Un océan de bière
L'Oktoberfest
C'est le grand jour !
Je suis réveillée très tôt et décide de partir vers 7h30 pour avoir une bonne place pour assister à la parade d'ouverture de l'Oktoberfest. Sauf que je me suis trompée dans l'heure et elle commence à 10h45 et non 10h, me dit un couple de retraités d'Alençon avec qui je sympathise. Cette levée aux aurores était parfaitement inutile: il fait froid (6 degrés) et j'erre sans but précis autour de la place d'où les chars doivent partir. Tout ça pour au final décider de me rendre à Theresenwiese, où se tient le festival, car ça serait chouette de les voir arriver. Entre temps il est 10h, la température remonte et il y a déjà du monde. J'en profite pour entrer dans la tente de la Hofbräu où tout le monde est déjà sur le pied de guerre en attendant l'arrivée de la bière à midi. Je vais aussi dire bonjour à Isa, ma copine de Bolivie qui travaille là ! Trop chouette de la revoir ! (Ce n'est pas elle sur la photo).
Sous la tente HofbrauMais la parade arrive bientôt donc je trouve un endroit que je pense stratégique, mais qui ne le sera pas au final. Du monde me passe devant et se bouscule, tandis que les charrettes de la (la parade des aubergistes et des tonneaux de bière) arrivent au son des fanfares. C'est chouette mais c'est un sacré bazar, les chevaux se cabrent ... "l'enfant de Munich", une jeune femme blonde, mène la parade. Comme l'explique la dame à côté de moi, "ce n'est pourtant plus une enfant". Le maire de Munich arrive ensuite à la tente de la Schottenhamel pour ouvrir le premier tonneau symbolique. "O'zapft is!" crie-t-il, signifiant "la bière est servie", et c'est parti pour la beuverie.
L'Oktoberfest est à la base fait pour célébrer le mariage du roi Ludwig avec la princesse Thérèse. La date de début a cependant été avancée en septembre pour profiter des beaux jours. Et ça c'est une bonne idée. Il y a une sacrée ambiance même en dehors des tentes: quasiment tout le monde, hommes comme femmes, porte un costume traditionnel bavarois. C'est comme un immense concours du même cosplay. J'aime beaucoup le côté fête foraine, car j'y suis assaillie de plein d'odeurs: pain d'épices, cannelle, gingembre, frites, saucisses, flammekueches ...
Je me dis qu'avant de boire, je ferais mieux de faire les manèges. J'opte pour des chaises volantes à ... 80 mètres de haut ! J'ai senti mon estomac me remonter dans la gorge. Derrière moi, des gars hurlent à plein poumons. Je risque de petits regards timides vers le bas, vers les toits de Munich ... Argh! Je finis par me sentir un peu plus à l'aise mais quand même ! Ça ne dure pas assez longtemps pour que je m'habitue totalement.
Ensuite, je me dis qu'un manège plus calme, ce serait pas mal. Je monte dans une sorte de train fantôme en réalité virtuelle. Enfin non ce n'est pas un train fantôme, c'est un voyage dans le temps, mais c'est le même principe d'être sur des rails et de passer de pièces en pièces. Je me dis que vus de l'extérieur, on doit avoir l'air bêtes à crier de surprise ou à s'émerveiller devant des barres de fer. C'est assez bien fait mais ça donne un peu envie de vomir ... Vite, une grande Bradwurst ! Un hot dog, quoi. Qui coûte un bras car tout est deux fois plus cher à l'Oktoberfest.
Je suis maintenant décidée à goûter la bière, je retourne à la tente d'Isa et essaye de trouver une place dehors, quelle chance qu'il fasse beau ! Je finis par aborder des étudiants Erasmus de l'université de Milan qui m'accueillent parmi eux. Ils sont vraiment chouettes ! La bière arrive dans sa chope d'un litre, tellement lourde que j'en ai mal au dos chaque fois que nous trinquons. Et c'est souvent. Quelle ambiance, c'est trop rigolo !
Une seconde chope de bière attaque ma sobriété. Je finis par suivre les Erasmus pour leur tour de la ville en fin d'après midi. Natalia, une Polonaise, est assez mal en point mais assez légère pour que je la soutienne. Sur la route de ce City tour, nous perdons le guide au moins deux ou trois fois. Puis, je m'incruste sur les photos de groupe, sans que les autres du plus grand groupe ne s'en aperçoive mais ça fait bien rire mes nouveaux copains. Finalement, nous nous promenons seuls dans les rues. Mais arrive 19h30, ils doivent repartir vers l'Oktoberfest pour prendre leur bus de retour à 20h30. Ils me manquent déjà !
Profitons-en tant que la lumière est belle!Exploration tranquille
La parade du dimanche
Je comprends mieux pourquoi les Allemands boivent autant d'eau pétillante, ça limite la casse, mais pas la fatigue par contre. Je me lève tôt une fois de plus pour une autre parade, la Trachten und Schützenzug qui est le défilé des tireurs avec plus de 9 000 participants costumés. J'en croise quelques uns dans le métro. Cette fois ci, je me mets au point de départ, la Maximilianstraße, une heure avant mais les gens n'affluent qu'au dernier moment.
Une "préparade" a lieu à 9h30. Très courte, pas mal mais ce n'est rien à côté de la vraie. Au moins, j'ai récupéré un coeur en pain d'épices qui dit probablement "j'adore BMW", c'est mieux que rien. Oui car tout le monde défile: les pompiers, les sponsors, les policiers, les chasseurs, les gueux (et oui), les patrons des tentes, des chars aussi qui représentent Neuschwanstein et euh, des chambres à coucher ... Pourquoi ?
Promenade dans les rues de Munich
Le défilé dure jusqu'à midi, mais le froid commence à me geler les os. Je quitte un peu avant la fin, me rendant sur la Platzl (oui c'est son sobre nom) avec l'intention de manger à la Hofbräuhaus, la brasserie. Mais celle ci est déjà pleine, chère, et les éclats de voix résonnent. J'opte pour le restaurant d'en face, qui me sert des boulettes de porc avec de la purée et de la citrouille, miam.
La fatigue de la veille se fait sentir, et je dois rester motivée pour ne pas m'endormir. Je fais un tour dans les rues de la vieille ville, attentive aux petits détails des façades. Je me trouve maintenant au Viktualienmarket, le marché des victuailles, mais comme on est dimanche il est fermé. C'est dommage car tout le monde en dit du bien. Je repasse sur la Marienplatz oú se trouve le Neues Rathaus, le bel hôtel de ville de style gothique (pourtant bâti dans les années 1900), mais aussi celui qui l'a précédé dans ses fonctions, ainsi que l'église Altes Peter et son haut clocher. J'emprunte des rues que je n'ai pas parcourues la veille, et j'arrive à la Frauenkirche et ses deux tours, lieu symbolique de Munich. L'intérieur a beau être grand, je ne l'apprécie pas autant que celui de l'Asamkirche, baroque à souhait avec ses profusions de détails. Je rejoins cette église en empruntant plusieurs petits passages qui révèlent des cafés à l'écart de la rue et bien sympathiques, cela donne l'impression de passages secrets.
Mais je ne profite pas à 100% et décide de retourner me reposer à l'hostel. Après tout en métro ça va vite. Je dois dire que je l'apprécie beaucoup, il n'est pas trop grand et vraiment bien pensé pour limiter les déplacements. Par exemple à la station Innsbrucker Ring, en descendant du U2, on fait la correspondance avec le U5 qui arrive sur le quai d'en face et attend que les gens traversent le quai. Aussi, il n'y a pas énormément de voies pour une même station car les rames peuvent emprunter la même voie et se succéder toutes les deux minutes sans se gêner. C'est un vrai travail d'horloger. Même le dimanche, en journée l'attente est de 10 minutes. Oui, en tout cas moi qui aime les métros, je leur tire mon chapeau.
Après une longue pause, je me motive tant bien que mal à quitter mon lit pour aller me promener dans le quartier de Haidhausen, repère des artistes et des hipsters. C'est aussi un endroit historique: il s'agissait du quartier pauvre, de ceux qui ne pouvaient pas franchir les portes de la ville de nuit (n'ayant pas acheté "le droit de cité"), puis au 16e siècle les artisans comme les tanneurs, les ébénistes, les plombiers ... Ils se partageaient entre familles des maisons comme le Kierchbaumhof, curiosité datant de 1760. En 1870, la victoire contre les Français permet de renflouer les caisses et faire rénover le quartier. En cet honneur, ils élargissent les rues, les places, et leur donnent des noms de villes françaises qui correspondent à des batailles gagnées (comme nous avec Iéna, quoi). Maintenant, c'est l'un des quartiers les plus agréables de Munich, il respire le calme et la douceur de vivre, surtout en cette fin de journée.
La nuit commence à tomber et je décide de repartir sur le site de l'Oktoberfest, que je n'ai pas vu de nuit. Beaucoup plus de monde à cette heure-ci, et un sacré turnover. Les gens sont bourrés à toute heure pendant l'ouverture, donc certains s'en vont aussi à la tombée de la nuit. J'ai plusieurs spécialités à goûter: un sandwich au saumon grillé à la flamme, des chips maison, des épis de maïs, une brochette de fraises enrobées de chocolat ... Mais ça coûte cher, très cher, pour une petite quantité. L'Oktoberfest, c'est commercial. Les gens s'amusent bien autour de moi, ils chantent, ils dansent, ils courrent, ils crient ... C'est chouette. Je teste mon portable en photos de nuit et je dois dire que je suis conquise. Et puis, on m'avait avertie de la viande soule, mais je n'ai pas eu trop de soucis, j'ai juste vu un homme qui semblait complètement plein à sa façon de marcher et qui a dû s'agripper aux barrières.
Un peu de culture
Dachau
GROSSE AMBIANCE. J'ai décidé d'aller visiter le camp de concentration, histoire de me challenger un peu. J'avais déjà visité Mathausen en Autriche, avec mon père, et j'en garde un souvenir écrasant. En plus aujourd'hui, il pleut. Dachau n'est qu'à 16 km en voiture.
Il y a quand même du monde venu pour se recueillir, ou en quête de sensations macabres. Il ne reste que quelques baraquements, témoins de l'horreur. Je retrouve la sensation d'écrasement déjà ressentie 9 ans plus tôt, comme si le ciel était très lourd au-dessus de toute cette grisaille. Et le camp est grand, trop grand, 10 000 personnes y ont trouvé la mort dans les premières années et il avait dû être agrandi. Je n'ai pas envie de refaire des recherches pour donner le chiffre exact. Je me dirige vers le crématorium et les chambres à gaz, qui ont été pensés "à la chaîne" car on passe d'une pièce à l'autre comme dans une usine de la mort. Je commence à me sentir très mal, très oppressée. Visiter un camp avec quelqu'un, c'est une chose, mais seule, c'est bien plus éprouvant. Je me mets à pleurer devant le mémorial. J'ai l'impression d'être dans un cauchemar. Les lieux de culte ont pourtant pris la place des horreurs, mais tout de même. On y trouve une église protestante bien glauque, une synagogue (heureusement), une église catholique, un couvent (ancien "terrain de jeu" que le chef avait fait construire par les détenus). Il y a aussi un musée, avec des photos des détenus sur lesquels on faisait des expériences pour repousser les limites du corps humain. C'en est trop, je n'y arrive plus, je pars. Dans la cour, j'entends des jeunes rigoler, je me dis que c'est pour relâcher la tension. J'espère. En sortant, j'ai une totale sensation d'irréalité, j'ai du mal à revenir à la vie normale, comme si je me réveillais d'un affreux cauchemar. Je suis complètement à l'ouest, et cette sensation va persister jusqu'à la fin de l'après-midi.
La Residenz
Je retrouve les rues animées de Munich avec un certain soulagement. Bizarrement, tout cela ne m'a pas coupé l'appétit, au contraire j'ai faim mais il m'était impossible de m'arrêter manger à Dachau, j'avais juste envie de m'enfuir des lieux. Après une longue hésitation, j'opte pour le restaurant de l'Hôtel de Ville.
Puis, après quelques hésitations, je vais visiter la Residenz car il y a tout de même de jolies pièces. C'est le palais des ducs, princes-électeurs et rois de Bavière. Attendez, c'est quoi un "prince électeur"? L'électorat était composé de trois clercs et quatre laïcs (des Nobles) dans le but de désigner l'Empereur du Saint Empire Romain Germanique. lls étaint quasiment indépendants de cet Empereur car ils règnaient sur leurs territoires respectifs. La Residenz elle, dans sa première version, date de 1385 et a été améliorée depuis. Le dernier Roi de Bavière, Louis II, y avait fait ajouter une serre, un lac artificiel et un pavillon mauresque, au-delà de toute convention. Mais nous reparlerons de lui dans le prochain article.
Pour la suite, il devait y avoir une visite guidée de l'Hôtel de Ville à 15h30, mais celle-ci est en Allemand exclusivement. Tant pis, il est tout de même accessible au public puisque que, quand même, des gens travaillent ici et d'autres viennent pour leurs papiers administratifs. Et ça doit être sympathique ... Le Neues Rathaus est souvent comparé à Poudlard de par ses escaliers, ses arches et ses couloirs gothiques. Même s'ils ne bougent pas dans tous les sens, le bâtiment est quand même splendide. Et puis, le clou de la visite est la bibliothèque de droit, Juritisches Bibliothek, qui est censée nous propulser tout droit dans La Belle et la Bête. Très bien. Au détour d'un couloir, je tombe par hasard sur sa porte d'entrée, et ils ouvrent la bibliothèque exprès pendant un quart d'heure après le départ des étudiants, pour la visite. Enfin ... Plutôt pour les photos. Je ne dis rien, je vous laisse regarder les vidéos.
INSTAGRAAAAAM On peut aussi monter dans la tour pour avoir une superbe vue sur Munich. Même s'il ne fait pas beau, ça vaut le coup d'aller jeter un oeil! Un ascenseur m'emmène tout en haut, d'où je peux voir toute la ville, quasiment seule. Tout à coup, la cloche retentit: oh non! J'ai oublié qu'il y avait le carillon à 17 heures! Et il est juste en-dessous de moi ... D'ailleurs, je vois tous les gens tout en bas qui le regardent. J'hésite, est-ce que je vais avoir le temps de descendre? Finalement oui, je n'en ai raté que la moitié. C'est mignon, les carillons.
Carillon my Wayward Son Je finis la soirée assez originalement dans un restaurant afghan. Il y en a une vingtaine à Munich! De l'agneau, du riz avec du safran, de la cardamone, des pistaches, des amandes, des raisins secs, des aubergines et des tomates, et de la sauce au yaourt. Je ne me souviens malheureusement plus du nom du plat, mais c'était délicieux.
Le château de Nymphenburg
Je rassemble mes affaires et part de l'hostel sur le coup des 9h30. Mais avant de quitter Munich, j'ai un dernier site à visiter, qui est sur ma route: le château de Nymphenburg. De sa traduction "le château des nymphes", il s'agit de la résidence d'été des Wittelsbach (les Rois de Bavière et du Palatinat), il a été terminé en 1730. C'est là où est né Louis II.
Ce palais est d'autant plus intéressant que les panneaux explicatifs racontent les dramas des personnalités qui y sont représentées ou y ont vécu. Une pièce remplie de tableaux de femmes de la cour de notre Louis XIV montre la Duchesse de Berry, mariée à 14 ans, veuve à 19 ans, morte jeune dans le scandale. Marie-Léopoldine, mariée à 18 ans au prince-électeur Karl Theodor, 70 ans. Elle refuse d'obéir à son mari et de lui donner un héritier. Quatre ans plus tard à sa mort, elle négocie l'héritage de la lignée des Wittelsbach plutôt que les Habsbourg, ce qui était plus compliqué. Elle est donc devenue très populaire en Bavière, et dirige plusieurs propriétés. Elle était aussi l'équivalent d'un trader de l'époque, une belle féministe! Le roi Louis I était fasciné par les femmes, par comment leur beauté s'exprimait dans l'art (enfin, pas que). Passionné par Lola Montez, une danseuse, cet amour mènera à la Révolution de Munich en 1848. Dans le palais, c'est toute une salle qui est dédiée à des portraits de femmes ...
Il y a un musée dédie aux carrosses, qui est assez intéressant. On y apprend que les voitures royales étaient équipées de suspensions modernes pour l'époque, qui allait d'avant en arrière du corps du véhicule. Ils étaient parés de symboles royaux: un coq pour la diligence et la force dans la bataille; un aigle pour la royauté; un sphinx masqué pour les arts; un faucon pour la vitesse, l'orgueil et la chevalerie; les lions pour la Bavière.
Dans les jardins royaux se trouvent plusieurs pavillons: Amalienburg construit pour la reine Amélie, Badenburg qui contenait une piscine privée pour les électeurs, et Pagodenburg pour prendre le thé. Ce parc comprend une grande forêt, qu'il est agréable de traverser. Faire tout le tour me prendra environ une heure.
Et au terme de cette visite, je prends une dernière fois le périphérique, direction Füssen et le château de Neuschwanstein !! En espérant que le temps ne se gâte pas trop.