Les vendanges terminées, le compte renfloué, il est temps pour nous de prendre la route vers le Yukon, tout là haut au Nord du Canada, juste à côté de l'Alaska. Mais avant d'entreprendre ces 2500 km, il faut que l'on donne un peu d'amour à notre fidèle Woodstruck! On aimerait pas tomber en panne, en plein milieu de nulle part alors que l'hiver point le bout de son nez. On ne croyait pas si bien dire.....
Extrait d’une discussion dans un garage avec une vendeuse :
Autant dire que ça commence bien ! c’est dingue , il faut vraiment avoir une patate chaude dans la bouche pour prononcer ce mot. On se sent un peu con mais Mimi fini par l’écrire sur un bout de papier ce qui fera bien rire notre interlocutrice. Mais de toute façon c’est trop cher pour notre budget nous irons donc au 'pick and pull’ (la casse où l'on récupère les pièces nous mêmes sur les épaves). Nous trouverons ce que nous cherchions ainsi qu'un moteur pour les essuies glaces.
Pendant les vendanges, nous faisions nos lessives dans une laverie qui était vraiment peu chère, chauffée et dont les sécheuses étaient gratuites (pratique les jours de pluies car le pire quand tu vis dans 6m2, c’est la pluie, comme vous l’avez surement compris après le séjour d’Antoine). Lors de notre dernière brassée, nous rencontrons un couple vivant dans un bus et cultivant un bout de terrain pour subvenir a leurs besoins. Isa qui est québecoise nous propose de venir dans son campement, au moins nous aurons de l’électricité et une place pour préparer Woody au périple. Changement d’alternateur, vidanges de l’huile moteur et de l’huile de transmission, changement des ampoules extérieures, vérifications des ailes opposées, armement du toboggan et attention au décollage !!! En prévision des nuits fraîches, Mimi coudra des rideaux épais pour isoler un peu plus la partie habitacle du reste du camion. Pour remercier nos bienfaiteurs, nous les aiderons a ramasser et laver environ 800kg de carottes ; une matinée a 4.
Le départ est imminent, réunion autour d’une pizza pour préparer le trajet. Il faudra faire 500km vers l’ouest , 2000 vers le nord et de nouveau 250 vers l'ouest pour atteindre Whitehorse, la capitale du Yukon. On prend conscience qu'il y a un passage de 500km au Nord de la Colombie Britannique où les stations essence se feront rare et où il n'y aura pas de réseau téléphonique. Mais bof, se serait bien plate qu’il nous arrive une tuile juste a cet endroit !!
On décide de faire la route en 6 étapes de 400 km, d’environ 6h30 chacune. La van est passée à l'inspection, la batterie est neuve, l'alternateur changé, les pneus gonflés, tout est parfait, winter is coming ! ( l'hiver arrive )
Nous quittons la vallée d’Okanaghan sous la neige, esquivant les premiers camions pognés dans une petite tempête sur les hauteurs de Meriit. Nous privilégions les nuits sur les parkings urbains pour rester proches de la civilisation en cas de pépins. Plus nous nous dirigeons vers le nord, plus il fait froid. Fini les petites gelées, bonjour le froid qui pique. Environ 6 degrés la journée pour -8 la nuit.
En roulant nous réfléchissons a la meilleure manière de se maintenir au chaud. Le chauffage intermittent qui vient du moteur ne peut remplir suffisament l’espace d’air chaud. La température à l'intérieur de la van ne dépasse pas les12°C. On conduit avec nos vestes d'hiver, bonnet et gants! Bon, ça, ça va encore, mais les nuits sont fraîches...On commence a penser au sac de grains que l’on réchauffe au micro-ondes pour mettre dans les couvertures mais ça ne sera pas suffisant...puis on a pas de micro-ondes! Peut-être les billes d’argile que l’on met dans les pots de fleur pour garder l’humidité peuvent fonctionner avec la chaleur? Les briques réfractaires le font, comme pour les cheminées ou les barbecues, il faut creuser par là! On en achète 2 à Prince George pour tester. On a l'impression d'avoir fait un bon dans le passé, mais ça marche!
La route est magnifique, on roule dans une vallée pendant des jours entiers, avec toujours cette même lumière, pas de soleil, une couverture nuageuse basse qui écrase encore un peu plus l’horizon. Comme d’habitude, a chaque arrêt notre dose de petits bricolages histoire de finir l’aménagement du van. Mimi s’occupe de fabriquer des caches pour les fenêtres à l’aide de papier bulle isolant ce qui empêche le froid de rentrer. Quand a moi, je peaufine les étagères de la cuisine ainsi que des protections pour que les choses ne tombent pas a cause du tangage .
Déjà 3 jours d'asphalte et le camion tient le coup, toujours des petits problèmes de transmissions mais pour le reste tout est bon !! Nous voila dans le vrai NORD, moins de villes, une pompe a essence tout les 250km, et les routes ne sont plus de neige mais de glace. A la tombée de la nuit nous croisons le regard vide d’une femelle moose ( Orignal) dans les phares du truck, on est stupéfait par la grosseur de l’animal sus nommé. C’est plus gros qu’un cheval !!
On s’arrête sur une aire pour changer les pneus arrières par des pneus cloutés, la sécurité avant tout. Petit problème, une fois que le camion est sur cale, et les roues descendues de la galerie nous ne retrouvons plus de démonte pneus !! A force de vider le véhicule, nous oublions quelques bouts de nous, le hamac ( qui nous était fidèle depuis tant et tant d’années) et là, la clef en étoiles qui doit se trouver chez Robert!! C’est pas très grave, nous avons réussi a rouler sans jusque là, nous pouvons attendre la prochaine ville pour en racheter une. C'est à dire dans....500km! C’est Whitehorse la prochaine grosse bourgade, on devrait y être dans une journée et demie.
Le lendemain, nous sommes au plein coeur du no man’s land, environ 2h que l'on a plus de réseau téléphonique et que l'on croise des villages fantômes. Bell 2, c’est le nom de la pompe a essence et du RV park où l’on pensait pouvoir prendre une douche après 4 jours de route mais le site est fermé pour la saison! Il est 16h, la nuit noire est dans 2 heures, on fait le plein ( le plus cher jusqu'à présent à1.60$/L ) et on reprend le chemin.
L'hiver est enfin là, un paysage monochrome qui nous avait tant manqué, tout est blanc, la route, les arbres, la rivière. Nous la longeons depuis 6 km quand l’aiguille de la jauge a essence commence a danser comme un kauzac jusqu'à chuter soudainement. Plus de contact, donc plus de direction assistée, plus de chauffage, plus de phare, PLUS RIEN!! Nous échangeons un regard perplexe, voir apeuré...Deuxième essai mais rien n'y fait ! Il y a bien de la batterie mais il tousse sec. Est-ce que je me serais trompé de carburant ? nan, c’est sur que nan !! La pompe a essence ?! On décide de ne plus essayer de le démarrer pour éviter de le noyer. On vérifie les fusibles, tout est bon, on commence sérieusement a soupçonner la pompe a essence.
Sécurité avant tout, la nuit tombe vite, on balise la route avec nos triangles oranges et une voiture s’arrête a notre hauteur, même pas 5 minutes après que nous soyons tombés en panne.
"What’s happen guys ? ( Que se passe t'il mon gars? )"
"The van stop just like that ! the fuel tank is full so i think it’s the fuel pump, we have already chek the fuses and it’s good ! ( Le van vient de s'arrêter juste comme ça! Le tank a essence est plein donc on pense que c'est la pompe, on a déja vérifié les fusibles et tout est bon! )"
Le gars se jette sous le van, il fout 4 grands coups de poings dans le réservoir et me cri de mettre le contact, sans démarrer. On refait le mouvement 2 ou 3 fois avec quelques bourrasques de plus dans le tank mais en vain ! En se relevant, il nous dit qu’il est garagiste un peu plus loin dans le nord, que c’est bien la pompe a fuel mais lui ne peut rien faire ( car il va dans l’autre sens ). Au même moment, une déneigeuse s’arrête avec un jeune homme au volant . Le premier mec lui explique notre problème et le conducteur de l'engin nous dit :
"I'm back in 45 min and we will see. (Je suis de retour dans 45 min)"
Le temps de nous préparer, toujours -10°c dehors, on prend que des choses utiles! Téléphone, carte de crédit et on abandonne Woody sur le bord de la route. A son retour il accepte de nous prendre tous les deux dans sa machine. La nuit tombe a une vitesse folle ! Juste le temps de faire 15 bornes et c’est la nuit noire. Il nous emmène avec lui au dépôt ou sont stockées les autres machines, la réserve d’essence et les tas de sels (5%), de graviers (45%) et de sables (50%) qui composent le mélange qu’il dépose sur la route après le passage de la lame. Nous nous dirigeons vers le bureau où il appellera 1 premier dépanneur qui ne pourra pas nous aider, quand au deuxième, qui est a 250 km d'ici, sa seule question sera: " Do you have a credit card? "Est-ce que vous avez une carte de crédit ?"
Une fois la transaction validée, le jeune communard nous installe dans leur salle de repos, un bâtiment en préfabriqué pour les gars qui travaillent la semaine car tout le monde ici habite a plus de 300km. Environ 3h plus tard les gyrophares dansent sous les fenêtres de la salle télé où nous nous étions assoupis . Willy sera le nom de notre preux chevalier, 50 ans, 110kg et une super gouaille illuminé par un sourire sans dents !On charge la bête, non sans mal.
Nous démarrons et il ne me faut pas 3 km pour me retrouver dans les bras de Morphée. Lorsque j’ouvre les yeux, nous sommes arrivés au garage, il est minuit, il ne reste plus qu’à descendre Woodstruck. Plus facile qu’à l’aller, car en levant le pont, une durite a pétée faisant glisser le plateau un peu plus vite que prévu en arrière et a planté notre attelage dans le sol. Un bon coup d’accélérateur pour dégager son camion et nous voila stationner pour la nuit, devant une énorme flaque de fluide de pression vert fluo . Le conducteur nous prévient qu’on ne le reverra sûrement pas car il ne travaille pas avant jeudi et puisque c’est le week-end du 11 novembre, il se peut que nous ne croisions pas le patron avant lundi. Et encore ce n'est pas sur car le 11 tombe un dimanche par conséquence le jour férié passe au lundi (pas con les gars !!) Bref c’est pas très grave, nous sommes en vie, dans un lieu qui a l’air sécuritaire où on peut dormir tranquillement et récupérer de nos émotions !
Réveil a la fraiche, 8° en dessous de zéro dans le camion . L' étape la plus ardue est de sortir du lit. L’ enfilage de pantalon cartonné par la froideur est un moyen efficace pour drainer le sang . Vite, préparer le café et le thé pour amener un peu de chaleur dans notre petite grotte roulante . Coté positif , l’espace étant petit , il ne faut pas longtemps pour arriver a 20°… au plafond, car le sol en parquet flottant est frais mon ami, deux paires de chaussettes et semelle obligatoire pour ne pas perdre un orteil !! On tient environ 2h avec cette première "flambée" , ensuite nous faisons des roulements avec nos 2 pierres réfractaires. Quinze minutes sur le propane pour les faire monter en température, on déplace ensuite la pierre sur une planche de bois que nous posons sur le sol entre nous , et nous étendons une couverture sur nos genoux pour faire une cloche de chaleur. On tient une bonne heure et demi par pierre. L’inconvénient de bruler du propane c’est l’humidité que cela dégage . On peut faire 2 roulements maximum avant que l’alarme a monoxyde de carbone ne se déclenche et nous fasse sortir un peu du camion. Au retour, on se fait a manger pour remonter la température et avoir quelque chose de chaud a se mettre dans le corps. Maintenant reste a savoir si le gaz va tenir le coup, on l'utilise depuis 4 mois.
Dehors c’est lunaire , gris et les nuages sont bas. Nous sommes encerclés par des carcasses de voitures, de camions et de remorques. Que de la tôle froissée, compactée, on se croirait dans un tableau en 3d de Picasso . Quelques préfabriqués sans vitres qui servent d’entrepôts a pneus se trouvent parmi les vestiges automobiles. Voici ce qui nous fait office de paysage.
On préfère rester dedans a bouquiner pour faire passer le temps. Pas âmes qui vivent dans le secteur. Pas de voisins, pas de voitures qui passent, juste nous, le silence et le froid. La journée se passe plus vite que prévu grâce aux tirades de Jean d’Ormesson ( d’un esprit venu d’ailleurs a un esprit de la terre ) :
-Quel cauchemar, me dit-il, que cette vie d’illusion ou votre seule liberté est d’explorer une prison dont les règles vous échappent ! et le temps ne s’arrête jamais ?
-il ne s’arrête jamais sur la vie qui n’existe que dans le temps et qui est liée a lui par des liens indissolubles et par son être même. Mais il s’arrête sur chacun de nous. …
Tout ça pour vous dire que les pages ne se tournent pas vite !!
Dimanche 11, 2ème journée depuis la panne. Je me réveille vers 7h, il fait encore nuit mais une idée est dans ma tête et m’oblige a me lever. En cherchant un coin idéal pour faire nos besoins (on a lu « comment chier dans les bois ?») , je fais le tour des épaves comme ça , juste pour voir , un rêve de gamins que de pouvoir se balader dans un cimetière comme celui la. La première visite se fait à tâtons car ces voitures sont autant de caches pour les animaux sauvages. N’oublions pas que la densité de population est de 0.05h/km². On pourrait tomber sur des renards, loups, carcajous ou, je ne l’espère pas, un cougar! Bon, beaucoup de traces mais pas de bestioles ! C’est d’enfer, il y a un school bus comme on aurait voulu avoir, quelques 4x4 et un mini van bien amoché. Avant d’aller plus en avant dans l’exploration, je vais refaire un p’tit café pour reprendre du chaud. Mimi est réveillée mais cachée sous les 4 couvertures. J’essaye d’allumer le gaz…rien . C’est la fin de tout espoir ! Isolés, sans eau (gelée), sans électricité, sans énergie . Y a pas a réfléchir 2 fois, foutu pour foutu, direction l' hotel a 4 km en bordure de route en face des pompes a essence. En gros, le centre et l’ensemble du village de Dease lake. On rempli le sac a dos avec quelques fringues, on prend tout ce qui est électrique a recharger et c'est parti, emmitouflés dans nos manteaux écharpes et bonnets. 40 min pour 4km, on est pas la pour cueillir des fleurs.
On arrive vers 10h , pour 170$ on a le droit a une chambre chauffée , lit queen , baignoire et wifi. On est comme des gamins devant une boutique de bonbons. Quand on ouvre la chambre, il fait chaud , un vrai chaud qui englobe toute la tète, les mains et au fur et a mesure qu’on s’épluche, on sent le réconfort pesant de la chaleur, on a l’impression d’être englobés dans du caramel tiède. Pas 5 minutes qu’on est la , on ne voit déjà plus le sol recouvert par nos affaires. C’est bon , on est comme chez nous , c’est le chaos !! Je fais couler un bain pendant que mimi s’attèle au branchement et a la communication. Trois jours que l'on a pas donné de nouvelles a personnes, les mamans s'inquiètent et de plus nous aurions dû arriver hier chez nos nouveaux hôtes. C’est agréable de pouvoir se satisfaire de choses tellement simples qu’on en avait oublié l’existence !! Ce soir on cuisine pas, se sera bière chips et pizza . On s’aperçoit que c’est super agréable de prendre du repos pendant des vacances 😀 Nous réalisons que nous dormons dans une vraie chambre depuis notre départ de chez Josh et Connie , il y a 6 mois, et le fait d’en avoir conscience rajoute à la douceur et la magie de ce moment. On dormira comme des bûches! Mais....
Comme il faut une conclusion , nous libérons notre éphemère cocon
et partons vers l’horizon a la recherche du camion.
Myriam , de bonne heure levée ,
Se senti vite frustrée
car le wifi on lui a coupée ,
avant même de rendre les clés!
partie aigrie, direction notre logis.
Ce n’est qu’un détail ici , retournons a notre récit.
Lundi 12 , en arrivant au véhicule , on voit 2 personnes qui réparent le camion-plateau qui nous avait remorqué mais ils ne viennent pas nous voir. Après une heure Mimi craque , elle va à leur rencontre pour qu’il nous fasse au moins le plein de gaz, qu’on puisse vivre ou plutôt survivre je crois. Les gars lui précisent bien que c’est férié aujourd’hui donc il n’y aura pas de visite de leurs parts mais ils veulent bien nous faire le plein de propane. On s’empresse de redémarrer nos cycles de chauffage. On peut faire des potages, du thé, du café... Refait par la nuit passée, on se RE-endort comme des bûches.
Le lendemain, ça frappe au carreau. 7h. Le garagiste vient faire l’inspection de la panne. Enseveli sous son bonnet a l’effigie de son entreprise ’Charlie’s shop’ , il avait la carrure d’un demi de mêlée . Sa voix roque me renvoi directement au enregistrement d’Yves Mourousi .Les mains dans les poches de sa salopette , la clope au bec . Nous lui donnons toutes les infos dont nous disposons. Il fait 2 /3 manips et nous dit que le problème vient de la pompe a essence !!.... ha bon ?! pensai-je frappé d’étonnement !! Il s’en va dans son bureau et revient 30 min plus tard .
"All right guys !" J’ai commandé la pièce, mais elle vient de Vancouver ( zut si on avait su, on l’aurai prit avant de partir…) et je ne la recevrai pas avant… vendredi matin !!!
Même pas le temps de digérer l’information que nous lui expliquons que tout va bien malgré le froid mais le gros hic, c’est qu’on s’ennuie a mourir ici donc si il avait un peu de boulot pour nous, on ne serait pas contre. De plus, je lui signale que j’ai repéré quelques pièces qui pourrait m’intéresser sur les épaves abandonnées. Il me fait un signe du style – prends ce que tu veux je m’en câlisse ! Cool, les affaires reprennent. On est douchés, on a de quoi manger, et on a même une occupation. Le ciel se dégage, le compteur de bonne humeur frôle les 100%, une petite boule de stress vient de se dissoudre dans mon ventre. Muni de la caisse a outils, je pars dans notre casse privée héhéhé pour commencer mon marché. J’avais repéré un ventilateur 12v pour conducteur dans le bus et un auvent sur un van bien défoncé. En ouvrant difficilement les portes latérales , je m’aperçois que l’intérieur correspondrait presque aux dimensions du notre. Mais attends un peu !! c’est l’ même !! Truc de malade supersonic ! Je cours chercher Mimi tout excité. Ni une ni deux, nous voila à quatre pattes, tournevis entre nos mains mouflées. Tableau de bord, fusibles, lampes de rétroéclairage , plafonnier, joint de porte, poste radio , chauffe-eau, ventilateur, bottes de pluie fourrées, cache porte, rétroviseur... j’en passe et des meilleurs. La caverne d’Ali Babus ! Non mais, te rends tu compte , perdu au milieu de nulle part, on trouve le jumeau de Woody en plus classe mais aussi en plus amoché !
Bon, il faut avouer quand même qu’il y a de la merde partout, au sens propre, de la merde humaine du sol au plafond en passant par la moquette, les vitres et les rideaux. On comprend vite que cela est dû aux tonneaux que le véhicule a fait. Mais l’occasion est trop belle pour faire les difficiles. On rit de se dire qu’on est des manouches; on se réchauffe avec des cailloux, on chie dans la neige et tout est bon a récup !! En tout cas, cela nous a occupés toute la journée.
Charlie vient me chercher le mercredi a 8h pour lui prêter la main. Flag boy . Pour pouvoir remorquer les véhicules accidentés , il doit fermer les routes de chaque cotés , signalisation 150m en amont du crash puis tout les 50m pour arriver au flag boy qui armé d’une pancarte et d’un walky t’autorise a passer ou non. Le premier jour nous allons remorquer un véhicule a 200km de notre base. Je rigole en lui disant qu’avec 50km de plus, on arrivait a l’endroit où il m’avait remorqué 5 jours auparavant. On rigole , 3h de route , il y a un p’tit jeune a coté de moi qui commence a piquer du nez, Charlie qui conduisait me fait signe de pas bouger et d’un geste rapide et précis, agrippe la manche de mon collègue et la secoues tout en gueulant et faisant des vagues avec la dépanneuse. Le jeune a fait un bond sur son siège au point de frapper le pare-brise avec sa tête !! Les yeux lui sortaient des orbites, il lui fallu plusieurs minutes pour se remettre de ce coup la pendant que le farceur l’enguirlandait amicalement lui disant qu’il ne le payait pas a ronfler ( j’ai bien cru que j’allais mouiller ma culotte). On bloque la route, il charge le véhicule et on repart. Le tout en 20min. 6h de route pour 20 min de job. Et le lendemain il aura encore besoin de mes services , toutes les compagnies de remorquages sont overbooker .J’accepte a contre cœur puisque démonter l’autre van était une activité bien plus passionnante que se taper de la route mais bon. Le lendemain on fait 250 km et on passe devant l’endroit précis ou woody s’était stopper. Putain de karma! On est jeudi, on avait décidé de reprendre une nuit au motel avant de prendre la route demain après les réparations surtout que cette nuit là les températures devaient descendre a -16°C. Charlie s'arrête devant l’hôtel pourvu du néon ‘no vacancy’ (= complet) .Je pense a ma petite femme qui a du faire 4 km avec 20kg sur le dos pour se trouver face a ce panneau. Je la retrouve la mine boudeuse dans la van, mais Charlie aura pitié de nous et nous offrira un chauffage électrique pour un peu plus de confort. On le fait tourner a fond, 30 degrés là d'dans, c'est là fête, on a tellement chaud qu'on peut se permettre "une douchette" version toilette de chat en faisant fondre de la neige! Je crois que c'est a ce moment là que l'on a réalisé qu'on avait atteint le summum de la manoucherie . On fête joyeusement cette dernière soirée à Dease Lake, demain on reprend la route!
Vendredi on se réveille avec une petite boule au ventre... Et si c'était pas ça la panne, et si la pièce était pas bonne, et si on doit rester encore plus longtemps ici et si..... Mais non, tout s'est très bien passé, la réparation a été effectuée en 3h, on a même eu l'occasion de filer un coup de main au garagiste en l'aidant a vider le réservoir d'essence. Il est 11h45, quand le doux ronronnement de Woodstruck résonne de nouveau dans nos oreilles. Soulagement immédiat et excitation de continuer le périple. Mais avant cela, un petit tour par la caisse ouch! Mais pas rancuniers on offrira même un verre de Ricard à nos "sauveteurs".
Tout est bien qui fini bien, cette expérience nous a permis de nous rendre compte que rien n'est jamais perdu. Allégés de 2000$ d'un côté, mais le coffre rempli de pièces pour finir l'aménagement de Woody. Je pense même qu'on lui doit de l'argent avec tout ce que l'on a récupéré! mais chuuuuut. Ce soir on dort au Yukon et ça, ça n'a pas de prix! Nous avons atteint la frontière tant attendu, 250 km au nord sans AUCUN soucis. Un dernier arrêt pour la nuit la plus froide: -17°C a Watson Lake. Le chauffage de Charlie nous a bien manqué. Samedi 17 novembre, après un arrêt déjeuner à Teslin, nous faisons encore 400km jusqu' à Whitehorse sous un beau ciel bleu. On croisera la route d'un renard, et d'un troupeau de caribous, pas de doute, on est bien dans le Grand Nord!
WE DID IT - ON L'A FAIT