Jour 1
Ça commence bien, le premier vol en Argentine. Il était prévu à 10 heures, encore hier quand j'ai fait le check in, et surprise, en arrivant à l'aéroport il est affiché pour 10h30. Et en vérité il ne décollera pas avant trois quarts d'heure supplémentaires. Je ne le sais pas encore, mais ce n'est que le début des retards car rien n'est à l'heure en Argentine. Rien. Jamais.
Buenos Aires a l'air très sympa, plantée au bord du Rio de la Plata qui fait office de mer. Encore faut-il pouvoir quitter l'aéroport. Car quand je veux prendre le bus, impossible de payer à bord ! Il faut une carte "SUBE". Qu'on ne trouve qu'à un endroit dans l'aéroport. Qui n'en a plus. Je traîne pendant une heure pour tenter de trouver un autre endroit, mais rien. Il va falloir que je fasse la manche si je ne veux pas passer la nuit ici. Enfin, non, en fait je propose 50 pesos à un gars car ça coûte 30, mais il n'en veut même pas, il me paye le passage. La manche malgré tout, donc.
Ok, j'arrive au bon endroit, par l'impressionnante avenue 9 de Julio qui est la plus large au monde ! 140 mètres, 6 passages cloutés, et ça doit être une douzaine de voies en tout, voire plus. Au centre trône une obélisque, qui n'a aucune signification particulière. Du coup, traverser prend du temps. Mais l'hostel Viajero n'est pas bien loin, à quatre blocs de l'avenue. Oh, et ici les blocs s'appellent aussi des manzanas ... Je ne vois pas trop le rapport avec les pommes.
L'hostel est vraiment cool: bar, activités, cuisine, dortoirs confortables avec rideaux, et piscine (mais il fait bien trop froid). Au vu du tableau des activités, il y a vraiment beaucoup de choses à faire. Il va falloir que je me fasse carrément un planning. D'ailleurs, il y a un atelier maté à 17 heures. Je vais faire un tour dans le quartier pour chercher à grignoter avant, et pour repérer les environs. Je tombe sur un petit resto qui vend des empañadas, allez il faut tester. Elles sont dé-li-cieuses, comme je disais en arrivant à Sao Paulo, la première bouchée de street food dans un nouveau pays, c'est toute une poésie. J'ai aussi une part de Budin de Pan, un espèce de pudding dans du caramel. Miam. Toujours pas très light, j'ai dû prendre facilement 3 kilos pendant ce voyage. Régime en rentrant.
C'est l'heure de l'atelier. Nous faisons connaissance avec Dante, qui s'occupe des animations de l'hostel, mais ce n'est pas lui qui anime le maté, c'est un autre gars. Il nous explique que le mot maté fait en fait référence au verre ou au pot, et ce qui se boit ce sont les yerbas infusées . Les récipients sont faits à la base avec des calabasas. En Argentine, il y a tout un processus pour faire son maté: remplir à moitié avec les yerbas, incliner à 45 degrés pour faire un petit tas pentu, planter la paille dans le sens opposé, recouvrir d'eau mais laisser un petit peu de yerbas sèches. D'où le tas. Il y a un cebador, un serveur d'eau désigné dans un groupe. On se filme pour voir si l'on va faire la grimace car c'est amer. Non, parce qu'en fait, j'ai connu pire au Pérou ...
Il fait froid quand même dehors, ça fait du bien de rentrer à l'intérieur pour profiter du cocktail d'accueil gratuit, qui est une sangria. Mais il faut vite ressortir, car il y a un groupe de deux gauchos qui viennent pour jouer de la musique traditionnelle.
L'ambiance dans le bar n'est pas trop mal bien qu'il y ait beaucoup de groupes déjà formés, mais je m'incruste quand même avec des Argentins de Rosario pour jouer au Jenga avec eux. Puis, c'est l'heure de manger, je me suis inscrite à la soirée asado (barbecue) pour manger de la viande grillée au feu de bois et boire du Malbec. Je fais la connaissance d'encore pas mal de monde, et je suis forcée de parler espagnol durant tout le temps mais je me débrouille pas trop mal. Nous faisons une partie de Uno avec des règles un peu différentes, évidemment, personne n'a jamais les mêmes. Puis avec encore d'autres personnes, Dante nous emmène dans un bar, le Gibraltar.
Les fameuses carafes pingouins. Jour 2
Lendemain un peu difficile, mais on ne va pas se laisser abattre ! Le temps est radieux malgré la fraîcheur hivernale de Buenos Aires, à 15 degrés. Le seul problème, c'est que j'ai perdu ma voix. Extinction quasi totale, mais j'ai mal à la gorge depuis Iguazu. Ça ressemble bien à une angine, je me demande comment j'ai fait pour choper froid par 25 degrés alors que je n'ai eu aucun souci à Rio malgré le fait d'être trempée avec du vent. Je pars faire un tour dans le centre-ville, côté Monserrat et Puerto Madero et ses buildings. Il faut savoir que Buenos Aires est une ville qui a voulu s'affranchir du style espagnol, et qui a rasé bon nombre de ses buildings pour en construire de nouveaux, tout sauf espagnol. On retrouve donc beaucoup de style haussmanien, mais aussi des immeubles cubiques des années 70, des inspirations italiennes, américaines, et ce les uns à côtés des autres dans la même manzana. Ce qui donne un ensemble très hétéroclite et plutôt rigolo quand on s'intéresse de près à l'architecture.
Mon premier arrêt est la plaza ... Non, mon premier arrêt est le snack d'empañadas, parce que j'ai faim, et elles sont moins bonnes que la première que j'aie mangé. Malheureusement, même si nous sommes samedi, beaucoup de commerces sont fermés. Donc, je me rends à la Plaza de Mayo, où se trouvent le Cabildo et surtout la Casa Rosada, siège du gouvernement. Qui était censée proposer des visites gratuites le samedi mais il semblerait que non. Bon, tant pis. Je pousse mes pas jusqu'à la Reserva Costanera Sur, un parc écologique, mais c'est un peu loin et en fait je pars du mauvais côté, il n'y a pas de pont là où je vais. Du coup, je laisse tomber, mais cela ne m'empêche pas de me promener sur les docks de Puerto Madero et d'admirer le Puente de la Mujer, en rénovation. Il y a pas mal de petits restos aménagés en bord de fleuve, c'est assez sympa et ça rappelle les villes européennes comme Anvers ou Hambourg. Puerto Madero était un quartier défavorisé, mais ils ont construit plein d'hôtels chics, d'où le look building, et tout le quartier s'est gentrifié.
De retour dans l'autre sens, je remonte la rue Florida où se trouvent pas mal de commerces, jusqu'au niveau de l'obélisque. Puis, je prends l'une des deux seules avenues diagonales du quartier, Saenz Peña, pour revenir à mon point de départ. J'essaye de trouver le passage Rivarola qui est connu pour être parfaitement symétrique, mais c'est peine perdue: maps.me n'est pas très précis ici, et les rues en angle droit sont si longues qu'il faut donner les adresses selon le quadrillage: au coin des 4 rues. Ce n'est pas tout à fait le même système qu'à New York où les rues sont aussi divisées en ouest/est, nord/sud, ce qui est aussi fort pratique. Mais du coup, je reviens sur la Plaza de Mayo. Et juste à côté, il y a une scène avec des gens qui font des démonstrations de danse. Cool, encore des danses traditionnelles argentines ? Traditionnelles oui, argentines non. Il semblerait que ce soient des danses du monde, et particulièrement d'Europe car il y a un groupe déguisé pour les ferias de Bayonne. Enfin, en basques, quoi. Je me disais bien, aussi.
J'en profite pour visiter le Cabildo, qui est donc l'ancien donjon et un siège militaire. Il y a un musée pour en apprendre plus sur la Révolution.
Le musée retrace le système sociétal colonial que nous connaissons bien: des castes selon la couleur de peau et l'origine ethnique, même si les personnes ne sont pas esclaves ou affranchies, les commerçants, les métiers manuels, l'élite, les femmes qui sont dépendantes de leur mari ... C'est au début des années 1800 qu'il va se passer beaucoup de choses pour l'Argentine. En 1806, les Anglais prennent Buenos Aires. Très facilement, car l'Espagne a l'air d'en avoir rien à foutre. Même le vice roi, Rafael de Sobremonte, quitte la ville pour aller à Córdoba. Peut être en prenant la thune avec lui, on ne sait pas trop. Les gens de Buenos Aires n'étaient pas contre cette occupation au départ, sauf que les Anglais sont protestants et ils ont très vite voulu imposer des lois anti catholiques. Ce qui n'allait pas du tout, donc protestation. L'Espagne finit par se bouger et demande à un officier français qui travaille pour eux, Jacques de Liniers, de monter une armée à Montevideo et de reprendre la ville. C'est ce qu'il se passe, au terme d'une journée sanglante. Liniers fut nommé vice roi du Royaume de la Plata. Au final, l'occupation anglaise aura duré 46 jours.
Mais ce n'est que le début des emmerdes. En Europe, Napoléon envahit l'Espagne à ce moment là (les Portugais fuient à Rio, etc), le Conseil de Séville se crée, et les sud-américains se rendent bien compte que le pouvoir faiblit, mais se sentent toujours un peu abandonnés. Des juntes prennent un peu de pouvoir, et surtout s'insurgent contre Liniers qu'ils accusent de vouloir donner le royaume à Napoléon puisqu'il est français. Liniers a le soutien des militaires, mais la situation est quand même tendue, alors un autre vice roi est nommé, Cisneros. Il contrôle la situation jusqu'en 1810, où toute l'Espagne tombe aux mains de Napoléon. Le 22 mai 1810, le peuple décide de créer un gouvernement local, mais comme le roi d'Espagne a toujours du pouvoir, ils créent cette organisation "au nom du roi". Ainsi, personne ne peut dire qu'ils sont entrés en Révolution, même si techniquement c'est le cas. Enfin, ça, c'est pour la majorité, qui veut rester en monarchie fédérale. Un autre groupe commence à parler d'indépendance, car le pouvoir du roi est affaibli, et le pays avait été conquis par la force. L'idée se propage partout au même moment, avec la formation de gouvernements autonomes dans toute l'Amérique latine. Cisneros et d'autres fonctionnaires furent envoyés en Espagne.
La suite, c'est beaucoup de conflits entre tous ces gouvernement autonomes, mais aussi une guerre civile entre les partisans de la couronne et ceux de l'indépendance. Ils essayent de se libérer les uns les autres, tandis que finalement, Napoléon est repoussé et le roi Fernando VII revient sur le trône, ce qui met la Révolution à mal, sans compter que la guerre crée une grosse crise économique. L'Argentine se proclame indépendante le 9 juillet 1816 sous le nom de "Provinces Unies d'Amérique du Sud". En 1817, José San Martin parvient à libérer le Chili, puis le Pérou des royalistes. Ainsi, les autres ont pu devenir indépendants aussi.
Fatiguée, mais pas inactive pour autant. Je vais faire une activité relativement tranquille ce soir, le Teatro Ciego. C'est une pièce de théâtre dans le noir, jouant sur les bruits, les odeurs et les sensations. Un peu comme ce que j'ai fait à Hambourg. Je réserve ma place et je ne résiste pas à l'envie de marcher encore, jusqu'à la Plaza del Congreso, bâtiment qui ressemble un peu à la Maison Blanche. Juste à côté se trouve le Palacio Barolo, du nom de son architecte qui s'est inspiré de l'œuvre de Dante Aligheri pour le créer. C'est pour le moins imposant. Je n'en avais pas entendu parler, il m'a été conseillé par Joan, un porteño (gentilé de Buenos Aires) que j'avais rencontré à l'Oktoberfest en 2019.
Mais il ne faudrait pas que je me mette trop en retard, car le théâtre est situé dans le quartier Palermo et il faut prendre le métro et marcher. Je n'ai toujours pas de carte Sube donc je descends dans le métro, le Subte, pour en acheter une mais ... Les guichets sont fermés ! Mais on est samedi ! Et il est 17 heures ! Pourquoi ! J'essaye donc de trouver des kioscos, puisqu'ils en vendent aussi, mais je repars bredouille après trois essais, ils disent que plus personne n'en a. Mais en fait, la quatrième est la bonne, je dois être tombée sur une dealeuse de cartes Sube qui me donne le précieux sésame. Ceci fait, allons-y.
Le quartier Palermo est très populaire, pour ses bars, restaurants et night clubs, il ressemble à tout quartier branchouille européen mais il s'en dégage une atmosphère sécurisante et agréable. Mais pas beaucoup de dépaysement. J'arrive au théâtre, et après avoir un peu patienté, nous entrons dans la pièce. Nous nous asseyons sur des chaises et mettons un casque. Oh, moi qui pensait que nous aurions de vrais acteurs malvoyants en face de nous ! Je suis un peu déçue. Mais bon, tant pis. La pièce enregistrée raconte l'histoire d'Alberto, mal voyant de Buenos Aires, ses combats pour qu'on arrête de le surprotéger étant petit, ses difficultés, son premier amour, sa découverte de la musique, son émigration à New York pour devenir un grand musicien, et son choix entre sa carrière et sa femme ... Le tout avec des odeurs, et même de la pluie. La fin est assez émouvante car il retourne à Buenos Aires pour rencontrer sa petite fille qu'il n'a jamais connu. Bon, c'est pas mal mais c'est vrai que mon expérience similaire à Hambourg était d'un plus haut niveau.
Jour 3
Dimanche. C'est le jour de la grande brocante à ciel ouvert dans le quartier à côté de l'hostel, San Telmo. Je retrouve donc le groupe pour le fwt, histoire d'avoir un peu de background supplémentaire. Mais avant, je fais un détour par une pharmacie pour me trouver des pastilles, histoire de pouvoir communiquer avec le reste du monde.
Notre guide se nomme Juan (in a million). Il nous apprend que Buenos Aires a été fondée en 1580 par les jésuites italiens, qui sont aussi allés dans la province de Misiones, d'où le nom. C'est là où se trouve Iguazu, et ils ont commencé la production en masse de maté. Ils ont aussi décidé de conserver la langue guaraní, qui est toujours parlée aujourd'hui. 50% de la population étaient des immigrants, et la moitié des italiens, c'est pour cela que les argentins parlent avec les mains. Pour autant, l'Argentine n'était pas très riche, les maisons étaient construites en adobe au départ et il n'en reste donc rien.
Il nous parle aussi des tunnels qui relient l'église de San Ignacio au Cabildo, infestés de rats. Ils se situent juste à côté de l'université de Buenos Aires, et les étudiants avaient l'habitude de les emprunter pour sécher les cours. Cela a donné lieu à l'expression "tu te comportes comme un rat" quand on sèche.
Nous arrivons maintenant au Paseo de la Historieta, c'est à dire la rue de la bande dessinée car les Argentins adorent. Surtout Mafalda, elle est partout. Ils en font plein de souvenirs. Il y a plusieurs personnages qui sont représentés en statues, dont un qui n'est pas trop connu à l'étranger, Clemente, une espèce d'abeille.
Malgré sa tête sympa, c'est un révolutionnaire. Il a été créé pendant la Coupe du Monde de 1978, alors que l'Argentine connaissait la dictature de la junte militaire dirigée par Videla. La tradition était alors de lancer des petits papiers pendant les matchs de foot. Le gouvernement ne trouvait pas ça très civilisé, donc il embauche un journaliste, José Maria Munoz, qui somme le peuple d'arrêter de se comporter en sauvage car il faut faire bonne impression au reste du monde. Mais dès que ça touche au foot, les Argentins sont plutôt intenses. Donc dès le lendemain de ce communiqué, un cartooniste a créé Clemente et l'a publié dans un journal pour soutenir cette tradition, car c'est la réalité du peuple Argentin et pas question de la changer ! Quant à Mafalda, pas la peine de la présenter.
Il y a une maison assez curieuse dans une rue de San Telmo: la maison minimaliste. Elle est très étroite, mais pas autant que celle qu'on trouve à Amsterdam. Il faut savoir que pendant l'immigration, la seconde plus grande après celle de New York, les familles pauvres vivaient dans des conventillos, des maisons partagées, car souvent elles ne pouvaient louer qu'une chambre où tout le monde s'entassait. Cette maison a été vendue, revendue, et à cause des successions elle a été partagée, et repartagée. San Telmo a aussi été dévastée par la fièvre jaune, suite à la guerre du Paraguay en 1865. Le pays a décidé de déclarer la guerre au Brésil, à l'Uruguay et à l'Argentine en même temps, ce qui n'est pas une bonne idée. Cela pourrait être à cause de territoires revendiqués ou parce que le gouvernement uruguayen, jusque là allié, s'est fait renverser par une junte avec l'appui du Brésil, et ça ne sentait pas bon pour eux. Beaucoup de jeunes argentins de 18-19 ans qui venaient de commencer leur service militaire sont morts, le Paraguay a perdu quasiment deux tiers de sa population et a dû instaurer la polygamie pour se repeupler car le ratio était de 4 femmes pour un homme, et les survivants ont ramené la fièvre jaune à Buenos Aires. Désastre complet. San Telmo s'appauvrit puisque les riches ont fui l'épidémie, mais un jour un architecte du nom de Jose Maria Peña rachète la Farmacia de la Estrella, plus vieille pharmacie de Buenos Aires, et une maison qui appartenait à une riche famille, pour les rénover et inciter le gouvernement à garder son patrimoine au lieu de tout détruire et de faire des immeubles hausmanniens de merde. Il crée aussi la grande brocante à ciel ouvert pour que les gens vendent leurs antiquités, et elle a toujours lieu les dimanches depuis.
Et c'est vrai qu'il y a un sacré monde autour de nous, nous devons faire attention à ne pas nous perdre, entre les stands, les shoppeurs et les artistes qui se donnent en spectacle dans la rue animée. Heureusement j'ai rencontré un français, Aloïs, qui fait deux mètres. J'arrive à lui parler en appuyant sur ma gorge pour un effet Dark Vador. Il a fait du volontariat à Salta avec des jeunes en réinsertion. Nous arrivons au dernier stop de notre tour, la Casa Chorizo (en forme de chapelet de saucisses) et surprise, Juan nous demande de payer un prix précis : 3000 pesos. Alors non seulement c'est censé être le prix qu'on veut, mais en plus le prix des tours normaux c'est 2000. Et oui je sais l'inflation blablabla mais prévenir avant aurait été mieux. Bon, pas le choix. Avec Aloïs, nous allons au Mercado de San Telmo qui est assez réputé, je prends une empañada au passage mais vraiment, la magie opère moins qu'avec les premières. Il rejoint une copine à lui, et nous nous disons au revoir car j'ai un planning un peu chargé.
Car le dimanche, ce qu'il est sympa de faire au lieu de regarder le match Boca Juniors contre River Plate, c'est d'aller au delta dans la ville de Tigre, et de potentiellement faire une promenade en bateau. On va voir. Grâce à ma carte Sube nouvellement acquise, je peux aussi prendre le train pour y aller, et pour moins cher. Une heure de trajet environ depuis la gare de Retiro. Malheureusement, le long du trajet, le ciel se couvre et devient un peu gris. Ça sera moins beau, mais maintenant que je suis là ... Je débarque dans la petite ville au bord du Rio Luján, et finalement les paseos ne sont pas si chers, ça va valoir le coup. Le prochain départ est dans 20 minutes, j'ai juste le temps de me prendre un burger pas trop trop gras - j'en mange quand même beaucoup trop mais il n'y a quasiment que de ça ! - et j'ai failli rater le départ, qui lui est pile à l'heure. Je n'y aurais pas cru. Du coup dommage, je ne suis pas sur le bord, c'est galère pour les photos. L'endroit est super joli, en plus: c'est un système de canaux au bord desquels se trouvent des maisons plus ou moins originales, plus ou moins chères aussi, la balade est très agréable malgré le temps et le vent qui se lève. Il y a vraiment des gens qui habitent ici, on peut les voir rentrer chez eux en canoë ... Ou en jet ski.
Je ne tarde pas trop car ce soir il y a une excursion tango dans une milonga avec l'hostel, à 19 heures. Je parviens à être dans les temps mais quand j'arrive, tout le monde regarde le match, et du coup le tour est annulé. En plus, Dante n'a pas l'air d'être là, je crois qu'on devait y aller avec un autre membres du staff Lucas, qui parle français, mais il dit que c'est annulé, personne ne s'est inscrit. Ah oui, super. Ça valait bien la peine. Mais il me donne l'adresse de l'endroit si je veux y aller seule, et c'est ce que je compte faire. Je prends le temps de me poser un peu, et je ressors prendre le bus. C'est censé être le 39, mais il y en a quatre différents et un seul va à Palermo. Et il en met du temps à arriver ! Je vois le 39-1, le 39-2 mais pas le 39-3 ... Ça me permet de remarquer que chaque ligne a son design différent. J'attends quasiment 20 minutes, j'ai faim, je devrais probablement me rabattre sur le métro et marcher longtemps ... Mais à peine je veux quitter l'arrêt, que le précieux bus fait son apparition ! Coup de bol.
Le tango va durer toute la nuit, donc j'ai le temps d'aller manger. Et on est en Argentine, il va falloir tester la viande ! Heureusement que c'est la voix que j'ai perdue et pas le goût. Palermo condensant les meilleurs restaurants, je vais au Calden del Soho qui est très bien noté. Tellement que je dois attendre 20 bonnes minutes avant d'entrer ! Je discute un peu avec le gars de la sécurité, surtout pour lui demander où prendre le bus de retour car les rues sont en sens unique. Il me dit que mon espagnol est plutôt bon, et il me demande "quand est ce que je rentre aux États Unis". Encore ? Ça arrive de plus en plus souvent, ou alors des fois c'est italienne. Je finis par pouvoir m'asseoir, goûte un Malbec rouge excellent et pas cher, et j'opte pour un ojo de bife. 3500 pesos (22 euros) par contre, c'est pas donné, et il n'y a que la viande sans accompagnement. Le Brésil me manque. Mais c'est une belle portion de viande ! Et il y a du pain, de la sauce, de petits oignons confits et de la vinaigrette (version Brésil) en tapas, inclus, donc ça va. La viande est très bonne, on sent la qualité, mais ... Ça ne vaut pas la picanha !
Ok maintenant, go tango. Maps.me me le met au mauvais endroit mais je finis par trouver au bloc suivant. C'est dans un centre culturel, donc ce sont des gens lambdas qui viennent danser et prendre des leçons pour progresser. Mais je rate le début de la leçon pour débutants et je ne me sens pas de les rejoindre. En plus il va falloir être en contact rapproché avec des gens que je ne connais pas et je ne suis pas d'humeur à me faire toucher par des inconnus. Ni d'humeur à galérer non plus. Donc je préfère les regarder et c'est tout aussi bien ! Pour apprendre, je verrai mercredi, c'est prévu à l'hostel. Si ça arrive.
Pour le retour, je me dirige vers l'arrêt de bus indiqué, et à un bloc près, je le vois passer devant moi, ce bus pas très fréquent. Je tape le sprint de ma vie et me remercie de faire du jogging régulièrement car grâce à un feu rouge et à de la confiance en moi, j'arrive à le choper. Ouf !
Jour 4
Aujourd'hui, je prévois de faire la balade avec les gens de l'hostel au cimetière de la Recoleta, mais la fiche pour s'y inscrire n'y est pas, et ils me disent à la réception que c'est le jour off de Dante. Bon, et bien encore un truc qui n'arrive pas, super. La ciudad de la furia, plutôt la ciudad de los occasions ratées. Je me rabats sur un autre fwt de la même compagnie, et cela permet aussi de visiter le quartier Retiro. Nous avons rendez-vous au Teatro Colón, probablement inspiré de l'Opéra Garnier comme d'habitude, à ceci près qu'il est plus grand et qu'il a une encore meilleure acoustique. Il y a vraiment beaucoup de monde dans ce groupe, et un couple de Canadiens âgés d'Edmonton me sautent dessus pour me dire bonjour et me parler, et complimentent mon anglais. Notre guide du jour se nomme Mariano, et en fait j'ai déjà donné pas mal d'informations sur ce qu'il nous a dit durant ce tour, au fur et à mesure de ma narration. L'avantage d'écrire à la toute fin du voyage. Je peux tout de même noter ici que nous sommes passés devant la Grande Synagogue de Buenos Aires, où j'ai appris que le V Vulcain de Spock est issu de la religion juive et veut littéralement dire "live long and prosper". On peut voir ce signe sur une mosaïque à l'entrée.
Nous voici sur la plaza San Martín, du nom du général dont nous avons déjà parlé, celui qui a libéré les autres pays d'Amérique Latine. Petite anecdote sur sa statue: les Chiliens ont commandé une statue à un artiste français, mais les Argentins n'étaient pas très contents car quand même, il est d'ici, c'est leur héros national. Du coup ils demandent à l'artiste de faire la même statue, en payant plus cher, et de la faire livrer à eux avant celle de Santiago. Du coup, l'artiste fait traîner la livraison de la chilienne en prétextant qu'il doit changer les sabots du cheval, sinon la statue va s'écrouler à cause des tremblements de terre !
Le square fait face au "Big Ben d'Amérique du Sud", ou Torre de los Ingleses, offert par les Anglais pour le centenaire de l'indépendance. Les Argentins leur doivent leurs trains, car ils ont créé pas mal de voies ferrées pour pouvoir importer de la viande et pour le reste du commerce. Mais c'était avant qu'ils entrent en guerre pour les îles Malouines, qui est un sujet très présent partout car cela est arrivé en 1982, il y a à peine 40 ans. On voit beaucoup de tags et affiches "Las Malvinas son argentinas, no olvide", sur les murs et sur les bus.
Les Malouines (ou îles Falklands pour les Anglais) sont sur la liste de l'ONU des territoires contestés. Elles sont situées dans l'océan Atlantique Sud, au large des côtes argentines. Elles avaient été occupées par les Français, les Espagnols puis finalement les Anglais, qui les délaissent un peu. Les habitants sont plus proches de la culture argentine. Mais le pays les revendique au moment de la dictature miltaire, entre 1976 et 1983, donc cela ne fait pas très bon effet et les Anglais se battent pour les garder. Les Argentins perdent, beaucoup de jeunes là aussi. Cela précipite la chute de la junte, et donne lieu à une élection avec un président démocratiquement élu. Cependant, quand bien même le peuple argentin n'est pas favorable à la dictature, on raconte l'histoire différemment ici, puisque comme je le disais, les Malvinas sont omniprésentes à Buenos Aires.
Nous pouvons aussi admirer le building Kavanagh, du nom de son architecte Corina Kavanagh. Elle a voulu le faire dans le style de ceux de Chicago dans les années 30. Il cache une très belle église qu'une dame de famille riche nommée Mercedes Enchilera a faite construire. La légende dit que Corina et le fils de Mercedes voulaient se marier, mais Mercedes s'y est opposée donc Corina a fait construire son building juste devant pour l'embêter ! Bon, il semblerait que ce ne soit pas du tout vrai, malheureusement.
Une longue marche nous emmène maintenant devant le cimetière de la Recoleta, un peu comme le Père Lachaise. Sur la place se trouve aussi le plus gros arbre d'Argentine et ses immenses branches, c'est un gomero. Pour ne pas prendre trop de place, il doit être soutenu par des piliers, et aussi par une statue d'Atlas faite en pièces mécaniques !
Le tour se termine, et je compte visiter le cimetière mais l'entrée coûte 1400 pesos soit 10 euros ... Beaucoup trop cher. Il est bientôt 14 heures, du coup mon plan est de retourner dans les environs de l'hostel, m'acheter des pâtes et faire la cuisine, parce que ça commence à me revenir cher et surtout, gras. Je suis donc à quelques manzanas du métro quand j'entends qu'on m'appelle. C'est Dante, avec d'autres gens, au coin de la rue ! Mais je pensais que c'était annulé ? Il me dit non, c'est que des fois la réception ce sont de gros glandus. Du coup, ils vont visiter le cimetière, je me fais embarquer car avec d'autres gens ça peut être sympa. Effectivement, ça l'est. Parce qu'il y a José, péruvien qui a vécu aux USA, Jessica qui est de Sao Paulo, mais surtout Rodrigo qui est de ... Euh, dur à dire au départ. Né au Guatemala, habite à Barcelone, mais a bougé à plein d'endroits car parents diplomates, et qui a un passeport italien. Gros cliché du stoner de base, tout le temps en train de parler de weed, mais là ce qui est marrant c'est qu'il est franc maçon du 7e degré (oui, pas très secret) et nous sommes dans un cimetière rempli de tombes de francs maçons, donc il nous fait le guide pour nous montrer tous les symboles plus ou moins cachés. Bon après, avec une tombe en forme de pyramide, on sait à peu près à quoi s'attendre. Si il faut il nous a raconté tout un ramassis de bullshit pour se la péter, et on n'aura aucun moyen de vérifier ! Mais bon au moins on a bien rigolé. J'ai pris des photos un peu glauques, donc âmes sensibles, ne regardez pas la prochaine mosaïque. Rien de dégoûtant, mais beaucoup de cercueils. Pas pire que les catacombes de Paris.
Il y a aussi la tombe d'Eva Perón, ou Evita, héroïne nationale que tout le monde vient saluer et que certains considèrent quasiment comme une sainte. Mais qui est-ce ?
Evita est à la base une actrice, elle épouse le colonel Perón un an avant son accession à la présidence de l'Argentine. Elle joue un rôle important dans sa campagne et oeuvre en faveur du droit de vote pour les femmes, instauré en 1947 après l'élection de son mari. Elle fonde le parti peroniste pour promouvoir les droits sociaux, non seulement les droits des femmes mais aussi pour les plus démunis. Elle est la passerelle entre les syndicats et son mari. En 1951, elle pourrait se présenter à la vice présidence, mais sa santé décline. Elle meurt à 33 ans d'un cancer fulgurant du col de l'utérus. Son cadavre a été embaumé et exposé dans la centrale CGT, puis enlevé et dissimulé pendant 16 ans. À cette suite, elle a pu rejoindre sa dernière demeure, avec sa famille.
Il commence à se faire un peu tard, au final je n'ai pas mangé, je ne suis pas allée à la laverie car ça devient très urgent, je n'ai plus aucun sous vêtement propre, et ensuite on a un cours d'espagnol argentin avec le gars du maté et ensuite il y a une activité ce soir, mais on a perdu Dante et une autre fille dont je ne connais pas le nom. José et Jessica crèvent la dalle donc ils s'installent à une terrasse de resto, mais moi je n'ai vraiment pas envie de burger. Je veux des pâtes, simples. Rodrigo en a marre aussi, donc on rentre tous les deux après un long moment passé dans le métro car ça nécessite beaucoup de changements. Et puis je l'aime bien, il est marrant, mais à petites doses sinon il est fatigant. Arrivés à l'hostel, je vais d'abord déposer mon linge à la laverie, j'aurais préféré une libre service pour avoir de quoi me changer direct comme au Brésil mais il n'y a pas, ça ne sera prêt que demain midi, du coup ça me laisse le temps d'enfin prendre un vrai repas au lieu de grignottage, des pâtes avec du thon, à 17h30. Puis c'est l'heure de l'activité à 18 heures. Je vous jure, j'ai un agenda de ministre dans cette ville, je ne m'arrête pas, j'ai dû me faire un planning. Mauvaise surprise entre temps, ma carte Monabanq est bloquée, heureusement que j'ai l'autre.
Mafalda dans le métro Le cours est assez rigolo car on apprend du slang argentin, et surtout les origines de certaines expressions. Il y a des mots italiens très utilisés dans le langage courant comme Avanti, la gamba (et non pas la gambas) ... Des mots différents entre le Chili et l'Argentine qui peuvent faire des quiproquos, comme "mal" qui est négatif au Chili mais les jeunes d'ici l'utiisent dans un sens positif, un peu comme nous avec le mot "terrible". Ah, et ils ont du verlan ! ispa, la yeca, el tordo. Et une expression un peu similaire à notre "les cordonniers sont les plus mal chaussés" : en casa de herrero, cuchilla de palo. Dans la maison d'un forgeron, couteau de bois. Et l'expression "Pipi Cucu", le gars me demande si je connais, je suis un peu étonnée qu'ils disent cucu et pas caca, mais du coup j'explique le sens scato. Et bien, rien à voir. Ça vient d'un boxer argentin dont je ne me souviens plus du nom, qui est allé à Paris, a gagné un trophée et on lui demande de dire "merci beaucoup" en français. Au moment de le dire devant tout le monde, comme il n'avait rien compris il dit "pipi cucu", et voilà. Ils ont aussi l'équivalent de "ça me casse les couilles" quasiment traduit. Et deux derniers pour la route, "boludo" assez connu qui veut dire "t'es con" mais dans le sens sympa du terme, à ne pas confondre avec peloudo qui veut aussi dire con, mais méchamment. Et le fameux "Che", qui est à la fois une interjection, qui veut dire "qué/quel" (che boludo!), et qui sert aussi à désigner des gens. Intraduisible.
L'atelier est fini, maintenant nous partons avec Dante voir le groupe la Bomba de Tiempo, qui font des percussions dans un ancien hangar. C'est tonique, c'est un peu style Tambours du Bronx, ça donne envie de danser. On peut boire des coups, et j'essaye d'éviter la bière le plus possible donc je demande s'il y a du vin rouge. Oui, il y en a en canette. ... en CANETTE. Il est bien nommé, Blasfemia. Mon dieu, je vais me faire tuer ou exiler de la France. Mais on va tester, parce qu'on est là pour de nouvelles expériences, même si celle-ci est peut être encore plus flippante que le deltaplane. Bon en vrai, je dois dire que ce n'est pas si mauvais, c'est un bon petit Malbec/Syrah. Le goût n'est pas horrible, j'ai eu bien pire durant les ferias et autres fêtes de village, franchement. Et 260mL pour un prix imbattable de 200 pesos, je dis oui!
Nous finissons la soirée dans un club qui s'appelle ... Le Jean Jaurès. Un club de reggaeton. C'est sympa de danser, mais même s'il y a moins de twerks intempestifs, c'est moins rigolo que les soirées au Brésil où les gens dansent comme s'ils faisaient des chorégraphies. Là, on est sur une ambiance un peu plus occidentale. Le Brésil me manque un peu, comme sa bouffe d'ailleurs. On rentre vers 2 heures du matin.
Jour 5
Une matinée bloquée pour reposer un peu les jambes et les genoux, et de toute manière, je suis bloquée jusqu'à midi à cause de la lessive. Je ne peux décemment pas passer toute la journée à l'extérieur sans culotte. Pour aujourd'hui, j'avais deux choix : soit prendre le ferry et aller à Colonia de Sacramento en Uruguay en traversant le Rio de la Plata mais en payant 80 dollars, soit prendre le bus et aller dans la pampa à deux heures de là, dans une petite ville nommée Areco où on peut faire du cheval mais c'est aussi un peu cher, mais le bus l'est moins. Je choisis finalement la seconde option, car je me dis que quitte à être en Argentine, autant expérimenter autre chose que Buenos Aires qui est au reste du pays ce que Paris est à la France. Ça ne sera pas la pampa "pampa" comme ailleurs, là où il n'y a rien sur des centaines de kilomètres, régions qui sont la hantise des joueurs de Geoguessr, mais quand même. À la base, ça veut dire juste campagne. Donc, pampa it is. Après avoir mangé de la viande achetée en boucherie et du maïs, passé une tenue décente grâce à mes culottes et chaussettes propres, je m'active pour aller choper le bus qui est à 13 heures. C'est un peu serré quand même car il faut aller au terminal de bus de Retiro. Donc, je tape un petit footing jusqu'à la station de métro, pour l'attraper pile à temps. Dix minutes de gagnées ! Dix minutes assez cruciales d'ailleurs. Car c'est le temps qu'il faut ensuite pour atteindre le terminal de bus. Bon, au final je suis à l'heure, j'avais une petite incertitude. Il part un peu en retard, comme d'habitude, il n'y a que les métros qui sont à l'heure, plus ou moins. Même les fwt ne le sont pas forcément. Mais il est confortable, par contre il n'y a de la wifi nulle part, c'est un scandale. Je me suis mal habituée au Brésil.
À la sortie de Buenos Aires, le paysage n'est pour le moment pas très passionnant. Des aires urbaines, puis la fameuse campagne, mais qui a des airs européens avec ses prairies vertes. J'espère que je ne vais pas être déçue, Areco est censée être le berceau de la culture gaucho ! Mais en nous approchant, les champs changent un peu, on peut voir des troupeaux de vaches, des chevaux, des moulins à hélice, des tracteurs ... Voilà, c'est ça qu'on veut ! Il n'y a même pas de terminal à Areco. Le bus nous dépose à une station service en bord de route, et s'en repart pour un long, long trajet vers Mendoza.
Ah, et j'ai mal anticipé mon coup: j'ai oublié de télécharger la map d'Areco, qui n'est pas la même que celle de Buenos Aires. Et ici non plus, pas de wifi. Heureusement, comme j'ai regardé sur Google maps hier, je me souviens sommairement de comment la ville est fichue. Et elle est toute petite donc ça devrait le faire. Non parce que là, je me sens bien paumée au milieu de nulle part, quand même ! Allez, on se met en route ... Je tombe sur quelqu'un et il m'indique le centre ville, en tout cas la rue principale. L'architecture est plus authentique qu'à Buenos Aires, bien sûr. C'est très tranquille mais surtout il fait un temps magnifique, ensoleillé et plus de 20 degrés. J'arrive sur la place principale, c'est très mignon et paisible, je suis contente de découvrir cet endroit, même si c'est vide j'ai un très bon feeling. Mon corps non, je me sens un peu en hypoglycémie, mais il n'y a pas grand chose d'ouvert. Je trouve une pâtisserie qui fait des alfajores, des espèces de gâteaux comme des macarons fourrés au dulce de leche. C'est pas mal, mais c'est évidemment bien sucré.
J'arrive au bord de la rivière, et c'est là que ça devient plus sympa. En traversant le vieux pont historique, on se retrouve dans une partie qui fait beaucoup plus western! Il y a des enclos pour les chevaux, les vaches, les chèvres, les moutons ... Le tout sous une belle lumière dorée, c'est génial ! Exactement ce que j'espérais ! Je me promène un peu le long de la route en terre, pour faire plein de photos et admirer les animaux et les bâtiments. Malheureusement, le musée de la culture gaucho est fermé les lundis et mardis, dommage car ça aurait été sympa. Je me promène un peu dans les rues de ce côté de la ville, mais je manque de me faire agresser deux trois fois par des chiens. Par un veau, aussi. Enfin non, pas vraiment, en fait il voulait des gratouilles sur la tête.
Je suis ravie, mais l'heure tourne. Enfin, je dis ça, mais ça m'étonnerait que le bus soit à l'heure, surtout s'il arrive d'aussi loin que Mendoza dans l'autre sens. Mais bon, on ne sait jamais. Je repars donc en sens inverse, et sur mon chemin je m'arrête dans une galerie dédiée à l'artiste Gasparini, peintre gaucho.
J'arrive au point de rendez-vous en avance. Donc, je refais un petit tour en bord de route pour revoir un peu de campagne et de chevaux, et je reviens vers 18h35. Allez, c'est parti pour une attente interminable, motivons nous. Mais en fait, surprise : le bus arrive même en avance de trois minutes. Comment est-ce possible ! Ben j'ai bien fait de m'activer un peu !
De retour sur Buenos Aires, j'ai faim, et on m'a dit qu'il fallait tester les pizzas, quand même. De toute manière c'est ce que je fais toujours, dans n'importe quel pays: tester une pizza. Même en Asie. On n'y croirait pas, mais ça permet de constater les différences culturelles ! Et là je tombe sur une pizzeria qui se proclame "la meilleure du centre de BsAs". Probablement pas la meilleure de la ville donc, mais apparemment elle a vraiment été primée, et ils disent faire des recettes d'ancêtres gênois. Bon, c'est pas napolitain mais c'est déjà ça. Elles sont chères et il y a 500 pesos de différence entre une petite et une grande, mais je peux emporter le reste, alors voyons grand ... Par contre par erreur je prends avec des poivrons. Et la pizza est IMMENSE. J'en aurai pour trois repas. Par contre il y a beaucoup trop de fromage, la pâte n'est pas super ... C'est un peu la déception. Heureusement que je peux l'emporter car je ne peux manger que deux parts tellement elle est grosse. Dans le sac, j'ai l'impression de porter deux kilos de pizza ! De retour à l'hostel, je vais discuter avec Rodrigo et d'autres gens, Paul et Pascual, je leur raconte ma journée, mais je suis crevée et j'ai envie d'être en forme pour demain car l'emploi du temps va être encore pas mal.
Jour 6
Le dernier jour plein au même endroit ... Ça fait bizarre de se dire que dans deux jours à peine, je serai en route pour la France. Et que demain, je repars sur Sao Paulo. Je me suis trompée d'une journée en faisant mon planning, je pensais repartir le 17 mais c'est en fait le jour où j'atterris à Madrid. Donc ce sera une escale d'une nuit là bas.
Bon, il va quand même falloir manger cette foutue pizza ... En plus, je l'ai sous la main, pas besoin d'aller racheter des choses. J'enlève les poivrons et une bonne partie du fromage mais j'en laisse un peu, et réchauffé c'est tout de suite plus mangeable. Et puis à 13 heures, avec un grand groupe de gens de l'hostel partons vers le quartier de la Boca, menés par Dante comme d'habitude. C'est un assez long trajet à pied, 30 minutes environ, et nous arrivons devant le stade des Bocas Juniors, qui ont gagné contre River Plate et se classent maintenant cinquièmes de la ligue 1, enfin équivalent. Tout est aux couleurs de l'équipe, jaune et bleu foncé, on dirait Ikea.
Je suis plus intéressée par les bâtiments colorés à moitié en tôle, typique du quartier. C'est un quartier qui était pauvre, où vivaient tous les dockers. Maintenant, c'est un incontournable de Buenos Aires, car on y trouve le Caminito, une rue avec des maisons colorées imaginée par un artiste, Benito Quinquela Martin, pour redynamiser le quartier. Il n'y en avait que deux au départ mais maintenant, tout le monde a fait pareil.
Mais qui dit grand groupe, dit s'attendre. Ça prend des plombes dans une boutique de souvenirs, et ensuite tout le monde s'attable pour manger, mais moi je suis ok avec ma pizza qui était déjà assez grasse comme ça. Du coup, je vais faire un tour en attendant, prendre des photos, des vidéos ... Avec l'espoir après d'avoir le temps d'aller au musée d'art moderne qui est gratuit aujourd'hui, peut être faire un tour à Costanera Sur, être rentrée pour 19 heures pour le cours de tango, aller au resto et faire la soirée karaoké ensuite. Agenda de MINISTRE vous dis-je.
La plupart des bâtiments sont des anciens conventillos comme à San Telmo, reconvertis en boutiques de souvenirs. C'est un style coloré et bariolé, original, assez particulier. La foule s'amasse, prenant des photos, assistant à une démonstration de tango, sous le regard des personnages souriants qui depuis les balcons scrutent tout le raffut de la rue. On peut y voir Maradona, et aussi le pape François qui rappelons le, est argentin. Probablement d'autres célébrités du pays que je ne connais pas !
Je rejoins le groupe pour refaire un rapide passage dans la rue, et nous allons ensemble visiter le musée Benito Quinquela Martin. On peut y voir certains de ses tableaux, et notamment qu'il avait l'air un peu obsédé par le feu car on n'y trouve pas moins de six peintures représentant l'incendie de la Boca, ou des forges, sur plusieurs années différentes dont deux en 1940. Sans relation, on y trouve aussi une collection de figures de proues assez flippantes.
Je pense que l'on risque d'attendre encore trois plombes. Cette fois-ci je prends vraiment congé, je monte dans le bus pour aller vers le musée mais je rate l'arrêt. Enfin, ce n'est pas que je le rate, c'est que je pensais qu'il y en aurait un plus près. Et je suis donc un peu plus proche de l'entrée de la réserve, mais il est 16h30. Que faire ? Maps.me me donne un trajet de 20 minutes à pied. Et si je n'aime pas trop ? Et si je rate un truc génial ? Bon, on va tenter un truc: y aller en courant. Enfin, en footing hein, pas un sprint. Il y a de quoi me faire gagner 20 minutes aller-retour. Et puis, ça me fera éliminer la pizza ! C'est ainsi que je traverse Puerto Madero et ses buildings, avec les autres joggeurs.
Alors, qu'en est-il de cette réserve ? Et bien ... Ouais, ça doit être agréable, mais là bof. En fait, j'ai vu mieux comme paysage. Et puis cela va impliquer de faire tout un tour entier car il n'y a qu'un accès. Après c'est sympa pour le principe, ça permet à plein d'oiseaux de venir nicher, et des papillons, tout ça tout ça .. Mais ça ne me motive pas. Même pas il y a des singes, il fait trop frais en hiver. Je n'en aurai pas du tout vu cette année ! Tant pis.
Allez, je me casse. En courant, en sens inverse, et je vais jusqu'au Musée d'Art Moderne pour voir des choses bizarres. Difficile d'expliquer les expositions, mais pour une entrée gratuite, ça m'intéresse vraiment. Je commence à apprécier ce type d'oeuvres, même si évidemment plus c'est bizarre, mieux c'est.
Le musée n'est pas si grand, donc au final je finis dans les temps pour rentrer me poser un peu avant le tango, à 19 heures. Trois garçons et cinq filles, mais le prof vient danser aussi. Avec sa partenaire, ils nous montrent les pas basiques, très basiques, le plus dur va être de le faire avec un partenaire. Paul galère, Dante est trop massif, l'autre gars veut surtout danser avec sa copine, donc au final je m'éclate plus avec le prof. Je redoutais un peu le rapprochement où on doit se serrer l'un contre l'autre, mais en fait ce n'est pas trop gênant. Enfin, avec le prof. Car Paul est gêné, lui, et on rentre dans les autres, et Dante me marche dessus. Mais bon, on n'est pas là pour gagner des concours ! Un petit truc qui se passe dans les milongas: on ne vient pas demander à quelqu'un de danser, mais on se regarde, on doit faire un contact visuel et ensuite ne plus rien dire. C'est un peu dur parce que je m'amuse à fixer Paul comme une psychopathe et ça nous fait rire. Et en vrai, si on ne veut pas du partenaire qui nous fixe, on regarde ailleurs jusqu'à ce qu'il s'en aille. "Maybe if I don't look at him he will go away". C'est censé être moins gênant. Rodrigo ne participe pas au cours parce qu'il préfère être dehors mais je me demande ce que ça aurait donné. Probablement n'importe quoi, quoique !
En parlant de Rodrigo, il est chaud pour le karaoké, par contre. À la fin du cours, je vais d'abord manger dans une parilla car j'estime ne pas avoir assez mangé de viande argentine ici, donc ce soir entrecôte et purée de patates et butternut, plutôt light. Ça me coûte encore une blinde mais ici au moins le service est compris dans le prix du plat, pas de surprises comme au Brésil. Bon, et du coup ce karaoké, Rodrigo le fait quasiment tout seul car il y a peu de monde motivé mais ça c'était avant que j'arrive, avec ma voix qui va mieux. Enfin, presque, elle n'était pas prête à forcer sur Baby One More Time. Elle se casse en plein milieu de la chanson, mais surprise, en fait ça me donne une voix rauque assez sexy. Britney Spears en version rock, jamais été aussi satisfaite de ma prestation ! Je devrais faire des karaokés uniquement quand je suis malade. Rodrigo met Bohemian Rhapsody mais m'abandonne dès le début de la chanson, et là vraiment ma gorge est trop morte, heureusement il y a une autre fille qui vient chanter avec moi. On passe une bonne soirée mais on rencontre un type vraiment bizarre, gentil mais bon, jusqu'au moment où quand il s'agit de me demander mon âge et que je dis la trentaine, il me demande si mes oeufs sont fertiles, d'un ton ultra sérieux. J'essaye de ne pas trop rigoler devant lui mais j'en fais part à Rodrigo via Whatsapp. Wahou. Mais quoi! Enfin quand même, c'est drôle. On finit une fois de plus au Gibraltar, trois fois dans la même semaine pour moi, ce qui est plus qu'au Shannon. Mais bien que le Malbec m'aide à parler espagnol, c'est bien plus fatigant pour moi que de faire une soirée en anglais, et au bout d'un moment je décroche. J'aurais eu envie d'aller danser dans un nightclub mais on ne va encore trouver que du reggaeton. Et puis ça ne vaut pas le Brésil ! Cela dit, dernière soirée sympa en Argentine.