Carnet de voyage

Le second chapitre de ma vie

16 étapes
105 commentaires
Un voyage à l'autre bout du monde pour faire grandir ce que j'ai de plus proche, mes valeurs. Un retour au fondamentaux, guidé par mes intuitions, pour retrouver les vertus naturelles de l'homme.
Janvier 2017
52 semaines
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24/01/2017

2017 marquera certainement un changement dans ma vie. Un rêve de grand gamin ou le départ de ma propre vie ? peu importe ! Je réalise enfin ce changement qui m'attire depuis des années, en secret au fond de moi, sans doute par peur de dire quelque chose que je ne ferai pas. Aujourd'hui, je le fais ! Je pense avoir ressenti que c'était le bon moment. Un moment où la maturité me permet de savoir ce que je veux faire de ce voyage. Un moment où le dégout de ce monde économique, dirigé par le profit, me pousse à vouloir découvrir des valeurs et des cultures plus authentiques. Un moment où je sens que nos générations prennent conscience du besoin de retour au sources, avant que la terre nous l'impose.

Je souhaite me laisser guider par les opportunités, les rencontres et mes intuitions pour donner le plus de place à la richesse du partage et de la solidarité. C'est l'une des raisons pour laquelle j'ai choisi de partir seul. Je donnerai le meilleur de moi-même pour offrir de l'importance à ces petits instants qui peuvent, comme par magie, devenir de grands souvenirs quand on leur laisse la possibilité de s'exprimer pleinement.

J'ai également à coeur de profiter de ce voyage en faisant une quête spirituelle. Ceux qui me connaissent bien savent la considération que j'ai pour la bienveillance, le rire, l'écoute, le respect, la solidarité, le non-jugement, la Suisse (certains comprendront)... J'espère pouvoir rencontrer des êtres spirituellement élevés et partager durant des heures et grandir encore.

Aussi, (certains seront déçus et d'autres rassurés par ce paragraphe), je compte aussi voir comment ça fait la Fiesta au Pérou haha !!! C'est quand même un domaine que je maîtrise un tout p'tit peu et ils ont intérêt de me montrer comment on danse, on chante, on boit, on rit et on refait le monde dans c'pays 😉

Enfin, il m'est important de remercier toutes les personnes qui m'ont entouré ces derniers mois. Vous m'avez témoigné tellement d'amour que j'emporte avec moi et que je ne manquerai pas de ressortir quand ce sera nécessaire. J'ai pleinement pris conscience de mes racines et de leur importance grâce à vos témoignages. Je vous en suis très, très reconnaissant. Merci 😀


PS : vous remarquerez certainement dans mes écrits un grand nombre (que dis-je, un nombre incalculable) de fautes d'orthographes. C'est normal !!!! C'est un mélange d'écriture spontanée, de tête de mule à l'école, de manque de correcteur d'orthographe sur mon appli smartphone et un peu de j'menfoutisme parce que merde, moi, j'suis en vacances HHHHHAAAAAAAA :P


Bon courage à tous et à bientôt

Maxoupérou 😉

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28/01/2017 - Lima

Avant même que je mette le pied sur le territoire Outre-Atlantique, Sofia se pose à côté de moi à l’aéroport de Madrid. Elle vient de passer un an et demi loin de sa famille d’Argentine et rentre tout juste. Elle me raconte son voyage. Je lui exprime le but du mien. Je m’intéresse à son pays et lui explique que je suis ouvert à d’autres pays que le Pérou, tout dépendra des rencontres qui dirigeront ma barque. Elle prend mon carnet et note le nom de sa ville en me disant “tu as une maison ici maintenant”. Son geste spontané me ravit. Après 10 minutes de discussion nous nous apercevons que nous aspirons aux mêmes valeurs. Elle considère que notre génération à un devoir de changement pour notre planète. Je commence à lui citer ce résumé de la pensée de Ganghi “Sois le changement…” puis elle accompagne la fin de ma phrase en cœur “... et tu changeras le monde”.

Mon arrivée à Lima me fait vite redescendre de mon nuage. Bagage perdu, galère en Espagnol, je me fais alpaguer de partout pour un taxi, on me déconseille fortement le mini-bus soit disant pour les locaux, les klaxons retentissent dans tous les sens, je comprends mal la ville… bref, je suis à Lima. Je me fais sourire à être content de cette chaleur que je souhaitais tant, qui là, avec mes chaussettes de rando, mon jeans, mon pull et mon blouson de montagne me fait me sentir… comme un con !

Moi qui me dis souvent que tout a un sens je me dis à ce moment “quelle connerie utopique” :)

Je me pose alors dans un parc et m'aperçois que les deux papis sur le banc d’en face parlent en Anglais. Ils se foutent de la gueule de Trump à voix haute, c’est assez drôle à entendre. Ils me demandent d’où je viens, nous papotons puis je leur explique mon histoire. Papi Jabier m’accompagne en taxi jusqu'à mon auberge de jeunesse pour que le taxi ne m’arnaque pas et pour appeler l’aéroport avec moi en espagnol. Il sait se faire entendre papi Jabier :) Il m’aide dans quelques démarches administratives, je l’invite à déjeuner puis nos chemins se séparent. Super papi Jabier :)

Il est inutile de me lamenter, je préfère prendre l’instant présent et profiter. J’ai sur moi mon passeport, ma carte bleue, mon téléphone et je suis en bonne santé. Tout ce qu’il faut pour faire un voyage :)

En deux heures sous les nuages de Lima je prends mon premier coup de soleil. Du coup les gens que je rencontre me parlent directement en Anglais (saleté de peau de roastbeef lol). Je découvre les plaisirs de voyager seul, je me pose où je veux, aussi longtemps que je veux, en appréciant le silence et sans me soucier de l’ennui de mon compère. C’est impressionnant ce que l’on remarque lorsque l'on regarde avec attention :)

On dirait que Lima s’est développé sur la base du paradoxe :) Il y a des fleurs merveilleuses qui poussent sur des ruines. La seule plage de sable est à la sortie du port. Des palmiers majestueux nourris par des déchets en abondance. Des rues atypiques avec des épaves sur le trottoir… Barranco est un charmant quartier de Lima.Les lieux ont attiré de nombreux artistes, les constructions baroques de l’empire colonial se mélangent parmi des ruines, des constructions abandonnées et des maisons péruviennes aux couleurs très chaleureuses. Je m’y sens bien dans ce quartier et remercie au passage un globe trotteur dont les textes ont influencé mes choix (D'ailleurs FroGuestHous est un excellent Hostel ;) )

En pleine contemplation du coucher de soleil sur l’Océan, un groupe se pose à côté de moi. Un Péruvien me demande d’où je viens et la machine est lancée avec Jose le Péruvien et Laurine la Française. Tous deux 20 ans, ils se connaissent depuis quelques heures, lui fait du rap dans la rue pour gagner de l’argent et payer des médicaments à sa mère malade (la sécurité sociale et le Pérou…) et Laurine passe son dernier jour à Lima après un mois de vadrouille avec ses deux amis rentrés la veille. Je leur offre un Pisco Saur, la boisson nationale. Jose nous offre un concert privé en pleine rue puis nous laisse. Nous allons partager une terrasse avec Laurine pour dîner. Nous avons les mêmes pensées concernant le mode de vie des Occidentaux, le respect de la planète, le capitalisme, les changements pacifistes que nous pouvons apporter. Son expérience d’un mois de voyage au Pérou lui permet de me confirmer que le Pérou devrait m’apporter de merveilleux instants.

Je suis bien, heureux de ces rencontres, Barranco me plait… aurais-je profité autant de ces instants si j’avais eu mon sac en pensant à partir le lendemain à la première heure pour ma seconde étape ???


Bon, je me lave les dents aux Tic-tac, mon jean me colle à la peau, mon T-shirt sent le randonneur de trois jours, j’ai retourné mes chaussettes et mon calbut mais ça ne change pas l’odeur… bref, je vais acheter de quoi passer quelques jours ici :)

Barranco con Laurine y jose
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Quelques heures après avoir posté mon précédent article, je récupère mon sac avec le plaisir de savoir que je n’ai rien perdu et un peu de reconnaissance au clin d’oeil que la vie m’a envoyé. Je vais prendre le temps de vivre chaque endroit, j’ai bien compris :) J’ai vraiment apprécié ma rencontre avec Jordi, le type de l’auberge qui a passé beaucoup de temps pour m’orienter et qui m’a aussi livré quelques anecdotes que je n’oublierai pas.

Je prends alors la route vers ma prochaine étape “Eco Tuly Park”, un éco village où je devrais travailler 4h par jour et je serai nourri et logé pour quelques pièces.

La traversée de la banlieue de Lima me fait beaucoup réfléchir. On est très loin du quartier bohème de Barranco. On pourrait presque définir cette banlieue d’un immense bidonville où les “maisons” sont entassées jusque sur le flanc de la montagne en arrière plan. La pollution est abondante, les gens vivent principalement des gourmandises, boissons et bricoles qu’ils vendent dans la rue. D’autres font des prestations et danses de rue aux feux rouges pour ensuite réclamer quelques centimes avant que le feu ne repasse au vert et que leurs clients éphémères disparaissent, puis ils recommencent…. à chaque feu rouge. Je ressens clairement l’insécurité dont on m’avait mis en garde.

Je repense alors aux objectifs de mon voyage et me demande :

- Comment penser à l’écologie quand tu ne sais pas si tu auras assez d’argent pour manger ce soir ?

-Comment penser à demain quand tu ne sais pas comment va se finir aujourd’hui ?

-Comment pense t-on au respect de la planète quand on n’a pas d’espoir ?

-Comment apprécier la beauté de la nature quand tu vis dans la montagne non pas pour être au calme mais parce que c’était la seule place où ton père pouvait construire une maison sans s’éloigner trop de son travail et il fait une randonnée tous les jours car il n’y a pas de route pour aller chez toi ?

… Alors je regarde encore... Mais tout cela n’est qu’une interprétation d’Européen qui a connu le “confort”. En observant plus les visages, certains semblent heureux, peut être à se satisfaire de choses simples. Des enfants se régalent à escalader les bidonvilles en riant. Les danseurs de feu rouge affichent encore un large sourire après le passage au vert. Le vendeur de boissons qui crève de chaud dans la rue semble apprécier le soleil en discutant avec les gens sur son trottoir. Je ne vois finalement que peu de tristesse sur les traits de leurs visages. Sont ils heureux ? Le serais-je à leur place ?

J’aimerais me fondre dans la masse un certain temps car il est certain que ces gens ont des choses à nous apprendre sur la façon de voir la vie. Mais bon, je me rappelle que je suis blanc bec, épais comme un câble de frein à main et mon niveau d’espagnol est …. merdique donc je reste dans ce bus jusqu’à mon éco village, ça me parait, malgré l’envie d’aventure, être raisonnable :)

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07/02/2017 - Chacra Y Mar

J'arrive enfin à ma seconde étape "Eco Truly Park". Un éco village que j'ai trouvé sur le net dont l'accroche du site était "notre priorité est de se faire des amis". Il était également noté accessoirement que leurs règles de vie étaient basées sur celles de la religion Hare Krishna (vous savez les crânes rasés qu'on prend pour des tarés dans Tours centre à chanter avec un tambour et des mini timbales :) ). Bref, moi je veux apprendre l'écologie, la permaculture et me faire des copains alors... j'arrive à Eco Truly park :)

El templo 

Un lieu magnifique entre l'océan et cette montagne sablonneuse. Depuis le bus je m'aperçois stupéfait de cette incroyable verdure en plein milieu de ce décor aride. Je suis impatient d'en apprendre sur leur méthodes d'agriculture.

Curieux, je pousse alors la porte de cet endroit mystérieux et je viens de mettre les pieds... dans un Monastère Krishna 😀 Tadaaaaa !!! la messe est dite haha.

Je ne sais pas bien ce que cela me réserve mais maintenant j'y suis, et après tout la vie m'a toujours guidé avec bienveillance vers des découvertes positives. Alors vamos 😉

Je le confirme, les lieux sont magnifiques, paisibles, verdoyants... c'est un vrai petit paradis. Je commence mes journées par 1h30 de yoga à 7h du mat, puis la cloche sonne pour annoncer le petit déjeuner que nous prenons tous ensemble sur les tables extérieures (oui j'avais oublié de préciser qu'il fait 20 degrés minimum 😀 je kiffe !!). Je travaille ensuite 3 - 4 heures et je suis libre pour le restant de la journée. Le tout ne me coûte que 10€ par jour en étant logé et nourri. Le soir, il y a une cérémonie... assez particulière. Ils donnent à bouffer à une poupée bleue qui représente leur Dieu Krishna, chantent des chansons bizarres qui répètent Hare Krishna pendant 10 minutes puis ils prennent un passage de leur livre sacré et font part de ce que cela leur évoque pendant une bonne demi-heure. Après cela, il est 20h, il fait déjà nuit depuis 1h et tout le monde va au dodo !!! Et bah à ce moment là, je vous laisse imaginer ce qui me passe par la tête...Wooooo elle est où la priorité de se faire des copains ? C'est quand qu'on fait de la musique, qu'on danse, qu'on parle fort et qu'on dit des conneries ?? Tout le monde pionce et Maxou il est comme un con en plein milieu de son joli monastère tadaaaaa !!!

Je décide de prendre cette expérience avec toute la bienveillance qui l'accompagne. Pas d'alcool, pas de clope, yoga et travail le matin, repas végétarien avec les légumes du jardin tous les jours, échanges spirituels... aller, cette expérience ne peut pas me faire du mal et je vais essayer d'en tirer le meilleur.

Mes premières journées ne me font pas rêver. J'ai déjà envie d'écourter mon séjour. Les échanges sont pauvres, lors de mes heures de travail on ne m'explique rien, les volontaires ne sont pas vraiment intégrés, d’ailleurs 4 d'entre eux sur 6 prévoient de partir plus tôt que prévu et le soir... je me fais chier 😕 (dois je préciser que mes soirées de vacances sont habituellement plus...agitées ?)

Je m'interroge sur l'intérêt de rester à cette adresse, qui, à priori, ne me convient pas mais je sens que quelque chose me dit de rester. Je décide de voir si le temps me donnera raison, car après tout, pour la première fois de ma vie, du temps, j'en ai :)

Mon hôtel 😀

Cela fait maintenant une semaine que je suis dans ce Monastère et j'ai appris à m'ouvrir à ce lieux et ses habitants. J'ai ouvert ma vision des choses et pris le meilleur de chaque instant.

J’ai vu l'équivalent d'un moine de 30 piges faire un discours sur sa religion, dans le temple, avec son style americo latino, avec sa casquette en arrière, parler poétiquement d'amour avec humour.

J’ai discuté avec un moine de 23 ans que j'essayais de repousser dans les limites de son discours religieux (oui même un moine ça se taquine 😜) Il m'a répondu avec patience et avec classe puis m'a ouvert les yeux sur une partie de ma spiritualité et sur l'harmonie entre le corps, l'âme et la conscience.J’ai eu de long débats sur les limites qui résident dans toutes formes d'aspect matériel alors qu'il n'y a pas de limite aux sentiments, quels qu'ils soient.

Tout cela a évidemment plus de sens quand le moine qui me fait prendre conscience de tout ça est aussi avec moi en train de travailler en écoutant de l'électro et en dansant. Quand à aucun moment je ne ressens une quelconque forme d'incitation à la reconversion. Quand on prend le temps de m’écouter au lieu d’essayer de me convaincre.

En occident, notre vision de la religion est noircie par les histoires que l'église porte sur son dos. Comment peut on croire en une religion qui disait "je suis la parole de Dieu, croyez moi, la terre est plate, donnez de l'argent à Dieu et vous irez au paradis". Ces erreurs du passé ont décrédibilisé des mouvements dont le but est de se connecter avec la vie. Des erreurs d'interprétations, des abus de pouvoir, des milliers de gens trompés (et vous connaissez le dicton). Voilà pourquoi l’église n'a pas de sens à nos yeux.

Ici, j'ai vu des gens modernes, qui parlent de spiritualité, qui respectent le fait que je n'adhère pas à tous leurs principes, qui ne portent aucun jugement, qui écoutent et apportent de l'eau au moulin de celui qui ouvre sa porte. Je dois bien admettre qu'ici, j'ai ressenti des choses que je ne connaissais pas en moi.

J'ai aussi vécu des moments que je n'oublierai jamais comme cette danse avec les oiseaux un matin.

Cette journée à suer avec le sourire avec Pello lorsque nous avons déplacé des dizaines et des dizaines de briques avec nos brouettes dans le sable sous ce soleil du désert sans jamais se plaindre. Ou encore ces matinées avec Gillermo, que dis-je… Don Gillermo, le papi de 75 ans qui travaille ici depuis 20 ans, sous le soleil et qui me parle avec passion de sa relation avec la Pachamama, la Terre qu'il considère comme sacrée avec laquelle il a créé ce paradis de verdure.

L'agriculture avec Don Gillermo

Dans ce Lieu j'ai aussi :

- fait de la percussion sur des chants sacrés

- passé le balai sur du sable avec un moine en écoutant du Naaman à fond

- cuisiné des repas végétariens pendant des heures- levé mon cul tous les matins avant 7h alors que je suis en vacances (seul mon Keketigno avait réussi à faire ça 😉)

- respecté mes 8h de sommeil par nuit (oui on se couche vraiment tôt ici)

- pas pris l’apéro 😇

- fumé une clope tous les deux jours

- fabriqué un attrape rêve indien

- planté des pommiers et des papayers

- chié dans des toilettes sèches tous les jours haha

- mangé des fruits et des légumes tous les jours (au passage : ne pas manger de viande ne m’a pas rendu plus faible et si nous limitions tous notre consommation, certaines entreprises arrêteraient de s’enrichir et nous pourrions prendre notre viande chez un boucher qui respecte... un tout p’tit chouilla plus l’animal)

- ...

Oui, j'ai fait beaucoup de trucs qui ne me ressemblent pas haha

Et il y a également un point important que je retiens.... c'est que je suis putain de fêtard !!!! J'ai besoin de plus de danse, de chanson, de déconnade, de fou rire, de musique, de gueuler, de dire à mes amis combien je les aime quand arrive 2 h du mat... 😉 d'être moi !!

J'en aurai encore beaucoup à apprendre à rester là mais j'ai besoin de retrouver des valeurs que je maîtrise. J'ai aussi envie de bouffer une bonne plâtrée de pâtes. J'ai envie de me dépenser et voir de merveilleux paysages.


Je remercie profondément Hadi et Manasa pour m’avoir fait évoluer spirituellement comme je ne l'aurais jamais imaginé.

Yan, Hadi, Manasa, Diego et Jonas 

Les larmes me viennent comme pour me témoigner une intensité marquante et me faire comprendre que cette expérience n'était qu'un échantillon. J'ai maintenant besoin de prendre du recul et mettre en pratique. Je ressens la force de ces émotions comme un message que je ne peux snober et dont je prends toute la mesure.


Je remarque encore une fois que je me suis trouvé ici par erreur ou plutôt... par hasard. Je n'étais pas conscient de là où je mettais les pieds. Si j'avais su... je s'rais po v'nu !!! Et finalement, n'y avait il pas de meilleur moment dans ma vie pour me faire découvrir une approche religieuse. N'était-ce pas un endroit adéquat pour démarrer un voyage en quête de spiritualité ? Je ne saurai jamais comment je suis arrivé là mais une chose est sûre, je vais continuer de suivre mes intuitions 😀

Demain je prendrais la route pour Huaraz, une ville entre la Cordillera Blanca et la Cordillera negra, d'où partent de nombreux treks pour découvrir ces merveilles montagneuses que peut nous offrir le Pérou avec ces nombreux pics à plus de 6000 m d'altitude. Je vais démarrer cette prochaine étape avec Diego, un Péruvien en vacances qui me propose de venir chez ses potes. L'an prochain il devra faire sa thèse. Il a choisi le thème du recyclage avec tout ce que cela entoure (consommation, nouvelles méthodes, processus écologiques...), je sens que nous allons beaucoup débattre sur le trajet 😋

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14/02/2017 - Huaraz

Je suis parti de ma précédente étape pour retrouver des valeurs que je maîtrise davantage, et bien je peux affirmer que je n’ai rien perdu : je sais toujours comment faire la fête, comment faire des pâtes carbo (même en remplaçant la crème fraîche par de la crème de lait et les lardons par du jambon et des brocolis (oui, j’ai quelques restes de mon écovillage)), comment socialiser avec les gens que je rencontre malgré la barrière de la langue et comment aller à la rencontre de paysages magnifiques 😀

Je suis rassuré et peut être que certains d’entre vous le sont également 😉

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Je pars donc de l’écovillage avec Diego pour entamer 6 heures de bus. Nos conversations sont riches et intéressantes même si je ressens un léger décalage sur nos expériences de vie. Normal, je n’étais pas le même non plus à 23 ans. Je ne sais pas encore si j’aurais envie de passer tout mon séjour avec lui. Le temps me le dira :)

Nous arrivons chez son ami Marco, un Péruvien de 26 ans qui fait des études d'architecture dans la même école que Diego. Il est ici dans la maison de ses grands parents qui ne sont pas là. Nous sommes donc tous les trois tranquillou. Il y a aussi Maria, une Péruvienne de 64 ans avec le style typique des Péruviennes des Andes. Elle s’occupe de tenir la maison, le jardin et l’élevage de cochons d’Inde (plat traditionnel au Pérou). La maison est …. particulièrement meublée. Il y a des tableaux chrétiens partout et des photos de famille. Il n’y a pas de chauffage. Pour la douche chaude il y a un système électrique douteux, les lits doivent avoir l'âge des grands parents mais je suis accueilli avec une générosité et une confiance qui me touchent. Je pose mes affaires et commence déjà à me sentir bien.

La maison, le jardin, les cochons d'Indes, la vue de la sdb, la douche, Maria et mes deux amis. 

Dès le premier soir, nous allons en centre ville de Huaraz, cette ville à 3000m d’altitude est impressionnante, charmante et assez pauvre à la fois. J’y trouve tout de suite un certain charme. Je ne sais pas si mon intention intérieure nous a guidés mais nous avons rapidement été dans un bar, puis un autre, puis nous avons refait le monde avec des fous rires en espagnol et en anglais jusqu’à 4h du mat :) Haaaaaa ce que j’aime ça lol ! Je me retrouve enfin 😀

Première soirée 

Les trois premiers jours nous avons fait une rando tranquillement pour nous habituer aux efforts en altitude. Nous avons goûté aux bienfaits des bains thermaux de Huaraz avec une eau naturelle et chauffée par les sources chaudes souterraines. Nous sommes aussi monté sur des VTT pour une journée sport, pique-nique et découverte de paysages et de sites archéologiques. J’ai aussi fait ma première rencontre avec un Lama qui… d’après mon analyse de sa mâchoire et de sa gorge en mouvement, allait me cracher à la gueule si je faisais un pas de plus 😝

Enfin, nous avons fait un trek jusqu’à la Laguna 69 (aucune connotation sexuelle, c’est juste qu’il y a 800 Lagunas et il fallait simplement les répertorier (moi aussi j’étais un peu déçu)). Départ à 3800 m pour grimper pendant trois heures et atteindre ce lieu magique à 4700 m (autrement dit à moins de 110 m du pic du Mont Blanc ;)) et ben ……. j’en ai chié !!! Je compte cet effort comme l’un des plus difficiles effectué dans ma modeste vie de sportif haha. Le réconfort avec ma plâtrée de pâtes devant ce paysage de carte postale était, comme certains le devinent, du pur bonheur :)

3 jours intenses dans la Cordillera blanca 

Nous sommes maintenant Vendredi soir et…. place à la fiesta 😀 (là Maxou, il est content haha). Découvrir leur façon de s'éclater c’est pour moi une opportunité d’apprécier et d’apprendre : je kiffe !!!

Invité dans une “boîte” où des potes de Marco font la fête, je suis accueilli comme l’un des leurs. On me passe un pichet de cocktail rempli… “mais j’ai pas de verre il est con ou quoi”… puis il finit son verre et me le passe. Haaa d’accord !! Je me sers donc un verre, passe le pichet au prochain et bois mon verre cul sec avant de faire tourner le verre. Ils s’amusent à passer régulièrement le pichet au petit Français, et moi, avec toute la politesse acquise grâce à mon éducation, j’accepte avec le sourire. Un sourire de plus en plus grand à l’avancée de la soirée :)

J’ai pas besoin de préciser comment on a fini :)

Fin de soirée 😀

Ici la musique principale est la salsa. Moi, ça me va bien, je suis pas trop démuni 😉 Bien que, leur façon de danser est très différente de la nôtre. Il faut imaginer comme un Européen qui danse en boite (un pas à droite puis un pas à gauche) mais avec des pas de salsa. Ils ne tournent donc pas beaucoup, bizarre mais pourquoi pas. Au début j’observe, ensuite j’essaie de mettre en application. Je galère un peu mais après quelques démonstrations de ma politesse avec les copains de Marco, ce sont plutôt les autres qui m’observent danser à l’européenne (ou plutôt à la cubaine) 😜

Je valide volontiers l’un de mes objectifs de voyage : ils savent faire la fiesta au Pérou ;)

Plus calmement, nous avons aussi découvert un petit bar qu’un globe-trotter avait notifié dans ses écrits. Les rencontres ont été tellement nombreuses avec des débats intéressants, d’autres sans aucun sens mais avec beaucoup de rires, certains à faire réfléchir sur la vie… Les gens sont tellement agréables, patients, ouverts… j’adore, c’est tout ce dont j’avais besoin :)

J’avais donc quelques doutes sur mon entente avec mes deux compères et je dois bien admettre que j'ai appris, en laissant la chance au temps, à aimer ces deux personnages que j’accueillerai avec grand plaisir en France. Mes longues conversations avec Diego, nos fous rires et nos foutages de gueules m’ont appris à voir en lui, un genre de Maxou à ses 23 ans. De son côté Marco, plus calme et timide, m’a montré sa grande générosité qui en dit long sur sa personnalité.

Nous avons longuement discuté (avec 4 mots par minute, il faut du temps lol).

Marco m’a appris beaucoup de choses et il est important de noter la différence de culture que démarque l’océan Atlantique. Ici, la majorité gagne environ 500€ par mois. Un architecte gagnera lui 1500€. Les études sont chères. Marco a pu suivre des études car son père a touché une prime suite à son accident dans la mine, où il a failli rester sous les décombres. Dans la rue, tout se vend. Quand il y a un besoin, il y a une offre. Les maisons qui ont pignon sur rue on transformé leur salon en mini magasin et je doute qu’ils aient une licence. On trouve de tout : une brouette à vendre à côté des légumes… normal !! Ceux des campagnes voisines descendent tous les jours avec leurs habits traditionnels et leur babioles dans le dos, tenues par le “drap coloré” péruvien, se posent sur le trottoir et tricotent où cuisinent en pleine rue pour espérer vendre et ramener un peu d’argent. Les transports sont très développés (va t'acheter une caisse perso avec 500€ par mois). Les taxis et les tuktuks ont donc pris le monopole et représentent 90% du trafic. Ils klaxonnent chaque passant dans la rue en espérant qu’il soit à la recherche d’un transport (ce qui a le don de me gonfler mais les gens d’ici semblent ne plus y faire attention), je vous laisse imaginer l’orgie de klaxons. Mais celui qui ne klaxonne pas, a moins de clients dans sa journée, alors ils font tout pour avoir….plus d’argent.

La plupart rêvent certainement de ma vie d’avant alors que j’ai tout plaqué pour découvrir la leur. Il est parfois préférable pour moi de ne pas trop me prononcer à ce sujet.

Cependant, ce qu’ils ne peuvent pas voir c’est qu’eux, ils ont l’air de vivre l’instant présent, ne se plaignent pas, s’amusent de choses simples, partagent énormément, se ravient de quelques mots échangés sur le chemin… Je remarque que l’omniprésence des commerces de proximité y est pour énormément dans ces relations.

Que penser de cette énorme différence avec toutes les conséquences qui l'accompagnent entre le commerce artisanal et industriel ??? Je n’ai pas encore toutes les réponses mais je vois déjà clairement certains aspects positifs.

En Occident, “nous sommes conditionnés pour n’en avoir jamais assez dans une société où l’excès est valorisé : excès de travail, de richesse, de confort… L’excès et l’abondance nous éloignent de la rareté et de l’intensité.” Autrefois,”avoir conscience de la nature limitée du monde obligeait chacun à aller chercher l’intensité au fond de lui-même” - Gislaine Duboc -


J’ai passé de très bons moments dans cette ville. J’ai retrouvé des instants qui ont rééquilibré ma balance :) J’ai observé et devrais observer encore.

J’ai un ami que je reverrai certainement, Diego. Marco m’a accueilli avec une confiance que je ne suis pas certain de pouvoir égaler. Il m’a ouvert la porte sans savoir qu’il était en train de me passer un message sur le partage que je n’oublierai jamais.

Cette étape m’a fait beaucoup de bien.

Demain je laisserai mes compagnons dans le but d’aller rejoindre deux Français, rencontrés par hasard dans un bar à Tours (oui pas étonnant je sais). Ils sont en moto, en train de traverser le Pérou et nous allons essayer de nous rejoindre à Chachapoyas pour aller découvrir un vestige Incas au bout d’une randonnée et pour le reste, on verra bien ce que la vie nous réserve ;)

Pour ce; j’ai 8 h de route jusqu’à Trujillo où je vais peut être passer un jour ou deux avant de prendre un second bus vers ma destination 13 h de bus plus loin (oui, ça parait petit sur Google map mais en fait … lol).

Je vous souhaite bon courage à tous, moi dans quelques heures ce sera soleil et playa ;)

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16/02/2017 - Trujillo

Cette petite étape à Trujillo à été… différente des précédentes. Il y a des moments où il est sans doute nécessaire de passer des instants moins intenses ou moins agréables pour donner plus de valeur aux périodes passées et certainement à celles à venir.

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J’arrive à Tujillo à 4h30 du matin. J’ai dormi environ 4 h tant bien que mal dans le bus. J’arrive dans la troisième plus grande ville du Pérou, je n’ai rien prévu, j’ai la gueule dans le pâté, tout le monde m’a dit de faire attention dans cette ville… Bref Maxou arrive en ville :)

J'arrive à mon auberge de jeunesse qui ressemble, de l’extérieur à un boite de nuit. Je passe la porte, il est 5 h du mat, la musique est forte et les gens sont tous bourrés. Certainement des célibataires qui fêtent, à leur façon leur célibat. Je peux comprendre :) La patronne de l’auberge semble… célibataire également haha. Elle me montre ma chambre, je réveille donc ceux qui essayaient de dormir malgré la musique (trop bien pour se faire apprécier sur la première impression). Je souhaite profiter du peu de temps que j’ai à passer ici alors je sors.


Je suis en plein centre ville, la ville est calme, il se met à pleuvoir. Après 1h à découvrir la ville sous la pluie, je me décide à prendre un taxi pour aller à Chanchan, un site archéologique important de la région. Le chauffeur qui pue déjà la sueur me dépose devant l’entrée puis me dit “mais ça n’ouvre qu’à 9h !!!” en effet, il est 7h. Bon il me dépose à un endroit pour prendre un petit dèj. Je rentre et ici le petit dèj c’est soupe de vermicelle et poulet.

“- Heeuuuuu vous auriez pas du pain et du beurre avec un jus d’orange ?

- non mais dans la vitrine il y a des trucs sucrés”

Haaaaa, elle parle de la vitrine poussiéreuse avec les papiers de gâteaux gras et le jus d’orange industriel que je m’étais juré de ne plus jamais boire. Aller, de toute façon j’ai pas vraiment le choix :) Je passe donc deux heures avec mon ptit dej, mon dico pour travailler un peu mon espagnol et surtout la télé qui passe les infos. J’ai eu beaucoup de temps pour me rendre compte que les informations ici sont pires que chez nous. Ils passent des horreurs en boucle. J’ai vu le visage d’un enfant défiguré par une agression, une dizaine de fois avant de passer à l’info suivante, l’humiliation d’une voleuse de portable repasser pendant 10 minutes, un enfant victime de je-ne-sais-quoi passer en interview avec deux flics à ses côtés alors que le moment lui semblait clairement insupportable… Ce n’est même plus de l’information orientée, c’est vraiment du bourrage de crâne. Et le pompon après les infos, sur la même chaîne, les redifs exagérées de la télé réalité et le peu de Péruviens dans le bar, les yeux rivés (enfin moi aussi tout le monde s’en doute, faut dire qu’elles sont un peu gaulées et de toute façon je ne comprends rien haha).


Deux heures plus tard, j’arrive à Chanchan. Un site Archéologique classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ce sont les ruines encore clairement visibles de “l’empire” des Chumis, une civilisation datant de l’an 1300. Malgré les tremblements de terre et les pluies torrentielles qu’a subi le pays, le site est impressionnant et remarquablement bien conservé. Bon j’avoue que le passage fléché de ce labyrinthe sans explication m’a rappelé Ia traversée d’Ikea mais la grosse différence est que… j’était tout seul (je suis pas vraiment habitué à visiter des sites culturels aussi tôt pendant mes vacances 😀 ). Enfin non, pas tout seul, il y avait aussi un mec du site, à qui j’ai demandé des explications et sur les 15 minutes de conversation, j’ai retenu qu'avant les murs faisaient 4 m de haut et que les Chimus vivaient principalement de la pêche (facile, on est dans le désert et au bord de l’Océan), moi je trouve que c’est pas mal au vu de sa façon d’ouvrir la bouche..... et de mon niveau d’espagnol je vous l’accorde haha.

Chanchan 

Il est maintenant midi, je viens de passer 8 h moyennement agréables mais tout va bien. Je décide d’aller à Haunchaco, "The place to go" avec sa plage agréable et ses bars et restaurants tranquillos. Je prends un bus pourri où certains me regardent comme un Greengo sans trop de sympathie. J’arrive à The beach et baaaaaa... même si c’est joli, c’est bien d’la merde :)

Huanchaco 

Je décide d’aller manger sur une terrasse, me pose, les prix sont trop chers et le passage devant la cuisine ne m’a pas rassuré. Je prends de quoi me désaltérer. J’en profite au passage pour proposer aux deux petits vieux en plein repas d’amoureux de les prendre en photo avec la mer derrière, histoire de recevoir un sourire puis retourne le long de l’océan. Un type d’une cinquantaine d’année m’aborde en Allemand (oui je commence à être un peu tout rouge 😀 ) je lui répond en Allemand que je suis Français et là c’est parti. Antonio a vécu en France. Il aime la vie… à sa manière. Nous discutons et rions de conneries pendants 30 minutes avant que je lui demande un bon endroit pour manger. “Suis-moi el Frenches, je t'emmène chez la Mama, elle fait de très bons plats à pas cher”. Et là surprise, il sonne à la porte d’une maison et nous voilà chez la Mama. Elle tenait auparavant un restau et maintenant elle fait à manger chez elle et ses amis viennent s’ils le souhaitent pour manger en échange de 3€. Je me retrouve donc à bouffer une soupe aux pâtes puis riz et poulet et salade d’avocat en dessert avec les conneries des trois mecs à la table. Je suis blindé !!! j’ai passé un bon moment.

La Mama 

J’offre une bière à Antonio avant que nos chemins se séparent. Je le remercie pour ce petit moment de soleil de ma journée. Il me remercie pour ma confiance. Je rentre à l’auberge et mes pensées qui commençaient à se mettre en place depuis le début de mon voyage se structurent. Je refais le point sur ce que j’ai vu depuis quelques semaines avec un œil… bien différent :

Il y a tout de même certains aspects qui me chiffonnent dans ce que je vois. Les automobilistes klaxonnent avant même que le feu soit vert, les taxis klaxonnent tout le temps leurs potentiels clients, les infos pratiquent de la fabrication du jus de cerveaux, la malbouffe industrielle fait sa place entre les fruits et légumes, les bus polluent comme on ne peut imaginer et vu leur façon de conduire, les chauffeurs sont certainement rémunérés à la commission. Les vieux dorment dans la rue à côté de leur chariot de malbouffe en attendant que les bourrés sortent pour acheter une barre industrielle à se mettre sous la dent alors qu’il y a un bon fruit fraîchement cueilli juste à côté. Que ce soit à Eco Truly Parc, chez Marco ou dans cette auberge, les lumières restent allumées sans personne à éclairer, juste pour que le prochain n’ait pas à lever son bras et chercher dans le noir cet interrupteur qui est toujours placé au même endroit. Le chauffeur de bus finit sa bouteille de jus, ouvre sa fenêtre et la jette, le site archéologique classé au patrimoine mondial de l’UNESCO a un chemin d’accès qui n’a certainement pas été nettoyé depuis des années. A Eco truly park la verdure est abondante car l’eau arrive en masse et il m’a fallu demander à 4 personnes pour savoir qu’elle provient directement de la rivière.

“- Elle est là, c’est le principal

- oui mais si demain il n’y en a plus ?

- Et bien nous verrons à ce moment là !!!”

Mais cette rivière vient de la Cordillera Blanca et je me remémore les paroles du guide de montagne qui m’expliquait qu’il y a 15 ans, la Laguna 69 était parmi les glaciers alors que la semaine dernière, j’y suis allé avec mes chaussures et j’ai bel et bien marché sur de la terre.

Je sens que malheureusement, ce pays, ou tout du moins ses grandes villes, suivent un chemin qui ressemble à celui emprunté par les Occidentaux il y a quelques décennies avant de se rendre compte que nous faisions fausse route. L’objectif premier est évidemment d’avoir un travail et de gagner de l’argent. La pollution, l’écologie…. ça vient après. Enfin pour la plupart.

De l’autre côté, on voit des organismes se mettre en place, des panneaux “prenez soin de la plage, elle vous appartient”, des écovillages se construisent partout dans le monde, de plus en plus de végétariens, un artisanat qui survit, des vidéos sur Facebook qui démontrent que nous nous sommes trompés dans la méthode d’agriculture industrielle, des anciens salariés de bureaux qui deviennent des “néo-paysans”...

Mais ce constat ne m’a pas attendu, il est accessible depuis bien longtemps mais rien ne change.


Il se construit alors dans ma tête un schéma qui me permettrait de mettre en harmonie mes convictions, mes paroles et mes actes.

Je cultive depuis quelques années la parole positive et j’ai conscience de son impact, mes compétences Marketing m’ont enseigné l’écoute du marché ainsi que la promotion efficace d’une idée et mon métier de commercial m’a appris à mettre en place un business plan dans son intégralité.

Des graines sont en train de germer dans ma tête et j’ai bien l’intention de les cultiver. J’ai des choses à apprendre au Pérou, d’autres en France. J’espère que pour la première fois de ma vie, j’aurai la main verte ;)

Tout cela orientera certainement mes prochains choix de voyage. En attendant, je vais rejoindre Romain et Jourdain pour passer du bon temps mais je garde bien en tête ces projets naissants dans un coin.


Bon autrement je suis certain que si j'avais passé plus de temps j'aurais apris à aimer cette ville qui a sans aucun doute des merveilles à montrer et pour parler de la soirée rassurez-vous, je ne suis pas parti faire dodo dans ma chambre à 20 h. Je suis dans une auberge de jeunesse quand même 😉

Sacrés circus Colombiens 

Je m'en vais maintenant vers Chachapoyas en espérant que mon arrivée sera ... plus agréable 😉

7

02/03/2017 - Chachapoyas

Chachapoyas, j’arrive enfin dans une ville qui me convient. Perchée à 2300m dans la Cordillère des Andes et à l’entrée de la Selva, (autrement dit l’Amazonie), les habitants sont souriants, ouverts, tranquilles… le calme est plus présent. Les montagnes entourent les lieux et installent ce sentiment d’appartenance à la nature. Chachapoyas est réputée pour avoir de nombreux sites archéologiques aux alentours, un bon nombre de randos, des cascades… bref, un endroit parfait pour les backpackers curieux :) Je m’y plais déjà.

Le gros détail c’est qu’ici, je retrouve Romain et Jourdain. Nous ne nous connaissons que de quelques heures voir même de quelques minutes lors d’échanges sur le Pérou quand nous étions au bar de Jourdain à Tours. Nous avons souhaité apprendre à nous connaître dans ce pays qui représente, à ce moment, notre seul point commun :). Bon j’admets savoir également que ce sont deux bons fêtards, ça aide !!

La Plaza de Arma et notre Auberge avec Romain et Jourdain 

Notre première soirée me confirme que nous allons bien nous entendre. Nous avons la même façon d’entreprendre une bonne soirée. Nous abordons les Chachapoyens sans hésiter et sommes toujours bien reçus, bien conseillés et particulièrement appréciés. La soirée est très agréable et je sens que ce n'est qu’un début. Nous décidons ensuite d’aller en boite. Je crois que je ne me lasserai jamais de ces lieux où la salsa met tous ces Péruviens debout pendant des heures. Je ne remercierai d'ailleurs jamais assez mes parents pour m’avoir incité à faire de la danse quand j’étais petit. Surtout quand mon pote va vers une demoiselle qui lui fait des signes, qu’il l’invite à danser et qu’elle lui répond “non non, ce n'est pas avec toi que je veux danser, c’est avec ton copain” 😀

Le lendemain, j’ai le plaisir de découvrir que mes deux associés sont des fanas de cuisine. Il faut que je précise que l’on peut manger pour 2 - 3 euros au Pérou et qu’il est par conséquent plus coûteux de faire sa propre bouffe. Peu importe, mes deux chefs aiment faire le marché, être aux fourneaux, bien manger et surtout… partager avec qui voudra bien s'asseoir à la table :) J’avoue que personne n’a jamais refusé de se faire offrir un repas, surtout avec des bons vivants agréables comme eux ;)


"Cevice" traditionnel, Aubergines à la Romaine et Cevice remastérisé à la Française : une tuerie ;)

Cette étape de mon voyage aura été marquée par deux treks que j’ai particulièrement bien vécus.

Kuélap est une ancienne forteresse construite à plus de 3000 m d’altitude par les Chachapoyas, un peuple Andin dont le nom signifie “guerriers des nuages”. Ce site Pré-Inca peut se visiter simplement en prenant un bus ou plus sportivement en empruntant le chemin de 9 km (aller) avec près de 1000 m de dénivelé à travers les montagnes. Bien évidemment, on est des grands sportifs alors on part de la rivière pour aller jusqu’en haut :)

En chemin on rencontre trois Péruviennes qui, comme nous, ont opté pour la difficulté de ce trajet. L’une d’elles est justement guide dans la région et profite d’une journée de repos pour faire découvrir le site à ses copines (normal). Sans vraiment le décider officiellement, nous nous joignons naturellement à elles et profitons du savoir de notre guide improvisée pour découvrir ce petit paradis perché en haut de la montagne.

La rando pour arriver à Kuelap 

Kuelap, la forteresse des Chachapoyas :

Kuelap 

Le site est merveilleux mais ce ne sera pas ma seule surprise de la soirée. En effet, la tête dans les nuages comme de bons vacanciers qui se respectent, nous n’avons pas prêté attention à l’heure. Il est 5h30, le soleil se couche dans deux heures et nous avons trois heures de marche. Ha oui, on est dans la merde !!!

Contrairement à certains, je prends cette situation comme une opportunité de découvrir cette nature au coucher du soleil.

Je me retrouve à marcher au côté de Clara, une jeune étudiante en Psychologie avec laquelle j’échange sur de nombreux sujets en espagnol. Je remercie au passage sa patience car marcher et parler sont deux choses difficiles à coordonner pour un homme mais alors marcher dans un petit chemin de montagne, dans la pénombre tout en parlant psychologie, en espagnol, je vous laisse imaginer ma galère :) Et le plus beau arrive enfin pour moi. La nuit tombe, la lune ne nous éclaire que faiblement et là je vie un instant magique. La nature reprend le dessus. Les animaux reprennent leur univers en nous imaginant loin. Les lucioles dansent par centaines. Le ciel étoilé s’offre à nous. Le chemin nous piège parfois et nous demande une attention particulière. Nous marquons régulièrement des pauses pour apprécier ce spectacle qui se joue quotidiennement et qu’il suffit de prendre le temps de contempler.

A l'arrivée nous retrouvons Romain qui, anxieux, cherche une solution pour rentrer. C’est vrai que nous sommes dans un petit village, à une heure de notre hostel… mais moi, je le sens bien :) Et quand bien même personne ne pourrait nous ramener, je me vois bien dormir chez l’habitant ce soir :) Le taxi qui arrivera quelques minutes plus tard ne me laissera pas ce plaisir mais nous rentrerons heureux de cette journée pleine de beaux instants.

Aller, plus que 9 km 😀

Le lendemain, nous partons pour Gocta, la soi-disant troisième plus grande cascade du monde. La randonnée est bien moins importante qu’hier (que 5 km aller) alors on y va à la cool, comme si nous avions aimé la leçon d’hier :)

Là nous sommes de plus en plus dans un décor qui se rapproche de la jungle, tout en restant facilement accessible. J’adore. Je ne sais pas pourquoi mais cette densité de végétation me plait, m’attire, j’aime ce côté tropical et encore plus quand il est en légère altitude (oui 3000 m c’est normal au Pérou 😀 ).

En chemin nous avons le plaisir de tomber sur un paysan qui fait son jus de sucre de canne traditionnel. Un régal pour les yeux et pour les papilles.

La fabrique de jus de sucre de canne traditionnelle 

Après cette pause inattendue, nous reprenons notre route. Je me retrouve à marcher avec Romain et à échanger sur des sujets de connexion avec la vie, de la force des éléments et tout autre sujet qui, certainement influencé par le décor qui nous entoure, nous plongent doucement dans une ouverture spirituelle avec les paysages que nous admirons.

La rando vers Gocta 

Nous arrivons ensuite à une patte d’oie. A gauche le chemin touristique indiqué, à droite un petit chemin qui semble s’enfoncer vers… nous ne savons où mais il nous suffira un regard pour nous décider à le prendre. Nous arrivons à la “marche” de la cascade. En effet la cascade de 771 m est composée de deux chutes successives et nous arrivons donc au démarrage de la seconde jetée. Excités de nous trouver à cet endroit peu visité des touristes, nous mesurons immédiatement l’importance que nous pouvons accorder à cet instant. Nous traversons le cours d’eau pour nous retrouver au bord du précipice, devant une oeuvre d’art naturelle.

La marche de la cascade 

Se sentiment de privilégié nous donne à chacun l’envie de nous isoler un peu pour contempler pleinement ce spectacle qui se présente sous nos yeux émerveillés.

J’ai vécu un moment dont je n’aurais pu imaginer l’intensité.

Je me pose sur un rocher, le paysage en face de moi est grandiose avec ces montagnes verdoyantes et ce vide qui témoigne d’une immensité inégalable.

Je médite. Je me concentre sur l’instant présent. Je ressens des énergies et une forte envie de crier. J’ouvre mes bras vers ce monde si puissant qui danse devant moi, ferme les yeux et crie de toutes mes forces jusqu’à ce qu’une certaine place se libère en moi. C’est alors qu’il se passe un moment de vie extraordinaire. Les vibrations de ce lieu me remplissent. Mes larmes coulent à flots dépassant toute possibilité de contrôle. Mon sourire témoigne en même temps de la joie que je ressens. Mes mains se mettent à trembler puis ce phénomène gagne mes bras. Mes pieds et mes jambes ne sont pas épargnés. Mon pouls s’accélère, ma respiration s’intensifie. Me voilà alors en connexion totale avec ce lieu.

Je prends pleinement conscience de ce cadeau que m’offre la vie et je m’en nourris profondément… pendant près d’une minute.

Cet échantillon de lumière restera gravé à jamais dans ma mémoire. Merci

Cette étape à Chachapoyas est, jusqu’à présent, ma préférée. Je pense comprendre que j’aime être dans une ville relativement calme, avec la nature aux alentours et des gens ouverts et agréables. Il est certain que mes deux amis français ont joué un rôle dans ma façon d’apprécier cet endroit. Les chemins ne se croisent pas par hasard. J'ai pris une belle leçon de vie avec leur attitude positive du quotidien, leur spontanéité et la joie de vivre qu’ils dégagent sans arrêt, à en surprendre les Péruviens. Quel exemple !!!

Je prends maintenant la route pour Tarapoto, l’une des plus grande ville de la Selva. J’ai 8 h de trajet et cette fois ci, c’est pas dans un bus grande classe 😎

 Le combi

Dans ma prochaine étape je passerai une semaine avec Jourdain. Ensuite je serai seul pour une semaine, tranquillement pour me mettre dans le bain de mon séminaire spirituel qui se déroulera du 6 au 18 Mars (oui j’ai un peu de retard dans mes écrits, c’est un peu comme les cahiers de vacances quand on est gamin, c’est difficile de s’y tenir 😀 ).


Encore merci à Gocta et Romain pour ce moment de vie.

8

04/03/2017 - Tarapoto

Bien implanté à l’entrée de la forêt Amazonienne, Tarapoto est LA ville pour découvrir la Selva du nord du Pérou. Sans doute pour ses merveilles et aussi pour sa facilité d’accès. C’est ici que j’ai découvert que ce que j’aime dans ce Pays, c’est le sentiment de liberté.

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Me voilà parti de Chachapoyas. Les heures de bus passent et je m’enfonce doucement dans cette végétation de plus en plus dominante. Je regarde par la fenêtre et retrouve mes yeux d’enfant, quand mes parents m’emmenaient en vacances et que je découvrais… la France.

Des passagers ne comprennent pas pourquoi je prends des photos car pour eux, c’est loin d’être le plus beau à voir et je le comprendrai plus tard mais à cet instant, c’est déjà tellement nouveau pour moi.

En route vers Tarapoto 

Je retrouve alors, avec un léger regret, une urbanisation plus importante qu’à Chachapoyas mais à une échelle tout de même agréable. Ici c’est le pays de la moto. Chaque feu vert me rappelle les démarrages de Moto Grand Prix mais avec des mobylettes :) J’en rigole tout seul dans mon moto taxi. Cette ville est assez récente mais ce ne sont pas les constructions qui me l’on soufflé. Tout autour, les petites montagnes restent présentes et la végétation… waooouuu.

Tarapoto vue d'en haut 

Je me trouve un petit hôtel au calme où Jourdain me retrouvera le lendemain.

Mon complice français souhaitant découvrir les plaisirs de la pêche en Amazonie, nous partons en moto vers la rivière conseillée.

Grâce à des travaux imposant une déviation, nous tombons sur un petit paradis avec petites tables sous parasols en feuilles de palmiers, snack et hamacs, le tout au bord de la rivière avec une petite musique Combia (musique latine colombienne)... Comment ne pas couper le moteur et poser nos lignes :)

Le p'tit palace secret 

On mange, on se désaltère, on rencontre deux trois locaux et Jourdain sort le premier poisson. Un poisson chat un poil plus gros que ceux que je connais en France auquel il faut couper les nageoires piquantes et vénéneuses.

Première prise 

Après quelques heures à ramener la végétation des fonds de la rivière …

la pêĉĥêˆvégétale 

… on se décide à aller un peu plus loin.

Nous arrivons dans un endroit qui ressemble presque à un bidonville mais disons plutôt un village reculé. Nos premiers échanges se veulent rassurants. Nous mettons nos hameçons à l’eau sous le regard étonné des villageois qui ne doivent pas voir des blancos s’arrêter ici très souvent et là, encore une fois, on s’accroche dans le fond. On est bien comme des cons et tout le monde rigole discrètement mais on comprend bien que c’est pour nous. Vous savez, le genre de situation ou vous sentez les regards sur vous mais le silence essaie de vous prétendre le contraire :)

Rapidement les jeunes qui pêchent également se rapprochent, l’un plonge et va nous décrocher la ligne. L’histoire se répète, c’est au tour d’un adulte d’aller nous dépatouiller. Viens alors un type qui nous conseille d’aller sur le bout de rive d’en face. Il est d’ailleurs conducteur de barque (c’est un métier ici car les déplacements se font beaucoup par le fleuve) et nous dépose en face avec quelques locaux qui se font certainement à l’idée qu’ils vont pouvoir se marrer un peu :) J’obtiens alors ma première et seule prise.

partie peche N°2

L’après-midi touche à sa fin et nous rentrons en barque vers notre bolide. Nous remercions le conducteur par une bière chaude 😀 et commençons à discuter dans un milieu agréablement convivial.

C’est la fin de journée, la plupart sont revenus vers leur logement et tout le monde se retrouve dans la rue. Les adultes discutent par petits groupes devant les maisons, les gamins jouent au ballon et les ados font des parties de volleyball en pariant des petites sommes sur l’équipe gagnante. On se croirait dans une grande récréation.

Attiré par ce spectacle et entraîné par notre élan de spontanéité, nous demandons à jouer. Je te raconte pas l’attraction du village : les deux Greengos font du Volley !!! Hah bah dès que j’ai loupé la balle, une ola de rire s’est lancée, j’ai compris qu’ils se croyaient au cirque 😀 Bon bah si il faut aussi faire les clowns 😉 Quel bonheur !! Quel beau moment de partage !! et de plus, nous avons gagné 😜 Bien entendu nous n’avons pas pris les 2 euros de mise et les avons grandement remerciés. Les échanges avec les gosses étaient aussi magiques.

Même si le poisson s’est fait timide, la journée aura été un vrai régal.

Les joies du p'tit village 

Le lendemain je pars pour aller voir UKRU, une association qui récupère des animaux dans le besoin de soin et qui pourrait avoir besoin de volontaire. Il n’ont finalement pas besoin de mon aide de mec qui n’a eu qu’un hamster dans sa vie mais j’en profite pour faire un tour et admirer quelque êtres peu communs en Europe.

Premier contact avec la faune 

Je retrouve ensuite Jourdain et nous sortons boire un verre car nous sommes samedi soir et leur façon de faire la fête nous a toujours montré que c’était une attraction que nous apprécions vivement.

Après quelques liqueurs de fourmis géantes nous partons dans une boite à ciel ouvert et là, même constat, ils sont trop cools, ils aiment danser, on fait des rencontres… bref, je n’ai plus de doute, ça ne dépend pas de la ville, ils savent s’amuser :)

Le dimanche, Milka, la rencontre d’hier soir de Jourdain (oui elle s’appelle vraiment Milka, j’ai vérifié, et il n’y avait pas de Marmotte) nous emmène dans un village avoisinant : Lamas. Nous visitons un château de 2006, d’un propriétaire Italien qui a décidé de craquer son slip ici, en plein milieu du village. Pourquoi pas 😀

Chateau de Lamas 

On se balade ensuite dans le village et comme d’hab, on tombe sur des trucs de ce genre que j’ai, ce coup-ci, pris en photo pour que vous compreniez l’expression : “c’est quand même pas le Pérou !!!” et ben si :

le caca sans complexe 

Le soir il y a une scène pour l’occasion du carnaval (assez peu développé à Tarapoto, c’est pourquoi je n’en parle pas plus). Je m’y rends seul et il me suffira de quelques minutes pour que William, un local de 35 ans, vienne me parler. Nous sympathisons. Jourdain et Milka nous rejoignent avec Johana, une amie de Milka. La soirée est lancée. On discute, on danse, on chante… Agréablement surpris, Johana danse très bien. Nous nous retrouvons vers la fin de la soirée devant la scène à danser comme des fous et les organisateurs nous demandent à maintes reprises de monter sur scène mais ma cavalière, par pudeur face aux gens de sa ville, ne souhaite pas franchir le pas. Alors que moi à ce moment là :) je pouvais monter sans me soucier d’un regard haha. Encore une soirée magique 😀

Le lendemain Jourdain part pour continuer son périple vers le sud du pays. Ayant fait part de mon souhait de faire une rando non touristique en pleine forêt, Johana se propose de m’emmener vers un trek que peu de personnes empreintent.

“- Mais johana, je compte faire ça dans la semaine et toi tu travailles.

- c’est pas grave je décale ma journée

- et pourquoi tu ferais ça ?

- parce que tu vas te perdre si je ne t’accompagne pas”

OK, ils me surprendront toujours avec leur générosité.


Le lendemain, nous commençons notre rando au petit matin. Je suis impatient de découvrir cette Selva naturelle et je ne vais pas être déçu. Assez rapidement elle m’interrompt et me montre des petits singes dans les arbres. C’est dingue ce que ça fait de les voir chez eux et non pas dans une cage. Le charme est totalement différent. Je suis… sur le cul.

Plus nous avançons et plus le chemin se rétrécit. Nous rencontrons un cacaoyer. Une première pour moi. Elle l’ouvre en le tapant sur une pierre, le prend et me le tend en me disant de goûter. Wooouuaaaaa, je suis avec Rahan dans la jungle, trop cool :)

Cacaoyer 

L’expérience se répètera sur un caféier...

Caféier 

… puis avec du huayruro, un fruit qui ne se mange pas mais il est rare et porte chance et force à ceux qui le trouvent et le portent.

Huayruro

Nous trouverons ensuite du Achiote que les aborigènes utilisent pour se peindre le corps avant leurs cérémonies.

Achiote 

Johana me fera ensuite goûter un Caimito, un fruit succulent dont les bords ne sont pas à manger car ils collent comme de la glue (vaut mieux le savoir).

Nous traverserons ensuite une “ferme” d’altitude. On sent bien que celui qui doit vivre ici ne fait pas ça pour le profit mais plus pour le palais sauvage dans lequel il s’est implanté. Nous en profiterons pour donner quelques fruits aux animaux et pour décrocher une noix de coco. Un délice !

La Chacra 

Nous continuons notre chemin à travers ce que je cherchais, la pleine jungle.

Nous arrivons ensuite vers le sommet. La pointe de cette colline aride et magnifiquement entourée de… ça :

Nous profitons de ce lieu pour un pique-nique avec cette vue splendide.

En entamant notre route du retour, nous tombons sur une tortue, là, en haut de cette colline, alors que l’on vient de passer des heures à grimper et qu’il n’y a pas la moindre trace d’humidité et peu de végétation pour la nourrir. Johana m’explique que parfois, les aigles (ha oui, j’ai aussi vu des aigles :) ) les prennent comme proies, les déposent au sommet et après quelques minutes d’acharnement à ne pas pouvoir percer leur carapace, les abandonnent là. Dans ce désert immense pour ces si petites pattes. Ne sachant pas trop quoi faire et ne voulant pas non plus désorienter la nature que je ne connais que très peu, j’hésite. Puis je me laisse emporté par mon intuition et décide de redescendre cette Tortue vers la ferme 1,5 km plus bas. L’épreuve fut difficile à travers cette forêt dense et ses pentes abruptes mais le bonheur partagé avec cette tortue valait bien quelques gouttes de sueur, des coupures de feuilles sur les jambes et deux trois ramassages sur le cul :) J’ai partagé ma tomate avec cette créature fascinante. J’aurais pu la regarder pendant des heures. Arrivé à la ferme, nous l’avons rafraîchie puis elle s’en est allée vers… sa nouvelle maison.

Tortutagna 

Je me suis renseigné en rentrant et je ne rentrerai pas dans le détail mais nous n’avons pas fait d’erreur et j’espère que petite tortue s’est retrouvé un abri :)


Nous marchons ensuite pendant des heures pour rentrer. J’ai la chance de voir à quelques mètres de moi, un serpent d’environ 1,5 m de long, s’éloigner de nous. Venir dans la jungle sans voir un serpent… j’aurai été déçu :)

La petite tortue a utilisé nos dernières ressources en eau, nous sommes fatigués de marcher et avons soif. Au bout de quelques kms il y a un endroit type Guinguette sur le bord de la rivière. Nous y faisons un petit détour en espérant y trouver de l’eau. Personne !!! mais un robinet et une piscine :) Alors moi qui m’apprête à sauter dans l’eau me fait freiner par le côté respectueux des Péruviens (où peut être plus trouillard haha). Bref je suis déçu mais elle me dit de lui faire confiance. En effet, je n’aurais pas dû douter d’elle et de ses bons conseils. Voilà le pompon pour la fin de journée :

détente en el rio 

Baignade de fin de journée, tranquillou, sans touriste, juste des petits groupes de ci de là. Au top !!!

Il nous reste un peu de chemin et la nuit tombe (tiens, ça me rappelle une histoire) 😀

En effet, nous finirons à marcher de nuit au bord de la rivière, à mettre parfois le pied dans la merde, à se faire chasser par les chiens des maisons agricoles du coin…

Quelle belle aventure. Merci Johana, ce trek restera parmi les meilleurs.

Johana 

Le surlendemain, je me décide à partir pour la cascade de Carpishuyacu. Normalement il faut payer 70 - 85 soles mais je décide de m’y rendre par mes propres moyens et éviter ainsi les touristes. Cette rando n’aura rien à voir avec la précédente mais j’aurai, encore une fois, apprécié ce merveilleux paysage et cette fois sous la pluie. J’ai pris la flotte pendant 4h, j’étais trempé de la tête au pied mais j’étais BIEN :)

Je n’ai donc que peu de photos mais j’ai pu me baigner, sauter de la cascade de huit mètres et profiter des bains thermaux naturels pendant deux heures.

 Carpishuyacu

Au retour, j’essaie de faire du stop. Je comprends rapidement, de part la fréquentation de cette route, que je vais galérer. Il faut aussi dire que je suis trempé et que ça pourrait faire hésiter les plus altruistes. Au bout d’un certain temps, un mini bus de touristes s’apprête à partir. Ils m’interpellent (me voyant galérer) et me proposent de monter avec eux. A ce moment il faut comprendre qu’ils ont tous payé 85 soles et moi, le Blanco en vacances avec du pognon dans les poches, nada, que dalle !!! Je fais donc profil bas. Quelques minutes plus tard, le bus s’arrête, les 8 voyageurs descendent pour aller se restaurer dans le bouiboui du bord de route avec un succulent repas préparé et certainement compris dans le prix. Moi je reste à l’écart. Puis, la mamie qui accompagne ses petits enfants en vacances me dit “prend une chaise et viens t’asseoir, tu ne vas pas rester la”. Elle insiste. Je m’assois. Elle me tend du pain. Elle insiste. Je le mange. Ils apportent un plat typique de poulet entouré d’une sorte de pâte de riz mélangé avec de la banane écrasée, le tout cuit à la vapeur dans une feuille de banane. Il manque évidemment une assiette, la mienne. Normal. La grand mère me donne son assiette. Elle insiste et mange dans mon assiette et dans celle de papi également. Du coup l’organisateur se prend au truc, me sert un jus d’orange puis plus tard un café. Je les aide quand même à débarrasser, enfin j’hésite (nan je déconne). Je ne leur ai pas dit mais moi… j’avais déjà bouffé haha :)

Super mamie. Elle a passé un message à ses petits enfants, au guide, aux deux touristes avec nous et à moi, évidemment.

Je m’aperçois en faisant le point sur mon clavier que j’ai bien profité de ces deux semaines à Tarapoto. J’ai fait de belles découvertes et de touchantes rencontres. Là deuxième semaine aura été plus saine et plus calme car je me prépare doucement à rentrer dans mon “stage spirituel” qui à influencé ma destination. Je vais donc être en rendez-vous avec moi-même lors de ces deux prochaines semaines.


Espérant que j’en ressortirai en me connaissant mieux :)

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25/03/2017 - Tarapoto

Le séminaire de développement personnel à Tarapoto.

Ce passage de mon voyage était important à mes yeux. Tellement important, que j’avais peur d’être déçu. Et bien je peux dire que j’en ai reçu plus que ce que j’en espérais 😀

Mon schéma de pensée Occidental me demande toujours du concret pour adhérer à une idée. C’est pourquoi je voulais vivre cette expérience aux méthodes traditionnelles d’Amazonie dans l’espoir d’ouvrir résolument la porte à ma spiritualité. Aujourd’hui je peux dire que c’est chose faite.

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Avant de me lancer dans la rédaction de cette étape qui devrait en faire sourire certains, en toucher d’autres et peut être en effrayer une partie, je tiens à préciser qu’il est difficile de s’exprimer sur ce sujet. Je sors de deux semaines en immersion avec une culture où l’on parle de coeur, d'âme et d’esprit, avec un naturel sans complexe, presque perturbant pour un occidental dont les sciences essaient de tout démontrer, où l’éducation nous apprend à penser de façon rationnelle et où les religions, originellement porteuses de spiritualité, sont en retrait.

Je suis conscient qu’il n’y a pas une bonne manière de formuler ses idées sur ce sujet très personnel à un groupe de personnes aux opinions diverses. Ainsi je sollicite votre indulgence en pardonnant les formulations synthétiques pour certains et trop idéalistes pour d’autres.

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Lundi 6 mars, j’entre donc en ce lieu intriguant dans lequel je vais passer deux semaines, pour une découverte avec moi-même, à travers des méthodes ancestrales Amazoniennes, minutieusement orchestrées par un Docteur Français qui vit depuis 35 ans auprès de ces traditions aux vertus subtilement profondes.

Ce docteur et son équipe nous ont réservé un accueil agréable. Nous serons donc un groupe de 16 personnes avec des profils et des motivations très variés. Les âges vont de 19 à 65 ans et plus de la moitié du groupe vient pour réitérer l’expérience. "AH BON ! mais c’est si bien que ça ???" Je dois préciser que je suis l’un des rares dans le contexte “tranquille, j’ai le temps, je voyage et j’ai pas de contraintes”. Pour la plupart c’est “j’ai posé 2 semaines et demi de congé, ça me coûte un bras et j’ai deux jours d’avion pour venir de l’autre bout du monde”.

Le centre 

Durant ce séminaire, nous allons donc travailler sur le corps, les émotions, le mental et l’esprit pour une purification, une régénération et une harmonisation de ceux-ci. Les méthodes traditionnelles amazoniennes utilisent la connaissance et les vertus des plantes que nous offrent le poumon de la terre, selon des processus et des rituels très strictes. Ceux-ci répondent à des règles ancestrales transmises de génération en génération.

Nous allons donc commencer par prendre des plantes “purgatives” pour, comme son nom l’indique, purger notre corps mais aussi notre esprit. Toutes les plantes que nous prendrons sont présentées sous forme d’infusion (je vous laisse de cette manière une belle image et vous épargne l’odeur et le goût). Chacun de nous aura des plantes associées à son vécu et son besoin. Pour ma part, j’aurai la Wayar Panga, une plante de terre pour m’aider à mettre en racine mes idées, autrement dit à incarner un peu plus mes pensées. Genre j’ai la tête dans les nuages bah voyons haha 😅

Wayar Panga 

Nous avons un autre jour pris de l’Azucena (Lys blanc). Une plante florale de rivière qui travaille sur l’équilibre entre le masculin et le féminin et nettoie de l’intérieur les parties génitales. Je ne sais pas trop quoi en penser mais vu de l’extérieur, pas de changement 😊

Azucena 

Une fois notre corps et notre esprit purgés, le tout accompagné d’un régime, nous étions près pour recevoir la plante curative (que je ne citerai pas pour éviter d’éventuelles recherches internet qui pourraient vous diriger vers des contenus inadaptés 😎). Cette plante sacrée est en réalité une liane qui, associée à une autre plante et cuisinée selon une recette très précise, permet un voyage à travers son univers intérieur avec une connexion vers le monde qui nous entoure. Celle-ci est impressionnante. Elle travaille à la fois sur le physique, le psychique et le spirituel. Elle vient scruter l’intérieur de notre corps et peut nous révéler des éléments oubliés ou refoulés ou encore même ignorés alors qu’elle ne fait que mettre en lumière des formes présentent en nous. Pour imager l’ensemble, le docteur nous dit que c’est comme un microscope. Quand on regarde avec nos yeux, on voit une forme avec ses limites. Lorsque l’on observe avec un microscope, on distingue alors une multitude de nouveaux éléments comme par exemple des microbes. Et bien on peut dire que cette plante est capable de voir en nous de façon microscopique et peut donc nous apporter des réponses précises. Il est donc conseillé de lui poser une ou plusieurs questions pour ainsi générer une attention dans notre intérieur que la plante rencontrera et à laquelle elle répond avec une intelligence, une sagesse et une vérité que l’on ne peut pas soupçonner. Je sais que ce que j’écris paraît invraisemblable. Vous penserez peut être “je sais pas ce qu’il a fumé mais ça devait être de la bonne”. Ce que je peux comprendre car je penserais certainement la même chose si je ne l’avais pas vécu mais je vous assure que je résume.

La Maloca 

Lors de ces cérémonies, on comprend notamment que notre corps ressent tout. Tout est question... d’énergie (pour faire simple). Notre corps est un outil qui permet de traduire ces énergies en émotions, en intuitions, en peur, en état d’alerte, en motivation, en joie…

Nous ne savons plus nous écouter. Pire, on a appris à mettre de côté nos émotions. “Il ne faut pas pleurer, c’est pour les fiottes”. Hors le chagrin est un élément indispensable qui est porteur de message. Si on l’enfouit, ses messages ne nous arriveront pas et nous n’aurons donc pas appris de cette souffrance. “Tu es mal dans ton travail mais au moins tu en as un” une belle porte fermée à la recherche de sa vocation, celle qui nous permettra d’être heureux au quotidien.

Bref, il est important d’écouter les signaux que nos sens intérieurs nous envoient, pour les laisser s’exprimer jusqu’à en comprendre le sens. Vous savez ces moments où vous ne le sentez pas mais vous ne savez pas pourquoi. Ce type qui ne vous inspire pas alors qu’il n’a rien fait de mal. Cette sensation de bien être auprès de quelqu’un sans raison particulière. Cette impression agréable à la découverte d’un lieu. Cette intuition qu’il ne faut pas accepter alors que tout le monde vous dit le contraire, ça vous parle ??? Et bien c’est notre corps qui reçoit des énergies invisibles par nos cinq sens mais que le chef d’oeuvre qu’est notre enveloppe corporelle ressent. Et ces moments, avec cette plante, on les voit, on les ressent. Ces informations sont transmises à notre cerveau et c’est ensuite, et seulement ensuite, que nous devrions mettre en marche notre raison.

Je ne parle pas de vivre dans le monde des Bisounours et de fuir la réalité et notamment celle que nous inflige la jungle urbaine dans laquelle nous devons évoluer. Il s’agit simplement d’offrir à notre esprit les bonnes données pour que notre raison ait les cartes en mains afin d’avancer en pleine conscience de ce que l’on vit, de ce vers quoi on va.

El árbol  

De mon expérience, j’illustrerais le passage de cette plante dans mon corps comme un petit train de nettoyage qui traverse lentement nos intestins que l’on peut considérer comme le “Méga Store” de nos émotions du passé. Il passe alors devant des petits paquets pollués et nettoie tout ça. Au même moment, les émotions peuvent nous apparaître sous des formes diverses et avec des intensités variables. Ce qui est sympa, c’est quand la p’tite locomotive s’arrête à un endroit et qu’elle sonne l’alerte à tout le corps du genre “LES GARS !!! on vient de passer devant “l’égo” et il y a un bon tas de merde, ouvrez les vannes il va falloir faire de la place !!!” Je laisse à chacun le soin de créer sa bande dessinée dans sa tête 😝(j’espère que certains s’attarderont sur la p’tite locomotive lol). Et puis le p’tit train passe aussi devant nos belles valeurs. Ma modestie m’empêche de les citer😋 mais ces moments sont des instants où l’on reprend conscience que la vie est belle. Ca nous rappelle pourquoi on est là. Ca remplit de joie. ca fait du bien 😀

Bon pour redorer un peu tout ça, ce qui est merveilleux c’est qu’après, on se sent bien. Comme lavé de l’intérieur. De nos émotions, de nos énergies, de nos tracas...


J’ai personnellement posé des questions à la plante et les réponses que j’ai reçues étaient pour certaines d’une vérité absolue. Ce sont des réponses évidentes. Il n’y a pas l’ombre d’un doute. Ces réponses viennent de nous, c’est juste que la plante a fait un peu de ménage pour mettre en lumière des choses dont on avait oublié le sens.

Aller j’en dis pas plus, les détails seront verbaux avec les plus curieux 😷


Cette liane sacrée a aussi la capacité de transmettre des connaissances. C’est de cette manière que de nombreux témoignages nous révèlent que des paysannes sont devenues sage-femmes du jour au lendemain, que des docteurs ont reçu en un jour le savoir des plantes médicinales de toute l’Amazonie, que des artisans sont devenus guérisseurs…

Ces rituels ont également permis des diagnostics inexpliqués de personnes en phase finale qui peuvent encore vous le raconter, des années plus tard, pendant une randonnée en montagne si le cœur vous en dit. Des maladies ont également disparu après un nettoyage intérieur et un rétablissement des énergies. Bref les témoignages sont nombreux et époustouflants.

J’ai d’ailleurs été très touché par l’histoire d’une séminariste qui venait pour la seconde fois. Elle m’a expliqué son passé très lourd et difficile qui lui a valu une vie de calvaire avec des humeurs et des colères non maîtrisées incessantes qui posaient souci sur sa sociabilité. Qui voudrait avoir comme ami une personne qui tape sa crise pour rien ? Elle a tout fait pour s’en sortir, psy, thérapie, hôpitaux, médecine douce… pendant près de 15 ans. On lui a même proposé l'hôpital psychiatrique. Les envies suicidaires et les dépressions lui pourrissaient la vie.

Elle était alors venue faire ce stage, un peu comme pour essayer une énième méthode mais à laquelle elle croyait. Elle était repartie du séminaire un peu déçue car contrairement à d’autres, elle n’avait pas reçu de message mais elle avait ressenti comme un massage, dans tout le corps. Bon, que penser de ça finalement. Et puis elle rentre en France, les jours passent et elle s'aperçoit que ses réactions ont complètement changé. Elle ne sait pas l’expliquer mais ses colères ne s'enflamment plus, ses humeurs ne la dominent plus, elle peut enfin trouver une vie calme et paisible. La plante l’a littéralement lavée de l’intérieur en douceur car c’est ce dont elle avait besoin. Ce séminaire a changé sa vie et elle était présente aujourd’hui pour finir le travail commencé.

Ce qui est merveilleux, c’est que pour accéder à tout ça, il suffit d’avoir de la sincérité et la plante s’occupe du reste.

La liane sacrée 

Enfin, il y avait une troisième famille de plante : les plantes maîtresses. Celles-ci agissent en douceur dans un processus long et paisible. Elles ont la faculté d’affiner la perception intérieure et d’intensifier les rêves. Moi j'aurai le droit à l’Ajo Sacha. Une plante de feu, masculine, qui travaille aussi bien sur le physique que sur le psychique et le spirituel. Elle renforce l’immunité, aide à faire le tri sur l’appartenance de nos émotions (ce qui n’est pas à moi, ça dégage !!!) et elle nettoie gentiment au passage.

Ajo Sacha 

Les Palos seront mon breuvage secondaire. C’est le jus d’un mélange d’une dizaine d'écorces d’arbres. Elles représentent l'enracinement, l’incarnation des idées dans le corps puis sur le développement de l’esprit.

Nous avons aussi bu ponctuellement un verre de Tabac. Bah même pour un fumeur, c’est carrément dégueulasse 😲 Mais bon, il parait que c’est une plante puissante qui apporte force, protection et structure. Elle aide à la décision et apporte une clarté mentale.


Même si je remarque une clarté d’esprit plus fondée, je préfère ôter toute idée illusoire immédiatement, je ne retiens toujours pas les prénoms, j’ai pas augmenté mon QI et je me perd toujours en ville 😇


Pour que ces plantes maîtresses se mettent à l’ouvrage correctement, nous serons isolés en forêt pendant 5 jours, là où aucune énergie humaine ne passe à part celles des organisateurs pour nous apporter notre “infusion” 3 fois par jour. Nous aurons chacun une petite cabane avec un lit, un banc, la rivière pour se laver, un bouquin et … et ba non en fait, rien d’autre. Pas de téléphone, pas de facebook, pas d’appel, pas de musique, pas de pote, pas de film... et même pas l’heure !!! Le tout démarrant par 48h de jeûne puis 1 bol de riz par jour, afin d’éveiller au mieux nos 5 sens mais aussi nos sens intérieurs.

ET BAH j’peux t’dire que t’as l’temps d’cogiter !!! Surtout pour un mec qui passe ses journées le cul dans le canap à pas sortir de chez lui d’habitude haha 😀

Bref, j’ai pris le temps (ou plutôt le temps m’a appris je ne sais pas ?) d’observer la nature, de réfléchir sur la vie. J’ai beaucoup pensé à chacun d’entre vous. J’ai compris que mes racines étaient un élément important pour moi. J’ai pensé à mon passé avec le sourire. J’ai envisagé des projets. J’ai fait le point, et j’ai envie de dire… la vie est belle 😌

C’est sûr que quand t’as bouffé trois bols de riz dégueux en cinq jours, la vie te parait soit merveilleuse, soit horrible mais il n’y a pas de milieu !!!

J’ai aussi occupé mon temps à regarder les fourmis géantes, les deux perroquets, la chouette qui m’a troublé à 3 m de moi, sur une branche en pleine nuit, éclairée avec ma frontale alors que je pissais (je vous laisse imager la scène), à chasser les moustiques en permanence, à fabriquer un nunchaku, à sculpter une statuette, à me fabriquer un séchoir en tige de palmier, à méditer… oui 5 jours c’est long.

Je n’ai pas vraiment de quoi illustrer car je n’avais pas mon téléphone mais voici quelques clichés d’un ancien séminariste photographe, Térence, qui était passé par ma loge quelques jours auparavant.

La diète en forêt 

Nous avons aussi eu le droit à un bain de plantes, suivi par un un soin personnel avec le guérisseur. Celui-ci m’a étonnamment trouvé une douleur sur une zone du dos que moi je qualifiais de “bah je suis chatouilleux c’est tout”. Sauf que pour lui, c’était des énergies qui n’avaient rien à faire là. Bah vas-y mon grand essaye toujours. Et là, il appuie pour vérifier, je sursaute “oui c’est bien là”. Il prend alors cette énergie en lui puis la recrache en criant fortement dans les airs. “Mais qu’est ce qui fait ?” Il répète l’opération deux trois fois puis rappuie sur l’endroit et… bah merde alors, ça ne me fait plus rien. Cette sensation de chatouille que je connais depuis l’enfance était en fait un nœud énergétique ? Wahou, ça laisse penseur. Il s’occupe alors de la partie complète de mon dos et me dit d’un air très sérieux qu’il y a un message là dessous et m’en indique la provenance.

Quand tu viens pour te détendre et que le mec t’enlève les nœuds du dos pour te les mettre dans la tête, tu repars avec un sentiment de… tu t’sens un peu con et obligé d’admettre 😮

Il s’avère qu’encore une fois il a mis le doigt sur un tabou dans ma vie dont je ne voulais pas voir l’impact. Ce séminaire m’a permis d’y voir plus clair et je sais ce que j’ai à faire désormais.

Après tous ces instants de réflexion sur soi-même, le séminaire touche à sa fin. Nous allons tous devoir respecter un régime particulier pendant plusieurs semaines afin que nos énergies se referment en douceur. Nous devons éviter les discothèques et lieux bruyants et devons éviter d’être en contact physique (et merde lol).


Mon esprit cartésien voulait du concret, j’en ai eu !!! Ce n’est finalement pas ce qui m’a le plus convaincu.

J’ai compris que la nature à une intelligence qu’elle nous communique sans qu’on s’en aperçoive. Que les énergies régissent notre univers et qu’elles sont dans la moindre petite émotion que nous émettons. Qu’il fallait dorénavant que j’écoute cet instrument incroyable qu’est mon corps et particulièrement les intuitions. Que je fasse les choses plus consciemment.

J’ai compris des phénomènes qui ne sont pas palpables et mon expérience ici ainsi que les témoignages des séminaristes m’ôtent le doute pour m'offrir un chemin de confiance et de certitude vers la spiritualité.

J’ai également compris le sens profond de l’humilité. Une valeur à laquelle j’ai parfois montrer un peu d’arrogance. A 29 ans, il n'est pas trop tard pour revoir sa copie.

Au delà de l’aspect spirituel, j’ai aussi vécu une belle expérience de groupe. J’ai vécu deux semaines avec des personnes aux histoires bien différentes et nous avons passé un moment merveilleux. Le respect de l’autre, de ses croyances, de son parcours, de ses peurs, de ses casseroles… le non jugement et la bienveillance étaient les maîtres mots de ce séminaire. C’est tellement reposant de se sentir pleinement soi-même :)


Le bien-être avec ceux qui nous entourent… ça me rappelle quelque chose...

Merci à vous 😉


Je me souviens du soir où j’avais dû choisir un titre à mon carnet de voyage. Je crois y avoir passé ¾ d’heure. Va trouver le titre d’un livre avant de l’écrire toi :)

Et bien aujourd’hui je peux dire que son sens est parfaitement justifié 😇

Cela fait un mois que je suis à Tarapoto, il est temps de continuer ma route vers de nouvelles aventures. Je vais donc passer mon dernier week end ici puis je naviguerai vers Iquitos. C’est une grande ville, encore plus enfoncée dans l’Amazonie où l’on accède par avion ou par bateau de marchandises en empruntant l’Amazone pendant trois jours. Cette ville sera un point de passage. Je rejoindrai ensuite Anne, une Française qui monte un grand projet d’éco village. Elle et son équipe ont besoin de volontaires pour continuer la construction du site, pour aider en permaculture et pour bien d’autres tâches. Je devrais y rester pendant un minimum de trois semaines.

Voici une présentation de ma future expérience :

Video : https://youtu.be/cdU1DtXPhH4

Site web : http://intiecolodge.com/fr/accueil/

Hasta luego 😎

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10/04/2017 - Lagunas

Samedi 25 Mars, je quitte la charmante famille de Jaime et Lupe qui m'ont accueilli chez eux pendant 3 semaines pour démarrer ma traversée vers Iquitos. Il me faut d’abord rejoindre Yurimaguas pour emprunter le fleuve qui me mènera à bon port. A partir d’ici, je rentre vraiment dans la Selva (jungle). Les routes sont peu, voir pas du tout développées. C’est donc le fleuve qui permet de voyager de ville en ville. Au lieu de faire 3 jours de bateau d’une traite, je décide d’aller jusqu'à Lagunas, un village de 7000 habitants, 7 heures de bateau rapido plus loin.

Bateau rapido 

Le fleuve est impressionnant. A certains moments il doit faire 100 m de large. Au bord, la végétation est incroyablement abondante. Je me souviens mes quelques virées en canoë sur l’Indre, la Dordogne, le lac d’Annecy, l’Ardèche… où l’on s’arrêtait souvent sur le bord sauvage pour profiter tranquille là où peu viennent à pied. Et bien ici, t’as juste envie de rester dans ta barque. Premièrement il faudrait trouver un endroit où débarquer là dedans :

Ensuite il faudrait une bonne machette pour avancer dans ce palais de verdure en espérant ne pas trop déranger la faune qui ne doit pas voir de Greengo très souvent.

Il est donc préférable d’aller de village en village plutôt que d’essayer de jouer à Mike Horn :)

J’arrive alors à Lagunas, l’entrée du village est sous l’eau mais les maisons sur pilotis laissent comprendre que c’est habituel.

Un homme vient me voir gentiment et m’explique qu’il est guide pour aller à la Réserve Naturelle. “ha bon mais il faut forcément un guide pour y aller ?”. Le mec rigole et me dit que oui c’est indispensable. Je prends sa carte et lui dis que je verrai. On sort du bateau en marchant sur des planches tenues par des poteaux en bois improvisés (pour eux c’est du solide mais pour un Européen c’est de l’impro 😀 ). Comme souvent, je me fait alpaguer par les motos taxi puis ici en supplément j’ai les guides de la réserve qui tentent leur chance également. Je commence à avoir l’habitude. Il suffit de les regarder avec le sourire et de leur dire “tranquilo” pour qu’ils me laissent peinard tout en me guettant à quelques mètres.Il faut rappeler qu’au Pérou et en particulier dans ces villages reculés, le travail est assez rare et ceux qui vivent du tourisme doivent faire leur place parmi les requins qui te sautent dessus s’ils veulent bouffer.

Sur le port, je recroise Miguel, le guide rencontré dans le bateau. Il me dit “Max, si tu veux je t’emmène en moto, nous discutons de la réserve et tu vois ce que tu fais”. Bon il me parait cool, let’s go ! Je monte sur la moto de son pote et nous allons … dans l’auberge de jeunesse de son pote haha. Ils ont bien joué leur coup :) Bon l’endroit est propre et agréable, il y a ce dont j’ai besoin, le prix est raisonnable et le mec sympa. Aller, bien joué Miguel, t’as gagné je pose mon sac.

En me renseignant je comprends que la réserve n’est pas un parc dans lequel on se balade à pied au gré du vent mais plutôt un lieu immense que l’on visite en barque sur plusieurs jours.

Ici il n’y a pas de banque. Petit détail auquel je n’avais pas pensé. Après quelques galères de tunes que j’ai résolu en sortant mes 100 euros de sauvegarde, je réserve pour partir le lendemain pour trois jours de bivouac. C’était pas ce que j’avais prévu mais comme prévu, je n’avais rien de prévu :) . Me voilà lancé dans cette jungle abondante avec des canoës traditionnels creusés dans le bois, avec trois allemandes et nos guides respectifs.

J’ai passé trois jours merveilleux.

Les lieux appartiennent totalement à la nature. Les animaux sont rois dans cette jungle grandiose. Nous naviguons, portés par le courant. On comprend très rapidement la diversité de la faune qui nous entoure. Nous traversons des passages restreints à travers les racines extérieures des arbres (oui c’’est normal ici, il y a même des arbres qui se déplacent de quelques centimètres par an), les lianes et les feuillages. On se croirait dans un film d’aventure, je kiffe.

Pendant ces trois jours, nous avons vu des singes, un paresseux, un iguane, des lézards, des perroquets, des martin-pêcheurs, des piverts, des tortues, des dauphins de rivière… Nous avons dormi dans des grandes cabanes en plein milieu de ce paradis. Les guides nous cuisinaient des plats délicieux (à condition d’aimer le poisson œuf au p’tit dèj), nous avons fait de belles rencontres avec d’autres visiteurs, j’ai péché, nous nous sommes baignés, nous avons navigué de nuit au petit matin avec nos lampes torche… C’était magique.

Nous avons eux deux jours de plein soleil puis de belles averses le troisième jour. Parfait pour rentrer à contre courant :)

Mes affaires sont donc trempées. En pagayant je pense à la suite de mon voyage. Je doit aller à mon éco village lundi prochain, nous sommes mercredi… il faut que j’aille à Iquitos, j’ai une bonne journée de trajet, il faut que je lave mes fringues et j’ai deux trois bricoles à faire… je décide donc de partir dès demain pour faire tout ça.

J’arrive à mon hostel, je me pose 20 minutes et là, Pierre débarque. Pierre, c’est l’Autrichien que j’ai rencontré par pur hasard devant l’agence, je sais pas ce qu’il foutait là et lui non plus. Il avait les jambes couvertes de piqûres de moustiques alors je m’étais un peu foutu de sa gueule gentiment. A quoi il m’avait répondu que c’est parce qu’il était venu en radeau, pendant 4 jours, depuis Yurimaguas. WOOOUUUAAA le ouf. Il compte maintenant acheter un canoë pour faire le reste de la rivière jusqu’à Iquitos. Je lui avais témoigné mon enthousiasme pour son aventure et il m’avait proposé de venir avec lui. Il comptait partir le lendemain et moi je devais rentrer dans la réserve pour trois jours. Nous nous étions donc quittés sur l’idée que s’il n’était pas parti dans trois jours, il pouvait passer à mon auberge et c’est ce qu’il était venu faire : me proposer de l’accompagner dans cette aventure folle de traverser la rivière sur un canoë jusqu’à Nauta (le village avant Iquitos).

L’idée est alléchante mais j’ai prévu la suite de mon voyage autrement donc je refuse sa proposition.

Nous marchons ensuite jusqu’au port pour que j’aille acheter mon billet pour le bateau demain. Il me quitte ensuite car il à un truc de prévu cette nuit. Je lui souhaite bon courage pour sa traversée et nous nous quittons là dessus.

Je marche alors vers mon auberge. En chemin je me dis qu’il va vraiment passer une belle aventure, qu’il va rencontrer plein de gens qui vivent sur la rivière, qu’il va pouvoir entendre des histoires incroyables et qu’il a bien de la chance.

Mais bon, moi j’ai pas le temps… mais merde, du temps j’en ai !!! Il me suffit de reculer mon écovillage d’une semaine. Rencontrer les nativos c’est ce que je veux faire de mon voyage. Je n’ai jamais eu plus de temps qu’aujourd’hui. Moi qui voulais que mon voyage se dirige grâce aux rencontres, aux intuitions et aux messages de la vie.

Je me remémore alors cette histoire :

C’est un prêtre qui tombe dans les sables mouvants. Un homme passe et lui propose son aide. Le prêtre répond : “non, j’ai toujours servi Dieu. Dieu me sauvera, Dieu me sauvera”. Une heure plus tard un 4X4 passe et lance le câble de remorquage au prêtre qui répond : “Non, j’ai respecté le chemin de Dieu toute ma vie, Dieu me sauvera, Dieu me sauvera”. Une heure plus tard, un camion de pompiers passe et déploie l’échelle pour le sauver. Le prêtre ne tend pas sa main pour prendre l’aide des pompiers et répond : “Non Dieu me sauvera, Dieu me sauvera”. Le prêtre meurt et monte au ciel. Il demande alors à Saint Pierre : “je ne comprends pas, j’ai servi Dieu toute ma vie et il ne m’a même pas aidé”. Ce à quoi Saint Pierre lui à répondu : “Tu te fous de ma gueule, on t’a envoyé un homme, un 4X4 et un camion de pompiers” !

Je me dis alors, moi qui souhaitait que les signes de la vie me guident, je viens de voir le camion de pompier passer devant moi et j’ai même pas tendu la main. Je ne sais pas pourquoi mais je ressens un bon feeling avec ce Pierre et mes semaines en séminaire m’ont appris à écouter mon ressenti et mes intuitions. En plus, il s’appelle Pierre, ça me rappellera quelqu’un de très proche ;) .

Je fais donc demi-tour mais il est déjà parti. Je fais tout ce que je peux pour le retrouver mais c’est trop tard. Ma seule solution est d’attendre devant son hôtel à partir de 5h30 du mat. OK.

Le lendemain, je m’assois devant son bateau à l’heure prévue. Après quelques heures d’attente, mon futur capitaine pointe le bout de son nez et me dit “Max, mais qu’est-ce que tu fous là ???”. Un regard a suffit pour qu’il comprenne que nous allons faire cette aventure ensemble :) Les sourires se lâchent.

Nous partirons donc pour un trajet en canoë, sur une rivière immense, en plein milieu de l’Amazone. Cette traversée se fait logiquement en bateau de marchandise pendant 3 jours et 3 nuits. Nous ne souhaitons pas vraiment dormir sur notre canoë et nos bras ne sont pas des moteurs donc nous en avons bien pour une semaine. Le but ne sera pas de faire une performance de vitesse évidemment, ce sera plutôt d’aller à la rencontre de ces villages, accessibles seulement par la rivière, où aucun bateau de touristes ne s’arrête.

Nous préparons notre navire et notre paquetage. Les gens autour sont impressionnés. Ils nous questionnent. Ils nous prennent pour des fous. Ils sont de plus en plus nombreux. Nous prenons quelques photos souvenir avec la famille qui nous a beaucoup aidés et nous commençons à partir.

Woouuuaaa, il est pas très stable notre canoë avec toutes nos affaires dedans. Les gens nous proposent de rajouter des flotteurs en bois sur les côtés. L’idée nous paraît… indispensable. Les villageois s’activent. L’un va chercher son pote qui a du bois, l’autre appelle une moto taxi, nous trouvons une corde, un autre coupe deux tasseaux avec sa machette, la moto taxi arrive avec deux grands rondins qui traînent derrière, un gars prend les choses en main et en quelques minutes nos deux rondins sont installés solidement. Nous pouvons donc partir à l’aventure sereinement. Nous sommes regardés par tout le monde sur le port. Les gens nous saluent de loin. On les regarde en s’éloignant et constatons déjà que notre voyage démarre avec de belle démonstration de solidarité.

On est partiiiiiiiiiiiiis !!!!!

Capitaine Pierre et son canoë 
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09/04/2017 - Nauta

La traversée en canoë sur le rio Maranon aura été une aventure insoupçonnée. Je n'avais pas pris pleinement conscience de ce en quoi je me lançais.

375 km - 9 jours - 8 nuits sur un fleuve qui dépasse parfois les 2 km de large.

Il ne pouvait pas y avoir meilleure expérience pour aller à la rencontre des nativos.

Lagunas - Nauta : 375km en canoë 

Je souhaite tout d’abord replacer le contexte mais ce coup-ci, dans son intégralité, c’est à dire sans le côté “monde des bisounours”.

Je me lance dans une traversée sur le départ d’un des plus grands fleuves du monde, tout le monde nous dit que nous sommes des grands malades et que c’est très dangereux, certains nous disent que les vagues peuvent atteindre les 2 m de haut, nous sommes pendant la saison des pluies, j’ai pu remarquer par moi même qu’il est impossible de débarquer n’importe où sur le bord et je suis avec un mec que je connais depuis une demi heure !😀

Jour 1 :

Nous partons donc de Lagunas avec déjà une belle démonstration de solidarité des villageois. Nous sommes comme deux gosses à contempler cette immensité à laquelle nous appartenons désormais. Rapidement, un dauphin de rivière vient nous montrer le bout de son nez. On est aux anges. On rame, on discute, on apprend à se connaître, on découvre notre nouveau monde de plus près… Dans la barque le fleuve est encore plus impressionnant. Il semble atteindre les 200 m de large. Ce n’est qu'à la fin du voyage que nous nous rendrons compte qu’il était en vérité bien plus large qu’on ne le pensait.

Après une bonne journée à pagayer au soleil, nous arrivons à la jonction de deux fleuves. WWWWOOOUUUAAAAA ! on se croirait sur l’océan. C’est immense. C’est calme, la nature nous entoure. j’ai l’impression d’être une fourmi dans un parc alors que je n’ai pas rétréci. C’est merveilleux, à couper le souffle. Les chants des oiseaux, des insectes, des perroquets, de quelques singes et autres animaux nous bercent dans un univers nouveau.

Ici, en plein milieu de ce parc aquatique démesuré, on sent bien que l’homme appartient à la nature et non l’inverse.

Malheureusement les photos et même les vidéos ne témoignent pas de la splendeur du spectacle.

Bon c’est bien beau tout ça mais d’après l’altitude du soleil, il fait nuit dans une heure et on se retrouve au milieu de ce désert liquide dont on avait sous-estimé l'ampleur. (D’après Google Maps, la jonction ferait environs 2 - 3 km de large sur 4 - 5 km de long). Bon on va ramer un peu pour essayer de trouver un village.

A cet instant je dois aussi préciser qu’il n’y a aucun village de marqué sur les cartes et que seuls les “ouais ouais il y a des villages plus loin” des gens à qui on demande, nous laissent imaginer qu’on va tomber sur un lieu pour dormir. Au pire des cas, on a nos lampes frontales et on peut faire nuit blanche dans le bateau mais si un village pouvait se montrer, ce serait sympa.

A la sortie du virage nous apercevons un village sur l’autre rive. C’est parti, faut ramer pour traverser vite car faire du contre courant ce n’est pas possible alors il ne faut pas le louper.

Nous accostons alors dans le village de Pucacuro. Le village est littéralement les pieds dans l’eau, les gens passent de maison en maison avec le fleuve jusqu’aux genoux, les gamins jouent dans l’eau et le premier mec qui vient nous voir c’est… le bourré du village.

A notre arrivée les quelques regards présents se demandent ce que 2 Greengos viennent foutre ici, à cet heure là, dans ce canoë bizarre. Cette sensation nous la retrouverons à chaque débarquement 😀

La mascotte du village tient à nous aider à porter nos lourds et encombrants bagages dans ce chemin périlleux. Comme prévu il se casse la gueule avec nos affaires et tout le village rigole. Ca y est, on est connus.

Le village doit contenir 50 habitants. Étonnamment, il y a une auberge ici où l’on passe la nuit pour 3 euros. Des planches en bois permettent de faire le chemin vers le rez de chaussée sans se mouiller. Comme dans la réserve, les toilettes sont la petite cabane dans le fond. (Aller c’est le moment pour préciser que la merde va donc dans l’eau stagnante en dessous qui sert également pour… faire la vaisselle, rincer les fruits… :) c’est l’aventure !!! haha).

Pour dîner, nous nous rendons dans “la maison là bas” où une dame fait normalement la bouffe le midi pour les enfants de l’école. Ça c’est du plan sûr, j’adore 😀

Effectivement madame nous accueille dans sa Casa et nous propose un plat copieux pour un euro cinquante. Parfait.

Posés sur la table nous racontons notre histoire qui fascine les gens qui nous entourent. Il suffira de quelques minutes pour que ceux-là se remettent rapidement sur le film de Jean Claude Van Damme des années 90 qui passe sur le téléviseur cathodique.

On comprendra alors plus tard que l’électricité est fournie par le groupe électrogène du village qui coupe à 21h. Voilà pourquoi ils ne voulaient pas louper JC :)

Cette petite étape tranquille nous a permis de faire connaissance en douceur avec les gens du fleuve.

Nous repartons au petit matin sur notre barque pour entamer les kilomètres.


Jour 2 :

Sur les coups de 11h les nuages noirs font leur entrée au dessus de cette forêt dense. Le vent se lève, je n’aime pas bien ça. Rien de dangereux mais rien d’agréable à l'horizon.

30 minutes plus loin on aperçoit une ferme en bord de rivière et décidons de nous y poser le temps que la pluie passe.

A peine débarqués à Nueva Union, deux femmes viennent nous voir pour nous demander ce que l’on fait là. C’est vrai qu’avec la galère en manoeuvrant nous avons atterri dans l’enclos des poules. C’est pas qu’on ait des gueules de pirates mais ça nécessite une petite explication. Les femmes nous disent que nous pouvons patienter ici sans souci. Très bien.

La ferme est différente de ce que l’on voit d’habitude. Elle est proprement construite, ordonnée, l’espace est vaste… étonnant.

Puis les femmes reviennent avec un mec. Je dois préciser qu’ici tout le monde se trimballe avec une machette à la ceinture :) On ne sait pas trop à quoi s’attendre mais comme toujours, le mec est tout surpris, il nous prend pour des oufs, rigole et nous dit “suivez moi et venez manger, vous devez avoir faim”. Bah écoute si tu proposes :)

Les quelques travailleurs de la ferme nous rejoignent pour déjeuner. Nous faisons une prière avant de commencer notre plat. Puis, quelques minutes plus tard un homme d’une soixantaine d’année rentre, et nous sommes présentés au patron. Un américain pasteur venu s’installer ici. Ahhhhhhh mais c’est pour ça que tout est droit ici :)

On nous a donc offert notre repas, les travailleurs ont rapproché notre bateau et mis nos affaires à l'abri, nous avons papoté avec le pasteur et le sous chef pendant près d’une heure. Le pasteur nous avait proposé de dormir là ce soir. Trop aimable mais les kilomètres ne vont pas se faire tout seuls. Je retiendrai de ce déjeuner ma discussion avec le sous chef. A force de question il m’explique que pour s’installer ici, c’est gratuit. Il faut juste être accepté par la communauté. Il faut présenter son plan, dire combien de terrain on veut et si tout le monde est d’accord, c’est parti.

- Il n’y a pas de taxes, pas de terrain à payer… rien ?

- Non rien.

- Et vous les travailleurs vous pensez quoi du patron pasteur Américain ?

- on est ravi, on a une église et un travail agréable.

- et vous êtes payés combien en moyenne?

- entre 80 et 150 euros par mois t

A d’accord, il s’est mis bien l’amerloque.

Je lui demande alors mais pourquoi vous avez attendu le pasteur pour faire tout ça ? A quoi il me répond simplement que eux, les Péruviens du Rio (rivière en espagnol) ils aiment bien avoir les bras croisés. Ceux à quoi il faut traduire : “parce qu’on y avait pas pensé avant”. Le gars m’explique qu’ici ils n’ont pas la culture du travail pour l’argent, de l’amélioration, du profit… Il parle du pasteur comme un dieu car ils ont un travail, de l’argent (ouais si on veut) et ils vont peut être bientôt exporter. Youpiiii

Ce témoignage me fait vraiment réfléchir.

Ces gens sont ravis de recevoir ce qui à été pour nous le début de la fin : la recherche du profit. Ils ne savent pas que c’est le début de la perte de ce qu’ils aiment ici. Leur autonomie, leur tranquillité, le calme… Qui pourrait leur en vouloir de simplement souhaiter un peu d’argent pour manger autre chose de temps en temps et de l’électricité pour regarder Jean Claude Van Damme à n’importe quelle heure ? Personne.

Je ne peux pas lui expliquer la suite de l’histoire du profit, moi qui ai plus d’argent dans mon sac à dos que lui dans sa maison familiale.

Y a t’il un milieu, un équilibre qui permettrait de maintenir le calme, la justesse de consommation et le confort ?


La pluie cesse, nous remontons dans notre navire. Nous remercions le Ricain et son équipe pour leur générosité et raccrochons nos rames.

A l’abri sous la bâche sera le thème de cette après midi sous le crachin tropical.

A l’approche de la nuit, nous arrivons près d’un village et le premier habitant nous salue spontanément et nous invite chez lui. Bon on est tombés sur le bourré du village mais ce coup-ci, on va dormir chez lui. Sa femme et ses enfants rentrent, ils semblent faire la gueule. Je pense qu’ils n’apprécient pas de voir papa complètement torché qui a invité deux Greengos à dormir à la maison alors qu’ils n’ont rien à nous offrir. Ambiance tendue mais détendre on sait faire (pas de sous entendu là dedans que les choses soient claires).

La soirée sera calme et c’est plutôt au matin que c’est devenu intéressant. Le mec est parti se pinter la ruche depuis 5h du mat. Il reviendra vers 10h pour s'allonger comme une merde sur la terrasse. C’est alors que le reste de la famille commence à se laisser aller.

Nous avons un peu échangé, elles nous ont montré leurs animaux, la femme à été nous chercher du singe pour le déjeuner. Je ne suis pas trop fan mais s’il fallait essayer une fois dans ma vie, c’était bien en plein milieu de l’Amazonie. De plus, comment faire le difficile devant cette immense marque de générosité. Elle nous offre un repas, que dis-je, un festin. Bon le singe c’est pas mauvais mais ça ne vaut pas le coup de manger du singe non plus. La mère s’est occupée de manger la tête comme une indigène, c’était assez… étrange :)

Dans la matinée nous avons également reçu la visite du président du village et de ses deux haut-placés haha. Il nous font un discours comme quoi ils sont ravis de nous accueillir dans ce village de Nueva Santa Rosa et puis il nous sort un blabla, pour ensuite nous parler d’électricité et … ahhhhh d’accord, tu veux du pognon et tu fais le gentleman. Malgré le fait qu’on est que peu d’argent à leur offrir, j’ai quand même pris le temps de me plonger dans mon rôle de diplomate pour lui expliquer les raisons de notre passage sur son charmant village et la grande reconnaissance que nous lui témoignons ….bref, j’ai fait du pipo en espagnol la situation m’a bien amusé ;)

Néanmoins c’était intéressant de voir que, comme me l’expliquait le sous chef de la ferme Américaine, il y a bien une hiérarchie et qu’ils sont venus réclamer poliment de l’argent. Qu’en penser, je ne sais pas vraiment. Moi je veux être témoin de leur générosité et eux souhaitent simplement un peu plus de confort grâce à l’économie des étrangers qui passent sur leurs terres. Disons que la balance est à l’équilibre.

Le ventre rempli nous reprenons notre chemin sans saluer le Padre qui dort encore sur le sol. Nous remercions la famille et leur laissons un billet qu’ils ont du mal à accepter.

Leur pauvreté m’a tout de même marqué. La maison est vide. Il n’y a pas de chaise ni de table pour manger. A ma demande la femme m’explique qu’elle préfèrerait vivre en ville mais il lui faudrait 8000€ minimum pour l’achat de la maison. C’est pour cela qu’elle vit ici, où l’emplacement est gratuit.

La fille quand à elle, étudie en ville où elle dort chez sa tante et apprécie vraiment revenir ne rien faire ici pendant ses vacances.

Les témoignages me laissent perplexe. Que ferais je à leur place ? Déjà j’utiliserais mon temps libre à faire une table et des chaises. Ce qui me laisse à penser qu’ils ne sont soit pas trop démerdards soit ils aiment vivre “Tranquilo” comme ils disent.


Jour 3 :

Nous levons l'ancre vers 11h pour une longue journée sous le soleil. On rame, on papote, on observe les dauphins qui s’amusent autour du bateau, on se baigne, on contemple ce paysage qui ne cesse pas de nous éblouir.

Vers 17h, nous ne sommes plus qu’à trois heures de San Rosé de Saramuro, un village important de 2000 habitants :). Nous sommes samedi et s’il y a moyen de faire un peu la fête, moi ça m’irait bien. C’est sympa de ramer mais danser et boire une ch’tite bière me semble être un programme mérité :). Nous allons donc naviguer un peu de nuit. Les conditions sont parfaites alors nous nous autorisons ce spectacle privé un peu fou.

Nous avons vécu un moment magique :) Le coucher de soleil nous ouvre les rideaux pour laisser place à cette demi-lune qui éclairait notre chemin. Les étoiles et la voie lactée positionnent ce décor infini. Le calme et l’étendue de la rivière nous baignent dans la plénitude de l’instant. L’orchestre de la jungle est grandiose. Wooouuuaaaaaa !!! Nous posons nos rames, nous nous taisons et contemplons ce chef d’oeuvre éphémère.

Au bout de 4h (au lieu de 3 car il est difficile de ramer les yeux vers le ciel :) ) nous apercevons la lumière du village. En nous en approchant nous passons devant de nombreuses maisons. Bizarre, la lumière est plus forte là bas, allons y !

Ahhhh non, finalement le village était avant mais là on est arrivés à une raffinerie de pétrole. Cette grande entreprise très éclairée ne prend pas les voyageurs, il n’y a pas d’auberge de jeunesse et on ne peux pas laisser le bateau ici. Il faut donc remonter à contre courant (truc impossible). Heuuuuu :)

Bon mon voyage m’a appris qu’en se montrant cordial et un peu perdu, un Péruvien ça se négocie à l’aise. Alors lui, il va nous garder notre bateau parce le spectacle de la rivière il valait largement le Puits du Fou mais 4h c’est suffisant :)

Le gardien accepte que nous laissions notre barque ici mais il faudra venir la chercher à 7h demain matin car après c’est son collègue qui prend la relève. (Oui bah tu lui expliqueras à ton collègue :) ).

Tout rentre dans l’ordre, nous trouvons une auberge de jeunesse. Les gens nous disent : “c’est vous qu’on a vu passer en canoë ?” Euhhhh , oui c’est ça. Encore une fois on a vite été connus ici :)

On demande à un gars qui fait la sécu du village s’il y a un bar dans le coin. Il nous affirme que oui et nous y conduit gentiment. Haaaa, Maxou va pouvoir boire une p’tite bière après ces 10h de canoë et peut être se faire des copains :)

Le gars représente en fait la police. En effet il n’y a pas de commissariat, ce sont donc deux trois mecs qui, à tour de rôle dans la semaine, se partagent cette tâche. Bon, et tu peux boire un coup pendant le service ? “oui, j’ai juste pas le droit de danser”. J’adore !!!

Une demi-heure plus tard nous sommes invités à la table d’un groupe d’à côté. J’ai eu ma bière, mes rencontres, j’ai dansé… encore une belle soirée avec de généreuses démonstrations de leur hospitalité.

Vers 2h nous rentrons avec le gars de la sécu qui certes n’a pas dansé, par contre il peut vraiment boire pendant le service, il n’y a pas de doute :)

Le lendemain nous sommes réveillés à 5h par des airs de Cumbia de la discothèque d'à côté. Grrrrr Mais qui va venir danser au p’tit matin ???

La pluie nous donnera l’occasion de prendre le temps et de refaire le plein avec le peu d’argent qu’il nous reste. Les rencontres du matin sont aussi riches que celles du soir. Un gars nous explique la politique de son pays. L’épicière veut se marier avec moi car je suis français. Les gamins nous lancent quelques mots en Anglais en se marrant, la boulangère nous fait goûter toutes ses gourmandises avec fierté… mais qu’est ce que je suis bien ici :)

Vers 13h nous retournons à notre bateau en espérant ne pas avoir causé de souci au second gardien de la raffinerie. Nous arrivons sur les lieux et là, surpriseeeeeee, le gardien, c’est le gars de la sécu d’hier qui à pris sa cuite avec nous la veille :) On est peinards !!

Notre barque a subi la pluie et le vent. Nous remettons un peu d’ordre à notre embarcation et reprenons le fleuve sous les nuages.


Jour 4 :

Notre traversée aura été courte ce jour-ci. La pluie nous aura fait décoller tard et la nuit tombe vite au Pérou.

En chemin nous croisons deux canoës. Un monsieur et sa femme dans l’un et un jeune homme dans l’autre. Nous en profitons pour demander s’il y a des villages dans les prochains kilomètres. Sans étonnement aucun, l’homme nous répond que oui, il y a plein de villages. Tout va toujours bien dans le meilleur des mondes ici, on commence à connaître :)

Le personnage nous demande ensuite si nous connaissons le “Masato” et accompagne sa demande par un geste de la main nous laissant comprendre que c’est quelque chose à boire. “C’est une boisson locale”. Parfait, goûtons cela.

La femme prend alors avec ses mains naturellement très propres, une pâte dans un seau qu’elle met dans la bassine qui sert certainement à écoper le bateau. Elle ajoute ensuite de l’eau de la rivière. Mélange avec ses mains et me tend la bassine qui visiblement présente quelques traces d’huile ou je ne sais quoi. bref, il faut pas être trop regardant sur l'hygiène et se rappeler qu’on est en plein milieu de l’Amazonie. Je bois ce breuvage… délicieux !!! non je déconne, c’est étrange et il y a des grumeaux :) Mais pour le sport on fait un grand “hhuuuuummmmmm c’est bon !!!” et on en reprend :)

On apprendra par la suite que le Masato est fait à base de Yuca, un genre de patate blanche d’ici. Il est d’abord râpé, pour ensuite être mâché, puis recraché dans un pot. Il fermente ensuite 2 - 3 jours pour donner de l’alcool et une texture pâteuse. Il suffit enfin de la mélanger à de l’eau pour en faire ce succulent apéro :) Santé !!!


Vers 17h, nous passons au côté d’une île comme nous en croisons tant mais ce coup ci, il y a un panneau “Bienvenue” sur le rivage. Nous ramons comme des dingues pour atteindre le bord avant de passer cette probable entrée pour une nuit gratuite. Nous mettons un pied sur cette grande étendue de jungle de 10 hectares pour se faire accueillir par deux chiens qui ne font pas honneur au panneau de bienvenue. Puis, quelques secondes plus tard, un petit vieux vient à notre rencontre. Nous lui expliquons que nous cherchons un endroit pour passer la nuit. Il nous invite volontiers chez lui en nous précisant qu’il n’a rien de plus à nous offrir que son toit. Très bien nous n’en voulions pas plus.

Au fil des discussions nous apprenons que Papi à 78 ans, qu’il n’a pas mangé depuis plus de 24h, qu’il vit tout seul ici sur cette île, que plus grand monde ne vient lui rendre visite et qu’il essaie de se nourrir de ce que la nature lui offre. Notre petit vieux a le dos courbé par la vie, il était bûcheron et fabriquait des maisons en bois. On devine son quotidien à aller chercher péniblement un peu de quoi vivre dans ses cultures qui doivent demander tant d’attention et d’huile de coude. Nous avons un peu de peine à remarquer sa pauvreté mais aussi beaucoup d’admiration devant l’énergie et la joie de vivre qu’il nous témoigne.

Nous avons des pâtes et des sardines, du pain et des petits gâteaux. Il nous suffira un regard avec Pierro pour nous accorder à lui offrir un grand repas et des restes pour son lendemain même si nous n’aurons plus rien pour nous. Nous trouverons bien de quoi nous nourrir dans un prochain village et quand bien même il nous faudrait jeûner une journée, nous penserons à papi le ventre plein grâce à notre passage sur sa Terre.

Papi à une petite cuisine décrochée de sa maison. C’est commun ici, sans doute pour que les restes d’odeurs n’attirent pas les insectes et autres animaux dans la maison. Le chemin pour y accéder est tellement fragile et branlant que l’on a du mal à imaginer notre funambuliste de 78 ans ne pas chuter un jour.

Nous nous sommes donc régalés avec nos quelques réserves. Pépé mange comme un ogre. Il dévore également notre pain rassis que nous souhaitions donner à ses chiens. On finira ce repas avec un petit verre de digestif local et un mapacho (cigare amazonien). Notre vieillard est aux anges et par conséquent nous aussi.

21h, nous allons nous coucher. Je prends le temps de méditer sur cette belle rencontre assez bouleversante. La vie, la pauvreté, la générosité, la joie de vivre, mes grands parents, le partage… Je m'endors sur ses pensées qui raniment quelques émotions.

Le lendemain, je trouve le grand-père auprès de la rivière à faire le reste de la vaisselle de la veille. Ce n’est pas l’inactivité qui l’emportera :)

Nous avalons un petit dèj et nous décidons de réparer son “ponton” hasardeux avant de reprendre le fleuve. Papi nous trouve quelques vieux clous, nous trouvons des planches, un peu de bricolage et le chemin vers la cuisine est consolidé.

On se sentait mal à imaginer notre vieil ami chuter ici.

Pierro, touché par la pauvreté de cet homme, sort ses 100 soles de secours (30 euros) et les offres par un geste spontané. Pépé les accepte humblement.

Nous ne nous attarderons pas plus car la pluie d’hier nous a un peu freinés. Le soleil d’aujourd’hui nous encourage alors nous quittons ce généreux vieil homme qui nous a amené un beau message de vie et de sagesse par sa simple spontanéité et par son hospitalité. Il est certain que son souvenir me reviendra quand je devrais, à mon tour, choisir d’ouvrir ma porte à un étranger.

Merci Papi

Jour 5 :

Comme à chaque fois c’est un réel plaisir de me retrouver de nouveau sur le canoë avec mon capitaine Pierro. Nous enchaînons les kilomètres, porté par le courants et parfois par nos coups de rame. On se baigne, on se lave, on navigue accompagné des papillons et des dauphins (dois-je parler des moustiques ??? non, ça foncerait ce beau tableau haha). Nous croisons des bateaux de marchandises qui rendent la traversée plus sportive : “il passe à droite ou à gauche, merde à droite rame rame il vient droit sur nous !!!” :) Nous passons également devant de nombreux petits villages typiques qui deviennent de plus en plus communs à nos yeux.

La météo pendant la saison des pluies est très décisive. La grande question est de savoir si la pluie et les gros nuages viennent vers nous. Mon compère et son esprit “aventure” est toujours plus relax que moi sur le sujet. Pour planter le décor, voici une situation : quand vous voyez ça venir droit sur vous, qu’il y a une belle maison sur le bord, que le fleuve fait 2 km de large et que le vent se lève, doit on continuer tranquille ou bien faire une pause à l’abri dans la charmante maison ???

Malgré l’envie du propriétaire du canoë dans lequel je suis de continuer en croisant les doigts, nous écoutons notre sagesse et nous arrêtons près de la petite maison sur pilotis, belle et bien entretenue par un mec qui nous accueille avec sa machette à la main.

“bonjour, on peut faire une pause ici le temps que la pluie passe ?

- il ne va pas pleuvoir, répond froidement le papa des lieux.

- mais ça vous dérange si on s’arrête 30 minutes ?

- vous venez d’où ?

(difficile de juger si nous sommes les bienvenus)

- Heeuuuu de Lagunas.

- Mais vous êtes des dingues, nous dit-il en souriant. Aller, venez chez moi. Vous allez bien boire un coup de Masato”

Ha bah bien sûr, c’est tellement bon la bave péruvienne haha :)

Sa femme arrive en courant car, prévenue par sa fille elle ne pouvait pas croire que deux Greengos venaient de s'arrêter chez eux. Elle nous dit bonjour, surprise et en pleine euphorie. Elle nous invite également et nous sert un bol de Masato, de la soupe et une assiette de poulet riz accompagné de bananes plantain. Bon on vient de manger mais on va bien trouver de la place.

Nous avalons tout ça et reprenons notre route. Le Padre avait raison, il n’a pas plu mais la pause en valait la peine :)

Nous naviguerons jusqu’à la tombée de la nuit. Le coucher de soleil nous offre de nouveau un panorama splendide que nous prenons le temps d’honorer en silence, bercés par le courant.

Nous arrivons dans un village. Il nous suffira d’expliquer à la première personne rencontrée que nous cherchons un endroit pour dormir pour que celui-ci nous propose son toit. Moi qui pensait qu’on allait peut être galérer. Ce ne sera encore pas pour ce soir :)

L’homme nous présente sa maison. Il informe sa femme qu’il a invité deux étrangers. Bien que ce soit pas coutume, elle accueille la nouvelle avec un naturel presque perturbant. Comme à l’habitude péruvienne, il nous dit de nous asseoir et nous offre à boire. En réponse à ma curiosité, l’homme nous explique qu’il est paysan et qu’il travaille aussi pour un projet subventionné par le gouvernement. L’objectif est d’éduquer les différents agriculteurs du fleuve avec des techniques agricoles naturelles. Ils répondent aux questions des agriculteurs et étudient leurs diverses questions. Génial !!! j’apprends donc qu’il y a une réelle dynamique de progrès initié par le gouvernement, sur ces terres que l’on pourrait croire oubliées de tous.

Après une bonne heure de bavardage, nous demandons s’il y a une épicerie pour acheter de quoi manger. Ceux à quoi il répondra en disant à sa femme, “ramène deux assiettes”. Un peu gênés mais ravis à la fois, nous nous retrouvons avec du poisson frais, du riz et des bananes plantain. Nous qui avions peur de jeûner, on aura bien finalement rempli notre panse comme des princes aujourd’hui haha.

Une fois le ventre plein, on se pose dehors pour discuter et …. ne rien faire, comme ils le font si bien ici. Le voisin a mis en marche son groupe électrogène pour allumer la télé. Ils sont une dizaine à l’intérieur pour regarder l’écran et autant dehors à observer par la fenêtre (enfin le trou dans le mur car les vendeurs de fenêtre ne font pas fortune dans cette partie du pays :) ). Les enfants s’amusent entre eux, les ados sont réunis en petits groupes deci delà et les parents s’échangent quelques mots de passage. J’explique alors à notre hôte qu’en Europe, les gens vivent dans des maisons fermées et ils ne parlent presque pas à leurs voisins. Ils travaillent dans des entreprises toute l’année et profitent de trois semaines de vacances pour aller au camping. “C’est quoi le camping ?” me demande-t-il. “C’est ce que tu vis tous les jours. Ce sont des lieux où les gens aiment se retrouver dans des hébergements avec peu de matériel, où les campeurs vivent principalement dehors et aiment échanger avec leurs voisins, faire des rencontres et prendre le temps de vivre”. Étonné, mon ami péruvien me répond que c’est ce qu’il vit tous les jours et me demande alors pourquoi nous ne faisons ça que trois semaines par an. “Malheureusement je ne sais pas te répondre amigo” mais la situation laisse à réfléchir.

Le lendemain l’homme est parti travailler à 4h du matin. Le temps est légèrement pluvieux, nous décidons de prendre notre temps pour un bon petit dej. Les habitants nous indiquent une boulangerie vers le fond du village. Les villageois nous regardent étonnés et nous saluent toujours très souriants. C’est alors que nous passons devant la “radio” du village. Il n’y a pas d’antenne mais simplement un mec, dans une mini cabane, qui passe de la musique sur des haut-parleurs merdiques à te donner envie de te boucher les oreilles. Interpellé par nos peaux blanches il nous demande ce que nous faisons ici. Nous lui expliquons notre parcours qui l’impressionne pas mal. Au bout de 20 minutes, il nous demande nos noms qu’il note sur sa main. Nous le saluons et reprenons notre marche quand d’un coup la musique de la radio s’arrête pour laisser s’exprimer l’animateur. “Mais naannnnnn” le type est en train d’expliquer haut et fort : “mesdames et messieurs aujourd’hui, dans notre village sont présent Maxime et Pierre de France et d’Autriche, ils traversent la rivière depuis Yurimaguas vers Iquitos…” et nous, pendant ce temps là, on marche dans les rues et les gens nous saluent encore plus souriants :) C’est du délire, on se croirait l’attraction du village, ou la série télévisée lol. Quel souvenir !!!

Nous trouvons alors cette boulangerie où encore une fois, le patron aime nous faire goûter ses friandises. On se fait le p’tit dej dans sa cahute et on commence à discuter. Après un petit quart d’heure, il nous invite chez lui et nous offre un thé et des trucs à manger. Nous papotons pendant une bonne heure, il nous invite ensuite visiter son four à pain. Il nous explique son projet de livrer les autres villages avec un bateau et nous montre fièrement son dossier qu’il compte présenter à la banque. Celui-ci contient une page de garde, un sommaire et….. une photo de sa femme devant la boulangerie, une photo de son chien sur le bateau, une autre photo de sa femme devant les stocks, une photo de lui devant son four et une photo de son téléphone portable première génération pour aborder le chapitre “communication”. Le tout avec des images pixelisées et floues... Et bah faut pas montrer ça à un banquier en Europe si tu veux qu’il te file un peu de blé mon gars haha. Nous avons évidemment évité de lui faire part de nos remarques et nous l’avons vivement encouragé. Il est tout de même intriguant de noter qu’on ne vit vraiment pas dans le même monde. C’est à la fois drôle et surprenant. Un banquier ici pourrait-il accepter un projet plus familial que financier ? Moi j’y crois à son projet car je me rend bien compte de la détermination de cet homme. Pourquoi mon esprit d’européen conditionné ne pourrait-il pas admettre qu’un banquier puisse accepter ce projet ??? j’aurais bien quelques idées mais je ne voudrais pas polluer les textes de cette longue étape :)

Nous saluons alors notre boulanger bien aimable avant de remonter dans notre embarcation.

Jour 6 et 7 :

Nous démarrons cette journée sous un ciel douteux mais notre enthousiasme est toujours bien présent. Les nuages nous font le plaisir de laisser la place au soleil pour nous offrir des moments de détente et de nage avec les dauphins.

Vers 4h30 le vent se lève et la menace réapparaît derrière nous. C’est alors que nous voyons sur l’autre rive une maison nous tendre les bras. Certes l’opportunité est alléchante mais si nous voulons la saisir, il va falloir ramer fort. Il nous faut parfois plus d’une heure pour traverser cet immense fleuve. Bon, rien de mieux à l’horizon, une tempête se pointe derrière nous… aller on rame comme des barges pour arriver devant cette famille colombienne venue s'installer ici près du reste de la fa mille. A 50m de notre embarcation, les bras tétanisés par l’effort, nous pouvons remarquer une moquerie discrète sur leurs visages. “Salut les Greengos, alors, on tente d'échapper à la tempête” se moque gentiment Jorge Panaipo, le père de cette charmante famille. Il nous aide à accrocher le bateau et très vite, sans attendre notre demande, il nous invite à rester chez lui pour la nuit.

L’homme est en train de réparer les fuites de son bateau avec le caoutchouc de ses vieilles bottes qu’il a fait fondre dans une casserole. La fille aînée lave le linge dans la rivière pendant que ses deux frères et sa soeur nous observent curieusement. La mère est dans la maison à s’occuper de sa petite fille. Leur demeure est l’ancienne école de Puerto America qu’ils ont rénovée. Le terrain est accueillant… on se sent bien ici :) On discute, on sympathise, on joue avec les gamins, on leur montre nos photos. Le courant passe bien.

Par curiosité je me permets de demander si les enfants vont à l’école. Le père me répond que malheureusement “non” car ils sont colombiens et seul le père à la nationalité péruvienne.

“- mais qu’est-ce qu’il leur manque pour avoir la nationalité péruvienne ?

- les papiers

- d’accord mais il faut quoi pour avoir les papiers ?

- de l’argent

- rien d’autre ?

- non, seulement de l’argent”

Moi qui est toujours du mal avec le côté administratif, je ne semble pas être le seul. Il m’explique aussi que l’école est dans le village d’à côté, qu’ils n’en ont pas dans le leur mais que ça ne poserait pas de souci de les emmener chaque jour. Ces enfants n’ont pas le droit à l’éducation seulement à cause de l’argent. Je repense alors à toutes ces fois où j’ai donné la vie dure à mes professeurs en leur disant “si je suis ici c’est parce que l’école est obligatoire jusqu’à 16 ans” quel petit merdeux. Si j’avais pu comprendre ma chance plus jeune, je n’aurais certainement pas usé le fond de la classe durant toutes ces années.

Nous passons ensuite à table. Ils nous offre du poisson fraîchement pêché avec du riz et des bananes plantain. Tiens !!! on commence à connaître :)

Pierro et moi sommes sur le coin de table avec le Padre Jorge mais je m’étonne de voir la femmes et les enfants manger assis par terre. Bon, ce n’est pas à moi de changer les coutumes même si cela me dérange un peu.

Nous finirons ce repas par une soirée conviviale à discuter, boire une bouteille que nous leur avons amenée et fumer les mapachos qu’il me reste.

Le lendemain, j’ouvre les yeux comme par habitude grâce aux chants de la nature. Il est 5 h. Les petits curieux nous observent dormir :)

Je vais me poser près de la rivière pour contempler le lever du soleil. Je me sens tellement bien ici. Cet jungle qui m’entoure, cet immense fleuve, l’aspect sauvage auquel on doit s’adapter, l’air pur, le calme… Les émotions me prennent. Je me demande alors si je serais heureux de vivre moi aussi dans ce contexte primitif ? Loin du stress, du bruit, de la course au profit, à vivre aux heures du soleil.

Les enfants viennent s'asseoir à mes côté, ils se mettent dans mes bras. Le père nous rejoint. Nous discutons un long moment sur les avantages de sa vie, ceux de la mienne et notre espoir de voir un jour un monde qui saura prendre les bienfaits des deux parties.

Je rejoins mon capitaine qui semble fatigué de nos efforts accumulés. Moi je suis en pleine forme et j’ai envie de vivre la vie de nos hôtes le temps d’une journée mais nous n’avons pas d’argent et pas de nourriture. Nous proposons alors à Jorge et sa famille de les aider dans leurs tâches du quotidien en échange d’un allongement de notre séjour sur leur terre. Ce à quoi il nous répondra avec le sourire “Vous allez poser vos fesses sur ces chaises, vous reposer et vous resterez aussi longtemps que vous voulez” :) Ses mots m’ont rempli d’admiration. Faire preuve d’autant de générosité, avec une telle spontanéité alors que tout ce qu’ils possèdent représente moins que mon sac dos… Ils viennent d’élargir le sens du mot “générosité” de mon cerveau d’Européen.

Bon je te remercie de ta proposition mon cher Jorge mais si tu crois que je vais poser mes fesses sur cette chaise les bras croisées, tu te mets le doigt dans l’oeil. J’ai la bougeotte dans les orteils et un surplus d’huile de coude alors “Vamos” ;)

En visitant les alentours de leur maison, je m'aperçois qu’il y a une nuance à apporter sur la pauvreté de leur situation. Ces gens là n’ont certes pas d’argent mais ils n’ont pas rien. Ils ont l’abondance de la jungle. Voici par exemple un citronnier et un papayer :

Si je compare au citronnier de chez mes parents on n’est pas sur le même rapport de productivité :) Il en est de même pour les bananes, les Yucas, le maïs, le poisson… Je commencerai donc ma journée par un peu de pêche au filet. J'aiderai ensuite à déboiser une partie du terrain pour préparer la plantation de maïs.

Après 2 heures de travail, je suis trempé de la tête au pied et j’ai 8 ampoules à la main droite. Bon, je vais ramasser les branches maintenant :) Mon nouvel ami lui transpire à peine et a abattu 5 fois plus de travail. La comparaison nous fera bien rire toute la matinée.

Pendant que je ramasse les branches avec le fils de 14 ans, il me demande des explications sur ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons. Je lui explique simplement. Il me répondra ensuite d’une phrase perturbante, avec un regard très sincère : “merci de m’éduquer”. Mes explications bénignes semblaient résonner d’une toute autre manière dans sa tête. Je prends alors conscience que les gamins semblent m’apprécier particulièrement quand je leur explique des choses. Je reviens alors sur le thème de l’école et de ces foutus documents qui coûtent trop cher et je demande à la grande soeur :

“- Vous m’avez dit que les papiers pour la nationalité péruvienne étaient trop chers. Mais c’est combien au juste ?

- c’est 5 euros

- tu veux dire 500 ?

- Non, 5 euros”

Sa réponse me cloue le bec.

J’avais compris que ces gens étaient pauvres mais je n’avais pas mesuré à quel point. Je suis encore plus touché par leur générosité.

Je n’ai plus un sous sur moi, il reste 10 euros à Pierro et nous avons encore deux jours de traversée si la météo est bonne. Ce sentiment d’impuissance alors que mon compte en banque dépasse largement leurs gains de l’année me bouscule.

C’est l’heure du repas, je propose mon aide en cuisine mais comme à leur habitude, ils la refusent et m’invitent à m’asseoir.

Au déjeuner, ils se priveraient presque pour nous. Dans l’après-midi je nettoie mes affaires dans la rivière. La fille veut les laver pour moi. Bien-sûr je ne la laisserai pas faire. Nous venions quérir l’hospitalité et nous refusons maintenant d’être traités comme des princes.

Le soir arrive, je demande à ce que l’on organise la table pour manger tous ensemble. Le père accepte sans réticence et les enfants, tout sourire s'empressent de m’aider à organiser la table. Je prépare un grand pichet de jus de fruit. il m’aura fallu insister pour qu’ils me laissent faire. Je propose ensuite qu’on prenne le temps de prendre l'apéro avant de manger (il faut rappeler qu’habituellement on mange avant que le soleil se couche car il n’y a pas d’électricité). Nous prenons donc ce temps appréciable de partager ensemble, de jouer avec les enfants, de nous raconter nos vies. Ce moment est particulier pour eux car, de ce que nous avons pu voir jusqu’à présent, il n’est pas coutume que la femme et les enfants participent au moment du repas quand il y a des invités. Nous avons ensuite mangé tous ensemble. Les histoires et les rires ont accompagné la soirée jusqu’au coucher. Je pense que j’avais envie de les inviter à ma manière, même si nous étions chez eux :)


A un moment Jorge s’intéresse à ma lampe frontale. Elle est design, compacte, économique avec une fonction lumière rouge… C’est alors qu’il me dit :

“- woouuuaaa, elle est bien mieux que la mienne. Et ça coûte combien ?

- 15 euros

- QUOI !!! la mienne n’en coûte qu’1 euro 50 !!! c’est pour ça qu’on ne trouve pas ce genre de modèle au Pérou”

Cette lampe, j’en ai besoin pour la suite de mon voyage. Oui mais lui il en a besoin tous les jours. Et merde je m’en fous de la suite de mon voyage. “Tiens mon ami, cette lampe est à toi”. Cet instant si insignifiant à écrire à pourtant été déstabilisant à lire dans ses yeux. Je repense alors à mes parents qui m'expliquaient l’importance qu’avait une simple orange sous le sapin à noël. Je viens de comprendre le vrai sens “d’offrir”.

Le lendemain matin, nous souhaitons partir pour continuer notre voyage. Jorge décide de tuer un poulet pour le petit déjeuner. mais des poulets, ils n’en ont pas 50, ils en ont 6 et maintenant plus que 5.

Nous demandons aussi s’ils ont de l’eau pour emmener sur le bateau. Je précise qu’ici il n’y a pas d’eau et que nous buvons de l’eau de pluie. La femme nous apporte alors 4L d’eau. Ce n’est qu’ensuite, en voulant me servir un verre que je comprendrais qu'elle nous a donné la totalité de leur réserve. Il vont donc attendre la prochaine pluie pour boire de nouveau. Tellement perturbé par ce que je vennais de remarquer, je n’ai même pas eu la présence d’esprit de leur remettre une partie de cette ressource vitale.

Après le repas (oui finalement c’était un déjeuner :) ), nous prenons quelques photos, nous offrons une de nos deux rames à notre ami qui en aura plus besoin que nous et le moment des adieux commence. Ce fût compliqué pour tout le monde. Seulement deux jours passés ensemble et tellement d’émotions partagées. Nous nous éloignons de cette attachante famille, portés par le courant en laissant couler des larmes sur nos joues souriantes.

Cette expérience aura sans nul doute été la plus touchante jusqu’à maintenant. J’ai appris la profondeur de la générosité, j’ai compris une infime partie de leur quotidien avec les bons moments et les dures réalités. Ils ont fait grandir des valeurs en moi et j’espère que mon quotidien occidental ne les effacera pas.

Jour 8 :

Il nous reste deux jours pour atteindre la ville de Nauta où je terminerai cette aventure. Je ne souhaite pas que le temps nous freine et pourtant la mini tempête nous mettra à l'épreuve. La rivière est de plus en plus large. Elle atteint à certains moments 2 à 3 km. Le vent est contre nous. Le courant nous fait prendre les plus longues distances. Nous ramons toute la journée. Notre seule pause sera l’heure passée sous la bâche à attendre que la tempête passe car la houle est trop forte et nous pourrions faire couler le canoë.

Le soir nous trouvons un village et comme à nos habitudes, la première personne rencontrée nous offre son hospitalité. Ma fatigue ne me fera pas profiter de cette soirée. De plus, il y a la télé d’allumée et nous remarquons bien la différence de convivialité.

Jour 9 :

La dernière ligne droite est la plus difficile. Nous prenons néanmoins conscience que nous allons quitter ce décor que nous avons pris le temps d’apprécier sous ses diverses facettes. Nous remarquons des Eco Lodge pour touristes. L’idée que des touristes puissent profiter de ce spectacle nous laisse songeur. Quel serait pour nous le goût de ces vacances sans les rencontres incroyables ???

Notre long périple se clôturera sur une touche de solidarité, comme ce fût le cas à notre départ. Nous croisons un bateau à moteur. Nous lui demandons où se trouve Nauta. Il nous crie sa réponse en continuant son chemin. Puis, il fait demi-tour et vient à notre rencontre. Il nous explique qu’avec le courant nous ne pourrons pas atteindre Nauta, que nous allons le dépasser. Il accroche alors notre bateau au sien et nous finirons ravis sur un bateau à moteur.

Les pieds sur terre et la tête dans la rivière (oui c’est pas vraiment le dicton mais ça peut se comprendre :) ) nous avons amarré au port de Nauta. Les gens viennent nous voir pour nous demander d’où nous venons avec notre petite barque étrange et primaire. Notre réponse ne met pas longtemps à faire le tour et de nouveau, tout le monde nous regarde étrangement. Je dirais presque que ça ne nous choque plus.

Nous l’avons fait :)

Je ne me rendais pas compte de l’aventure incroyable dans laquelle je me lançais. J’ai eu la chance inouïe de partager des moments de vie avec ces gens de la rivière. Ces peuples reculés qui vivent simplement, en répondant à leurs besoins primaires, sans trop connaître la folie du profit, m’ont enseigné les valeurs profondes de la générosité, de l’hospitalité et de la convivialité. J’ai aussi appris à apprécier l’instant qui s’offre à moi en mettant de côté mes peurs et mes angoisses. J’ai aussi cultivé les bienfaits de la patience et de l’écoute.

Si j’avais su qu’il y avait près de 400 km et que j’y passerais 9 jours, je s’rais po v’nu !!! Mais je savais que cette expérience serait inoubliable alors je l’ai fait et j’ai bien fait :)

Merci capitain Pierro ;)

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Nous passons la nuit à Nauta. Encore une fois, nous nous faisons héberger par pur hasard par une association de protecteurs des cultures indigènes. "Mais ça ne s'arrête jamais 😀"

Le lendemain, je prendrai la route en direction d'Iquitos où je déciderai d'y passer une semaine avant de rejoindre Inti Eco Lodge.

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06/10/2017 - Katmandu

Après ma virée en canoë sur le Rio Maranon en Amazonie, je suis rentré en France pour une raison personnelle et parce que j’en ressentais l’appel. J’avais fait le point sur mon voyage et j’avais réalisé mes objectifs de voyage. Ce retour précipité aura eu l’avantage de ne me laissé aucune animosité dans ce merveilleux périple où j’ai trouvé beaucoup plus que ce que je pouvais imaginer.

J’ai ensuite décidé de rester en france pendant l’été pour profiter des miens. Ce temps m'a aussi été précieux pour mettre en application dans mon quotidien ce que j’avais appris en Amérique du sud. J'ai également participer à des stages de développement personnel pour ne pas perdre de vue le chemin qui c'est dessiné devant moi.

Durant le mois de septembre, j’ai ressenti le besoin de me réinvestir dans un projet, dans un métier plus en accord avec mes vraies convictions aujourd’hui conscientisées. Néanmoins, j’avais le souhait de refaire une petite retraite personnelle pour m’isoler un peu et prendre le temps de faire le point sur moi.

J’ai alors décidé de partir un mois au Népal afin de suivre les enseignements Bouddhistes pendant 10 jours dans un monastère et découvrir les bienfaits de la méditation. Ensuite, je retrouverai Sacha et son pote pour un trek à travers les villages népalais et pour le reste… on verra ce que l’avenir me réserve :)

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Kathmandu

Après 19h de voyage, je mets les pieds sur la capitale du Népal. Je me retrouve de nouveau avec mon sac sur le dos en plein milieu d’un monde complètement différent du mien. Pour autant, je retrouve un air de déjà vu. Les rues sans trottoirs où se mélangent piétons, vélos, motos, voitures, chiens et mêmes des vaches :) me rappellent le Pérou.

Malheureusement les mendiants et la pollution aussi me rappellent le Pérou. Les maisons ouvèrtent sur la rue transformées en magasin, les marchands assis par terre, les taxis qui te klaxonnent pour te proposer leurs services, les fils électriques à hauteur d’homme… heureusement qu’ils sont un peu bridés ça me rappelle de ne pas parler espagnol :)

Plus sérieusement, ce constat me fait réfléchir. Moi qui pensais que le Pérou était particulièrement pauvre, je retrouve la même à l’opposé de la planète. Finalement, n’est-ce pas nous, Européen, Nord Américain et Australien qui sommes différents du reste du monde ? Je parle peut-être un peu vite mais j’ai l’impression qu’ici aussi le capitalisme n’a pas encore mis son drapeau.

Je me balade alors dans Thamel, quartier réputé pour être atypique. Ici on ne peut pas faire abstraction de la religion. Des lieux de culte sont à chaque coin de rue. Un guide m’expliquera qu’il y a, à Kathmandu, 33 millions de Dieux représentés par des statuettes, des monuments ou tout autre forme. 33 millions ??? t’es sûr ??? Oui, 33 millions. Wouah !!! Cette information me sera reconfirmée plus tard. Dans ce pays chargé d’histoire, les cultures hindouiste et bouddhiste se partagent le patrimoine. Il y a même des temples dont les bases de la structure sont décorées de Dieux Hindous et le toit de Dieux Bouddhistes pour rappeler la paix qui règne entre ces deux cultures.

Tout le monde pratique donc de près ou de loin une religion ou une philosophie spirituelle. Je me sens donc en sécurité. Le respect est partout, l’insécurité ne semble pas montrer ses dents même si je reste prudent. Et même si mon côté blanbec fait que je suis abordé toutes les 10 minutes pour un taxi ou une babiole, les gens restent courtois.

En fin d’aprèm je visite la place de Durbar. Un lieu mythique où les temples et autres monuments culturels se dressent encore malgré le tremblement de terre terrible de 2015. On peut voir des infrastructures en reconstructions, des monuments décorés de milles sculptures…

Je me trouvais en ce lieu au moment d’un festival religieux. Il y avait un endroit où je ne pouvais pas rentrer car réservé aux Népalais, ils vont à la rencontre de la déesse qui leur fait la marque de Bouddha sur le front. Cette déesse, bien vivante, est une enfant. Elle à été choisi suite à un rituel où plusieurs enfants sont choisis selon des critères de pureté puis ils sont positionnés dans des situations effrayantes. La déesse actuelle est celle qui a naturellement géré le mieux ses émotions. Lors de sa première menstruations, elle redeviendra civile et un-e nouveau-elle dieu-déesse sera défini. OK, pourquoi pas 😮

Quelques heures plus tard, je remonte le quartier pour me rendre à mon auberge de jeunesse et ces rues me reconfirment que je ne suis pas fait pour les capitales. La densité de population, les klaxons et la pollution me fatiguent. Je décide alors que demain, je marcherai vers Kopan, le monastère dans lequel je ferai mon “stage” à 10 km d’ici (ça me forgera pour les treks à venir 😀 )

Je me lève à 7h, je prend un petit dèj horrible (je ne pensais pas qu’on pouvait même ratter du beurre), je chausse mes chaussures de rando et me voilà parti avec le sourire aux oreilles pour la traversé de Kathmandu. Cette ville contient 3 millions d’habitants (et 33 millions de Dieux, c’est dingue). En 2000 ils n’étaient qu’un demi million. Jusqu’à 2008 le Népal était sous une monarchie. ça explique pas mal de choses.

Je me rend au temple de Pashupatinath. Cet immense lieu Hindou est très étrange. la rivière sépare la naissance et la mort sous leur forme divine. d’un côté des minis temples avec une statue représentant le masculin et le féminin :

et de l’autre des personnes décédées sont purifiées dans la rivière pour ensuite être incinérées en public avant que leurs cendres soient remisent à la rivière devant Shiva, leur Dieu vénéré.

C’est un peu… étrange et perturbant. Je m’imprègne petit à petit de leur culture vraiment complexe et si différente.

Je marche ensuite vers Stupa Bodnath.

En chemin je passe devant des échafaudages en bambou qui rappellent que les normes ici…

Le Stupa Bohnat est sacré. C’est le plus grand Stupa du monde. Un Stupa représente, dans la culture bouddhiste, une architecture mandala. C’est à dire le chemin vers l’éveil. Des moines bouddhistes et de nombreux croyants viennent s’y recueillir. Je ressens tout de suite beaucoup plus de plénitude. Je sens que je me rapproche de ce qui va me convenir :)

Sur mes derniers kilomètres je rencontre Superman sans son costume. Comment ai-je reconnu que c’était Superman me direz vous ? A vous de juger :

A vrai dire j’en ai croisé plusieurs. Le plus impressionnant portait un frigo. mais pas un petit, un vrai. Ils passent le bas d’une sangle dessous et le haut sur leur front et roulez jeunesse. Certains maçons font pareil avec des hottes de briques. Faudrait pas que les gamins voient un père Noël chez nous, il le prendrait pour un maçon à barbe blanche 😆

La fin de journée approche, j’ai retrouvé mon sourire de voyage, celui qui se dessine bêtement avec mes yeux curieux d’un gosse qui découvre la vie. Je monte la colline jusqu’à mon monastère. Les lieux sont magnifiques. Ils surplombent la ville entourée de montagnes verdoyantes. Les moines bouddhistes sont évidement vétuent de leurs habits traditionnels. Les merveilleuses statues aux peintures dorées me laissent contemplatif.

On me présente mon dortoir. Au repas du soir je sympathise avec un roumain, un canadien et un danmarkoi (ouais ça doit s’écrire autrement mais bon :P).

Le décore de nuit est tout aussi majestueux. Les lumières de la ville, celles des statuts… wouah ! J’ai le sentiment d’être privilégié.

En quelques heures ce monastère m’aura déjà appris une chose : Au chiotte Turk tu iras, moins de temps sur ton téléphone tu passeras :)

J'espère que cette initiation de 10 jours m'en apprendra bien plus 😇


Namasté

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16/10/2017 - Kopan

Cela fait dix jours que je suis dans le monastère de Kopan. Dix jours d’enseignements intensifs, de méditation, de silence… Dix jours sans viande, presque sans clope, sans une bière, sans contact avec l’extérieur, sans téléphone… Dix jours avec des personnes qui viennent chercher quelque chose de plus, ici, à plus de 10 000 km de chez eux. Dix jours à faire plein de belles rencontres. Dix jours à travailler mon anglais en profondeur (où j’ai pris conscience qu’il me manquait un peu de vocabulaire :) ). Bref, dix jours à réfléchir, rire et rêver.

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Pour introduire cette étape, je me permets de partager ma réflexion. En quête de spiritualité, je suis venu dans ce monastère au Népal suite au constat suivant sur les religions.

De mon point de vue (peu impliqué je l’accorde), le christianisme et la religion musulmane se sont malheureusement transformées en rites que certains appliquent bêtement. Ces religions semblent avoir perdu du sens. Il faut prier mais pourquoi ? Quel est le chemin spirituel ? Il faut aller à la messe le dimanche, mais en ressort-on meilleur ? Il faut faire une prière avant de manger, mais quel était le sens que Jésus et Mahomet plaçaient dans cette prière ? Les pratiquants se questionnent-ils dessus ?

Pour s’impliquer dans une religion, il faut avoir un bon fond, de vrais valeurs. Les lascars qui lancent des “sur l’Coran j’te nique” ou les p’tites vieilles Catholiques qui passent leurs journées à baver sur le dos des gens alors qu’on leur enseignait la compassion en tendant l’autre joue lors de leur communion, ne montrent plus vraiment l’exemple et présentent même des arguments de taille pour les Athéistes.

J’entends tellement peu de personnes citer l’évangile pourtant si inspirant d’après certaines citations d’une nonne rencontrée lors d’un stage. Alors que des citations du Bouddha et du Dalaï-Lama, il y en a plein, même sur les réseaux sociaux.

Le bouddhisme est, dans sa forme philosophique, un chemin à suivre que nous montre Le Bouddha, pour être meilleur avec soi-même et avec les autres. Ce chemin nous aide à comprendre certaines réflexions de la vie pour aiguiller nos choix. La religion est complexe mais la philosophie a du sens. Le Bouddha explique avec beaucoup de profondeur pourquoi il ne faut pas voler, tuer, mentir, commérer… Il nous fait réfléchir sur l’intérêt que l’on place dans chacune de nos actions. C’est un carnet de bord que l’on aperçoit rapidement lumineux car ça tombe sous le sens.

Aujourd’hui évolue en Occident ce qu’on appelle le développement personnel. Ma maigre expérience me fait penser que c‘est un mélange de toutes ces cultures réunies puis mélangées, parfois un peu maladroitement, car la population manque de sens.

Ces techniques sont magnifiques et pour certaines très poussées scientifiquement mais nombreux s’accordent à dire que le développement personnel reste fade s’il n’est pas accompagné par un aspect sacré.

Me voilà donc au Népal, au cœur de la culture Bouddhiste pour mon propre développement personnel et pour recevoir la vision spirituelle du Bouddha :) .

Le monastère est situé en haut d’une colline, au côté de Kathmandu et en même temps entouré de nature et de montagnes. Les lieux sont chargés d’histoire. Le matin on entend les tambours et les cornes des différents temples et monastères de la vallée. Il y a donc un aspect “p’tit paradis urbain”, c’est assez étrange mais très agréable :).

Nous ferons donc pendant 7 jours, 2h de méditation, 3h30 de cours et 2h de questions-réponses par jour. Chaque matinée nous serons en silence jusqu’au déjeuner pour ne pas disperser notre mental. Puis, les deux derniers jours nous serons en silence complet et ferons 5h de méditation par jour. Le programme me plait bien 😛


Assez rapidement, pendant les enseignements, j’ai le plaisir de remarquer que notre cher moine et nos deux adorables nonnes ont beaucoup d’humour. J’ai cette idée préconçue que quand on est sage et spirituel, on n'est pas très marrant. Et bien je suis ravi de constater que non. Ils sont drôles, chacun à leur manière. Ils ont tous une pointe d’ironie envers eux-mêmes et leur religion. J’adore !!


Je me permets maintenant de supposer que la partie qui va suivre sera peut-être barbante pour certains mais je ne peux pas écrire cette étape sans faire un condensé de ce que j’ai appris sur le Bouddhisme (je sens qu’une partie vient de passer directement aux photos haha).

Le bouddhisme est constitué, pour ce que j’ai envie d’en retenir, de deux parties dont la première est le “Dharma”. C’est la partie philosophique. Celle-ci nous enseigne comment trouver l’Illumination, autrement dit la joie constante. En très résumé, l’Illumination, c’est la fin de la souffrance intérieure.

Il y a donc 6 causes de souffrance que je vais illustrer très brièvement ici :

Le désir : le désir d’argent par exemple, influe sur notre générosité. Celui de faire la fête, sur notre gueule de bois du lendemain. Celui de la belle demoiselle, sur notre déception de voir qu’elle n’a rien dans le crâne. Celui d’une cigarette, sur notre mauvaise santé…

La colère : elle amène à la haine qui, à son tour amène à faire du tort (à moins qu’elle ne soit la résultante du tort reçu).

La fierté : elle développe l’égoïsme

L’ignorance : c’est agir sans mesurer les conséquences de nos actes.

Le doute : nous empêche de nous engager, de faire des choix, de passer à l’action. On reste donc dans son canap' et on se lamente en écrivant des chansons haha.

Et la dernière… trop complexe (en vrai j’ai pas tout compris 🤣)

Derrière chacune de ses “causes de souffrance”, Bouddha nous explique quels sont les “antidotes”. Pour la colère on trouvera la compassion. Pour le désir il faudra travailler sur le détachement…

Bref, il existe donc un long processus complexe et très précis qui ne semble posséder aucune faille et qui, par conséquent, est très convainquant. C’est la partie qui me plait beaucoup.

Une chose essentielle dans le Bouddhisme est de comprendre la loi de cause à effet. Chaque action que nous engageons crée un effet opposé et un effet équivalent. Si je frappe dans un mur, le mur reçoit l’effet équivalent à la force de mon poing et mon corps reçoit la force opposée. Il est de même dans nos actions immatérielles. Si je dis à quelqu’un que c’est un gros con, il va le recevoir négativement mais il peut aussi me mettre son poing sur la gueule (évidemment maître Bouddha utilise d’autres exemples pour illustrer tout ça). Plus sérieusement et sans rentrer dans le concept physique, le gros c.. en question peut ne pas réagir mais intérieurement il a reçu la violence et il la transformera forcément. Ce peut être en médisance et les fruits se récolteront indirectement. Ce peut être par violence verbale et être encore plus blessant. Ce peut être un malheur qui fera du gros c… un être introverti, malheureux, dont les parents croiront avoir fait une erreur et toute une famille sera dans le malheur…

Les conséquences de nos actes ont TOUJOURS un impact.


Dans cette philosophie, aimer signifie “vouloir que l’autre soit heureux”. Vouloir “être heureux” c’est de l’attachement à soi-même. Intéressant non ?

Une des phrases qui m’aura beaucoup marquée est la suivante :

“Quelque soit la joie qu’il y a dans ce monde

Elle vient du désir de voir autrui heureux

Quelque soit la colère qu’il y a dans ce monde

Elle vient du désir de me voir moi-même heureux” Shantideva

Il est vrai que quand je plonge dans mes souvenirs, les moments de joie sont généralement des moments de joie pour ou avec d’autres. Je pensais que rendre mon prochain heureux satisfaisait principalement mon ego. Ce qui peut être en partie vrai quand on reprend le concept de l’attachement à soi même et par conséquent à celui d’être aimé. Mais il y aurait un pouvoir de générosité au dessus de cela.

Mais pourquoi se prendre la tête alors, quand on veut être heureux, il suffit d’être généreux. Ahhh, je l’aime bien cette phrase, “Pour être heureux, suffit d’être généreux” 😀

Ensuite il y a l’aspect religieux auquel j'adhère évidemment moins. Bien qu’il y ait débat sur la notion de “religion” car le Bouddhisme n’exprime à aucun moment la création, les Bouddhistes croient à la réincarnation. Si je suis bon, je me réincarne en mieux jusqu’à trouver l’Illumination. Si je suis mauvais ma réincarnation sera moins avantageuse (disons cela comme ça 😉 ).

C’est pourquoi les jeunes moines Bouddhistes de ce monastère étudient de 5h à 22h. Ils semblent passionnés, ils travaillent en groupes, ils sont soudés. Leur sérénité et leur investissement sont remarquables. Si la philosophie Bouddhiste est accessible à tous, l’aspect religieux en revanche demande beaucoup d’implication. Les Bouddhistes considèrent que nous avons une opportunité d’être humain et que cette chance ne se reproduira pas alors il faut la saisir et travailler pour trouver “l’illumination”. Chaque seconde à faire autre chose qu’à travailler sa spiritualité est donc du temps de gâché.

Mais peut-on vraiment dédier une vie sous le prétexte que la prochaine sera meilleure.

Seule la foi en cette religion peut permettre un tel sacrifice.

FIN de la partie théorique (pour ceux qui voulaient sauter ce passage 😉 )

Durant ces quelques jours, j’ai été surpris de constater que le Marketing avait été inventé par la religion haha. Ah ça ils l’ont le côté commercial. Avantages, inconvénients… tu dois te rendre compte de la chance que tu as, il faut la saisir… nan mais sérieux, ils font même le coup de la promotion. Bientôt ils vont nous dire qu’il n’y a plus que 1000 places pour cette année :) Alors que Bouddha disait “ne croyez pas les yeux fermés à mes enseignements, c’est dans la pratique que vous trouverez la vérité”. Je vois bien qu’ils essaient de me la vendre leur religion, même si elle est gratuite. Comme à chaque vendeur, j’ai répondu que j’allais réfléchir 😀

Néanmoins certains concepts méritent réflexion. Sur le plan “développement personnel” c’est très élaboré.

Nous avons fait une méditation dite “analytique” sur la colère. C’est à dire que pendant ces 20 minutes offertes à nous mêmes, nous analysons notre colère, ses causes, nous nous remettons en question et nous déroulons un processus de réflexion sur la colère. C’est fou, je suis ressorti de cet exercice avec plus de compassion que je n'aurais pu l’imaginer. Je suis certain que ça aura un impact sur mes prochaines querelles.

Prendre 20 minutes pour réfléchir à sa colère. Ça parait long, on n'a pas le temps dans la vie de tous les jours ! Mais combien de temps passe-t-on à ruminer le problème, à le raconter à ses amis, un par un, ses collègues, sa famille… ça prend pas dix fois plus de temps ? Et quel est l’avantage de casser, même un petit morceau de sucre sur le dos de quelqu’un ? Tout le monde va en parler, puis la personne concernée sera jugée à son insu. On jugera la personne au lieu de juger son acte…

20 minutes, seulement 20 minutes, finalement, c’est beaucoup moins. Ce temps précieux pour améliorer son point de vue, son comportement, celui de la personne d’en face… On s’demande pourquoi qu’on n’y avait pas pensé plus tôt !!!


Cela rejoint ce que j’avais appris de la culture Amérindienne, “prendre le temps de réfléchir”. Pas besoin de se mettre dans la position du lotus pour ça. Il suffit de se mettre au calme, seul, sans son téléphone, la télé et autre co……..rie :) et de penser.

On peut donc tous le faire, c’est cool non 😀

6ème jour :

Comme chaque matin nous sommes en silence. Personne ne parle, ne se regarde, ne se sourit. Nous sommes seuls avec nous mêmes, nos émotions, nos souvenirs, nos motivations et nos souhaits d’améliorer nos vies. Après la méditation du matin je me retrouve au petit déjeuner face à un Américain. Je l’observe du coin de l’oeil et commence à juger ses gestes (oui quand on ne parle pas, il y a souvent une voix qui prend la relève dans la tête). Il est légèrement brutal dans ses mouvements. Ce type m’agacerait presque. Quel manque de respect. Puis il jette sa tartine dans son bol encore plein de céréales, ce mec n’a rien compris à nos méditations sur le respect. Il sort de son sac un cahier, prend une grande respiration et commence à écrire. Ma curiosité mal placée plonge mon regard dans sa première ligne : “Jordan, mon frère, je t’aime et tu me manques…” ces quelques mots suffiront pour me donner une grande leçon. J’ai jugé cet homme préoccupé et sur le point de mettre son courage sur le papier. Après deux pages, il ferme son cahier, respire de nouveau et finit calmement son bol et sa tartine. La leçon sur les préjugés est bien passée.

Mes larmes montent devant le témoignage d’amour de ce mec envers son frère (c’est vrai que ça me parle bien). Voilà le genre de choses qui ressortent de ces stages où l’on prend le temps de réfléchir sur sa vie, de faire le tri, de prendre conscience que si on veut améliorer les choses, il faut que ça vienne de nous, il faut mettre son ego de côté, sortir sa compassion et son courage le tout poussé par la conviction que demain sera meilleur, que notre cœur sera plus léger, que nous aurons donné le meilleur de nous-mêmes.

J’aimerais tellement que mes amis, ma famille et tout être humain puissent sortir la tête de leur quotidien quelques semaines pour prendre le bonheur que je reçois ici. Travailler sur soi-même, comprendre ses émotions, admettre sa vulnérabilité, ça change la perception de la vie, les relations.

8ème jour, Dieu créa … nan j’déconne :)

8ème jour, nous entrons ce matin dans deux jours de silence complet. Seul les enseignants nous donnent les directives. Lors de la pause j’observe et le constat est paisible et intrigant. Nous avons tous ralenti notre marche à environ 1,5 km/h. Non pas que nous soyons des zombis mais nous sommes tous dans des réflexions profondes. La marche est presque méditative. Certains sont assis ou allongés dans le parc, se reposent, s’instruisent, méditent sur leur vie ou leurs projets.

Après le petit déjeuner, en nettoyant les tables, mes yeux sont encore tombés malencontreusement sur la signature d’une lettre qu’une femme était en train de terminer avec ces mots écris en gras :”I LOVE YOU”.

Décidément, cette retraite inspire et moi je dois travailler sur ma curiosité mal placée 😀

Ici nous avons tous conscience que nous sommes privilégiés d’une certaine manière. Nous qui venons pour la grande majorité de population où la misère a laissé place au pouvoir, dans le bon sens du terme. Dans le sens où nous avons, par le fait de ne pas être sans cesse préoccupé par nos besoins vitaux, la capacité de nous épanouir, nous réaliser, réfléchir sur nous, sur la planète, sur la joie. Nous avons le privilège d’améliorer nos vies et de transmettre notre savoir, car tout le monde recherche et a le droit au bonheur. J’ai la chance d’être né dans une famille avec amour, avec de quoi me nourrir chaque jour. J’ai la chance d’être né dans un pays avec une grande liberté même si beaucoup de choses sont encore à améliorer.

Aujourd'hui, j’ai à peine trente ans et je m’aperçois de ce privilège et d’une certaine manière j’en mesure la responsabilité. Oui je peux passer une petite vie paisible avec un travail qui me permette de vivre égoïstement une belle vie mais je peux aussi utiliser ce cadeau pour le partager. Alors je fais le choix de la générosité et si un jour je m’écarte de ce choix, merci à celui ou celle qui me remémorera ce texte.


Le samedi soir, nous nous sommes tous munis de bougies pour célébrer notre stage dans le parc. Nous plaçons ces 500 lumières autour des statues et du bassin. Karin notre nonne bien aimée anime religieusement la soirée. Nous sommes toujours dans notre devoir de silence mais pour les Tantras (sorte de chanson Bouddhiste) nous avons le droit de chanter. Au début je chante, puis je prends du recul et j’observe ce moment de partage et de joie. Les Tantras se terminent puis nous revenons sous silence, à contempler cet univers éphémère. Cet instant tellement bénin sur le papier et pourtant si intense en chacun de nous silencieux.

Alors je les observe, un par un.


L'Israélien qui est venu pour l’fun et qui découvre finalement qu’il n’est pas loin d’avoir trouvé la foi.

La Canadienne abusée sexuellement par son papa, viens cultiver l’amour dans un refuge où la malveillance n’existera pas.

Le Dannois de 60 balais qui à son âge est venu chercher le courage pour se réorienter, vers un métier qui fait sens à ses yeux car on n'est jamais trop vieux pour se sentir mieux.

Le Germano Américain, en phase de terminer son examen, impliqué à méditer comme lui-même ne l’aurait jamais imaginé.

Et y a le Danois de 27 ans qui d’un au revoir émouvant, s’évade de son couple fade car l’appel de la vie lui a appris qu’il avait trop perdu de temps.

Le ricain gangster, un peu sur les nerfs, venu pour trouver de la sagesse et avouer à son frère que leurs querelles le blesse.

Le costaud barbu qu’est sorti de sa salle de muscu pour chercher de la douceur coincé dans un coin de son coeur.

Le prof de math Canadien à la retraite qui continue le chemin spirituel de ses ancêtres.

L’Indou qui trouve pas son bonheur sur Tinder, presque converti car le Bouddhisme donne du sens à sa vie.

L’Italienne de 35 ans à qui les parents lui reprochent ardemment de ne pas avoir de p’tits enfants, elle vient en espérant recevoir de l’amour sans jugement.

Il y a aussi l’Chinois, avec tous ses pourquois dont sa culture ne lui répond rien alors il a pris son baluchon sous l’bras et c’est sur le chemin qu’il trouva la confiance en soi.

Le begg qui ici trouve du repos dans ses propos.

Cette Hollandaise qui accompagne sa sœur introvertie et un peu mal à l’aise.

Ces quelques Français, guerriers de la paix, venus pour se renseigner car le train est lancé et ils ne voudraient pas le louper.

Cette Espagnole curieuse, assise au premier rang studieuse, pour rapporter un peu de compassion à son pays en explosion.

La femme Italienne touchée par les reliques des corps incinérés des Bouddhas qui nous ont précédés.

Le Roumain ambitieux qui sait qu’il mérite mieux, avant de foncer pleine balle vient faire sa retraite spirituelle au Népal.

Le couple de Britanniques guindés, venus pour se cultiver, sérieux comme dans une école catholique privée.

La mère de famille Allemande qui vient étudier loin des siens comment elle pourra leur donner plus d’amour au quotidien.

L’architecte Néo-zélandaise qui a décidé comme second choix, après son ascension de l'Himalaya, de suivre les enseignements méditatifs qui contre toute attente l’auront soignée de ses troubles post traumatiques répétitifs.

Et puis il y a ce jeune Français curieux, au fil des jours de plus en plus heureux car il va pouvoir ramener chez lui ce qu’il a appris dans ce riche pays ;)

(PS: cette partie peut aussi se chanter sur un air de SNIPER haha)


Mais ce ne sont pas des cas à part perdus dans leur vie. Ce sont des gens simples, comme vous et moi, qui assument leur vulnérabilité et cherchent du sens là où ils ressentent du vide. Ce sont des personnes qui souhaitent aller au-delà des sourires et de la politesse de société. Ils veulent découvrir la profondeur de leurs émotions. Pour cela ils sont venus chercher ce cadre sincère et bienveillant.


J’ai donc vécu un moment magique à observer ces personnes silencieuses dont l’énergie qui s’en dégageait en disait long. On pouvait lire les émotions dans les yeux de chacun.

J’en ai passé des célébrations les samedis soir mais celui-ci restera gravé.

Merci Kopan

Au moment où je rédige cette étape, nous sommes la veille du départ. Je commence à avoir des pensés qui ressemblent à celles que j’avais exprimées au Pérou, lors de mon passage au monastère Hare Krishna : ”Quand est-ce qu’on danse, qu’on chante, qu’on se raconte des conneries, qu’on fait la fête et qu’on joue de la musique???” Haha !!!

Encore une fois, je trouve beaucoup d’inspiration dans cette culture mais je suis toujours attaché à mes plaisirs. Est-ce un tort ? Est-ce ma nature ? Et puis il y a ces paysages qui m’appellent comme des sirènes depuis 10 jours.


Je vais bientôt sortir de ce monastère qui aura enrichi ma vie. Je remercie ces moines et nonnes qui m’ont apporté beaucoup de réflexion que je ferai grandir avec le temps.

Il est temps pour moi de découvrir ce pays sous ses autres facettes.

Merci

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06/11/2017 - Katmandu

En sortant du monastère de Kopan je voulais retrouver un peu de mon identité de fêtard tout en conservant les vertus de mes enseignements Bouddhistes. Je voulais aussi m’émerveiller devant ce que le Népal pouvait m’offrir. J’avais le souhait de me laisser guider par les signes que m’envoie la vie et j’espérais que la rencontre avec mes deux nouveaux compères ne m’éloignerait pas de ces objectifs.

Et bien il faut croire que lorsque l’on prend le temps de penser à ses intentions, un mécanisme se déclenche et tout fonctionne comme sur des roulettes 😀 Certains considèrent que ce mécanisme se forme dans notre intérieur, d’autres le savent venir de l’univers. Chacun le prend comme il l’entend, pour ma part, je crois au deux et l’essentiel, c’est que je ne suis jamais déçu 😉

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Tout juste sorti du monastère, vers la fin de journée, j’arrive à mon hôtel en plein centre du quartier de Thamel. Je retrouve quelques personnes du stage et nous allons apprécier une bière et une cigarette. Nous sortons ensuite retrouver d’autres personnes apprentis Bouddhistes au restaurant. Au final nous serons presque une trentaine à manger et boire. Ensuite nous allons en boite et nous passons la soirée à danser comme des dingues… Et bah bravo !!! 10 jours que nous travaillons sur le côté négatif de l’attachement au plaisir et en une soirée, BIMMM, on est retombés dedans. Chassez le naturel, il revient en moto (oui, les deux roues sont plus courants que les 4 pattes au Népal). Enfin pas totalement quand même. Nous avons aussi passé la soirée à échanger sur les leçons de notre stage et nous ironisions sur nos mauvaises actions. Je citerai alors cette belle analyse du Mahatma Gandhi que j’aime associer avec le chemin vers l’acceptation d’une idée, d’une réflexion, d’un nouveau point de vue… :”Premièrement il y a l'ignorance, puis la moquerie, ensuite le combat et enfin la victoire.” J’en déduis que nous sommes donc sur la bonne voie 😉

Le lendemain je décide d’aller à Bhaktapur. C’est la ville d’à côté qui aujourd’hui se confond avec Kathmandu. Il s’y trouve une ancienne cité royale apparemment très charmante et pleine d’histoire. J’aurai pu me joindre à mes collègues de soirée d’hier mais je décide d’y aller seul pour retrouver cette liberté de voyageur solitaire que j’aime tant (qui aurait cru que je dirais ça un jour ? haha).

Je prends donc un bus local pour 1h30 de trajet. Il y a quelques différences avec nos bus à nous. Mes genoux sont bloqués dans le siège d’en face, quand il y a une bosse sur la route (et il y en a beeeaaauuuuccccoooouuupppp) j’ai la tête qui vient cogner contre le toit du bus. Oui, je suis grand dans ce pays 😀 Après 20 minutes de trajet, le Népalais assis à côté de moi avec lequel je discutais descend puis, celui assis derrière vient prendre sa place. Après 2 minutes, il va jusqu’au bout de son action et me demande d’où je viens. Nous discutons, il m’explique qu’il fait ses études à Kathmandu et qu’il habite un peu plus loin que mon point de chute. Au moment de descendre, il se propose de venir avec moi pour… faire le guide en gros 😉 Je suis ravi de voir qu’encore une fois voyager seul a ses avantages et permet de découvrir la générosité des habitants d’un pays.

Nous avons donc visité les temples qui ont survécu au tremblement de terre de 2015. Ashok m’a fait découvrir la nourriture locale excellente et particulièrement épicée 😛 En nous perdant dans les petites rues on tombe sur des minis temples bouddhistes et hindouistes. Certains locaux s’y recueillent, d’autres papotent, certaines tissent des mèches à bougies pour les offrandes avec leurs outils traditionnels à l’ancienne, des papis jouent aux dés, d’autre aux petits chevaux…

Ils sont tous très agréables. Dès que je dis bonjour tout le monde me répond avec un grand sourire et des yeux pétillants. Quand je leur pose des questions, ils sont toujours ravis de me répondre. J’adore !!!

J’ai l’impression que la principale différence avec le monde occidental c’est la notion de temps. Non pas qu’ils ne respectent pas des objectifs dans leur journée mais j’ai la sensation qu’ici, il faut faire une tâche tôt le matin ou après le déjeuner ou encore en rentrant du travail mais pas à 7H15 ou à 14h ou à 18h52. Le fait de ne pas avoir à respecter un emploi du temps à la minute leur permet d’être pleinement attentionné quand l'inattendu les interpelle. Ils sont donc dans l’instant présent et non dans la planification constante de ce qu’il vont devoir faire. Alors certes il est possible qu’ils en fassent pour le coup moins que s’ils étaient rigoureux mais peut on passer son temps à courir après les aiguilles ? Quel en est le but ? Accomplir plus de tâches nous rend-t-il plus heureux ? Je me souviens d’une citation du Dalaï Lama :”Les hommes, parce qu’ils perdent la santé pour accumuler de l’argent, ensuite ils perdent de l’argent pour retrouver la santé. Et à penser anxieusement au futur, ils en oublient le Présent, de telle sorte qu’ils finissent par ne vivre ni le présent, ni le futur. Ils vivent comme s’ils n’allaient jamais mourir… et meurent comme s’ils n’avaient jamais vécu. ». J’imagine qu’il fait référence aux burn-out, aux dépressions, aux médocs pour dormir, aux séances de kiné et d’ostéo… Et nous faisons tout ça pour quoi ? Pour nous assurer un bel avenir. Si je résume, nous vivons dans le futur pour nous assurer des vieux jours heureux que nous idéalisons et nous seront très probablement déçus car la vie est dynamique et ce que nous espérons aujourd’hui sera forcément différent demain.

Malheureusement notre société nous guide vers ce schéma qui nous éloigne du propre de l’être vivant : vivre l’instant présent. Je ne souhaite pas vivre chez les bisounours, il est important de construire son chemin, répondre à sa propre vocation que la vie nous a offerte tout en réalisant son identité. J’ai bien conscience que prévoir, planifier, construire me permettent ultérieurement des moments agréables mais j'espère arriver à trouver le juste milieu pour ne pas passer à côté des moments inattendus qui se présenteront à moi.

mandala de Kalachakra 

Avec mon nouvel ami, nous continuons à nous balader de temple en temple. Mon attitude avenante de voyageur curieux le surprend un peu et petit à petit il se prend au jeu avec plaisir. Il découvre même des choses qu’il ne savait pas de son pays. C’est beau le partage 😀

Nous passons ensuite devant un lieu qui ressemblerait presque à un temple mais sur une statue j'aperçois des cartables.

Ashok me confirme que c’est une école. Je passe la porte, surpris du cadre si différent de l’image que j’ai de ce genre de lieu. J’arrive devant une classe et une dizaine d’enfants sont en train de discuter tranquillement avec leur institutrice. Ils ne sont pas en train d’étudier religieusement alors je me permets de passer ma tête par la porte et de lancer un petit “Hello, do you speak english ?”. Les gamins et la prof tournent la tête et me répondent que oui, ils parlent anglais. Je sens que je vais me régaler 😛 Je rentre alors dans la petite classe et commence à poser des questions aux jeunes élèves qui me répondent ravis de mettre en application leurs révisions. Certains moins à l’aise en anglais se font souffler les réponses. On passe un petit quart d’heure à échanger, ils me montrent leurs dessins, mettent en pratique leurs leçons, on se marre, on se moque, on se félicite… que du bonheur. J’ai vraiment apprécié ce moment spontané et qui sait, peut être aurais-je été plus attentif en cours d’anglais si un jour un étranger était venu échanger quelques mots dans ma salle de classe. Alors j’aime à penser que ce moment opportun aura un petit impact sur la motivation de ces jeunes népalais 😀

Nous quittons alors les bancs d’école et allons nous poser tranquillement. Dans notre discussion Ashok m’explique que le salaire moyen ici est entre 80 et 160 euros. Ah ouais, j’ai déjà claqué deux salaires népalais en 15 jours. J’apprends également que certaines filles doivent suivre des traditions pour les relations avec un homme comme avoir l’accord de ses parents par exemple. Ok, merci du conseil, je vais éviter de me mettre dans la m…. à être obligé de me marier avec une Népalaise 😇.

Nous avons aussi été interpelés par des enfants… orphelins, clochards, sdf. Ils nous demandaient de l’argent. J’apprends que malheureusement ce n’est pas rare.

Cette journée m’aura donc montré la belle attitude des habitants de ce pays et la misère qui traverse les rues comme un vent froid que tout le monde aimerait éviter mais qui malheureusement touche beaucoup de passants.

Merci l’ami pour cette prise de conscience.

Sur le chemin du retour, j’observe à travers la fenêtre du bus. Kathmandu me met une grosse claque de rappel sur les avantages que nous avons en France. Nos routes, la gestion de l’eau, de nos déchets, du flux routier, notre système de santé… ici certains bords des routes sont des déchetteries et des casses à ciel ouvert. L’eau potable n’est pas vraiment potable et il n’y a pas de châteaux d’eau donc chacun doit se munir d’une pompe et d’un bidon sur son toit. La circulation est un vrai bordel. Il n’y a pas de feu rouge. C’est donc la police qui fait la circulation avec un masque pour ne pas respirer la poussière et les gaz noirs des pots d’échappement. Pour traverser la route en tant que piéton, il faut se lancer dans ce flux condensé de voiture, de bus et de motos et ne surtout pas accélérer ou ralentir. Chacun se cale sur le rythme de l’autre pour définir sa trajectoire. La poussière recouvre les magasins qui ont pignon sur rue et les cultures de bord de route. Les montagnes de déchets qui puent sont régulières sur les rues car le ramassage des ordures est loin d’être en place. Les mendiants malades ou handicapés arpentent la ville chaque jour pour recevoir une infime partie de ce que je recevrais en France, directement sur mon compte, si j’étais dans leur situation. Les routes ne sont pas construites partout, les pneus de presque tous les véhicules sont lisses, les suspensions sont rincées et pourtant seuls quelques étrangers mettent leur ceinture. Tout le monde travaille tous les jours et la plupart ne prennent jamais de vacances… Alors certes, je suis ravi de recevoir les belles attitudes des Népalais mais si je suis honnête avec moi-même, je sais qu’à la longue j’aurais envie de retrouver un peu d’ordre, de calme, de propreté, de confort, de sécurité. Je prends conscience des atouts de mon pays en vivant d’une certaine manière l’opposé. Il me vient alors l’envie de redécouvrir mon pays de naissance avec un regard plus conscient des détails qui m’entourent. Ces avantages que je considérais comme acquis, comme normal, finalement ce sont des luxes que plus de la moitié du monde ne connaît pas. Un Népalais m’expliquera plus tard que le problème dans son pays c’est que ceux qui ont l’opportunité de travailler en dehors des frontières ne reviennent jamais. Je comprends. C’est triste et j’espère que la situation va s’améliorer. Mais, en même temps, le Népal aurait il conservé ses belles traditions et sa riche culture avec un pays développé ?

Le soir je retrouve Guillaume, un français de Kopan qui se dit timide alors qu’ensemble, le courant semble bien passer. Nous avons la possibilité de rejoindre les autres mais nous décidons de commencer par une bière en petit comité. Finalement, 7h plus tard, après avoir parlé d’écologie, de spiritualité, de religion, de l’infiniment grand et de l’infiniment petit, avec les différents ouvrages et documentaires référents dans le domaine, nous ressortons agréablement marqués de cette belle rencontre. Nous avons pris plaisir à dresser un portrait plutôt positif et encourageant du monde. Décidément, j’adore voyager seul 😀 Vers la fin de soirée (oui il y a tjrs fin de soirée dans ce genre de rencontre), nous discutons avec le patron du bar à la fermeture. Celui-ci nous explique son point de vue dissonant du Bouddhisme et de la corruption qui l’accompagne.

Cette journée très contrastée m’aura présenté une facette que le touriste ne veut pas voir. Le constat n’est pas noir mais légèrement grisé. J’ai envie d’éclaircir cette peinture mais que faire à mon niveau ? Alors de nouveau cette phrase vient résonner dans ma tête :”soit le changement que tu veux voir dans ce monde”.

Merci Guillaume. J’aurais grand plaisir à te revoir en France ou ailleurs 😉

Le lendemain soir, je retrouve Sacha et Flo pour le dîner. Plusieurs jours que je les attends avec impatience en espérant que le courant passera bien avec l’ami de Sacha que je ne connais pas. Je peux dire que j’ai été ravi de comprendre très rapidement que tout allait bien se dérouler car nous partageons vraiment les mêmes valeurs 😀

Nous avons choisi de passer une journée sur Kathmandu avant de démarrer notre rando organisée. Nous avons donc visité le Monkey temples et la ville de Patan.

Nous avons eu la chance de parcourir les rues le jour d’un “festival religieux”. Ce jour était consacré au Dieu de la réussite. C’est assez troublant de remarquer que certains présentent cette figure divine comme le Dieu de l’argent. Oui, malheureusement il faut vraiment se méfier des interprétations. Le rituel de cette journée consiste à dessiner des sortes de “mandala” devant sa porte pour inviter le dieu à rentrer chez soi ou dans son magasin pour que l’année soit bonne. Alors tout le monde achète des poudres de couleur et se met à créer des oeuvres magnifiques aux yeux de tous. Je suis alors touché par le mouvement de rassemblement que déclenche cette festivité.

Le soir, face à notre resto, nous passons devant un mandala d’environ 2m de large. Nous dînons, discutons, rions… puis il me vient l’envie de pisser 😉 Information peu intéressante me direz-vous mais pourtant assez marquante pour moi car, j’ai du attendre 30 minutes qu’un constipé me laisse la place. C’est pendant ce temps que je me suis retrouvé seul à observer le grand mandala devant le resto. Je me suis alors fait la réflexion que j’étais passé devant sans même y prêter attention. Où plutôt sans lui porter l’attention que je lui aurais porté si j’avais voyagé seul. J’ai alors admiré la beauté de cette oeuvre d’art éphémère et l’émerveillement des passants à son égard. Attitude que j’aurais eu si je n’avait pas été emporté par l’élan de groupe et par l'appétit. Je prends alors conscience de deux choses. Je ne suis pas croyant mais je constate la beauté que les rituels religieux apportent à la société. Cette journée de solidarité accompagnée d’une touche de créativité dont le résultat provoque l’émerveillement de tous, amène de la joie dans les rues, les maisons et sur les visages. Je repense alors à nos événements religieux qui ont pris une tournure commerciale tels que Noël, Pâques, l’Ascension… Ces journées ont perdu leur charme et leur raison d’être initiale. Bien qu’il soit vrai que nous développons de nouvelles manifestations joyeuses et solidaires, je trouve dommage de ne pas avoir su conserver les bons côtés de nos traditions. Secondement, je prends conscience de la puissance qu’a le voyage en solitaire, en terme de réflexion personnelle. Je mesure alors avec recul la beauté de mon voyage au Pérou. Wouaw, il ne pouvait pas y avoir meilleure situation que celle-ci pour m’en rendre compte. Je ne parle pas du fait d’attendre derrière une porte de chiottes dans un resto, néanmoins, je remercie le type pour avoir été constipé ce jour là 😛 .

Ce soir là nous ne nous attarderons pas car le lendemain nous démarrerons un trek de 5 jours et au vu de nos séances de préparation tellement fréquentes ces derniers jours 😛 il est préférable de commencer par une bonne nuit de sommeil.

Hasta pronto 😉

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31/03/2020 - Dhulikhel

Du 20 au 24 octobre 2017

Lorsque j’avais pris la décision de partir au Népal, j’avais en tête de faire un trek dans l’Himalaya et de dépasser l’altitude du Mont Blanc. Finalement j’ai décidé de me joindre à mes deux compagnons français qui avaient déjà réservé un trek particulier. Celui-ci ne nous emmènerait pas dans les hauteurs des montagnes mais sur les balcons de l’Himalaya à travers les villages et à la rencontre des Népalais.

Une fois de plus, j’ai bien fait de suivre la proposition qui s’est présentée sur mon chemin ;)

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1er jour

Le matin nous quittons nos chambres d’hôtes et prenons un bus en direction de Dulikhel, une ville à seulement 30km de Kathmandu mais tout de même à 1h30 de bus. Oui les routes sont différentes au Népal et pourtant ils appellent ça “The Highway”, j’imagine la tête qu’ils feraient s’ils voyaient nos autoroutes ^^.

Notre guide, Shubeen, est un jeune Népalais de 25 ans qui a grandi dans la région que nous allons traverser. Il est, comme c’est coutume au Népal, guide pour financer ses études et apporter un peu d’argent à sa famille.

Moi - Shubeen (notre guide) - Sacha - Flo 

Nous allons donc marcher plusieurs heures en direction du monastère Bouddhiste “Namobuddha”. En chemin nous sommes interpellés par un petit monument sur lequel sont inscrit en népalais des noms, des dates et des montants. Shubeen nous explique que c’est un mémorial en souvenir des donateurs qui ont permis la construction de ces nombreuses marches en direction du village suivant. “Ce n’est donc pas l’état qui a financé ce long passage ?” - “non, l’état ne finance pas grand chose dans les villages”. Ce cours arrêt me laissera songeur sur les priorités en terme de construction dans un pays en développement qui de plus a subi un tremblement de terre aux lourds dégâts il y a 2 ans. Peut on laisser à l’abandon une partie de sa nation sous prétexte de priorité dans les villes ? Mais comment faire autrement si le budget ne suit pas ? Et comment obtenir plus de fond dans un pays où les habitants survivent ?

Plus nous avançons et plus nous nous réjouissons du spectacle qui s’offre à nous. Nous sommes entourés de montagnes verdoyantes, le ciel bleu nous accompagne, en arrière plan quelques monts reconnus de l’Himalaya montrent le bout de leur cime par dessus le tapis de nuages. La nature abondante abrite la faune qui se devine par les sons résonnants dans ces montagnes. Les agricultures étagées bien connues des cartes postales d’Asie soulignent le relief et colorient ces merveilleux paysages. Quel bonheur. Nous avançons avec une béatitude enfantine qui nous fait oublier l’effort et le poids de nos sacs :)

En milieu d’après midi nous arrivons au Monastère Namobuddha où nous devons passer la nuit. Nous sommes émerveillés devant la beauté des lieux, des décorations traditionnelles et du panorama qui nous accueille. Nous souhaitons poser nos affaires mais notre guide semble inquiet suite à ses échanges avec les moines qui gèrent l’intendance. Nous comprenons alors qu’il n’y a plus de place pour dormir dans le monastère et que nous allons dormir dans l’auberge d’à côté. “Ah d’aaaccccooorrd, en fait rien n’est réservé et on improvise sur place”. Cette prestation en ferait ronchonner plus d’un mais nous, ça nous convient. Népali style !!!

Le soir nous dînons avec les moines. Lors du thé, nous avons la chance de discuter avec l’un d’entre eux. Celui-ci nous fera l’honneur de nous faire partager avec une sagesse manifeste, quelques enseignements Bouddhistes. Parmi ses nombreux exemples, je retiendrai entre-autres la façon dont il nous a illustré que la colère provient de chacun de nous. Elle n’est qu’une interprétation que l’on autorise à l’intérieur de notre mental, c’est une croyance à laquelle on choisit de donner du pouvoir. Il nous explique alors :“si tu es joyeux et que je te souris, tu seras certainement enchanté par mon sourire. Et si je te souris, de la même façon alors que tu es en colère, tu croiras peut-être que je me moque de toi et la colère augmentera probablement en toi. Mais mon sourire est le même. C’est bien la preuve que TOUT se passe à l’intérieur et c’est un bon point de départ pour regarder un peu plus en soi”. Bel exemple, je garde ;)

Jour 2

Le lendemain matin nous nous levons à l’aube pour aller au sommet du monastère contempler le lever du soleil. Nous décidons d’apprécier en silence ce moment de vie unique. C’est assez étrange de partager près d’une heure avec des amis sans énoncer ce que l’on ressent, ce qui nous émerveille et ce qui nous fait rire. On le garde pour soi et, étrangement, le moment s’intensifie de l’intérieur. Merci les copains, merci pour ce silence respecté, merci à la nature pour ce spectacle.

Nous avons ensuite assisté au cours du matin pour les jeunes moines. Ceux-ci répètent des prières et régulièrement font sonner leurs instruments. Il est amusant de remarquer que malgré la sagesse qu’il y a derrière ces cours ancestraux, ces moines restent des enfants. L’un s’est assis derrière le pilier du temple et pose sa tête sur celui-ci à l’abri des regards du maître. L’autre s'endort la tête dans les bras. Un petit malicieux s'amuse à chatouiller l’oreille de son voisin quand son surveillant a le dos tourné. Puis un des aîné qui doit avoir certaines responsabilités, passe dans les rangs et réveille les fatigués et reprend les moins studieux avec un petit coup de livre sacré sur la tête. Cette petite comédie me rappelle que ces personnes restent bien des êtres humains :)

Cours du matin et p'tit dej 

Je passerai rapidement sur le petit dej qui me remémore chaque matin que j’aime quelques habitudes Françaises :)

Tout de suite après avoir fait le plein d’énergie, nous reprenons la route car une longue et dure journée nous attend. Nous devons redescendre la montagne pour ensuite remonter la suivante et atteindre 2000m d’altitude. La descente, à part le mal au genoux qu’elle nous aura procuré, restera un souvenir exceptionnel. On peut dire que notre jeune accompagnateur commence à connaître nos goûts. Ils nous a fait passer à travers les rizières et les maisons des paysans.

Ces petits passages de 20 - 30 cm de large m’auront rappelé l’humilité. En effet, quand tu fais le beau parce que tu crois avancer vite et qu’une népalaise qui, par définition fait deux têtes de moins que toi et a donc des jambes plus courtes, te double et dévale la montagne comme Usain Bolt avale un 100m, que tu ne peux même pas prendre l’excuse d’avoir un sac de rando car elle, elle a une hotte remplie, soutenue par la tête et que, ébahi par la prouesse tu loupes le chemin et te pète la g…#* !!! Et bien tu mets ta fierté de côté et tu t’arrêtes pour admirer le paysage :)

A travers ces champs étagés nous avons également pris conscience de la sueur qui coule sur les fronts pour nous permettre d’avoir du riz dans nos assiettes. Il ne s’agit pas de grands champs avec des tracteurs et des bennes. Il s’agit bien de petites parcelles qu’il faut cultiver à la main et en remonter les récoltes sur le dos car les machines, quand bien même ils pourraient s’en offrir, ne pourraient circuler et remonter ces terrains ardus.

Nous avons également eu la chance de tomber sur un groupe de personnes avec des enfants et des adultes. L’un d’eux parlait anglais et nous expliquait que les personnes qui naissent ici sont presque condamnées à rester là car un professeur ne gagne pas beaucoup d’argent et venir en campagne, loin de tout n’intéresse que peu voir pas d’enseignant. Cet homme se bat pour faire venir des professeurs dans les campagnes et pour que des écoles se construisent. Il veut apporter l’éducation pour permettre aux générations à venir le choix d’être paysan comme leurs parents ou d’aller vers un avenir… différent.

Le plus marquant c’est quand nous nous apprêtons à continuer notre route et que les gens nous remercient profondément d’être passés par là et de découvrir leur façon de vivre. Comme s’ils aimaient à penser que nous allons communiquer ce que nous venons de voir. Alors peut-être serait-ils ravis d’avoir connaissance de ces quelques lignes.

Après une longue marche, nous arrivons enfin en bas de la vallée. Un peu épuisés, nous avons faim mais pas de bol, c’est un jour national et… tout est fermé. MDR Shubeen est un peu embarrassé. “T’inquiète pas mon grand, il en faut plus pour nous agacer :)”. Nous trouvons tout de même un bouiboui qui veut bien nous faire une assiette. “Ce que tu nous offriras sera parfait”. A la fin du repas un type nous demande où nous allons et nous explique que c’est son chemin. Il propose de nous avancer un peu. Grand sportif que nous sommes nous refusons poliment. Nan j’déconne, on a commandé une bière de plus pour l’attendre ;) Notre chauffeur arrive alors… en camion remorque et nous voilà embarqués Yalaaaa !!! IM PE CABLE !! Nous avons le sourire de savoir que nous gagnons quelques kilomètres. Puis, nous passons à côté de personnes en train de marcher dans la même direction. Le conducteur s’arrête, ils échangent deux mots et les Népalais prennent place à nos côtés dans la remorque. Nous comprenons que c’est coutume ici. Nous sommes dans un Blablacar qui ne s’est pas organisé sur le net, simplement par la générosité des gens. Que c’est beau la solidarité !!! Alors certes les personnes qui descendent donnent une légère contribution mais le capitaine du covoi nous a refusé un billet car il trouvait que la somme était trop importante. Il s'est contenté de quelques pièces. Grand prince le mec ;)

Bon dans tout ça on a gagné pas mal de kilomètres de monter et on n’est pas mécontents :)

Avec Flo nous nous laissons entraîner par l’élan sportif qui alimente nos foulées tout en papotant de la vie. Quelque temps après, nous faisons une pause pour attendre Sacha et Shubeen que nous ne voyons plus. 10 minutes plus tard, toujours personne à l’horizon. L’inquiétude nous gagne. Nous crions leurs noms. Rien ! Nous utilisons nos sifflets. Rien ! Nous n’osons pas descendre plus bas car s’ils ont pris l’autre chemin nous allons nous perdre. Les minutes passent. Il fallait bien que les emmerdes commencent. Nous descendons encore un peu sans conviction mais nous ne pouvons pas rester là à rien faire. Nous crions, sifflons… et… nous entendons un sifflet !!! “Ça doit être Sacha”. On communique par coup de sifflet pour se repérer au bruit. Nous arrivons devant une maison et là… c’est un enfant qui joue avec un sifflet. :( Mais pas n’importe lequel. Celui de Sacha qui lui, pénardo, est en train de boire un genre de cocktail local, dans la maison d’un Népalais, entouré de femmes et enfants, à faire le clown, à montrer ses gadgets aux gosses et à trinquer avec le Padré. Sacha : “venez les mecs, ils sont trop cools et y’a moyen de se faire payer un coup” MDR. On avait bien tort de s’inquiéter. Nous avons été accueillis comme des princes. Nous avons mangé sur un plateau d’offrandes garni. Nous avons dégusté deux alcools locaux faits maison (que j’ai peiné à finir, c’est vous dire comme c’est bon les grumeaux de maïs fermentés :) ). Ils nous ont décoré le front du fameux Tica, ce point sur le front en signe de… plein de choses à vrai dire mais là ça semblait être sous le signe de l’amitié. Quel bonheur, quelle générosité ! Nous avons été régalés en moins de 30 minutes, nous avons ri sans nous comprendre, nous avons partagé, nous avons créé du lien avec si peu. Je n’ai plus besoin de rappeler que ces gens ne possèdent que très peu de choses, que la maison était presque vide, que nous étions sur les seuls “sièges” et que eux étaient assis par terre. Ils ne possèdent rien de matériel et tellement de chaleur humaine. Les rencontres de cette journée ne nous laissent pas indifférent.

Quel bonheur 

En fin d’après-midi nous arrivons au village prévu et notre guide demande à la première personne qu’il semble connaître si elle peut nous héberger. La réponse est immédiatement un grand oui, accompagné d’un sourire droit dans les yeux en guise de bienvenue. Le plus impressionnant n’est finalement pas leur générosité mais la spontanéité de cette valeur. Nous sommes très touchés.

Le soleil couchant, nous exprimons à notre guide que nous kifferions faire de la guitare autour d’un feu devant ce spectacle de la nature. Aussitôt dit, aussitôt fait. Le voisin va chercher sa guitare, en chemin nous entrainons sans peine quelques villageois et en deux temps trois mouvements, nous sommes en haut d’une petite montagne de 2000m, avec des potes inconnus, un feu et une guitare. Quelques bières et chansons plus tard, nous avons motivé nos nouveaux compagnons pour nous enseigner des chants traditionnels Népalais. C’était du pur bonheur. Ils étaient tellement ravis de nous voir nous intéresser. Nous échangions nos énergies festives si différentes (oui ils ne voient pas souvent trois Européens danser autour du feu en chantant du yaourt Népalais avec une impro de guitare :) ). Nous avons égayé leur soirée et ils ont enchanté la nôtre.

Comme à notre habitude nous avons fini la soirée tous les trois, à nous remémorer les émotions de la journée, pendant que le Népal se repose, et à fredonner l’air de notre hymne Népalais : resham firiri ;-)

à imaginer de nuit ;) 

Le lendemain notre itinéraire est relativement court alors les villageois nous proposent de prendre la matinée pour aller visiter une sorte de grotte où un Bouddha aurait médité il y a plus de 2000 ans. “Ok, en avant !”

Nous nous dirigions sans le savoir vers la cave de “Ghelung”. Un site très peu connu, perdu dans une partie difficile d’accès de la montagne, retrouvé grâce à des prédictions d’un Lama (professeur Bouddhiste) lors d’une méditation. Ce lieu est sacré pour avoir été le refuge d’un Bouddha qui y aurait médité pendant 6 mois. Nous descendons alors les centaines et les centaines de marches construites par les habitants alentours, au péril de leur vie, dans ces montagnes abruptes et ce, avec l’argent de nombreux donateurs. Mes pensées se portent sur ces longs et dangereux travaux qu’ont réalisé ces Népalais, avec solidarité et par foi en leur religion.

Je suis sincèrement touché de prendre conscience de ce qui peut les animer à ce moment. Shubeen m’apprend que même l’herbe des bordures est coupée à la serpe par les vieilles femmes du village. Ces femmes qui prennent tant de risques et font couler leur sueur, bénévolement, sans rien qu’on leur demande, simplement par amour de leur culture et par plaisir de nous offrir une vue et un passage agréable. Bien que je sois, je l’avoue, quelque peu émotif, je suis troublé de l’intérieur par une énergie que je ne comprend pas. Comme un homme "moderne", je cache mes émotions et continue la descente un peu troublé. Nous arrivons alors sur le lieu où se dresse une brèche dans la roche d’à peine 40cm de large sur 2m de haut. À l’intérieur, nous sommes anxieusement pris entre deux parois rocheuses impressionnantes et nous apercevons une dizaine de mètres plus haut, un passage lumineux d’apparence impraticable. Immédiatement, nous sommes traversés par une énergie indéfinissable qui nous laisse sans voix. Je ne comprends pas ce qui se passe en moi, des larmes coulent sur mon visage sans contrôle et pourtant sans peine. Mes amis sont eux aussi bousculés par leur ressenti.

Notre guide qui s’avère bien instruit sur la culture de son pays, nous explique que si nous grimpons le long de ces parois étroites et effarantes, il y a ensuite un passage assez technique qui donne sur l’endroit où méditait le Bouddha. D’après la tradition, ce rituel purifierait les hommes et femmes qui le pratique. Nous réfléchissons longuement, nous nous essayons sur les premiers repères de cette escalade mais, un peu perturbés, nous abandonnons. Nous sortons émus de cette cavité. Une légère déception sommeille en nous alors que Shubeen se lance dans cette ascension spirituelle. Ni une ni deux, nous y retournons. Je grimpe cette roche, les jambes tremblantes sans que je comprenne vraiment pourquoi. Je passe sous l’énorme pierre en rampant dans une poussière aux odeurs écoeurantes. Ma claustrophobie est mise à l’épreuve. Je passe enfin. Et là, j’arrive sur une petite plateforme naturelle que nous partageons à plusieurs et qui domine une vue ... splendide. Celle-ci est encore plus appréciée quand elle est le résultat d’un effort émotionnel étrange. Nous sommes bouche bée, en pleine conscience de nos sensations. En pleine réflexion sur ce que pouvait être ce décor il y a 2000 ans et ce qu’il a pu enseigner au Bouddha dans ses méditations.

Avant de partir, nos amis Népalais nous témoignent avec sérieux, une grande reconnaissance et un grand respect pour notre intéressement à leur culture. Cette réaction en rajoute une couche. Chez nous certains sites sacrés sont des pompes à fric et ici on te remercie d’être venu. Comment avons nous pu perdre ces valeurs que ces hommes portent naturellement ? Comment avons nous pu nous écarter de ces rituels et cette spiritualité qui a fait vibrer l’humanité pendant des millénaires, qui donne du sens et qui est aujourd’hui scientifiquement prouvé comme un équilibre psychique ? Avant je ne croyais que ce que je voyais, maintenant je crois ce que je vis.

Ce village, la route pour y venir et ses habitants m’auront comblé et profondément touché. Je n’ai pas l’impression que mes rencontres m’amènent vers l’élite Népalaise. Non ! Bien au contraire. Et pourtant, ils semblent tous naturellement bons, accueillants, curieux, ravis de nous faire partager ce qui les anime. Est-ce seulement ce peuple qui détient naturellement ces valeurs ou sont-elles les valeurs intrinsèques de l’homme que notre fascination pour l’avarice, l’orgueil, l’envie, la gourmandise, la colère, la luxure et la paresse ont enfoui en nous ? Pouvons nous retrouver cette simplicité qui rend heureux, qui apporte la joie ?

Après un délicieux repas qui nous a remis de nos émotions, nous rechaussons nos godasses pour continuer cette aventure étonnante.

Nous nous dirigeons alors vers notre dernière étape où nous passerons deux nuits, histoire de s’immerger encore plus dans la vie locale.

En chemin nous contemplons encore de merveilleux paysages, des mini-arbustes protégés car ce sont des “arbres de Bouddha”, nous nous arrêtons à un site religieux “Arya Avalokiteswor Dhyan Gumba” où des moines en pleine cérémonie quotidienne nous invitent à nous assoir à leur côté.

Nous avançons dans les petits chemins, traversons les cours des maisons, nous échangeons quelques bonjours avec les habitants et partageons quelques paroles de chanson grâce à notre nouvel hymne de randonnée “Resham firiri” :-)

Nous arrivons donc à la maison de Tiamba, le père du patron de l’agence de trekking, et de sa femme que nous nommerons Aruna pour des raisons évidentes de confidentialité (ok je suis pas crédible, j’ai zappé son prénom). La maison est rudimentaire, comme toutes les autres et pourtant il y a un certain standing en plus. Il y a un étage, une terrasse, des chèvres, un buffalo et son petit, des poules, des cultures tout autour... Le tout est implanté au milieu d’un “village” dont les maisons et terrains sont bien espacés. La vue donne sur les montagnes, la verdure et on aperçoit la rivière en contrebas. AAAAHHHHH, on est pas mal ici :-)

Nous avons donc passé deux jours à vivre à leur manière, à cuisiner avec eux, à aller au petit shop du village, à nous faire offrir le thé chez le voisin, à aller balader les buffalos, à essayer d’expliquer ce qu’était la permaculture, à essayer de les comprendre, de ressentir comment ils se sentent, ce qu’ils pensent de leur vie, à leur offrir un repas “français” (avec les ingrédients locaux) et à leur faire partager notre façon de passer une soirée. J’ai donc compris qu’on ne pouvait pas bousculer 40 ans d’habitudes pour expliquer une méthode novatrice de culture sans passer par la démonstration et l’expérience. J’ai compris que ces gens, proches de la nature montrent leur visage heureux mais ils ont aussi des peines évidentes et on ne peut qu’être empathique face à leurs tourments. On aimerait leur expliquer que chez nous, des cadres supérieurs reviennent à une vie moins sophistiquée, plus proche de la nature, avec des revenus largement divisés, pour trouver ce que eux, dans leur campagnes perchées, reçoivent au quotidien. Mais à ce moment, le silence nous semble plus sage. J’ai remarqué que malgré le contexte naturel qui les entoure, le respect qu’ils portent aux plantes et aux animaux n’est pas toujours admirable. Et une fois de plus, nous sommes touchés par leur générosité. Sans que nous ayons le choix, nous n’avons compris que le lendemain que nous dormions sur leurs matelas et que eux, dormaient par terre, sur un tapis, dans le salon, pour nous laisser le confort et l’intimité à l’étage. Le plus marquant est leur réaction quand nous refusons ce confort, ils se sentent presque offusqués et insistent encore. C’est dingue.

La seconde soirée, nous avons eu le privilège d’assister à un rituel chamanique Népalais. Il y aurait donc dans chaque village un chamane qui, par invocation de son maître spirituel, a le don de guérir les villageois. Cette cérémonie n’avait absolument rien à voir avec ce que j’ai pu voir au Pérou. Le chaman a chanté et frappé sur son tambour pendant 4h. Son corps convulsait tout en restant dans la maîtrise. Nous l’avons vu danser dans la pièce, marcher dans les braises sans aucune séquelle. Bien que peu utile spirituellement, cette soirée était impressionnante. Nous avons eu la chance d’être témoins d’une démonstration ancestrale, ce qui pour moi est d’une valeur inestimable. Merci.

Nous sommes désormais à la fin de ce trek. Nous en avons pris plein les yeux, nous avons été touchés par les rencontres, nous avons ri, nous nous sommes épuisés de bonne fatigue, nous nous sommes liés d’amitié avec notre cher Shubeen et nous avons renforcé notre trio :-) C’était magique... Et en même temps, je remarque une légère note d’amertume qui vit au fond de moi. Elle n’a pour le moment pas une grande place mais je la sens présente. Comme s’il me fallait lui donner de l’attention pour la comprendre. Alors je l’observe. Et je constate qu’elle est le résultat de ces sentiments de pauvreté, de dur labeur, de jalousie de l’occident et de misère qui se manifestent. En effet, tout cela n’est pas mis en évidence dans nos rencontres et pourtant, cette partie est bien la réalité. Ne pas donner d’importance à ce ressenti permet de garder un souvenir de bonnes vacances mais maintenant que je suis pleinement conscient de ça, je m'interroge et me sens presque mal à l’aise de ne pas “être né sous la même étoile”. Nous nous plaignons des inégalités en France et qu’en est-il des inégalités dans le monde. J’ai entendu ces termes des centaines de fois sans vraiment en comprendre le sens. Cela me confirme que l’on ne comprend vraiment que ce que l’on vit. L’expérience est incontestablement plus forte que les mots. Mon sentiment de "privilégié" me revient et je me fais la promesse de garder cette prise de conscience dans mes choix lors de mon retour en France. Et, aussi étrange que cela m’est paru, cette petite révolte intérieure s’est doucement transformée en paix pour laisser place à quelque chose qui représentait du sens dans ma vie. Mes valeurs étaient en train de changer et mes convictions de se renforcer. Au moment où je le vivais, je dirais que ce n’était que l’observation d’une sensation et aujourd’hui je peux dire que ça fait sens dans ma vie :-)

“Agis en ton lieu et pense avec le monde” Édouard Glissant

Pour le retour en bus, nous avons mis 7h pour faire 80km. Non, il n’y a pas d’erreur. Ce trajet à été le plus horrible que j’ai vécu. Nous étions sur les nerfs, les uns sur les autres, secoués par ces chemins cabossés, dans un bus rincé, il faisait chaud et nous étions obligés de fermer les fenêtres pour éviter de laisser rentrer la poussière et le plus surprenant était le calme des Népalais.

J’ai alors demandé à Shubeen comment il faisait pour garder son calme ? Ce à quoi il m’a répondu qu’il lui suffisait de penser qu’il y a de ça un an, il mettait un jour et demi de marche alors 7h de bus… c’est le luxe. Ah oui, tout est une question de point de vue.

De retour à Kathmandu, nous préparons nos affaires pour repartir le lendemain vers Pokhara, la seconde grande ville du Népal. Celle-ci est au pied de l’Anapurna, elle est le point de départ de nombreux treks, elle est aussi reconnue pour son lac magnifique et son côté “moderne”. Nous nous réjouissons à l’idée de découvrir encore ce pays fascinant. Alors en avant ;-)

Merci Timal, merci Shubeen, merci à tous ceux rencontrés sur le chemin et merci à mes deux compères ;-)

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Nous sommes le 30 novembre 2020, en cette période de crise covid 19, MyAtlas (hébergeur de ce carnet de voyage) m'annonce leur liquidation et m'invite à fermer mon voyage pour ne pas le perdre. J'aurais aimé conclure ce carnet avec plus d'attention et en même temps... ce sera fait ! (le p'tit coup de pompe est souvent bénéfique pour un 80 pourcentiste comme moi ). Alors voilà plus de 3 ans que je suis rentré du Népal, et je peux dire que ce voyage a changé ma vie.

Je réalise avec le recul à quel point tout était aligné, avant même que je décide de partir. Je repense à l'introduction du livre "Réveillez le chaman qui est en vous" d'Arnaud Riou, qui débute avec ces quelques lignes en parfait accord avec ce que je ressens aujourd'hui en pensant à mon voyage : "Notre existence se construit comme un puzzle. Nous ne sommes pas toujours conscients, au moment où nous en assemblons les pièces, de la grande cohérence de l'ensemble. C'est en prenant du recul que nous réalisons que tous les évènements qui nous arrivent ont du sens et sont à leur place. Où que vous soyez aujourd'hui, soyez certains que vous êtes au bon endroit, au bon moment...". Évidemment ! C'est valable pour des grandes phases de vie (être commercial pendant 7 ans) comme pour des tout petits détails. Comme mon sac que la compagnie aérienne avait laissé à Madrid me laissant démuni à mon arrivée au Pérou. Mon sac que j'avais passé des mois à confectionner avec les trucs de voyage les plus sophistiqués, perdu à Madrid, BIM !!! Je me souviens encore de cette colère à l'aéroport qui cachait ma peur . Aujourd'hui encore, je me remémore ce moment quand des questionnements matériels se présentent. Je mesure à quel point ce passage m'a été utile pour commencer à percevoir les ressources que j'avais à l'intérieur plutôt que de m'appuyer toujours sur des ressources extérieures.

Alors je ne vais pas revenir sur tous les détails de mon voyage mais je vous assure au passage que de nombreux moments m'ont vraiment marqué. Lors de ce voyage j'ai appris à regarder en moi, pour trouver ce que j'avais de plus précieux à offrir. Je croyais que je partais voyager à l'autre bout du monde sans savoir que je m'aventurais dans un voyage intérieur, à déterrer mon Être. J'ai compris que je n'étais pas Moi, séparé du reste. J'ai mis du temps à vraiment comprendre que je suis la Vie, appartenant au grand tout, comme mon voisin, l'étranger, cette plante, la rivière, et même ce moustique qui m'énerve . Pendant mes explorations, j'ai eu la chance (ou l'intuition) d'aller à la rencontre du divin et d'ancrer mes valeurs avec conscience.

D'un côté, les rencontres avec les chamans, les enseignements religieux et Bouddhistes, les synchronicités, les connexions à la nature... m'ont ouvert à une spiritualité saine.

Et de l'autre, les horreurs observées, les constats alarmants, les témoignages douloureux, mélangés avec le courage, la générosité et l'espoir dont j'ai été témoin, auront profondément ancré mes valeurs et donné l'envie d'agir.

J'ai pris conscience que dès ma naissance j'étais arrivé au 3ème étage de la pyramide de Maslow. Comme beaucoup de mes proches, mes besoins physiologiques, de sécurité et d'appartenance étaient satisfaits dès ma naissance. Ce que je n'avais pas réalisé, c'est que de nombreux êtres humains passent leur vie à essayer de nourrir ces 3 niveaux de besoins pendant que d'autres se plaignent de ne pas s'accomplir. Et soit disant, ce serait de la faute de l'autre, du gouvernement, des décisions, des lois, du voisin, du professeur qui m'avait mal parlé...

C'est à la fin de mon voyage au Népal que j'ai pris une tarte ! J'avais fait le tour de ce que j'avais besoin de vivre pour passer à la suite. L'introspection, la réflexion, mes observations et mes échanges avaient fait leur chemin, je sentais qu'il était temps d'agir, de passer à l'action. Je le ressentais dans mon corps comme une force qui se déployait en moi. L'introspection ne me nourrissait plus, parfois même ça me saoulait. J'avais besoin d'agir plus que de parler, de faire plus que de penser, j'avais besoin d'aligner mes actes avec ma nouvelle vision du monde.

Quand j'étais dans l'avion au retour du Népal, j'étais d'une sérénité incroyable, j'avais confiance que j'allais vivre quelque chose de joyeux dans ma vie et j'étais loin de savoir quelle forme ça prendrait. Une pensée dominait mon esprit, un peu comme une conclusion à mon voyage : "je suis privilégié sur cette planète !". Et c'est vrai ! Ou du moins c'est ma vérité. En France je côtoyais des personnes qui vivent dans le confort et qui se plaignent du moindre dérangement. Là-bas, j'ai rencontré des personnes qui vivent dans la misère et qui se réjouissent du moindre dérangement. Pourquoi sommes-nous tombés dans la culture du malheur alors que nous avons mille fois plus de choses qui vont bien que de choses qui ne vont pas. Pourquoi ne réussissons-nous pas à nous réjouir de ce que nous avons ? Ces peuples rencontrés en auraient tellement à nous apprendre sur les valeurs profondes de l'être humain. Et moi, j'ai été spectateur de cette richesse. J'en ai même été l'acteur. J'ai été touché par leur sagesse. N'ai-je pas un rôle à jouer ? Ne suis-je pas "privilégié" ?

Et dans l'autre sens, j'ai découvert, rencontré et contribué à des projets écologiques magnifiques en France. Il y a des pionniers, des ingénieurs et des citoyens motivés qui s'unissent pour conjuguer confort et préservation de la planète, respect de la Terre et abondance, affirmation et bienveillance, révolution et amour. Et quand je suis arrivé à l'autre bout du globe, la permaculture n'était pas connue, le "bio" pas vraiment non plus, tout comme les constats des dégâts des pesticides. La Communication Non Violente, à quoi ça sert ? Pourquoi c'est important de mettre sa bouteille en plastique à la poubelle vu que tout le monde la met par terre ? Dans les villages côtiers de l'Amazone, il n'y a pas d'éboueur qui passe alors évidemment, les déchets partent dans le fleuve. Les panneaux solaires, c'est pour les riches, alors on préfère dépenser nos sous dans le pétrole pour le groupe électrogène, comme on le fait depuis.... J'ai bien essayé de transmettre des idées, et pendant de longues heures mais ce n'était pas suffisant pour les séduire. Alors je me suis dis : "Pourquoi notre savoir occidental ne traverse-t--il pas les frontières ?". J'étais triste d'avoir des connaissances et de ne pas savoir les transmettre. N'ai-je pas un rôle à jouer ? Ne suis-je pas "privilégié" ?

Il était temps pour moi de passer à l'action. Une phrase qui m'avait accroché et qui vient des Amérindiens m'est alors revenue : "marche tes paroles".

À mon retour en France j'étais assuré que je voulais contribuer à rendre le monde meilleur. Je ne savais pas comment mais je le sentais : cette force et cette confiance accumulées dans mon voyage me poussait à croire en moi, en mes rêves, à me réaliser. Je n'avais pas encore le comment mais j'avais le pourquoi, et ça me suffisait .

J'ai suivi des stages de développement personnel, des formations de Communication Non Violente, j'ai passé des semaines entières dans ma chambre en pyjama à écouter des maîtres de sagesse en vidéo, à apprendre des méthodes de connaissance de soi, j'ai rempli des documents pour me créer des supports de formation, j'ai gribouillé des tas de paperboards... Je voulais proposer des stages de développement personnel !

Alors vous n'imaginez pas les réactions des gens quand vous leur dites que vous étiez commercial et que maintenant vous voulez organiser des stages de développement personnel... "mais bien sûr !"

J'en ai essuyé des peurs (des autres, pas les miennes), des "tu ne devrais pas", des "ça ne marchera pas, qui va te faire confiance ?!"... Et, étonnamment, ça ne m'impactait pas, je n'avais jamais ressenti autant de confiance en moi.

Bon j'avais aussi l'immense privilège d'avoir le chômage  !! Ça aide. Et j'avais également le soutien de certains proches qui me disaient "on voit pas trop où tu vas mais fonce Max, on croit en toi  !" Et ça faisait du bien à certains moments Haaaaaaaa.

Depuis, trois années sont passées. Trois années à écouter mes émotions, mes besoins, à clarifier mes intentions, à me raccrocher chaque jour à ma raison d'être, à croire en moi, en mes rêves, à oser, à tenter, à me relever, à me remettre en question puis à recommencer. Aujourd'hui je suis fier de transmettre la Communication Bienveillante à travers des stages de développement personnel et des formations professionnelles. Je suis émerveillé d'être témoin d'éclosions magnifiques en accompagnement individuel. J'ai aussi la joie profonde de partager mon quotidien avec une femme que j'aime. Elle est arrivée dans ma vie comme un papillon se pose sur une fleur, car c'est lorsque la fleur s'ouvre que le papillon apparaît. Je me sens aligné dans ma vie et je sens que je grandis chaque jour, de l'intérieur.

J'ai une profonde gratitude pour ce voyage initiatique qui aura marqué "Le second chapitre de ma vie". Je me rappelle encore avoir passé trois quart d'heure à réfléchir à ce titre en me disant "va trouver l'titre d'un bouquin quand t'as même pas l'histoire"  . Trois ans plus tard, je reconnais que ce titre sonne assez juste avec l'histoire.

J'ai également une profonde gratitude pour "la grande cohérence du puzzle de ma vie". Depuis ma plus tendre enfance, chacun de mes choix m'a guidé jusqu'ici. Il n'y a rien à juger. Je peux juste dire que ça "est". Aujourd'hui j'ai acquis une vraie conviction que "le plus important n'est pas le but, c'est le chemin". Alors j'accueille ce qui "est" avec la curiosité de ce que sera demain.