Départ 11 Août 2023
2h,3h,5h,6h30...La nuit qui précède le départ est ma tourmente. Une tempête d'incertitude, un ouragan de doute et me voilà projetée dans l'avion, quelques cohérences cardiaques plus tard,merci Shirine.
Le voyage est un accélérateur de conscience, une machine à vieillir prématurément si tant est que la sédentarité et son inertie soit de nature humaine.
Il est un temps entre le passé et le futur; l'ultra présent, factuel et inébranlable; les petites choses à faire pour arriver à bon port. Je me questionne sur l'aisance et les repères que j'ai développée au travers du déracinement ces 10 dernières années.
7h30, ma place de parking est loin au port de Thonon, le train que j'avais prévu de prendre n'existe pas, je ne m'inquiète pas: j'irai à la gare de Genève par le premier train et aviserai à ce moment là. 9h30 Cornavin, finalement le quai d'en face annonce l'aéroport cinq minutes plus tard, je ne réfléchis plus, je monte. Mon téléphone ne marche pas et je n'ai qu'un vague souvenir du terminus assigné. Je suis le flot des passagers et j'arrive exactement à l'endroit où l'on m'attend.
Ma place est là ,parmis ces gens qui transitent.Sans famille,sans histoire,sans territoire, en mouvement, volatile et rien d'autre.
L'amabilité rassurante du personnel et les voyageurs avec leurs enfants m'encourage à me détendre, à me dire que les choses vont aller,que je ne suis pas seule.Tout le monde ici rentre ou part, je m'adonne à quelques devinettes en regardant leurs silhouettes défilés sous mes yeux tandis que je nourris mon corps d'ultime sandwich européen.
10h50 embarquement, chaques vagues de contrariétés des dernieres semaines accrochent mon estomac de nausées. Je dois aller devant, mais pas trop ! La fatigue projetée de ce voyage me terrifie, les restent du brun-out sont bien là et je note pour moi-même qu'il y a encore une chose non réglée.
Heure incertaine , c'est si bruyant un avion, c'est tellement dangereux de traverser l'Atlantique. Turbulences, je regarde un film pour me détendre,je choisi celui avec Colin Pharell qui parle d'une amitié qui s'arrête de manière brutale et incompréhensible par choix, ça vous étonne ? Je pars avec mes blessures,mes pertes et mes fantômes, et sans bagages en soute!
Très peu de français dans ce cargo plein !
Un couple de juifs pas loin de moi, elle avec sa toge blanche et sa robe noire,blonde aux yeux bleu,magnifique.Lui, beau parce que jeune, un livre à la main et le regard dans le vide depuis déjà 4h. Vivent-ils avec sobriété? Sont-ils préservé du capitalisme seulement le vendredi ? Ils ont l'air de ceux qui vivent "à côté", sans excès et dans une tourmente simple. J'envie parfois les spirituels et religieux de naissance,ils semblent préservé de la perdition.
Heure obsolète, nous voici survolant le Canada, le continent est bien là. N'a de soulagement que celui qui sait ce que veux dire transatlantique.Mon voisin, un français, ne me parle que d'argent et de magouilles et commençant chaques début de phrases par 'je vais être honnête avec toi'. Sera t'il un jour confronté, comme je le suis parfois quant mon comportement déborde, au cynisme de la vie? Comprendra t'il ?
Je songe déjà que c'est mon dernier voyage, que si tout ce passe bien , je ne serai plus capable de faire tout cela après, que c'est étrangement violent et déconnecté de prendre l'avion et de changer de continent.
Il est bientôt 20h ou plutôt 4h du matin dans mon organisme encore europeaniser.Ce deuxième avion est un supplice d'inconfort et tout comme à chaque fois que je prends la version cheap de la vie, je paye ma tolérance au place de merde. Si j'avais payé encore 10euros de moins je pense que je serai dans les toilettes!
Alex est là, nous partons en métro puis en ferry, sa maison est une cabane dans les bois.
Il y a des instruments de musique partout.Nous sommes contents de nous retrouver, je sens les embruns maritimes.
Dormir, il me faut dormir.Il est minuit, soit 7h chez vous