon corps est encore tout fumant, il a gardé la température. Il ne faut pas trop tarder car il est 9h et notre bus est à 10h. Nous traversons le désert Salvador Dali, qui pourrait être un peu plus surréaliste, je ne m'attendais pas à seulement des pierres aux formes certes un peu étranges, posées sur une dune. Ça fait un bel arrière-plan de tableau, ceci dit.Nous passons aussi rapidement devant la Laguna Verde, qui n'est pas très verte à cette saison de toute manière.

Le poste de frontière avec le Chili est tout petit, posé au milieu de nulle part. Nous arrivons pile, avec Soledad nous disons rapidement au revoir à tout le monde, filons à la migration pour le tampon de sortie, et hop, dans le bus. Le poste s'appelle Hito Cajon, et nous devons attendre, mais au moins nous sommes dans le bus. Par contre, en arrivant à San Pedro, nous devrons passer la douane et ils ont l'air assez stricts, vérifiant tous les sacs pour voir si nous ne transportons pas d'artisanat végétal (mon cendrier en palisangre est vernis, normalement ça passe, et j'ai la semilla de wayruru dans la bouteille, mais c'est scellé ...), animal (ça ça va, la laine d'alpaga ...) et pas de fruits non plus (aïe, les fruits d'Amazonie! Bon on tente et je dirai que j'avais pas compris que c'étaient des fruits). C'est un passage de frontière assez efficace: 20 minutes d'attente, et nous voici au Chili, en route pour de nouvelles aventures!

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Comme je quitte la Bolivie, je vais donc faire un petit résumé de mes impressions.

C'est effectivement un pays que l'on sent pauvre, du fait du niveau de vie assez bas, même si nous les touristes, nous raquons à fond. C'est un pays que j'ai plutôt vécu à travers ses fêtes, qu'il s'agisse de l'Entrada Universitaria aux allures de carnaval, ou de la Fête de l'Indépendance, plus militaire mais qui révèle la fierté d'appartenir au peuple de Bolivar. Qui dit fête, dit bien sûr musique. Meilleure qu'au Pérou dans les grandes villes, un peu plus kitsch dans l'arrière pays. Surtout, beaucoup de fanfares, certainement des répétitions avant la fête nationale, mais que l'on pouvait entendre de partout, même dans des petits villages comme Tihuanaco. Un peuple en général gentil, mais qui semble parfois sur la défensive par rapport au gringo. Un peuple politisé, impliqué dans le "oui" ou "non", Evo Morales doit-il rester. Les Boliviens du département de Potosi avaient voté non, car Evo n'avait pas tenu ses promesses. D'autres ont suivi. Alors, qui assurera la relève à la fin de son mandat? Et enfin, tout de même, un pays qui bouffe mal. J'espère ne plus sentir autant d'odeur de poulet frit et de friture froide, manger moins de semelle en guise de steak, et avoir un climat plus clément que sur l'Altiplano. Mais, en définitive, un pays "à l'arrache" où je me suis amusée autant que reposée, où j'ai fait de bien belles rencontres au fil de ma route, un pays entre tradition et modernité, bref, un pays qui m'a tout de même plu.

De la musique. Les seconds sont péruviens, mais bon !  
13
août

L'arrivée à San Pedro va être un changement radical: déjà, nous allons descendre de 1 100m depuis le Sud Lipez. Nous allons donc passer à une température d'environ 20°. Le chauffeur de bus fait office de guide temporaire, plus bavard que Walter. Il nous montre où est San Pedro, dans la vallée qui s'étale à nos pieds. Il nous conseille des restaurants, des hôtels ... Il s'arrête quand nous croisons un troupeau de lama, et nous explique comment passer cette fameuse douane. Ah, et la piste, c'est fini: dès le passage au Chili, nous roulons sur l'asphalte, avec d'ailleurs des panneaux de signalisation. C'est déjà le retour à la civilisation.

Et donc, cette douane? Pas vraiment de quoi s'inquiéter si on n'a pas de drogues sur nous. On décharge nos sacs, on les passe au scanner, et les douaniers s'amusent à faire une démonstration avec le chien. Vous savez où ils avaient caché la dope? DERRIÈRE MON SAC. Et je n'avais pas vu leur petite manigance car je regardais quelque chose sur le portable de Soledad.J'ai eu un léger moment de flip, du coup. Mais tout le monde a applaudi, je n'ai pas vraiment eu le temps de comprendre ce qu'il se passait. Ce fut rapide et efficace, en tout cas.

Je pensais donc à un changement "radical", mais pas à ce point là! San Pedro de Atacama a l'allure d'un village Disney. Il fait un peu surfait, mais vraiment, quand on revient de la galère du Sud Lipez, ce retour à la civilisation prend l'allure d'un petit paradis, en tout cas c'est la première impression. C'est un village très boisé, avec des arbres le long des rues. Il y a de la Wifi et de l'eau chaude partout. Et du papier dans les toilettes. Les commerçants sont gentils même s'ils parlent vraiment vite. Il y a des boutiques d'artisanat partout, des agences touristiques, des cafés, des restaurants même si c'est un peu cher, et les maisons en elles-mêmes ... Non, en fait, je vais juste mettre des photos, vous verrez de quoi je parle, entre le "wouhahou c'est trop bien" et le "ouais ça fait faux", mais la première impression fait du bien.


L'hostel dans lequel je suis est ouvert sur l'extérieur, c'est à dire que toutes les pièces donnent sur un patio central, ce qui est parfait pendant les autres saisons mais moyen pendant l'hiver, la température tombant dans la nuit à 5°, ce qui est moins froid qu'auparavant, mais tout de même je n'ai pas été élevée au Danemark. Les gérants parlent très vite et je ne comprends que les mots clés dans la phrase, et encore. Je suis dans un dortoir à 4 lits, ça change de d'habitude, mais je suis obligée d'aller en haut, et le lit se balance quand je monte l'échelle. Comme j'arrive l'après-midi, il y a de la musique dans le patio, c'est plutôt agréable comme ambiance car ça sent un peu plus les vacances. Je profite de la wifi ... Et de la minette qui vient voir les gens.Je grimpe sur une chaise pour la caresser alors qu'elle est sur le toit de canisses, et elle semble apprécier cet effort puisqu'ensuite, elle miaule pour m'appeler, elle me suit même dans mon dortoir. Normalement demain je dois changer d'hostel car je l'avais déjà réservé à l'avance sans flexibilité, mais là j'hésite. Il y a une petite épicerie à côté où je vais chercher de l'eau. Je demande à un employé de la boutique qui regarde les gens entrer quels sont les prix, s'il peut me passer une bouteille d'eau ... Ah non c'était un client qui attendait son ami. Et je n'avais pas vérifié mais c'est de l'eau gazeuse.J'ai VRAIMENT besoin de dormir. J'essaye de faire une sieste, mais non, je n'y arrive pas.

Je me repose quand même comme je peux, et vers 17h30, je ressors pour rencontrer Saaid, que j'avais ajouté sur Facebook comme Yann auparavant. Il n'aime pas voyager seul, voulait connaître un peu l'Amérique du Sud, mais il n'a que deux semaines. Il m'a donc rejointe à San Pedro. Notre première mission va être de décider de notre planning, mais au final ça va malheureusement être plutôt par rapport à moi.Je suis fatiguée, je veux me reposer demain, je ne tiens pas à faire les geysers vu que j'en ai vu dans la matinée même. Il faut se lever à 4h30 - ce qui donne 3h30 pour la Bolivie: le Chili est à l'heure d'hiver depuis hier - et remonter jusqu'à 4100m d'altitude. Ces deux paramètres me font dire qu'il faut que je les zappe, même s'ils sont plus grands que ceux de ce matin, ils sont aussi plus chers. Ici, 1€ est égal à environ 750 pesos chiliens, ça paraît bien comme ça, sauf que non: ce sont des prix comme en France, les zéros en plus. En gros, pour avoir une idée du prix, il faut regarder le premier chiffre et se dire qu'en euros, c'est un peu plus cher. Et pour les excursions, non seulement on paye le guide, mais on doit payer l'entrée du parc en plus, qui n'est pas comprise dans le prix. Oh, et nous nous rendons bien vite compte que la commission pour retirer du cash est ÉNORME: environ 5€ de pris par la banque chilienne. Et devinez quoi? Je suis encore coincée au niveau des retraits avec Monabanq! C'est merveilleux! Du coup, comme j'ai besoin de cash, je dois retirer avec ma carte Banque Postale. Je crois qu'en tout ils vont me retenir 15€ de commission, autant vous dire que je suis très joyeuse. Et non je ne peux pas changer mon plafond maintenant car il fallait fournir des documents en plus, je ne sais pas lesquels ni où ils sont ... Tant pis. Je ne pourrai retirer avec Monabanq que le 15, et encore je sens que ça va partir vite. Allez, heureusement qu'on ne reste qu'une semaine. Les autres excursions que l'on prévoit ne sont pas données non plus: la Vallée de la Lune demain après-midi, la Vallée arc-en-ciel le 15 au matin et la Laguna Cejar l'après-midi, et le 16 toute la journée, les Piedras Rojas où il faut remonter en altitude, mais je pense que mon oeil ira mieux d'ici là. Je souhaite payer par carte, c'est donc obligé, là. Nous trouvons une agence où c'est possible, mais pas de place pour les geysers demain. Nous allons donc chercher une autre agence pour Saaid, et comparer les prix. Je me rends vite compte que c'est un TRÈS très bon négociateur. Il y va cash et fait baisser les prix jusqu'à 7 000 pesos moins chers avec un aplomb terrible! J'aimerais bien savoir faire pareil mais je n'y crois pas assez, je pense. Et allez savoir si avec une femme c'est pareil? Bref, il arrive à négocier un bon prix, l'employé de l'agence appelle et ... Il n'y a plus de place. Je n'hésite pas à lui faire remarquer que normalement c'est la première chose qu'on fait. Tant pis pour lui, on aura goûté de ses bonbons whisky-cerise, sans rien acheter. Dans une autre agence, Saaid trouve son bonheur, mais toujours impossible de payer par carte. Donc, retour à la première, où nous négocions les prix au plus bas grâce à ce que nous ont donné les autres agences. Nous réservons tout, il y a de la place, Saaid paye par cash pour éviter la commission, moi je n'ai que 2550 pesos, ce qui fait 3€, moins que le prix du retrait. Ils ont un système bizarre, avec l'application Tab. Ils prennent ma carte en photo, je donne mon mail pour le reçu, je prends un selfie (? Pour entrer dans les parcs nationaux, apparemment), eeeeeeet ça ne marche pas car leur connexion est pourrie et le serveur n'en fait qu'à sa tête. Après 3 essais infructueux, je vais devoir revenir payer demain, en espérant que ça marche. Si non, je reste campée sur mes positions!

Après tout ce cirque, il est temps d'aller manger, là ce serait presque plus simple si l'un des distributeurs n'était pas hors service et qu'il n'y avait pas la queue dans le froid à l'autre. Heureusement, il reste 20 000 à Saaid, ce qui permet un repas à 5 000 chacun et son entrée au parc. Nous nous faisons la réflexion que ce village est charmant si l'on est riche (sans blague!), enfin surtout si on a une Visa Premium, que finalement en apparence c'est paradisiaque mais que si l'on gratte sous le vernis, les coulisses sont presque infernales. "Presque" car quand même, les commerçants sont agréables, les excursions valent le coup d'être faites, et la nourriture ... Et bien nous allons dans un petit restaurant à 5 000 pesos le plat, je prends un poulet "chapsui" (essayez de le dire avec un autre accent, en changeant les voyelles, vous allez comprendre!) et je me régale. Ça fait plus occidental mais c'est très bon. On ne s'attarde pas car lever tôt pour Saaid et moi la fatigue me rattrape ... Même avec quatre épaisseurs, j'ai froid en rentrant. Je file prende une douche chaude, me laver le corps et les cheveux. Ah! Quel soulagement! Je me couche vite fait bien fait tout en constatant que la porte du dortoir ne ferme pas bien. Ce qui a été très embêtant quand un gars du dortoir est rentré et a oublié de la fermer derrière lui et d'éteindre la lumière, je crois qu'il était bourré ou défoncé, ou les deux. Malgré un petit courant d'air frais, ça ne m'a pas empêchée d'hiberner tranquillement.

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Jour 1: Gustavo LePaige, un prêtre perché 

Comme ça fait du bien! Je me sens plus fraîche et dispo qu'hier, même si mon oeil est toujours un peu bizarre. Je traîne bien facilement jusqu'à midi, l'heure du check-out. Mais petite contrariété encore, ma carte ne passe pas dans la machine.Je dois donc, encore, payer par cash, pour ensuite changer d'hostel, qui se trouve être en face. Autant je ne trouvais pas les gérants du Tatai's très avenants, autant la jeune femme de la réception du Laskar est bien plus sympathique! Je ne peux pas non plus y payer par carte ... Mais d'ici le 17, ça ira pour retirer de l'argent. Elle est même d'accord pour changer ma réservation, même si au départ elle craignait qu'Hostelworld ne la charge. Elle parle bien anglais et ne le prend pas mal quand je dis que je parle un peu espagnol mais que je ne comprends rien à l'accent chilien! Je peux même m'installer avant l'heure officielle du check-in. Bon, ici, pas de chat mais pas grave. Il n'y a pas de petit déjeuner mais ils mettent du thé et du café à disposition. La wifi est moyenne, mais tant pis. Le lit a l'air plus confortable et je suis en bas, super. Cet hostel tire son nom du volcan Laskar, signifiant "langue de feu" en kunza, le langage local. C'est le deuxième volcan le plus actif du monde, 18 éruptions en 35 ans. Il peut exploser à tout moment ... Je profite de l'absence de Saaid pour me faire à manger à l'hostel avec des oeufs et du riz achetés à côté. Je traîne encore jusqu'à 14h, trouve un endroit où faire la lessive, et je me balade tranquillement jusqu'au terminal de bus, qui lui aussi fait Disney. Il y a un bus direct pour Iquique le matin, ce qui est une bonne nouvelle, mais l'agence est fermée à ce moment là. Je retourne dans le centre du village, il fait soleil, il fait bon, c'est vraiment chouette. En chemin, je prends une glace à la papaye, et je me rends à l'agence pour partir à la Vallée de la Mort, puis la Vallée de la Lune.

Nous partons à l'heure avec notre guide, Simon. Je râlais du prix des tours, mais en réalité, il est totalement bien accordé à la qualité. Simon parle anglais et espagnol, et fournit des explications claires et détaillées. Nous sommes donc entre la Cordillera de la Sal, la plus sèche du monde, et la Cordillera Domeyko. Il pleut grand maximum 50mm par an, en moyenne 20mm, et c'est tellement sec qu'avec à peine une goutte d'eau, toutes les fleurs éclosent. C'est ce qu'il s'est passé il y a peu de temps avec El Niño. Le sol est ici riche en chlorures, en sel, en lithium. Le bus nous dépose au pied d'une grande dune, que nous allons gravir. Les paysages sont vraiment magnifiques, avec de très beaux phénomènes géologiques. Lors de l'ascension, Simon est très attentif à notre bien être, il me conseille de plutôt respirer par le nez que par la bouche car l'air est très sec. Il y a une vue magnifique depuis en haut, nous pouvons voir ce qui s'appelle le Colisée, en rapport avec le monument romain.

La Vallée de la Lune a été nommée comme cela par Gustavo LePaige, prêtre belge, star de San Pedro de Atacama car c'est lui qui l'a placé sur la carte, l'a fait reconnaître site archéologique et géologique, etc. Il se sentait comme sur la Lune en étant dans cette vallée, et nous verrons plus tard que c'est un sacré poète.

Comme nous sommes avec un tour, nous ne pouvons pas nous attarder, surtout qu'il y a beaucoup de monde. Notre bus nous emmène ensuite près de rochers, nommés les Trois Maries. C'est encore LePaige qui les a nommées, ayant vu ici la forme de la mère de Jésus. De droite à gauche, on peut donc imaginer une Marie qui prie, une Marie qui tient dans ses bras Jésus (selon l'angle on peut plus facilement la deviner) et la troisième a en fait été cassée par un touriste qui a voulu monter dessus pour se prendre en photo. La honte. Il n'y a donc que deux Maries et demi ... Pourtant il y a beaucoup de panneaux "No Pasar" et il est en fait important de les respecter car si on marche sur le sol, le sel s'évapore très aisément. On peut y voir des cristaux purs, 100% de sel, qui sont en fait comme des stalactites à l'intérieur du sol. Un autre rocher est appelé le dinosaure, car il ressemble fortement à une tête de T-rex. On l'appelle aussi le Pac-Man, mais le dino est plus réaliste car quand même ce n'est pas un rond parfait! Cet endroit s'appelait avant "Las Salinas" et il y avait des mines des années 1960 à 1983. Nous revenons en marchant un peu dans le Colisée. Simon raconte qu'avant, le Dakar passait par ici (d'ailleurs je me suis trompée le dernier était en 2015, mais on ne comprenait rien non plus ...), mais maintenant il a été arrêté car les pilotes dégradaient tous ces beaux lieux géologiques.

Notre lieu d'intérêt suivant est la Vallée de la Mort, "Valle de la Muerte". Il y a plusieurs théories sur ce nom, très intéressantes. La première se rapporte à la colonisation, lorsque les Espagnols sont arrivés pour soumettre les Atacameños de la région. Ils ont coupé les têtes des leaders nationaux et les ont plantés sur des piques, à flanc de crête que l'on peut voir depuis notre point de vue. Ce nom rappelle aussi la mort de la culture, étouffée par le catholiscisme et les traditions espagnoles. La seconde théorie fait intervenir encore LePaige, qui en allant dans cette vallée rouge, se serait cru sur Mars. Cela se dit "Marte" en espagnol. En rentrant, comme il avait un accent pourri, les locaux ont compris "Muerte" à la place de "Marte", et comme LePaige avait l'air d'être un sacré original, ils ne se sont pas posé plus de questions. D'ailleurs sur Internet et dans les agences, on retrouve souvent le nom "Marte" et non "Muerte"! La troisième théorie qui ne tient pas debout est qu'il n'y aurait aucune vie dans cette vallée, ce qui est faux: il y a des plantes et des lézards. On trouve notamment l'herbe rica-rica, utilisée comme analgésique pour l'intestin, l'estomac et les règles depuis bien longtemps. Elle entre aussi dans la composition du Pisco Sour chilien. Rappelons que le Pérou et le Chili se disputent l'origine du pisco ... Ça sent la blague sur "ah oui,le truc péruvien, là?"

Et pour finir, nous allons voir un coucher de soleil sur la Piedra del Coyote, magnifique mirador d'où nous pouvons voir toute la vallée qui s'assombrit peu à peu. Saaid me fait remarquer que cette oasis avec les montagnes en arrière plan font penser au Sud du Maroc. Je ne m'en souvenais pas bien, mais maintenant qu'il le dit ...

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Jour 2: Les chamans taggeurs

Aujourd'hui, deux excursions dans la journée. D'abord, j'apprécie de ne pas avoir froid dans cet hostel, c'est vraiment très agréable. Le bus vient me chercher vers 8h30 et notre guide, Sophie, est française. Elle parle anglais et espagnol avec un fort accent, je pense qu'il est difficile pour les autres de la comprendre. Nous avons à nouveau les explications sur la Cordillera de la Sal, mais Sophie semble encore plus calée sur la géologie. Elle nous parle à nouveau de l'évaporation, qui forme une roche salée qui se nomme l'évaporite. Ce phénomène est très intense du fait que nous soyons au niveau du Tropique du Capricorne. Un peu plus de précisions sur la Cordillère Domeyko: c'est la plus grande réserve de cuivre du monde. Nous traversons la Vallée de la Patience, qui était un lac il y a bien longtemps, et où maintenant la NASA fait des essais lorsqu'elle veut mener une mission sur Mars. Ce désert, qui avant tous ces phénomènes tectoniques était recouvert par l'océan, est vraiment une autre planète!

Sur notre chemin, nous croisons de nouveaux camélidés sauvages: les guanacos. Ils vivent plus bas en altitude que les vigognes mais sont assez similaires. D'ailleurs, nouvelle étonnante : les lamas ne sont pas une espèce naturelle. Elle a été créée par l'homme au début de l'Antiquité, après avoir observé les comportements des deux animaux sus-cités. L'enjeu était de créer une nouvelle espèce qui ait le point fort du guanaco, la stature et donc la viande, et le point fort de la vigogne, la laine. Sans FIV, cela a pris des siècles et des siècles, il fallait être motivé, d'autant plus que cette race a une gestation d'un an. Mais c'est fou de se dire qu'ils ont réussi. Le lama est 3/4 guanaco et 1/4 vigogne, l'alpaga est 3/4 vigogne et 1/4 guanaco. Je ne sais pas comment on appelle l'espèce 50/50, en revanche.

Nous voyons aussi de petits autels, sous forme de petites maisons, pour les accidentés de la route. J'en ai vu partout auparavant mais cette fois ci nous avons des détails. Ces maisons s'appellent des animites, elles servent à donner un foyer à l'âme du mort, car lors d'un accident, elle n'a aucun endroit où se rattacher sinon. L'animite la plus connue du Chili, voire du monde, est celle de Paul Dubois, qui se trouve vers Valparaiso. Il s'agissait d'un tueur à gages, mais qui avait toujours proclamé son innocence. Le peuple chilien y croyant, ils ne voulaient pas laisser son âme errer, c'était trop injuste. Et peut être un peu dangereux de laisser le fantôme d'un tueur à gages se balader dans la nature? En tout cas maintenant, les gens viennent mettre des bougies près de son animite et lui demandent d'exaucer des prières. Je ne sais pas s'ils lui demandent la mort de gens, mais je pense que c'est fort possible.

Notre premier arrêt est aux pétroglyphes de Hierbas Buenas, lieu chamanique où des figures sont gravées dans la roche. Sophie nous raconte une longue histoire à ce propos, dont je n'ai pas tout retenu. Le plus important est surtout que cette culture chamanique vient de la civilisation Tiwanaku, et c'était un moyen de communiquer avec les Dieux, par le biais de visions provoquées par l'ayahuasca, la plante hallucinogène venue d'Amazonie. Il y avait un chaman par oasis, il avait donc un rôle d'oracle. Le premier chaman Inca, puisqu'ils ont repris l'idée, aurait vu dans sa première vision un condor, dans la seconde un puma, et dans la dernière un serpent, d'où la trinité Inca, par exemple. Je ne pensais pas que ces pétroglyphes seraient aussi bien conservés! Il est impressionnant de voir les diverses figures gravées, surtout des animaux sacrés, des lamas et quelques hommes.

Ces dessins vont raconter une histoire, particulièrement celle des caravanes du peuple Lican-antay (les Atacameños), qui a été chassé de son territoire par les glaciations, les sécheresses ... "Chili" signifie "là où le monde se finit". Des caravanes Incas passaient aussi par là, pour le troc qui était principal à l'époque. Ainsi, les Atacameños connurent des animaux tels que les iguanes et les singes, qui sont aussi gravés dans la roche, ce qui sorti de nulle part n'est pas un hasard. Le peuple s'est installé dans sa région actuelle vers 11 000 av.JC. On peut aussi voir des ictoglyphes, gravés et peints en rouge avec du sang de boeuf. Mais certains son tfaux, d'autres pas encore authentifiés.

Après un très bon petit déjeuner, copieux et savoureux, nous nous dirigeons vers la Vallée Arc-en-Ciel (Arcoiris) qui doit son nom évidemment à ses couleurs. Rouge pour le fer oxydé, jaune pour le soufre, vert pour l'oxyde de cuivre, un peu de bleu pour le cobalt, violet pour le manganèse. Toutes ces joyeuses couleurs étaient des couches de sédimentation qui ont été plissées et compressées à cause de la plaque de Nazca entrée en collision avec la plaque Atlantique. C'est ce qui fait la différence d'avec l'Himalaya, qui n'est pas volcanique: la plaque de Nazca a des volcans. Ici, c'est le paradis des géologues! Sophie nous montre aussi du pingo-pingo, une plante que l'on peut prendre en infusion contre les infections urinaires et aussi contre les douleurs menstruelles, et que l'on brûle lors des funérailles pour guider les esprits. Il y a là aussi des troupeaux de lamas, et nous apprenons l'origine des petits bouts de laine dans leur pelage: c'est une cérémonie de fertilisation.

Nous revenons à San Pedro vers 12h30, je vais me reposer à l'hôtel et nous repartons à 15h pour aller à la Laguna Cejar et la Laguna Piedra. Notre guide s'appelle Rosio, elle nous explique une fois de plus le phénomène de l'évaporite. En arrivant aux lagunes, ce que je ne savais pas, c'est qu'il fallait prendre son maillot pour aller se baigner! Et le droit d'accès est de 20€, ça fait cher ... Mon maillot est encore à la laverie mais pas de regrets: malgré un cadre idyllique, l'eau est très très froide, et surtout très très riche en sel. Rien qu'en y trempant les pieds, non seulement ils gèlent mais le sel brûle mes piqûres de moustiques ainsi que ma peau en général. Je ressors très rouge! Saaid a le courage de se baigner en entier. Du coup, il flotte, bien plus que dans la mer. Il y a 40% de sel, à titre de comparaison la mer n'en a que 3% en moyenne. Nous ne nous attardons pas trop, et essayons d'aller voir les quelques flamants de la laguna. Mais il y en a peu car l'eau est trop profonde, et moi je ne vois rien.

Nous repartons, pour nous arrêter aux Ojos del Salar. Ce sont deux étangs parfaitement ronds.Je me balade un peu dans le Salar en évitant de casser toute l'évaporite. Notre dernier arrêt est la Laguna Tebinquinche, qui a la particularité d'accueillir une certaine bactérie qui dans quelques années, après les tests, pourrait avoir un effet antibiotique. Comme elle libère de l'oxygène, elle crée de petits coussins de sel sur les rives. L'eau ne bouge pas, elle est translucide, les montagnes et volcans se reflètent dans ce miroir naturel.

Rosio nous conte la légende autour du Licancabur et de la Quimal, "la Princesse". Le Laskar est le père de toutes les montagnes de cette partie de la Cordillère, et le Licancabur et le Juriques sont ses fils. Il y a un vide entre ces deux montagnes, et les autres. L'histoire veut que le Licancabur et la Quimal vivaient une romance. Mais le Juriques a commencé à avoir des vues sur elle. S'en est résulté un triangle amoureux et beaucoup de conflits. Alors, le Laskar a dû trancher. Il a envoyé une boule de feu sur le Juriques, qui a perdu sa tête (le sommet est plat, et Juriques veut dire "sans tête"). La Quimal a été condamnée à l'exil de l'autre côté du Salar, dans la Cordillère Domeyko. Mais à chaque solstice d'hiver, l'ombre de la Quimal vient toucher le Licancabur. C'est le seul moment de l'année où ils sont réunis. C'EST BEAU.

Le soleil commence à se coucher. Je n'étais pas à fond sur cette excursion, mais ils ont prévu un petit apéro avec un verre de Pisco Sour (un vrai verre, pas un petit fond), des chips, des cacahuètes, du fromage ... C'est super agréable! Nous retournons à San Pedro. Nous voulons réserver notre bus direct pour Iquique demain, mais comme nous sommes le 15 août, la moitié des agences est fermée, et ce fameux bus de jeudi est annulé. Nous allons devoir faire une correspondance à Calama mais là on ne peut rien acheter. Bon et bien, on verra demain.

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Jour 3: Le retour du froid

La journée commence tôt : debout à 6h pour un pick-up entre 6h30 et 7h. Aujourd'hui, nous faisons une longue excursion à la journée, et nous allons encore monter en altitude. On verra comment mon oeil s'en sort. Le trajet commence de nuit, et nous nous rendons à la Laguna Chaxa d'où nous pouvons voir pleeein de flamants roses! Mais il est un peu tard pour me rendre compte que le zoom de mon portable est pourri. Donc, il y a des photos, mais elles sont bof. Et il fait surtout très, très froid, et je reste dehors plus longtemps que dans le Sud Lipez. Même avec 5 couches, des gants, des collants chauds et des chaussettes, je me transforme en glaçon. Je ne sens presque plus mes doigts. Nous avons un petit déjeuner, mais il est sur une table dehors. C'est difficile de manger avec des gants, mais le café me réchauffe un peu les extrémités. Pour les pieds, je dois sauter sur place. Notre guide Adel nous fait un beau cours sur les flamants roses.

Ce sont donc une des espèces d'oiseaux les plus anciennes. Pendant longtemps, ils ont été chassés pour leurs plumes, leur viande et leurs oeufs (j'ai du mal à imaginer) et ils sont devenus espèce protégée depuis le 20e siècle. Ils couvent pendant l'été et les bébés naissent en septembre. Les mâles s'occupent aussi de leurs poussins, les flamants étant monogames avec un couple fait pour durer. Les femelles pondent un oeuf par an, on comprend donc l'enjeu de les protéger. Surtout que faire un nid devient de plus en plus compliqué avec l'activité humaine, d'où l'importance des réserves et le respect de leurs règles. Il y a ici trois types de flamants: l'Andin qui est le plus abondant, avec du jaune sur le bec et les pattes; le flamant de James qui est plus petit, plus rare, qui a de longues pattes roses, et le flamant chilien ("le plus intelligent" selon Adel car il a profité de l'évolution de l'espèce) qui a de plus longues pattes roses au bout et qui pour attraper le plancton riche en bétacaroténe qui leur donne cette couleur, il piétine le sol. Les deux autres se promènent pour faire bouger le plancton.

Une petite note sur le Salar également : à l'origine il y avait 1450 mètres de sel. Il était précipité par l'eau riche en minéraux qui s'écoulait des pentes andines. Il y avait alors formation de lagunas qui se sont ensuite évaporées, laissant le sel au fond, retenu par le lithium. D'ailleurs ici il y a des mines de lithium, fournissant 40% de la production mondiale! Ils peuvent l'extraire par évaporation. Je ne sais pas si les Chinois font pareil à Uyuni, en revanche.

Nous repartons dans la douce chaleur du bus, il était temps! Pour un trajet où nous allons monter en altitude. Les pentes sont en fait les cendres des volcans qui ont durci. Sur le chemin, nous voyons encore des vigognes, mais aussi des suris, sorte d'autruches normalement difficiles à voir, et aussi des vizcachas, sorte de croisement entre un lièvre et un chinchilla. Nous arrivons au terme de notre trajet à la Laguna Tuyaito, qui est actuellement le point le plus austral où je sois allée. Puis nous nous dirigeons vers les Piedras Rojas, dont la roche s'appelle la Tova, et résultant d'éruptions riches en fer oxydé, qui donne donc une couleur rouge à ces coussins pierreux. Il fait toujours froid, mais je m'en sors bien pour prendre des photos, je m'aventure même sur la lagune gelée pour faire un selfie. À propos, on parle de "lagune" et non de "lac" quand aucun fleuve n'en sort. On en apprend, des choses, ici!

Maintenant, nous redescendons en contournant le volcan Miñiques. Lui, il tire son nom de l'auriculaire. Le village de Socaire, au pied de 5 volcans, les a nommés comme les doigts de la main: Tumisa, Lejla, Chiliques, Miscanti, et ironie du sort le dernier est le plus grand. Nous continuons à admirer le paysage. ET SOUDAIN PAF un pneu crève. Le chauffeur tente de réparer le tout, mais il n'y parvient pas. Nous attendons 30 minutes dehors, pendant que le guide fait du stop pour nous, pour que les minibus des autres agences nous ramènent à Socaire pour manger. On y parvient avec environ 1 heure de retard. Puis nous redescendons, encore. J'en profite pour demander à Adel ce qu'ils font en cas d'éruption du Laskar, car on peut le voir fumer. En fait toute l'éruption va du côté argentin, donc, bon ... Nous arrivons à Toconao, un petit village dans une autre oasis, où nous nous promenons un peu, puis, retour à San Pedro. Cette fois ci, nous sommes plus chanceux pour les tickets de bus, donc départ pour Iquique et ses nuits à 13 degrés demain!

17
août

Iquique: la ville qui te retient

On s'arrache la vache! San Pedro a beau être joli, Francisca la réceptionniste a beau être géniale, le froid ce n'est plus possible. Mais on va l'affronter une dernière fois pour partir, vu que le bus est à 7h du matin. Nous partons avec la compagnie Turbus, et petit coup de stress, car j'espère qu'il part bien du terminal et non de l'agence qui est à l'autre bout de la ville, et ce n'est pas marqué sur le ticket. Mais c'est bon, aucun souci finalement. Au deuxième étage du bus, je m'octroie le siège de tout devant, car il n'y a pas grand monde. Il est temps de dire au revoir au Licancabur, à la Vallée de la Lune, à la Cordillère Domeyko ... Le paysage ne change pas beaucoup à mesure que nous nous éloignons de la frontière bolivienne. Des déserts bruns, des reliefs ... Le soleil se lève mais il fait froid dans ce bus. Au terme d'1h30, nous voici à Calama, et ses barres d'immeubles en plein milieu du désert. Il y a du vent, il fait encore froid ici. Nous n'arrivons pas dans le bon terminal, nous devons marcher une demi-heure pour y parvenir, sachant que le bus s'était arrêté devant mais que nous ne savions pas que c'était là. Cela a été l'occasion de voir un peu à quoi ressemblait la ville: à pas grand chose. Il y a tout de même quelques maisons colorées, et un paseo piéton qui fait penser à une ville espagnole actuelle.

Le bus pour Iquique part à 11h, nous nous installons confortablement. Je préfère voyager de jour aussi pour observer le paysage, mais là, je dois dire que j'ai raté mon coup car c'est toujours aussi désertique. De temps en temps, il y a une oasis et une ville ou village, mais je trouve que c'est relativement rare. Donc, le paysage est assez ennuyeux, finalement. On peut noter que les Chiliens sont très à cheval sur la sécurité des passagers, car il faut obligatoirement mettre sa ceinture de sécurité dans les bus (wow!), le code du travail stipule que les chauffeurs ne peuvent pas conduire plus de 5 heures, c'est affiché dans le bus avec un panneau électronique avec le nom du chauffeur et le nombre d'heures qu'il a conduit. La vitesse, aussi, car si l'on dépasse la limitation on est en droit d'aller engueuler le chauffeur et lui dire de ralentir. Luttons contre les mauvaises pratiques routières, c'était un message du gouvernement chilien qui ne fait pas confiance à son peuple et ne tolère que peu de fautes. Je commence à comprendre le concept de "pays le plus sûr d'Amérique Latine".

Nous sommes proches, nous faisons un petit arrêt dans la ville de Pozo Almonte et ses tags anti-avortement ... Chouette alors ... "quelle ironie que ceux qui sont contre l'avortement sont ceux qui soient nés"! Oui mais si on n'existait pas on ne serait pas là pour critiquer , et de plus je ne crois pas que ce soient nous qui aient demandé à naître, et tout le monde n'a pas la plus belle des vies, enfin bon. Le Chili a l'air presque aussi engagé dans le droit des femmes, ainsi que dans le diktat de ce qu'il faut qu'elles fassent, que nous. Il y a du féminisme et des extrémistes religieux, quoi. Après cet interlude nous continuons sur l'autoroute qui nous mène à Iquique, en passant entre les montagnes puis en amorçant notre descente.Je ne m'attendais pas à la vague de bonheur qui m'a submergée en voyant l'océan et la plage (jeu de mots!). Je sens la surexcitation monter en moi, à l'idée d'un climat qui va mieux me convenir. Si j'apprends à nouveau quelque chose sur moi actuellement, c'est que je ne suis définitivement pas une fille des montagnes. Pas trop longtemps en tout cas. C'est bon à savoir pour les prochains voyages! Le chef-lieu de la région de Tarapaca ne ressemble pas à une belle ville vue d'en haut, car il y a beaucoup d'immeubles comme toute bonne station balnéaire qui se respecte. Mais pas que: en arrivant et en marchant jusqu'à notre hostel, nous voyons au fil des rues que nous croisons, beaucoup de petites maisons colorées. Je suis ravie de ce parfum de tropiques, bien qu'il ne fasse pas chaud à proprement parler, il fait vraiment bon. Nous arrivons à l'hostel et c'est aussi un petit coup de foudre tant il fait accueillant et propice aux soirées. Il est presque au bord de la plage, alors, je fonce.

Ça fait longtemps que je ne me suis pas baignée dans le Pacifique, la dernière fois étant à Santa Monica en 2012. En Asie, c'était plutôt dans la mer. Je me suis baignée à Bayonne dans l'Atlantique en 2014. Mais apparemment, je n'apprends rien de mes erreurs. Parce que je fonce dans l'eau avec mes lunettes de soleil, sauf que la houle est vraiment forte. Au début ça va, mais les vagues sont de plus en plus violentes, je me prends l'écume sur la tête, je me fais emporter, je hoquette car j'ai du mal à reprendre ma respiration, je capitule et je me fais prendre dans le rouleau, j'arrive à me sortir du courant en luttant pour ne pas me refaire aspirer, et j'arrive à rejoindre le bord de l'eau. Adieu, mes lunettes de soleil ...Je garde espoir 15 minutes, je les vois même être emportées par un rouleau, comme agonisant, mais non elles ne sont pas rejetées sur la plage par les vagues. Beaucoup de coquilles de moules, par contre, ce qui n'aide pas car elles sont noires et ont la même forme que mes lunettes. Ça m'énerve un peu, j'aimais beaucoup ces lunettes de Madère, peu chères mais résistantes et stylées. J'avais dit à Isa "pour l'instant il ne leur est rien arrivé" et voilà, ça m'a porté malheur. Quel boulet, parfois ... Du coup je reste sur le bord et laisse les vagues m'atteindre , c'est moins dangereux. Et à défaut, je vais maintenant avoir des lunettes du Chili, ce qui est aussi cool, finalement. Je vais dans un grand centre commercial, ah ça, il n'y avait pas en Bolivie! Je trouve une paire et prends la promenade au bord de la mer pour rentrer. En chemin, je prends des churros avec du chocolat à une vieille dame. C'est si agréable de contempler le Pacifique! Les gens jouent au beach-volley, font de la relaxation, du foot, au coucher du soleil, alors que les bateaux deviennent ombres qui se découpent sur la baie.Il y a de gros oiseaux noirs dans les palmiers, qui sembleraient être entre le corbeau et le toucan. Ils font un bruit étrange, ils grincent. Mais je trouve ça fort rigolo.

Je rentre à l'hostel peu après 19h, et m'inscris au tournoi de ping-pong qu'organisent Sylvain, un Français, et Bart, un Hollandais. Saaid aussi va participer, ainsi que des filles de Lyon: Leonor, Claire, Marie. Et puis Sabrina, Bob, Dayana, Wandrille, Michaela de la réception, Valentin, et d'autres car nous sommes 16 en tout et je ne me souviens que de ces noms là car l'alcool a coulé, pas à flots mais pas mal en tout cas. J'ai perdu, gagné, perdu, nous avons bien rigolé, puis nous avons fait un beer pong où nous avons lamentablement perdu, car c'est dur, en fait; puis vers 1h30 du matin nous sommes allés sur la plage car les garçons et Sabrina voulaient faire un bain de minuit. Un chien dans la rue, qui voulait s'incruster dans l'auberge, nous a suivi et a foncé s'éclater dans les vagues, sans avoir peur de rien. Côte humains, il faut qu'ils fassent attention, quand même, c'est dangereux quand on est en état d'ébriété, des gens sont morts comme ça ... Mais tout le monde s'en sort vivant! Et content! Et souriant! Sabrina veut aller dans un bar, mais la majorité des gens veut aller se coucher. Une bonne douche chaude (toujours aussi important de le préciser!), et au lit, fort heureuse.

En fait, j'ai envie de rester ici, je regrette d'avoir réservé à Arica. J'ai envie de faire du parapente, d'aller visiter la ville minière fantôme, de rester avec ces gens cools. J'ai cherché des excuses pour annuler ma réservation et la décaler d'un jour sans qu'on ne me charge, mais au final, je n'ai pas osé. Quelle erreur!

Parce que le matin, quoi de plus agréable que de se faire réveiller par le bruit de l'océan? Le matelas est si confortable, la couette parfaite, il fait doux ... Alors qu'est ce qu'il m'a pris à midi de me dire "je vais aller visiter Humberstone, la ville minière fantôme, et revenir pour prendre mon bus pour Arica". Donc, vers midi et demie, je me mets en route pour cette visite.

Le minibus me dépose au milieu de la route, sous le soleil écrasant alors que la météo sur Iquique était plutôt nuageuse.Je dois marcher 5 à 10 minutes dans ce désert avec le backpack pour atteindre la ville. Originairement La Palma, elle est construite en 1872 sur un gisement de salpêtre. De 1878 à 1884, sous la Guerre du Pacifique, elle passe de propriétaire à propriétaire. En 1930, suite au crack boursier, le site est fermé, puis réouvert en 1934 sous le nom de Santiago Humberstone, et décline en 1960, où il est ensuite abandonné. Le décor délivre une atmosphère particulière, avec ses maisons aux toits de tôle rouillée. Il n'y a en plus pas grand monde, et on se croirait dans un décor de cinéma. Je ne reste pas longtemps sur place puisque je doisaller prendr e le bus au terminal. Il y a un colectivo toutes les 30 minutes au bord de la route, donc quand j'en vois un, je cours pour l'attraper! Avec le sac, la chaleur, etc ... Sous l'effort, la veine de mon front ressort, c'est un peu flippant.

Retour à Iquique, petit passage par le centre ville, arrivée au terminal, je prends mes tickets pour Arica. Et nous partons: j'ai le sentiment d'avoir fait une grosse bêtise, finalement.

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Arica: le point noir du voyage

Et oui c'était un fort mauvais pressentiment. Je m'attendais à une ville bien plus sympathique en ce qui concerne Arica, mais à côté d'Iquique, c'est profondément nul. Heureusement à l'hostel il y a mon nouveau pote Wandrille qui reste deux nuits aussi, et avec qui je repartirai vers Arequipa.

J'ai eu un très mauvais feeling avec cette ville, de par la déception qu'elle m'a procurée car pour un spot de surf il n'y avait aucune vague, sur une plage laide. Inutile de préciser que je m'en suis voulue à mort d'avoir pris une si mauvaise décision. J'ai passé une journée là pour donner une chance à la ville, mais non, je la boude, je trouve tout laid, je suis déprimée et je rumine mes occasions ratées. Je prends toujours les choses bien plus mal quand je peux m'accabler. Donc et bien peu d'écrits mais quelques photos, et je me tire d'ici dès que possible pour oublier cette si mauvaise expérience.

Il en faut au moins toujours une par voyage, pour apprendre de ses erreurs.

Comme vous pouvez le constater, article assez court, que j'ai difficilement terminé de rédiger car il soulève des sentiments pénibles, beaucoup de regrets vis à vis de choses que j'aurais pu vivre, et cette impression d'avoir complètement raté cette partie du voyage, ce qui m'a gâché la fin du Chili. Alors que ce n'est pas si grave, au final, je pense que la fatigue aide. Mais je me rattraperai à Arequipa, pas d'inquiétude. En complément, un petit topo sur le pays!

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Conformément à mes impressions, le Chili est le pays le plus développé de toute l'Amérique Latine. Il n'y a qu'à voir l'état de ses routes, son niveau de vie, sa sécurité ... Il s'étend sur 4300 km, a une faible densité de population, possède la fameuse Ile de Pâques et aussi un territoire de l'Antarctique.

Il doit surtout sa richesse à l'exploitation de ce fameux salpêtre, avec des sociétés britanniques après son indépendance. Le pays va cependant voler l'accès à la mer de la Bolivie pendant la Guerre du Pacifique, et va prendre tout le territoire allant d'Antofagasta à Tacna, cette dernière province étant ensuite restituée au Pérou.

Comme souvent en Amérique du Sud, ça a été un peu le bazar avec beaucoup de coups d'État, même si c'est bien moins impressionnant que la Bolivie. La crise économique d'après le Jeudi Noir de 1929 est à son paroxysme. En 1938 arrive au pouvoir un président radical (Cerda), allié au Front Populaire, qui prend beaucoup de mesures sociales pour son pays, permettant son avancée.

Le nom de Salvador Allende ne vous est peut être pas inconnu: il est élu en 1970. C'est le premier socialiste du Chili, et il renforce l'économie du cuivre, et nationalise beaucoup d'entreprises. Sauf que le cours du cuivre chute et le pays se trouve plongé dans, à nouveau, une grande crise économique. Il y a pas mal de révoltes de la population face aux décisions d'Allende, qui essaye de renforcer son soutien avec des milices pro-gouvernement. Mais l'une de ses pires décisions a certainement été de mettre Pinochet à la tête de l'armée, ça lui aurait évité de se faire assassiner en 1973 et plonger le pays dans la dictature. Des doutes planent toujours sur l'implication des États-Unis dans cette histoire ... Une vraie catastrophe car la liberté de la presse est abolie, un couvre-feu est instauré, la littérature de gauche est brûlée, les gens sont exilés, tués ou faits prisonniers. Mais cette situation ne peut pas durer, Pinochet veut rester "légitimement" au pouvoir. Il organise un référendum pour modifier la Constitution, comme Evo. Et comme à Evo, on lui a dit non! Il doit céder son poste et organiser le retour à la démocratie. Le climat politique qui s'en suit est moins tendu, seulement des histoires de "Pinochet doit-il être soutenu", mais il meurt en 2006. Depuis, Michelle Bachelet est au pouvoir. Malgré ses tentatives, l'avortement reste toujours interdit ...

Il y a énormément d'immigration au Chili: des Espagnols bien sûr, mais aussi beaucoup d'Allemands. Certaines bières locales ont des noms germaniques, et on ressent très fort cette influence dans la rue quand on traverse au passage piéton et que les voitures s'arrêtent. Systématiquement. Ça fait très bizarre car même en France c'est plus chaotique. Le pays est aussi bien plus propre que ses voisins. La diversité de l'immigration occidentale rend la formation d'une identité culturelle bien difficile. Je m'étonnais au départ de ne pas retrouver du type quechua comme au Pérou, avec les pommettes saillantes et les cheveux raides et très noirs, peut être un peu plus d'Aymara bolivien avec des visages plus ronds et des cheveux plus bruns que noirs (logique vu que cette région était bolivienne!). Peu de look plus traditionnel en revanche. Saaid avait rencontré un Abdala, lui avait demandé d'où il venait: il ne le savait pas. Les Chiliens essayent de se construire une solide identité, en passant par le fait qu'il ne faut surtout pas les confondre avec leurs voisins! Et le Pisco est définitivement chilien, bien sûr.

Une semaine c'était bien peu. Mais si ce n'était pour les paysages, on se croirait en Occident dans un tel pays. J'ai beaucoup apprécié la gentillesse des commerçants, des gens en général, ce qui m'a assez étonnée, arrivant de la Bolivie. On s'habitue aux prix, même si l'on est taxé de partout. Ce pays me laisse une impression de Dolce Vita, où l'on peut se la couler douce. Un pays tout de même intéressant, et je suppose que si je retourne un jour en Amérique du Sud, j'aimerais mieux le connaître, pourquoi pas la Patagonie et l'Ile de Pâques? Merci pour l'accueil, Chili!

20
août

Vite, vite ... Il est temps de partir et de laisser ce mauvais ressenti derrière soi. J'ai prévu de faire le plus rapidement possible, mais je dois tout de même attendre que Wandrille se réveille. Nous quittons l'auberge vers 9h, et nous rendons au terminal où nous optons pour un taxi qui va nous emmener à Tacna, côté péruvien. Même s'il coûte 4000 pesos contre un bus à 2000, l'avantage est que nous ne sommes que cinq, le passage va donc être rapide. Oui, depuis Desaguadero je suis toujours méfiante. Arica n'est qu'à 20 minutes du poste de frontière, mais à notre arrivée nous devons attendre quelques minutes, le temps que les militaires péruviens lèvent le drapeau. Ils sont fiers comme Artaban, provoquant presque le Chili. Cela ne nous empêche pas de fredonner le thème de la 7e compagnie quand nous les voyons passer, ce qui fait bien rire notre chauffeur. Ensuite, ce dernier nous dit de nous dépêcher d'aller dans la file pour passer la frontière avant que tout le monde du bus n'arrive. Et effectivement, c'est d'une rapidité bluffante, particulièrement car le comptoir pour le tampon de sortie du Chili est adjacent à celui de l'entrée au Pérou. Ils se passent mon passeport d'un comptoir à l'autre, c'est d'une facilité déconcertante, à tel point qu'on est en droit de se demander pourquoi ils ne font pas ça systématiquement! Nous reprenons place dansle taxi, et nous remontons le temps: deux heures de moins au Pérou, allilentu les quechuas! Il est l'heure à laquelle je me suis réveillée. Changement de l'état de la route, aussi, c'est bien moins lisse de ce côté là. Il y a aussi plus d'agriculture, cela paraissant moins sec côté péruvien. Après un peu de trajet, nous arrivons à Tacna au terminal de bus, et nous pouvons partir à Arequipa pour 9h. Oui c'est étrange ce changement d'heure! Mais c'est pratique. On embarque donc, et le conducteur nous passe des films pendant toit le trajet: Lucy, puis une comédie américaine avec une apparition surprise de Norman Reedus (Daryl de Walking Dead) et de Chevey Chase (Pierce de Community) ce qui a un peu relevé le niveau, puis John Wick 2 ... Le trajet est pénible sur la fin, surtout quand nous rentrons dans l'agglomération d'Arequipa, car ça n'en finit plus. Nous arrivons avec une bonne heure de retard. Wandrille me montre où prendre les colectivos, ce qui est plutôt utile.

Je suis arrivée avec un jour d'avance, et j'ai réservé pour le 21 au Dragonfly Hostel. Mais j'avais hésité avec un autre, le Wild Rover, qui en fait avait l'air aussi sympathique. Donc, je décide qu'il faut tester les deux, et je me dirige vers ce dernier. En plus il a une piscine, un bar ...Je suis plutôt d'humeur à faire la fête. Wandrille me suit, et nous buvons un verre ensemble avant qu'il ne parte prendre son bus de nuit. Moi, je prends à manger et je ne me couche pas très tard, puisque je subis le petit décalage horaire!

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Jour 1: Bend the knee

La matinée commence doucement au bord de la piscine, mais je suis d'humeur plutôt timide, surtout que tout le monde est déjà en groupe et en pleine conversation. Donc, je m'en vais visiter le couvent Santa Catalina, le plus grand du monde (non on ne fait toujours pas dans la demi-mesure au Pérou). C'est une ville dans la ville qui fait au moins trois cuadras, dédiée à Sainte Catherine de Sienne, construit en 1579 pour 450 religieuses qui n'avaient aucun contact avec le monde extérieur jusqu'en 1970! Aujourd'hui il y en a une petite vingtaine. Ce sont des filles de familles nobles, mais aussi des métis plus pauvres qui étaient donc dans des cellules plus pourries. Le couvent a souvent été touché par les séismes, et en partie détruit, mais les nonnes ont pu le reconstruire. Elles vivaient recluses, mais elles avaient des contacts entre elles pour manger, prendre le bain ... Mais de ce que j'ai compris, elles ne parlaient pas beaucoup. Il fait très beau et chaud aujourd'hui, ce qui rend la visite de ces ruelles colorées très agréable, même s'il est étrange de se dire qu'il y avait tant de répression dans un cadre si idyllique.


Je dois maintenant prendre une décision : est-ce que j'annule ma réservation au Dragonfly en ayant des frais, ou bien est-ce que je reste au Wild Rover qui a l'âme festive et qui organise un tournoi de beer-pong le soir même? Je vais faire un saut au second hostel pour voir tout de même ce qu'il en est. Je me présente, je demande à visiter ... Et cette fois-ci je suis mon instinct.Je dis "à tout à l'heure" à la réceptionniste pour annuler une heure plus tard ... Pardon, ce n'est pas poli, mais c'est difficile de gagner contre un bar et une piscine. Alors, je retourne au Wild Rover pour garder mon lit pour ce soir, prendre un bain de soleil, tenter de me baigner dans la piscine qui est cependant bien froide (une minute de baignade!) et manger, car j'ai la flemme de me rendre dehors, ce qui va être une constante de ce séjour. Pendant ce déjeuner, une jeune fille m'aborde et engage la conversation. Elle s'appelle Teja et elle est slovène. Elle est arrivée en bus ce matin tôt mais elle doit attendre 14h pour le check-in. Je suis contente d'avoir quelqu'un à qui parler! Mais comme elle a besoin d'une sieste, je pars l'après-midi de mon côté.

Je vais visiter le musée Sanctuarios Andinos, où se trouve la momie de Juanita, une petite fille inca de plus de 500 ans. Elle a la particularité d'être à moitié congelée, ce qui a rendu sa conservation plus facile durant toutes ces années. Pas le droit de porter un appareil photo, cependant, mais vraiment pas: il faut laisser toutes les affaires dans un casier.

La visite commence par un vieux film des années 80 certainement, pour nous mettre dans le contexte.Juanita avait probablement 12 ou 13 ans lorsqu'elle a été sacrifiée. Si vous vous souvenez de l'article du Machu Picchu, alors vous avez en tête la signification des rituels incas. Ils ne tuaient pas des enfants juste pour le fun, mais pour apaiser les Dieux, incarnés par le Soleil (Inti), la Terre (la Pachamama), l'Eau (la Pachatata), Wiracocha le Dieu Créateur, etc. Arequipa est une région très volcanique, la ville est nichée au pied des volcans Misti, Picchu Picchu et Chachani (celui qui ressemble au Canigou sur les photos) et l'on en trouve d'autres un peu plus loin, notamment l'Ampato où les archéologues ont trouvé Juanita. Quand on voit les volcans entrer en éruption, ou encore les tremblements de terre fréquents, il y a une certaine logique à considérer ces phénomènes naturels comme divins. Ainsi, pour le sacrifice de Juanita, la troupe a-t-elle dû gravir les pentes de l'Ampato. Les archéologues témoignent de leur difficulté à le faire, du fait du froid et de l'altitude. Mais pour les Incas, c'est une promenade quotidienne, bien qu'il y ait un peu de défi dans l'ascension pour laquelle ils n'utilisaient que des cordes et des pieux. Pour Juanita, c'était certainement un grand honneur que d'avoir été choisie pour habiter avec les différentes divinités, aussi malgré son lourd attirail, elle devait être très motivée pour monter jusqu'en haut. Elle prenait certainement beaucoup de feuilles de coca et d'anesthésiant, aussi. Mais a-t-elle compris ce qu'il se passait, a-t-elle eu peur devant la mort lorsque le chaman lui a fracassé le crâne avec une pierre et laissée ainsi dans le glacier qui devait être sa dernière demeure? Maintenant, elle en a une nouvelle, où nous sommes invités à entrer à la fin de ce petit film. Juanita se trouve dansune pièce noire, dans un caisson de verre où elle est gardée à température adaptée. Il n'y a pas de lumière sur elle, il faut plisser les yeux pour l'observer, et s'habituer à l'obscurité. Elle a une toute petite tête, elle est recroquevillée. Elle avait été placée en position foetale selon le rituel, mais maintenant elle est assise. La peau de son visage ressemble à un parchemin blanc, et elle n'a plus de lèvre supérieure. Son cou est toujours pris dans la glace. On peut dire qu'elle est pour le moins intrigante! Je mets donc une photo trouvée sur Internet pour tout de même vous donner une idée d'à quoi elle ressemble,sans quoi ce serait dommage.

C'est une photo récente. Normalement, elle est dans un caisson hyperbar et très froid pour la conserver. 

Après un passage au marché San Camillo pour goûter un jus de chirimoya, ma mission shopping commence. Cela fait un mois que je répète "j'achèterai tout à Arequipa" pour ne m'encombrer de souvenirs qu'à la fin. Et bien, il est temps de tenir sa promesse. Je trouve un grand magasin où il y a de tout, où je peux heureusement payer par carte, et où j'achète ... Vraiment beaucoup de choses, j'achète même un sac spécial pour tout mettre dedans. Cela terminé, je me promène encore un peu dans la ville, pour passer devant l'église de la Recoleta que j'ai la flemme de visiter, et monter au mirador Yanahuara,sous la menace d'une fumée noire ...J'ai envie de dire comme la dame au Machu Picchu "y'a un volcan par là?", bien qu'ici ça ait 10 fois plus de sens. Mais je pense que c'est trop proche de la ville et dans la mauvaise direction pour que ce soit une éruption, dommage. Le mirador en lui-même n'est pas mal mais ne casse pas trois pattes à un canard.

Je rentre et retrouve Teja au bord de la piscine qui parle avec Alex, un Allemand, et un Australien dont j'ai oublié le prénom malgré le fait qu'ils soient marqués sur nos bracelets. Mais Alex a un rencard à 20h donc il nous quitte. Teja doit se lever à 3h du matin pour faire le Colca Canyon dans la journée de demain, donc elle ne va pas boire. Heureusement les barmans me trouvent un partenaire de beer-pong pour le tournoi, Abhi, mais à condition que je sois la seule à boire mes verres car il a une migraine. Et bien soit, c'est une bonne excuse! Nous gagnons notre premier match contre John le barman et un Anglais, en étant tous deux au top de nos capacités, oui, même moi, je m'en étonne d'ailleurs. Le second match nous oppose aux autres Anglais qui se sont entraînés toute la journée. Nous gagnons lorsque je marque un point décisif! Génial! À ce stade je suis la seule fille qui reste! Nous sommes en finale mais ... Nous perdons à deux verres près. Nous n'aurons pas les tee-shirts, mais tout de même qu'est ce que je suis contente! Et en passant aux toilettes avant d'aller au lit, je croise un Français : Cyril. Vous savez d'où il est? De Montpellier, depuis un an! Bon, comme je ne suis plustrès sobre, nous allons nous retrouver demain matin pour aller faire la visite guidée gratuite de la ville.

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Jour 2: Rapides un peu lentes

Hier soir, jeune inconnue ignorée, et ce matin au petit-déjeuner, star populaire du beer-pong, tout le monde me salue et me félicite pour mes matchs d'hier. C'est trop rigolo, je me croirais presque dans un film américain cliché! Mais pas le temps de signer des autographes ou de leur faire ployer le genou, je retrouve Cyril et son ami Pierre pour la visite. Notre guide Clara nous emmène devant la cathédrale où nous pouvons voir la compétition annuelle du taillage de sillar. Il s'agit de la pierre volcanique blanche avec laquelle sont faites les habitations du centre d'Arequipa. Elle est d'ailleurs nommée la Ville Blanche (comme Sucre) pour cette raison, et pour une autre moins glorieuse. Il n'y avait que les Espagnols qui habitaient le centre ville, les indigènes étant relégués à la périphérie. Le "blanc" viendrait donc aussi de la couleur de leur faciès. Arequipa la ville raciste. Un peu plus rigolo maintenant, Clara nous montre la petite statue du joueur de trompette sur la fontaine centrale. Il s'appelle le "Turututu". En quechua, beaucoup de mots viennent des sons que la chose produit, ainsi un bébé s'appelle un "wawa". Nous continuons avec une autre église, où la guide nous demande si nous connaissons les catastrophes naturelles qui frappent Arequipa. Sauf qu'au lieu de "disaster" j'ai compris "monastery", j'ai répondu "Santa Catalina" et ça a fait bien rire Cyril, moi aussi après coup quand j'ai compris mon erreur. Sur les murs de l'église, on retrouve la Trilogie Inca: le condor qui est le messager des Dieux et représente leur monde (Hanan Pacha, le monde d'au-dessus), le puma pour notre sol, monde des vivants (Kay Pacha, le monde d'ici), et le serpent qui représente l'infini pour le monde des morts (Ukhu Pacha, le monde d'en-bas), faisant partie de la Cosmovision inca. Nous allons ensuite au marché San Camillo où Clara nous montre tous les fruits, les céréales, les boissons, et un pain un peu spécial avec une tête de bébé dessus. Pour qu'un couple ait un enfant, ils en achètent un, fille ou garçon, le nomment, le bercent, etc ... Elle nous présente aussi le "frog juice": autant souvent les jus ont des noms bizarres comme "griffe de chat" (uña de gato) car la plante a cette forme, autant non, là, il s'agit d'une vraie grenouille qui aurait des vertus pour la force, la concentration, l'attention etc. (on devrait donc en mettre dans la Ritaline), pour booster ses capacités en général. Nous retournons ensuite à la Plaza de Armas, mais nous avons perdu Pierre entre temps ...

Comme nous ne le retrouvons nulle part, Cyril et moi nous partons repérer nos bus respectifs pour la suite du voyage, et les réserver. Sur le chemin, nous mangeons des oeufs de caille. Avant de s'installer dans la meilleure ville de France, Cyril a travaillé en Afrique et a passé du temps en Israël, c'est donc très intéressant de parler avec lui de ses ressentis mais également de toutes ses connaissances en histoire et politique. Je suis de retour juste à temps pour partir au rafting à 14h! Je suis avec une New-Yorkaise et deux Québecquois qui ne sont pas à mon hostel. Notre premier arrêt est pour nous équiper, avec des combinaisons et des chaussures spéciales qui donnent l'impression agréable et désagréable en même temps de marcher dans de la gelée. Gilets de sauvetage, casques ... On fait encore un peu de route et on arrive au point de départ sur le Rio Chili. Rien à voir avec le pays qui ne s'écrit comme ça qu'en français, ici "chili" veut dire "froid" en quechua, dommage quand on voit le climat si clément d'Arequipa. Nous apprenons les noms des mouvements et positions que le guide va nous crier, et c'est parti! Bon, c'est rigolo, mais je dois admettre que je pensais que ça irait plus vite et que j'aurais plus de sensations fortes, je n'ai toujours pas fait le deuil du parapente. Mais bon quelques petites frayeurs sur les rochers! Et le guide nous crie les instructions au dernier moment donc nous rigolons et c'est tout de même sympathique! Le Québecquois lui dit cependant qu'il aimerait que le bateau se retourne ... Aussi quand le guide nous dit "tous à gauche" je le vois venir gros comme une maison mais je dois jouer le jeu, surtout que les filles n'ont pas compris ce qui allait se passer. Et plouf! Oh! Qu'elle est froide! En plus nous ne sommes pas tout de suite au soleil. Encore quelques minutes de descente, et ça y est c'est fini, retour au bercail. En revanche ils ont filmé une vidéo, ils ont fait un petit montage, je trouve ça super!

Au retour, je croise Teja qui me propose de manger ensemble, et j'embarque mes deux Français avec nous. Le repas n'est en revanche pas terrible, mais pas cher. Puis la soirée continue, au bar, encore! Teja est fatiguée, mais avec Cyril nous rencontrons pas mal de monde, dont Max le barman québecquois, on danse avec eux, on s'éclate! Il devait y avoir un karaoké, mais au dernier moment tout le monde s'est défilé et a préféré jouer au beer pong ...

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Jour 3: Comment se faire adopter

J'avais effleuré l'idée de faire un trekking dans le Colca Canyon. Mais c'était au début du voyage, je ne savais pas qu'il fallait se lever à 3h du matin et franchement, je préfère faire la fête. J'avais donc opté la veille pour la version flemmarde, c'est à dire départ à 8h en bus pour deux jours sans randonnée, oui c'est un peu abusé de me laisser aller comme ça. Le départ de l'hostel est plutôt étonnant puisqu'il se fait à l'heure. Mais vraiment, pile à 8h, et encore c'était moi qui était en retard. Le reste des pick-ups aux hôtels prend un peu plus de temps. Nous nous arrêtons dans une boutique où je goûte enfin la chicha morada (la boisson de maïs violet) et c'est vraiment très bon. Pour faire passer ma petite gueule de bois (petite, mais nous allons passer à 4900m d'altitude, outch j'avais oublié) je prends des feuilles de coca avec de la mint, l'espèce de pierre aromatisée pour donner du goût. Sauf qu'apparemment celle du Pérou est bien plus forte qu'en Bolivie car je commence à la mâcher avec les feuilles juste au moment où la guide, Laura, nous dit qu'il ne faut pas qu'elle entre en contact avec la peau. Effectivement, ça envoie une petite décharge électrique, et je sens ma bouche tout de suite anesthésiée quand je cale les feuilles en haut de ma gencive. Je préfère encore les manger, finalement.

Nous passons près de la plus grande usine du Sud du Pérou : Yura, les ciments faits à partir du sillar. Laura dévie sur la politique péruvienne, en parlant des mineurs, des foreurs etc. Tout a été privatisé, notamment par Fujimori, d'origine japonaise comme son nom l'indique, qui a été le 7e Président le plus corrompu de la planète. Il a été au pouvoir de 90 à 2000, a mis fin aux guérillas du Sentier Lumineux, parti communiste cependant terroriste. Mais malgré cela, il a baigné dans des affaires de tueries pour justifier la neutralisation du Sentier Lumineux, ce qui devait bien l'arranger. Il fait sortir le pays de la récession en dévaluant la monnaie de 200% (d'où le "nuevo sol" car comme au Chili il y avait plein de zéros avant), la croissance reprend mais seulement pour les riches, l'écart se creuse avec les pauvres. Fujimori et sa famille sont scandaleusement riches, ils devaient faire au moins la moitié du PIB du pays ... Il a fait un coup d'Etat contre son gouvernement pour obtenir plus de pouvoirs, a fait stériliser des femmes indigènes sous la contrainte dans le cadre d'un programme d'eugénisme, et avec toutes ses affaires de corruption, il doitfuir le pays en 2000, vers le Japon. Il a été accueilli en France également, c'était Chirac à ce moment là. Il y a encore des Péruviens qui sont partisans de son retour, comme on peut le voir sur les tags.

Nous passons au mirador des volcans, qui est donc le point à 4900m d'altitude. Des gens ne se sentent pas bien, et méthode inédite pour moi, Laura nous fait sentir de l'alcool à 96°, ce que je trouve mieux que les feuilles de coca. De là nous pouvons voir un beau panache de fumée venant du volcan Sabancaya, actif depuis plus d'un an. Je me demande si c'était de ce volcan dont parlaient les biterrois de Puno, mais il n'y a pas de quoi s'inquiéter. Il a dû s'énerver un peu après la secousse mais personne n'a paniqué comme les gens qui n'ont pas l'habitude de ces forces de la nature. C'est comme s'il pleuvait à San Pedro comme il peut pleuvoir chez nous, ce serait l'hécatombe.

Nous descendons ensuite dans la vallée du Colca proprement dite, en direction de Chivay, un mignon petit village niché au creux du début du canyon. C'est là que nous allons déjeuner. Il s'agit d'un buffet, mais il n'est pas extraordinaire. En revanche ce qui l'est plus, c'est la famille de Français qui m'a invitée à manger avec eux: Thierry et Marie, et leurs enfants à peine plus jeunes que moi, Julie et Adrien. Ils sont vraiment très accueillants!

Nous allons ensuite dans nos hôtels respectifs pour quelque temps, avant de partir vers les sources chaudes. Le cadre est chouette, au milieu des montagnes! Et l'eau chaude fait du bien, bien que je sois un peu choquée par le fait qu'ils laissent couler l'eau en permanence. J'avais remarqué cela pendant nos arrêts aux toilettes: certains robinets d'eau restaient ouverts. Je ne trouve pas que ce soit très écolo mais il doit y avoir une raison à cela.

Après notre bain délassant, ils nous ramènent à l'hôtel avant le repas. Moi je suis toute seule dans le mien, dans une chambre double mais personne n'est avec moi. Je m'attendais à un hôtel un peu pourri, mais je dois admettre qu'il est assez confortable. Bon, pas de chauffage, mais de l'eau chaude et une bonne Wifi. Si ce n'est qu'avec Internet, je me suis pris un petit coup de flip. En effet, navigant sur Facebook, je suis tout à coup redirigée vers la plateforme Bitel, sans que je ne puisse rien y faire. Et cette sympathique entreprise m'oblige à choisir un mode gratuit, ou un mode ... Payant! Quoi! Le Facebook payant ne serait donc pas un mythe? Je suis censée le choisir pour voir les photos et vidéos des autres, et être redirigée quand je clique sur un lien! Quel est ce scandale? Quelle est cette sorcellerie? Je cherche sur Internet et effectivement, c'est d'usage ... Inutile de dire que je suis profondément choquée. Mais plus tard quand je suis rentrée sur Arequipa, plus de traces de cette pratique. Je me demande si l'hôtel n'utilisait pas une clé 4g ou quelque chose dans le genre.

Je profite de la pause temps libre pour aller me promener dans le village car la place n'est pas loin. Il y a toute une rue avec des statues plutôt réalistes, qui décrivent des personnages et des danses.

Puis je ne tarde pas trop, vu la ponctualité du bus. La guide nous emmène dans un restaurant où nous allons voir des danses et des musiciens traditionnels. Aujourd'hui je repose mon foie, donc je commande un jus de Sancayo: c'est le fruit du cactus et c'est plutôt bon. Pour manger, une soupe au potiron (oh, que ça fait du bien!) et un croustillant de truite. Les danseurs nous invitent, la jeune dame commence par entraîner Adrien et Marie. Puis lorsque je vais prendre une photo de la performance suivante, où l'homme porte l'espèce de cagoule bizarre et les deux ont des sortes de fouets qu'ils font claquer sur le sol, c'est évidemment là que je me fais inviter. Au départ tout est normal, mais il me fait allonger par terre ... Il met un chapeau sur ma figure et fait claquer les fouets à côté de moi, oh merde, je suis tombée sur un truc sado-maso! Ensuite il me porte sur son dos, me fait tourner, me fait donner des coups de fesses à la dame d'à côté ... Le pire c'est que le plus dérangeant dans tout ça est que je peine à respirer, mes poumons et mon diaphragme sont comprimés par ses épaules, expliquant la rougeur de mon teint sur les photos - non étrangement ce n'est pas le reste car en vrai c'est plutôt drôle. Libérée, je retourne manger et n'accepte plus beaucoup de danses. Thierry fera celle du condor, portant un poncho noir à franges blanches alors que le danseur a carrément un masque. Puis la soirée se termine, et au dodo car demain nous devons nous lever à 6h du matin pour continuer notre visite.

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Jour 4: La magie des Condors

Ça va, ce n'est pas trop difficile, il fait un peu frais mais "still less cold than Uyuni", ma nouvelle expression favorite. Nous stoppons à quelques miradors du canyon en ayant des explications sur les peuples locaux.

Deux peuples, ensuite dominés par les Incas, vivent ici: Les Coyawas, fils du volcan Coyawata, et les Cabanos, fils du volcan Hualca Hualca. Deux ethnies dans une même vallée, vous voyez venir les rivalités. Ils pratiquaient la déformation du crâne, plutôt réservée aux nobles, les premiers vers le haut et les seconds vers l'arrière, pour se différencier. Mais quand les Espagnols sont arrivés ils ont aboli ces traditions. Cependant, pas question d'être pris pour un autre! Les femmes Coyawas ont alors fabriqué des chapeaux blancs, les Cabanos des chapeaux colorés. Une fleur pour le célibat, deux quand elles sont mariées. Ces pratiques sont encore en usage chez les vieilles personnes, mais plus beaucoup chez les jeunes. En France, qu'est ce qu'on aurait la pression avec un chapeau de célibataire! Laissez moi vivre dans l'anonymat et dans la volonté de ne pas me marier! Avant ces peuplades, il y avait la culture Huari, mais elle a commencé à décliner suite à un Niño très dévastateur. Dans ces contrées on trouve aussi la cité de Cal Al, la seconde civilisation la plus ancienne du monde après les Mésopotamiens (je ne sais pas pourquoi les guides formulent souvent "c'est la chose la plus (insérez l'adjectif désiré) du monde" pour ensuite préciser qu'il y en a une autre qui gagne le titre ... Comme le Colca Cañon d'ailleurs, mais ça c'est moins de leur faute. C'était le canyon le plus profond du monde avant que les appareils de mesure deviennent plus performants et qu'un autre encore plus profond soit trouvé en Chine. Le Colca fait quand même déjà 3400m de profondeur, à tel point que là où nous allons, on ne peut pas voir la rivière.

Nous arrivons aux environs de la Cruz del Condor vers 8h30 et nous craignons que ce ne soit qu'un peu tard. Nous commençons par marcher aux miradors, en attendant que les oiseaux ancestraux daignent montrer le bout de leurs becs. Ils sont charognards, peuvent vivre jusqu'à 80 ans, s'émancipent du nid familial vers leurs 6-7 ans et sont monogames à vie. Les jeunes sont marrons, les adultes sont noirs. Vus de près sur une photo, ils n'ont pas une très jolie tête. Nous continuons notre chemin et sur un piton rocheux, deux condors commencent à sortir. Nous tentons de les prendre en photo, mais c'est un peu la déception car sur les photos on ne voit que des traits noirs. Bah, en réalité c'est ce à quoi nous nous attendions ... Quand un autre condor sort de la falaise. Puis un autre. Mais ils ne sont toujours pas proches ... Ils entament un ballet, et on voit l'un d'eux survoler un autre groupe un peu plus loin, c'est la jalousie. Nous marchons pour nous rapprocher : c'est un peu mieux! Puis nous nous rendons à la Cruz del Condor en elle-même et là c'est la consécration. Il y en a 7 ou 8 qui se rapprochent de nous, planent à une distance visible, et il y en a même un qui se pose à côté! Wahou! Ils sont très majestueux dans le ciel, ces messagers des Dieux. Le moment en devient magique, fascinant. Nous rentrons 15 minutes après l'heure donnée par la guide mais ce n'est pas grave, quelle expérience ! Et bien mieux que ce à quoi nous nous attendions! J'en reviens émerveillée.

Copyright pour Adrien !  

Nous retournons en direction de Chivay, avec quelques arrêts pour des miradors sur la vallée fertile et de petits villages blancs. Mais bon, il y a beaucoup de femmes et surtout d'animaux victimes ds dérives touristiques, particulièrement les bébés alpagas. Nous avons vu l'un d'eux qui devait être très jeune, à peine sevré, il était enchaîné seul en plein soleil sans eau à disposition, seulement un petit biberon maintenant vide. Il avait clairement peur car il poussait de petits cris de détresse face aux touristes insensibles voire plus intéressés par le fait qu'il soit mignon plutôt qu'il soit terrorisé. Ça m'a crevé le coeur, je n'ai pas pris de photos de lui, c'était trop barbare. Au village nous en avons vu mais de ceux qui sont accompagnés par leurs maîtresses, on les sent ennuyés mais plus sécurisés. Il y avait aussi un aigle enchaîné qui a essayé de s'enfuir. La catastrophe, quoi. Ensuite, je commence à être agacée par l'attitude des vendeuses de vêtements et souvenirs. On passe devant et on a droit à "regarde l'amie, ça c'est une écharpe!" "et ça c'est un bonnet!" "regarde j'en ai des rouges et des bleues!" NON SANS BLAGUE je n'avais pas remarqué.Je sais qu'elles font leur boulot mais j'ai l'impression d'être un peu prise pour une tonta (une abrutie), et ça me fait fuir plus qu'autre chose car ça m'empêche de me concentrer. Comme je n'ai pas le réflexe espagnol, parfois je lève juste la main pour leur dire de se taire. C'est d'une impolitesse folle, je sais, pardon.

Déjeuner dans un buffet bien meilleur que le précédent où je me lâche sur leur ceviche, et nous nous remettons en route vers Arequipa où nous arrivons vers 16h30. Je propose à Julie et Adrien de me rejoindre pour un verre à l'hostel puisque les gens de l'extérieur peuvent venir au bar - le reste est sécurisé. Je pensais qu'ils allaient venir après leur restaurant (ou pas, c'est donc une bonne surprise) mais ils arrivent en fait à l'heure de l'apéro! Toute la famille, je suis contente. Nous échangeons les photos, j'en profite pour subtilement leur payer les bières pour les remercier de leur gentillesse, ils ne voulaient pas mais j'ai rusé. Ils voulaient m'inviter au restaurant (avant cette histoire de bières) mais j'ai poliment refusé. Je n'avais pas faim, je n'osais pas, et j'avais aussi envie de profiter de l'ambiance de la soirée, avec plus de bière, haha. Mais je leur propose de revenir après. C'est ensuite l'occasion de rencontrer deux Canadiens, Alan et un autre au nom compliqué qui viennent de Vancouver, Nate du New Jersey, Michele de Rotterdam, parler avec les barmen John et Max, se prendre une tôle au babyfoot ... Ça se dit Foosball à l'international, et ça fait beaucoup rire John de savoir qu'en France on appelle ça babyfoot. Tout comme quand je lui explique qu'avec mes amis de l'université on ne faisait pas de beerpong - tout le monde n'a pas une table de ping pong - mais qu'on jouait au Caps. "On prend les caps de la bière, on les remet dessus et on doit viser celle de l'autre." "Et comment ça s'appelle?" "Ben, le Caps ..." voilà ça l'a bien fait rire aussi! Adrien et Julie reviennent, et nous rencontrons une autre Française, Marie. La barmaid donne des shots gratuits au bar, et nous pouvons faire du body-painting! John me fait le mien et c'est génial! La soirée finit par s'achever, et je sens que ça va être un peu triste de quitter cet endroit. Mais les mystères de Nazca m'attendent ...

26
août

Qu'il fait beau à Arequipa! Ça donnerait envie de rester un jour de plus, mais les lignes de Nazca sont très tentantes. Alors, je quitte le Wild Rover en fin de matinée. Je dois prendre un bus dont le trajet est estimé à 10 heures. C'est long ... Et le bus en question n'est pas terrible, il fait chaud et l'air conditionné ne marche pas. Je m'installe à côté d'un Péruvien qui fait Juliaca (au nord de Puno) jusqu'à Chiclayo (au nord du pays). Il en a pour deux jours de trajet, jour et nuit. Je ne sais pas comment il fait. Le chauffeur s'arrête souvent, vraiment souvent, à ce stade nous ne sommes pas arrivés. Le paysage est cependant intéressant : après avoir quitté les volcans d'Arequipa, nous piquons vers le Pacifique. Ça se voit car soudain, il y a une énorme bande de nuages. Nous traversons une partie désertique dans le brouillard, il faut dire que c'est fantomatique! Et voici que nous arrivons vers la mer, dans la ville de Camaná. Il fait frais, gris et humide, ça ne donne pas envie de se baigner surtout qu'on peut voir la houle. La région est fertile, avec des avancées de végétation dans les terres bordées par les montagnes, que nous devons contourner. Et après la ville, nous nous arrêtons dans un restaurant qui ne me donne que peu envie, surtout que j'ai grignoté des gâteaux que proposent les vendeurs ambulants qui montent dans le bus à chaque arrêt, ce qui prend 10 bonnes minutes à chaque fois. Il faut être patient. Ça fait 4 heures que nous sommes partis et cet arrêt nous en prend une de plus. Enfin nous repartons, et une heure plus tard, le soleil se couche sur l'océan. Il fait nuit noire bien rapidement et ce n'est plus très drôle. La route serpente à flanc de montagne, et je dois accepter que nous ne serons jamais à Nazca à 22h. Et voilà que nous tombons sur des travaux qui nous stoppent, les voitures ne pouvant passer que dans un seul sens. Ça me rappelle le Laos, mais c'est un peu moins long. Nous roulons, roulons, roulons ... C'est interminable. Mais heureusement il y a bien un moment où nous arrivons. À minuit. 12 heures de bus ... Record battu. Je suis obligée de prendre un taxi car ça craint un peu à cette heure là. Et arrivée devant l'hôtel, aucune réponse. Le taxi me propose un autre endroit mais je refuse et m'entête, de toute manière tout sera fermé à cette heure là. Il a le mérite de rester avec moi jusqu'à ce que Maribel, la gérante, vienne enfin m'ouvrir, ouf! Je m'excuse d'avoir fait tant de bruit et file au lit.

C'est un peu bruyant, quand ce ne sont pas les chiens qui aboient, ce sont des gens qui crient, et au matin ce sont les coqs qui chantent. Je me suis réveillée dans la nuit car je sentais des piqûres, mais je me dis que ce sont probablement des araignées ou de gros moustiques. Le lendemain, ça me démange autour du coude et dans le dos. Mais peu importe, je demande à Maribel à quelle heure je peux réserver pour un vol. Il y a de la place dans 40 minutes! Elle me conseille de ne pas déjeuner avant, mais ensuite il sera trop tard ... Je mange quand même, elle m'apporte un beau petit déjeuner, avec 3 pains, confiture et beurre, des oeufs brouillés et du jambon, du thé, du jus d'orange, des fruits, c'est royal je n'ai plus l'habitude! Surtout que je n'avais pas mangé hier soir. J'ai le temps de me préparer tout juste avant que le taxi ne m'emmène à l'aéroport.Je vais au comptoir et je dois être pesée, j'avais dit faire "entre 70 et 72" vu tout ce que j'avais mangé. La dame me fait garder mon sac et ma softshell pleine de pièces de monnaie. Je dois peser deux kilos de plus, 72 tranquille. Et bien non ... 69,5! Wow! Ça doit me faire peser environ 67, je suis surprise! Je paye 90$. J'attends un peu, et puis nous embarquons dans un petit avion à hélices ... Quelle excitation, et quelles sensations au décollage! Pour voir les lignes, il penche extrêmement à gauche et à droite, je comprends mieux les recommandations de Maribel. Cela permet de les voir de plus près, de nos côtés respectifs, et de prendre des photos. Au départ on voit surtout la délimitation entre la vallée de champs de maïs fertile et soudain le désert. Et des formes géométriques comme des trapèzes, des triangles, des rectangles ... J'expliquerai les hypothèses sur la signification plus tard. Et tout à coup, l'astronaute, à l'origine des théories ufologiques! (Photo 8) Et puis, le singe! Wahou ! Il est génial, c'est mon préféré! (Photo 9) On voit aussi le chien (photo 10), le colibri (photo 11), le condor (photos 12 et 13), l'araignée (photo 14), qui fait petite, mais on la voit vraiment bien. En même temps je ne vais pas leur en vouloir pour la taille, déjà qu'ils font ça à main levée et que ça leur prend du temps, ils n'allaient pas faire sur de grandes distances de telles figures, mais elle fait déjà 50 mètres de long. Ensuite un arbre, une figure non identifiée et un lézard qui a été coupé par la Panaméricaine car lors de sa réalisation ils ne l'avaient pas encore trouvé, c'est malin. Puis il y a le flamant (photo 16), le perroquet (photo 17), des spirales et un oiseau (photo 18) ... Ainsi qu'un animal qui ressemble à un bébé dinosaure! Je crois que c'est le pélican mais le pilote nous a dit "si vous avez vu Jurassic Park vous allez aimer" (photo 19). Avec toutes ces virevoltes, j'avoue que je commence à avoir envie de vomir. Il y avait d'autres lignes non moins plus intéressantes à voir, les lignes de Palpa, avec plus de figures humaines, mais je crois que ça va me suffire bien que ce soit pour le moins fantastique et exceptionnel. Quand nous atterrissons, j'ai un peu de mal à marcher et à parler ... Mais ça passe, aucun regret.

N'hésitez pas à zoomer dessus pour mieux voir!