Nous pensions que nous n'avions pas eu de chance à l'aller, et que nous avions cumulé à ce moment là tous les ennuis possibles, le retour pouvant alors bien se passer.
C'est tout de même avec une certaine angoisse que nous parcourons l'aéroport de Chendgu jeudi soir, notre départ étant prévu à 20h35 pour Pékin, où nous sommes censés arriver à 23h15 pour une correspondance vers Manchester à 01h45. Première surprise : Hainan Airlines, qui gère les deux vols, ne prend pourtant pas en charge le transfert des bagages. Il nous faudra donc les récupérer et nous réenregistrer à Pékin.
Dans la salle d'embarquement, l'attente est longue. Tellement longue qu'à 20h35, l'écran affiche toujours un départ à 20h35, et nous n'avons pas commencé à embarquer. Les chinois, bien disciplinés, font tous la queue pour monter dans l'avion, mais mis à part quelques personnes demandant des nouvelles, personne ne bronche. Nous finissons par monter dans l'avion vers 21h, mais nous attendrons quasiment une heure pour décoller, très longue et éprouvante pour nos nerfs.
Nous aurons à peu près 45 minutes pour gérer la correspondance, ce qui semble impossible. Alors, nous demandons aux hôtesses si elles pourront nous placer devant à la fin du vol pour descendre plus vite. On nous dit oui, puis finalement qu'il n'y a pas de places, mais que le staff sera là pour nous aider. Bien évidemment il n'en sera rien.
A Pékin, c'est parti pour un sprint d'anthologie... Benjamin attend les bagages, Aline court entre les deux terminaux (voyons si l'altitude à fait d'elle une Emelie Forseberg) pour aller tout de suite à l'embarquement au moins pour commencer le check-in. Nous sommes finalement rassurés, le vol pour Manchester ne partira qu'à 4 heures. Mais la compagnie Hainan Airlines veut nous garder... Motif pris que nous allons louper la correspondance pour Lyon, et qu'il faudrait attendre un vol pour Bruxelles, un jour après, qui nous permettra d'aller ensuite à Lyon. Hors de question. Tout ce que la compagnie Hainan Airlines a fait dans ce voyage a foiré, nous n'arrivons pas à nous comprendre, et nous sommes pressés d'atterrir sur le sol européen pour nous débarrasser de ces foutus chinois. Bref, il nous tarde d'avoir en face de nous des gens qui parlent anglais, qui ne crachent pas à tous les coins de rue, avec lesquels on pourra se débrouiller.
Nous finissons par avoir nos billets pour Manchester, il faut dire que nous avons été bien aidés par une franco-chinoise, passagère également, qui parle mandarin, mais nous avoue elle même avoir du mal à les comprendre. Mais c'était oublier une étape, celle du passage de la frontière chinoise, où l'on nous avait dit, à l'entrée, que la sortie du territoire ne poserait pas problème... Et bien non, les chinois choisissent ce moment, alors que le vol est en partance dans 1h30, pour procéder aux mêmes vérifications pour le passeport d'Aline.
Nous pouvons vous le dire maintenant que nous sommes rentrés : le passeport d'Aline a été déclaré volé en 2012 (nous ignorions comment), et n'est donc plus valide. Ce fait est signalé à toutes les douanes du monde, en principe, par Interpol. Mais cela ne nous avait pas empêché de voyager au Maroc en 2016, personne n'a rien vu... Les chinois ne l'ont pas détecté non plus à la délivrance du visa. Mais là, à chaque passage de frontière depuis Bruxelles, cela pose problème.
On comprend rapidement que la douane chinoise n'a gardé aucune trace du passage de Aline lors de l'entrée sur le territoire. Cette fois, nous voyons néanmoins ce qu'ils font... Visiblement un peu perdu, le douanier regarde une procédure éditée par Interpol, puis scanne le passeport, ce qui lui prend... 10 minutes. Par la suite, Benjamin hallucine quand il voit le douanier ouvrir le logiciel Paint, pour faire des traits sur l'image du passeport. Sans doute une technique de vérification de la validité, mais cela fait tout de même un peu amateur.
Benjamin comprend rapidement qu'il n'y a pas plus de solution qu'à l'aller, à part les presser pour qu'on puisse avoir notre vol... Il leur montre l'heure d'embarquement, dans 15 minutes. Pendant ce temps, Aline commence clairement à nous voir rester ici, et pique une crise d'angoisse. Les chinois finissent par nous libérer pile à l'air de l'embarquement en nous disant de ne pas revenir ici avec ce passeport. Merci... Nous piquons un nouveau sprint pour monter dans l'avion, et c'est bon, nous décollons pour Manchester dans un avion plutôt confortable par rapports aux précédents de la compagnie.
L'atterrissage sur le sol européen fait figure de soulagement. Nous sommes dans un pays libre. Nous avons à nouveau accès à l'internet sans restrictions, et aux réseaux sociaux. A la sortie de l'avion, nous sommes accueilli par un agent anglais de la compagnie Hainan, très attentionné, qui nous informe quant aux correspondances. La prochaine pour Lyon est le lendemain à 18h...
Le passage de la douane est à la fois plus radical et plus agréable. Le douanier anglais nous explique clairement ce qui se passe quant à la déclaration de vol du passeport (ça change...). Il se renseigne sur notre voyage. Il part dans son bureau et met 10 minutes à revenir pour nous expliquer que ses instructions sont de conserver le passeport pour le remettre aux autorités françaises, de nous donner une photocopie tamponnée par la douane, et de voir avec la compagnie si elle accepte de nous prendre avec ce document. Sinon, il faudra demander un document provisoire de voyage aux autorités française, ce qui peut prendre un certain temps...
La solution est bien plus ferme, on pourrait presque dire stricte, mais en même temps rassurante quant aux compétences des douanes dans un contexte marqué par la menace terroriste. Bref, nous avons continué de nous inquiéter pendant l'heure qui a suivi, avant que la compagnie nous dire qu'on pouvait embarquer avec ce document dans la mesure où nous rentrions chez nous.
Cela n'était néanmoins pas fini... La compagnie Hainan devait en effet gérer notre retour sur Lyon. Les passagers français qui étaient avec nous parviennent à prendre les deux dernières places pour Paris le matin (une maman et son enfant). On nous donne le choix entre Toulouse aujourd'hui, et Lyon demain à 18h... Nous optons pour Toulouse et achetons notre billet de train. La fin de l'embarquement est dans 1h30. Le très sympathique agent anglais de Hainan appelle pour faire le check-in et nous dit que ce sera ok. Il attend avec nous mais on ne voit rien venir... Il tente de rappeler à de multiples reprises mais la compagnie (ou l'agent certainement situé à Pékin chargé de s'en occuper), ne fait rien... ça tombe à l'eau. Encore un coup de la Hainan, l'agent anglais semblant par ailleurs vraiment désolé.
On finit par se dire que c'est un coup des chinois pour nous punir d'être allés au Tibet. En attendant, on nous paie cette fois une nuit à l'hôtel Clayton, à côté de l'aéroport, ainsi que les repas. Nous ne sommes pas allés visiter Manchester, l'essentiel du temps ayant été consacré à du repos dans cet hôtel très confortable, et au personnel très accueillant.
A 15h, le lendemain, nous nous présentons au check-in avec de l'avance... On ne sait jamais. Rapidement, on comprend qu'il y a un nouveau problème. Au bout d'une heure, on nous explique que la Hainan Airlines n'a effectué qu'une pré-réservation, qu'elle n'a pas payé, pour Benjamin... Et pour Aline, eh bien rien n'a été réservé... Ils ne sont pas ailleurs pas joignables. Coup de grâce final. Par chance, grâce à l'habileté de l'hôtesse de Flybe, nous parvenons à avoir deux places (c'est un coup de chance car il ne restait qu'une seule place en plus de celle vaguement réservé pour Benjamin...), que nous devons néanmoins payer nous-mêmes. Si on avait su, on aurait pu prendre un vol chez Air France ou tout autre vol hier (le vol initial étant chez Flybe, Hainan ne pouvait réserver de vol que chez eux).
Nous embarquons dans un avion assez rudimentaire, après le passage du contrôle des bagages, très méticuleux, et rassurant, chez les anglais. Nous atterrissons à 22 heures à Lyon, enfin, après un joli coucher de soleil admiré depuis l'avion.
Le passage de la douane française confirme finalement ce que nous pensions. Aline n'avait qu'une photocopie, et a exposé toutes ses péripéties une fois à l'agent. Il n'a pas compris. Elle a répété l'histoire, mais au milieu, il lui a dit "Aller, c'est bon, passez". Bref, ça nous a bien arrangé, mais on trouve quand même ça très limite du point de vue du contrôle de nos frontières nationales...
J'imagine qu'à la lecture de ces lignes, vous devez vous dire : "les pauvres", "c'était leur voyage de noces" ou "ils n'avaient pas mérité toutes ces emmerdes" (ou si). Ou alors "ça va les refroidir de partir si loin". A vrai dire, même si ce furent des moments angoissants, ces péripéties ont pimenté notre voyage de noces et les avoir affrontées - et résolues - renforce notre tempérament aventurier. On a déjà bien envie de repartir, notamment Benjamin, qui pense déjà aux cimes du Népal, du Pérou ou du Canada.
Alors oui, ce sera avec des passeports valides ! Et nous ferons aussi plus attention aux vols que nous réservons. Mais pour une aventure avec quelques péripéties, histoire de repartir avec plein de souvenirs !