Carnet de voyage

Seattle

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Dernière étape postée il y a 106 jours
Par Melta
Ici et maintenant
Août 2023
10 jours
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Publié le 12 août 2023

Départ 11 Août 2023

2h,3h,5h,6h30...La nuit qui précède le départ est ma tourmente. Une tempête d'incertitude, un ouragan de doute et me voilà projetée dans l'avion, quelques cohérences cardiaques plus tard,merci Shirine.

Le voyage est un accélérateur de conscience, une machine à vieillir prématurément si tant est que la sédentarité et son inertie soit de nature humaine.

Il est un temps entre le passé et le futur; l'ultra présent, factuel et inébranlable; les petites choses à faire pour arriver à bon port. Je me questionne sur l'aisance et les repères que j'ai développée au travers du déracinement ces 10 dernières années.

7h30, ma place de parking est loin au port de Thonon, le train que j'avais prévu de prendre n'existe pas, je ne m'inquiète pas: j'irai à la gare de Genève par le premier train et aviserai à ce moment là. 9h30 Cornavin, finalement le quai d'en face annonce l'aéroport cinq minutes plus tard, je ne réfléchis plus, je monte. Mon téléphone ne marche pas et je n'ai qu'un vague souvenir du terminus assigné. Je suis le flot des passagers et j'arrive exactement à l'endroit où l'on m'attend.

Ma place est là ,parmis ces gens qui transitent.Sans famille,sans histoire,sans territoire, en mouvement, volatile et rien d'autre.

L'amabilité rassurante du personnel et les voyageurs avec leurs enfants m'encourage à me détendre, à me dire que les choses vont aller,que je ne suis pas seule.Tout le monde ici rentre ou part, je m'adonne à quelques devinettes en regardant leurs silhouettes défilés sous mes yeux tandis que je nourris mon corps d'ultime sandwich européen.

10h50 embarquement, chaques vagues de contrariétés des dernieres semaines accrochent mon estomac de nausées. Je dois aller devant, mais pas trop ! La fatigue projetée de ce voyage me terrifie, les restent du brun-out sont bien là et je note pour moi-même qu'il y a encore une chose non réglée.

Heure incertaine , c'est si bruyant un avion, c'est tellement dangereux de traverser l'Atlantique. Turbulences, je regarde un film pour me détendre,je choisi celui avec Colin Pharell qui parle d'une amitié qui s'arrête de manière brutale et incompréhensible par choix, ça vous étonne ? Je pars avec mes blessures,mes pertes et mes fantômes, et sans bagages en soute!

Très peu de français dans ce cargo plein !

Un couple de juifs pas loin de moi, elle avec sa toge blanche et sa robe noire,blonde aux yeux bleu,magnifique.Lui, beau parce que jeune, un livre à la main et le regard dans le vide depuis déjà 4h. Vivent-ils avec sobriété? Sont-ils préservé du capitalisme seulement le vendredi ? Ils ont l'air de ceux qui vivent "à côté", sans excès et dans une tourmente simple. J'envie parfois les spirituels et religieux de naissance,ils semblent préservé de la perdition.

Heure obsolète, nous voici survolant le Canada, le continent est bien là. N'a de soulagement que celui qui sait ce que veux dire transatlantique.Mon voisin, un français, ne me parle que d'argent et de magouilles et commençant chaques début de phrases par 'je vais être honnête avec toi'. Sera t'il un jour confronté, comme je le suis parfois quant mon comportement déborde, au cynisme de la vie? Comprendra t'il ?

Je songe déjà que c'est mon dernier voyage, que si tout ce passe bien , je ne serai plus capable de faire tout cela après, que c'est étrangement violent et déconnecté de prendre l'avion et de changer de continent.

Il est bientôt 20h ou plutôt 4h du matin dans mon organisme encore europeaniser.Ce deuxième avion est un supplice d'inconfort et tout comme à chaque fois que je prends la version cheap de la vie, je paye ma tolérance au place de merde. Si j'avais payé encore 10euros de moins je pense que je serai dans les toilettes!


Alex est là, nous partons en métro puis en ferry, sa maison est une cabane dans les bois.

Il y a des instruments de musique partout.Nous sommes contents de nous retrouver, je sens les embruns maritimes.

Dormir, il me faut dormir.Il est minuit, soit 7h chez vous

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Publié le 13 août 2023

Baindbrige Island/ Coniquee

Cette cabane au fond des bois me plaît. Elle a le charme sauvage de la grande Amérique.Son poêle à bois et ces énormes cyprès qui débordent, on y devine la marrée basse dans le fond de la propriété, on se l'était déjà fait remarquer mais nous vivons la même solitude tout les deux. Ou plutôt nous avons choisi une qualité de vie qui souffle les mêmes silences.

La balade de ce matin autour de Baindbrige Island me laisse a comprendre qu'ici les gens ont le sens de l'intimité, chaques chalets est cachées au milieu de la forêt, c'est un mélange satisfaisant entre la côte sauvage et la montagne.Les arbres aux cimes inaprochable s'épanouissent sur les terrains des propriétés.Il paraîtrait que quelques européens habitent le quartier.

Quel engagement de venir vivre au states!


Après avoir préparé le Van et une heure de route plus tard dans le WV (qui a pleins de problèmes techniques,normal...), je rentre incognito dans le mariage où Alex travaille comme musicien pour un groupe de musique country, ça promet ! Je fais semblant de bouger des câbles et de servir à quelques choses. Les gens ici ressemblent à nos bons vieux gars du cru; petits et tassés, un regard de veau et des grosses bagnôles. On se croirait à Bonnevaux avec plus de terrain, ça valait bien l' jetlag. Il y a des aigles royaux qui ne cessent de voler au dessus de nos têtes. C'est un mariage sans prétention, en petit comité, je tente de suivre la discussion d'un homme pêcheur de saumon en Alaska, j'ai clairement pas le niveau, Alex me rassure en me disant qu'il n'y a 'pas plus américain', je me vois obligée de me penser comme 'pas plus française' ! Je titube entre sieste, wishky et photographe pour le groupe. Une belle entrée en matière,douce et conséquente !


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Publié le 14 août 2023

Dormie 12h , journée au ralenti, je n'ai aucune idée du temps qui passe, je me laisse complètement portée par le jour.On planifie les randos des 5 prochains jours, ca va être costaud, je comprend rien à leurs unités de mesure , il fait 89 farenheit , nous allons parcourir des miles qui nous emmène à des dénivelés en feet tout ça avec des sacs qui pèsent des pounds mais attention car si l'on fait trop de routes ça nous coûtera des gallons...Ma dyscalculie prend un coup dans la gueule, tampis pour les maths, tant que l'ours et le cougar reste loin de moi!

Il faut des permis pour entrer dans chaque parc national, et après beaucoup de tergiversations et de renseignements sur les feux de forêt aux alentours nous décidons de partir dans les Olympics, au Mildred Lakes.

Cela étant acté et en vue des farenheits de la journée (n'est-ce pas) une baignade dans le Pacifique s'impose.

J'avais oublié à quel point il est salé ce Pacifique..Bryan et Patrick sont avec nous, des copains d'Alex, charpentier, musiciens, on boit des bières, on discute, on rigole, j'arrive à suivre les conversations, interagir, personne ne me demande de répéter, je suis secrètement fière de mon anglais!

La nuit est tombée mais nos sacs sont encore éventrés et en attente. Nous partirons à l'aube demain, je vois bien qu'Alex a beaucoup de choses à organiser, c'est d'habitude moi qui suis dans cette posture quand on vient me rendre visite.Je le soutien comme je peu mais je paye encore le jetlag et les pintes d'ambrés m'ont complément assommée et puis je n'y connais pas grand chose en parc nationaux americain...A vrai dire, partir en montagne ici, ce n'est pas comme chez nous, à l'arrache !Il faut, entre autres, beaucoup d'outils pour être autonome et de la protection contre les ours ...En sommes je ne sers pas à grand chose, je fais mon sac comme je le fait toujours et quelques blagues pour l'ambiance puis le reste fait son affaire n'est-ce pas ?




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Publié le 16 août 2023


Le départ pour les Olympics a été compliqué.Alex s'est levé contrarié,le van ne marche pas et nos plans sont bousculés...je lui propose de prendre la Jetta mais cela n'a guère de résultats satisfaisants sur son humeur. J'essaie de faire un point avec lui, lui dire que si on ne pars pas aujourd'hui ce n'est pas grave ,si on fait autre choses que des randonnées ça me convient aussi, il ne veux rien entendre, c'est la montagne ou rien et rien n'est visiblement pas envisageable.

Finalement il réussit à réparer brièvement le van ,nous arrivons à midi dans les Olympics Forest.

Il fait presque 40 degrés, très humide, le chemin monte en pente raide dans la forêt, Alex marche loin devant,je ne me sens pas bien, l'ambiance est tendu,je suis hyper stressée par ce nouvel environnement et j'ai peur de ne pas tenir le coup physiquement. Absence d'empathie chez mon binôme.

Nous croisons un couple qui nous dit que la rando est dure que nous devons bien suivre les Cairn et qu'il y a un nid de guêpes sur un passage où l'on doit mettre les mains.Alex est allergique et n'a pas pris de quoi réagir en cas de piqûre, je n'ai pas de carte ,je ne connais pas l'itinéraire et je ne sais pas si je serai en mesure de gérer une situation compliquée seule. Encore un cran de stress.

Nous marchons 5h sans vraiment manger car l'effort est trop intense, la chaleur trop agressive.

Nous arrivons au Mildred Lakes, c'est beau.Ma premiere pensée sera pour les Alpes, c'est mieux !

Je ne dirai pas que les parcs ici sont spécialement beau mais une chose est sûre, c'est immensément sauvage et intense.

Nous installons la tente , mangeons , nous baignons.Je ne suis pas tranquille, j'ai l'impression de faire un quart sur un bateau toute la nuit , je me réveil en permanence avec la même chose en tête; maintenir la veille, au cas où un ours arrive. Je lache quand même prise sur le cougar, quoi qu'il se passe, si je l'entend, ce sera déjà trop tard. Encore une pensée pour mes montagnes, quel luxe de se délecter de paysages sans en payer le prix de l'alerte du danger permanent.

Le matin je profite d'un baignade solo , soulagée que la nuit est quittée les lieux.Le lac est poissonneux,très transparent, frais comme j'aime. Nous mangeons et partons pour trois heures de rudes descente, on cherche le chemin plusieurs fois.Pas d'ours, on parle fort et faisons du bruit dans le bush, il y a des traces partout, parfois de forte odeurs animales.

Arrivée au van je suis contente, encore une étape de franchie post-'maviequ'afoutulecamps'. Alex n'a guère autre choses en tête que de partir sur notre prochain itinéraire.Pas de repos nous partons pour 5h de route en direction de Leavenworth dans l'état de Washington.

Je me suis tordue la cheville et je commence à sentir les prémices d'une infection urinaire dû à la déshydratation des derniers jours.Nous trouvons un accord pour tempérer son rythme que j'ai clairement du mal à suivre.Nous passerons la journée du lendemain à se balader dans la ville avant de repartir en rando.Ouf!

Il est 22h quand nous arrivons au camps dans la forêt avec le van, j'arrive à manger un peu car il fait moins chaud.Les étoiles sont magnifiques. Il y a quelques campeurs, je suis contente d'être entourée de gens.









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Publié le 17 août 2023


Je m'arrime à Seattle pour les derniers jours de voyage. J'ai envie de musée, de café culturelle, de boîte de jazz et autres joyeuserie américaine.J'ai aussi envie de rencontrer d'autres voyageurs, de les écouter, d'échanger.

Cette première partie n'aura pas été de tout repos, je n'avais pas prévu une telle intensité et je suis contente de voler de mes propres ailes en respectant un peu plus mon rythme et mes besoins. Bon évidemment, aujourd'hui, s'écouter, c'est surtout une envolée bourgeoise.Le backpacker que je réserve est excessivement cher (70€/nuit en dortoir), j'espère que le choix en vaut le chandelier !


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Publié le 18 août 2023

Seattle à des allures de ville de pêcheurs pittoresque. L'arrivée au port était assez abrupte, après plusieurs jours relativement isolée dans les montagnes je pars me cacher au backpacker le temps de laisser infuser cette nouvelle énergie. Il me semble évident que les Etats Unis demande une grande adaptabilité et beaucoup de temps. Son intensité n'a rien de comparable....même si j'ai plusieurs fois penser à mon voyage en Inde.

Je pense avoir fait mon voyage à l'envers. Les montagnes, à mon arrivée, était bien trop sauvages,trop vite, sans éléments d'informations et complètement à la merci de mon binôme. Mon tempérament se veut indépendant et autonome, je crois que j'ai besoin de connaître l'environnement avant de plonger dans un monde inconnu. Évitant autant que possible d'avoir comme seule arme, une confiance aveugle en mon guide!

Ce que j'apprends en ville parle de Bigfoot, des terres sauvages d'Amérique du nord qui couvent les lieux les plus isolés et déconnecté du monde. L'état de Washington c'est la terre de 'in to the wild', de 'Twin Peaks' ,des Indiens volés, de la drogue et de la musique, d'Amazon et de 'Greys Anatomy'(vachement moins glamour..)

J'aurais voulu savoir tout cela avant de partir en trail...(enfin pas pour greys Anatomy bien-sûr...)

Anyway, je rencontre une fribourgeoise qui me fait, malgré elle, raconter mon impression des lieux et de mes derniers jours.Elle est ici pour 10jours avec l'idée de louer un van et partir seule dans les Olympics pour des 'day hikes' je l'a regarde avec de grand yeux ; sait-elle ce qui l'attend ?Je me garde de lui dire que je l'a trouve très courageuse pour ne pas la stresser inutilement avec des peurs qui m'appartiennent. Je lui laisse quand même l'application Caltopo qui permet d'avoir un gps et un tracé d'itinéraire malgré l'isolement car le sens de lecture de terrain et d'orientation est indispensable ici.

Ça m'interpelle, je regarde sur internet, puis je constate qu'il y a pleins d'autres randonnées bien plus tracé que celle qu'Alex avait choisi pour nous, j'en conclue que tout est une histoire de d'habitude. C'est un art en soi de pouvoir accueillir quelqu'un en douceur dans des lieux familiers.

Je pars me balader dans Seattle à pied.

Je passe des quartiers de morts-vivants ; la pauvreté est omniprésente, les visages que je peine à regarder sont bouffis d'opium, décharnés par les épreuves que personne n'ose/n'a envie d'imaginer.Il n'y pas de rue sans clochards, beaucoup de femmes et d'handicapés en fauteuil. Ceux qui ne 'dorment' pas dans les rues errent avec des yeux terriblement brillant et jaune. J'observe un grand malaise chez les gens qui regarde systématiquement dans la direction opposée. Malgré tout, contrairement à chez nous, je croise leurs regards mais ils ne m'importunent pas, certainement trop défoncés !

Je tombe sur un parc avec un énorme concert organisé par KEXP. Je suis contente, je m'installe à l'américaine, dans l'herbe,un bouquin, un fish n chips de poisson local, un pepsi pour la forme! J'apprécie vraiment la manière dont les gens se parlent; avec beaucoup de facilité et sans craintes de l'autre.Le concert est super et je rentre satisfaite de ma soirée. Le backpacker est plein....de gens sur leurs téléphones..c'est plus c'que s'était pti gars !

Demain j'irai à la grosse Convention de tatouage de Seattle qui a lieu ce weekend et par chance c'est à côté du musée de la musique.

Si j'étais restée plus longtemps, je pense que je serai reparti dans les montagnes avec cette Suisse, dans une approche plus chill et plus avertie. C'est quand même sans regret que je profite de ces derniers jours ici. It is what it is