Finalement, c'est pas la Colombie!
Du 16 août au 22 septembre 2021
38 jours
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... Parce qu'après moults rebondissements dans l'affaire de mon voyage de cet été, il se trouve que mon passeport n'était pas valide assez longtemps pour aller en Colombie. Six mois après la date du retour, et non de l'entrée, à un mois près ça ne passera pas! Heureusement, il y a d'autres pays qui accueillent les touristes avec des conditions moins "strictes". D'où le Mexique.

En fait, il se trouve que c'était ma toute première idée, pour pouvoir redécouvrir le pays avec des yeux d'adultes, environ 20 ans plus tard. Après une réorganisation éclair, cinq semaines seront donc parfaites pour redécouvrir le Yucatan, tout comme pour découvrir de nouveaux endroits plus à l'ouest car on ne peut pas résumer le Mexique à sa partie la plus touristique!

C'est l'un des pays qui m'avait le plus marqué durant mon adolescence, avec la Turquie, donc j'ai quelques flashbacks de Tulum, Chichen Itza, des Islas Mujeres, de Playa del Carmen ... Mais en famille, ce n'est jamais pareil qu'en backpack solo. Alors, la hype est quand même présente! Il y a plein d'autres ruines mayas à découvrir, et même si les hostels vendent moins de rêve qu'en Colombie, il y en a quelques uns qui ont l'air bien cools.

Comme cet article est court, parce que rien n'est préparé comme d'habitude (à part de nouveaux achats: des chaussures aquatiques, un verre qui ferme, une banane à mettre sous les vêtements, un nouveau sac de ville, une coque antichocs, des compresseurs d'air, un sac waterproof), j'en profite pour mettre la petite chronologie essentielle pour comprendre l'histoire du Mexique ici.

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Qui des trois premiers était vraiment le premier, c'est un peu contesté. 

Mais qui sont tous ces gens ?! (me dis-je moi aussi en regardant cette frise chronologique).

- Les Zapotèques: ils sont dans la région de la ville d'Oaxaca. A leur actif: le concept de Cité-Etat dans le coin, le calcul en base 20, les rébus et des calendriers, mais parfois ces inventions peuvent être attribuées aux Olmèques. Encore présents en tant qu'ethnie aujourd'hui alors qu'ils se sont frités avec les Aztèques, il se trouve qu'ils sont plus tolérants que les autres vis à vis de l'homosexualité masculine car ils reconnaissent un 3e genre, les muxhe, des "hommes au coeur de femmes". On fait comme on peut. Ah, et si le nom vous dit quelque chose, c'est l'une des insultes du Capitaine Haddock.

- Les Mixtèques: ce sont les voisins des précédents qu'ils ont repoussé un peu vers l'est en arrivant, leur territoire s'étend un peu sur Oaxaca jusqu'à Puebla. C'est le "peuple du pays de la pluie", qui a opposé une belle résistance à la colonisation espagnole.

- Les Olmèques: ils ont le mérite d'être la "culture-mère" des civilisations précolombiennes parce que la première ville olmèque, San Lorenzo, est la plus ancienne ville mésoaméricaine. Ensuite, beaucoup d'autres civilisations se sont inspirées d'eux. Eux, ce sont les "gens du pays du caoutchouc", comme nommés par les olmécologues qui ont créé leur petit club de fans des Olmèques. Ce peuple est au même endroit que les deux autres, mais leur territoire va jusqu'au Chiapas. Ils ont donc une culture très rayonnante, riche en arts, et une obsession pour les jaguars.

- Les Chichimèques: des nomades chasseurs-cueilleurs établis au nord de Mexico.

- Les Mayas: les fameux gars qui ont annoncé la fin du monde en 2012, et on en a bien rigolé, alors qu'en fait le mec était dyslexique et maintenant en 2021 on fait moins les malins. On va en parler beaucoup dans le blog, puisque c'est la civilisation la plus florissante des endroits que je vais visiter. Etablis sur la péninsule du Yucatan, le Guatemala, le Belize, le Salvador et le Honduras, ils sont objets de tous les fantasmes, quand on ne les confond pas avec les Incas.

- Les Teotihuacans: alors là il y a un piège. En fait, Teotihuacan est le nom d'une grande cité proche de Mexico, que je vais aller visiter, le nom est aztèque mais elle a été construite bien avant eux. Plusieurs peuples peuvent avoir créé cette ville florissante, on sait que les Mayas l'appelaient "puh" (qui veut dire roseaux, ok), mais on essayera d'aller faire le point sur tout ça une fois là-bas car la cité a été abandonnée.

- Les Totonaques: de grands agriculteurs, producteurs d'ambre et de coton, car ils vivaient sur les montagnes à l'Est. Les Aztèques étaient un peu dépendants d'eux lors des années difficiles, pouvant même se vendre comme esclaves, mais le peuple a essayé de se friter un peu avec eux.

- Les Toltèques: à part faire des accords, ils savent aussi construire de supers trucs. On les a appelés les maîtres bâtisseurs. Etablis dans le centre du Mexique, ils sont allés piller Teotihuacan. Ils se sont frités avec les Chichimèques, et les Aztèques étaient leurs fanboys si on en juge par le fait qu'ils se considéraient leurs descendants, et que cela les rendaient légitimes.

- Les Aztèques: bon alors, eux aussi ils envoient du lourd, c'est la civilisation la plus récente ayant contribué à la grandeur du Mexique, ils ont donné le nom au pays, à la ville de Mexico-Tenochtitlan. On aura l'occasion d'en reparler maintes et maintes fois, m'est avis.

Voilà pour les principaux noms à connaître, qui ont pourtant plein de choses en commun comme leurs pyramides, leur art (qui doit différer pour les fins connaisseurs mais pas pour l'aesthète lambda), leur langue, leurs ancêtres, leurs dieux, et le fait de s'être tous faits conquérir par les Espagnols à partir de 1519.


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Ah. Et je m'engage, je promets d'essayer de ne pas prendre trouzemilles photos de jungle! Ouais! Et d'essayer de changer de titre en cours de route, parce que c'est le premier qui m'est venu.

... Et ma lubie de ce blog est de mal nommer les villes intentionnellement. Concept.

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16
août

Le plot twist, c'est que finalement, Emma voyage avec moi pendant deux semaines. Je crois qu'il n'y a jamais eu autant de rebondissements pré-voyage, même l'année dernière.

Après une balade très agréable dans Barcelone, du côté du Barrió Gótico et des Ramblas, elle est initiée à l'ambiance des auberges de jeunesse. Notamment parce qu'on avait acheté un paquet de 500 grammes de pâtes et que j'avais tout cuisiné dans la marmite, qu'il y en avait beaucoup trop et que j'ai proposé à tous les gens qui passaient de venir les partager avec nous. Utile, pour se faire des connaissances ! Pour Emma, c'est facile de parler espagnol, mais pas anglais. Pour moi, l'inverse. Mais il va bien falloir pratiquer un peu avant le Mexique, et déjà réécouter la prosodie de la langue, ça aide.

Evidemment, la nuit est un peu agitée de mon côté, non pas parce que c'est bruyant, non, j'ai réussi à trouver un hostel calme et propre, ce qui est rare dans cette ville. Juste les soucis de sommeil habituels ... Et puis, le réveil à 7h30 alors que ça fait un mois que je me lève vers 11 heures, ça pique. Mais il faut ce qu'il faut. Arrivées à El Prat, nous partons pour nos checks-ins respectifs, puisque ... Nous n'avons pas le même vol. Et oui, mon vol pour Emirates était complet. Emma part avec KLM et fait une escale d'une heure à Amsterdam. J'espère que tout ira bien pour elle. En attendant, nous avons la chance d'avoir à peu près le même timing, surtout que moi je prends les horaires très à la cool, maintenant que je connais cet aéroport par coeur. D'ailleurs, même en pensant arriver au dernier moment, je suis en avance.

12 heures de vol ... Un direct c'est chouette, mais damn, heureusement que j'ai l'habitude. Quand on ne dort pas, le temps est long, et encore là ça va puisqu'il s'agit d'un vol "en journée" (j'arrive à 16h, donc 23h en France). L'avion est relativement confortable, mais la bouffe est dégueulasse, enfin, surtout la viande qui a un goût de reconstitué. Au moins, j'aurai testé le trio des compagnies des EAU.

Le vol est d'autant plus long que l'avion ne coupe pas tout droit. Il doit naviguer vers le nord, traverser l'océan, et arriver au niveau du Nouveau Brunswick, redescendre le long des côtes du Maine, passer près de New York ... Et enfin la descente. Mexico est une grande ville, et oui, elle est vraiment vraiment grande. Les maisons s'étendent presque à perte de vue à basse altitude. Une fois sur le plancher des vaches, je m'empresse de me dégourdir les jambes.

Mais dans l'organisation de ce voyage, j'ai fait une grossière erreur, vraiment grossière, une erreur de débutante. Vous savez, je ne suis jamais restée plus d'un mois d'affilée dans le même pays, en fait. À quelques jours près, mais c'était calculé. Alors quand j'ai pensé à 5 semaines au Mexique, j'ai oublié un détail important, qui me saute soudain aux yeux en remplissant le formulaire d'entrée sur le territoire:

Les visas touristiques gratuits ne durent que 30 jours.

... Je crois que le Pérou c'était 3 mois mais là n'est pas la question. Ok pas de panique, j'ai deux solutions: une extension de visa à l'ambassade, pour une semaine, ou deux ou trois jours au Guatemala ou au Belize, sachant que j'ai ce même souci de passeport que la Colombie. Bon, on va la jouer honnête. J'arrive devant le douanier qui me refait remplir mon formulaire au stylo, puis il me demande combien de temps je reste au Mexique. Allez, cash, 36 jours et on va voir où ça me mène. Et bien ça m'a menée au fait qu'au lieu de me mettre "turismo 30 días" il a coché "otro 180 días" sans rien me demander de plus.

Bon ! Ben ça commence bien, mon ange gardien s'arrache déjà les cheveux. Pauvrette.

Avec tout cela, il est 17h15, et je me rends compte sur les panneaux d'affichage que l'avion d'Emma arrive à 18h40, et non 19h40 comme je l'ai cru. Il y a de la wifi, ce serait bête de se lancer dans un aller-retour en métro, on va l'attendre. Ce n'est pas si pénible que ça, mais un peu stressant quand il s'agit de ne pas la rater quand tous les passagers arrivent en même temps. Mais il y a de l'animation: il y a un gars qui essaye de passer l'air de rien, il se fait (littéralement) choper par un douanier, il essaye de s'enfuir, les flics arrivent. Oh, et il y a des chiens dans des cages, qui aboient. Et puis enfin soulagement, la voilà, et nous pouvons aller prendre le métro.

Prudentes ou paranos ? Je ne sais pas, mais nous surveillons nos sacs comme nos vies. Mais arrivées à la machine, mauvaise surprise: il faut acheter une carte, la charger, on n'a pas la tête à réfléchir mais surtout ça ne rend pas la monnaie, et sur 100 pesos c'est bête ... Heureusement une dame (une policière ou en tout cas qui bosse dans la "seguridad") vient à notre rescousse, demande à un homme le change sur le billet, charge sa propre carte de 10 pesos et nous fait passer avec. Durant l'une de ces étapes, un peu à l'ouest, j'ai cru venir voir une arnaque, mais non, un simple acte de gentillesse. Nous voici donc sur le quai, c'est probablement le métro le plus vétuste que j'aie vu jusque là. En plus, la rame s'arrête tout le temps, et lors de notre correspondance, on voit qu'on est dans la banlieue car on est assaillies d'odeurs de poubelles, de moisi, de pourri ... Super comme première impression. Heureusement, c'est un peu mieux ensuite. Nous montons dans une rame réservée ax femmes, ce qui peut faire débat mais qui pour le coup est sécurisant.

Une fois dehors, je crois que je suis encore trop sur mes gardes car je ne me sens pas très à l'aise dans ces rues. Il faut dire qu'il fait nuit, ce n'est pas terrible, mais Emma ne se sent pas en insécurité pour autant. C'est probablement ma fatigue. Nous trouvons notre hostel, Casa Pepe, et après un bref passage au rooftop très sympa et une conversation rapide avec un gars, nous décidons que ce sera tout pour aujourd'hui.

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Just go with the flow

Dès le matin, j'avais réservé un walking tour pour découvrir Mexico. Mais durant le petit déjeuner, un Hollandais du nom de Stuart (enfin, on croit), nous signale qu'il y a aussi un tour qui part de l'hostel. C'est l'occasion de faire connaissance avec le groupe, donc nous optons pour cette option. Mais la fatigue se faisant un peu sentir, pour ma part, c'est aussi l'option la plus pratique.

Notre guide se nomme Daniela, et elle travaille apparemment au bar de l'hostel aussi. Il faut cependant noter que ce tour n'est pas exceptionnel. Peu d'anecdotes croustillantes, si ce n'est que Mexico s'enfonce de 1 à 6cm par an, ce que l'on peut nettement voir sur les gros bâtiments tels que la Cathédrale Métropolitaine dont le sol et les autels sont loins d'être alignés. Ça ne rend pas pareil sur les photos mais croyez moi, en vrai, c'est visible. Depuis l'entrée, on voit le sol s'enfoncer vers la gauche, et la colonnade vers la droite. Daniela essaye de nous expliquer des choses mais nous nous faisons virer de devant le choeur.

La cathédrale en question donne sur le Zócalo, qui est l'équivalent de la Plaza de Armas en Amérique du Sud. Apparemment c'est la 3e plus grande place au monde pour une capitale. Ce mot désigne en fait la base d'un monument, et il a été repris dans tout le pays pour désigner la place principale. Ce que j'y préfère, ce sont les décorations qui brillent de mille feux au soleil.

Derrière le Zócalo, on peut trouver les ruines aztèques du Templo Mayor, réalisé en pierres volcaniques. C'était le plus grand temple de la capitale de Tenochtitlan. Il était au centre, pour représenter l'axe central du monde, qui est carré et divisé en quatre selon la cosmogonie aztèque. Il devait être impressionnant, car selon certains archéologues, les Aztèques souffraient d'un complexe d'infériorité, passant après d'autres civilisations très marquantes comme les Toltèques et les Mayas.

Nous continuons notre promenade dans les rues de Mexico, souvent "à thème", et plein de boutiques de téléphones et de technologie se succèdent. Un peu comme à Hanoï. C'est un concept que j'ai du mal à comprendre: trop de concurrence, et si tout est au même endroit, les boutiques ne sont pas dispatchées. Mais au moins on sait où aller ...

Nous nous arrêtons sur la place Manuel Tolsa, face à un palais de style espagnol, mais surtout face à la Poste qui a des allures de Palais des Doges. Et comment ! L'édifice a été commandé à une société florentine, réalisé avec des matériaux italiens, et terminé en 1907. L'intérieur est luxueux, comme on pourrait s'y attendre. Nous terminons notre tour face au Palacio de Bellas Artes et non loin de la House of Tiles qui a des airs d'église portugaise.

Peu d'informations, je compte donc refaire un walking tour dans 5 semaines à mon retour sur Mexico, pour en apprendre un peu plus. En attendant, nous suivons Daniela dans une petite taqueria pour le déjeuner, où tout le monde mange des tacos sauf nous, qui n'avons pas faim, mais nous ne passons pas à côté d'un grand jus de fruits "antigrippal". Nous discutons avec un peu tout le monde, Jarred qui vient de l'Utah et deux autres filles de San Francisco. Il y a aussi trois gars du Bangladesh qui vivent à Toronto. L'une des deux filles, Tatiana, nous fait goûter du cactus: ça a un goût de haricot vert.

Pour l'après midi, comme nous n'avons pas pu prévoir d'autre walking tour, nous suivons les gens qui proposent d'aller visiter le Musée d'Anthropologie, du côté du parc de Chapultepec. Les filles insistent pour prendre des Ubers, alors que nous étions plutôt pour prendre le métro. Et finalement, étant six et ayant pris deux voitures, nous avons perdu les autres. À notre arrivée nous perdons même notre compagne, car avec Emma nous restons un peu à l'écart du musée car j'ai repéré des voladores, des danseurs qui montent tout en haut d'un grand pilier, et qui s'en laissent tomber la tête en bas tout en tournant, en musique. C'est assez impressionnant et je me souviens en avoir déjà vu quand j'étais ado. Mais cette fois-ci, il y a une vidéo !

Nous entrons maintenant dans le musée où les membres de la sécurité nous désinfectent de haut en bas, ce qui est rafraîchissant. Ce musée est très grand, et il contient des pièces de toutes les cultures du Mexique, autant dire énormément, et retrace le parcours de civilisations et de personnes et lieux avec des noms compliqués. Donc, on trouve des salles dédiées aux cultures que je citais dans le premier article.

Il y a beaucoup de petites figurines humaines, parfois représentées avec des transformations physiques. Selon les marques retrouvées sur les squelettes, il semblerait que dans la culture de Teotihuacan, il n'y avait pas de division du travail selon le genre car, homme ou femme, ils ont tous les mêmes. Mais la modification corporelle prenait beaucoup de place, notamment les scarifications, l'allongement du crâne et le limage des dents. La peinture faciale était aussi très importante, en cercles concentriques, ou une seule partie de la face. Selon les études, les gens de ces civilisations étaient plus petits que nous, et plus robustes.

Mais là où je prends ma première claque, c'est devant la reconstitution de la pyramide du Serpent Emplumé de Teotihuacan. Nous parlerons plus en détails de la ville quand nous irons la visiter plus tard. Et la seconde claque, dans la salle Aztèque. Tout au fond, se dresse l'impressionnante Piedra del Sol, riche en détails, qui représente le Dieu Xiuhtecuhtli (je vais en chier pour écrire ces noms à la con) qui tient dans ses deux mains des cœurs humains, puisqu'il s'agissait d'un autel sacrificiel, un temalacatl. Cependant, il ne fut jamais terminé car il a été brisé à l'arrière, mais tout de même utilisé.

L'organisation de la société aztèque Mexica suit le calpulli, c'est à dire la différenciation entre la Noblesse (pilpitin) et les autres (macehualtin). Les premiers avaient le droit de garder des richesses comme de la jade, des plumes, de beaux habits, ils vivaient dans des palais et étaient polygames. Ils travaillaient en tant que servants publics, et ne faisaient pas de travail manuel. Les macehualtin faisaient tout le reste, ils n'avaient pas le droit de montrer des signes extérieurs de richesse sinon c'était un crime passible de peine de mort, et ne pouvaient avoir qu'une femme. Les artisans et les marchands étaient exempts de ces travaux, mais ils devaient payer des tributs venant de leur spécialisation. Il y avait des esclaves, les tlacotin, qui étaient endettés et devaient racheter leur liberté. Les meilleurs jeunes guerriers, quelle que soit leur classe, pouvaient profiter des bénéfices des nobles.

Les shamans avaient une place prépondérante dans la société. La religion s'orientait beaucoup sur le concept de dualité, notamment l'opposition entre les saisons, et la terre et l'eau, à l'origine de l'agriculture.

Bien sûr, impossible de ne pas mentionner Quetzalcoatl, le serpent emplumé, patron des arts comme la peinture et l'architecture. C'est à lui que l'on faisait beaucoup de sacrifices. C'est un protagoniste de la création des hommes selon certains codex, ayant récupéré des os dans le mo de souterrain et les ayant mixés avec son propre sang pour créer les humains; et le souverain de Tula qui aurait rompu son voeu de chasteté et se serait immolé selon les Toltèques. Il a un jumeau, Xolotl, qui est un chien, et qui est le Dieu des Monstruosités, le patron des jumeaux et des animaux qui se transforment, comme les têtards.

Le souverain Palak, de Palenque

Évidemment, le musée est très grand, et le premier étage est réservé à de l'art plus actuel, qui passe un peu à la trappe car il est devenu trop difficile de se concentrer après toutes ces salles. Dommage car les panneaux étaient probablement intéressants. Pendant ce temps, il pleut énormément, mais l'orage se calme un peu avant que nous sortions pour nous promener dans le parc. Mais d'abord, nous goûtons un tlayuda. C'est comme un taco mais qui croustille, avec du cactus, du fromage, des oignons, du mole (la sauce marron) ... C'est assez original. Le parc de Chapultepec, en tout cas la partie où nous nous promenons, est très fréquentée et n'a rien de bien extraordinaire, bien que ce parc soit trois fois plus grand que Central Park. Il y a un château qui le domine au dessus d'une colline. Nous décidons de rentrer ensuite à l'hostel pour profiter de l'happy hour et retrouver le groupe. Mais une fois arrivées dans le centre de Mexico, le vent se lève, le tonnerre gronde. Bah, mettons nous en route ... Mais le ciel est de plus en plus menaçant, et pour cause: de la grêle se met à nous tomber dessus ! Nous avons le temps de nous abriter jusqu'à ce que "ça se calme", enfin presque, avec un parapluie pour deux nous rentrons quand même un peu trempées, mais à peu près à l'heure du rendez-vous sur le rooftop.

Et à 20 heures, c'est le début du spectacle Animas. Nous ne sommes que trois à l'avoir réservé. C'est une expérience de théâtre immersif, où nous sommes invitées à côtoyer les esprits qui descendent dans le monde des morts. C'est, évidemment, une ambiance très Día de los Muertos. On se croirait presque dans le film Coco. La pièce est menée par un philosophe, José Vasconcelos. Enfin, non, pas vraiment lui puisqu'il est mort. Mais l'acteur lui ressemble beaucoup. Et la pièce est incroyable car nous suivons tous les acteurs dans l'hostel, dans la cage d'escalier, dans les chambres, les couloirs, et ils nous interrogent sur la vie et la mort. C'est incroyable, ça prend aux tripes, je ne sais pas si les mots sont suffisants pour décrire une telle expérience, donc les vidéos parleront d'elles mêmes.

Nous retrouvons ensuite tout le groupe pour leur raconter à quel point l'expérience était magique, et les margaritas étaient bonnes. Nous allons manger des quesadillas dans la rue avec Jarred, proche du Zócalo. Il y a plein de gens, de bruits, de senteurs, de saveurs, de cyclistes qui semblent protester mais on ne sait pas trop pourquoi, et l'esprit embrumé par la margarita n'aide pas!

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L'excursion étrange

Bon, le lendemain, ça ne va pas trop mal mais je n'ai dû dormir que trois heures. Ou quatre, en pointillés. Après avoir encore englouti des quesadillas au jambon au petit déjeuner, nous voilà parties pour Xochimilco et ses canaux. Notre but est de visiter la Isla de las Muñecas, l'île des poupées que l'on voit souvent à la télé et sur Internet, et de nous promener dans le parc écologique, plein de petites îles fertiles où l'on pratique l'agriculture. Un peu comme les orpaillages mais en mieux. Après avoir récupéré une carte sim mexicaine pour pouvoir utiliser Uber, nous prenons le métro et appelons un chauffeur à sa sortie. Il se nomme Raul, et Emma sympathise avec lui. Moi, c'est mieux que j'écoute et me contente de comprendre l'espagnol pour le moment. Nous atteignons l'embarcadère de Cuemanco vingt minutes plus tard.

Il fait chaud et lourd au soleil, tandis que nous essayons de comprendre comment atteindre notre but, qui n'est pas du tout à l'endroit indiqué par Google ou maps.me. Nous pensons à une arnaque mais non ... Aller à l'isla de las muñecas prend 4 heures, donc 2000 pesos par bateau, ce qui fait ... Beaucoup. Nous repérons des groupes de touristes et leur demandons s'ils veulent y aller, mais non. Nous avons failli faire une heure de trajinera, le nom des bateaux, avec un groupe de Colombiens mais le gars a refusé. Nous sommes sur le point de laisser tomber quand le premier monsieur à qui nous avons parlé nous interpelle et nous présente un Allemand qui veut aussi faire les poupées. Ce qui fait un prix de 650 pesos par personne soit 27 euros, c'est correct, nous acceptons.

Bon, la théorie est que ce monsieur allemand serait un peu Asperger, car il est gentil mais un peu spécial. Nous commençons la promenade au fil de l'eau, et il faut dire que c'est très, très apaisant. Fatiguée, je m'allonge sur les chaises tout en discutant, et en observant les oiseaux et autres animaux qui égayent la balade.

Après une bonne heure de trajet, au beau milieu du parc, nous arrivons à l'île. Et l'effet est ... Percutant. C'est extrêmement bizarre et dérangeant. Mais pourquoi cet homme a-t-il fait ça ? Il a commencé avec une poupée lorsqu'une petite fille s'est noyée dans le canal, nous raconte son petit-neveu en personne. Puis il a vécu isolé toute sa vie là, sans femme ni enfants. Notre théorie serait qu'il y a autre chose, forcément. L'a-t-il tuée lui-même ? Pas porté secours ? Est-ce un traumatisme ou une culpabilité si grande qu'il n'a pas trouvé d'autre moyen ? Aujourd'hui il y a plus de 2000 poupées, amenées par les touristes petit à petit.

Nous ne restons que 20 minutes, pour repartir alors que le tonnerre se remet à gronder. Allons-nous avoir de la pluie ? Et bien ça a failli, mais non. Au retour, nous avons le temps de nous arrêter dans une ajoloteria, pour voir les axolotls dans de petits aquariums. Il y a les roses bien connus, mais aussi des noirs ! Et on peut voir bouger leurs petites branchies !

Le guide nous offre un peu de fruit appelé tuna, très bon mais plein de pépins ! Et nous retournons tranquillement à l'embarcadère pour 16h15. Notre nouveau pote nous propose de partager un taxi jusqu'en centre ville, mais je suis plutôt pour voyager en transports en commun. Et enfin nous trouvons un colectivo qui nous y emmène pas très loin !

La soirée est tranquille, nous allons au restaurant pour goûter du guacamole, des empañadas et une molcajete qui est en fait comme une cassolette, mais mauvaise surprise, elle est avec du porc et non du boeuf. Et bien trop grosse pour que nous la finissions, mais nous pouvons l'emporter en doggy bag, ouf!

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Frida y Diego

Une journée qui leur est totalement consacrée. Nous commençons notre matinée en faisant la manche au gars de la réception, pour 5 pesos qu'il nous manque pour prendre le métro. Et pour retourner à la station, on commence à avoir le coup. Nous retrouvons Alejandro, notre guide du jour, devant le guichet de la station Derechos Humanos, à Coyoacan. C'était autrefois un village indépendant qui a été absorbé par Mexico, et dont le nom veut dire coyote. En franchissant le Rio Magdalena, nous entrons dans un havre de paix, ou presque. C'est le genre de quartier à part, qui est resté village et a conservé son identité première. Les ruelles sont pavées, les maisons colorées, il y a peu de voitures ... Et probablement plein de gens friqués.

"L'histoire de Coyoacan commence là où celle des Aztèques se termine", puisque les colons espagnols s'y sont établis. Après la prise de Tenochtitlan, le Mexique est resté une colonie pendant 300 ans. Hernan Cortés était connu pour être un bon tacticien, aussi s'est-il allié avec d'autres peuples ennemis des Aztèques. Tenochtitlan était située sur une île et composée de canaux, aussi parvient-il à tout assécher pour qu'ils n'aient plus d'accès à l'eau potable. Il a assassiné Moctezuma II pour prendre le pouvoir, en 1520. Les colons reconstruisent ensuite Coyoacan.

Et en effet, les maisons ici sont de type colonial, avec de magnifiques patios colorés. L'architecture ressemble un peu à celle de l'Andalousie ou du Portugal.

Nous continuons notre chemin pour entrer dans la Casa de Cultura Jesús Reyes Heroles, où il y a des statues grandeur nature de Frida Kahlo et Diego Rivera. Pendant que les autres sont partis et que nous parlons avec Alejandro, il nous fait une photo au Polaroïd avec les deux statues. Que pour nous car il n'en avait plus qu'une sur son appareil. Tant pis pour les autres, il fallait être plus sympa.

Nous sortons ensuite sur la petite place où se trouve une église franciscaine. Alejandro nous explique que les dominicains et les franciscains avaient une vision bien différente de la conquête. Les premiers l'envisageaient par la force, comme lors de l'Inquisiton. Les seconds pensaient à une conversion plus en douceur. Ils apprenaient la langue et les coutumes, puis bâtissaient des églises avec d'immenses portes. Ils donnaient des messes, et les gens en étaient curieux et venaient s'intéresser d'eux mêmes à la religion catholique. Cependant, ils en ont fait un syncrétisme, comme partout, avec la Virgen de Guadalupe.

Nous arrivons maintenant sur la place principale, qui est la deuxième la plus visitée du Mexique. Nous pouvons voir l'église de San Juan Bautista, le bâtiment le plus ancien du quartier. L'endroit est très animé, il y a des gens qui font de la musique, des cireurs de chaussures ... Nous marchons jusqu'au marché local, qui est certes touristique mais aussi apprécié des locaux pour venir y manger. Alejandro nous conseille un petit stand de nourriture où c'est bon, copieux et pas cher. Il nous dit que les Aztèques étaient végétariens, ou presque car ils mangeaient des insectes. Maintenant, tout le monde s'est mis à la viande.

Il nous emmène jusqu'au musée de Frida, mais nous faisons demi-tour pour d'abord aller manger là où il nous a dit. Ce sera donc des enchiladas: en verdes pour Emma, en mole poblano pour moi. C'est une sauce marron à base de cacao amer et d'autres ingrédients comme de petites tomates, des cacahuètes, des pruneaux, du sésame ... En fait à part le cacao, c'est difficile de savoir ce qu'il y a vraiment dedans car il y a plein de recettes différentes. C'est bon, mais un peu lourd voire écœurant, alors je ne force pas sur la sauce.

Nous voulions goûter un chile en nogada qui est un truc que l'on mange en septembre durant le mois de l'indépendance, nous pensions que c'était un dessert sucré mais il semblerait que ce soit un poivron vert avec de la sauce aux noix et des graines de grenade. On verra plus tard ... Nous nous dirigeons vers la Casa Azul, la maison de Frida Kahlo transformée en musée.

C'est probablement l'artiste la plus connue et la plus importante d'Amérique Latine. Elle naît en 1907 d'un père allemand et d'une mère mexicaine. Elle contracte la polio à 6 ans, la laissant avec sa jambe droite plus courte que la gauche. Elle guérit, et une fois adulte commence à étudier la médecine, mais elle a un grave accident de bus à 18 ans qui la laisse alitée pendant très longtemps, et la rendra stérile. Sa mère lui emmène un miroir et Frida commence à peindre des autoportraits. Son art est souvent marqué du domaine de la fertilité qu'elle n'avait plus, de la nature et de spiritualité. Remise, elle se marie à Diego Rivera en 1929, qui est plus vieux qu'elle mais très influent. Le couple semble assez libre, puisque Frida a des amants comme Leon Trotsky, et des amantes car elle était ouvertement bisexuelle. Elle acquiert beaucoup de renommée, fréquente d'autres peintres comme Picasso, tout comme son mari qui peint dans un style bien plus classique et devient ensuite cubiste. Elle fait aussi de la photographie, comme son père, car elle a baigné dedans: Guillermo Kahlo était épileptique et elle l'accompagnait toujours dans la chambre noire pour être sûre qu'il n'y aurait pas de souci. Elle commence à poser ensuite.

L'image du corps est très importante pour elle: elle soignait son style et tentait de cacher son handicap. Elle aimait porter des robes et vêtements traditionnels, fière d'exporter sa culture. Elle avait fait grande impression à Paris, et avait lancé le style de "la robe de Madame Rivera", ce qui est un nom sexiste pour une féministe comme elle on en convient, et si je vous en avez parlé en ces termes, vous m'auriez dit "qui ça ?". Ses tenues faisaient donc partie de son personnage, de son expression, et semblaient presque aussi thérapeutiques que ses croquis. En 1953, elle contracte une gangrène et doit se faire amputer le pied droit. "Qui a besoin de pied, j'ai des ailes pour voler", déclare-t-elle. Ce pied, cette jambe qui lui auront pourri la vie jusqu'à la fin. Elle meurt en 1954 dans la Casa Azul à l'âge de 47 ans.

Ce que je peux reprocher à ce musée, c'est qu'il y a peu de tableaux, et qu'on ne se sent pas tant immergés que ça dans la vie de Frida. Nous nous rendons compte que dans le billet est inclue la visite du musée Diego Rivera, qui est à 4km de marche d'ici. Nous avions envie de faire un trajet faisable à pied, et je me sens en forme, donc c'est parti !

Le musée s'appelle aussi Anahuacalli et contient une très grande collection de figurines préhispaniques, que Diego affectionnait. Le bâtiment est aussi magnifique, tout en pierre volcanique. Nous ne pouvons pas non plus prendre de photos en intérieur sans acheter un permis. En tout cas, la visite est une très bonne surprise.

Nous en apprenons plus sur le dieu Tlaloc, celui des pluies et de l'eau verticale en général, qui a un nom simple. Il pouvait déclencher quatre pluies: celle pour les bonnes moissons, celle qui les fait pourrir, celle qui les fait geler, celle qui les assèche. Chacune était dans un réceptacle, placé aux quatre coins de l'univers. Les fidèles, les tlaloques, représentaient physiquement ces réceptacles. Quand ils les frappent ils produisent du tonnerre, quand ils les brisent, de la pluie. C'est aussi le Dieu qui accueille les morts de soif, noyés, ou frappés par la foudre dans son royaume de Tlalocan.

Il y a aussi Huehueteotl, le Dieu du feu et des volcans. Il est représenté comme un vieillard, car le feu serait le plus vieil élément du monde, avec un brasier sur le dos et de la fumée.

Les femmes qui mourraient en couches devenaient des Cihuateteo, des guerrières mortes sur le champ de bataille.

L'orage gronde, mais la pluie ne tombe pas. Nous rentrons en colectivo, et rentrons dans le centre de Mexico. Nous nous arrêtons dans une grande pâtisserie, le système de commande est un peu compliqué et Emma prend une figurine en gélatine au goût un peu étrange, et nous retournons à l'hostel. Nous y retrouvons Valentin, Suisse de Lausanne, que nous avions croisé la veille et qui nous avait dit partir aujourd'hui. Il s'était trompé dans la date de son vol, il part demain. Nous sortons vers 21h, en parvenant à nous débarrasser d'un Écossais bourré du matin au soir, et qui est dans un état pitoyable. Il essaye de nous suivre mais heureusement, il se casse la figure et nous passons par les escaliers pour le semer.

Dehors, nous tombons sur le son et lumière sur le Zócalo, en l'honneur du peuple indigène. Mais nous n'arrivons pas à trouver de resto ouvert, à part du maïs avec de la sauce bizarre, mais ça nourrit. J'en profite aussi pour donner le plat d'hier, que je n'aime vraiment pas, à un sans abri. Heureusement nous pouvons retrouver de la nourriture à l'hostel !

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Le Serrat d'en Vaquer

Aujourd'hui, nous allons visiter la fameuse cité de Teotihuacan. Valentin nous a dit avoir été un peu déçu, ayant vu les ruines mayas avant, qui sont bien plus impressionnantes. Pour nous, ça tombe bien, on n'a encore rien vu. Nous discutons avec lui et un autre gars durant tout le petit dej, puis il est temps de se dire au revoir.

Nous partons sur le coup des 10h30 pour aller prendre le métro jusqu'à la station d'autobus de Mexico Nord. Pour changer, nous allons jusqu'à la station Allende, en passant par d'autres rues que nous connaissons moins. Je n'ai pas parlé de la situation covid ici, il n'y a pas de loi pour le masque à l'extérieur mais tout le monde le met, il y a des gens avec des panneaux "usa el cobreboca" dans les endroits fréquentés, d'autres qui donnent des masques au besoin, et d'autres qui viennent voir les gens pour leur mettre du gel hydroalcoolique sur les mains. Les règles sont bien respectées (pas comme en Serbie!)

Après deux correspondances nous arrivons au terminal de bus. Sur internet, ça semblait beaucoup plus simple de trouver où aller, en plus l'info que j'avais était fausse. Nous demandons donc à des gens, pour finalement nous rendre compte que nous sommes parties à l'opposé. Mais nous finissons par trouver le guichet et le bus en question. Il met 45 minutes pour quitter Mexico, il y a un peu de bouchons mais ce n'est jamais pire que Bangkok ... En sortant de la ville, nous pouvons voir des villages accrochés à flan de montagne, avec des maisons colorées ou encore grises car non peintes. C'est un sacré contraste.

Il y a un gars qui est monté dans le bus pour chanter, mais il ne maîtrise pas très bien certaines notes. Nous arrivons finalement à Teotihuacan sur les coups de 13h30. À l'entrée, nous déjouons une tentative d'arnaque grossière, un gars qui nous dit qu'il n'y a plus de bus après 13h30 et qu'il faut lui acheter ... On ne l'a même pas laissé finir.

Arrivées sur le site, les premières ruines ne sont pas très impressionnantes. Des pierres et de la végétation dessus, "on dirait le Serrat d'en Vaquer" dit Emma. Mais heureusement, le reste, c'est pas la même. Nous voyons les deux grandes pyramides, Piramide del Sol et Piramide de la Luna tout au fond. La perspective nous joue des tours, car l'Avenue des Morts, qui mène au coeur de la ville, est très longue et il faut passer des escaliers qui montent puis qui redescendent. Cela est prévu comme une procession et effectivement, on sent bien cet aspect dans nos genoux et mollets. Et cet arrangement fait que l'on découvre des monticules en arrivant sur les placettes, que l'on n'avait pas vus de loin. C'est assez surprenant. À mesure que nous approchons des pyramides, les bâtiments sur les côtés de l'avenue sont de mieux en mieux conservés. Il y a d'ailleurs une belle symétrie. Enfin, nous atteignons notre but, plus d'escaliers, plus de paliers. La pyramide du Soleil est immense et tout le monde s'y presse. Ce qui est drôle, c'est que les vendeurs ambulants proposent des appeaux qui font le bruit de jaguars et d'aigles, et ils jouent aussi "Vive le vent" à la flûte de Pan. Il en résulte une cacophonie qui crée une ambiance sonore un peu ridicule, en plus les touristes en achètent et s'y mettent aussi. On croirait qu'il va y avoir des attaques de jaguars.

Teotihuacan était une cité où la religion était dominante, mais elle était aussi avancée dans les arts et la science. Elle a probablement été construite en 100 avant JC, et abandonnée entre 700 et 750. On ne sait pas vraiment qui l'a construite en premier car plein d'ethnies la revendiquent. D'après les hypothèses les plus probables, la ville aurait été incendiée, mais seulement les quartiers de la classe dirigeante, ce qui peut faire penser à une émeute. Les habitants pourraient avoir souffert de malnutrition, ayant alterné une période de sécheresse puis de gel.

Les toltèques l'ont réinvestie après sa chute, puis les Aztèques, qui l'ont nommée telle qu'elle, "la ville où les hommes deviennent des Dieux", en langue nahuatl.

En plus des deux grandes pyramides, on peut aussi voir el Mural del Puma, qui comme son nom l'indique, représente un gros chat sauvage qui pourrait être un puma. On ne voit pas sa tête et il semble être représenté dans un milieu aquatique, avec des chalchihuites (des pierres précieuses).

Autant la zone archéologique est encore ouverte, autant les sites annexes comme le musée sont fermés. Et rien n'était précisé, donc nous avons eu cette mauvaise surprise en y arrivant. Il n'empêche que ces ruines sont très impressionnantes et la cité devait être immense. Nous nous sentons bien en immersion, probablement à cause de la procession sur l'Avenue des Morts.

Il ne fait pas très chaud, il y a du vent, il fait gris, mais la visite était agréable. Nous arrivons à prendre le bus de retour sans avoir à repartir en sens inverse (ça alors, il y en avait encore !), après avoir mangé de la pastèque.

Un autre gars monte pour jouer de la musique pendant le trajet. Pas de bol, il se met juste à côté de nous. Mais il s'avère qu'il a une voix percutante, qui me file la chair de poule, bien que quand il se mette à siffler cela me fasse un peu mal aux oreilles. Je lui donne de l'argent à la fin de sa prestation, en espérant qu'il puisse aller au moins prendre une douche.

Une fois de retour au terminal, nous mangeons de petits tacos avec un consomé, une sorte de bouillon un peu piquant. Puis nous marchons pendant une demi-heure pour nous rendre à la Basilica de Guadalupe, une grande place religieuse avec une grande église récente toute ronde, et deux autres qui sont aussi toutes tordues et qui menacent de se casser la gueule sur nous. C'est Valentin qui nous l'avait conseillée, mais on n'est pas emballées.

Sur le chemin du retour, Emma s'achète du maquillage et nous prenons des nouilles instantanées et un sandwich au 7-Eleven vu que tout ferme à 21 heures. Sur la terrasse, je prends un cocktail au mezcal et nous faisons la connaissance d'Alexis, qui vient de Charente-Maritime.

L'ouragan Grace risque cependant de perturber nos plans, nous prenons demain l'avion pour Mérida mais il vient droit sur nous. Il a touché Tulum et a ensuite traversé le Golfe du Mexique, mais c'est apparemment devenu une tempête tropicale, moins forte. Elle va toucher Mexico demain, donc, suspense.

21
août
21
août

Finalement, la tempête passe bien au nord de Mexico, et nous n'avons que de la pluie normale. Heureusement que nous partons aujourd'hui, c'est un peu morose comme vrai premier jour pour Alexis. Nous prenons bien le temps de nous reposer dans la matinée, car le vol est à 16h45. Et il ne semble pas annulé, quelle chance !

Mais à l'aéroport, c'est la galère. Nous mettons 20 minutes à trouver où déposer les bagages, car en même temps ce n'est pas très logique, puis il faut que nous remplissions le formulaire de santé qui ne veut pas nous prendre nos dates de naissance, mais ils nous laissent passer à la sécurité, puis nous ne trouvons pas les panneaux d'affichage de la porte d'embarquement ... Pas mal de stress, mais au final on y est arrivées. L'avion tangue de gauche à droite au décollage, mais une fois dans les airs, ça va mieux. Pour moi, le vol passe plutôt vite, pour Emma aussi vu qu'elle dort. La chance.

Petit choc thermique à la sortie de l'aéroport, climat tropical oblige, mais nous sommes en fin de soirée donc ça va. Nous sortons à pied de l'aéroport, pour aller prendre un colectivo qui nous emmène en centre ville. Un vrai, qui s'arrête quand on lui demande, nous en profitons pour demander à être déposées au coin de notre rue, même s'il faut marcher quelques blocs. Mais choc, il y a de l'eau partout, tous les carrefours sont inondés, Grace est bel et bien passée par là et la pluie ne s'est pas bien évacuée. Les voitures et bus prennent l'allure de bateaux.

Notre hostal (donc guest house) se nomme Casa Garza, les lieux sont très beaux et il y a une petite piscine que je testerai probablement demain avec plaisir. Notre hôte Irma est très gentille, par contre l'ambiance ne semble pas très propice aux rencontres. Tant pis, ça sera relaxant, on se socialisera à nouveau à Tulum.

Nous allons prendre notre dîner dans un restaurant que nous jugeons un peu cher. Bon, moi, je n'ai pas vraiment faim, je me sens nauséeuse donc un sandwich pour tenir la nuit sera suffisant, et le guacamole que nous partageons.

Les rues sont peu éclairées, mais pour l'instant, pas de sentiment d'insécurité non plus. Les boutiques sont différentes de celles de Mexico et il y a de beaux souvenirs, certains bien kitchs, qui pourraient me faire envie. C'est aussi une ville où il y a des calèches. Mais nous en apprendrons plus demain, lors du walking tour.

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L'adaptation compliquée 

Il y a pas mal de lumière dès le matin dans le dortoir, et cela nous réveille vers 7 heures. Après le petit dej, nous marchons jusqu'au parc Santa Lucia pour trouver le guide de notre walking tour de la matinée, en espagnol. Avec la chaleur, c'est dur de se concentrer.

La région du Yucatan a été nommée ainsi par les conquistadores espagnols qui, rencontrant les Mayas, leur ont demandé s'ils avaient déjà un nom pour ce lieu. Ils ont répondu dans leur langue "écoute ce que je dis", et les espagnols ont mal compris. La conquête s'est faite différemment qu'avec les Aztèques car le peuple était moins guerrier, plus porté sur le spiritualisme, et plus dispersé. Ceci étant dû au fait qu'ils construisaient des cités puis allaient ailleurs une fois qu'ils avaient épuisé les ressources, et ils étaient déjà sur le déclin car il n'avait pas plu pendant 40 ans. Mais pourtant, ils ont pu résister plus longtemps car les Espagnols n'étaient pas préparés au climat tropical. Ils avaient lancé des expéditions complexes où ils ont manqué d'eau et de nourriture, notamment dans l'état de Tabasco où les conditions sont encore plus extrêmes. Ils ont aussi capturé des conquistadores qui s'étaient échoués près de Chetumal, et les avaient engraissés. Cela a créé le mythe que les Mayas étaient cannibales. Francisco de Montejo échoue deux fois, mais son neveu parvient à fonder Mérida en 1542. Les Mayas ont été aussi affaiblis par une épidémie de variole importée par les colons à partir de 1521, qui a décimé une grande partie de la population, à tel point qu'il ne reste maintenant qu'un faible pourcentage de gènes indigènes.

Les Espagnols ont aussi fait venir des esclaves dans le Yucatan. Le parc Santa Lucia en était la plaque tournante, et marquait la frontière entre le quartier des riches espagnols, le centre ville, et celui plus pauvre. Aujourd'hui, la tendance s'est inversée car les plus riches vivent à la périphérie du centre ville, dans le passage Montejo.

Nous passons ensuite devant l'Université autonome du Yucatan. Son dernier étage est dédié au peuple libanais, qui a fait des dons car le Yucatan avait accueilli des immigrés. Ils accueillent aussi des Afghans, et d'ailleurs à partir de jeudi ils vont débuter un nouveau plan d'immigration pour les réfugiés qui vont fuir le pays incessamment sous peu.

Nous passons ensuite devant le théâtre Felipe Carillo Puerto, qui était gouverneur du Yucatan en 1922. Socialiste, il a beaucoup œuvré pour le droit des femmes, faisant tenir le premier congrès féministe d'Amérique latine. Il était aussi sensible aux droits des indigènes vu qu'il avait probablement des origines mayas. Il s'était d'ailleurs engagé contre le racisme envers eux quand il était jeune, ce qui lui avait valu d'être emprisonné. Pendant la Révolution Mexicaine, il n'a pas voulu soutenir le parti des révolutionnaires et il a été fusillé en 1924 avec trois de ses frères.

Les églises ont aussi leur petite histoire. Elles sont faites avec les pierres des pyramides que les colons ont trouvées, et on peut voir la croix maya sur certains murs, qui était en fait une rose des vents. C'est une pierre très calcaire que l'on trouve dans les cenotes, où l'eau est très froide. Ce calcaire donnait d'ailleurs des calculs rénaux aux Mayas.

La ville est très jolie, avec plein de petites placettes, mais nous avons bien trop chaud après cette marche, rester debout et se concentrer étant un peu épuisant. Nous décidons donc, dans l'ordre: de nous renseigner pour un tour à Uxmal mais c'est vraiment trop cher (50 euros), de passer à la pharmacie acheter des masques (ça l'est beaucoup moins), elle m'a proposé des blancs, roses, noirs ou bleus et je n'étais pas habituée à tel choix, puis d'aller à la station de bus pour nous renseigner sur le trajet pour Uxmal mais il y avait trop de monde, et enfin de rentrer à l'hostel et de profiter de la piscine, de midi à 14 heures. L'eau n'est pas très propre mais elle est fraîche, et c'est revigorant !

Nous ressortons un peu avant 15 heures, car le guide nous a dit que le Musée de la Gastronomie Yucatèque tenait des ateliers intéressants sur des plats locaux. Effectivement, nous pouvons voir des femmes préparer les tortillas, mais aussi des hommes qui déterrent une sorte de caisson qui cuisait sous terre, avec du relleno negro dedans. C'est un plat préparé avec des piments séchés au soleil, de telle sorte que ça ne pique même plus, et qui a un goût fumé très prononcé. C'est délicieux, mais nous n'en profitons pas au restaurant du musée, qui est un peu cher. À la place, nous allons dans un petit restaurant un peu boui-boui qui pue les poubelles mais la nourriture est bonne, et moins chère. Il va falloir qu'on se calme un peu sur le budget ! Emma reprend un consomé de poulet bien moins piquant que celui de Mexico, tandis que je goûte un pollo pibil cuit dans une feuille de bananier.

Pendant que nous mangeons, deux grosses averses passent, et aussi un clodo relou que nous avons bien tenté d'ignorer mais il n'a pas compris notre intention. Quand nous ressortons, le temps est un peu plus stable.

Nous nous dirigeons vers le Paseo de Montejo qui est la grande avenue avec toutes les maisons coloniales, que l'on retrouve dans plein de villes. Motivées, nous marchons jusqu'au bout, jusqu'au monument à la patrie en l'honneur des indigènes, apparemment. Cela nous fait une belle randonnée urbaine.

Nous n'avons toujours pas notre billet pour le bus de demain, donc rebelotte, mais cette fois il n'y a personne qui fait la queue, nous avons eu du nez. Nous prenons l'aller retour, départ à 9 heures, mais nous allons probablement patienter longtemps avant notre bus de retour.

Ce soir, donc, nous ne sortons pas au resto, nous faisons donc des courses au Oxxo. Pas de chance, il n'y a pas grand chose non plus, mais nous pouvons trouver des oeufs, des champignons et du maïs. Et de la gélatine violette au raisin. Mais aussi de l'agua de Jamaica, de l'eau infusée à l'hibiscus qui vend un peu plus de rêve sur le papier qu'en vrai. Mais j'ai tellement soif de quelque chose de frais et sucré que je me l'enfile très vite.

J'ai le temps pour un petit plouf dans la piscine, qui se transforme en une baignade d'une heure pour éviter les moustiques qui sont de sortie. Et il semblerait que tout le monde parte ce soir, l'hostal se vide très vite et nous ne sommes plus que nous deux dans le dortoir, ce qui n'est pas plus mal car c'est bien plus respirable.

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Uxmal

Le réveil est un peu dur ce matin, à 7h30, mais je suis parvenue à éviter une insomnie qui me guettait. Aucun problème pour prendre le bus depuis le terminal, mais il ne faudra pas rater celui du retour car il n'y en a qu'un, aux alentours de 15h-15h30.

Nous partons donc visiter Uxmal (à prononcer Ouch-mal) , une antique cité maya avec des pyramides impressionnantes. J'espère que cela en vaut la peine, car le prix est assez élevé. Nous passons dans les villages d'Uman et Muna (oh, ce sont des anagrammes) qui sont assez animés, surtout le premier où se tient un marché proche de l'arrêt de bus. Nous remarquons des tuktuks, avec des chauffeurs à scooter bien que nous en ayions vu un à vélo à Mérida. Nous remarquons aussi beaucoup de rapaces qui tournoient dans le ciel, ils sont appelés les pilotes. En continuant notre route, nous montons à flanc de colline, ce qui nous livre une très belle vue sur la vallée où les arbres tropicaux s'étendent à perte de vue. Quand nous descendons du bus, quatre Espagnols de Barcelone nous proposent de prendre un guide à tous les six. C'est Orlando qui vient nous accoster pour proposer ses services. Pour une fois, je suis partante, pour 100 pesos par personne c'est plutôt pas mal.

Nous apprenons ainsi qu'Uxmal signifie "construite trois fois", même si elle est en voie d'être reconstruite une quatrième fois puisque la restauration du site est en cours. Il y avait 30 000 habitants à l'époque, c'était une ville assez riche qui était un centre de pouvoir, gérant environ une centaine de villages. Ils s'étaient établis dans une vallée très fertile, même s'il n'y a pas de cenotes. Ils ont donc créé des lacs artificiels et des citernes, mais ensuite est arrivée la période de sécheresse.

Nous faisons face à la magnifique Pyramide du Devin, qui serait sortie de terre en une nuit selon la légende. En fait, on peut voir cinq périodes de construction différentes. Il y a un temple à l'intérieur, dédié à Chac le Dieu de la pluie et analogue de Tlaloc. Selon les reconstitutions, la ville aurait été majoritairement peinte en rouge, mais il manque des informations vu que les conquistadores ont fait des autodafés et brûlé beaucoup d'informations. En plus d'être impressionnante, cette pyramide est rigolote car lorsqu'on tape des mains, un effet d'écho se crée avec l'ouverture sur la face Est, produisant un petit chuintement connu comme le cri du quetzal.

Nous continuons avec un peu d'architecture: le faux arc maya. Les Espagnols l'avaient comparé aux arcs romans, mais en fait il n'y a pas de pierre angulaire. Ce sont deux murs qui se rejoignent. Nous pouvons en admirer au niveau du Guacamayo, ainsi que des gravures du masque de Chac, et des têtes de serpents emplumés. Nous voyons aussi des buos, des oiseaux messagers de la mort, représentés autour de spirales qui symbolisent le vent. Nous apprenons aussi que le jade était beaucoup plus populaire que l'or, bien plus cher, il servait à faire des masques funéraires, ainsi que l'obsidienne pour les yeux (d'où le commerce avec Teotihuacan). Quand les colons sont arrivés, ils ont réclamé de l'or, et les Mayas leur en ont donc donné sans problème.

Nous voici maintenant dans le Quadrilatère des Moines, nommé ainsi lors de la découverte de la cité en 1586, alors qu'il n'y avait probablement pas de moines, pour ainsi dire. Ils ont aussi cru à un palais car il y a un trône, mais il est possible qu'il s'agisse d'un fauteuil pour un enseignant. L'endroit pouvait aussi servir de place pour les cérémonies, au vu de son acoustique incroyable. Elles devaient se tenir aux équinoxes et solstices, car sur certaines gravures l'ombre se trouve entre deux serpents à ces moments de l'année, symbolisant le passage d'une saison à l'autre. Les bâtiments sont décorés dans le style puuc, qui signifie colline : toutes les gravures sont en haut, alors que le bas est plus sobre.

De l'autre côté de la Pyramide du Devin, nous pouvons voir l'entrée du temple. Non seulement l'entrée est décorée de masques de Chac, mais tout l'ensemble forme lui-même un masque géant ! Le shaman pénétrait ainsi dans le temple comme s'il se faisait avaler par le dieu, se connectait à l'inframonde (grâce à des hallucinogènes) et renaissait en sortant.

Sur l'un des bâtiments du Quadrilatère, nous pouvons voir une gravure d'un homme avec le sexe coupé : les Mayas leur coupaient les parties génitales lors des sacrifices de sang.

Nous passons maintenant devant un jeu de pelote, mais l'anneau n'est pas l'original. Beaucoup d'interrogations demeurent quant à ce jeu. À Chichen Itza, il est possible que les matchs aient eu lieu entre prisonniers, car quand même, c'était très compliqué : la pelote pesait 3 kilos, l'anneau était haut et étroit, et les gens étaient petits, pas comme les basketteurs. Donc, la foule venait pour voir galérer les joueurs, le capitaine de l'équipe perdante était décapité. Mais ici à Uxmal, le jeu avait probablement une connotation religieuse, comme la porte d'accès à l'inframonde, Chibalba. Cela reste une théorie.

Notre visite s'achève avec le Palomar et le Palacio del Gobernador, ce dernier reprenant tous les symboles que nous avons vus jusqu'à maintenant sur sa façade. Et avec une dernière vue magique sur la Pyramide du Devin, décidément la star de cette visite passionnante. Orlando est vraiment sympathique et calé sur le sujet. Il ne nous en veut pas non plus de nous être parfois plus intéressés aux iguanes qui courent partout dans les ruines. D'ailleurs, ils étaient considérés par les Mayas comme les gardiens de la terre. Ils ne les mangeaient donc pas, si vous vous posiez la question. Ce n'est pas très poli.

Nous allons manger un repas léger au restaurant sur place, avec les plats les moins chers, mais encore de délicieux jus de fruits (chava, orange, ananas). Pendant notre repas, la pluie se déchaîne, mais nous sommes au sec. Nous partons ensuite attendre le seul bus de l'après midi qui va nous ramener à Mérida et qui vient de Campeche, donc il y a du monde dedans et nous passons le trajet debout. Pas mécontentes d'être arrivées, nous prenons nos billets de bus, et les horaires, pour Chichen Itza demain. Il pluviote toujours mais les carrefours se sont à nouveau transformés en petits lacs, cette ville a vraiment un problème d'évacuation.

Après avoir rencontré des Québecquois qui nous ont donné de bons conseils, enfin, d'après ce qu'on en a compris - cet accent putain - nous ressortons vers 19h30 pour aller manger, et ensuite assister aux danses Vaquerias Yucatecas, qui ont lieu tous les lundis devant le Palacio Municipal, gratuitement. Nous ne pouvons pas être tout à fait l'une à côté de l'autre car les chaises sont espacées, cause covid. Entre temps, nous avons appris que seulement 27% de la population Mexicaine était vaccinée. Vu comme ils sont à cheval sur le respect des mesures, ça doit être par manque de doses.

Ces danses sont sympas au début, mais c'est très répétitif. Autant dans les mouvements que dans la musique qui les accompagne. Et puis tout à coup ils commencent à faire des trucs de fou comme danser avec une bouteille de bière sur la tête, puis un plateau qu'ils ne font pas tomber tout en tournant sur eux mêmes, puis en se mettant sur une petite caisse ... Finalement c'est assez impressionnant. Et puis comme d'habitude, parce que nous sommes de petites vieilles et que la journée nous a fatigué, dodo !


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Chicken Itza

Grosse journée aujourd'hui, mais on n'a quand même pas envie de partir trop tôt. C'est donc à 10 heures que nous prenons notre bus pour Chichen Itza, l'une des sept merveilles du monde moderne. J'y étais déjà allée quand j'avais 13 ans et je m'en souviens assez bien, mais ça vaut quand même le coup de s'y rendre. Orlando, le guide d'hier, nous a prévenues qu'on ne pouvait plus voir le jaguar aux yeux de jade, ni monter tout en haut de la pyramide "alors que c'était possible il y a 20 ans". Oui, effectivement.

Le bus est assez lent et met bien trois heures à arriver à destination. Il faut dire qu'il passe dans tous les petits villages, ce qui rend le trajet intéressant, mais je croise les doigts pour que nous ne nous fassions pas voler nos backpacks. Tout ce que j'ai lu sur internet me fait un peu peur.

Mais j'aurais dû plutôt m'inquiéter des hordes de touristes et marchands à l'arrivée sur le site. Enfin, on s'en doutait, tout de même. Nous allons mettre les sacs en consigne, dans des casiers qui ont failli ne pas pouvoir accueillir mon backpack, mais en poussant, ça rentre. Maintenant, il faut payer l'entrée qui coûte environ 25 euros, en cash car sinon il faudrait payer à deux fenêtres différentes - la taxe du gouvernement et l'admission - puis, j'ai envie d'un hot dog avant d'entrer mais je dois l'engloutir car pas de nourriture autorisée à l'intérieur. Et enfin nous y sommes, et nous traversons l'allée de stands en nous faisant alpaguer toutes les deux secondes.

Mais de mon point de vue, la pyramide de Kukulkan (l'équivalent de Quetzalcoatl) est splendide. Elle est encore plus belle que dans mes souvenirs car elle a été restaurée sur deux de ses faces, et semble encore à l'état sauvage sur les deux autres. Ce qui est aussi sauvage, ce sont toutes les instagrameuses qui font des photos devant, avec leurs petites poses de pétasses et leurs petits sacs Vuitton. Qu'à cela ne tienne, nous aussi on en fait, mais de manière plus ridicule. Et cette séance terminée, on s'enfonce dans la jungle pour voir d'autres ruines, et un premier cenote où des têtes coupées étaient jetées.

Chichen Itza était considérée comme le plus grand centre religieux de l'époque Maya, car elle a été construite proche du Cenote sacré, l'entrée du monde des Dieux. Ce sont les Itzas qui l'ont bâtie, une branche particulière des Mayas car ils véhiculaient une religion empreinte des toltèques. C'était le siège du pouvoir à la fin de la Période Classique et au début de la Période Postclassique. La ville contrôlait ainsi les salines et les échanges portuaires de l'état de Tabasco jusqu'en Amérique Centrale. Ils avaient un fort pouvoir militaire, mais qui a commencé à décliner au 13e siècle avec la concurrence de Mayapan. Il se peut aussi qu'ils aient tellement asservi les autres peuples et fait tellement de sacrifices qu'ils n'avaient plus assez de main d'œuvre. Chichen est cependant resté un haut lieu de pèlerinage.

Ce Cenote Sacré est d'ailleurs plutôt impressionnant. 60 mètres de large pour 34 de profondeur (22+12). Il n'y avait pas que les têtes des hommes sacrifiés, il y avait aussi du quartz, de l'or, du cuivre, de l'obsidienne, du bois, des coquillages et même des textiles ... Un beau bazar. Nous avons l'impression d'être nous-mêmes en pèlerinage puisqu'il fait une chaleur monstrueuse et que tout le monde nous alpague.

De retour sur la place principale, nous pouvons admirer le Temple des Guerriers, avec son Chac Mool qui en garde l'entrée, et le Temple des Grandes Tables, mais aussi la plateforme de Venus. Comme la planète, pas la déesse, évidemment. Il y a là de magnifiques fresques très bien conservées, et sur une autre plateforme, nous pouvons voir plein de petits crânes - je me demande ce qu'ils pouvaient bien y faire - ainsi que des aigles et des jaguars.

Mais le stade du Jeu de Pelote les surpasse encore. Il est très grand, c'est le plus grand de Mésoamérique, l'acoustique y est parfaite. Les anneaux sont à neuf mètres de haut, très étroits, et les murets pour y accéder semblent bien trop grands pour des personnes d'1m70. Cette thèse des prisonniers sacrifiés tient bien la route, cela permettant au passage de faire des offrandes aux Dieux. D'ailleurs il y a encore des fresques sur les côtés du stade, représentant des hommes, ceux qui allaient mourir, mais aussi des guerriers et des hauts dignitaires. Les détails sont incroyables. Et en ce qui concerne les spectateurs, ils montaient tout en haut des murs pour avoir une vue plongeante sur les matchs.

Être au soleil nous tape un peu sur le système, et nous nous enfonçons à nouveau dans la jungle pour être plus tranquille. Nous nous rendons jusqu'à l'Observatoire, aussi appelé Caracol (coquillage en espagnol mexicain, escargot en catalan) car son toit y ressemble. Il y a aussi quelques édifices réservés aux religieux, grignotés par la jungle.

Nous avons pris environ 2h30 pour tout visiter, et nous avons de la chance car les gros nuages menaçants n'arrivent que maintenant. Ils donnent à la pyramide un style dramatique. Mais si nous voulons manger avant de reprendre le bus, histoire de ne pas tourner de l'oeil, c'est maintenant. Le hasard faisant bien les choses, la pluie se met à tomber au moment où le site doit fermer. Incroyable, quelle bonne idée de leur part. La fraîcheur qu'elle amène est la bienvenue, mais pas de là à attendre le bus en finissant trempées. Alors que les meutes s'en vont, le volume sonore est à son maximum, c'est fatigant ... En plus, le bus pour Tulum a du retard. 30 bonnes minutes, mais au moins il y a des places assises. Il passe par Valladolid, où j'achète une délicieuse limonade à un vendeur ambulant. Il va nous falloir trois bonnes heures de route pour atteindre notre prochaine étape.

24
août

Ah, les touristes américains, les cafés, les bars et les petits restos vegans. Bienvenue à Tulum ! Et ses rues qui ont des noms inspirés par les constellations, les signes astrologiques et la mythologie grecque, à tel point que je me demande si le gars qui a eu cette idée ne serait pas fan de Saint Seiya. Pour un dépaysement, ce n'est pas ici qu'il faut aller, mais l'étape est la bienvenue. Nous sommes un peu contrariées car la météo prévoit de la pluie pour la moitié de notre séjour. On va bien voir comment on va s'arranger ... Nous nous installons à l'hostel, qui a une très belle piscine .. Qui pue. Oui, ça sent les canalisations. Peu importe, j'y vais quand même, histoire de me délasser un peu les jambes. Puis nous ressortons manger dans un petit resto qui ne paye pas de mine. Un guacamole, des milkshakes, et des platillos. C'est une base à mettre dans les tortillas, par exemple de la viande, du fromage, des poivrons et des champignons. On a encore un peu de mal à comprendre la différence entre tous les plats, car on dirait partout les mêmes.

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Chill

Mon ventilateur usb est cassé, ce qui fait que malgré la climatisation bien fraîche, mais dormant dans un petit box, j'ai eu chaud. Bon, ce n'est pas bien grave. Nous décollons tard, vers 10h30-11h, pour chercher un scooter à louer, car notre hostel nous le propose à 700 pesos et c'est trop cher. Et en demandant à un gars dans la rue, il nous propose 500. C'est une toute petite agence de location. Nous allons quand même comparer les prix, ce sont les mêmes mais l'autre gars à qui nous demandons n'est vraiment pas sympa. Nous recontactons l'autre qui nous a laissé sa carte, mais nous galérons à trouver la maison en question, on se retrouve dans un salon de coiffure. Bon, on a fini par y arriver, et c'est un bonheur de conduire à nouveau un scooter ! Je conduis un peu toute seule pour le prendre en main, histoire de ne pas faire tomber Emma, mais les réflexes reviennent vite. Et sous un soleil éclatant, nous voici lancées ! Notre premier objectif serait d'aller voir la Playa Ruinas de plus près, mais nous ne pouvons pas y aller en scooter. Nous pourrions tout aussi bien nous arrêter sur une plage publique, mais il paraît qu'il y a de gros problèmes de sargasses. Beaucoup de monde conseille d'aller à la Caleta Tankah qui est à environ 5 kilomètres au nord de Tulum. C'est une plage où il n'y en a jamais. Alors, c'est parti ! Le trajet est marrant mais pas extrêmement agréable car nous longeons une grande route très fréquentée. Mais nous y parvenons en 10 ou 15 minutes, donc, ça va. Aller à Akumal, située à 25 km de là, semble maintenant un peu trop ambitieux. Mauvaise surprise cependant, l'accès coûte 300 pesos par personne. Avec l'accès à la plage, le transat, le cenote et le stationnement inclus. Bon ... Allez, on le fait. Au moins on est sûres de pouvoir se baigner, et profiter peut être de la seule belle journée sans pluie.

Et on râle, on râle, mais payer en valait la peine. La mer est un peu démontée, très marronasse, sauf à l'endroit de la petite piscine naturelle qui a des airs de lagon. Du sable blanc et fin, peu de roulis, mais un effet piscine à vagues dès que l'on s'approche des bouées de délimitation. On se sent happées par le courant, se baigner ailleurs aurait été bien dangereux. L'eau est très bonne, et très agréable malgré les autres baigneurs. Avoir un transat et de l'ombre, c'est quand même assez confort quand il fait 33 degrés avec un ressenti de 38.

Nous décidons cependant d'aller marcher un peu lorsque quelques nuages viennent voiler le soleil. Il y a un espèce d'hôtel qui semble abandonné mais pas vraiment non plus car on n'y voit que les gens qui y travaillent, mais l'effet urbex est peut être dû à l'ouragan qui a arraché des parties de la toiture. Quoiqu'il en soit, nous avons une vue sympa sur cette partie de la côte, et à notre retour nous suivons le panneau "cenote". Nous traversons une petite partie de la jungle pour, et bien, tomber sur un cenote. Alors oui il y a un peu de monde. Mais putain, c'est paradisiaque. De l'eau translucide, de la végétation abondante, un peu d'ombre, des rochers tout doux sous la plante des pieds, pas étonnant que les Mayas pensaient à des endroits sacrés et des manifestations divines ! C'est très agréable. En repartant sur la plage, nous essayons un jeu où il faut lancer une pelote dans le trou de l'autre joueur, c'est un peu dur mais on s'en sort. Une dernière baignade dans la mer pour la route, un peu de bouffe et vers 17 heures ils ferment. On pourra dire qu'on en a bien profité ! C'était chill, mais qu'est ce que c'était bien.

Emma essaye de conduire le scooter avant qu'on ne reprenne la route du retour. On dirait qu'elle a fait ça toute sa vie (sans ironie) mais bon elle sait pas tourner et ça, c'est con. Quand je reprends les commandes, on doit passer dans la jungle. Elle a voulu faire une vidéo mais pas de bol, ça n'a pas marché. Pourtant, on s'était presque cassé la gueule, et tout, parce que c'était une route avec des cailloux. Dommage.

Il ne fait pas encore nuit et on compte bien profiter de notre petit scooter vert fluo. Nous voulions nous lancer sur la route du Kaan Luum Lagoon, mais l'accès est aussi fermé depuis 16 heures. Tout ferme beaucoup trop tôt dans ce pays. Sur la carte, je repère un lac et une route qui passe dans la jungle. Nous sommes motivées pour explorer les environs, mais prenons la mauvaise route. Emma veut demander s'il y a un resto sympa dans le coin, mais sous estimant son pouvoir de séduction, elle fait peur aux pauvres gars qui n'ont jamais vu une fille aussi sexy. Ils n'osent même pas la regarder en face. Probablement qu'ils vont la maudire et faire des sacrifices à Quetzalcoatl, on espère juste que ça ne va pas enlever la bénédiction de la petite veste sur l'île des poupées.

Nous continuons notre route vers un quartier un peu reculé, dans la forêt, et il y a un chemin de terre qui mène à un lac. Mais plus nous progressons sur cette route, plus nous nous posons des questions, car il n'y a rien, c'est reculé, et il y a des déchets tout le long. Sachant qu'il y a des histoires de cartels à Tulum, on se dit que finalement c'est une idée de merde, et on fait demi-tour. Peut être que c'était juste les ordures habituelles car c'est un endroit populaire pour les locaux, mais on ne dirait pas, et puis deux filles qui se font enlever au Mexique ça arrive souvent. Nous sortons sans croiser personne, mais ah là là, on aurait pu.

Nous rentrons tranquillement à l'hostel pour nous baigner dans la piscine et faire un triplé avec la mer et le cenote dans la même journée, puis douche et nous allons trouver un petit resto pas cher. Guacamole, fajitas et horchata (de l'eau de riz avec des trucs dedans, c'est bon). Nous allons ensuite dans un bar, nous aurions bien aimé en trouver un sympa où rencontrer des gens mais c'est assez calme. En s'installant, mauvaise, très mauvaise surprise: je n'avais pas bien fermé ma gourde, avec la pression il y a de l'eau dans mon sac, qui est étanche et qui a donc retenu l'eau dans la poche où il y a ... Ma liseuse. Et quand je la retire, je vois un filet d'eau qui en dégouline. C'est très très mal barré. Nous demandons du riz à la serveuse, qu'elle nous fait payer 100 pesos, avec un récipient. On va la laisser dedans tout le temps, en espérant qu'elle remarche un jour, qui sait ... De toute manière, pas le choix. C'est très chiant, car lire en voyage avec une liseuse c'est très chouette pour passer le temps. Mais ça aurait pu être le portable, donc relativisons.

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Encore chill

Le scooter étant à nous jusqu'à midi, nous allons prendre un petit déjeuner, acheté au Super Aki, sur la plage publique. Il fait encore très beau, il faut en profiter. Nous garons le scoot hors du parking public car on est des thugs, et on va se caler sur le sable blanc à l'ombre d'un palmier. Ça ne sent pas super bon à cause des fameuses sargasses. Il est possible de se baigner, mais la flemme car il va falloir sécher. Pour notre petit dej, c'est parfait. Mais vers 11 heures, le vent se lève, le ciel se couvre. Nous préférons partir, et c'est plus agréable de marcher quand ce n'est pas le plein cagnard, on a déjà un peu cramé hier. Nous voulons voir les ruines de Tulum de loin, puisqu'elles sont au bord de la mer. La pluie se met à tomber, petite averse tropicale, mais nous avons de quoi aller nous abriter. Il y a plein de clubs de plage vides car ces sargasses ne font pas du tout envie. Nous continuons encore un peu, on se fait alpaguer pour du snorkelling et Emma se fait encore draguer, mais nous devons retourner au scooter. On se prend encore deux petites averses sur le chemin, rien de bien grave, et nous devons rendre notre bébé. Juste à temps avant que le temps ne se déchaîne et que nous soyions coincées deux heures à l'hostel, mais le repos c'est toujours bon.

Le programme de l'après-midi n'est donc que peu mouvementé, mais important : on va se trouver un petit coiffeur, pour que je coupe plus court et me fasse raser les petits cheveux sur la nuque, et qu'Emma fasse un soin et couper les pointes. Nous allons dans le premier salon que nous trouvons, où le coiffeur nous parle de son passé avec les cartels. Il était militaire mais il est parti en live, il est venu s'installer sur la plage de Tulum pour faire n'importe quoi. Il a des cicatrices sur le visage de cette époque là. Il est ensuite devenu alcoolique et sa femme a fini par se barrer. Et puis il a décidé de changer, il a ouvert son salon, et il bosse aussi dans un centre communautaire pour aider les gens dans la rue. Il nous parle d'une dame qui s'est faite assassiner lundi dernier. Il nous raconte aussi que les grandes entreprises comme Coca viennent s'installer au Mexique car ils ne payent pas d'impôts, mais que les politiques sont dans la dynamique de redonner l'argent aux Mexicains. Ah, et aussi, son père est mort du covid, et lui a eu la dengue, le paudisme, Zika et le chikungunya. Un sacré personnage, ce monsieur.

Allégées de quelques kilos de cheveux, nous sommes cependant toujours fatiguées et nous nous reposons encore car nous voulons sortir ce soir. J'ai contacté une fille, Sarah, du groupe Facebook Voyager au Féminin qui demandait s'il y avait des gens sur Tulum. Elle est dans l'hostel avec lequel nous avions hésité, et nous pouvons y aller pour la soirée donc c'est parti. L'hostel est dans la zone hôtelière, et quand nous arrivons il y a déjà la musique à fond car il y a un DJ. Sarah vient nous chercher à la porte, elle est facile à reconnaître car elle ressemble à Anne Hathaway. Elle vient de Paris, bossait dans la mode, le graphisme plus précisément, et a décidé de partir deux ans en voyage pour un tour du monde. Pauvrette, il lui est arrivé que des merdes la première semaine: l'ouragan, les punaises de lit, le malaise en plongée, et elle s'est perdue plein de fois. Mais elle va bien finir par se rôder. Au bar pour prendre des mojitos, je parle avec un Texan qui me parle du PSG. Puis avec un Hawaïen. La côte avec les Américains, ils ont aucune chance. On va danser toutes les trois et ça ressemble à un micro Spring Break. Mais la soirée se finit tôt, 23 heures, plus de musique. Franchement l'hostel est très sympa, les dortoirs sont bien insonorisés mais c'est une vraie usine. Et il est loin du centre. Je tenterai peut être la version Cancun, cela dit.

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Coba

Ça va, réveil pas trop dur. Nous prenons un colectivo vers 10 heures pour aller visiter des ruines, encore. Mais dans un style encore différent, car elles ne sont pas rénovées, donc moins chères ! C'est un peu le souci ici. Il y a plein de choses à faire mais les activités sont hors de prix, alors il faut choisir. Observer des singes ? Oui mais il faut prendre un taxi pour aller à Punta Lagunas depuis Coba, ou alors le Sanctuary d'Akumal coûte 50 balles. Les cenotes? L'entrée coûte 15 balles en moyenne, donc il faut choisir. Rio Secreto ? 60! Ah, les cenotes vers Valladolid devaient être moins chers, pour sûr.

Revenons à Coba. C'est une cité maya, la grande rivale de Chichen Itza à son apogée. Elle exerçait son pouvoir sur l'Est et le Nord du Quintana Roo. Mais non seulement Chichen lui pique des villages, mais aussi Uxmal et d'autres. Elle est restée plus puissante sur le long terme, et avait une grande importance religieuse elle aussi.

D'ailleurs, parlons un peu religion maya. Le monde des humains était précédé d'un autre monde qui a été détruit par des inondations à cause d' un outrage aux Dieux (ça sonne familier ?). Dans cette version, c'est l'insigne des déités célestes, les Oxlahun Ti-Kû, qui aurait été volée. Après cette apocalypse, quatre arbres furent plantés aux quatre coins du monde (qui était un carré), et quatre oiseaux divins de couleurs différentes s'y sont perché. Jaune au sud, blanc au nord, noir à l'est, rouge à l'ouest. Au centre, un arbre vert a été planté en souvenir de la destruction. L'univers maya est donc divisé en quatre parties et il y a un axe qui joint les niveaux cosmiques du ciel, de la terre et du monde des morts. Ce grand carré flotte sur l'eau, marquant la frontière avec le monde des morts. La terre est représentée par une tortue ou un crocodile. Au centre, il y a une montagne sacrée avec une grotte, à l'entrée de laquelle pousse un arbre celba. On peut entrer dans l'autre monde et dans l'océan des origines par cette entrée. Une fois que le monde fut créé, avec les plantes et les animaux, le première père et la première mère ont façonné les hommes avec de la pâte de maïs, ayant échoué avec d'autres matériaux. C'est pour cela que les Mayas s'appellent comme ça : "hommes de maïs".

Ce créateur s'appelait Hunab Ku, qui était un concept invisible et donc n'était pas représenté ni représentable par les mortels. C'est le père de Itzamnâ, seigneur des paradis, du jour et de la nuit. Aux paradis, il y a 13 niveaux, tenus par les Oxlahuntiku. Aux enfers, il y a 9 niveaux, tenus par les Bolontikû.

Nous commençons notre visite des ruines par le "groupe Cobá" où il y a le Templo de la Iglesia qui est assez massif. Puis, nous marchons pendant un kilomètre pour aller jusqu'au "groupe Macanxoc" où se trouvent des stèles gravées, mais pas très bien conservées. Nous essayons de repérer des animaux car nous avons vu une tarentule et il pourrait y avoir des singes, mais tout ce qu'Emma repère c'est ... Un serpent, sa phobie. Il aurait mieux valu que ce soit un chihuahua.

Sans plus d'encombres, nous allons maintenant vers le groupe Nohoch Mul, la "grande montagne", qui est effectivement très haute, avec une ambiance plus Tomb Raider. Mais la pluie se met une fois de plus à tomber, et pas qu'à moitié. Elle inonde tout le site. Ce n'est qu'une demi heure plus tard que nous pouvons sortir de notre abri et retourner tant bien que mal à l'entrée, en sautant par dessus de vraies petites rivières. Tout ressemble à un gros marécage. Au moins nous n'avons plus à nous soucier des serpents.

Nous retournons vers le centre de Cobá car avec tout ça, il est 14h et quelques. Nous nous calons dans un resto avec un petit consomé de pollo habituel pour Emma, et un Poc Chuc pour moi, c'est du porc mariné dans des trucs mayas, et c'est plutôt bon donc il se peut que j'en reprenne et que je fasse plus attention à ce qu'il y a dedans.

En attendant le bus nous rencontrons un couple de français, ça passe le temps car nous attendons 40 bonnes minutes avant que le bus pour Tulum n'arrive. Une fois en ville, nous nous baladons un peu pour apprécier le street art, mais nous sommes crevées et en plus, devinez quoi, il se remet à pleuvoir ! ... Bon je râle, mais je savais très bien dans quoi je m'engageais: une saison des pluies, ça ne peut pas être plus clair.

La musique dans le bus 

Le soir, nous rejoignons Sarah et ses potes pour manger de la street food dans la rue. Du coup, on teste des gringas. C'est du poulet avec du fromage dans des tortillas. Et non, je n'ai toujours pas compris la différence. Je me prends aussi un sandwich avec de la viande qui vient d'Argentine, parce que j'ai encore faim. C'est pas mal mais sur le papier ça me vendait encore plus de rêve. Il y a beaucoup de chiens errants, et Sarah est allée leur acheter des croquettes, mais ils les boudent, ces ingrats. C'est bien plus intéressant mon sandwich. Pour la fin de la soirée, nous revenons finalement au Mayan Monkey où on rentre toujours comme dans un moulin, et on fait bien la fête. Il y a du monde, je recroise des gens d'hier qui sont persuadés que je suis dans l'hostel. Jour 2, ils ne se doutent de rien. Il y a beaucoup de gens stylés ce soir, c'est très marrant à regarder, mais j'ai extrêmement chaud, et demain nous avons décidé de nous lever un peu plus tôt pour faire des trucs ensemble, donc on arrête la soirée vers 22h30.

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Akumal Matata

Plan A: Kan-Yû Lagoon et Cenote Dos Ojos.

Plan B: Déjà pas le premier car mauvaise surprise, le colectivo nous laisse à l'entrée d'Akumal de manière très froide et nous dit qu'il faut marcher une heure pour y accéder. Ah bon ? C'était pas prévu, ça, je suis en tongs .. Les filles seraient motivées car elles sont en baskets, mais je n'ai pas envie de me faire des ampoules, je le sens mal. C'est soit un taxi, soit un changement de plan. Et finalement, nous nous laissons tenter par le snorkeling avec les tortues d'Akumal. Bon alors évidemment, c'est comme d'habitude, ça sera jamais la même expérience qu'en Malaisie mais je commence à faire la paix avec ça. Nous trouvons un stand qui nous le propose pour 550 pesos, et oui, Akumal est en fait une réserve protégée donc c'est pas donné, pour s'approcher des tortues il faut un guide. Et celui du jour c'est Angél, qui a une bonne tête (de hippie) et qui est sympa, pas trop pressé donc patient quand on met du temps à se préparer. En plus, il pense à notre compréhension, il articule et parle lentement, ça fait plaisir. Et il nous propose de prendre des photos avec sa GoPro (sans supplément). Nous récupérons un cadenas avec une caution de 100 pesos pour un casier où mettre nos affaires, on se prépare, on ne comprend rien au système de chaises qu'on peut mettre sur la plage, mais il finit par être temps d'y aller. Nous n'avons pas le droit de mettre de crème solaire, donc c'est plutôt bien qu'on soit parties de bon matin.

La plage est paradisiaque, l'eau est très chaude. Avec notre équipement de snorkeling, on est prêtes, même si le masque d'Emma fait des siennes. On y va, mais on n'est pas assurées de voir des tortues. Pour le moment, on nage dans de petits bancs de poissons colorés, bleus et jaunes, on voit un "poisson coffre" (pes cofre?) qui fouille le sable à la recherche de nourriture, un autre poisson irisé arc en ciel, et notre première tortue ! On peut la voir nager, et remonter sa toute petite tête à la surface pour respirer, ce qui est trop marrant. Nous passons au dessus de coraux de feu, qui peuvent nous envoyer des épines si on les touche, il faut faire attention. Là, on voit encore des poissons, et puis en continuant, une autre tortue, mais de loin car elle est dans l'aire inaccessible en snorkeling. On voit aussi un petit calamar tout marrant, et trois autres tortues, dont une plutôt grosse. Bon ce qui est dommage c'est que l'eau n'est pas claire, mais pas grave, c'est quand même très sympa, un peu magique. Au total, on a fait une heure d'activité ! On est un peu lessivées.

Pas de chance, juste après l'activité je me remets à faire une allergie, ma lèvre supérieure a gonflé. C'est probablement dû à toute l'histamine des piqûres de moustiques. Ça ne dure que deux heures, fort heureusement. On se pose sur la plage, on admire le paysage, mais on va manger assez vite. Nous trouvons un petit resto, évidemment touristique, donc un peu cher. Mais nous optons toutes pour une soupe de tortilla avec du poulet, la version un peu plus relevée et grasse du consomé. À côté, je prends un épi de maïs.

Nous revenons ensuite sur la plage mais là, nous nous rendons compte qu'on a perdu le cadenas. Heureusement, toutes nos affaires sont avec nous, mais ça fait chier pour la caution. Nous profitons encore un peu de la plage, mais l'eau est vraiment chaude, et il faudrait qu'on aille au cenote. Nous allons donc, comme des adultes responsables, signaler qu'on a perdu le cadenas. Et finalement, c'était le gars de la sécurité qui l'avait gardé car on l'avait laissé sur le casier. Ouf !

Heureusement, on est vaccinées contre le tétanos. 

Nous partons donc reprendre le colectivo en sens inverse vers le Cenote Dos Ojos, semi couvert, car à moitié dans une grotte. Il y a deux parties d'où son nom. 350 pesos (14 euros) de plus pour 1h30, presque les prix de Calicéo, mais c'est ça ou rien. La mauvaise surprise c'est qu'on doit marcher 3 km pour y accéder, et je suis toujours en tongs. Les ampoules arrivent lors du premier kilomètre, mais franchement, encore deux comme ça ... J'essaye de faire du stop. Plein de personnes ne s'arrêtent pas, sauf un taxi. Haha, quelle blague. Mais en fait il nous dit qu'il va récupérer des clients là bas et il nous emmène pour le prix qu'on veut. Bon ben 10 pesos par personne, au lieu de 50, belle négociation. Au moins on arrive pour profiter un peu, et on aura vu des panneaux mal dessinés sur le chemin.

L'endroit est superbe. Il faut mettre des gilets de sauvetage pour aller dans l'eau car c'est profond, on dirait une rivière souterraine. L'eau bien fraîche est d'un magnifique turquoise. C'est un peu trop frais pour Emma d'ailleurs. Et les gilets sont trop grands, ils remontent au dessus de nos têtes. Mais à part ça, c'est super agréable. Les deux yeux communiquent par la Batcave, et des gens le font soit avec un guide soit en plongée. D'ailleurs ces derniers nous passent en dessous et des filles se mettent à hurler en pensant qu'il s'agit de bêtes des profondeurs.

Finalement, on a assez de temps pour bien en profiter. Pour le retour, on trouve un gars pour nous ramener jusqu'au colectivo et ce dernier nous dépose devant le supermarché. On en profite pour faire quelques courses, et Sarah nous propose de nous faire à manger ce soir à son hostel, elle a acheté un gros avocat tropical. Mais c'est un peu le bazar dans la cuisine, l'évier est bouché car les gens ne nettoient pas bien derrière eux, les plaques mettent longtemps à chauffer, il n'y a pas assez de couverts ... Et l'avocat est très sucré, même avec un assaisonnement. Finalement, Sarah parvient à faire un truc pas mauvais, avec du riz et de la sauce tomate en plus: vert, blanc, rouge, couleurs du Mexique. L'hostel est beaucoup plus calme, car plein de monde est reparti, c'est bientôt la rentrée et je suppose que les vols low cost sont le samedi. Bon, ça sera assez posé pour une dernière soirée sur Tulum. Demain, nous partons pour Cancún, pour la fin du voyage d'Emma.

29
août

Pourquoi remonter vers le nord si je descends ensuite vers le sud ? Parce qu'Emma prend son avion demain et je vais l'accompagner. De toute manière j'avais des projets sur Cancún.

On engloutit des soupes avant de partir, assez vite pour avoir quelque chose dans le ventre, et on prend un bus ADO plus confortable que les autres. On s'enfoncerait dans les sièges, et on a un film pour nous faire patienter pendant les 2h30 de trajet. Ayant pris un antihistaminique la veille au soir, je suis un peu shootée et je somnole. Nous passons par Playa del Carmen, qui semble être devenu encore plus touristique qu'avant. Il y a beaucoup de boutiques de fringues, et il semblerait qu'on ne puisse faire les tresses que là. Playa, c'est aussi une destination pour les riches, il y a tout un quartier qui s'appelle Playacar et qui est sécurisé, c'est là où il y a les plus belles villas, un hôpital, uj aérodrome etc. Une ville dans la ville.

Nous passons aussi devant une foulitude de parcs à thèmes. Ça fait envie, et en même temps non. Trop cher, trop surfait, mais quand même, des tyroliennes ... Bientôt nous arrivons à Cancún (que je ne prononce pas autrement qu'avec l'accent du sud: Canncouneuh) et tous ses hôtels. D'ailleurs, de loin, on peut voir la zone hôtelière qui s'étend tout le long de la lagune, de grands buildings blancs qui déforment un peu trop le paysage. Cancún est comme un immense Club Med à la taille d'une ville. L'autre hostel, l'autre Mayan Monkey, est là bas. Peut être irai-je faire un tour dans la zone, mais peut être pas aller m'y installer finalement. Ça va être cher, et le centre est finalement assez avantageux.

Nous nous installons donc dans le Nomads hostel, qui est à cinq minutes à pied de la station de bus, pratique pour Emma demain matin. J'essaye de faire ma lessive mais on est dimanche et la lavanderia est fermée. Ça attendra encore demain ! Nous nous mettons en maillot et montons à la piscine en rooftop. Il faut savoir que j'ai décidé de ne pas me raser les jambes du séjour pour apprendre à assumer mes poils, pour l'instant ça se passe bien, mais j'ai failli craquer car l'ambiance fait un peu jet-set, mais ça va encore, je résiste à la pression sociale car les gens s'en fichent, finalement, et même si ce n'était pas le cas, ça ne me fait pas grand chose. La vue est agréable, quand bien même on puisse qualifier d'agréable les grands immeubles blancs. Pendant que l'on se sèche, deux Mexicains et une Allemande viennent nous parler, ils nous proposent des bières car ils les prennent par cinq dans un seau. Le gars qui nous parle s'appelle Zach, il a l'air sympa au premier abord mais très vite il dit qu'il veut une copine européenne "pour la culture". Oh et plus tard dans la conversation il me dit qu'il s'est fait virer par son boss qui l'a traité de taré. Ça fait deux red flags. Il veut nos numéros sur Whatsapp, et nous faire découvrir Cancun. Après avoir bu environ 3 bières pour ma part, nous décidons d'aller faire autre chose car il est un peu insistant et ne nous met pas trop à l'aise, finalement. Je veux payer un seau mais la serveuse ne veut pas car c'est sur l'ardoise de Zach, il faudrait que je m'arrange avec lui mais je n'ai pas de monnaie. Je lui dis bien qu'on revient vers 21h, voire 21h30, avant la fermeture en tout cas.

Nous passons dans le dortoir, où trois filles sont arrivées. Dont une Luxembourgeoise asiatique. Elle me rappelle une fille que j'ai croisée à Porto car des Luxembourgeoises, ça ne court pas les rues. Il y a deux Allemandes aussi. Je demande les prénoms de tout le monde, la fille s'appelle Cynthia, et oui, ça fait tilt, c'est bien elle. C'est juste incroyable ! C'est la plus grande coïncidence du monde ! J'ai du mal à m'en remettre !

On va donc faire un tour dans la rue, mais tout est grand, pas fait pour les piétons. On peut s'approcher de la lagune et de la forêt mais pas entrer dedans, donc finalement nous faisons demi tour et allons manger un bowl (ça fait du bien après tous ces trucs mexicains gras). Au retour, nous proposons aux filles de monter au rooftop car de toute manière il ferme tôt. Zach et les autres sont partis, donc je n'ai rien payé, j'espère qu'ils ne sont pas dans les cartels sinon je suis dans la merde. À la place, on papotte et on joue au baby-foot.


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Pas de stress à Isla Mujeres

Tristesse, Emma est partie ce matin. Ça va être très étrange de continuer seule, maintenant, mais ça va le faire. Je vais étendre mon séjour à l'hostel, en espérant ne pas recroiser Zach - pas pour l'argent, mais parce qu'il me met un peu mal à l'aise - qui de toute manière ne loge pas dans l'hostel, ils venaient de l'extérieur comme beaucoup de monde.

La matinée va être consacrée à la logistique: laverie, retrait d'argent, courses, réservation de la plongée pour demain. Puis, un tour à Isla Mujeres et dans la zone hôtelière, histoire de voir à quoi ça ressemble. Au passage, je me rends compte que j'ai oublié mon shampooing.

Les trois premiers, check. Ça fait énormément de bien de trouver un vrai supermarché avec de vrais produits qui ne soient pas que des trucs gras. Je prends du ceviche au poulpe, des pâtes, de la sauce tomate, des yaourts à boire, et du fromage soit disant "manchego" qui ressemble plutôt à de la contrefaçon vu qu'il est en tranches. Évidemment, ça ne doit pas être la même chose. Je vais me réconforter avec tout ça, car j'ai appris que ce n'était pas la peine d'aller plonger au MUSA car les fonds marins sont vraiment nuls en ce moment, aucune visibilité, ça ne vaut pas le coup. Au moins c'était très honnête de la part de l'instructeur. Et j'ai galéré pendant une demi heure avant de trouver un mini ventilateur usb qui m'a coûté le même prix qu'en France. Mais vu que l'autre m'a lâchée et qu'on va bientôt dans la jungle ... En plus je peux l'utiliser dans la rue en le prenant à la main. C'est quand même pas mal. Et au passage, j'ai pris un donut au sirop d'érable. Mais je le mérite, j'ai beaucoup marché aujourd'hui.

Je retrouve Cynthia et Jenny dans la cuisine. Cynthia va bouger à Playa aujourd'hui, moi je ne peux pas, j'ai mes fringues. Jenny est motivée pour aller avec moi à Isla Mujeres. Nous décollons toutes du dortoir vers 14h30. Le plan est de prendre le ferry à l'Embarcadero, il faut prendre le bus vers la zone hôtelière, jusqu'ici tout va bien. Sauf que le bus ne nous arrête pas là, il nous dit d'aller à Playa Tortuga, plus loin. C'est là où il nous dépose. Sauf que le prochain ferry est dans 1h30 et que ça va être chiant d'attendre. Nous reprenons donc le bus en sens inverse, mais un gars qui est guide nous entend parler, et il nous explique qu'il vaut mieux partir de Puerto Juarez car il y a des ferrys toutes les demi-heures. Mais il faut changer de bus, ou marcher. Je ne suis pas sûre de comprendre, Jenny panique, elle descend au niveau de l'hostel et moi je me laisse guider car je sens que je peux faire confiance à ce gars. En plus il va prendre le même van et descendre 400 mètres avant moi, donc il m'accompagne volontiers. Très sympa.

Me voici donc au bon terminal de ferry, le prochain départ est dans 20 minutes, parfait. Le ferry va plutôt vite pour rejoindre l'île, filant sur une mer aux différentes teintes en dégradé de bleu, elle ressemblerait presque à un tableau.

La couleur est, je vous jure, plus fidèle sur les deux dernières. 

J'y étais allée quand j'étais ado, mais je n'en avais pas grand souvenir, et bien c'est très sympa comme ambiance. Plus décontracté que Cancún. On peut y louer des voiturettes de golf pour se déplacer, il y en a partout ... Il y a de petites boutiques de souvenirs, des bars, et pas mal de drapeaux LGBT+. Vu le nom de l'île, j'espère que ce sont des lesbiennes, sinon ce serait pas drôle. Je me promène dans les petites rues, au bord de la Playa Norte, pendant une petite heure, je prends comme d'habitude plein de photos et me fais traiter de paparazzi. C'est vrai que je n'en ai pas beaucoup parlé, mais les Mexicains alpaguent un peu tout le monde avec des "hola amiga, hola chica como estás", et souvent d'autres commentaires. Pas forcément de la drague lourde, disons que je les situe entre les Indonésiens (ultra relous et moqueurs) et les Sri Lankais (relous mais pas autant que prévu, plus dans la curiosité).

Puis, je prends le bus qui fait le tour de l'île, en 30 minutes environ, c'est vraiment petit. Les belles maisons de riches et celles bien, bien plus modestes s'alternent au fil du trajet. C'est un bon moyen de visiter sans trop se fatiguer, sans trop se frotter les cuisses non plus. J'arrive à Punta Sur, donc complètement de l'autre côté, où il y a le temple d'Ixchel, la déesse Maya des arc en ciels, de la médecine etc, qui a donné son nom à l'île. Les ruines sont toutes petites, on les voit de loin, elles coûtent 30 pesos. C'est non. Je repars en sens inverse et marche le long de la route, je m'arrête devant un stade où des gens jouent au "beisbol", j'achète un souvenir sur lequel j'ai flashé car je n'avais pas assez de conneries comme ça sur mon étagère, et je pars de l'autre côté de l'île. 100 mètres plus loin, car c'est étroit ici. Il n'y a quasiment personne, si je me fais agresser je suis dans la panade. Mais en fait, c'est reposant, on n'entend que le bruit des vagues.

Mais comme j'ai mal aux cuisses, je monte dans le premier bus qui passe. Bien m'en a pris car il arrive pile 5 minutes avant le départ du ferry de 19h, celui qui part au soleil couchant. Il y a un musicien qui fait de la flûte de pan juste quand le bateau quitte le quai, c'est un moment tellement magique que j'en ai presque les larmes aux yeux (probablement la fatigue aussi). La vidéo ne doit pas rendre grâce à cet instant. Il enchaîne avec d'autres chansons et c'est drôle car les Mexicains aiment beaucoup chanter en même temps, ça leur fait vraiment plaisir ! On fait même une ola durant une chanson. Et enfin nous débarquons à nouveau à Puerto Juarez, à la tombée de la nuit. Je trouve un colectivo direct, c'est un vrai de vrai, avec des banquettes et des gens qui se tiennent debout dans le peu d'espace de l'habitacle, où il y a de la musique qui sort des baffles. Et nous passons par des quartiers plus authentiques. C'est marrant de faire cette expérience dans une ville comme Cancún.

Donc finalement, pas de zone hôtelière. Pas de plongée, ni même de snorkeling avec les requins baleines. Et apparemment il y aurait un ouragan qui arriverait sur Tulum mercredi, encore. Mais il va falloir penser à partir de la péninsule du Yucatan dans tous les cas, ça fait trop longtemps que je suis là. C'est bien mais je vais finir par me ruiner. Et puis, j'en ai marre des moustiques, et de ne même pas pouvoir mettre de moustiquaire.

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Playa del Carmen

Improvisation. Sarah a vu de superbes aras dans le quartier de Playacar, pour le prix basique de 350 pesos, comme partout quoi. Donc aujourd'hui, comme je ne peux pas plonger, je me rabats sur ça, mais ça va me permettre de découvrir Playa del Carmen pour l'après midi. Tout d'abord, fin de la partie logistique: récupérer les fringues, se décider à aller à la pharmacie pour acheter de la vraie pommade anti moustiques, et du répulsif au DEET (tant pis, j'en peux vraiment plus), et acheter le repas de midi: encore du ceviche, et du riz en sachet. Parfait. Jenny compte partir aujourd'hui, et il y a une autre fille sympa dans le dortoir, qui est franco-norvégienne. Bon, je n'aurai quand même pas perdu mon temps ici, les supermarchés vont me manquer.

Les colectivos partent d'à côté de l'hostel, c'est donc on ne peut plus simple pour y aller. Par contre, arrivée sur place, je pensais qu'il me déposerait plus proche du centre-ville. Il faut que je marche 15 bonnes minutes en plein cagnard avec le sac, tout ça pour arriver à la station de bus ADO et y laisser mon sac. À part financièrement, j'ai perdu au change.

Avant de me diriger vers l'Aviary, je descends vers la plage. C'est un peu Disneyland : il y a des mariachis, des voladores, et des danseurs mayas les uns à la suite des autres. Par contre il fait très bon, car il y a un peu de vent. La plage, elle, n'est pas terrible, et la mer est agitée. Aucun regret.

Je passe dans un centre commercial très agréable, ombragé, pour aller aux toilettes avant d'entrer dans Playacar. Je dois montrer mon passeport qui se fait scanner et m'inscrire sur le registre, ça rigole pas. En même temps quand on voit la tête des villas luxueuses, on comprend mieux tout ce bazar.

J'arrive enfin au Xaman-Ha Aviary et dès l'entrée, c'est le coup de coeur: il y a plein de perroquets partout. De magnifiques aras comme on les imagine. Je peux les approcher de très près pour les prendre en photo, à un ou deux pas, avec précaution pour ne pas les embêter quand même. Mais ils ne réagissent pas mal, ils sont plutôt curieux. Je passe au moins 20 minutes à mitrailler et à faire des vidéos, ou tout simplement les observer. En plus, à part les agents d'entretien, je suis toute seule. Et ça c'est extrêmement appréciable, de ne pas avoir des gamins qui braillent dans tous les sens. Très relaxant !

Est ce que je peux mettre autant de photos de perroquets ? ABSOLUMENT. 

Au bout d'un moment, je me décide à bouger. Je croise des perruches, de beaux flamants roses, et dans une volière, d'autres gros oiseaux dont je ne connais pas le nom mais surtout, un petit toucan. Très timide. J'essaye de le suivre pour le prendre en photo mais à chaque fois il s'envole et change de branche. Ça va bien me prendre 10 minutes pour arriver à quelque chose, et encore ! Il y a un petit pivert qui me suit et lui, il adore être sous le feu des projecteurs. Il pose pour mon appareil pendant quelques minutes, et quand je m'intéresse au toucan il me vole dans les cheveux. Ou alors il veut que je laisse son pote tranquille. C'est la première fois que je vois un oiseau réagir comme ça !

J'ai aussi la surprise de voir des agoutis, de petits rongeurs locaux, entre le capibara et le cochon d'inde. Je retourne un peu voir les perroquets et enfin, je décolle. Quel petit havre de paix !

De retour dans le centre de Playa, je me promène sur la 5ta avenida, pun intended. Des bars, des boutiques de souvenirs, des pharmacies, des massages, comme partout dans le monde. Sympa, mais rien de spécial, finalement. Je récupère donc mon sac et me retape tout le chemin en sens inverse. C'est injuste de ne même pas perdre 5 kilos suite à tout ça, ce serait mérité, heureusement que je peux au moins me faire plaisir sur la bouffe (et encore).

Transpirante, je ne trouve pas les colectivos pour Tulum. Je finis par demander, ils partent de sous le pont. Une petite heure de route, et je demande au chauffeur de m'arrêter au coin de la rue de notre premier hostel. J'y fais un saut pour tenter de retrouver mon shampooing, qui m'attendait bien sagement dans la douche ! Comme en Bulgarie. Puis, je dois marcher jusqu'au Mayan Monkey car je vais y dormir cette nuit, pour retrouver Sarah et continuer le voyage avec elle. Je la trouve dans la piscine (super propre) en très charmante compagnie. Un gars qui s'appelle Sydney (ouais, ça arrive) et qui est bien plus qu'une grande montagne de muscles, il est aussi très sympa et surtout, il porte de l'attention même aux filles qu'il ne drague pas. Ce que j'apprécie grandement !

Les quartiers pauvres de Tulum, et une photo de ce qui va se construire juste à côté. 
1
sept

J'ai cru que je n'arriverais jamais à quitter la Riviera Maya. Trop de choses trop chères à faire, mais il y a toujours un cenote de plus à voir ... Mais non. Je crois que comme je n'ai pas de timing prédéfini cette fois-ci, je me suis sentie happée par cet endroit. En plus j'ai mal dormi donc je suis crevée. Et le fait d'aller essayer de trouver des colectivos depuis la zone hôtelière jusqu'au centre ville, avec le sac, et le fameux climat lourd de Tulum, c'était une épreuve en soi. Ne pas trouver les colectivos en question, aussi, et finir par aller à la station de bus car le colectivo pour Chetumal part à 14h et il est midi, ça nous achève presque. Mais le bus finit par arriver, nous nous installons tout au fond pour pouvoir étendre nos jambes, et enfin on se casse. Bon, la route est toujours la même, des arbres, de la jungle. Trois heures plus tard, nous arrivons à la lagune de Bacalar. Nous voulions réserver à la Yak House, le party hostel du coin, mais il n'y a plus de place pour ce soir, et puis Sarah a eu sa dose, moi aussi d'ailleurs. Donc, ce sera une petite guest house qu'elle avait repéré au préalable, tenue par un particulier, bien notée et tranquille, dans un jardin. Nous posons les sacs et filons à la plage. Sur le chemin, je fais goûter l'horchata à Sarah, elle est conquise. Je pense que c'est pour l'instant ma découverte gustative préférée.

À cet endroit, la lagune est plutôt tranquille, on n'y voit que deux couleurs mais c'est bien. Heureusement que j'ai mis mes chaussures d'eau, c'est plus agréable dans la vase. Et je teste enfin mon sac waterproof comme il se doit, c'est un succès. Nous apprenons aussi qu'il y a des stromatolites, des "living rocks" comme c'est marqué. J'essaye d'expliquer à Sarah ce que c'est, mais j'échoue lamentablement, la prépa est trop loin. Bon, ce sont en fait des micro organismes très anciens en symbiose avec les cailloux qui produisent de l'oxygène. Il n'y en a qu'à 12 localisations dans le monde, dont ici. Bon, on marche quand même dessus quand on se baigne, mais soit.

Nous allons ensuite faire un tour dans la ville, repérer des restaurants et visiter le Fort San Felipe en scred car pourquoi payer l'entrée quand on peut l'éviter, la caisse n'est pas au même endroit, au pire on dira qu'on ne parle pas espagnol et qu'on est débiles. Très belle vue depuis ce petit fort, il y a aussi un musée où on en apprend un peu sur les pirates d'ici !

Bacalar est connu pour ses pirates. En fait, la pratique émerge dans un moment de prospérité de l'Amérique Latine: les mines, les esclaves, le coton et le bois de Campeche. Ce sont l'Espagne et le Portugal qui ont le monopole de ce continent, il n'y a quasiment pas de Français et d'Anglais, et apparemment de grands pirates de ces nationalités auraient prospéré car ils étaient plus ou moins protégés par ces pays, vu qu'ils permettaient de miner la puissance navale espagnole. Les fameux pirates des Caraïbes sont en fait des pions dans une guerre européenne à distance du Vieux Continent. Isla Mujeres et Cozumel sont aussi les cibles des pirates. Au 17e siècle arrivent encore plus de flibustiers, l'Espagne a besoin d'aide et enfin, les Anglais, Français et Hollandais négocient des colonies dans ce coin là pour leur venir en aide. Et soudain tout le monde se met à combattre la piraterie.

Nous repartons vers le centre ville, où les oiseaux font un raffut pas possible à la tombée de la nuit, et nous trouvons un restaurant pour manger ... Des pâtes! En dessert, je goûte une marquesita, une crêpe croustillante dans laquelle j'ai fait mettre une banane et du dulce de leche, miam. Nous rentrons à la guest house car nous sommes crevées et sur la route il y a plein de chiens errants qui grognent, je me mets entre Sarah et l'un d'eux pour la protéger mais il essaye de me mordre le mollet ! Sarah réagit juste à temps et fait semblant de lui lancer une pierre, à deux doigts de refermer sa mâchoire sur moi ! Heureusement qu'elle était là car je ne suis pas vaccinée contre la rage. On forme une bonne équipe.

Et les oiseaux braillent à pleine gorge. 

Par contre, dans nos lits, on se croirait clairement dehors. Il n'y a pas de volets, ça donne sur la rue, et les moustiquaires sont un peu inutiles. On entend encore les chiens aboyer, mais aussi plein d'insectes qui chantent, comme dans la jungle. En fait c'est reposant, mais les boules quiès et le masque pour les yeux sont obligatoires. J'inspecte le matelas, pas de punaises apparentes mais j'ai peut être halluciné, j'ai cru voir une puce. De toute manière, pas le choix, je m'asperge de DEET, partout, je prends un antihistaminique en prévision et on verra bien demain.

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Vertigineux ! 

J'ai très bien dormi finalement - en même temps je sentais venir une insomnie donc je me suis shootée - mais pas Sarah. Donc, nous prenons la décision de réserver au Yak Lake House pour ce soir car cette fois-ci il y a la place. Mais pas sans avoir goûté le petit déj qui est bon, copieux et pas trop cher !

Sarah m'a proposé de faire les tyroliennes K'an Kin qui ne sont pas loin et qui passent dans la jungle et la lagune. Au départ je voulais éviter vu le prix, mais je n'ai pas mis longtemps à être convaincue et à perpétuer la tradition de faire une tyro par voyage. Nous allons donc prendre un colectivo sur la grande route, il nous fait payer deux fois le prix cet enfoiré. À l'entrée des "Tirolesas", il y a une chaîne qui ferme le passage, mais un gars vient nous ouvrir et nous demande si on vient faire les tyros. Euh ... Non, on vient pour se faire couper les cheveux ? Bon, il est pas méchant non plus, et souvent les gens ici demandent confirmation une ou deux fois. Nous le suivons dans la jungle, il nous fait remplir un formulaire au cas où on meurt, il faut désigner un héritier. Ok, pas du tout angoissant. On essaye aussi de négocier le prix, et ça marche! En même temps, il n'y a pas foule, juste nous deux. Nous avons tous du mal à nous comprendre, mais nous retenons l'essentiel. Nous allons nous équiper des baudriers, et partons dans un gros tuktuk dans la jungle, ça secoue !

Nous voici tout en bas de la première tyro. Il faut monter. Alors, le problème n'est pas tant la hauteur. C'est qu'il s'agit d'une échelle en fer. Comme celles dans les films. Qui fait 30 mètres de haut. Les marches sont très grandes. Bon, ben pas le choix, allez, comme les héros. Mais qu'est ce que c'est dur... On est attachées, mais il faut que nous fassions régulièrement des pauses. En plus je suis passée en première. J'ai l'impression que mes bras vont me lâcher. Et eux, ils montent ça tranquillou ... Je m'accroche comme je peux, trop tard pour reculer. L'ascension doit prendre 5 très très longues minutes. Ça doit être insupportable avec un grand groupe. Mais enfin j'en vois le bout. Je me hisse plus que je monte. Et enfin, c'est fini. Je ne pensais jamais y arriver.

C'est une autre sensation en haut: la vue est superbe, sur la lagune turquoise, mais putain ... C'est vertigineux. J'essaye de ne pas regarder en bas car mes jambes se mettraient à trembler, donc je regarde l'horizon et la jungle à perte de vue. C'est grandiose. Je me force aussi à regarder un peu en bas, en me tenant à la colonne. Sarah a super peur, je peux comprendre. Elle va passer en première avec le moniteur. Moi je vais tenter toute seule ... C'est encore une autre paire de manches. Mais je suis bien harnachée, et j'ai fait encore pire à Cusco, c'était très cool. Alors je me lance dans les airs et oui, ça va ! Nous passons dans un tunnel de végétation juste avant d'arriver. Et même si je tourne comme d'habitude, j'arrive à me réceptionner. Les suivantes sont moins hautes mais très cools aussi, et nous n'avons plus à monter d'aussi grandes échelles. C'est quand même bien plus sportif que prévu ! L'une des lignes passe au dessus du lagon, et c'est vraiment très beau.

Il y en a cinq et finalement c'était assez incroyable, aucun regret ! Nous allons reprendre un colectivo en bord de route, qui nous emmène au Cenote Azul, pour nous détendre après tant d'efforts et d'émotions. C'est un endroit super car déjà il coûte 25 pesos, et ensuite l'ambiance est très familiale, l'eau est plutôt bleu foncée et plus claire par endroits, et très douce. Autant sur les lèvres que sur la peau. On ne voit pas le fond, le trou d'eau semble s'enfoncer dans les abysses. C'est un peu stressant par moments, surtout que j'essaye d'y faire de l'apnée pour me sentir en suspension dans l'eau, mais je ne sais pas où est la surface. Il y a aussi une balançoire dans l'eau, c'est très dur de monter dessus car ça glisse comme pas possible. Nous rencontrons aussi une maman avec sa fille qui essaye de parler français. Bref, c'est un bon moment, agréable, calme ...

Nous allons ensuite à Cocalitos, et pour ce faire nous marchons le long de la grande route en maillot/short de bain, pendant 5 minutes car c'est plus court par là. C'est une plage où on trouve des stromatolites, ces micro organismes bactériens qui créent des roches. Ce sont les plus vieux du monde, ils ont quasiment créé la vie telle que nous la connaissons ! Ceux de Bacalar ont 10 000 ans. Ils sont dans des aires protégées, "Stromatolits nursery". Très mignon. La plage est tout aussi incroyable, avec ses différents tons de bleu qui ont rendu la lagune célèbre. Il y a encore des balançoires, et même des hamacs dans l'eau ! Ça, c'est rigolo, et plutôt confortable.

Nous tentons de prendre un colectivo pour rentrer, mais nous n'en voyons qu'un au bout de 20 minutes et il ne veut pas s'arrêter. Heureusement, nous tombons sur des Canadiens qui nous ramènent en ville. Nous allons check-in dans notre nouvel hostel, assez sympa, entre le backpacker et le party. Puis, nous réservons une voiture pour demain toute la journée pour aller à Calakmul. On essaye de motiver des gens pour venir avec nous, mais pour l'instant on a eu des nons, ou des gens un peu trop insistants que l'on n'a même pas recroisé. Ce soir, il y a un feu de camp et de la musique live, c'est sympa. Nous discutons avec des Français de Toulouse, et aussi un Allemand du nom d'Aron.

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Calakmoute

Sarah m'a motivée à aller visiter les ruines de Calakmul aujourd'hui. Quand je dis motivée, ça veut dire se lever à 6h45, aller chercher la voiture à l'aéroport de Chetumal, et se taper 4 heures de route ... Aller. Donc bon, on n'est pas très fraîches ce matin, mais on tente de prendre un colectivo. Les chauffeurs nous boudent toujours. Mais pas les taxis qui viennent nous parler. On dit non, ils insistent, c'est toujours non. J'ai envie de leur dire que c'est parce qu'on ne "les connaît pas", voulant signifier "on sait qu'il y a de faux taxis alors on se méfie", Sarah pense que ça ne sert à rien, je trouve que si, il faut qu'ils soient conscients de ce genre de problème. Ne serait ce que pour arrêter de nous faire chier. Mais finalement un couple de Mexicains va en prendre un, donc nous montons avec eux. Au moins nous nous sentons plus en sécurité. À quatre dans la voiture, 50 pesos, probablement comme ou moins cher que le colectivo. Il nous faut à peine 30 minutes grand max pour nous faire déposer à 1km de l'aéroport, en plus nous sommes déjà en retard. Mais arrivées sur place, les agents de sécurité nous disent qu'il n'y a personne, que l'aéroport est fermé. Nous expliquons que nous venons pour louer une voiture avec Europcar, ils nous disent que personne ne sera là avant 10 heures. Il est 8h30. Nous soufflons, blasées, mais le temps de nous rediriger vers la sortie, les gars arrivent tout juste. Et bien, on a un bon timing finalement! Les formalités complétées, je prends en main la petite Kia, que l'on va avoir jusqu'à demain matin, on a négocié 10 heures.

Nous filons sur la route, mais nous nous arrêtons sur le chemin pour prendre à grignoter, Sarah goûte des empañadas très grasses, mais bonnes. Sinon, la route n'est pas trop mauvaise. Il faut juste faire attention aux dos d'âne qui sont traitres. Et aux cadavres d'animaux de temps en temps. Nous voyons un chien les quatre fers en l'air, en bord de route, c'est impressionnant. Nous finissons par arriver dans l'état de Campeche, où la jungle se densifie par rapport au Quintana Roo. Et nous entrons dans l'aire de la très grande Biosfera Calakmul, qui renferme plein d'espèces comme cinq de jaguars sur les six du Mexique. La route n'est pas terminée. À la bifurcation, surprise, il faut payer 150 pesos de plus de droit d'entrée pour pénétrer dans la réserve. Et nous achetons un pique nique avec un petit sandwich, un jus, de l'eau, une banane, pour la modique somme de 150 pesos aussi (7 balles). Mais nous voyons nos premiers singes mexicains ! Ce sont des singes hurleurs apparemment, car ils sont tout noirs.

Nous reprenons la route où nous sommes censées rouler à 30 km/h à cause des animaux, mais je vais plutôt à 60 sinon on ne va jamais s'en sortir, il est déjà 13h et il y a 60 km. Oui, c'est énorme, surtout sur une petite route qui heureusement est toute droite ou presque. Nous voyons une sorte de renard noir, de gros oiseaux (on apprendra plus tard que ce sont des pavos orcelados, des faisans quoi), et même une biche. Et une multitude de beaux papillons. Et ben ! Sarah me parle du Manoir de Paris, un endroit où l'on vit une expérience immersive avec des acteurs qui jouent des serial killers de tout temps, de manière très réaliste. 5 minutes plus tard, nous croisons un convoi de trois voitures qui nous font signe de nous arrêter. Et des mecs descendent avec des machettes. On a failli se faire découper en morceaux par les cartels. Ou presque, parce qu'en fait ils viennent molester un arbre. On part en fou rire. Quelques kilomètres plus tard, nous voyons aussi un couple qui est en panne de voiture. Au départ on se dit "on ne 's'arrête pas", mais quand même, et puis ils ont l'air de touristes avec une voiture de location, vu que c'est la même que nous. Ils n'ont aucune idée de quoi faire, je leur donne de l'eau de ma gourde, ça se tente. Nous leur proposons de les emmener vers le site, mais ils refusent, en même temps il faut bien garder la bagnole. Nous allons prévenir les gens là bas ...

Et enfin, enfin ! 10 kilomètres plus tard, on arrive. On se gare et on ne traîne pas, car nous sommes impatientes de découvrir le site, qui est assez grand. Bien sûr on passe l'information pour les gens en panne, mais il semblerait qu'ils ne puissent pas y faire grand chose car ils n'ont pas de matos. Même pas des talkies walkies. Bon au moins ils sont au courant, ils vont peut être réfléchir. Nous, on se lance sur le chemin dans la jungle, aspergées d'une tonne de répulsif parce que les moustiques ne demandent qu'à nous agresser.

Calakmul est caractérisée par "le règne du Serpent" car il y vivait une grande élite, au vu de la taille de ses monuments. C'était aussi une cité indépendante comme les autres, en guerre avec Tikal et Palenque. Les gouverneurs du règne Kaan étaient d'abord dans la ville de Dzibanché, avant de se relocaliser à Calakmul. Ils avaient le pouvoir de sanctionner ou confirmer l'ascension au trône des autres rois de cités mineures, et avaient installé un fort pouvoir diplomatique. Les gouverneurs mayas, les ajaws, étaient considérés comme semi-divins. Ils étaient les médiateurs entre le peuple et les Dieux. Il fallait passer un rite pour accéder au trône, lors d'une cérémonie avec des offrandes de sang: se trouer le lobe des oreilles, la langue ou le pénis avec une épine ou de l'obsidienne. Ils savaient interpréter la position des étoiles et les mouvements de la nature, adaptaient leur calendrier en fonction, et s'en servaient dans des actes diplomatiques. La dynastie Chauve-Souris a succédé aux Serpents, mais ils étaient moins puissants et peu à peu la population a quitté la ville et les monuments se sont dégradés.

Nous visitons d'abord l'Area Residencial Chan Chi'lch, nous remarquons que les bases des constructions sont très massives. Nous ne savons pas si c'est restauré, mais en tout cas les pierres semblent presque polies. Nous prenons une photo ensemble sur les marches avec le retardateur, c'est un peu galère mais ça passe. Et oui, à Calakmul on peut monter sur les ruines ! D'ailleurs, tout en haut de la structure que nous gravissons, il y a ... Des singes araignées. Au moins une dizaine ! Les petits ont l'air très curieux, on essaye de faire de grands gestes, il y en a un qui veut s'approcher mais sa maman lui dit non.

Nous revenons sur le chemin principal mais mauvaise surprise, le grand tour est fermé. Il y a un panneau qui dit que c'est parce qu'on ne peut pas maintenir les distances de sécurité. On est deux et on a quasiment le site pour nous, c'est trop con, on y va. Ça se voit que le chemin n'a pas été pratiqué depuis longtemps, en plus on passe encore sous une meute de singes araignées qui s'attroupent presque autour de nous, curieux, peut être que ceux là n'ont pas vu d'humains ici depuis un bail. Ils commencent à crier donc on ne s'attarde pas trop, ça pourrait être pire que les mecs avec des machettes. Nous nous promenons dans l'acropole Chik Naab, d'autres aires résidentielles où plusieurs familles vivaient en communauté pour le travail et la vie quotidienne. Nous voyons encore quelques serpents, et araignées. Puis nous arrivons à un endroit avec plein de stèles, mais nous nous faisons repérer par un gars qui fait le tour. Je ne sais pas comment j'ai pu tenter de me cacher avec mon truc bleu fluo, mais je laisse vite tomber. Tant pis, autant assumer. Poli, il reste derrière nous et attend qu'on ait fini nos photos pour nous dire qu'on n'a pas le droit d'être là. Heureusement qu'on l'avait spotté, je crois que sinon on aurait hurlé en le découvrant dans notre dos par surprise. La stratégie de ne pas savoir parler espagnol ne paye pas non plus, donc j'explique qu'on a pensé que c'était fermé à cause du covid, ce qui est à moitié vrai. En fait, c'est parce que dans cette zone les pyramides s'écroulent et il ne faut pas monter dessus. Heureusement que ce n'était plus notre intention. Du coup, nous lui demandons s'il veut rester avec nous pour nous babysitter, parce qu'à sa place, si j'avais croisé des gens qui n'avaient pas le droit d'être là et que je craignais qu'ils ne fassent encore n'importe quoi, c'est ce que j'aurais fait. Il nous dit oui, mais je pensais qu'il allait se contenter de nous ramener dans la zone autorisée. Mais en fait il nous fait presque une visite guidée, et on sympathise avec lui. Il nous montre des photos du jaguar qu'il a vu en bord de route il y a deux semaines. Alors, si on en voit un, il faut surtout ne pas bouger. Bon, depuis la voiture ça serait mieux ...

Maintenant, nous sommes sur la place principale, avec la grande pyramide de 50 mètres de haut sobrement nommée Estructura II, particulièrement impressionnante. Allez, on monte. Nous pensons que le gars va rester en bas, mais il nous aime bien donc il la gravit avec nous. C'est bien moins dur que l'échelle de la tyro, mais ça fait mal aux cuisses car les marches sont bien hautes. Mais la vue sur la jungle à perte de vue est merveilleuse. On peut même voir un bout du Guatemala depuis là-haut. Probablement le seul spot que j'en verrai. On fait des photos, la descente est un peu raide mais ça va, il faut descendre de côté. Mieux que les squats. On monte aussi sur la pyramide de 30 mètres, c'est déjà plus facile, mais comme ça on voit la grande émerger de la jungle. Bien sûr, on est encore accompagnée de singes et de serpents, mais surtout de pavos.

Attention Emma, sur ces photos se cache un chihuahua. 

On se demande ce qu'il se passerait si sur le chemin du retour, on percutait un pavo. Est ce qu'on l'emmènerait à l'hostel et on le ferait griller sur le feu de bois ? Ça serait marrant. Mais dans ce scénario on finirait aussi en prison. Quand on a vu une embuscade de pavos sur la route, on y a réfléchi.

Nous passons à la grotte aux chauves souris pile au moment où elles sortent, au coucher du soleil. Il y en a une multitude dans le ciel, mais moins qu'à Mulu en Malaysie. En plus il faut un guide pour y aller mais on n'a presque plus de thunes, juste assez pour manger. Un gars blague en disant qu'on peut donner notre voiture, ou même nos fringues. Non, pas nos fringues, haha. Hahaha.

On ne s'attarde pas car il reste encore deux heures de route, dans la nuit, avec des pleins phares qui ne restent pas enclenchés tout seuls. J'essaye dz suivre des voitures le plus souvent possible, mais je vais un peu vite et très souvent je me prends trop fort les ralentisseurs que je ne vois pas arriver, surtout de nuit. Nous finissons par enfin arriver à Bacalar, je dépose Sarah et je veux me prendre un bowl mais c'est fermé car il est 21h03 et pas 21h. Je me rabats donc enfin sur une pizza, effectivement elle est très bonne. En rentrant, Sarah s'est couchée mais les gens de l'hostel font l'atelier Margaritas, le volontaire qui anime me propose d'essayer gratuitement, j'en fait une classique puis un cocktail au mezcal avec le shaker ! Et demain, je me fais embarquer pour l'acroyoga et le karaoké, avant de partir.

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Une journée presque foirée

Il fait moche, et Bacalar quand il pleut, ça perd tout son charme. Mais ce n'est pas grave, car je pars en expédition à Chetumal pour rendre la voiture. Sarah dort, je n'ai pas envie de la réveiller. Je passe mettre de l'essence, retirer des sous, mais mauvaise surprise, même en changeant mon plafond de retrait, ça n'a pas été pris de suite en compte comme la dernière fois. Donc j'utilise mon autre carte bleue et vais me taper une bonne commission. Cool. Voiture rendue, caution rendue, mais maintenant il faut rentrer. Mauvaise surprise d'ailleurs: je veux booker pour ce soir mais le prix a doublé. Vraiment. 25 balles la nuit, c'est pas possible. Je préviens Sarah qui s'est réveillée, je ne vais pas être à l'heure pour le check out, je lui demande de le faire à ma place et ranger mes affaires pour me barrer, et aller dans une autre guest house, car c'est pas possible à ce prix là, et finalement elle me dit que le gars de la réception va me faire la nuit au prix normal. Enfin ça c'est la version simplifiée, il y a eu tout un mic-mac. Autre mic-mac il y a en quittant l'aéroport car tout le monde insiste pour que je prenne un putain de taxi. Non, je veux un colectivo, et je n'hésite pas à marcher 2km et quelques pour arriver en centre ville. J'attends 20 minutes dans le combi avant qu'il ne parte, mais au moins c'est mieux.

Arrivée à Bacalar, je prends mon ticket de bus pour demain. Je retrouve ensuite Sarah à l'hostel, je déménage dans son dortoir, encore un lit d'en haut, dangereux car je me prends la poutre en pleine tête. J'ai une belle bosse ...

Je vais manger un bout dans un resto qui fait des tacos vegan, c'est pas trop mal, et je profite de la wifi vu qu'il n'y en a toujours pas à l'hostel. Puis je marche jusqu'au Cenote Negro qu'on peut rejoindre par un trou dans la clôture. Sauf que d'une je laisse traîner mon sac dans du caca, et de deux je craque mon pantalon. Tout ça pour un cenote même pas negro et un Belge qui m'humilie. Non j'exagère il était marrant mais bon, j'étais pas venue ici pour souffrir et c'est un échec total. Mon ange gardien est en RTT aujourd'hui, il faut bien de temps en temps.

Mais heureusement, la routourne a tourné. Les filles du dortoir, Elvira (Rep Dom) et Steffie (Pays-Bas) sont super sympas et motivées pour l'acroyoga. On retrouve donc Federico, face au lagon, prêt à nous faire souffrir, ou pas.

Déjà que je ne suis pas souple, alors là c'est mal barré mais ça va être marrant. Quand Federico le fait, ça a l'air simple, mais évidemment ça ne l'est pas. Il soulève la nana avec ses jambes comme une plume. Moi, je galère, je m'y reprends à plusieurs fois, rien n'y fait j'ai une jambe qui se tend et pas l'autre. Pas étonnant, mon corps n'en fait toujours qu'à sa tête. Je laisse tomber l'idée de faire la base, et c'est Federico qui me soulève. C'est moins dur que ce que je pensais quand on est au dessus. J'attrape mes chevilles, l'une après l'autre. On tente aussi une autre figure assez marrante. Elvira essaye de me soulever mais par rapport à Steffie, je suis trop lourde. En tout cas, c'est plutôt marrant comme séance, on a bien rigolé, même si j'ai tenté de contracter mes fesses au maximum mais avec le gras sans muscles ça ne se voit pas.

Maintenant, on va se chauffer pour le karaoké. Après un bowl au quinoa, Sarah m'accompagne mais va se coucher assez vite. J'ai envie de chanter, mais toute seule c'est nulle. Heureusement, Elvira me rejoint, et elle me motive plus que jamais. Donc, je vais chanter Grace Kelly de Mika, ça se passe bien, Elvira chante aussi, je fais ensuite Stitches de Shawn Mendes parce que je suis lancée et on finit toutes les deux avec Baby One More Time de Britney, qui je pense va devenir ma nouvelle chanson spéciale karaoké. En tout cas, tout le monde se marre bien, surtout que quand on a fini de chanter on a droit à un shot de tequila. Plein de monde me dit que j'ai géré, je suis pas la meilleure non plus mais j'ai réussi une chanson casse gueule. Ça valait le coup de la chanter sous la douche pendant tout ce temps. On continue la soirée, je parle à un Ecossais et à un Uruguayen qui s'appelle Mateo et qui est docteur, et qui va peut être aller à Perpignan d'ici deux semaines et demies, quand je rentre quoi. Depuis Barcelone. Donc je lui dis qu'on pourrait rester en contact, ça serait marrant. Je parle aussi à un groupe de parigots, qui partent dans un club mais je n'ai pas envie de les suivre. Franchement, je suis super contente de cette soirée, ça faisait si longtemps que j'avais envie de faire un karaoké, j'ai pas eu trop peur, je me suis éclatée avec Elvira. Allez, je vais tenter The Voice.

TELL ME WHY 
5
sept

Au revoir, Quintana Roo ! C'était cool mais à un moment, il faut partir. J'ai envie de découvrir de nouveaux horizons. Sarah, elle, part sur Cozumel pour rejoindre Sydney (le gars de Tulum, pas la ville hein). On se dit au revoir, mais on va prendre souvent des nouvelles. Retour au voyage solo ! Ça fait aussi du bien. Et la motivation il en faut, car j'ai du mal à émerger avec la tequila d'hier, mais des médocs et ça repart. Je ne trouve personne au moment de partir, c'est triste ... Mais finalement je fais demi tour car j'ai oublié mes chaussures d'eau. Et là il y a un peu plus de monde, je dis au revoir à Elvira et Mateo et cette fois-ci, c'est la bonne. 15 bonnes minutes de marche, et je me trouve devant l'agence, prête à partir. Sur la devanture ils promettent un bus avec wifi, toilettes, clim ... Et ce qui arrive est un gros colectivo dans lequel je vais passer 8 heures de ma vie avec la "gueule de bois fatigue". Wouhou. Mais c'était ça ou prendre le bus de nuit, donc faire nuit blanche. Encore pire.

La musique à fond, c'est parti. Je mets mes boules quies pour ne pas avoir les oreilles qui vrillent, en plus du bruit du van. Ce qui est rigolo au Mexique, c'est que les gens adorent chanter dans les bus quand il y a leur chanson préférée qui passe ! Bon, le chauffeur va assez vite, on s'arrête souvent pour les toilettes, on fait une pause d'une demi heure pour manger au bout de 3h30 de route. Plus que 180 km. Emma disait que les transports mexicains étaient soporifiques, j'ai bien failli m'endormir, ce qui est assez rare pour être signalé. Nous traversons l'état de Campeche, et juste avant la ville d'Escarcega, nous nous arrêtons en plein milieu de nulle part et ... Le van ne redémarre pas. En plus tout le monde a chaud, les gens gueulent pour ouvrir les fenêtres, il y a une dame qui appelle sa famille pour dire que ce service est vraiment nul. Moi ça me rappelle l'Indonésie ou le Laos, alors bon. En moins pire en fait, car le van finit par repartir tant bien que mal. J'entends une dame qui se plaint de la compagnie. Et en tout, on se fait arrêter 4 fois par les flics.

Le soleil se couche alors que nous arrivons dans l'état de Tabasco, qui a donné son nom à la fameuse sauce. Les couleurs sont magnifiques, le soleil se transforme en boule de feu ... Au moment où nous passons devant des plantations de palmiers caractéristiques. Tiens tiens. L'huile de palme. Effectivement, le Mexique en est un grand producteur. Beurk. Dix minutes plus tard, même pas, nous arrivons en Chiapas, parce que les états ont des formes bizarres. Et au beau milieu de nulle part, le chauffeur me dit de descendre, "Palenque, Palenque". Euh, ah ? Mais non, et il fait nuit ! Je rappelle que j'ai payé jusqu'à là bas. Nous sommes à un embranchement, Palenque est au sud, le van continue vers l'ouest. En fait, nous sommes trois à y aller, le chauffeur paye le trajet en taxi pour nous. Je suis donc avec trois gars, pas très à l'aise. Et ce qui y contribue encore moins, c'est que nous passons un poste de douane, ça a l'air assez sérieux. Et on croise encore plus de voitures de police que dans le Quintana Roo. Un rapport avec les braquages dont j'ai entendu parler, peut être ? Moi qui jusque là tolérais bien les flics, je me sens moins rassurée ici, c'est un peu oppressant.

Finalement, nous arrivons à Palenque. Ma guest house Casa Janaab n'est pas très loin du terminal de bus, donc je vais m'y installer. Il est 20h30, nous avons mis 7h30, c'était plutôt une bonne estimation de la part de l'agence, ce qui est d'ailleurs assez étonnant. Le quartier où je loge est assez sympa, contrairement à ce que m'avait dit Steffie. Il y a des restos, des hôtels, des arbres, mais peut être est-ce une partie de la zone touristique. Dans le dortoir, je retrouve deux filles que j'avais croisées dans la première guest house de Bacalar et que j'avais confondues avec d'autres car elles avaient littéralement la même gueule. Bah d'ailleurs elles viennent de Flandres et les autres venaient d'Allemagne. Ce n'est pas un hostel où les gens communiquent beaucoup, mais il y a enfin de la wifi, il est temps de rattraper le retard sur le blog, donc la non socialisation est la bienvenue !

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Better than expected

Quelle galère, la tablette n'a pas chargé de la nuit. Elle commence à déconner. Elle est vieille vu qu'elle était à mon père, elle chauffe vite, elle ne supporte pas le courant d'ici, et elle consomme comme un monstre. Mais elle est super pour retoucher mes photos, comment je vais faire ? J'essaye de la charger avec ma batterie externe, qu'elle va vampiriser, mais pour l'instant pas le choix.

En attendant, je pars pour les ruines de Palenque. Ah ça, j'en aurai fait des ruines, presque toutes ... Je prends le colectivo, qui me dépose devant la billetterie et m'attend pour le dernier kilomètre. Je pénètre dans la zone archéologique, et je me dis que cette jungle est encore plus jungleuse que dans le Yucatan, et c'est chouette. De grands arbres, des lianes, et du relief, surtout, c'est ce qui me manquait le plus. Le site n'est pas très bien entretenu, mais il est en voie de rénovation. Le style architectural est un peu différent de ce que j'ai pu voir jusqu'à maintenant, car les parties supérieures des temples sont plus stylisées. On y trouve aussi les éternelles stèles, qu'est ce qu'ils aimaient ça, ces Mayas. Les Dieux, les rois les dignitaires ...

Palenque est encore une autre cité maya qui comme d'habitude, tapait sur la gueule de ses voisins et se faisait envahir de temps à autre. Par Tikal, Calakmul, Bonampak ... Mais le plus intéressant, c'est que le roi Pakal a été découvert là, sa tombe était dans le Temple des Inscriptions. Le gars avec le masque de jade au musée de Mexico. Il y a une frise qui le représente renaissant sous la forme du Dieu du Maïs, très important puisque les Mayas pensaient être faits de maïs par les Dieux. Il y a aussi la tombe de la Reine Rouge, couverte de cinnabar. Comme c'est rouge, il y avait une composante symbolique avec le sang, mais aussi une composante pratique car il permettait de sceller la tombe.

Après Pakal, il y a eu Serpent-Jaguar, de son nom traduit littéralement, c'est lui qui a construit le Complexe de la Croix un peu plus haut. On y trouve le Temple du Soleil, dédié au Dieu "GIII" (ils n'ont pas dû trouver son nom, ou alors il est juste très dur à prononcer, on sait jamais avec les Mayas), avec des bas reliefs de serpents car c'est le même mot "chan" pour serpent et ciel. Et on trouve aussi le Temple de la Croix Feuilletée, dédiée au Dieu "GII", c'est aussi le Temple du Maïs. Sa forme est rigolote.

Il y a toute une aire avec une cascade, qui est fermée au public. J'essaye de passer par les toilettes, discrètement, mais le chemin passe juste sous les yeux des dames qui en fait surveillent les touristes audacieux. Dommage.

Une heure et quelques de visite plus tard, je reprends le colectivo pour redescendre. Sur le chemin, je constate qu'il y avait un sentier de randonnée dans la jungle un peu en contrebas, je ne l'avais vu mentionné nulle part. Tant pis, de toute manière je suis affamée. Je vais faire les courses au Chedraui pour midi, car il serait temps de se remettre à contrôler un peu les calories. C'est super grand, il y a de tout, même des flics avec des mitraillettes, ah quand même. Je me repose jusqu'à environ 15 heures.

Je ne suis pas loin de la station de bus et des tours opérateurs, donc je vais me renseigner sur les tours qui partent dans la Selva Lacandona, la grande jungle du Chiapas et du Guatemala où vivent les Lacandones, derniers descendants des Mayas. Ils ont pu échapper aux Espagnols en allant se cacher dans la jungle. Ils y sont toujours. Il y a trois options: un jour aux ruines, un jour dans la communauté, deux jours avec les deux. Et évidemment, je choisis deux jours avec les deux ! De toute manière j'en avais envie longtemps auparavant, quand je planifiais un peu le voyage. Je me revois il y a deux jours, me dire "j'en ai marre des moustiques et de lq chaleur", l'être humain est fait de contradictions, mais bon, je ne sais pas si je retournerai dans la jungle de sitôt alors autant en profiter à fond.

Je pars ensuite pour la cascade de Misol-Ha, encore en colectivo. Il emprunte la fameuse route entre Palenque et San Cristóbal, réputée pour ses braquages. Jour et nuit. Même que le bus n'y passe pas. Sauf que la réalité est différente : elle tourne et retourne tellement dans les montagnes que le bus ne peut pas passer. Et que les braquages n'ont pas lieu tant que ça, et surtout la nuit, d'ailleurs il y a des vans touristiques qui vont tous les jours à San Cristóbal et rien ne se passe. Alors, en colectivo, ça devrait le faire, il suffit de ne pas être malade en voiture!

Bon, oui, la route est un peu dangereuse en fait. Dangereusement belle. Il y a des petites collines toutes rondes, recouvertes de végétation tropicale, ça me rappelle un peu le Vietnam, c'est marrant. Le combi me laisse en bord de route, je dois marcher 1,5km dans les champs de maïs et les pâturages. Oui, c'est assez typique de ce coin je crois, de la jungle et boum, soudain, des vaches. Original. Par contre je crois que j'ai vu que la cascade fermait à 17 heures et il est ... 16h50! Je me dépêche, mais une fois arrivée, ce n'est pas du tout fermé.

Misol-Ha est une cascade qui se jette gracieusement de 25 mètres de haut, sur le rio Tulijá. Je me plains toujours d'avoir vu trop de cascades, mais là j'en avais envie, et le site est splendide. En plus, je suis toute seule. Je m'entraîne pendant une vingtaine de minutes à prendre à nouveau des photos en manuel, je m'éclate. Je prends de tous les points de vue possibles, à gauche, en dessous, à droite.

Quarante minutes plus tard, je me remets en route, car j'aimerais rentrer avant qu'il ne fasse nuit, quand même. Je n'ai même pas le temps d'attendre que le colectivo arrive tout de suite, je monte presque au vol, le chauffeur me dit joyeusement "sin miedo!", bah non, pourquoi ça ? Parce qu'il va vite dans les virages ? Ça va. De retour sur Palenque, je refais des courses et je ne traîne pas trop car demain, debout à 5 heures du matin. Vu que je me réveille tout le temps en ce moment, ça ne devrait pas trop poser de souci.

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Fausse bonne idée 

Franchement, ça va. Je me sens un peu enrhumée à cause de la climatisation à fond, mais ça passe vite. Je vais attendre le minibus à la réception, qui quand il arrive demande une "Mariane Ferranti", c'est nouveau ça. Dans la nuit, nous allons chercher les dernières personnes de notre groupe, et nous prenons la route. Pas facile de somnoler, même si la fatigue n'est pas très loin. Le soleil finit par se lever, et bientôt nous arrivons pour prendre notre petit déjeuner buffet. Qui n'est pas extraordinaire, mais bon il fera l'affaire. Une fois remontés dans le bus, notre guide Joyce se présente, et nous aussi. Notre groupe est constitué d'argentins, de mexicains et de deux Suisses, Marine et Thibault, que je pensais en couple mais j'apprendrai plus tard qu'ils sont frère et soeur, pas du tout de ressemblance. Il est trop tôt pour discuter et faire connaissance, en plus j'ai envie de regarder le paysage car les petites montagnettes sont encore embrumées. Cet endroit est encore plus rural, d'ailleurs Joyce nous dit que tous les enfants n'allaient pas à l'école, donc ils ont mis en place un programme où les enseignants viennent à domicile deux jours par semaine, et le reste du temps les enfants peuvent travailler dans la maison.

Encore une bonne heure de route avant d'arriver à l'embarcadère de Frontera Corozal, un petit village au bord du Rio Usumacinta qui marque la frontière entre le Mexique et le Guatemala, ce pays où je n'ai pas le droit d'aller en théorie à cause de mon passeport. Peut être qu'avec un tour organisé, ça aurait pu passer, mais bon tant pis. Du coup, c'est rigolo car pour moi il prend des airs de pays inaccessible, mystérieux, alors que bon le Chiapas appartenait au Guatemala avant et c'est sensiblement la même chose. On voit leurs antennes relais en face, car la petite ville cachée par les arbres a l'air un peu importante, on peut distinguer de petites maisons coloniales colorées et ça a l'air sympa. C'est donc sur ce fleuve que nous allons faire un tour de lancha, la petite pirogue mexicaine à moteur, pendant 40 minutes pour atteindre le site de Yaxchilan qui est situé dans l'une de ses boucles, comme une espèce de vésicule le long de la frontière. C'est drôle car les deux rives ne sont pas fournies pareil en végétation. Je ne sais pas si c'est une politique de déforestation de la part des Guatemaltèques, ou pas. Du coup, ça donne une assez bonne idée d'à quoi ça ressemble en face sans les arbres.

Nous arrivons à Yaxchilan, avec notre nouveau groupe de six, qui a changé car on ne peut pas tous être ensemble, le conducteur nous donne une heure trente pour visiter et nous dit de revenir tous ensemble, en groupe. Avec les Suisses, nous allons signer le registre, et l'un des gars rejoint le groupe avec qui il était à la base. Les deux autres sont un couple gay.

A l'entrée de la ville, il y a le Labyrinthe. C'est un bâtiment dans lequel il y a, et bien, un labyrinthe dans le noir. Les guerriers devaient en sortir pour prouver leur valeur. Avant, nous pouvions aussi nous y engager avec un guide, plus maintenant, il y a dû y avoir des pertes. Le nom du site, Yaxchilan, a été donné par l'archéologue Maler et signifie en maya "pierres vertes", mais son nom antique aurait pu être Pa'chan. C'est la fameuse ville qui contrôlait Bonampak et tapait sur la gueule de Palenque et Tikal. La première stèle date du roi Yeux Noués-Jaguar I, et oui je vais continuer à mettre leurs noms qui sont d'ailleurs les officiels, car c'est marrant. Yaxchilan est à son apogée durant le règne d'Itzamnaaj Bahlam III, mort à plus de 90 ans. Roi très apprécié, la plupart des monuments du site datent de son règne, puis de celui de son fils Oiseau-Jaguar IV, qui ne lui a succédé que dix ans plus tard. Pourquoi tout ce temps alors que les rois montaient sur le trône dès petits ? Mystère. Il se pourrait que la cité ait été soumise à celle de Piedras Negras pendant tout ce temps, et que la régence était assurée par une souveraine, Yopaat Bahlam II, mais ce qui est bizarre c'est qu'elle n'apparaît pas dans les tablettes. En plus, Oiseau-Jaguar IV était le fils de la troisième épouse de son père, venue de Calakmul, donc il n'était pas le plus légitime. Il devait donc y avoir une période de grosse crise politique jusqu'à ce qu'il finisse par monter sur le trône, construire plein de choses (notamment pour rendre maman légitime aussi) et se bastonner avec plein de monde pour cacher son complexe d'infériorité. L'interrègne de dix ans a ensuite été effacé de l'histoire.

La cité n'est que peu restaurée, recouverte de jungle. C'est encore plus Indiana Jones que les autres! On peut y voir des acropoles, mais le monument le plus important est le Templo Mayor, auquel on peut accéder par un dénivelé de 90 mètres d'escaliers. De là haut, on commence à entendre des singes hurleurs. On dirait des rugissements, mais sur la vidéo ça rend surtout comme un bruit de train.

Je passe par un petit chemin peu fréquenté pour me retrouver sur une autre acropole où je suis presque seule, il y a deux Françaises qui parlent entre elles. Je ne suis pas d'humeur à me socialiser, donc je m'en vais, de toute manière il est presque l'heure. Tout le groupe arrive, sauf le gars qui a rejoint les autres. Évidemment, il a dû rester avec eux. Mais notre conducteur ne veut au départ rien entendre, dans le doute, on l'attend. Au bout de 25 minutes on insiste, mais il a peur de se faire engueuler. Il y a même un des gars qui va faire le tour des ruines pour le trouver, toujours rien. Et il faut qu'on aille manger car on va tous mettre nos groupes respectifs en retard pour la suite de la journée ! Après, c'est un peu nul, il a bien dû monter dans une autre lancha et on ne lui a rien dit ... Bon, on finit par partir, au pire il y a quelques autres lanchas à prendre.

Enfin de retour, on s'excuse, on explique, et on va directement manger. En plus dans notre groupe de base il y a une petite de 5-6 ans, elle doit avoir faim. Il manque une soupe à notre table, du coup je lui passe la mienne en attendant. Nous discutons voyage avec les Suisses, surtout de l'Asie, qui nous manque trop. Le repas n'est pas trop mal, ça va, j'ai du poulet light, mais Marine a pris un mole avec une énorme dose de sauce, c'est beaucoup trop. C'est marrant aussi car elle emploie la même stratégie que moi, consistant à dire qu'elle s'appelle Marina parce que de toute manière les gens vont le prononcer comme ça. Elle a passé un mois et demi à l'université de Mérida pour le boulot.

Tout juste fini, nous repartons vite pour ne pas être en retard à Bonampak. Il faut y être avant 15h30 et nous arrivons pile. Nous sommes dans la réserve des Lacandones que j'ai mentionnés plus tôt, et ces gardiens de la forêt refusent de laisser des tours operators entrer à Bonampak, car ils veulent être associés au tourisme, et ne pas se faire exploiter comme l'étaient les gens de Hierve El Agua, site proche de Oaxaca qui a fermé à cause de ça. Donc, en conséquence, nous changeons de van pour prendre le "transport lacandon", bon c'est une autre van mais conduit par un gars de la communauté. Les guides en font partie aussi, ils sont vêtus d'une longue robe blanche qui les fait ressembler à des membres d'une secte. Et c'est chez eux que je vais dormir ce soir, ok.

Bonampak est une petite ville qui dépendait donc de Yaxchilan, dont le nom signifie "murs peints" car les fresques sont la principale attraction. Il y en a trois différentes, peintes par un maître et deux assistants compétents, car elles ont été réalisées d'une traite quand le plâtre était encore humide et franchement, il y a du niveau. Les premières racontent la présentation d'un enfant héritier d'une famille noble, les secondes la capture de prisonniers d'une cité rivale et leur sacrifice, les troisièmes des danses suites à ces sacrifices. On peut voir aussi des femmes qui se coupent la langue, dans un auto-sacrifice, charmant.

Les fresques sont bien conservées même maintenant, alors qu'elles le furent bien mieux en 1946 lors de la découverte de Bonampak. C'est très original, et j'ai un petit flashback du Sri Lanka. Autrement, le site est effectivement petit, en montant tout en haut on a une belle vue sur la place centrale et les montagnes, mais c'est tout.

Ça bosse ! 

De retour au van, je vais maintenant me faire déposer dans l'eco-village lacandon où je vais passer 24 heures. Je fais la connaissance de Regina, et de la jeune Maria, qui m'installe dans ma petite chambre. Je me mets en maillot pour aller me baigner dans la rivière qui passe à côté des bungalows. Comme c'est rafraîchissant ! Je vois même des colibris qui viennent butiner les hibiscus. Retour à la chambre, je peux même mettre ma moustiquaire ! J'inspecte le matelas, pas de punaises mais il me semble qu'il y a de petits trucs qui sautent, probablement des puces. Bon, ben je vais m'asperger de répulsif et mettre mes affaires un peu loin. Le dîner n'est pas très copieux, mais ça passe. Ma tablette ayant enfin un peu rechargé car elle est raciste et n'accepte qu'un chargeur Samsung et le câble d'origine, je vais pouvoir enfin un peu éditer les photos, tandis qu'un groupe de gens chante dans le resto.

Et puis, il se met à pleuvoir.

Mais quand je dis pleuvoir, je veux dire, des trombes d'eau. Je vérifie toutes les cinq minutes le niveau, parce qu'il me semble qu'il y a tant d'eau qu'elle n'est pas assez absorbée, et il me semble que ça monte. Bon, et bien heureusement que je me suis méfiée et que je ne me suis pas plus que ça installée, car je vois l'eau qui passe sous ma porte. Nope. NOPE. Pas question de noyer le reste de mon matos. Pas de panique. Je fourre tout dans mon backpack, je sauve mes chaussures, et je sors au moment où Regina vient me voir. Je cours sous la pluie, je vais me réfugier dans le resto. En pyjama devant tout le monde, mais bon, au point où j'en suis. En dix secondes, je suis rincée ! Je pose les affaires sur la table car il ne s'agirait pas que ce soit inondé là aussi. C'est Miguel, qui je crois est le mari de Regina, qui vient m'aider à changer de chambre pour une plus grande juste à côté où il y a une marche donc l'eau s'y écoule tout devant. Heureusement que j'ai mes tongs. Je surveille le niveau d'eau, effectivement c'est stable. Je repars dans ma première chambre pour récupérer la moustiquaire que j'avais lâchement abandonnée, il y a un bon centimètre d'eau. Apparemment ça arrive souvent, mais ça faisait 6 mois qu'il n'avait pas plu comme ça. Évidemment. Je pose le filet sur le matelas, le temps de me sécher, et je l'installe encore au dessus de mon nouveau lit. Sauf que, là, qu'est ce que je vois dans ma moustiquaire ? Qui a eu le temps de venir squatter dedans en l'espace de cinq minutes ? Une punaise. Une putain de punaise de lit. Nope nope nope nope nope. Je vais à nouveau chercher Regina et Miguel, je dis que je suis désolée mais non, je ne peux pas rester, elle va me piquer, me faire des allergies, et pondre dans mes affaires. Au début ils disaient qu'il n'y en avait plus, mais je ne fais pas confiance à ces bestioles, en plus les matelas sont fichus de telle sorte qu'elles peuvent aller dedans. Regina me fait une fois de plus changer de chambre, je suis encore upgradée, mais elle est un peu plus loin. Je suis Miguel dans la nuit, trempée, fatiguée, sans savoir où je vais ni ce que je vais trouver cette fois-ci dans mon lit. Bon, cette chambre fera l'affaire, ça fait la troisième, il faut que j'arrête de leur demander des trucs. Je regarde les deux lits: plus propres, pas de punaises il semblerait, mais par contre quelques fourmis, des araignées et d'autres petites bestioles dans le matelas, j'en vois une rentrer dedans comme je le craignais, et je fais alors appel à mon bon sens. Il y a deux dessus de lits que j'inspecte, ils m'ont l'air propres, et en les pliant chacun en deux, je peux me faire quatre couches. Je vais donc dormir par terre, comme sur un tapis de sol, c'est pas comme si c'était la première fois mais ça fait longtemps que je ne l'ai pas fait sobre. J'aurais dû accepter la tequila des gens du resto. Il n'y a pas de poux dans les oreillers, parfait. Heureusement, j'ai mon sac à viande en soie, donc de quoi me couvrir pour ne pas avoir trop froid vu que c'est très humide. Et au final, ça passe. Je me réveille souvent mais je parviens à dormir quand même, bercée par le bruit de la rivière et des insectes, alors que la pluie s'est enfin arrêtée.

Oui, c'est sûr, ce n'était pas la meilleure idée de ma vie, de venir ici. Mais je me dis que j'ai une expérience complète, et que ça pourrait être pire, j'ai évité l'eau, les puces et les bed bugs, après tout je ne m'en sors pas si mal et dormir par terre n'était pas si terrible. Je me lève, je vais prendre le petit dej, et je retrouve Miguel pour l'excursion dans la jungle, qui sort tout juste de la brume.

J'ai dit que je faisais un effort, pas 10 000 photos de jungle, j'ai tenu ma promesse. De toute manière, il faudra les retoucher et je suis suffisamment à la bourre comme ça. Comme, je le rappelle, il a plu hier, il y a pas mal de boue sur le sentier. Ça me rappelle Belouve avec Cécilia mais en toujours moins pire. Avec un bâton, c'est mieux. Je reste concentrée car il y a des lianes avec des épines vénéneuses, heureusement Miguel a des antibios au cas où. Il me parle de plusieurs fruits dont le zapote, je crois en avoir vu en Amazonie. Peu d'animaux à part de classiques papillons et des libellules bleues. Avec mes règles, je pourrais attirer des jaguars. Nous traversons plein de petits ponts de bois car cette jungle est très irriguée. Bon, à cause de la boue, l'expérience est un peu plus pénible que prévue mais nous arrivons en avance à la cascade des Murciélagos (des chauves souris). Je suis contente d'avoir mes chaussures aquatiques, c'est vraiment la base en fait, car Miguel me fait traverser la rivière une fois mise en maillot, et me montre une petite caverne avec des chauve-souris. Puis, j'ai le temps de me baigner une bonne demi heure, il m'avait donné 1h30 mais c'est bien trop. Nous rentrons donc tranquillement au village, j'ai un peu la tête qui tourne. Soit je suis déshydratée, soit c'est parce que je dois mettre trop de DEET, soit mon système immunitaire lutte contre des piqûres ...

Nous avons quand même marché plus de 7 kilomètres en tout ! Ah oui, quand même ! Pour 3 heures de promenade.

Je rentre à la chambre, que je dois laisser pour 14 heures, quand je vais manger. Ils sont un peu espagnols ici. J'en profite pour mettre le blog à jour, prendre une heure d'internet, me promener dans le village et prendre des photos, aussi.

Vers 17 heures, je suis prête à partir, mais le van n'arrive pas. J'ai un petit coup de stress, et s'ils m'avaient oubliée ? Pitié, je ne veux pas dormir à nouveau par terre. Maria en rajoute une couche car elle vient me demander, étonnée, pourquoi le van n'est toujours pas là. Mais il finit par arriver à 17h30, c'est Joyce qui conduit, il a dû voir mon expression de soulagement à son arrivée. Ni une ni deux, je charge le backpack et lui raconte mes mésaventures. Nous discutons du Mexique pendant deux heures et demie, car en tant que guide, il est très pointu là dessus. Il me donne des conseils pour Oaxaca car il vient de là bas, il est zapotèque - j'adore ce que vous faites - et il me parle du fait que dans leur langue, ils distinguent quatre genres: homme, femme, neutre et muje. Ça ne veut pas dire homo, ça se rapproche du bigenre ou bispirit, c'est donc intéressant. J'ai aussi toutes les réponses nécessaires sur la cuisine Mexicaine : en fait quand on dit "taco" c'est vraiment le terme générique pour tout le reste. Ce qui change c'est la garniture. Quesadilla vient de queso + tortilla, donc du fromage dans une tortilla. Fajita, poulet + poivron + oignons. Enchiladas, de la viande et normalement des épices qui arrachent, mais ça s'est perdu. Al pastor, c'était de la viande halal mais là aussi ça s'est perdu. Platillo, tout le reste. Il me raconte aussi l'histoire du dessert le plus fameux du Mexique, le chile en nogada dont on a déjà parlé à Mexico. C'est Agustin de Iturbide, le général rebelle qui a mené les armées, qui est déclaré Empereur suite à l'indépendance de la Nouvelle-Espagne. Il vient manger dans un couvent à Puebla, et au terme d'un repas gargantuesque, il demande un dessert aux nonnes. Panique, car il n'y a plus rien. Elles font avec ce qui reste : un piment vert, des noix, de la pomme et de la poire, et ont l'idée de rajouter des grenades pour faire du rouge et ressembler à l'uniforme du général, qui kiffe la référence.

Nous passons devant d'autres plantations d'huile de palme. Joyce, qui décidément est une mine d'informations, me dit qu'ils ont eu beaucoup de mal à les implanter car les guerriers de la forêt lacandone, à savoir les oiseaux et les insectes, venaient attaquer les plantations.

Nous voici enfin arrivés à Palenque. Ayant la flemme d'aller acheter à manger, je veux aller goûter un risotto aux crevettes dans un resto, ça me faisait envie. Mais le plat est énorme et bien gras. Heureusement, on peut demander des doggy bags. Ça sera mon repas de demain midi, avant de partir.

9
sept

Au revoir la jungle, la chaleur, les moustiques. Je suis impatiente de découvrir de nouveaux horizons. Mais je me connais, dans un an, je voudrai retourner dans la jungle, comme d'habitude. En partant de l'hostel, je sauve un portable sur le bord de la route, qui a failli se faire écraser. Je compte le ramener à l'hostel mais je croise un gars qui dit qu'il est à lui. Je lui demande de le déverrouiller. Il le fait avec son empreinte, c'est bien le sien, il a eu du bol. Je monte dans un colectivo et m'installe confortablement pour quelques heures de route jusqu'à Ocosingo.


La route. J'ai eu la flemme de trier. 

J'ai entendu plein de choses sur cette route, notamment qu'il y avait souvent des braquages de touristes, mais pourtant plein de monde y passe tous les jours. Alors, en colectivo ... On y croise souvent la police, mais il faut s'en méfier aussi. Bref. Le paysage est magnifique, il est encore plus beau après Misol-Ha où je m'étais arrêtée. De belles vallées montagneuses. Par contre, beaucoup de travaux, et des enfants qui nous sautent dessus pour nous vendre des trucs à chaque arrêt. Cela dit, il vaut mieux ça, les braqueurs pourraient s'en donner à coeur joie vu qu'on s'arrête une dizaine de fois. C'est long, mais c'est tellement joli que je ne le vis pas mal. Trois heures plus tard, changement de combi à Ocosingo, direction San Cristobal. On se sent dans la montagne car la végétation a changé, plus de palmiers mais des conifères ! C'est rigolo. Par contre, je repère un petit insecte noir sur ma peau. Qui en saute. Bon, ce n'est pas une mini punaise, mais une puce ce n'est pas cool non plus. Vite, qu'on arrive, ça commence à me démanger un peu. Le trajet est un peu plus court, et nous voici enfin à destination.

Première impression : hé, je suis revenue à Cusco ! Avec les petites maisons coloniales, ça a un sacré air. Il manque les balcons de fer forgé, mais on y est presque. Même les places y ressemblent un peu. Il fait beaucoup plus frais évidemment, nous sommes à 2 200m d'altitude. Soit 1 100 de moins que Cusco et ça, heureusement quand même. Je m'installe à l'hostel Puerta Vieja, qu'on m'a vendu comme un super hostel mais pour l'instant le personnel n'est pas top, et j'ai du mal à trouver comment entrer en contact avec les gens. Ça va venir, je suppose. Même s'il y a ENCORE le même gars de Tulum et Bacalar. Je le suis. J'ai appris son nom maintenant, il s'appelle Alan. On a le dîner inclus, ce qui est plutôt cool, mais il n'est pas très copieux alors je vais m'acheter une natilla et un nuegado pour goûter, en plus j'ai envie de sucre et ici c'est l'endroit idéal, il y a plein de pâtisseries. Je vais aussi me balader, et booker un tour à cheval pour demain avant de rentrer. Je me cale tranquillement dans mon lit, confortable mais ... Probablement plein d'araignées car je me fais piquer à plusieurs reprises, notamment au dessus de l'oeil, ce qui me fait gonfler la paupière en pleine nuit. Je prends un second antihistaminique, alors ... Dire que je croyais que les bestioles allaient arrêter de me piquer. Quelle naïveté.

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Un autre monde

Pas de bol, ça n'a pas dégonflé. Je crains un peu de devoir faire du cheval un oeil fermé, en plus c'est désagréable au possible. Je trouve une solution en me collant un pansement en travers de l'oeil pour le garder ouvert, et bonne nounj89velle c'est moche mais ça marche. De toute manière, je vais ressembler à Elephant Woman toute la journée, heureusement que les lunettes de soleil ça existe. Je descends à la cuisine pour le petit dej, et quand je demande de la glace, les dames n'en ont rien à foutre. Genre, vraiment. Heureusement, un autre mec de l'hostel me sort une bière du congélo, ça fera l'affaire et ça fait rire le volontaire qui lui non plus n'est pas très utile. Aussi, une autre fille de mon dortoir, une Espagnole, remarque mon souci et me dit qu'elle a eu le même sauf que ça se voit moins. Bon, ben j'imagine que ça fait de nous des potes. Crêpe et pancakes avalés, je me prépare pour partir faire du cheval jusqu'au petit village de San Juan Chamula, réputé pour son église. Oh non Marine, tu nous soules avec ton art religieux. Non mais attendez, c'est pas ce que vous croyez, vous allez voir.

Dans le taxi, une autre tradition qui se perpétue : je suis avec un couple de Montpelliérains. Spotted. Nous arrivons à l'endroit où nous montons à cheval avec plein d'autres personnes. Ma jument s'appelle Coqueta, et ça va elle n'est pas trop difficile. Par contre les étriers sont petits et ça me fait mal aux genoux, donc je préfère les déchausser. Coqueta est un peu longue à la détente le matin, elle ne veut pas trotter. Comme nous sentons que ça va être une balade tranquille, avec les gens de devant on s'amuse à trotter un peu, voire galoper sur quelques mètres, mais ni la selle ni Coqueta ne sont confortables. En plus nous devons souvent prendre la route goudronnée car il a plu et les chemins sont glissants pour les chevaux. Le paysage est très beau, c'est très agricole.

Au bout d'une heure, nous laissons les chevaux avant d'entrer dans le village de San Juan Chamula. Tout le monde se dirige tout droit vers l'église, évidemment. C'est quand même une sacrée attraction. J'avais lu quelques mots à son sujet, mais quand même, la voir de ses yeux c'est tout autre chose. De l'extérieur, rien d'anormal, mais à l'intérieur ... Je vais essayer de décrire du mieux possible, mais je pense que les mots ne suffisent pas à capturer l'essence de ce lieu mystique.

Car ça pour être mystique ... Les Chamulas suivent une religion syncrétique mêlée de chamanisme. Le chaman tient lieu de docteur. Ici, les croyants sacrifient des poulets pour guérir les maladies. Ils transfèrent le mal dans le corps du volatile, il part en même temps que son âme. On voit d'ailleurs un sac bouger, et on entend un cot cot cot un peu affolé. J'essaye d'en faire abstraction car ça me perturbe. Je dois aussi ranger mon portable, même pour prendre des notes, car c'est un lieu sacré et les photos et vidéos sont interdites sous peine d'amende de 4000 pesos. Après les explications que je n'ai pas comprises intégralement, je m'asseois par terre comme tout le monde, pour prendre des notes et retranscrire mon état d'esprit. Je suis sur une couche d'aiguilles de pin, dispersées sur tout le parterre de l'église. Elles représentent le ciel, tandis que les racines représentent l'inframonde. Des centaines, peut être un millier de bougies sont allumées, sur les tables et à même le sol. De couleurs différentes, elles se consument pour créer des lignes colorées qui se mêlent entre elles, rappelant un tableau abstrait. L'air est empli d'odeurs de cire fondue, d'encens et bien évidemment de pin frais. La plupart des gens présents, touristes comme chamulas vêtus de peaux de moutons noirs, sont assis par terre pour prier, méditer, préparer les poulets ou dans le cas des gringos, observer de manière intriguée et émerveillée. C'est un endroit comme aucun autre, et lorsque l'on croit avoir saisi l'essence du lieu, voici que des musiciens entrent, avec des encensoirs et des pétards qui retentissent, faisant sursauter les non avertis. Le lien entre la religion et la nature est profond. Les plantes comme les tournesols et autres sont posées en offrande à tous les saints vénérés ici, petites statues dans leurs retables, alignés les uns à la suite des autres. De grandes tentures vertes et grises décorent la pièce. Tout à coup devant moi, une dame sort son poulet du sac et l'étrangle. L'oiseau est pris de convulsions tandis que son âme quitte son corps. J'espère que la maladie sera guérie ... Je demanderais bien qu'on soigne mon oeil, d'ailleurs. Mais je ne me sens pas d'étrangler un poulet. Pendant ce temps, les musiciens répètent inlassablement le même rythme, au son des tambours, guitares et accordéons. Nous les voyons contempler la représentation de Saint Antoine de Padoue, faire des ... des trucs, mais personne n'ose les déranger. Ah, maintenant il y a des flûtes ou des sifflets, je ne sais pas trop. Et un poulet qui caquette. Ah, le sifflet est en fait une mini calebasse. Boum ! Une autre détonation, et les musiciens s'arrêtent de jouer. Les croyants boivent de l'alcool, d'ailleurs ils en proposent aux gens à côté de moi, qui refusent, quelle idée. Je ne sais plus où donner de la tête, je ne comprends rien à ce qu'il se passe mais c'est fascinant. Totalement hors du commun, inimaginable si on n'y assiste pas soi même. Une dame entame une litanie incompréhensible pour moi, et une musique désincarnée proche de l'autel de San Juan Bautista entonne We wish you a merry Christmas, ce qui est plutôt dérangeant. Et avec tout cela, c'est bientôt l'heure d'aller retrouver les chevaux. Il faut bien partir un jour, j'aurais pu y rester de longues minutes encore, je me retourne plusieurs fois pour graver le souvenir dans ma mémoire.

J'ai trouvé la vidéo de quelqu'un qui s'appelle Osk A, car vraiment, il faut voir ça.  

En sortant, je n'adresse la parole à personne, voulant me connecter avec mes sensations, et en plus j'ai l'impression de revenir d'un autre monde, ce qui n'est pas foncièrement faux. Il y a des gens qui ont acheté des "fourmis" (c'est ce qu'ils ont dit mais on dirait d'autres insectes) et m'en proposent, au point où j'en suis, j'accepte. Ça a un goût de fumé, ça croustille et ça reste dans les dents. Nous remontons sur les chevaux, et faisons une petite balade avant de rentrer. Coqueta est un peu plus réveillée.

De retour à San Cris, je vais acheter du poulet frit que j'éponge de sa graisse autant que faire se peut, et je commence à cuisiner le riz de Tulum. Je me suis faite à l'idée que ma liseuse est morte. Je galère à trouver comment allumer les plaques, principalement car il n'y a pas de briquet, et les cuisinières ne sont d'aucune utilité, elles s'en foutent. Bon heureusement, il y a d'autres gens qui m'en passent un. Je vais ensuite me reposer tranquillement, avant de partir pour le walking tour de 17h. Je fais un saut à la pharmacie pour essayer de trouver un répulsif contre les araignées, et la nana me m'en propose un contre les insectes volants. "Arañas no vuelan", dis-je. Elle est un peu con. Elle finit par me donner une bombe à mettre sur mon matelas. Ça fera l'affaire, enfin, j'espère.

Je me rends sur la Plaza La Paz et essaye de trouver le guide. Je ne vois pas d'ombrelle orange, mais en regardant bien, je finis par repérer le logo sur une casquette. Je vais me présenter, lui aussi, il s'appelle Carlos et il est de Xochimilco à Mexico City (interro surprise chers lecteurs, vous vous souvenez de ce qu'on y a fait?). Il pensait qu'il n'y avait personne à cause du temps qui vire à la pluie, mais nous sommes huit au final, dont une fille de mon hostel, enfin du lit au dessus de moi pour être plus précise. Joy, d'Allemagne. Les autres personnes avec nous sont assez cools aussi ! Bon pour une fois, j'ai eu la flemme de prendre des notes pendant le tour, surtout que Carlos nous montre des endroits un peu hors des sentiers battus, ce qui est très bien. Il nous fait visiter beaucoup de centres culturels, car c'est assez emblématique de la vibe de San Cristóbal. Il y a plein de boutiques de commerce équitable et responsable, une foule de petites associations. Ne serait-ce que dans l'Avenida Michel Hidalgo, il y a la boutique de Kiki Suarez, une grande artiste. Elle a peints des femmes dans des positions un peu tordues, qui sont probablement une référence à l'orgasme, car dans le temps lorsque cela arrivait, on les torturait. Charmant. Dans cette rue se trouve aussi la première faculté de Droit d'Amérique Latine. Et tout au bout, on trouve l'Arco del Carmen, symbole de la ville, entrée de l'ancienne Ciudad Real en venant du Guatemala.

San Cristóbalest l'une des premières villes de Nouvelle-Espagne en Amerique continentale. C'était la première capitale du Chiapas avant Tuxtla Gutiérrez, de qui elle est la rivale. C'est le prêtre Bartolome de las Casas qui lui donne son nom. C'était un fervent défenseur des indigènes. La villr a changé plein de fois de nom, elle s'est même appelée Villa Viciosa.

En redescendant, nous faisons un tour dans le Mercado de Dulces y Artesanías, où se trouvent donc des stands de pâtisseries. Carlos nous fait goûter un ponche, à ne pas confondre avec celui au rhum même si des fruits sont aussi infusés. Ça se sert chaud, et ce n'est pas mauvais. Il faudrait au moins ça pour accompagner les tacos d'ici ... À la langue, à l'oeil ou à la cervelle de boeuf. Nous remontons l'Avenida Insurgentes qui nous mène à nouveau vers le Zócalo, et nous nous arrêtons devant des maisons avec des fresques un peu curieuses, notamment des sirènes et des statues de lion qui ont été commandés par les colons espagnols, sauf que les Mexicains n'en avaient jamais vu de représentations et ils ont donc inventé en fonction des descriptions.

Tandis que nous remontons le Corridor de Guadalupe, menant à l'église du même nom, je parle de mes impressions sur les flics du Chiapas à Carlos. Il me dit que des enfants indigènes sont souvent enlevés pour rejoindre les forces paramilitaires. Grosse ambiance dans le Chiapas, et pendant ce temps les hippies viennent ici pour se défoncer et trouver leur moi intérieur. On essaye de ne pas être trop politique, mais j'ai tout de même lancé le sujet. Mais tout à coup, un accordéoniste sort sur son balcon et se met à ... Euh, chanter, appelons ça comme ça, en tout cas il détend l'atmosphère.

Il se passe de sacrées choses ici, tout de même. Les rues sont aussi recouvertes de street art, certaines fresques réalisées par un artiste sous substances, allez savoir lesquelles vu qu'on y trouve plein de choses. Carlos nous parle de la galeria Arteria, et l'une des filles du groupe renchérit en la qualifiant d'incroyable. Mais arrivés sur place, c'est déjà fermé, il est plus de 19 heures. Pas grave, ça sera pour plus tard. À la place, nous allons dans une galerie où nous pouvons apprécier de magnifiques textiles, notamment un tissu tressé avec du cuivre.

Nous entrons dans un petit restaurant qui nous fait déguster du pozole, une soupe avec du maïs, dans de tout petits bols juste pour l'échantillon. Trop bien, on ne paye rien de plus. C'est pas mal, mais bon, encore un truc au maïs qui n'ai pas trop de goût. Et notre dernière étape est aussi une dégustation, une liqueur de ... maïs, appelée pox. Il y a aussi du sucre de canne dedans, et c'était un alcool très prisé des Mayas. La liqueur est déclinée dans sa version pure, mais aussi à l'hibiscus et au chocolat, cette dernière étant particulièrement délicieuse. C'est là que nous arrêtons notre walking tour, qui a duré 3h30 au lieu de 2h30. Carlos nous propose de rester boire une bière, nous parle d'autres tours comme celui du temazcal - ça m'intéresse - et il va aussi reverser une grande partie de ses pourboires à une association pour les chiens errants. Nous aurions bien aimé rester, mais Joy et moi avaons réservé le dîner gratuit de l'hostel pour ce soir et nous sommes déjà à la bourre, le repas ne se servant que jusqu'à 20h30. Je n'ai aucune confiance en les nanas de la cuisine là-dessus. C'est donc sous des trombes d'eau et un peu à regret que nous quittons le groupe, non sans avoir pris les comptes Instagram ou numéros Whatsapp les uns des autres.

Les rues se sont transformées en rivières, et on comprend mieux l'utilité des hauts trottoirs. Le souci c'est qu'ils sont glissants, et d'habitude je préfère carrément marcher sur la route pour éviter de me casser la figure, ce qui doit énerver les voitures. Notre progression en est fortement ralentie, et nous arrivons à l'hostel à 20h34 exactement. Et devinez quoi, en cuisine on se fait engueuler. Les dames ne veulent pas nous donner nos burgers à la viande qu'on a pourtant réservés en début de journée ! Soit disant il n'y en a plus. Je vais voir la réceptionniste pour lui dire qu'elles abusent, et en fait elles sont ok pour nous donner des burgers mais seulement végétariens. Bon, et bien on va crever la dalle. Heureusement que j'ai fait plein de riz pour compléter le repas car les portions ne sont pas bien grandes. Après tout cela, Joy me présente à un autre Français de Lyon, très sympa. On va tous prendre un verre au bar, et je rencontre deux Normandes, Chloé et Meïlys, qui sont dans mon dortoir. Chaque fois je crains de ne rencontrer personne et de rester à part, mais tout finit par bien se passer. On danse tous ensemble, en plus c'est la soirée des cocktails gratuits. Les mojitos sont nuls, par contre la tequila sunrise est sympa. Plein d'autres gens rejoignent notre groupe, et on s'entraîne pour la soirée karaoké de demain.

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Journée de repos, ou presque 

Bon, malgré l'Aerius et la pommade à la cortisone, mon oeil n'a toujours pas dégonflé. J'ai même l'impression qu'il est pire, parce que je peine vraiment à l'ouvrir, il me fait mal car je dois forcer sur la paupière, même avec le pansement pour le maintenir ouvert. J'essaye de n'ouvrir que le droit en mettant mon masque de nuit en travers de ma tête, j'ai l'air con mais tant pis, mais c'est pire car c'est mon oeil directeur et le droit n'est pas habitué à autant forcer non plus, au bout d'une minute je vois des points noirs. Bon, et bien il va falloir être radicale et aller voir un docteur ! Mais tout d'abord ... Il y a une cérémonie du cacao dans un autre hostel, ouvert au public pour cette occasion, avec un certain Keith. Cet autre hostel, La Isla, c'est le repère des hippies. Alors, allons-y, je suis curieuse, on verra bien ce que ça donne !

Ça donne ... Dans le too much pour moi. Je retrouve des gens du groupe du cheval, mais on ne se parle pas plus que ça, car tout le monde autour semble vivre dans le monde des Bisounours. Alors oui, ce sont des gens sympas, compatissants et tournés vers les autres, mais une vingtaine de personnes qui soupirent de contentement à chaque phrase, qui s'appellent "beautiful soul" et pour qui la réponse à "je crois que je t'ai croisé quelque part" c'est "oui dans une vie antérieure", c'est trop. Et ce n'est pas fini, attendez de voir le gourou. Nous prenons nos tasses de cacao, les volontaires (avec leurs tee shirts "la isla, a place to be awaken") les remplissent d'eau chaude, jusque là tout va bien, il me tarde de savoir à quoi va ressembler ce fameux rituel maya. C'est comme ça que c'était vendu. Keith se lève et, avec son tee shirt "Keith cacao's magic" ou un truc dans le genre, commence son one-man show. Oui, oui. Il blague, tout le monde rit comme hypnotisé par son charisme de folie, mais pas moi. Parce que moi qui pensait assister à un rituel ancestral, je me retrouve à écouter un gourou antivax. Merveilleux. Et le cacao alors ? On le goûte, Keith le boit presque cul sec en blablatant sur lui et sur le potentiel de chacun, nous encourageant à la méditation, tout le monde soupire de plaisir. Sauf moi, parce que ça ne va pas soigner mon oeil. Impossible de me mettre dans le mood, je finis le cacao amer et quitte la secte discrètement quand Keith a le dos tourné et ne peut pas faire de remarques. Je sais, ce n'est pas poli, c'est pas très hippie, mais je m'en fiche. J'ai un petit retour de karma car dans ma précipitation j'en oublie ma pommade.

Vite, le centre médical. Par chance il y en a un non loin, et il n'y a personne dans la salle d'attente, et le docteur est jeune, sympa, et parle anglais. Il me rassure tout de suite en m'affirmant qu'il s'agit de piqûres d'araignées et que c'est fréquent ici. Ce ne sont donc pas des punaises, bonne nouvelle pour mes affaires, que j'avais quand même sorties du dortoir par précaution. "How many pills did you take yesterday, Marine?" me demande-t-il sur le ton du docteur qui parle à une junkie. Il me prescrit des antihistaminiques plus forts que l'Aerius, me demande de faire une prise de sang pour être sûr que je n'ai pas attrapé un parasite peu fréquent, le chagas, on ne sait jamais, et il me fait une piqûre de cortisone dans les fesses qui me fait un mal de chien pendant une heure, mais au moins ça va être radical. J'ai pris une assurance cette fois-ci, avec le covid, je devrais pouvoir me faire rembourser la consultation. Pas le médicament par contre, car la pharmacienne abrutie ne comprend pas que je n'ai pas de RFC (leur numéro de sécu) vu que je ne suis pas mexicaine, il y a une case "cliente extranjero" sur son logiciel, je lui dis de la cocher, elle me répète RFC, une de ses collègues lui montre la case, elle s'en fout, elle me dit que pas de RFC, pas de facture. Bon, il faudra se contenter du ticket et de l'ordonnance, je suppose. Ayant très mal aux fesses, impossible de partir en vadrouille pour le moment. De toute manière, il pleut. Oh, et je me rends compte que je me suis encore faite piquer, sur la joue cette fois, j'ai une grosse cloque, sexy. Et quelques autres piqûres qui n'étaient pas là auparavant. Ça suffit, je demande à changer de dortoir, car si c'est pour encore me faire piquer, cette injection n'aura servi à rien. Pas de chance, ce soir c'est plein, mais demain c'est possible. Je vais quitter le dortoir des filles, dommage, mais la santé avant tout ! J'envisage d'aller dormir sur le canapé du coin ciné, pourquoi pas après tout.

Vers 16h30 la douleur s'est estompée, je vais aller faire un tour dehors, il y a des éclaircies, alors pourquoi prendre le parapluie ... Dans la rue, je goûte quelques petites cochonneries sucrées, et me rend au Templo Santo Domingo pour voir sa belle façade. Il y a aussi un marché artisanal mais rien ne m'inspire. Du coup, je passe à la fameuse galerie Arteria, je ne la trouve pas extraordinaire mais je fais bien car il se met à pleuvoir des cordes. Je me cale sur un canapé en attendant, puis je me dirige vers la Iglesia de Guadalupe qui est juste à côté. Les représentations religieuses ont des têtes de poupées, c'est un peu dérangeant, mais c'est rigolo. L'église est aussi très fleurie. En redescendant, je fais un saut dans un café où l'on peut voir des colibris, espérant les prendre en photo, mais pas de chance ils se cachent à cause du mauvais temps. Je vais ensuite acheter des truxs sucrés au marché sur les recommandations de Carlos: une durazno pasa (une pêche amère macérée dans le sucre) et un lemon relleno de coco (de la pâte de noix de coco dans un citron vert confit), en faisant attention car avec tout ce sucre, le stand est envahi de guêpes, il ne manquerait plus que ça.

Retour à l'hostel car c'est bientôt l'heure du repas, et ensuite il y a (encore) karaoké. Je n'ai plus peur de rien, je passe même en première, motivée par les shooters de mezcal sunrise gratuits. Le docteur m'a dit pas plus de deux verres, mais deux verres pleins je présume. Du coup, je m'éclate, je motive les gens, et j'enchaîne les chansons parce que j'ai soif. Alan chante encore I want it that way, parce que j'ai insisté. Je rencontre de nouvelles personnes, comme Cristian du Nicaragua et Eric qui vit en Californie et qui fait une super interprétation de Frank Sinatra. Dur de passer après lui, mais pensons au mezcal. Au final, j'ai bu gratuitement toute la soirée. Mais un autre truc se prépare : tout le monde ou presque va partir en rave ce soir. En plus ce sont les 30 ans de Chloé et d'autres français sont arrivés. Je suis au départ tentée d'aller voir à quoi ça ressemble, mais le projet serait de ne pas rester trop tard car je prévois le temazcal demain midi et il faut être en forme. J'apprends que c'est à 25 minutes de marche et que l'entrée coûte 300 pesos. Une rave quand on ne peut pas trop boire et qu'on ne prend pas de drogues, c'est un peu nul, non ? Du coup, je passe mon tour, tant pis. J'essaye d'aller dormir sur le fameux canapé mais je n'y arrive pas car il y a un détecteur de fumée qui bugue et qui fait des bips stridents toutes les 20 secondes. Finalement, il se trouve qu'il y a un lit en hauteur de disponible dans mon dortoir, et pas dans un coin. Je vais le squatter dans la nuit. Joy n'est pas partie en rave non plus. Bon, une part de moi regrette d'avoir raté l'occasion, vu que je n'en ai jamais en France non plus, mais il faut savoir faire les bons choix, enfin, j'espère que c'est le cas. Avoir refusé la coke, oui, ça l'était. Prendre possiblement d'autres drogues après une piqûre de cortisone, sous antihistaminiques, pour la première fois en voyageant seule au Mexique, avec des gens sympas mais défoncés, et pas mes potes, je trouve que les calculs sont pas très bons quand on y pense.

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L'expérience spirituelle transcendante

Ils sont tous rentrés à au moins 6 heures du matin, la rave était dans un skate park, c'était de la grosse techno comme à Berlin et ça m'avait soulée au bout d'une heure à l'époque, bon c'était du clubbing quoi. Je me demande même si elle était si illégale que ça ou si c'était juste pour faire genre c'est une rave à San Cristóbal, voilà. Ils ont tous pris des trucs et ils ne parlent que de leur soirée. C'est marrant de les écouter mais du coup je me sens exclue, et tandis qu'ils vont tous dormir, moi j'ai un vrai programme parce que moi, j'ai pas 6 ou 10 mois de voyage. Il ne me reste qu'une semaine et demie et je compte découvrir des trucs. Notamment la meilleure expérience de mon voyage.

Je dois rejoindre Carlos chez lui à 11 heures, mais une fois arrivée, je m'aperçois qu'il m'a envoyé un message via Whatsapp en me disant qu'il ne va pas venir et qu'il faut que j'aille par moi-même au temazcal dans la montagne. Oui d'accord sauf que je n'ai pas l'adresse. Il ne répond pas au téléphone, panique à bord. Je vais être à la bourre. Au bout d'un quart d'heure sans réponse, j'ose sonner chez lui, et je fais bien car il est là et il m'explique mieux. Je rencontre donc sa femme et sa fille, toute mignonne, et je monte dans sa coccinelle au pare brise tout pété pour qu'il m'emmène prendre un taxi, qui va me mener au mirador de Don Lauro.

Maintenant, il s'agit de trouver où c'est. Parce que c'est pas dans un spa ou quoi, je n'ai aucune idée de ce que je cherche. J'entends des cris et des chants dans une maison, il y a des gens en cercle vêtus d'habits traditionnels, qui font je ne sais quoi, c'est ici le temazcal ? Bah non, me répond la dame, ça c'est ... Euh, je n'ai pas compris, mais c'est privé. Elle m'indique une direction un peu plus haut sur le chemin de terre. Heureusement, je croise deux filles tatouées qui s'y rendent aussi. Et bien, heureusement que j'ai demandé, car c'est dans un jardin au milieu de nulle part, mais il y a plein de gens qui y sont déjà. Je fais connaissance avec le shaman Gustavo, qui m'explique un peu en anglais ce qu'il faut faire et ce qu'il va se passer. Pour l'instant, je suis un peu perdue. La tente vient d'être préparée, au lieu du four à pizza traditionnel, on dirait une yourte. Ses armatures sont des branches auxquelles sont accrochées des fleurs et de petits sachets. Le sol est recouvert d'épines de pin, qui créent un matelas naturel. En son centre, un trou est creusé pour accueillir les pierres volcaniques, les abuelitas, qui sont en train de chauffer dans le feu. Gustavo me donne une pincée de tabac pour l'y jeter dedans. Je regarde aussi la préparation de la cérémonie : de l'encens, des petits sachets, du basilic/romarin qui trempe dans un seau d'eau, des instruments ... Nous sommes une trentaine de personnes. La cérémonie va bientôt commencer, nous passons des vêtements légers ou nous mettons en maillot, et nous entrons un par un dans la tente. Je me suis installée proche de la porte, derrière Gustavo, en cas de problème. Je vois tout le monde prendre l'encensoir et entrer à quatre pattes en posant le front sur la terre. Je ne l'ai pas fait, Gustavo me dit de ne pas m'inquiéter, mais je suis venue pour faire ça dans les règles. Je ressors et fais tourner l'encensoir autour de mon corps, pour qu'il purifie ma peau nue, et rentre comme il se doit, à quatre pattes dans la boue. Je me dis qu'il y a plein d'insectes prêts à me piquer dans le tapis d'aiguilles de pin, mais tant pis.

Avant de commencer, tout le monde se présente. Beaucoup de gens viennent en famille. Le temazcal étant un moyen d'entrer en contact avec les esprits de la nature et des ancêtres, les gens parlent d'abord de leur reconnaissance envers leur famille, leurs amis, leur vie en général, et envers la Pachamama (je pensais qu'ils l'appelaient différemment ici). Ils posent aussi le but du temazcal d'aujourd'hui : purification, recherche de réponses, hommage. Le père de la jeune fille à côté de moi est mort il y a peu et elle lui dédie cette cérémonie. Ça commence déjà à être émouvant. Moi, je parle de mes amis et de ma famille.

Les premières abuelitas sont accueillies dans l'âtre, un homme assiste le shaman en les prenant avec des bois de cerf. Il y a des enfants, Gustavo leur dit qu'il va faire noir et chaud, qu'il ne faut pas avoir peur. Je crois qu'il fait en sorte de me prévenir aussi. Quatre chants, et on rouvre la porte. On tient mais si on se sent mal, on peut partir à tout moment. Le battant de la porte est rabattu, le rite peut commencer. Gustavo lance de l'eau sur les abuelitas, et des huiles essentielles dans l'air. On ne voit rien. Et les chants commencent ... À l'unisson, au rythme des tambours et maracas, des chants puissants. Des mélodies qui sortent du plus profond du coeur de chacun. Des références aux éléments, à la nature, il fait de plus en plus chaud mais c'est bon. Tout le monde semble faire partie du même corps, en totale communion. Ne connaissant pas les paroles, je parviens à en saisir quelques unes et à les chanter avec eux. Sinon, je fredonne l'air, me sentant part de ce groupe. La porte s'ouvre au bout de quatre chants comme annoncé. Les enfants sortent, les abuelitas rentrent, "bienvenidas". Un autre chant est entamé, un chant de transition.

Bienvenidas abuelitas, caras piedras de mi corazón. Entran con el corazón rojito ... Cantando esta cancion de amor.

Deuxième session. Je prends une profonde inspiration, les chants reprennent, la chaleur est de plus en plus écrasante. Je sens toute l'eau de mon corps dégouliner sur ma peau, et mon visage brûler, mais la mélodie me porte, les notes me transpercent. Mon coeur bat la chamade, je suis presque en transe, avec tous ces gens autour de moi. Venue de julle part, je me prends de l'eau dans la figure, c'est bien venu. La porte s'ouvre, les abuelitas rentrent - bienvenidas. Je sors pour boire, prendre le frais, en espérant ne pas attraper la crève. Beaucoup d'autres personnes doivent faire la même chose. Mais au final, la chaleur réconfortante de la tente, c'est le mieux. La pluie semble arriver, le tonnerre gronde. Troisième session. Chants, tambours, chaleur. Je me consume. Certains s'arrêtent là, je veux aller jusqu'au bout. Quatrième session, comme les quatre éléments, le dernier est le feu. On a un peu plus de place, on peut s'allonger, vidés mais détendus, à la toute fin, tandis que nos corps reviennent à température normale et que la pluie tombe sur la tente. Il y a bien quelques insectes, que je n'écrase pas, ça la foutrait mal. Je suis dans un état second, encore sous le coup de l'expérience que je viens de vivre. C'était fou, c'était incroyable. Et tout ça sans drogues. La pluie fait rage, mais elle peut bien me tremper les os, la boue peut bien salir ma peau, après tout c'est le monde qui nous donne vie tous les jours. Cette nature que nous rejetons et pourtant sans laquelle nous ne serions rien. La boue, ce n'est que la terre nourricière, après tout.

J'ai essayé d'être discrète pour être la plus respectueuse possible. 

Quand je vais payer, Gustavo me redonne du tabac "à mettre dans mon porte monnaie". Ah, euh, ok. Je plains les gens à qui je vais donner mes sous qui puent. Je fais aussi attention à bien me sécher, car c'est un coup à choper la crève. Mes chaussures sont trempées bien que les gens aient mis une bâche pour protéger les affaires. Mais ce n'est pas bien grave. Je ne sais plus trop où j'habite et j'ai un peu la tête qui tourne. Mais c'est aussi probablement l'hypoglycémie, il est quand même 14h30.

En redescendant de la montagne, prudemment car ça glisse, je décide d'aller au parc de l'Arcotete. Bon, il pleut toujours, mais si je n'y vais pas maintenant je n'irai jamais. Comme il est un peu tard et que je ne veux pas traverser la ville pour prendre un colectivo, je prends un taxi. Les routes sont mauvaises, ça secoue et je me sens un peu nauséeuse. En arrivant, ça va mieux. L'entrée n'est pas bien chère, et après avoir mangé un sandwich (une torta) je me dirige vers l'Arco de Piedra qui est l'emblème du site. Il pluviote mais ça va. Il y a des gens qui font de la tyrolienne (qui n'a pas l'air de faire bien peur) et d'autres qui font de l'escalade libre. Il y a aussi des grottes à visiter. Bon, elles n'ont rien d'extraordinaire, certes, mais c'est toujours rigolo de voir des formes dans la pierre. On peut s'y promener en passant à travers de petits conduits, il ne faut pas être obèse. Mais ça on le sait de suite en passant la petite porte.

Pour franchir le Rio Arcotete, il y a des ponts suspendus en bois, qui bougent quand on passe dessus, et ça aussi c'est toujours fun. Bon, et bien ce fut rapide, j'aurais bien aimé revenir à pied à San Cristóbal mais comme il fait moche et que quand même, il faut se ménager après un temazcal, on va opter pour le colectivo. De retour en ville, je vais booker mon tour pour le canyon demain, puis je retourne à l'hostel. Je vais faire ma prise de sang demain, et ce soir il n'y a pas beaucoup d'ambiance vu que tout le monde est crevé, donc zéro alcool. Ça fait du bien de temps en temps. J'ai changé de dortoir, je suis dans "le placard sous l'escalier", il n'y a pas de fenêtres, que des gars, et il pue l'humidité. C'est un peu mieux quand on laisse ouvert. Mais au moins il y a Gustavo, un Brésilien trop sympa (alors tout le monde ne s'appelle pas Gustavo non), et un Anglais que je ne comprends pas quand il parle. Je redoute un peu d'aller dormir, ça ne me fait pas très envie, donc je traîne en salle ciné pour regarder des séries. Un autre gars me rejoint, on veut mettre la saison 5 de la Casa de Papel mais on se fait virer car "il est trop tard, la salle est fermée", sauf que 10 minutes plus tard les volontaires s'y calent pour se matter un film d'horreur. Pas cool. En plus la musique va me réveiller en pleine nuit, n'importe quoi.

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Pourquoi les crocodiles ressemblent autant à des bouts de bois. 

Réveillée tôt pour aller faire ma prise de sang, à jeun, alors que je crève la dalle. Vite, qu'on en finisse, et que je puisse manger mes crêpes. Au labo, la dame me montre que tout est bien stérile, et oui, tout l'est bien. En fait, c'est rassurant. J'ai un peu la tête qui tourne, mais pas assez pour faire un malaise.

De retour, je profite de mon petit dej, enfin presque.. Le guide pour le Cañon del Sumidero arrive à 8h45 au lieu de 9h. Je ne suis pas prête ! J'ai même pas pu aller aux toilettes ! Heureusement la fille de la réception lui dit de revenir plus tard. Ça a l'air de le faire chier, mais hé, 9h c'est pas 8h45, surtout que ça prend du temps pour être servi. J'engloutis donc les bonnes crêpes, me prépare en vitesse, et j'en ai tout juste le temps d'ailleurs qu'il est déjà revenu. C'est un peu nul car au final on tourne et retourne pour aller chercher les gens, on repasse devant l'hostel, il aurait pu me laisser plus de temps. Il s'appelle Alejandro et quand je lui demande si on peut aller aux toilettes avant notre premier stop, il dit non. J'aurais jamais dû prendre du café. En plus la route secoue un peu, mais bon, ça va passer. Nous nous dirigeons vers Tuxtla Gutiérrez, et mauvaise nouvelle, tout est embrumé. C'est pas bon signe. Finalement, on peut quand même faire un stop pipi ... Attendez, je suis qu'avec des vieux mexicains, heureusement qu'on s'arrête.

Après un trajet qui semble bien long, nous arrivons au premier mirador, La Coyota, et suspense, suspense ... Ah ça va en fait, c'est assez dégagé ! On peut voir le Rio Grijalva 1000 mètres plus bas. Ce n'est qu'un petit stop photo, on repart assez vite pour le second mirador, nommé Los Chiapa. C'est l'ethnie qui a donné le nom à l'état qui vivait ici, leur nom voulant dire "ceux qui vivent sur la montagne qui est sur l'eau en dessous" (ouais en VO c'est "los que viven en el cierro que está sobre el agua de abajo"). Ils se sont retirés dans le Canyon del Sumidero pour échapper aux Espagnols pendant la conquête.

Je commence à avoir faim, on n'a pas du tout mangé. Encore un long temps de transport plus tard, nous arrivons à l'endroit où nous allons prendre le bateau, pour descendre dans tout le canyon pendant deux heures. Mais comme on va apprécier la vue au dessus de nous ... Le bateau n'a pas de toit. Il est midi. On est en plein cagnard. J'ai mis un pansement pour protéger ma piqûre sur ma joue qui fait une cloque, aussi pour la cacher car elle est dégueulasse, mais je suis obligée de l'enlever sinon je vais bronzer avec la marque d'un petit carré sur le visage et j'aurai l'air con. Je n'ai même pas prévu de crème ... Heureusement, un gars m'en donne un peu. Je prends aussi des cacahuètes pour tenir encore jusqu'au repas.

Et c'est parti, nous pouvons admirer une presse hydraulique. Puis nous pénétrons dans le canyon, qui est certes impressionnant mais assez sale. Ils essayent de le nettoyer, mais ces derniers temps il a trop plu et il y a plein de plastiques à la dérive dans l'eau. Nous pouvons admirer des cascades, dont celle de l'Arbol de Navidad qui est magnifique, nommée comme cela à cause des formations rocheuses vertes qui rappellent un sapin. Nous passons juste en dessous, pour nous faire mouiller, je protège le Reflex juste à temps. Mais avec la chaleur, ça fait du bien ...

Nous continuons notre petit tour à la Cueva de Colores, bon, rien de bien extraordinaire. Nous pouvons voir aussi pas mal d'oiseaux, des aigrettes et des pélicans. Les parois rocheuses qui s'élèvent à 1 200 mètres au dessus de nos têtes sont impressionnantes, et finalement le cagnard est supportable. Surtout quand on va vite. Dès qu'on s'arrête, c'est infernal.

Et puis, on entre dans la "zona de cocodrilos", enfin, je n'en ai pas vu à Bacalar et ça va être l'occasion ! Après avoir vu 40 bouts de bois et les avoir pris pour des crocodiles, l'attente est terminée. Surtout qu'ils sont assez pépères, sur leur petite plage privée, ils ouvrent grand leur bouche, on dirait moins des branches. C'est rigolo en tout cas. Et celui qui est aussi rigolo, c'est Pancho. C'est un singe araignée très curieux que l'un des guides attire avec un appeau. Il ouvre ses grands yeux ronds pour nous regarder passer et se faire photographier tel un acteur sur un tapis rouge. En comparant les photos prises à d'autres moments, il semble tout le temps être là. En plus il a un petit collier. Mais bon, il est mignon et rigolo, il fait bien son job.

Enfin, nous terminons notre trajet, qui finalement n'était pas si mal que ça, à Chiapa de Corzo. C'est un village touristique, un autre pueblo magico. On peut y faire un tour assez rapide dans les rues, il fait très beau temps, peut être même un peu chaud. Je vais enfin manger, dans un restaurant typique avec de la musique, j'essaye une Pepita con Tasajo. Le gars me dit que c'est de la viande de boeuf dans de la sauce à la fleur de courge. En tout cas c'est ce que j'ai compris, mais au goût, surprise, on dirait de la joue. Pourtant même en vérifiant il y a bien marqué "viande de boeuf salée". En soi, j'ai voulu faire typique, c'est pas terrible. Et en plus une petite fille, bien que mignonne comme tout, vient me harceler pour vendre des trucs. J'achète toujours pas aux enfants, la pire c'était celle de 3 ou 4 ans. Je suis obligée d'être ferme, puis de l'ignorer, ça me fend le coeur car elle a l'âge de mes patientes mais je n'ai pas trop le choix non plus. Une fois le repas terminé, c'est déjà l'heure de repartir. Et bien ça ne m'aura pas laissé un souvenir impérissable non plus.

Sur la photo 1, ce n'est PAS Chiapa, heureusement. C'est un quartier très moche de Tuxtla. 

À mon retour, il y a toujours les mêmes personnes dans le patio, ça me crée un vrai sentiment de famille, de rentrer à la maison. J'ai beau critiquer cet hostel, le fait que les gens y restent longtemps, les repas ensemble etc, ça crée vraiment cette sensation. Bon, même si les Caennaises m'ont un peu soulée en me disant "c'est pas un vrai temazcal que t'as fait, c'était juste pour la thune", gnagnagna, tu n'étais même pas là, tu n'en sais rien. J'ai pas critiqué votre rave de merde, là. Je ne l'ai vraiment pas bien pris, ça me met de mauvaise humeur, j'ai besoin d'aller m'isoler un peu. Mais je finis pour revenir au bar pour goûter une ... immondice. Une Michelada. Ça avait l'air sympa comme ça, autour de certaines il y a des bonbons, je pensais que c'était juste un cocktail à la bière sucré et épicé. Et non, que nenni. Il y a aussi du jus de tomate et de la sauce huître. Non non c'est pas une blague. Mon expression change au fur et à mesure que je le vois préparer le fameux cocktail, l'effroi doit se lire dans mes yeux. Mais peut-être que c'est pas si mauv .. Ah si putain! J'ai presque recraché ! Heureusement, l'autre serveur du bar m'aime bien depuis le karaoké, il ne me le fait pas payer et le boit à ma place. Je prends un cocktail plus classique, mais comment font-ils pour boire ces trucs à longueur de journée ? Vraiment, ces gens ne sont pas comme nous.

L'ambiance est moyenne ce soir. J'ai des sentiments vraiment partagés quant à mon départ demain, je me sens complètement perdue dans mon ressenti. J'ai envie de me casser, mais en même temps envie de rester. J'ai aussi un peu peur de ce que je pourrais faire ici, je sens que ça pourrait être dangereux pour moi, trop de tentations, trop de stimulations. Cette ville a vraiment un effet bizarre sur moi, et je crains que ça ne tourne à la mauvaise influence. Il y a pourtant encore tant à découvrir, toute cette spiritualité est incroyable, la vie culturelle est épanouie, c'est vrai qu'on pourrait y rester bien longtemps. Mais en même temps il pleut tout le temps, il fait froid, mon dortoir pue. San Cristóbal, c'est un très beau piège doré, un magnifique traquenard où la drogue se vend au coin de la rue, mais un endroit beaucoup trop fascinant pour me laisser insensible. J'ai l'impression que ça pourrait m'épuiser. Finalement, le temps m'étant compté avant mon retour, c'est le planning qui va trancher à ma place.

14
sept

Douze heures quarante de bus. C'est plus que la durée de mon vol ! Du coup, j'ai préféré prendre le bus de jour pour regarder le paysage, et c'est un bus OCC de première classe, bien confortable, avec des chargeurs et la télé. C'est étrange de quitter San Cris mais comme je l'ai dit, il le faut. En plus, Oaxaca (wah ra ca) c'est sympa, paraît-il. J'espère. J'ai peur qu'il ne s'y passe rien car les mesures covid y sont restrictives, bien que ça se soit un peu allégé depuis une semaine. Ouf ! Je me dis qu'il va falloir que je rencontre de nouvelles personnes aussi, et cette perspective me fatigue déjà. Bon de toute manière, ça n'arrivera pas ce soir vu que j'arrive à minuit et quelques.

Contrairement à ce que je pensais, je n'ai pas mal vécu ce si long trajet. De la place pour étendre les jambes, des toilettes dans le bus, une série avec des acteurs américains, allemands, anglais et Marc Lavoine (Crossing Lines, ça s'appelle), des burgers juteux, et un état second. Je regarde le paysage, principalement. Nous quittons la cuvette dans laquelle se trouve San Cristóbal pour arriver dans la vallée de Tuxtla Gutiérrez, puis une belle petite route de montagne avec beaucoup de virages. Je n'ai pas compté le nombre de fois où nous nous sommes faits arrêter par les flics ou les paramilitaires, mais j'ai eu un peu peur pour mes affaires à un moment donné. Au final, tout va bien. Après notre entrée dans l'état de Oaxaca, nous traversons une grande vallée avec plein d'éoliennes. La petite ville dortoir, La Ventosa, est bien nommée. Effectivement, on peut entendre le bruit de sacrées bourrasques, et il se met à pleuvoir. Quel endroit moche, tout de même. Je commence à m'inquiéter un peu car pour une fois, les vendeurs ambulants qui montent dans le bus ne sont plus là, et je n'ai rien à manger pour ce soir. Et ce n'est certainement pas en arrivant que je vais trouver des trucs ouverts. Nous traversons à nouveau des montagnes, et la nuit tombe, on ne voit plus rien, juste les virages et quelques cactus. Encore 4 heures et demie ... Je branche ma tablette et commence à retoucher mes photos quand nous nous faisons arrêter une énième fois et les flics font carrément descendre des gens pour un contrôle, dont le mec à côté de moi. J'essaye de me faire oublier. Au final nous repartons sans encombres, et vers 22 heures nous nous arrêtons dans un resto routier en plein milieu de nulle part. Comment ai-je pu croire que les Mexicains allaient nous laisser mourir de faim ? Je prends une torta avec du jambon dedans, c'est trop bon et réconfortant. Nous repartons pour les derniers kilomètres qui nous séparent d'Oaxaca. Je repère un insecte qui se promène près de mon bras, et au lieu de l'écraser, je le balance sur le gars derrière moi. Je critique, mais si il faut c'est moi qui les ramène dans mes bagages, ces insectes. Et finalement, délivrance ! Je prends un taxi car quand même, c'est pas terrible de se promener seule dans des rues désertes avec un backpack, en plus je ne suis pas sûre que la réception soit encore ouverte, j'ai envoyé un message mais bon. En fait, si. Soulagement : mon hostel, Casa Angel, est super propre. Le lit, très confortable. Je vais rester là, je n'avais pris que deux nuits au cas où. Je trifouille mon sac en dehors du dortoir pour ne réveiller personne, et vais prendre ma douche, ça fait sacrément du bien.

Je ne me sens pas très en forme quand même. Je prévoyais de faire le walking tour de 10 heures, mais je me sens un peu fiévreuse et fatiguée, je vais donc d'abord m'occuper de ma lessive car c'est une sacrée infection ! Mon sac pue, donc il serait temps de s'en occuper. Et ceci fait, le petit dej pris, je me repose jusqu'à midi. Je peux faire le walking tour de l'hostel aussi, ça me permettrait de rencontrer des gens. Il est à 16 heures, ça me laisse le temps de faire des choses, quand même. Il fait très beau, très bon, 28 degrés. Ça change ! C'est un temps parfait. Je pense pouvoir aller aux ruines de Monte Alban en colectivo, mais c'est plus compliqué que prévu, il faut prendre un bus exprès, et il y a des heures spécifiques. Bon, et bien on verra demain, de toute manière il fait peut être un peu trop soleil pour la visite sans ombre. Je suis à côté du Mercado del 20 de Noviembre que m'avait conseillé Joyce pour la bouffe, et bien, allons-y. Je teste un tamale, du poulet et des frijoles dans une feuille de bananier. C'est bon mais trop gros et trop écœurant, en plus j'ai pris du riz, mais je complète avec un délicieux chocolat, vraiment vraiment très bon ! Préparé par de petites mamies. Bon, vraiment, la bouffe Mexicaine c'est pas trop ça quand même. Toujours fatiguée, je me balade un peu dans les rues. Je trouve ça très mignon comme ville, moins tape à l'œil que San Cristóbal. Et puis on circule plus facilement sur les trottoirs. Ça fait plus ville pour vivre que ville d'exposition. Il y a aussi beaucoup de street art politique. Joyce m'avait parlé du musée Francisco Toledo, l'artiste muje, mais je n'arrive pas à le trouver. Je vais dans une galerie, en rénovation, et les gars me donnent l'adresse d'une expo pour vendredi. Bon, alors, que faire de mon temps ? Ah, je sais, les cactus! Mais le jardin n'ouvre que le matin à certains horaires à cause du covid. Décidément ... C'est dur de faire des choses par ici ! Même le walking tour en fait ... Il aurait fallu que je m'inscrive et il n'y a personne d'autre. Heureusement j'ai un plan B pour dans une heure, et il va bien avoir lieu.

C'est donc au théâtre Macedonio Alcala que je retrouve le groupe, mené par Raul. Il nous explique que ce bâtiment était auparavant un casino, ce qui n'avait pas plu au peuple qui était pauvre et n'en avait pas besoin, il n'était que pour les riches. En fait il n'est resté que trois ans un casino, car ensuite il y a eu la Révolution. Macedonio Alcala est un fameux musicien d'Oaxaca, compositeur et violoniste.

Nous évoquons la Révolution Mexicaine, à ne pas confondre avec la guerre d'indépendance qui est célébrée aujourd'hui, le 15 septembre. Porfirio Diaz, général de l'armée Mexicaine puis président pendant 33 ans, gouverne le pays de manière dictatoriale. Il était populaire car il avait gagné la bataille contre les Français qui, sous Napoléon III, voulaient alors intervenir au Mexique pour instaurer un régime politique qui servait leurs intérêts. Il change même son anniversaire pour matcher le jour de l'indépendance ... C'est Madero qui lance l'appel à la révolte en 1910. Le fameux Zapata rejoint le mouvement, protestant surtout contre l'accaparation des terres agricoles par les riches, et mène les guérilleros dans l'état de Morelos. Madero devient président mais cela entraîne beaucoup de désillusions et il est assassiné en 1913. Lui succèdent d'autres généraux qui prennent à chaque fois le pouvoir par coup d'Etat: Huerta, Carranza et Obregon. L'ironie c'est que Porfirio Diaz s'est exilé en France, il est mort à Paris et enterré à Montparnasse.

Oaxaca est considérée comme la capitale du mezcal. Elle regroupe pas moins de 65 cultures, majoritairement zapotèques, nomades ensuite sédentarisés depuis 8000 ans. Conquis par les mixtèques, ils se sont ensuite à nouveau dispersés, ce qui semble être toujours le cas aujourd'hui.

Nous visitons le temple Santo Domingo de Guzman, très belle église dans laquelle il y en a pour 5 millions de pesos d'or. Elle a mis 200 ans à être construite, à cause des tremblements de terre qui arrivent régulièrement dans la région. Le plus fort jamais enregistré avait une magnitude de 8.2.

Nous continuons notre balade dans le quartier proche de mon hostel, Raul nous donne quelques bonnes adresses. Notamment une boutique où ils vendent du chocolat, et nous faisons une dégustation de fèves de cacao, ainsi que d'échantillons des tablettes qui sont vendues. Trop chouette ! Raul explique le processus de création du chocolat, c'est l'occasion de faire le lien entre ce que j'ai appris à Berne.

Puis nous entrons dans une galerie d'art. Raul nous raconte qu'en 2006 les enseignants se sont révoltés pour protester contre les conditions scolaires, la vétusté des écoles notamment. 5 000 personnes se sont rassemblées, et le gouverneur de Oaxaca a envoyé les flics leur taper dessus, 28 personnes sont mortes. On n'en parlait pas dans les médias, contrôlés par le pouvoir en place, et le président de l'époque Vicente Fox a soutenj le gouverneur. Donc, le peuple de Oaxaca a fait le blocus de l'état pendant 6 mois. Ça a été très dur pour les citadins car il y avait moins à manger, tandis que dans les campagnes ils produisaient leur nourriture. Le gouverneur finit par démissionner, mais un mois avant la fin de son mandat. Oaxaca est une ville très politisée, on peut s'en rendre compte avec le street art omniprésent.

Nous passons maintenant dans le quartier de Xochimilco, nommé comme celui de Mexico car les gens qui l'ont fondé ont émigré de là-bas. Il y a un aqueduc, en dessous duquel des boutiques et des maisons sont construites. La rue pavée est très jolie, les couleurs des maisons sont intenses, on y tourne des films. D'ailleurs en parlant de couleurs ... Les gens ne peignent pas leur maison comme ils le souhaitent. Chaque année on leur propose un nouveau set de couleurs, défini à l'avance. S'ils ne l'acceptent pas et font ce qu'ils veulent, ils peuvent encourir de trois mois à trois ans de prison ! Ça rigole pas.

Le tour se termine, je rentre car c'est BBQ night à l'hostel. Je fais connaissance avec plein de gens, notamment Thomas de Belgique, qui va ensuite rejoindre sa copine à Philadelphie, Maddie l'Anglaise et son groupe de potes qui sont bien plus intéressés par les deux Danoises blondes qu'autre chose, et beaucoup d'autres gens dont je n'ai pas forcément retenu le nom. Il y a une dégustation de mezcal à 9 heures, c'est l'occasion de goûter du Espalin et du Tobala, qui ont une bonne saveur fumée comme je l'attendais du mezcal. Puis, nous sortons sur le Zócalo pour assister au Grito de Dolores, un discours prononcé par le gouverneur de Oaxaca pour célébrer l'indépendance. Il cite notamment des héros de guerre comme Hidalgo, Vicente Guerrero, d'autres, et termine par Viva la Revolución! Viva México! Les gens reprennent ce cri en coeur, avant le feu d'artifice.

Nous allons dans un premier club recommandé par un gars de l'auberge, enfin, peut être ... C'est un peu glauque, la musique est nulle, mais l'un des gars du groupe nous offre un seau de bières, alors, d'accord. Je cherche un plan B avec les autres français de San Cristobal qui sortent aussi, et propose à Thomas de l'embarquer avec moi. Mais les autres ont finalement la même idée que nous, fuir cette ambiance cringe. Nous essayons donc le bar qu'on m'a conseillé, mais nous sommes 15 et c'est limité à 50 personnes, c'est un peu tendu. On essaye un autre endroit ... Raté, c'est un resto en rooftop. Mais juste en face, il y a un club nommé le Fandango, ce que je fais remarquer, la musique a l'air sympa. Bon, on va tenter, car là ça commence à devenir chiant ces échecs ... Les Danoises partent en éclaireuses, bingo, ça passe. On commence à danser, puis on trouve la salle où il y a le plus d'ambiance. Il y a un jeune qui resemble à Bilal Hassani qui vient danser avec nous, on s'éclate, il est super cool. Il me semble que c'est un club LGBT+ friendly, parce que ce n'est pas le seul petit muje du coin. C'était donc ça, j'ai dû sentir les arcs-en-ciel. Franchement, très bonne soirée, ça fait trop du bien de sortir et de danser, et de s'éclater. On part vers 3 heures du matin environ, je serais bien restée mais je me sens plus safe si les gens de mon hostel sont là.

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Le réveil n'est pas trop difficile, mais quand même il ne faudrait pas trop abuser. Je me réveille vers 8 heures mais n'émerge que vers 10 heures, le temps de déjeuner et hop, je suis motivée pour les ruines de Monte Alban. Il fait un peu gris, mais pas pluvieux, c'est un temps parfait pour ne pas décéder. Il y a une superbe vue sur les trois vallées depuis la colline, qui se nomme ainsi car en saison, elle se couvre de blanc de par les fleurs des arbres.

On trouve l'Etla au nord, la Zimatlan au sud et celle de Tlacolula à l'est. La cité est à 1 900m d'altitude. Les habitants ont dû modifier le paysage, pour l'agriculture et les habitations, tout en essayant de respecter la topographie des lieux. Ils avaient des plantes médicinales comme de l'arnica, des fruits, des insectes comestibles comme des chapulines (les grillons) mais aussi des vers et des abeilles, et d'autres animaux comme des lapins et des tatous.

A Monte Alban, il y a des stèles qui servent pour l'astronomie, surtout pour marquer midi car il n'y a alors pas d'ombre. Elles sont appelées Nahuitji Copijcha en zapotèque, "soleil au dessus ou au centre", qui a la même traduction que méridien en latin. Au moment du solstice d'hiver l'ombre était à son maximum en direction du nord.

Une des particularités de Monte Alban, ce qui fait son originalité, ce sont les "danseurs", des pierres gravées à l'effigie d'hommes nus et obèses, avec des nez épatés et des lèvres charnues, ce qui suggère une influence olmèque. Apparemment ils représenteraient des dirigeants d'autres cités ennemies de Monte Alban qui auraient été capturés et sacrifiés. On trouve le symbolisme de la castration et du don de sang pour les Dieux.

C'est un peu différent de ce que j'ai vu jusqu'à maintenant. Je grimpe des marches comme je peux, j'ai l'impression qu'elles sont encore pires que chez les Mayas ... Arrivée en haut je m'asseois et soudain, Cristian, le Nicaraguayen! Quelle coïncidence ! Je suis super contente de le voir. Encore plus de savoir qu'il a le même ressenti que moi vis à vis de San Cristobal, et de cette rave à la con à laquelle il s'est fait chier parce qu'il n'aime ni la techno ni la drogue. En fait, il habite à Miami, il me dit que c'est une ville très superficielle et qu'il aimerait se barrer, mais bon c'est là où il a grandi, donc ... Et du coup on échange nos instas et je suis invitée à Miami quand ça rouvrira. Et ben, j'ai tout gagné ! Il est avec un tour organisé, et moi je dois finir ma visite avant que le bus n'arrive, et je commence à avoir bien mal aux genoux. On se recroise, on continue à papoter, il est vraiment cool, on a de quoi bien s'entendre. Dommage il part demain et moi je suis trop crevée pour faire un truc ce soir.

En redescendant, je m'enfile une petite torta, et repos. Et grande nouvelle: ma liseuse est revenue d'entre les morts ! C'est incroyable ! Il suffisait de la recharger maintenant qu'elle était sèche. Elle est comme neuve, je suis tellement contente, j'ai bien fait d'y croire. Merci, le riz à 100 pesos pour ce miracle. Puis vers 17 heures je vais au marché de La Cosecha, un marché bio. Il faut que je mange un chile en nogada aujourd'hui, jour férié. Ils ne sont servis qu'en septembre, pour l'indépendance. Mais là, il n'y en a pas. Je continue à me balader un peu dans la ville, et je trouve un endroit où manger le fameux dessert. C'est ... spécial. C'est pas mauvais, mais je ne peux pas dire que ce soit bon non plus, comme d'hab c'est écœurant. C'est quand même un poivron avec de la noix dedans. Je repense à l'histoire que m'a racontée Joyce, Agustin de Iturdibe qui venait de remporter la guerre d'indépendance, à Puebla. Il vient manger dans un couvent avec son armée, ils finissent toute la nourriture et réclament du dessert, les nonnes affolées font la seule chose qui reste, des poivrons, de la noix, des pommes, et rajoutent des grenades pour faire du vert, du blanc et du rouge, comle l'uniforme du général. Il me faut au moins ça pour finir ce poivron à la con qui coûte 250 pesos. Au moins, ça, c'est fait.

Je fais un peu de shopping, vais manger des ramens décevantes et je monte ensuite sur le rooftop pour danser la salsa. C'est rigolo mais je tombe avev les Anglais en chien sur les Danoises. J'espère qu'ils vont finir par les choper, qu'on en finisse. Du coup c'est comme si je n'étais pas là, mais je ne m'en sors pas trop mal sur les pas, alors qu'eux sont raides comme des piquets. Je finis la soirée en regardant Netflix, pas facile de s'intégrer ce soir. Ça arrive.

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Aujourd'hui, ça sera tout d'abord visite de Teotitlan Del Valle, un village proche de Oaxaca connu pour son artisanat. Par contre, la journée ne commence pas très bien, j'apprends la mort d'un collègue, pas du tout de notre service, certes, mais un collègue tout de même. Sous le choc, je me mets à pleurer, et l'un des gars du dortoir essaye de me réconforter. Heureusement, dans ces cas là, la tristesse ne dure pas toute la journée. J'ai juste besoin de digérer la nouvelle.

Je pars donc à pied pour l'endroit où il faut prendre les bus pour Tlacolula ou Mitla, je parviens à en trouver un qui va me laisser au bord de la route. Nous traversons la vallée, un peu nuageuse, mais tout de même appréciable. Je me rends compte que le village est à 4 kilomètres de là où il va me laisser, je ne suis pas assez en forme pour marcher une heure, surtout que le temps est lourd. Mais je sais que je vais arriver à me débrouiller, que les choses vont bien se passer. Effectivement, au crucero, soit à la sortie de la route, il y a un taxi collectif qui m'emmène au village pour 8 pesos.

Alors soit je ne suis pas venue au bon moment soit ... Je sais pas en fait, je m'attendais à un grand marché artisanal sur une place, mais en fait il y a surtout des boutiques et quelques stands sauf que la moitié sont fermés. Certes, les tapis sont jolis, mais on les trouve ailleurs, et je ne sais pas, je pensais qu'on verrait plein de gens à l'ouvrage, en train de tisser sous nos yeux. Et bien non. C'est un peu mort. Je vais voir l'église, faire le tour des quelques pâtés de maison, mais rien de bien folichon, même pas d'ateliers proposés pour apprendre à tisser. Une demi heure sur place, et c'est plié. Il y a un petit musée, mais la flemme.

Je prends cette fois ci un tuktuk pour revenir au crucero, même si on est plusieurs ça me coûte un peu plus cher que le taxi ! Mais bon, pas grave. Au bord de la route, il y a des mezcalerias, des mecs un peu chauds me demandent si je veux faire une dégustation, mais je suis plus intéressée par le bus pour Mitla. Ils me disent que prendre un taxi collectif n'est pas plus cher. En attendant, je vais prendre une nieves oaxaqueña, une glace locale, aux pétales de rose. C'est super bon. Finalement c'est un taxi qui arrive en premier, et je saute dedans. Le chauffeur parle anglais, il veut pratiquer un peu avec moi, bien qu'il ait vécu à Los Angeles pendant une bonne partie de sa vie, ça doit lui manquer. Il me raconte son histoire: il sait parler anglais, mais ne sait ni lire ni écrire car à 6 ans sa mère est morte et son père l'a vendu à une boutique pour qu'il y travaille. Il en a fugué à 11 ans, il a survécu dans la rue, puis il a émigré aux USA. Il a appris tout seul à conduire une voiture puis il est devenu chauffeur routier. Il a réussi à tracer sa route, sans mauvais jeu de mots. C'est dingue comme histoire, je suis touchée, pourtant avec mon travail ce genre d'histoires ne devrait pas m'étonner.

Avant d'entrer dans le village de Mitla, nous devons descendre du taxi car la mairie a installé un stand de désinfection, ils passent les sièges au produit sanitaire et nos mains à la solution hydroalcoolique. Il me laisse sur la place principale, c'est une petite marche de 20 minutes jusqu'aux ruines. Mitla est beaucoup plus sympa que Teotitlan ! Il y a même plus de boutiques, on dirait. Mais toujours les mêmes choses, évidemment. À l'entrée de la zone archéologique, bonne surprise : il y a des cactus ! Plutôt sympa, ça fait très ambiance mexicaine clichée. En soi, le site est pas mal, avec de jolies gravures, mais un peu cher pour son prix qui est de 80 pesos, le même que Palenque. Mais c'est un site zapotèque, et les zapotèques sont cools. Bon, aussi mixtèque, qui les ont conquis par la suite.

L'originalité, c'est l'église construite sur les ruines. C'est le tempke catholique de San Pablo, qui date du 17e siècle, et c'était pratique courante à l'époque d'utiliser les fondations des anciennes villes, histoire de bien les écraser. Ces réutilisations prennent fin avec la loi de nationalisation des biens ecclésiastiques, sous Benito Juárez en 1859. Le Salon des Colonnes, plutôt bien conservé, avait un but político-administratif, peut être religieux.

Bien que le village soit sympa, on en fait aussi vite le tour, et je me dirige vers l'arrêt de bus quand une mezcaleria attire mon attention. Oh et après tout, pourquoi pas ? Je vaks goûter deux tyoes de mezcal différents, au cas où je voudrais prendre autre chose que du Tobala, mais surprise, j'ai pris du Tobala. Ces deux shots à jeun m'ont bien détendue. Malheureusement, il se met à pleuvoir, mais j'arrive vite à l'arrêt pour me mettre à l'abri. Mais la pluie reprend de plus belle une fois montée dans le bus. Vraiment, vraiment très fort, on ne voit plus rien, comme d'habitude la ville est à moitié inondée mais là l'eau monte jusqu'au trottoir quand même ! Le chauffeur ne semble pas paniqué pour autant, et le bus prend une allure de bateau dans la tempête. Nous nous en sortons, je n'aurais pas cru.

De retour sur Oaxaca, j'ai le plaisir d'assister à un mariage avec des mariachis qui mènent le cortège. Mariage pluvieux ... Il est 5 heures de l'après midi mais j'en profite pour aller au restaurant italien, des pâtes ça fait du bien ... Et pile pour 18 heures, je me rends à l'exposition sur Francisco Toledo, le peintre muje. Bon, en fait, c'est pas mal mais je ne me connecte pas plus que ça à son travail. Cette série porte sur les fables d'Esope.

Je rejoins l'hostel, monte sur le rooftop, et je joue à un jeu de cartes avec des gens très cools: Fabrice, Samuel, Zoé, Nils et Paul. Je les suis ensuite au restaurant et même si j'ai mangé il y a peu, je ne vais pas passer à côté de l'occasion de manger un pozole, une soupe de poulet épicée et de, oh, de maïs, surprise. C'est pas trop mal, mais comme d'habitude, quoi. Nous partons ensuite vers un salsa bar, le Txalaparta, qui a un rooftop. Il pluviotte, mais ce n'est pas grave. On s'amuse, on est trempés mais hé, on est là, on est heureux, on est en voyage. On se sent libres. C'est peut être ma dernière soirée comme ça avant bien longtemps. Il y a encore plein de gays, dont un qui s'appelle Miguel et qui me kiffe car je suis française. On est potes, maintenant, s'il vient en France on se captera peut être. La salsa c'est bien, mais ce n'est pas mon genre préféré, je pars vers 1h30. En plus au bout d'un moment, la pluie, hein, je vais choper la crève. Mais sur le retour je m'arrête un peu pour écouter le concert live de rock juste à côté de l'hostel.

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La journée du retard (partie 1)

Outch, j'ai mal aux jambes et aux genoux. Je me réveille tôt, mais me laisse du temps pour émerger, sauf que je me mets à la bourre. Je veux aller au Jardin Ethnobotanique où on peut voir plein de cactus, et ça tombe bien il y a un tour en français une fois par semaine et c'est maintenant, sauf qu'à cause du covid c'est limité à 15 personnes. Je mange en vitesse, tout ça pour qu'en arrivant on me dise qu'il fallait venir 30 minutes en avance. Ah ben merci, donc c'est mort. Il est 10 heures et il y a déjà des gens qui attendent pour midi en espagnol. Je retourne à l'hostel, je reviens vers 11h30, j'essaye de gruger, je rentee dans le bâtiment, mais je me fais griller. Tant pis, j'aurais essayé ! Je suis un peu blasée mais soit, c'est pas si grave.

Je rejoins le groupe pour aller manger dans un café en rooftop, avec une belle vue sur Oaxaca, plutôt cool avant de partir. Mais le temps qu'on nous serve, je dois les quitter juste après avoir terminé mon repas, je suis assez triste. Le backpack sur le dos, je marche une vingtaine de minutes jusqu'à l'autre terminal, découvrant un autre quartier de la ville. Mais en y arrivant, oups, ce n'est pas là que sont les guichets de la compagnie AU. Il y a une autre compagnie mais le bus met 30 minutes de plus et j'aimerais arriver à Puebla avant 20h30 pour voir le sons et lumières sur la cathédrale. En plus je ne comprends pas où ils doivent me laisser. Je laisse tomber, sauf qu'il est 14h15 et le bus AU part à 14h20, de pas loin, mais le temps de s'y rendre ... Heureusement il passe par un autre terminal. Donc, je prends un taxi pour aller à celui de Santa Rosa, à la sortie de la ville, et arrive 15 minutes avant lui. Ouf ! To be continued ...

18
sept

Enfin dans le bus, c'est un peu difficile encore de dire au revoir à Oaxaca et à ses petites maisons accrochées aux collines, mais l'au revoir est prolongé puisqu'il y a des bouchons à la sortie de la ville. Et bien, on n'est pas rendus. Un peu plus tard, nous nous faisons évidemment contrôler par les flics, cette fois ci tout le monde doit montrer sa pièce d'identité. Par réflexe je cache mon portable dans ma poche ventrale, mais il ne se passe rien de plus, à part des questions sur combien de temps ça fait que je suis là, quand est ce que je pars ... Mince, s'il me demande le formulaire d'immigration, il est dans mon grand backpack dans le coffre. Mais ça se passe bien. Chanceuse que je suis, la vegetation va encore changer entre Oaxaca et Puebla. Notamment au moment où nous traversons la biosphère Tehuacan-Cuicatlan. J'avais lu quelque part que c'était un endroit où l'on pouvait voir des cactus, et pour l'instant il y en a bien quelques uns mais le plus impressionnant c'est le panorama sur les montagnes. Et puis tout à coup au détour d'un vallon, une première pente est couverte, mais alors vraiment bien couverte de cactus. De longs cactus qui s'étendent comme autant de doigts levés sortis de la terre. Et ça continue sur tous les autres versants ! Il doit bien y en avoir des milliers et des milliers, qui recouvrent les pentes, comme des piques acérées. Je ne sais pas si les photos rendent bien l'effet, mais ça m'impressionne.

Environ une heure avant d'arriver à Puebla, on est plus ou moins dans les temps, je vais pouvoir voir le sons et lumières sur la cathédrale. Il y en a un à 20h30 et l'autre à 21h15 au pire. Nous nous arrêtons sur une aire d'autoroute pour aller aux toilettes, je prends aussi un paquet de chips, mais je me ravise et veux aussi prendre un sandwich ... Mais je vois le chauffeur de bus fermer la porte. Oups. Je laisse mon sandwich sur le comptoir et cours. Ouf, une fois posée sur mon siège, un autre gars a vu la scène et explique au chauffeur, qui me dit d'y retourner et qu'il peut m'attendre. Non maintenant c'est bon, c'est trop tard, j'en veux plus, voilà. Il insiste mais je n'ai pas envie de faire attendre les autres personnes. Je sais que la bouffe c'est sacré chez vous, mais un sandwich jambon fromage, je m'en remettrai.

Nous voici repartis, mais pas pour longtemps ... Il y a un accident sur la route. Allez, c'est mort pour le spectacle. On reste allez, une heure, une heure trente ? C'est moins pire que ce à quoi je m'attendais. Une petite chance d'arriver pour 21h15? Non, même pas. Je suis aussi en retard pour le check in de mon hostel qui se termine à 21 heures. Heureusement, je peux les appeler grâce à mon numéro mexicain pour les prévenir, un gars va m'attendre. Derrière moi aussi, on appelle, il y a une jeune fille qui parle avec un volume sonore encore pire que le mien, et oui ça existe, en plus elle a une voix geingnarde. Allez, prendre son mal en patience, tout ça. Finalement le bus arrive à 22 heures, vers la fin du spectacle probablement, mais il pleut comme vache qui pisse donc peut être qu'il n'a pas eu lieu. Ça m'arrangerait, j'ai pas un très bon karma. Je tente de comprendre comment les bus fonctionnent, mais comme l'hostel m'attend, je dois me résoudre à prendre un taxi. Le ciel se déchaîne encore comme il sait si bien le faire dans ce pays, et à la sortie je me prends une bonne petite douchette. Heureusement le gars qui m'attend est réactif, il était à côté de la porte pour me l'ouvrir. On ne fait pas un vrai check-in mais je peux aller dans mon dortoir quand même, censé fermer à clé mais il manque un carreau donc tout le monde peut y entrer. Et du coup il fait un peu frais et il y a zéro insonorisation. Après, c'est très joli. J' inspecte le matelas, RAS. Il est juste un peu dur, mais ça fera l'affaire.

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Aujourd'hui, walking tour à 11 heures, pour ne pas déroger à la règle. J'ai eu un peu frais dans la nuit, mais ça va. Le petit dej est loin d'être extraordinaire. J'avais lu de mauvais commentaires sur cet hostel mais il me plaisait quand même pas mal comparé aux autres, et il semblerait que presque tous les points aient été améliorés, comme la propreté par exemple. Mais pour ce qui est de l'atmosphère, bof, ça dépend des gens évidemment. Mais ce n'est pas trop agencé pour les rencontres. Et aussi, paraissait-il que le petit dej était cool. Bof bof. Avant de partir, je demande à changer de lit pour avoir celui du bas, c'est mieux quand même. J'embarque mes affaires, et branche mon chargeur sur la nouvelle prise, tandis que je vais finir de me préparer et que la nana change les draps. Je l'aide à balancer la couverture sur le lit du haut car elle est plus petite que moi, elle galère. Puis sur ce, je vais sur le Zócalo.

C'est Omar qui sera notre guide de la matinée, je suis avec un couple d'Espagnols du pays basque, dont l'un est d'origine mexicaine et vient voir sa famille. Bon ben, tour en espagnol, donc! Ça va, Omar ne parle pas trop vite.

Les olmèques sont considérés comme la culture mère, ici plus qu'ailleurs, mais dans cette région c'étaient les Mexicas les leaders, une variante aztèque. J'avais déjà expliqué que Mexica était une vallée, la plus influente, le nom signifie vallée de la lune, donc fils de la lune. Puebla est fondée en 1531, et son invasion commence en 1590. Au départ il y avait un premier Zocalo, mais trop proche du Rio San Francisco, il se faisait inonder et il était infesté de moustiques. Les Espagnols, préférant construire leurs églises et administrations sur une place principale, l'ont donc déplacé à l'endroit où il est aujourd'hui. Puebla, de son nom complet Heroica Ciudad de Puebla, ou Puebla de Zaragoza, est la ville la plus architecturalement parfaite du Mexique. Autrefois nommée la cité blanche, elle est censée être un paradis pour les colons et mêlant des éléments castillans et arabes. . Entre temps elle a pris des couleurs ... Son deuxième nom est Angelopolis, la ville des anges (tiens tiens, encore une) et on en trouve plein de sculptures sur les lampadaires de type français. En langue native, son nom signifie "le lieu où les serpents changent de peau", car c'est le 4e état mexicain à avoir le plus de reptiles.

La Cathédrale est grande, parce qu'elle a été construite au moment où on se demandait si la capitale allait être Puebla ou CDMX. Donc il y avait une sacrée concurrence à ce niveau. En fait, les deux sont assez similaires, construites en pierres volcaniques, deux tours, des dômes, un décoration baroque à l'intérieur mais un style gothique à l'extérieur - ça parle à beaucoup de gens. Celle de Puebla paraît plus imposante mais elle est construite dans le square, avec des rues adjacentes qu'elle semble écraser, alors que celle de CDMX est en plein Zócalo, qui est immense, ça ne fait pas le même effet. Mais celle de Puebla accueille la plus gros cloche d'Amérique latine. On peut y voir trois portes, la plus grande étant la centrale, nommée la Porte du Pardon, celle que l'on doit franchir pour absoudre ses péchés. On dit ici qu'il faut vraiment, vraiment en avoir besoin pour la passer. Normalement, le palais du gouverneur était bâti face aux portes divines, mais ici ce n'est pas le cas, elles donnent sur ... Une taqueria.

Nous allons maintenant entrer dans la Biblioteca Palafoxiana, du nom de l'évêque qui la fit bâtir, Palafox. C'est la première bibliothèque publique du Mexique. Elle contient beaucoup de livres anciens, notamment des Bibles et des ouvrages de théologie dans les bas étages, mais aussi de la science vers le haut. Étonnante conciliation, surtout qu'on y trouve des traités de médecine.

Nous passons dans un petit marché geek, pour qu'Omar nous montre des faïences au mur, et il nous parle de la talavera, la céramique typique de Puebla. Elle est très résistante car faite en pierre volcanique. Classiquement elle est beige, blanche et bleue, mais la modernité a apporté son lot de couleurs. Un autre marché, maintenant : El Parian, un mot philippin qui veut dire ... Marché. C'est là où les marchands de Veracruz se sont installés au 18e. Puebla est connue comme étant un carrefour culturel, et donc gastronomique, reliant le Pacifique aux Caraïbes. Aujourd'hui, el Parian est un marché de souvenirs.

Nous traversons la rue Los Sapos où, coup de chance c'est dimanche, les brocanteurs sont de sortie. C'est donc très animé. Souvent des gens nous interpellent, comme partout au Mexique mais là ils sont très insistants. Bon, c'est assez cathartique de les envoyer balader en français. Ils nous proposent à manger (genre des grillons) ou nous demandent juste des sous. J'ai l'impression qu'il y a encore plus de pauvres à Puebla ... C'était peut être pour ça que certaines personnes disaient que ça craignait. Mais il y a pire quand même. Dernier point d'intérêt : la Casa del Alfenique, avec sa façade sculptée qui la fait ressembler à un gâteau glacé. C'est normal, la fiancée avait demandé à son futur époux de lui faire la maison la plus douce de Puebla. Ah, ces femmes de l'époque ...

Puebla est une ville chargée d'histoire, mais j'en ai déjà beaucoup parlé auparavant. Pas facile d'être mon avant-dernière étape ! Nous passons devant le musée de la Révolution et ses impacts de balles sur sa façade. Omar nous fait aussi goûter de petites tartelettes faites au couvent de Santa Clara, tout proche.

Bien, avec tout ça il est 13h30, je n'ai pas très faim, il va bientôt pleuvoir. Il faut que je réfléchisse à un plan: pourquoi pas aller voir Cholula cet aprem, c'est à côté ? J'avais prévu un jour de plus pour aller visiter, mais ça peut me libérer une journée de plus pour aller à Atlixco, le village des fleurs, voire faire le trajet Cuernavaca-Tepotzlan-CDMX ... J'y vais maintenant ? Mauvaise idée. Je peux aussi visiter le Templo Santo Domingo mais surtout sa Capilla del Rosario qu'entre 15h et 18h. Vu les événements de ces derniers temps, c'est risqué de penser rentrer avant 18 heures. Donc, petite torta au cochinita pibil et agua de sabor, histoire de ne pas faire une hypoglycémie, et j'attends l'heure. La nonne nous dit qu'on ne va pouvoir la voir que de loin car il y a un mariage qui va y avoir lieu. Ah, j'ai bien fait! C'est vrai qu'elle est très jolie avec toutes ses dorures. Je me demande combien d'argent il faut pour se marier là.

Bon, ceci étant fait, je vais donc chercher les colectivos pour Cholula. Coup de bol, j'en trouve un sur la route, je saute dedans. Mais je me rends compte que je suis sur la route du volcan Cuexcomate, et tout à coup malgré mes genoux de plus en plus défectueux de jour en jour, je me sens d'humeur à en gravir un. Rien de tel qu'une petite rando improvisée jusqu'au sommet d'un cratère !

... Bon alors en vérité, bien qu'il s'agisse d'un volcan, c'est vraiment un ... Bébé volcan. On dit que c'est le plus petit volcan du monde. Puebla culmine à 2 135m d'altitude, et oui quand même, et il est noté à 2 136m. Hahaha, trop mignon. Bon, il doit quand même faire 4 ou 5 mètres de haut depuis l'extérieur. Si on compte son dedans et son dehors, on arrive à 23 mètres. C'est en fait une éruption du Popocatepetl qui a créé un geyser à cet endroit. Ah d'ailleurs, c'est le cas en ce moment, il est entré en éruption la semaine dernière et des touristes ont été blessés par la lave, on ne peut pas y aller. L'ouragan, les inondations, l'éruption, je suis très, TRÈS déçue de ne pas avoir eu de tremblement de terre.

Depuis le haut du cratère, je peux entrapercevoir son papa, qui cache son sommet entre les nuages. Quel dommage, j'aurais bien aimé mieux le voir, peut être demain ? Je redescends de mon ascension épuisante, reprend un colectivo et cette fois ci, j'arrive jusqu'à Cholula. Il y a une pyramide à voir, mais je suis au courant que c'est fermé, et on peut la voir de l'extérieur. En fait, la petite ville est une bonne surprise: animée, sympa, plein de souvenirs un peu moins chers. Il est temps de faire du shopping pour les souvenirs. Puis, je vais enfin tester une gordita, un petit pain brioché dans lequel on met de la crème. Ça va c'est petit, mais je m'attendais à mieux. Il y a une grande église qui domine la colline mais on ne peut pas y monter, dommage car par temps moins orageux, la vue sur la vallée de Puebla et les volcans qui l'encerclent doit être extraordinaire. Je me promène encore un peu, profite de l'ambiance, vais voir le "train touristique" mais c'est plus un tram qu'autre chose. De là, on devine plus ou moins la montagne de la Malinche, que Sarah a gravie, 4 500m ou quelque chose comme ça ! J'ai déjà donné au Pérou. Et puis je veux à tout prix éviter le kiné au retour. Finalement, je passe au CAPU terminal avec le bus, car je veux me renseigner sur mes options pour demain: Atlixco, Cuernavaca ... Tout est possible en fait, il n'y avait pas d'infos sur Internet.

Maintenant, je prends un autre colectivo pour rentrer dans le centre, alors qu'il se met à pleuvoir comme vache qui pisse. Merci parapluie, mais je suis quand même mouillée, heureusement que j'ai le pantalon adéquat. Je trouve l'arrêt mais pas le bon bus, je m'acharne à en trouver un qui passe proche de l'hostel mais en fait il n'y en a pas et j'aurais dû me contenter d'un autre. Je craque, je prends un colectivo qui me laisse un peu loin, mais au moins un peu plus près. Il est 20h30, j'achète une boîte de thon pour aller avec mon riz que je dois finir petit à petit. J'arrive tars à l'hostel, je veux faire cuire du riz à 21 heures, je me fais engueuler par le volontaire français, heureusement il y en a un autre - un peu weirdo avec qui j'avais discuté juste avant - qui vient à ma rescousse.

Retour dans ma chambre, mon nouveau lit ... Délesté de mon chargeur. Quoi ? C'est quoi ce bordel ! Qui me piquerait un chargeur ? Je regarde les lits des autres filles, rien, elles ont le leur. Je regarde en haut des casiers: rien. Dans les casiers vides: rien. Sous les lits évidemment, dans les draps, les couvertures, les matelas: rien ! Sérieux? Je n'ai plus que 30% de batterie ! Je viens embêter les volontaires, le Français se montre plus sympa avec moi. Il cherche dans les tiroirs des objets trouvés : toujours rien ! Il y a plein de chargeurs, en plus. Mais pas le mien. Il me dit d'attendre le lendemain, qu'il puisse ouvrir le bureau, car si elle l'a trouvé il sera là.

• • •

Voilà, comme les trois petits points l'indiquent, on est demain. Allons tirer cette affaire au clair. Et dans le bureau, donc ? Oui ! Ah ... Non en fait, fausse alerte. Je ne prends pas les chargeurs des autres moi, même oubliés. J'ai une théorie : elle a pensé qu'il était à la nana avant moi puisque je venais juste de changer de lit, et elle l'a embarqué. Ou alors il est resté dans les draps ! Dans tous les cas, je ne pense pas que ça ait été intentionnel vis à vis de moi. Elle ne travaille pas aujourd'hui, mais une autre nana lui envoie un message pour lui demander. Et là ... Elle répond qu'elle n'a jamais été dans mon dortoir. C'est faux. C'est un mytho, je l'ai vue changer mes anciens draps ! Les rouages dans ma tête tournent à toute vitesse, et si en admettent avoir pris mon chargeur, même par erreur, elle se faisait accuser de vol, et virer? C'est le Mexique, bébé. On punit gravement le vol pour faire bonne figure. Elle a peut être paniqué et menti, car si elle l'avait embarqué dans les draps, elle n'aurait pas dit ça. Elle aurait proposé de vérifier. Bon, est ce que ça vaut la peine de taper un scandale et ruiner la vie d'une nana ? Non. Je vais racheter des câbles et me casser de l'hostel à midi. Du coup les câbles fonctionnent plutôt bien. Et comme vous l'avez deviné, vu comment ça part, il est bientôt midi, donc pas d'Atlixco. En fait, le CAPU est tellement chiant d'accès que ça me démotive. Si je vais directement à CDMX à Casa Pepe, je sais que je oeux recharger directement en usb, on va faire ça, et on ira à Tepotzlan depuis là-bas car niveau bus ça revient au même. Je vais refaire un tour en ville, je trouve un resto où je mange un mixiote, de la viande en papillotes. Surprise, c'est de l'agneau, donc c'est super bon. Ça change ! Je suis en terrasse, des gens viennent me demander des trucs. Et heureusement que je suis sous un parasol car soudain il se met à pleuvoir des fruits depuis l'arbre, mais genre littéralement.

Bon, et bien ... Puebla c'était sympa, mais l'hostel, bof. Je vais aller profiter d'une meilleure ambiance à Casa Pepe, d'un meilleur lit, tout ça.

Sur la route, j'ai la chance d'avoir un temps dégagé aujourd'hui, donc je peux voir la Malinche, mais surtout el famoso Popocatepetl (5 436m!), dont le cratère fumant lui crée une petite écharpe de nuages. À côté, il y a son copain, le Itzaccihuatl. Ils ont des petits surnoms, le Parc National Itza-Popo. Ce ne sont même pas les plus hauts sommets, le Popo est second. C'est le pic d'Orizaba, situé à cheval entre l'état de Puebla et celui de Veracruz, qui culmine à 5 675m. En tout cas, le volcan me fascine, je passe une heure à le prendre en photo pendant qu'on tourne autour. J'avais pris exprès une place stratégique et un vieux me l'avait piquée, j'ai voulu en prendre une autre équivalente mais on me l'a réclamée, j'ai donc viré le vieux sans autre forme de procès. "Para sacar fotos", du coup il a pris sa place côté couloir, et bon il a pu voir que je ne lui avais pas menti. Ici, encore un changement dans le paysage ! Ce pays est géographiquement passionnant. Nous entrons dans une vallée verte et fertile, les pentes du Itza, on se croirair en montagne à la maison. Et nous allons vers la vallée cuvette de México qui va devenir plus aride au Nord. C'est fou !

20
sept

Je suis encore dans le déni, revenir sur CDMX signifie bientôt rentrer. Et quand bien même j'en ai souvent envie, dans les moments de coup de blues, bah maintenant je veux grappiller les derniers moments passés ici. Le terminal TAPO où j'arrive est assez près du centre, à 30 minutes de marche de Casa Pepe, mais je passe d'abord au Chedraui faire des courses: de la viande, du poisson, un yaourt. Je vais rater l'happy hour mais elle ne vaut le coup que si on commence à boire à 18h, sinon ça passe trop vite. Je prends un bus, j'ai des sous mais pas de carte chargée... Une dame me la passe pour moi, je veux lui donner 10 pesos, elle refuse. Je ne mérite pas la gentillesse des gens. Une fois descendue, je retraverse le Zócalo, vais m'installer, et je suis prête pour boire. Je rencontre un groupe de gens sympas, on boit, un Indien qui bosse dans l'informatique me fait un faux certificat - je ne pense pas en avoir besoin si je suis vaccinée mais là je n'ai pas le courage de vérifier, je suis bourrée. On est un groupe de nationalités habituelles: allemands, néerlandais, américains, anglais, et un autre français. À 23 heures on décide d'aller ailleurs, et en bas de l'hostel, tout à coup, qui c'est qui sort d'un taxi ? L'écossais. Oh putain. Du coup il nous suit en grognant des trucs. Mzis ça fait 5 semaines qu'il est là, alors ? Voire plus ? La nana anglaise me dit qu'elle a été volontaire dans d'autres hostels d'Amérique Latine, et il s'est fait blacklister de partout. Et qu'apparemment il ne lui faut pas tant d'alcool que ça pour être dans cet état. Elle pense que c'est un crackhead, un junkie du crack, quoi. Et lui, il gueule à tout le monde que c'est un docteur, en quoi on ne sait pas trop. "Are you from Glasgow?", qu'on lui demande, il répond "FuUuUck you". C'est franchement triste. Comment ce genre de personne en arrive là, jusqu'à en devenir ridicule, rejeté de tout le monde ? Qu'est ce qu'il s'est passé dans sa vie ? C'est la psy qui parle, là, même avec 3 grammes d'alcool à cause de la chope de bière qu'on m'a commandée et que je n'avais pas demandée. Je n'ai pas mangé, j'en voulais moins, elle n'est pas bonne mais maintenant qu'elle est là, bah évidemment elle se termine. Ce bar est nul, on rentre, je tente de me faire à manger mais il est 1h30 et on n'a pas le droit. Je rentre dans mon dortoir et oh, comme on n'est que deux dedans, la fête continue ici. Des gens se sont assis sur mon lit et sniffent de la coke. Super. Si j'en retrouve dessus, je les tabasse ! J'en peux plus de la cocaïne, ça me soule. Tous ces gens, on dirait qu'ils sont venus au Mexique pour sniffer, en plus j'ai appris ensuite qu'elle est meilleure et moins chère en Angleterre. Ça y est, je fais la gueule, comme avec la morphine, j'en prendrai VRAIMENT jamais. Ça a l'air tellement normal ici, mais c'est de la putain de drogue, moi si j'en prends, j'arrête pas, ça me fait peur. C'est pas bien de normaliser sous prétexte que c'est facile à avoir. Vers 3 heures, je demande aux gens de partir parce ça commence à me stresser. En plus j'ai rien mangé, mais un gars anglais gentil va m'acheter des tacos pendant que j'essaye de dessoûler. Bon, je ne les trouve pas bons, je ne les ai même pas mangés, mais merci pour l'intention.

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Au vu de mon état de ce matin, une décision importante est prise: pas de Tepotzlan. En fait, je ne sais même pas si, gueule de bois ou non, j'aurais été motivée pour me taper quatre heures de bus en une journée. Surtout avec le vol de retour qui m'attend. Et bien tant pis, c'est une bonne journée de repos, en plus je suis bien à la bourre sur les photos d'Oaxaca, et je termine de les éditer. L'autre nana du dortoir n'est pas là, c'est bien tranquille. Vers 15 heures je me décide à me balader vers le quartier de Roma, censé être le quartier hipster. Rien d'extraordinaire en fait, mais pour une petite balade de lendemain de soirée, les allées ombragées par tous les arbres sont très agréables, surtout par ce beau temps. Même dans cet état, j'aurais marché mes 6 kilomètres quotidiens.

Je fais encore un peu de shopping de retour en centre ville. Il fait si bon, j'ai envie d'en profiter un maximum. De retour à l'hostel à 18 heures pour me faire mon déjeuner/dîner. Les petites quesadillas de ce matin ont suffi pour la journée, mais quand même. Mais tout à coup je réalise qu'on est mardi, c'est jour de lucha libre ! J'avais hésité à y aller pour mon retour sur CDMX, et puis j'avais oublié, évidemment. Il est 18h30, ça commence à 19h30 et ce n'est pas très loin, à l'Arena Mexico. Je mange un peu quand même, et je file. Je prends le métro pour aller plus vite, et au final je mets 15 à 20 minutes, il est 19h15, parfait. On me vend des billets dans la rue.

Je m'installe dans les gradins, j'ai une super vue ! Le spectacle commence, ils en font des caisses, c'est marrant. Je prends des vidéos mais je me fais reprendre. Je trouve donc une stratégie, je mets mon portable entre mes genoux et mes cuisses, relève les jambes sur le dossier de devant, et je mets ma veste dessus. Ça donne des vidéos pas très bien cadrées, et qui deviennent noires tout à coup car je referme vite les cuisses quand j'ai besoin de recacher le téléphone, quand les gens de la sécurité passent. Je crois qu'ils se doutent de quelque chose mais ils n'arrivent pas à me prendre en flag. C'est d'autant plus dangereux qu'il y avait des flics en bas. Mais c'est fun. Sur le ring, ça fait des sauts périlleux, tout ça, la foule se met à participer et ça c'est marrant, c'est ça qu'on veut voir ! Il y a même un round avec des filles, avec leurs masques et leurs cheveux soyeux on dirait des supers héroïnes, wahou. Bon, par contre, c'est très répétitif. Je prévois de rester deux heures maxi, et en fait les gens commencent à partir à 21h30. Je ne sais pas si c'est un entracte ou si c'est la fin, mais je me casse, je vais rentrer pour profiter du rooftop. À la sortie, il y a des masques de luchadores, j'en ai pas besoin, ça va faire trop, j'ai presque plus de thunes et ... 50 pesos pour ceux là ? Bon, d'accord allez !

Certaines vidéos deviennent noires, car je planque le portable entre mes jambes quand les gars de la sécurité arrivent. 

Mais de retour, les copains ne sont pas sur le rooftop, déception. Ils ont dû partir dans un bar plus tôt ... Ma seule compagne est donc une dernière petite margarita. Je vais aussi faire un tour sur le Zócalo pour profiter de ses illuminations une dernière fois. Et je règle les derniers préparatifs avant demain, je continue de bosser sur le blog ... Finalement l'anglaise et son pote reviennent vers minuit et demie, on papote jusqu'à 2 heures, c'est cool de finalement ne pas être seule ce soir. Je me sens un peu stressée pour demain, quand même.

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Après mon dernier petit dej, mes dernières quesadillas jambon fromage, mes derniers pancakes, je prépare mon sac pour m'en aller. Je croise le groupe de gars, je les remercie, je leur souhaite une bonne journée, puis je vais au Museo de Arte Popular comme prévu, cette fois ci. On y trouve plein de statuettes à caractère religieux, mythologique ... J'adore prendre des photos pour essayer de leur donner vie, comme des portraits, c'est l'unde mes trucs préférés.

Je commence à me sentir un peu stressée à cause du départ. Je rentre, j'écris un peu, je profite du rooftop mais il fait trop chaud, je vais dans la salle télé où ils ont carrément mis des lits pour chiller devant, et avant un long vol et une nuit blanche en perspective c'est par-fait. Je cuisine mon riz et mon poisson pour plus tard, et prend la route.

C'est toujours un peu compliqué de terminer mes blogs. Au moment où j'écris ces lignes, je suis dans l'avion. J'essaye au moins de finir le texte sur le territoire mexicain, mais plein de photos seront éditées pendant les 11 heures de vol, et le reste des vidéos uploadées depuis Perpignan. C'est toujours pas mal de boulot, surtout au niveau des photos et des recherches. Mais je n'imagine pas faire sans !

Dire qu'au départ j'étais censée partir en Colombie, il y aurait eu encore plus de cocaïne. C'est un point qui m'a bien fait chier sur la fin du voyage, mais bon personne ne m'a forcée, je ne juge pas les gens car c'est leur problème après tout. C'est juste que ça paraissait trop banal et ça ne devrait pas l'être. C'est le problème de l'Amérique Latine aussi. Quoi d'autre ... Les gens qui alpaguent, qui insistent, mais j'ai connu bien pire (coucou Indonésie). Je n'ai pas trop souffert de harcèlement de rue, assez vite fait, mais faut dire que je m'habille comme un sac en voyage, souvent à cet effet, et d'autres filles ont été plus remarquées que moi. Bon le souci c'est que dans les hostels, si on ne fait pas un peu d'efforts, c'est plus dur d'avoir de l'attention. Je dis "plus dur" car malgré tout j'en ai eu un peu, grâce à "l'énergie" dont parlait Paul, qu'est ce qu'il était sweet ce gars, un vrai chamallow.

Sinon, quand même, sacrée découverte. Je me plains de la bouffe mais elle est quand même fondatrice, c'est quand même intéressant à essayer. Et les sauces surtout ! Celles où on trempe les nachos. C'était toujours un succès. Ça par contre, aucun reproche, tout comme aux trente milles guacamoles qu'on s'est tapés avec Emma.

Les hostels, plus ou moins biens, mais esquive totale des bed bugs et ça, ça fait plaisir. Pas des araignées certes, mais bon. De la wifi pas trop nulle, franchement. Plein de gens cools rencontrés sur la route, avec Insta j'ai l'impression que c'est plus dur de rester en contact qu'avec Facebook mais on verra bien.

Les paysages ! Quand même, quelle variété ! De la jungle, de la montagne, des volcans, et dire que le Nord est désertique. C'est assez incroyable d'avoir tour ça sur son territoire, alors en plus, toutes ces cultures ? Les Aztèques, les Mayas, les Mixtèques, et mes petits chouchous les Zapotèques. Et il y en a plein d'autres. Quelle terre de spiritualité, aussi, franchement les expériences chamaniques étaient au top, si je devais faire un top 5: le temazcal, Oaxaca, San Juan Chamula, Akumal (snorkeling et cenote), San Cristóbal. Bacalar n'est pas très loin derrière, mais comme il a plu ... Au final j'ai moins accroché avec Mérida et évidemment Cancún, quoique Isla Mujeres était très sympa et puis revoir Cynthia était incroyable.

Finalement, j'avais des craintes, j'ai été parano au départ, et ensuite je me suis relâchée sans perdre ma vigilance. Je n'ai rien oublié, rien perdu, j'ai juste dû racheter un ventilo, et il y a bien l'histoire de mon chargeur qui va rester au Mexique mais s'il fallait que quelque chose me quitte, autant que ce soit ça. Aucune valeur affective. À part la piqûre d'araignée, qui est passée, je suis saine et sauve, rien de cassé, c'est le plus important. Même si les éléments ont eu l'air de se déchaîner contre moi.

Quel sera mon prochain grand voyage ? Aucune idée, croisons les doigts pour le Japon et la Corée qui ont un an pour rouvrir leurs frontières et me voir débarquer. Sinon la Russie a réouvert, et la Colombie le reste, l'Argentine peut être, une fois que j'aurais refait mon passeport. Merci à toi d'ailleurs, fidèle compagnon. Je viens de me rendre compte qu'on ne t'a pas fait de tampon de sortie du Mexique, peu importe. Pas question que je te laisse à l'administration, je te garderai toujours et je demanderai à ce que tu sois incinéré avec moi !

Et comme d'habitude, chers lecteurs, merci à vous de m'avoir suivie, merci à Joce qui est la seule à laisser des commentaires qui me font plaisir, merci aux autres qui me font des retours en privé, merci à MyAtlas sans qui cela ne serait pas possible, et voilà, le discours pour les Oscars est prêt. Je vous laisse, l'avion décolle ...