A 1h30, le réveil sonne, c'est l'heure de se préparer pour le départ. Notre chauffeur nous attend déjà dans la rue, je l'appelle chauffeur parce qu'il va rouler à 100 km/h de nuit sur les petites routes du volcan en plein brouillard, d'autant plus que les chutes de pierres sont fréquentes dans ce coin. L'avantage, c'est qu'on va arriver rapidement. Il nous a déposés à Montaña Blanca, il a enregistré son numéro dans mon téléphone et m'a dit qu'il allait dormir dans sa voiture pour nous raccompagner au retour. Une fois prêts à se lancer sur le trek, des rangers arrivent en nous disant que cet accès est condamné justement à cause de chutes de pierres. On se dit que c'est fichu, mais ils vont rapidement nous proposer un autre itinéraire, qui commence plus bas, qui est plus long, mais moins raide. N'oublions pas qu'on a comme objectif le lever du soleil au sommet. Pas le choix, on décide d'y aller, mais le quiproquo qui suit va nous mettre dans une sacrée galère plus tard, car deux Françaises étaient dans la même situation que nous. On discute avec elles, et elles allaient prendre leur voiture pour aller à l'autre sentier de départ et nous proposent de nous y conduire. Pour éviter du trajet à notre chauffeur, je lui dis qu'on a rencontré des Françaises qui font la même randonnée que nous et qu'elles nous accompagnent au nouveau point de départ. C'était pour moi très clair, mais apparemment pas pour lui, vous comprendrez pourquoi après notre ascension...
C'est donc à Roques de Garcia (2025 m) que notre ascension va commencer. Les paysages sont complètement lunaires, c'est totalement désertique avec des rochers de plusieurs dizaines de mètres déposés ici et là. J'ai même lu que de nombreux robots envoyés sur Mars étaient testés dans le parc national du Teide en raison de leurs climats similaires. Mais le plus impressionnant était la quantité d'étoiles visibles dans la nuit violette.
Il faut avouer que de nuit, on ne profite pas autant des paysages que de jour, mais on est plus concentrés sur notre marche. Il y avait un groupe loin devant nous qui nous distançait de plus en plus. On les voyait évoluer rapidement sur le volcan, ce qui nous motivait à maintenir une bonne cadence. On a commencé par le sentier numéro 3 qui est très progressif mais semblait interminable On avait pensé à prendre une lampe frontale mais elle éclairait très faiblement donc on se servait de nos téléphones pour s'éclairer, mais sans gants nos doigts étaient frigorifiés. On à ensuite emprunté le sentier 23 qui fut pour moi la partie la plus difficile, car on traversait les cols des montagnes, donc on montait puis redescendait, et on avait l'impression de ne pas gagner d'altitude. à la fin de ce sentier nous n'avons pas directement trouvé le sentier suivent, on avait un gros doute et le tracé au sol était moins clair que précédemment. On a fini par trouver le sentier 9, le plus raide, sur lequel on a commencé à apercevoir les premières lueurs du jour.
Sur la première photo on voit l'ombre du Teide sur la mer de nuages, sur la dernière on aperçoit Gran Canaria, un autre ile des ...On a donc commencé à se presser pour avoir la meilleure vue possible sur le lever du soleil. C'est là qu'on a rattrapé le groupe qui avait pris de l'avance au début mais qui bloquait sur le pic du Teide, qui était particulièrement escarpé. À ce moment-là, il y avait de fortes rafales de vent et il faisait très froid, à peu près 3 degrés, contre 25 au pied du volcan. J'avoue que je n'étais pas du tout assez équipé pour ce froid, avec uniquement une polaire North Face, un jogging synthétique qui laissait passer le vent, et pas de gants ni de bonnet... Cyprien, lui, était un peu mieux équipé avec des gants et une fine doudoune, mais il n'était pas très réchauffé non plus. Il y avait tellement de vent qu'on n'a pas réussi à faire décoller le drone... mes doigts me brûlaient et j'avais les lèvres figées, impossible d'articuler. Il y avait des blocs de neige coincés entre les roches volcaniques à certains endroits. Heureusement, les premiers rayons du soleil ont commencé à nous réchauffer doucement, mais il y avait toujours le vent qui déviait l'endroit où l'on posait notre pied à chaque pas.
Il est 7h30, le soleil est en train de se lever, et on est toujours en train de grimper. On a quand même pu profiter de ce spectacle unique en s'arrêtant quelques minutes entre deux rochers.
C'est à 8h qu'on arrive enfin au mirador de Pico Viejo à 3500 mètres. C'est là que se trouve le téléphérique qu'on doit prendre pour la descente. L'idée était de prendre la première navette de la journée qui est gratuite pour les randonneurs qui ont gravi le Teide de nuit, car les suivantes sont payantes (et plutôt chères). Mais le sommet du volcan est à 3715 mètres, il nous reste donc 215 mètres de dénivelé positif puis négatif en moins d'une heure. Étant donné le froid et le vent (qui sont encore pires au sommet), on prend la décision raisonnable mais regrettable de s'arrêter là dans notre ascension et de profiter de la vue qui s'offre à nous en attendant le téléphérique.
Sur la photo du milieu on voit la lave qui à coulé du volcan, à 3500 il y avait de ammas de neige au milieu des roches volcaniquesFinalement, nous nous sommes un peu fait avoir car la navette est arrivée à 9h30 et nous a coûté 44€. Cependant, c'est en arrivant en bas du volcan que tout s'est étonnamment compliqué. J'ai envoyé un message à notre pilote en avance pour le prévenir que nous arrivions bientôt en bas du téléphérique, mais je n'ai reçu aucune réponse de sa part. J'ai fini par l'appeler une première fois, mais il n'a pas répondu. La deuxième fois non plus. Nous supposons alors qu'il ne s'est pas réveillé et qu'il est dans sa voiture au parking quelques kilomètres plus loin.
Épuisé, je me suis endormi sur un muret en pierre pendant que Cyprien persistait à faire décoller son drone et s'est fait gronder par un agent du parc qui lui a dit qu'il n'avait pas le droit. Réveillé par l'agitation (et l'inconfort du muret), j'ai décidé de rappeler notre ami qui devait venir nous récupérer, car plus d'une heure s'était écoulée depuis notre descente. Il a enfin décroché, mais à l'autre bout du fil, c'était une femme française d'un certain âge à qui j'ai commencé à parler en anglais. C'est là que j'ai compris qu'il avait enregistré son numéro sur mon téléphone avec l'indicatif français. On aurait pu encore attendre longtemps, mais au moins on a trouvé le problème. Je l'ai donc rappelé sur son numéro espagnol, et c'est là qu'il m'a expliqué qu'il était rentré chez lui à plus d'une heure de route car il croyait que les Françaises que nous avons rencontrées au début de l'ascension étaient en fait des amies que nous avions retrouvées, et il avait compris que nous n'avions donc plus besoin qu'il nous raccompagne le matin.
Nous nous sommes retrouvés bloqués au milieu du parc, épuisés et affamés à 11h du matin. Nous avons commencé à faire du stop, mais les personnes qui s'arrêtaient nous disaient qu'elles allaient juste jusqu'au prochain parking à 300 mètres. Nous avions encore 30 kilomètres à faire pour aller au logement, y récupérer toutes nos affaires, le libérer pour midi, puis être à nouveau à la rue car aucun logement pour le dernier soir.
À 13h, après encore un bon bout de marche, nous trouvons quelqu'un qui passe par la ville où nous nous rendons et qui nous y dépose rapidement. Nous avons eu beaucoup de chance qu'il nous y emmène, car une fois arrivés au logement, les propriétaires ont sorti nos affaires pour pouvoir accueillir les prochains locataires. Dépassés par notre état de fatigue, nous choisissons la solution de facilité et réservons notre prochaine nuit à Costa Adeje, où nous avons été le premier jour, car le contact est bien passé avec notre hôte.
Je n'aurais jamais pensé voir autant de paysage différents en une semaine, et encore moins réussir à faire le tour de l'île en passant par le Teide mais nous avons atteint nos objectifs ! Cyprien je t'attend en Australie pour y vivre d'autres aventure !