Carnet de voyage

Noces tibétaines

23 étapes
36 commentaires
Nous en avions rêvé en choisissant une photo de Lhassa pour décorer l'urne des dons à notre mariage, nos amis et familles nous l'ont offert par leur générosité. Kiki So La Gyalo !
Du 1 au 25 août 2017
25 jours
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Avant de prendre notre envol, voici un aperçu de l'itinéraire prévu :

-Départ mardi 1er août de Lyon pour Chengdu (par Bruxelles et Beijing), c'est parti pour 14h15 dans l'avion. Arrivée mercredi 2.

-Jeudi 3 et Vendredi 4 : nous profiterons de la capitale du Sichuan, de sa gastronomie épicée et nous découvrirons nos premiers temples (bouddhistes et taoïstes). Nous avons prévu quelques balades dans les parcs de la ville, une dégustation dans une maison de thé et peut-être une soirée à l'opéra du Sichuan.

-Vendredi 4 : départ juste après manger pour 41h de train direction Lhassa... Le train le plus haut du monde avec le passage de Tanggula Pass à 5072m d'altitude, une façon originale d'entrer dans l'immense plateau tibétain en prenant le temps d'admirer les paysages

-Dimanche 6 : arrivée Lhassa le matin, journée tranquille pour s'habituer à l'altitude (3650m) et commencer à découvrir l'ambiance de la ville et notre hôtel "House of Shambala" (avec spa...)

-Lundi 7 : Visite tranquille du Jokhang, temple le plus sacré du Tibet, du Barkhor, quartier autour du temple puis du célèbre Potala. Grosse journée de découverte en perspective ...

-Mardi 8 : on continue la visite de la cité secrète de Lhassa par le monastère de Drepung, littéralement "tas de riz", puis du monastère de Sera où nous devrions pouvoir assister à des joutes oratoires entre moines

-Mercredi 9 : départ vers Gyantsé (4000m) en passant par le Kampa La (col à 4800m) et le lac Yamdrok avec ses eaux turquoises. A l'arrivée visite du Stoupa de Kumbum (sanctuaire)

-Jeudi 10 et vendredi 11 : direction le camp de base de l'Everest ! Situé à 5200m d'altitude, près du monastère le haut du monde : Rongbuk. Au petit matin, nous suivrons sur quelques mètres le chemin emprunté par Kilian Jornet en mai dernier.

-Samedi 12 : arrivée la veille à Shigatsé, nous repartons pour Lhassa via l'autoroute de l'amitié reliant le Tibet au Népal

-Dimanche 13 : départ du trek après la visite du monastère de Ganden, campement dans la vallée Trubshi

-Lundi 14 : 1er jour de trek, 6h de marche sont prévues, campement à Yamado après le passage d'un premier col à 4530m d'altitude et la traversée du village de Hepu

-Mardi 15 : passage du Shuga La (5250m), partie la plus exigeante du trek, traversée d'une belle vallée alpine jusqu'à Chitul Gang (4900m)

-Mercredi 16 : passage du Chitul La (5210m) où on nous annonce un superbe panorama, campement au camp d'éleveurs nomades de Nyagarsumdo

-Jeudi 17 : fin du trek par une descente jusqu'au monastère de Samye où nous dormirons

-Vendredi 18 : nous explorons la vallée de Yarlung , ancienne capitale du Tibet et berceau de la civilisation tibétaine, son nom signifie "lac sacré"

-Samedi 19 : retour à Lhassa et balade l'après-midi

-Dimanche 20 : lac Namtso (4700m), le plus grand du Tibet et le plus haut lac salé du monde, visite d'un petit monastère et couché de soleil

-Lundi 21 : après avoir admirer le lever de soleil sur le lac et sur la chaîne du Nyenchen Tanglha, nous disposerons de quelques heures pour nous balader autour du lac avant de repartir vers Lhassa

-Mardi 22 : nous assistons aujourd'hui au festival du Shötun, ou ... banquet du yaourt.

-Mercredi 23 : retour à Chengdu par avion cette fois-ci (plus rapide)

-Jeudi 24 : nous profiterons de notre matinée pour aller observer les célèbres panda de la réserve naturelle au nord de la ville, avant de reprendre l'avion vers la France dans la soirée

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Nous étions partis pour un voyage de 20h, partant à 7h20 de Lyon, faisant escale à Bruxelles - la patrie de Tintin qui a lui aussi fait un petit Tour au Tibet - puis Pekin.

Si nous avons globalement bien volé, hormis quelques turbulences avant Bruxelles, les emmerdes ont elles aussi bien volé, et en escadrille !

Première étape : Aline est retenue 1h à la douane à Bruxelles, pour un problème de passeport. Ça passe et nous nous envolons pour Pekin, apres avoir pris conseil auprès du consulat français. C'est tout de même bien angoissés que traversons l'Eurasie, avec la compagnie Hainan Airlines... dont les hôtesses à l'attitude militaire plutot flippante décident de fermer les hublots avant même l'obscurité... Juste le temps d'admirer la vue sur les Pays bas auparavant. Nous n'avons quasiment pas dormi, d'autant que nos repas sont servis a des horaires bizarres : 15h (Ok ça veut dire 21h en Chine), puis un petit déjeuner au milieu de la nuit à 2h heure chinoise. Autant dire que tout n'a pas vu le fond de notre estomac. A noter que de manière générale, l'anglais des agents de la Hainan Airlines s'est revélé a peu près incompréhensible pour nous compte tenu du fort accent chinois.

Deuxième étape : l'arrivée à Pekin. A l'origine, on a atterri en avance. Puis finalement, nous perdons une heure faute de stationnement disponible, le pilote allant se garer du côté des entrepôts de marchandises.

On a pris du retard et malgré nos maigres espoirs, nous sommes retenus à la douane pendant 1h30, toujours pour le même problème. Nous finissons par passer (après avoir songé au demi-Tour), a l'heure à laquelle notre avion décolle...

Troisième étape : trouver un autre vol pour Chengdu. Hainan Airlines nous enregistre gratuitement sur un vol qui part à 16h. Plutot cool pour l'instant. Sauf qu'au moment d'embarquer, ledit vol est... annulé. Nouveau vol pour 18h, puis pour 21h... tous annulés. À cause de pluies diluviennes. On nous promet un Hôtel, puis finalement non. On en deviendrait presque fou d'autant qu'il est difficile de se comprendre avec les agents de la compagnie. Nous passons la nuit à l'aéroport, heureusement Hainan Airlines dispose d'un espace dédié avec des canapés.

Quatrième étape : Nous sommes enregistrés pour un vol qui part à 16h. Ouf.

Le matin, nous en profitons pour aller de l'aéroport à l'ambassade de France en taxi, puis pour faire un tour sur la place Tiananmen.

Portrait de Mao et cité interdite depuis la place Tiananmen  

Retour via le métro et le train express, au maniement bien compréhensible. Il est assez aisé de s'orienter, le métro est plutot moderne.

Dans le métro  

Le vol pour Chengdu se passe bien. Nous n'avons encore rien compris aux horaires des repas puisque nous sommes servis à 16h... L'arrivée dans cette immense métropole, capitale du Sichuan, est bien agréable, les gens y semblent plus détendus qu'à Pekin. Et pouvoir retrouver un vrai lit apres ces péripéties c'est top !

PS : comme prévu, nous n'avons pas accès à Facebook. N'hésitez pas à partager y compris sur nos profils 😀.

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En arrivant le jeudi soir au lieu du mercredi matin, notre programme a du être bien raccourci ...

Nous avons tout de même pu profiter d'une très bonne nuit de sommeil dans le joli "BuddhaZen Hotel". Il portait bien son nom - il est situé à côté du temple Wenshu, dédié a un Maître du bouddhisme zen - jusqu'à ce que des travaux nous réveillent à 8h du matin... Nous avions été prévenus et c'est pas plus mal pour avoir le temps de faire un tour à Chengdu.

Bouddha Zen Hôtel  

Nous décidons d'explorer les environs et si nous avons le temps de faire un tour en centre ville. Nous nous dirigeons donc vers le temple Wenshu, très proche. Il fait déjà très chaud et humide.

Nous faisons déjà le tour diu quartier, à la recherche de l'entrée principale mais aussi pour découvrir cet ensemble tout en travaux de rénovation. Globalement, nous l'avons découvert la veille en arrivant, Chengdu est une ville à l'aspect moderne, dont l'ancien quartier est en train d'être réhabilité. Peut être reviendrons nous dans quelques années constater le résultat.

Le temple : premier temple bouddhiste pour Benjamin, pour qui tout est resté un peu abscons. Aline, toute excitée à l'idée de retrouver la sérénité des temples bouddhistes, restera un peu sur sa faim, notamment par rapport à son Voyage en Thaïlande. Le temple est une enfilade de plusieurs pagodes, avec leurs nombreux bouddhas et boddhisvatta. Malheureusement nous ne pouvons pas entrer dans les pagodes. De nombreux fidèles sont néanmoins présents, prient et apportent offrandes dans les fumées d'encens. Le parc aux alentours, avec ses tortues, est apaisant. Nous finissons par une khora autour de ce qui nous semble être un chorten.

Temple Wenshu 

Nous n'avons pas testé la maison de thé du temple, pourtant recommandée, afin de faire un tour en centre ville. Après le métro, toujours facile d'utilisation, changement d'ambiance puisque nous remontons vers Tianfu Square, où siège une immense statue du Grand Timonier. Sous ses pieds, un immense centre commercial, et tout autour, de nombreux gratte-ciels, plutôt lumineux et bien agencés. Globalement, Chengdu est une ville à la modernité décomplexée, plutôt décontractée. Nous n'avons pas encore pu visiter ses parcs. On continuera à notre retour !

Ballade matinale dans Chengdu et vers Tianfu square  

Avant de clore cette matinée, parlons de l'humidité étouffante qui règne à Chengdu. Trempés de transpiration, nous terminons sous une pluie diluvienne aportée par l'orage. Nous arrivons juste à temps pour notre départ prévu à 13h.

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Si nous comptions sur nos journées à Chengdu pour couper le transport en deux, c'est raté. Nous ne nous serons posés qu'une nuit et une matinée à Chengdu, salutaires tout de même.

Mais le train s'est énormément développé ces dernières années en Chine et nous comptions utiliser ce moyen de transport, certes plus long. Il permet ce faisant de mieux contempler le paysage, de se reposer et de s'acclimater progressivement à l'altitude. Il faut dire qu'on change d'ambiance en arrivant à la gare de Chengdu. Cela grouille de partout, c'est très bruyant. A l'ambassade on nous avait annoncé une "gare française un jour de grève", ce n'est pas vraiment le cas, d'abord car ici les trains sont à l'heure. Une vraie ambiance de film en fait, un Départ de Titanic (oups) ou plutôt la gare dans laquelle Bradd Pitt embarque pour l'Inde dans 7 ans au Tibet.

Nous avons eu de la chance d'avoir l'assistance de notre chauffeur, pour nous aider à aller chercher les tickets (nous n'avions qu'un billet électronique qu'il fallait échanger en ticket classique), dans une annexe située sur le côté de la gare. Par la suite, il nous faut montrer notre ticket et nos permis pour le Tibet plusieurs fois : ils sont vérifiés scrupuleusement. Nous arrivons finalement dans une salle d'attente où les gens sont agglutinés en attendant qu'on leur ouvre les porte des plates-formes. Tout est indiqué en mandarin mais nous parvenons à nous y retrouver grâce aux chiffres (la référence du train et l'horaire). Seuls occidentaux, nous sommes un objet de curiosité. Quand les portes s'ouvrent, bousculade générale. On s'en sort indemnes, a la limite du fou rire en fait.

Pour le reste, le train couchette chinois est le même que celui de la SNCF pour ceux qui ont eu la chance de les emprunter quand ils existaient encore. Nous avons 4 lits... pour 6. Une maman aux traits tibétains est là avec ses 3 enfants, deux filles et le dernier, un garçon gentil trublion. Ils se partagent à 4 les deux lits restants. S'ils ne parlent pas anglais, les quelques instants de partage avec cette famille, souvent sur la foi de mimes, seront intéressants. Nous nous apercevons rapidement que nous avons oublié de nous acheter à manger, mais en les observant nous avons rapidement su quoi acheter sur les quais et comment le préparer. En fait, il y a dans chaque wagon de l'eau bouillie en libre service, de quoi faire beaucoup. Pour le reste, la voiture bar propose des plats assez copieux, si bien qu'un repas tient 24h !

En tout cas, le train et sa longueur rendent les chinois plus accessibles, alors qu'ils ont en général peu de temps à nous accorder dans le rythme du quotidien.

Petite vue sur l'extérieur et nos plats le soir 

Si les nuits ne sont pas excellentes, comparables à celles passées en refuge, on se repose quand même super bien à la faveur de plusieurs siestes.

Niveau paysages, c'est très intéressant sur la première partie puisqu'on traverse le relief escarpé du Sichuan. C'est assez dense mais en même temps joli, au plus près de la nature. Nous allons ainsi jusqu'à Lanzhou, au matin du samedi, où nous bénéficions de 20 Minutes pour nous dégourdir les jambes. À midi, arrivée à Xining où nous changeons de train (en fait nous rejoignons la ligne qui vient de Pekin, qui met 2h de plus mais pour laquelle les billets sont compliqués à obtenir).

Entre Lanzhou et Golmud le samedi 

Nous avons été déçus par les paysages de l'après-midi. Nous traversons un long plateau quasi-désertique a 2000m d'altitude. C'est à partir de Golmud (2850) que l'on s'élève sur le plateau tibétain, a la tombée de la nuit, à peine le temps de profiter des premiers glaciers qui apparaissent au loin que l'obscurité arrive. Pour le reste, on a pris quasiment 2000m en 3 ou 4h, d'après l'altimètre d'Aline. L'effet de l'altitude est néanmoins très atténué par l'oxygène diffusé au niveau de chaque couchette. En tout cas, nous n'avons pas senti passer le Tangula La, a 5100m d'altitude, au milieu de la nuit. Par contre, le bruit des diffuseurs qui sifflaient a empêché tout le monde de dormir. Prévoir des boules Quies !!!

Au petit matin, nous nous réveillons au milieu de la verdure, des Montagnes au loin tachetées de quelques glaciers, et des Yacks qui paissent dans cette longue vallée. Ça et là, des drapeaux à prière apparaissent. Ça y est, nous avons changé de dimension, nous sommes au Tibet.

Au petit matin, comme une évidence : nous avons changé de pays !  

Arrivée à 10h, premiers aperçus du Potala, au loin. Nous quittons nos compagnons de rail. Nos passeports sont contrôlés ainsi que nos permis. Ça passe sans encombre. Nous sommes accueillis par notre guide qui nous ceint une écharpe blanche autour du coup, une tradition, après nous avoir dit Tashi Delek ("Bonjour" en tibétain).

Tashi Delek, Lhassa !

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Dimanche 6 août, nous arrivons enfin à Lhassa. Notre long périple a rajouté au coté mystérieux de cette cité, si près du ciel que certains l'appellent la "cité des dieux".

A partir de la gare, il faut traverser les nouveaux quartiers chinois, sans aucun charme, pendant de nombreux kilomètres... Mais quelle puissance quand on arrive sous le Potala, majestueux et rayonnant en ce jour de ciel bleu.

Nous nous installons à l'hôtel House of Shambala, situé dans une maison traditionnelle au milieu du quartier tibétain. Les chambres ont gardé un caractère très authentique.

Arrivée à Lhassa et installation à l'hôtel  

L'après-midi, nous étions censés nous reposer pour nous acclimater - les quelques montées d'escalier nous rappellent que nous sommes à 3650m d'altitude - mais en l'absence de signe de mal des montagnes, nous n'avons pas résisté à une promenade, nous imaginer rester dans une chambre d'hôtel serait mal nous connaître. Il n'y a pas besoin de guide pour visiter la ville, seuls les monastères, palais et temples le requièrent. Nous n'avons pas été contrôlés. Nous avons par contre été surpris par la chaleur, qui devient étouffante en fin d'après-midi.

Nous commençons par le quartier du Barkhor, où se situe le temple Jokhang, dont nous rejoignons rapidement le sentier de pèlerinage, en le prenant en sens horaire (conformément aux préceptes bouddhistes). Nous avons tout de suite été charmés par l'ambiance et le style authentiques de cet ancien quartier, par les odeurs d'encens que l'on brûle, par ces drapeaux a prière pendus à des mas dont il faut faire le tour par la gauche. Les echoppes sont présentes tout le long mais n'ont pas le caractère oppressant que l'on peut connaître ailleurs.

Centre de Lhassa : rooftop de l'hôtel et premiers tours sur le Barkhor, senteurs d'encens !  

Nous quittons la khora pour rejoindre le parc devant le Potala. Ce parc remplace une ancienne bourgade tibétaine, située au pied du Potala (en fait Lhassa correspondait à deux quartiers disjoints autrefois : le Barkhor et le Potala ; Désormais une immense place au style très communiste remplace ce village).

Quoiqu'il en soit, la vue sur le Potala est splendide. Sous tous les angles. On ne s'en lasse pas.

Mythique Potala 

Après un arrêt à l'hôtel, nous repartons pour dîner à Lhassa Kitchen, conseillé pour notre guide. Accessible pour le porte-monnaie, mais aussi pour votre estomac peu habitué, ce restaurant en face du Barkhor permet de goûter la cuisine tibétaine.

Premiers pas avec la cuisine tibétaine avec notamment les cheese momos qui feront le bonheur d'Aline !  

Le soir, nous faisons une nouvelle khora autour du Jokhang, faisons tourner quelques moulins à prières, avant de contempler les prosternations des fidèles devant le temple pendant un long moment. Il y a beaucoup plus de pèlerins à cette heure que l'après-midi, et les suivre pour cette khora en devient presque... envoûtant.

Jokhang et Barkhor (le tour) : une ferveur impressionnante !  

Le lendemain, nous ferons un tour de nuit, également splendide, quoique moins authentique.

Lhassa la nuit est à la fois splendide et artificielle, sauf pour le Barkhor  
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Lundi 7 août, le programme du jour est la visite des monastères de Drepung et de Sera, situés à quelques kilomètres de Lhassa, respectivement à l'ouest et au Nord. Il s'agit de monastères fondés par des disciples de Tsongkhapa, le fondateur de l'école des Gelulpa. Ils comptaient plusieurs milliers de moine avant 1959.

La matinée commence donc par Drepung, qui implique de ne passer qu'un contrôle de sécurité léger à l'entrée. Le monastère est situé légèrement en hauteur par rapport à Lhassa, à flanc de montagne. Il faudra d'ailleurs grimper de nombreux escaliers. Nous sommes accueillis par l'encens, brulé en grande quantité, et les traditionnels moulins à prière. Nous empruntons le sentier de pèlerinage , qui présente l'avantage de traverser les différents bâtiments.

Je n'en ferais pas une liste exhaustive, n'ayant pas retenu tout ce que le guide nous a dit. C'était très riche, sur l'histoire et sur la religion bouddhiste et heureusement qu'il est là ! On traverse notamment le palais de Ganden, ancienne résidence des Dalaï Lama avant la construction du Potala (soit les quatre premiers dalaï-lama, qui sont enterrés à Drepung d'ailleurs). Il abritait ainsi le gouvernement du Tibet, en attestent les nombreuses salles d'accueil diplomatique, avec un trône au milieu.

Visite d'un des plus grands monastères du Tibet 

Après un passage aux cuisines, on visite aussi une magnifique salle de prière, où siègent de nombreux bouddhas et dieux protecteurs. Sans compter les lamas et personnalités honorées. Difficile de les identifier tous... J'aurais retenu notamment : Tsongsten Gampo, premier roi du Tibet, ayant répandu le bouddhisme, le célèbre Sakyumani (le Bouddha), avokitsevara ou Chenrezig en tibetain, boddhisatva de la compassion dont les dalaï-lama sont la réincarnation, ou encore Manshuri, boddisattva de la sagesse, muni d'un livre dans ma main gauche et d'une épée dans la main droite pour détruire l'ignorance, et le boudhisattva de l'avenir.

A la fin, des moines sont rassemblés devant la salle de prière pour s'entrainer en vue des joutes philosophiques de l'après-midi. L'occasion nous aussi de nous familiariser ave l'exercice que nous verrons de près à Sera.

Entraînement pour les débats de l'après midi 

A noter : apres le palais de Ganden, au milieu du parcours, il est possible de faire une pause à la boutique du monastère. Les bénéfices financeront sa rénovation, et les différents objets sont bénis.

C'est en fini pour la matinée, j'ai un regret : celui de ne pas avoir fait la khora autour du temple. Certes, elle monte à 3900m, mais la vue y est annoncée comme magnifique. Peut être dans deux semaines !

L'après-midi est consacrée au monastère de Sera, fondé par un second disciple de Tsangkhapa. Les bâtiments sont relativement proches de Drepung au niveau architectural, mais installés sur un terrain plus plat (en faux-plat montant dira-t-on). Grosse différence néanmoins : il y a beaucoup plus de monde par rapport au matin (c'est un jour spécial pour les tibétains mais de manière générale les sites sont plus fréquentés l'après-midi) et l'accès au parcours habituel passe par une immense file d'attente. Nous l'éviterons, ce qui implique de faire l'impasse sur quelques bâtiments.

Mais peu importe, le guide nous emmène voir trois magnifiques Mandala dans une chapelle en retrait. Il faut 7 jours pour un groupe de 4 moines pour les élaborer, à base de sables colorés grâce à des minerais et des plantes. Ces tableaux d'une grande finesse sont par définition éphémères, mais ceux-ci sont conservés sous verre entre chaque nouvel an tibétain.

Dans les allées du monastère de Sera, il fait chaud 

Par la suite, moyennant un petit tour de passe-passe et quelques escaliers supplémentaires, nous accédons à la salle de prières et à la chapelle principale, attraction des lieux. Elle est dédiée a un dieu protecteur, les pèlerins y viennent pour que leurs enfants reçoivent une trace de suie sur le nez, leur assurant des nuits tranquilles. Après quelques hésitations, nous décidons que Benjamin est trop grand pour en bénéficier et améliorer ses nuits pour l'instant difficiles. La visite se termine par de nouvelles statues des divinités dont nous commençons à être familiers. Nous nous rendons ensuite dans la cour des débat, juste à temps pour trouver une petite place assise à l'ombre, il commence déjà à faire bien chaud.

Ce qui va suivre restera une expérience inoubliable. Les moines rentrent dans la cour, se prosternent à quelques reprises, avant de se grouper par deux, l'un assis, l'autre debout, pour s'exercer au débat philosophique. Apres explication de notre guide, celui debout pose une question à celui assis, qui y répond. Mais le plus impressionnant reste la gestuelle associée à la question : prenant son élan, le moine fait remonter son chapelet sur son bras gauche, afin de signifier la compassion, avant de basculer son corps vers le moine assis, en tapant dans ses propres mains de manière énergique, pour éloigner le mauvais esprit. Certains y ajoutent même une forme de chorégraphie. Si nous ne comprenons pas ce qu'ils disent, le langage non verbal est éloquent, et les débats semblent de plus en plus intenses, mais toujours avec le sourire.

Inoubliables débats philosophiques !  
Une vidéo pour se rendre compte un peu mieux !  

Nous nous amusons à quelques transferts dans notre vie quotidienne : débats politiques, audiences aux tribunaux, travaux de groupe à l'école... Nous sommes restés plus d'une heure à les observer. Faisant le tour de la cour, nous comprenons que ce sont les plus jeunes qui s'exercent tandis que les plus anciens débattent plus calmement au fond. A la fin, les moines se rassemblent en cercle, pour quelques chants et mantras.

Nous finissons cette visite par une Khora (tour en sens horaire) autour du temple, malgré la chaleur écrasante. Elle durera un peu moins d'une heure, ça fait du bien de marcher. Des mantras colorés sont disposés le long du parcours, ainsi que des portraits de boddisattva et de dieux protecteurs.

Khora autour du monastère de Sera 
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Mardi 8 août : Apres les avoir contemplé de l'extérieur au cours des deux derniers jours, jusqu'à la sortie de nuit hier, le temps était venu de visiter l'interieur des deux monuments emblématiques de Lhassa.

Nous commençons par le Potala le matin, moyennant un petit déjeuner rapide. Le guide nous promène dans un parc côté Nord, ou chinois et tibétains font leurs exercices matinaux. C'est une nouvelle perspective sur le palais également que nous n'avions pas encore vue. Le tour continue jusqu'a l'entrée Sud, dédiée aux groupes.

Un bol de tsampa et c'est parti pour le Potala, au petit matin !   

Globalement, il y a quelques minutes d'attente pour entrer et pour prendre les différents billets (le guide s'en charge), mais ce n'est jamais trop long et cela permet d'éviter une foule trop nombreuse à l'intérieur (toutes proportions gardées...). La montée sur les escaliers du Potala dévoile petit à petit la vue sur Lhassa, et les murs de l'enceinte se font plus précis. Pour le blanc, il s'agît d'un mélange de pierre, de lait et de sucre, renouvelé toutes les années.

A un moment donné, nous arrivons sur une plateforme à l'entrée du palais blanc. A partir de l'entrée au sein de ce dernier, nous disposons de 1h pour boucler l'intérieur. Penser à se reposer avant d'entrer pour éviter de perdre du temps à l'intérieur...

Montée sur le Potala jusqu'a l'entrée dans le Palais blanc. Photos interdites ensuite. 

Le Potala comprend un palais blanc (dédié au pouvoir politique) et un palais rouge (dédié au pouvoir religieux).

  • Le palais blanc se parcourt assez rapidement, après avoir monté trois escaliers très raides menant au sommet : antichambre d'accueil, salle du gouvernement avec le trône du Dalaï Lama, puis les appartements de ce dernier, incluant aussi une salle de prière. C'est déjà majestueux et chargé d'histoire.
  • Le Palais rouge suit, et se parcourt à la descente : 3eme, 2eme puis rez-de chaussée. Globalement, chaque salle est impressionnante... On y trouve notamment de nombreuses statues de divinités, bouddhas, bodhisattva, des mandalas de bronze. A noter également une chapelle en l'honneur de Tsongten Gampo, premier roi du Tibet, a l'endroit où ce dernier édifia le premier Palais, au VIIeme siècle, un millénaire quasiment avant la construction du Potala. On finit en trombe dans une immense salle de prière en bas, cœur du Potala, où se situent notamment les tombes des Dalaï Lama, dont le cinquième Dalaï Lama, qui a édifié le Potala. Celui-ci est embaumé (privilège des dalaï-lama) sous un immense stupa recouvert de plus de 5000kg d'or et d'ivoire.

Voilà, il y aurait bien plus à raconter et on aimerai vous montrer ces statues et édifices chargés de spiritualité et de matériaux tous plus impressionnants les uns que les autres, mais évidemment on ne peut pas faire de photos à l'intérieur.

On nous annonçait un Potala décevant. Et bien nous n'avons pas du tout été déçus, bien au contraire. Certes, cela fait un peu "musée" et il n'y a plus à proprement parler de "vie" a l'intérieur, les moines semblant davantage là pour surveiller que pour prier. Mais demande-on à Versailles de voir la Cour de Louis XIV fonctionner comme au bon vieux temps ? En réalité, chaque salle témoigne de la splendeur du Tibet, tant historique que religieuse, et les différentes figures qui y sont représentées racontent de manière imagée une histoire que l'on se plaît à connaître de mieux en mieux. Il faut remercier notre guide qui a mis tout son talent pour faire (re-)vivre ce lieu...

Nou descendrons les marches par le côté Nord, plus vert, avant de faire la Khora du Potala, qui se finit par un alignement continu de plus de 1000 petits moulins à prière. Devinez qui a tenu à tous les faire tourner !

Redescente du Potala puis Khora  

L'après-midi est consacré au Jokhang, que le guide Lonely planet encensait comme le monument le plus authentique de Lhassa. Nous avons été un peu frustrés, plutôt que déçus.

Le temple est magnifique, couvert de dorures que l'on voit depuis la Cour, notamment s'agissant du trône et des appartements du Dalaï Lama. Par la suite, passée la description de l'histoire du temple, les empreintes de Tsongten Gampo sur une pierre, nous entrons dans une stupéfiante salle où siègent d'immenses statues, notamment celle de Maitreya, le bouddha du futur, ou de Guru Rimpoche, le moine qui répandit le bouddhisme au Tib

A l'intérieur du Jokhang après avoir passé les dieux protecteurs 

Les chapelles s'enchaînent également, à l'intérieur desquelles chaque figure, qu'elle soit un grand maître, un roi, un dieu protecteur, un bouddha ou un bodhisattva, vous emmène dans son histoire, ses valeurs, son expression... On se plait avec Aline à les reconnaître avec leurs signes : le vase dans les mains pour le boddhisattva de la longévité (oui il est nouveau par rapport à hier), les milles yeux et milles mains pour celui de la compassion, le livre et l'épée pour celui de la connaissance... Nous rencontrons aussi un nouveau bouddha fait de deux personnages, en pleine embrassade... La moustache pour Guru Rimpoche, le bonnet jaune pour Tsangkhapa... Parfois, ce sont 8 statues du meme bouddha, notamment celui de la médecine, qui sont disposées ensemble et dont l'expression varie. Cette capacité du bouddhisme tibétain à rendre ces figures vivantes, avec leur histoire qui se complète chaque jour, est particulièrement impressionnante. On a l'impression de rencontrer une connaissance, qui a chaque fois vous dévoile une partie de lui.

La principale chapelle abrite un bouddha de 12 ans, amené par la reine népalaise du premier roi du Tibet. On ne peut le voire que de loin pour notre part. Mais pour beaucoup, il est le cœur du Jokhang. Et pour cause : a l'origine le temps a été bâti pour accueillir cette Grande statue d'or venue du Népal.

Sur le toit du Jokhang, après la visite !  

Malheureusement, nous n'avons pas pu pleinement en profiter car l'apres-midi, beaucoup de chapelles sont fermées (on voit tout de même à travers des grilles). Surtout, il y a un monde impressionnant et il est difficile de se frayer un chemin parmi les groupes, qui parfois vous poussent de devant les chapelles avant meme que le guide n'ait fini son explication.Le temple a été bouclé en une heure de ce fait, je pense qu'il en méritait bien deux... voire trois. À faire plutôt le matin en conséquence (dès l'ouverture même a-t-on lu), au milieu des pèlerins et avant l'afflux des touristes.

Nous avons beaucoup appris au cours de cette journée, en particulier grâce aux explications de notre guide, au très bon français. Malheureusement, à l'heure de partir à l'Everest, nous apprenons que pour des raisons familiales, nous devons changer de guide pour les prochains jours. Nous ne le remercierons jamais assez pour toutes les explications données et sa sympathie au cours de ces trois merveilleux jours a Lhassa.

PS : via le portail "Arianne" du ministère des affaire étrangères, nous venons d'apprendre qu'il a eu un fort séisme à Chengdu. Comme vous le savez, nous n'y sommes plus et tout va bien ici. Nous aurons "une pensée de compassion" pour toutes les victimes.

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Mercredi 9 août, nous quittons Lhassa aux aurores (nous y reviendrons), sous un temps bien pluvieux. Ça s'annonce mal alors qu'on doit traverser de somptueux paysages, faits de lacs, de cols, de montagnes à plus de 7000m, et de glaciers.

Et il faut aussi s'habituer à notre nouveau guide, qui ne parle pas français mais anglais (bon ok, ça nous entraîne) et dont l'approche est quelque peu... différente.

Pour faire court et simple, disons que ce guide nous a permis de connaître l'histoire officielle du Tibet...

Puis, il est aussi plus superficiel... Ainsi, au bout de quelques kilomètres, nous faisons une pause le long du Brahmapoutre, ou Yarlung Tsampo, qui draîne de manière impressionnante une large vallée. Non seulement le guide est incapable de nous donner le nom du fleuve (je l'ai grâce à la carte), mais en plus la pause n'est pas justifiée par cet élément géographique à mon sens majeur, mais par la présence d'un chien, coiffé d'une crinière de lion, et surélevé sur une estrade par son proprietaire afin de permettre aux touristes de faire une photo. Visiblement cela plaît aux chinois puisqu'il y a dix estrades pour les jours de beau temps. A peine le temps de dire stop, que notre guide tend un billet au propriétaire, et nous invite, tout content de lui, à faire une photo autour de cette pauvre bête, trempée sous la pluie. On a été polis. Bon.

Le fameux chien, et nous comme des cons, devant le Yarlung Tsangpo 

Revenons à la route. De manière générale, il faut passer de très nombreux checkpoints où le guide descend demander l'autorisation de passer avec nos passeports.

On monte le premier col de la journée dans les nuages, sans grand espoir pour la visibilité. Le guide se rattrape en nous offrant des frites et du thé au beurre de yak - qu'on apprécie plutôt - lors d'une pause à mi-pente. Les effets de l'altitude se font sentir dans la voiture : on sent qu'il faut respirer un peu plus fort que d'habitude. Mais aucun mal d'altitude lorsque nous arrvions au Kampa La, à 4792m. Les chinois se pressent vers une stèle indiquant une mauvaise altitude : 4998. Nous on préfère aller voir les drapeaux à prière situés en contrebas. Même dans le gris de la purée de pois, les tibétains arrivent à colorer leurs cols et c'est plutot appréciable.

Le Kampa La sous la pluie 

Premier "Ki Ki So so Lagyalo" (formule tibétaine au passage des cols, signifiant "les dieux sont victorieux"), mais pas d'explications du guide sur les drapeaux à prière pour l'instant. Nous distinguons le lac Yamdrok Tso en contrebas, et nous arrivons rapidement au bord, mais nous n'en verrons pas sa couleur magnifique de laquelle il tient son nom, sauf sur un poster au restaurant du midi où nous arrêtons. Le midi nous nous arrêtons dans une bourgade pas très jolie, le guide nous expliquant : "C'est le seul restaurant "autorisé" pour les étrangers à des kilomètres à la ronde". Bon.

Au bord du Yamdrok Tso qui ressemble à autre chose apparemment par beau temps (merci au restaurant)

Après avoir longé le lac dans son immensité (en fait 9 lacs plus ou moins reliés), nous atteignons le Karo La, plus haut point de la journée - et au passage de notre vie 😀 jusqu'à présent - à 5052m. Nous ne verrons pas le sommet de 7161m situé au dessus mais seulement les glaciers qui en descendent. Au passage de nombreux drapeaux a prières, toujours aussi beau.

Je demande l'explication au guide, qui m'expose ce qu'on lui a enseigné : alors que les chinois peuvent aller à l'université, beaucoup de tibétains ne le peuvent pas. Ils accrochent de ce fait des morceaux de texte sur ces drapeaux multicolores le long des cols, chaque année, afin que le vent diffuse la connaissance. Ces drapeaux sont aussi censés porter bonheur. Le guide de voyage dont nous disposons exposé une version moins laïque mais plus simple : en agitant ces drapeaux, le vent diffuse les prières qui y sont écrites.

Au Karo La sous les glaciers 

Nous redescendons - moyennant cette fois un petit mal de tête - et nous arrêtons au bord d'un lac artificiel. Puis nous traversons d'immenses étendues montagneuses dans lesquelles se nichent des villages traditionnels. Les montagnes ne sont plus vertes comme à Lhassa mais plus arides, et très sèches. La végétation semble s'arrêter à 4500m. Au milieu, de vastes vallées verdoyantes où sont cultivés du blé, de l'orge ou du colza. C'est magnifique et cela ressemble aux photos que nous avions vu du Ladakh, en moins aride. Nous sommes malheureusement pressés par le temps, et n'avons pas le temps de nous arrêter.

Sur la route  

Vers 15h, pause à Gyantse, petite bourgade actuellement en travaux mais au caractère tibétain prononcé. Son fort (Dzong) qui la domine a été le lieu d'une bataille en 1907 entre l'armée du général anglais Yonghusband, et les tibétains, sous équipés. 4000 d'entre eux furent massacrés.

Vue sur Gyantse et son fort 

Nous visitons le monastère et surtout le "Kumbum" (Grande pyramide circulaire dans laquelle figurent de multiples chapelles) de Gyantse. Nous rencontrons à nouveau ces figures religieuses que l'on prend plaisir à reconnaître. Et les lieux sont beaucoup plus calmes et silencieux qu'à Lhassa. Nous n'aurons malheureusement pas le temps de faire l'intégralité du Kumbum, seulement le rez-de-chaussée, mais ce que nous avons vu vaut vraiment le coup. De nombreux bouddhas, dieux protecteurs, boddhisattva...etc sont là et on peut faire des photos pour 10 Yuan. A voir vraiment, d'autant que c'est le plus grand kumbum du monde....

Monastère de Gyantse et le superbe Kumbum où nous pouvons photographier les statues 

Petit inconvénient par rapport à hier : notre guide ne connaît que peu le bouddhisme tibétain, qu'il éclaire à la lumière du bouddhisme Han (chinois). Nous nous aidons à nouveau de notre guide de voyage pour identifier les différentes figures.

Par la suite, route vers Shigatse, toujours au milieu de l'immensité des champs, des villages et monastères qui se distillent au pied de montagnes arides. L'habitat reste relativement traditionnel jusqu'à l'entrée de Shigatse, en témoignent ces murs recouverts de bouses de yacks (nous espérons pouvoir faire des photos demain, c'est finalement assez esthétique). Cette bouse, qui est aussi un combustible, semble une véritable matière première ici.

A Shigatse, notre guide parvient à obtenir les permis pour l'Everest à 15 minutes près. Cela nous permettra de partir tôt demain. Installation dans un Hôtel 4* aux chambres immenses, très confort mais pas très authentique. Nous visiterons Shigatse vendredi ou samedi à notre retour du camp de base, mais la ville nous semble à première vue très sinisée...

Globalment, cette étape mériterait deux jours pour pouvoir profiter des différents lieux, ou à tout le moins il conviendrait de la réaliser au retour de l'Everest, pour eviter de devoir trop se presser pour arriver à Shigatse avant 18h, date de fermeture du bureau des permis...

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"Qomolöngma", déesse-mère de l'univers, nom du toit du monde en tibétain, a bien voulu se départir de son voile nuageux pour que nous puissions l'admirer hier soir et ce matin, depuis le "camp de base" de l'Everest, situé à 5200m d'altitude.

Chomolongma depuis Rongbuk (à gauche) et le camp des tentes (à droite) 

Et pourtant, ce n'était pas gagné !

Nous sommes partis de Shigatse à 7h20 jeudi matin pour un trajet qui devait durer 8 heures et qui en durera 11h. Le trajet normal emprunte la route de l'amitié, construite entre le Tibet et le Népal, nommée "route nationale" entre Shangaï et Zangmu par les chinois (aucun panneau n'indique d'ailleurs "friendship highway"). Or, celle-ci a été endommagée, ce qui nous impose un long détour par une piste non goudronnée pendant 3h... Laquelle parcourue entre 12h et 15h, malgré les paysages magnifiques, a été difficile a encaisser d'autant que nous n'avions pas mangé. Nous avons bien cru ne jamais en sortir, et nous ne sommes pas passés loin du torticoli...

Une fois la voie normale rejointe à Shegar, nous patientons 30 min à un énième Check point, où des militaires pas commodes vérifient scrupuleusement les papiers. A partir de là, nous montons le col du Pang La (5200m) avec une route toute neuve, mais déjà dégradée par endroits, qui secoue moins voire pas du tout. Au passage du col, le chauffeur chuchote "So ! So ! So!", formule rituelle au passage des cols, remerciant et invoquant la protection des dieux. Et pour cause : nous ne traînons pas pour voir le panorama sur l'Himalaya, de toute façon à moitié bouché (nous ne voyons ni l'Everest, ni le Cho Oyu, ni le Makalu, les 3 8000 que l'on voit normalement, mais seulement une succession de glaciers), car un orage de grêle arrive bientôt.

Au passage du Pang La, vue sur l'Himalaya nuageux 

C'est une fois dans la vallée que nous commençons à reprendre espoir, à la faveur des quelques morceaux de ciel bleu qui se détachent dans le ciel. Arrivés à Rongbuk, vers 18h, plus haut monastère du monde (5000m), nous devons patienter pour le dernier checkpoint, mais c'est justement le moment que l'Everest choisir pour se dévoiler, d'abord sa base, majestueuse, puis son sommet... C'est bon, on n'aura au moins pas fait toute cette route pour rien...

A partir de là, il faut rouler 4 km pour atteindre la fin de la route, et un camp de tentes en poil de yak, pouvant accueillir une dizaine de personnes chacune. Si l'aspect des lieux est peu engageant, l'intérieur des tentes est plutôt agréable, nos hôtes tibétains sympathiques nous offriront le luxe de dormir dans une petite annexe, seuls. La promiscuité des lieux pendant la soirée nous permettra néanmoins d'échanger avec notre guide, notre chauffeur, et nos hôtes, autour de la carte, de photos de montagne... Pour le reste, en dehors de la tente, les lieux ne sont vraiment pas accueillants. En particulier les latrines, qui, à défaut d'être les plus hautes du monde, sont certainement les plus dégueulasses et les moins intimes...

Celà dit, le camp des tentes n'est pas encore le "camp de base", situé à 5.200m. Nous aurions souhaité monter à ce dernier, 4km plus loin, à pied, mais notre guide nous apprend que c'est interdit aux étrangers, et que nous sommes obligés de prendre le bus. Un peu frustrés, nous sommes donc montés entre 19h et 20h là-haut.

Soyons clairs, Il s'agit certes du camp de base d'une expédition britannique en 1923, mais ce n'est aujourd'hui plus qu'un point-de-vue touristique, aménagé à cet effet. Les chinois se prennent en photo devant la stèle indiquant "Everest Base Camp, 5200m, nous, nous montons une petite moraine pour atteindre des drapeaux à prière et prendre l'Everest. Il est à peu près dégagé, mais reste sur fond nuageaux. Pour cause, de l'autre côté, la mousson apporte son lot d'humidité et de vent ! D'ailleurs, 5 minutes après que nous soyons rentrés, il se met à pleuvoir. Heureusement, nous sommes sous la tente à attendre notre repas.

Avec notre hôte au camp des tentes et vue sur l'Everest sur fond nuageux le jeudi soir

La nuit sera agitée, surtout pour Benjamin comme à chaque fois qu'il dort près d'un sommet mythique... Il faut se lever toutes les deux heures pour voir s'il ne s'est pas dévoilé, d'autant que c'est la pleine lune. Mais le ciel étoilé annonçait une belle perspective pour le lever du soleil... De 7 à 8 heures, les premiers rayons du soleil viennent frapper Chömolongma, sous notre regard admiratif. Nous avions pris un petit déjeuner dans la tente, mais il vaut mieux se poser sur le devant du camp des tentes pour regarder ce spectacle.

Nous ruminons quand même notre frustration de ne pas pouvoir monter à pied au camp de base ; à défaut, Benjamin tentera le footing à 5000m, en faisant des tours dans l'aire "autorisée", comme un hamster dans sa cage.

A 9h, il faut déjà partir, car la route parcourue la veille doit l'être en sens inverse. Nous nous arrêtons quand même visiter le petit monastère de Rongbuk, très charmant même s'il est en rénovation. S'y mélangent des nonnes et des moines, qui ont à coeur de nous expliquer les différentes statues présentes, notamment l'immense statue de Guru Rimpoche, au premier étage. Benjamin fera également la Khora du monastère, en compagnie de pèlerins, qui offre effectivement les plus belles vues sur Chomolöngma, et donne à ce sommet la spiritualité qui nous manquait jusqu'à présent. Il y a une pension au monastère, c'est à notre avis un lieu plus intéressant pour dormir, d'autant que les chemins situés alentour semblent pouvoir être empruntés pour se balader, dans une certaine liberté.

Le retour du camp de base est globalement mieux passé que l'aller, mais nous sommes arrivés à 19h30 à Shigatse... Celà fait beaucoup de route pour un petit moment, certes intense, mais assez frustrant puisque nous ne sommes pas vraiment libres de nos mouvements là-haut. Et encore, nous sommes relativement chanceux puisque certains sont arrivés là-haut au milieu de la nuit, pour en repartir à 9 ou 10h... Sans compter tous ceux qui, d'autres jours, ont fait ce trajet pour ne rien apercevoir, l'Everest restant sous les nuages.

Vues sur le chemin du retour  

Ces trois derniers jours nous ont rendus humbles face à l'immensité du Tibet. Les paysages sont magnifiques, il y a beaucoup à voir. Nous sommes ainsi passés près de Sakya, un des plus beaux monastère du Tibet, sans pouvoir le visiter. A chaque instant, un paysage merveilleux et changeant se déroule sous nos yeux, nous passons des cultures d'orge et de colza aux immensités désertiques. Et ces deux derniers jours, le temps est devenu plus clément. Derrière la fenêtre de notre voiture, nous voyons à la fois plus de choses, mais de manière si fugace qu'elles nous échappent. Il nous tarde de marcher lors de notre trek, dans deux jours !

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Ce matin, la journée a bien commencé au monastère de Tashilumpo. Pendant que le guide achete les billets, nous contemplons cet ensemble epoustouflant depuis le parc situé en face. Des pèlerins y prient et au fond du parc, nombreux sont rassemblés pour faire des exercices sportifs sur un fond musical mélodieux.

Devant le monastère de Tashilumpo  

Le monastère est le lieu de résidence du Panchen Lama, le deuxième personnage le plus important après le Dalaï Lama, dans la religion bouddhiste. Ces deux personnages ont parfois rivalisé pendant l'histoire, le Panchen ayant globalement souveraineté sur l'ouest du Tibet autour de Shigatse pendant que le Dalaï l'exerçait sur l'est autour de Lhassa, mais les uns et les autres participent à la recherche et au processus de nomination de la suite de la lignée. Certains Panchen Lama ont été les professeurs de Dalaï Lama, et c'est le 5ème Dalaï Lama qui déclara que le tuteur du monastère était le premier de la lignée des Panchen Lama. Ils font tous les deux partie de l'ordre des Gelugpa. Si le sujet vous intéresse, nous vous conseillons quelques recherches sur le 10è Panchen Lama et le (ou les) 11è (actuel).

Le monastère est assez étendu, et plutôt calme ce matin, nous croisons quelques groupes de touristes chinois et russes, beaucoup de pelerins, et évidement des moines, mais l'ambiance est bien différente de celle ressenti dans le Jokhang. De manière générale, les visites sont plus opportunes le matin. Nous prenons plaisir à parcourir les rues pavées.

La première salle que nous visitons renferme une statue de 26m de haut de Maitreya, le Bouddha du futur, que nous reconnaissons facilement maintenant. Il rappelle à Aline, par sa taille et sa stature, le Bouddha couché de Walt Pho à Bangkok. Nous continuons la visite par la chapelle dite de la victoire renferma une imposante statue de Tsongkhapa, le fondateur des Gelugpa. Suivent ensuite 3 chorten funéraires des Panchen Lama, le premier et plus grand pour le 10è, dont les liens avec le gouvernement communiste chinois ont été fluctuants, puis le 4è tuteur du 5è Dalaï Lama. Ce dernier est le seul mausolée à avoir résisté à la révolution culturelle, puisque le dernier chorten a été édifié en 1989 pour rassembler les restes du 5è au 9è Panchen Lama. Ces trois salles sont construites de la même façon, autour d'un chorten où se niche une statue du Panchen concerné, devant lequel on trouve des photos des trois derniers Panchen Lama. Tout autour se trouvent des fresques et statue de Bouddha et au plafond un immense Mandala.

A l'intérieur du monastère de Tashilunpo 

L'une des fresques, située en face du bouddha de la longévité, a été abîmée pendant la révolution c ulturelle, les gardes rouges écrivant en mandarin que le seul à détenir la clef de la longévité est Mao...

On distingue vaguement le tag des gardes rouges : quelques caractères chinois en plus clair

Nous visitons également une agréable salle d'assemblée, où l'on retrouve les bancs utilisés par les moines pendant leur lecture, autour du trône de l'actuel Panchen Lama. Notre guide nous laisse ensuite, pour notre plus grand plaisir, du temps libre pour visiter les nombreuses chapelles autour de la cours des débats. Nous ne les citerons pas toutes, nous apprécions la visite de l'imprimerie où nous pouvons observer les moines transcrire sur papier ou tissu les enseignements du Bouddha et des grands maîtres, et lire à voie haute des textes sacrés dans un joyeux brouhaha. Il est agréable de traverser (toujours dans le sens des aiguilles d'une montre) les chapelles quasiment seuls avec les moines, qui récitent des mantra, ou ... jouent avec leur téléphone ! Il existe de nombreuses statues où nous prenons plaisir à reconnaître nos figures favorites. Chaque chapelle contient une statue principale mais est entourée de multiples petites statues différentes. Vraiment un plaisir de se perdre dans ce dédale de chapelle qui respire une ferveur particulière.

Au niveau de la salle d'assemblée, un dédale de petites chapelles 

Nous profitons d'autant plus que le guide n'a cessé de nous répéter depuis hier que nous avons tout le temps que nous voulons, n'ayant aucun impératif à tenir. Nous lui avions alors demandé si nous pourrons faire le tour du monastère pour finir, ce à quoi il semblait favorable. Ces tours sont des "Khora" parcourues par de nombreux pelerins, beaucoup moins par les touristes. Elles prennent autour d'une heure, il y a un peu de dénivelé, ce qui suffit à faire fuir les touristes, et à l'inverse nous attire. La Khora permet de parcourir la montagne à la "tibétaine", c'est peut être le moment où nous sommes le plus proches de cette culture. Elles offrent également une perspective sur la ville et le monastère, vu d'en haut. Après 3 jours de voiture, autant vous dire que nous y tenions pour nous dégourdir les jambes, quitte à réduire la visite de l'intérieur du monastère.

Mais surprise, à la toute fin de la visite, au moment où nous disons dotre souhait de faire cette Khora, le guide nous dit qu'il faut y aller...après nous avoir dit de prendre notre temps et alors que nous avions exprimé plusieurs fois notre souhait. Nous quittons donc le monastère très agacés, et carrément furieux contre notre guide, meme si celui-ci a fait des efforts à l'intérieur du temple pour nous expliquer correctement les différents éléments. On arrivera à 17h30 à Lhassa, on avait largement le temps. En dehors de ça, on a eu plus l'impression au cours de ces 4 jours d'avoir une nounou qui prend soin de nous - et nous surveille - plutôt qu'un guide qui nous emmène la où on a envie.

Globalement, il semblerait que les guides et agences de voyage aient pour référence les touristes chinois qui sont bien moins actifs que nous, peu interressés par le peuple et la culture tibétaine et encore moins par les Kora. Malheureusement, ces quatre jours vers l'Everest, nous avons plus eu l'impression de participer à un tourisme de masse, qui dévoie la culture, les sommets et les paysages sous prétexte de les rendre accessible. Quel est le sens de monter à un "Camp de base" de l'Everest dans un bus ? Contemple-t-on vraiment des paysages depuis la fenêtre d'une voiture ? Pourquoi visiter un monastère comme un musée si nous pouvons ressentir la ferveur qu'il provoque ?

Ce décalage entre ce que nous pensions faire et ce dont on nous donne le droit nous a bien miné le moral aujourd'hui, alors que nous parcourions la vallée du Yarlung Tsampo (Bramhapoutre) vers Lhassa. Nous qui avons l'habitude de nous balader à droite et à gauche en toute liberté... Nous espérons que le trek que nous commençons demain nous permettra d'être plus actifs et d'apporter un peu de la séreinité que nous sommes venus chercher.

Nous sommes de retour ce soir à Lhassa, où nous sommes retournés parmi les pélerins du Barkor pour tourner 3 fois autour du Jokhang, encore et encore, jusqu'à nous enivrer de cette ferveur. Nous gardons espoir de pouvoir faire d'autres Khoras, au cours desquels on sent de si près l'âme tibétaine.

Le long du Yarlung Tsangpo puis agréable Retour sur le Barkhor 
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Petit retour a posteriori sur les 5 jours de trek entre Ganden et Samye.

Ce dimanche matin, nous rencontrons notre nouveau guide à Lhassa, qui nous met tout de suite en confiance. Bon, on s'en veut un peu d'avoir râlé à l'agence, car elle l'a contacté à 10h du soir la veille pour lui apprendre qu'il partait avec nous en trek...

Mais ça ne l'empêche pas d'être extrêmement sympathique, d'autant qu'il comprend rapidement que nous ne sommes pas deux occidentaux mécontents, mais simplement en attente d'un peu plus de culture tibétaine, et pas chinoise, et de marche. Et nous constatons rapidement que nous nous comprenons très bien, car il parle anglais et non pas le "chinese english". Namgyal sera exceptionnel pour ce trek et tout le reste du séjour. Nous le recommandons chaudement.

On commence par monter à Ganden par une jolie route en lacets. Ce monastère est très joli, même sur fond de brouillard. Il est niché sur un petit col à 4300m d'altitude. Il offre une belle vue sur la vallée en contrebas.

Ganden 

Nous commençons par en effectuer la Khora (il y a une petite Khora et une grande, nous faisons la petite), avec un groupe de pèlerins. Notre guide achète de l'encens pour nous, et le met dans les fours à encens. Il nous invite à le faire, à offrir aussi de la tsampa sur les braises, et à prier contre le réchauffement climatique, pour la sauvegarde de l'environnement. Il chantera / priera tout le long de ce joli sentier, s'arrêtant quelquefois pour des explications. Ambiance méditation, réflexion et marche posée...

Nous avons aussi enfin droit à l'explication sur les drapeaux à prière, qui sont placés près des éléments pour assurer la diffusion des prières. Toujours dans l'ordre : bleu pour le ciel, blanc pour les nuages et le vent, rouge pour le feu, vert pour l'eau et jaune pour la terre.

La Khora se termine par la visite de la grotte de Tsongkhapa, dans laquelle le fondateur de l'école des Gelugkpa à médité plusieurs années avant de construire le monastère.

Sur la Khora puis dans la grotte  

Commence alors la visite du monastère de Ganden, qui nous a semblé encore plus riche que les monastères de Sera et Drepung. Mais tellement que nous n'avons pas pu tout visiter, nous étions de toute façon en overdose de contenus à un moment. On y voit les traditionnelles salles d'assemblées, ainsi que de multiples chapelles. Beaucoup de statues de Tsongkhapa, bien évidemment, mais aussi d'autres figures, nouvelles pour nous, notamment les Arats, qui sont des traducteurs venus d'Inde pour écrire des textes religieux en tibetaines, sur des livres dont certains exemplaires sont encore conservés à Ganden.

Dans le monastère 

Nous finissons en prenant du sweat tea dans la maison de thé dû monastères, sur fond de chants monastiques.

Pour la suite, l'itinéraire part en principe de Ganden directement, où il faut monter un col avant de redescendre sur Trubshi Village. Nous ne pourrons pas vous renseigner sur cette portion car nous avons pris la voiture pour notre part.

Benjamin en était initialement chafouin mais cela a permis d'autres découvertes. Nous mangeons en effet dans un restaurant local à midi, à la table et du guide et du chauffeur (enfin). Puis, nous passons chercher le cuisinier qui nous invite à visiter sa maison, y prendre le thé, goûter ses succulentes pommes de terre ainsi que des bugnes. Nous visitons les différentes pièces de la maison et l'écoutons parler de lui, sa famille et son exploitation. Il s'appelle Dawa et sera d'une gentillesse infinie pendant ce trek.

Chez notre cuisinière Dawa 

Pour la suite, nous installons notre campement à Trubshi village, au bout de la route en fait, une tente népalaise un peu vieille mais qui tiendra le coup malgré la grêle qui suivra juste apres. Le guide nous a ensuite invités à aller nous ballader et... il n’a pas fallu nous le dire deux fois. Nous montons dré dans le pentu, un peu essoufflés puisque nous sommes à 4500m d'altitude.

Campement et petite ballade au dessus  

Le soir nous attendons le premier repas en compagnie de quelques villageois qui viennent nous rendre visite et de chiens qui se montreront quelque peu bruyants au cour de la nuit qui suivra...

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Au matin, nous devons nous habituer au climat tibétain : il a plu toute la nuit et nous sommes dans le brouillard. Mais ce sera comme ça tout le séjour, le soleil se lève progressivement, en particulier l'après midi vers 16h.

Après un gros petit déjeuner (œuf, beignets, beurre de cacahuète...etc) nous remontons une petite rivière. Il nous faut fréquemment traverser des ruisseaux. Ce ne sera pas très long : 2 heures pour 500m de dénivelé. Nous ne nous fatiguons guère mais nous constatons que nous ne sommes pas tres en forme : un peu barbouillés et l'altitude doit faire son effet nous arrivons à 4500m...

Matinée brumeuse en prélude  d’une petite étape  

Yama Do, notre point d'arrivée, vaut le coup d'œil et l'arrêt un bon petit moment. Il y a plusieurs tentes nomades et nous sommes chaleureusement accueillis dans l'une d'elle pendant près de deux heures.

L'occasion d'assister à la préparation du beurre, du fromage de yack et autres produits. Au tricotage de petites boucles colorées en poils de yack que les nomades accrochent aux oreilles de leurs bêtes pour les reconnaître (plus bucolique que nos chiffres et nos codes barres sur nos vaches). D'échanger aussi sur le mode de vie des nomades, qui sont désormais limités à occuper leurs tentes trois mois dans l'année et à redescendre a un endroit fixe le reste du temps (loi du gouvernement chinois).

Sous une tente nomade 

Le campement installé au dessus du village, et apres pic nic et sieste, Benjamin part se ballader sur une crête herbeuse au dessus. L'occasion de traverser des prairies remplies d'edelweiss, occupées aussi par les yacks et d'apercevoir un troupeau de Nayas (des gazelles), vue presque féerique... De monter jusqu'à 5260 m aussi.

Ballade au dessus du campement pour Benjamin  

Le soir, nous aurons droit à une longue discussion, très instructive, avec Namgyal sur son histoire, celle de sa famille et du Tibet. L'occasion de réfléchir à beaucoup de choses et de travailler notre anglais !

Au passage le repas de Dawa était à nouveau exceptionnel : du riz et du yak préparé avec différents légumes.

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Au matin, une belle purée de pois et de la pluie nous attendent. Étrange car Benjamin s'est levé au milieu de la nuit et le ciel était dégagé et plein d'étoiles.

Nous ne mangeons pas tout le déjeuner préparé par Dawa : malgré son insistance, nous montons à 5200m aujourd'hui et il nous faut éviter de trop manger.

Départ donc dans la brume et une petite bruine. Nous montons à un rythme régulier et rattrapons les autres groupes. Nous mettrons deux heures à gravir les 700m de dénivelé, en prenant soin de ne pas trop s'essouffler mais pas de problème de ce point de vue. Malgré le temps, et l'altitude, il ne fait pas vraiment froid.

Nous sommes suivis par un petit chien, qui ne va plus nous lâcher pendant 2 jours, et que nous dénommerons Tchang (petite référence au reporter belge). Il est très gentil, n'aboie pas, mais a mis du temps à comprendre le concept de la caresse sur la tete, toujours effrayé par je ne sais quoi. Il faut dire qu'il a eu droit aux cuisses de poulet de notre pic-nic, que notre guide nous recommande de ne pas manger, à raison puisqu'elles sont dans des emballages industriels et couvertes de gelée étrange.

Il n'y a pas vraiment de chemin, quelques sentiers, mais il faut connaître pour remonter la rivière du bon côté et partir à gauche sur la fin du vallon pour atteindre le col. Par de problème pour notre guide, même dans la purée de pois.

Le col ne nous offre pas vraiment une vue dégagée... Nous sommes malgré tout content d'avoir dépassé les 5000m et nous prenons en photo devant l'immense tas de pierre couvert de drapeaux à prière.

La montée au Shuga La

A La redescente du col, la vue se dégage sur une belle vallée, perdue au milieu des montagnes. Et donc très sauvage. On y aperçoit aussi quelques lacs. Le sentiment d'égarement nous envahit et c'est fort agréable.

Nous suivons une sente pour une longue traversée à flanc de montagne, pendant une heure à peu près. Le soleil arrive, et tape très fort à cette altitude. A la fin il faut traverser une rivière (assez grosse donc nous mettons un peu de temps à trouver un passage). Pic-nic frugal ensuite (peu de choses dans nos casse-croûte mis à part quelques biscuits) et nous marcherons encore 30 minutes en direction de notre campement, au pied du vallon qui mène au col de demain. Les camps ne sont pas possibles ailleurs. Nous sommes arrivés avant nos yackmens, le guide salue la performance. Effectivement, les autres groupes arriveront deux ou trois heures plus tard.

Chemin et vue apres le Chitul La 

Une fois les yacks arrivés, et les tentes installées, c'est parti pour une traditionnelle sieste. Nous sommes à nouveau bien gâtés par Dawa qui nous amène du sweat tea. Quelques averses viennent de temps en temps au milieu de chaudes eclaircies.

Passée celle-ci, Benjamin monte à nouveau dré dans le pentu sur la droite du camp. D'abord dans les alpages au milieu des yacks, la faune et la flore se font de plus en plus rares, jusqu'à disparaître totalement. Il montera un tas de cailloux jusqu'à atteindre une cime avec un cairn a une altitude de 5700m. Soit 600m de dénivelé en un peu plus d'une heure de quoi être quand même bien essoufflé au sommet. Pas de 6000m (il y en a un pas loin mais trop pour un depart a 16h).

Le sommet offre un joli panorama !  

La descente sur le tas de cailloux sera un peu acrobatique - c'est pas là qu'on a envie de se faire mal - mais Benjamin arrive au campement pour 18h. Il croit avoir le temps de faire une petite toilette dans le ruisseau à côté, mais à peine est-il dans l'eau qu'il y a un éclair et le tonnerre qui retentit quasiment au même moment. Sortie de l'eau moyennant un saut supersonique, quasiment comme un reflexe.

Ça n'avait donné aucun signe mais un orage s'ensuit avec de fortes pluie. Nous mangerons un peu dans l'eau, celle-ci ruisselant sous la tente mess. Cela ruine aussi la lessive de Aline, faite quelques minutes plus tôt, qui n'aura pas le temps de sécher...

Nous apprenons quelques techniques pour faire face à ce désagrément. Nous passons à nouveau une super soirée, à écouter Namgyal nous parler de bouddhisme pendant plus d'une heure.

Campement 

A noter que nous sommes en compagnie d'un autre groupe de français, assez nombreux puisqu'ils sont avec l'UCPA. Ils font ce trek et enchaînent avec le tour du Yamdrok Tso. Ça nous fait plutôt envie sur le moment car nous savons déjà qu'il ne nous reste que quelques jours de marche, alors que nous profitons vraiment de ces paysages.

Belle nuit étoilée ensuite.

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Ce matin le ciel est clair et apres un bon petit déjeuner (Dawa a préparé des pancakes, un délice avec le beurre de cacahuète), nous partons vers le Chitul La, notre deuxième col à 5200m d'altitude. Cela fait une petite montée car nous sommes déjà à 5050m, ce campement étant assez haut. Une bonne nuit pour faire des globules !

De belles couleurs ce matin 

Le petit chien Tchang nous suit toujours pendant cette longue remontée à flanc de montagne (le creux du vallon semblant très humide voire marécageux). Il y'a de nombreuses marmottes, souvent très grosses comparées aux nôtres. Il nous faut bien 1h30 voire deux heures pour atteindre le col, moyennant de nombreuses petites montées et descentes.

Le Chitul La est très chouette. Il y a de nombreux lacs, et il est encaissé entre deux montagnes assez esthétiques. Au demeurant il fait beau... Le moment est choisi pour accrocher nos drapeaux à prière, près des éléments nous dit Namgyal.

Belle ambiance au Chitul La 

Nous amorçons notre resescente, qui ne se fait pas tout de suite car il faut longer un lac pendant pas mal de temps. En fait, nous restons un bon moment au dessus de 5000m, et on sent un léger épuisement quand même. On aperçoit un troupeau de Nayas au loin, la faune et la flore sont globalement bien présentes, même à 5000m d'altitude, avec aussi des gentianes et des edelweiss.

On croirait pas mais nous sommes à 5000m !  

Il faut ensuite suivre la rivière qui s'enfonce et descend rapidement dans quelques gorges. Nous apercevons les Nayas au dessus de nous. Nous sommes aussi accompagnés de nomades, qui cherchent leurs yacks et qui font l'aller retour depuis Yama Do en une seule journée... Cette descente se poursuit jusqu'à atteindre des camps nomades, ou nous nous arrêtons à nouveau pour prendre le thé au beurre de yack, en compagnie des yackmen qui nous ont rattrapé.

Descente vers les camps nomades 

Nous avons ensuite perdu notre petit chien Tchang, qui a sans doute été effrayé par les nombreux molosses qui aboient à côté des tentes nomades. Benjamin remontera en courant au cours de l'après-midi pour le chercher mais c'est peine perdue !

Une de nos seules photos de Tchang 

La suite de la randonnée est assez longue, nous suivons un vallon, rejoint par d'autres, qui s'enfonce progressivement vers une forêt. La rivière grossit et nous arrivons à un campement, ou nous nous reposons agréablement, cela a été sans doute la plus longue journée du trek, et surtout le soleil est épuisant...

La soirée sera un peu différente : même s'il pleut à nouveau, Namgyal sera moins bavard mais se consacrera à l'allumage d'un gigantesque feu. Personne n'y a cru avec cette humidité, mais après avoir bien bataillé pour faire de l'air sur les braises, c'est parti. Une belle leçon... Nous profitons de ce moment avec les autres groupes, l'occasion de faire connaissance aussi. Comme de tradition, les tibetaines chantent et nous demandent de chanter nos chants traditionnels, mais nous sommes bien souvent incapables de trouver des chansons simples faute de connaître les paroles...

Joli feu allumé dans l'humidité 
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Soyons clairs, la marche qui nous conduit jusqu'à la route vers Samye ce jour là est très courte et ne dure qu'une heure / une heure et demi. On n'est déjà plus dans le paysage de montagne des deux ou trois derniers jours. Mais nous arrivons dans des villages ou la civilisation reprend progressivement sa place (chemin carrossable, puis fils électriques...). Et il faut déjà dire au revoir à notre cuisinier et notre yackmen.

Retour à la civilisation 

Notre chauffeur est là dés le village de Changtang, bien avant Samye. Pour autant, la suite ne présente qu'un intérêt limité pour la marche car une route est en construction, et le paysage massacré.

Au dessus du village se trouve un joli ermitage qui vaut vraiment le coup. Il faut faire 200m et près de 1000 marches. Seul le guide et Benjamin y monteront, Aline étant prise d'un petit mal de tête. Cet ermitage de Yamalung est un lieu de méditation de Guru Rimpoche, le fondateur de Samye.

Montée à l'ermitage début Yamalung 

L'ermitage est superbe et permet de renouer avec le bouddhisme, même si ce Trek fut rempli d'enseignements spirituels grace a Namgyal. Accroché à flanc de montagne, on y trouve une petite salle d'assemblée où des nonnes prient. L'occasion pour Namgyal d'inviter Benjamin a s'asseoir pour méditer, sous le regard de Guru Rimpoche, ou Padmasambava.

C'est une belle fin pour ce trek, commencé à Ganden, monastère des Gelugkpa (ou "les vertueux"), et fini dans des lieux nyinhmapa, un ordre marqué par davantage de spiritualité et moins d'enseignement.

Visite de l'ermitage de Yamalung, sous le regard imposant de Guru Rimpoche 

Après avoir reçu de l'eau sacrée, nous redescendons et remontons dans la voiture, pour une heure de route vers Samye, observant circonspects les travaux de construction de la grosse route. Samye garde malgré tout une taille humaine pour l'instant, et l'après midi nous monterons sur l'Hepo Ri, colline sacrée, pour admirer la vue sur le monastère et le Yarlung Tsangpo au loin.

Si le trek a duré 5 jours, alors que les pèlerins le parcourent en 1 jour et demi, ce fut une belle expérience naturelle et culturelle. Cela vaut le coup de prendre le temps d'aller voir les nomades, les ermitages, et de profiter des lieux tout simplement.

C'est aussi un beau voyage car on change de dimension : de la vallée de Lhassa à celle du Yarlung Tsangpo, on se perd au milieu des alpages nomades, toujours dans la verdure mais à la limite de la mineralité... Surtout sur le plan spirituel : habitués depuis le début à une approche très doctrinaire du bouddhiste (courant Gelugkpa), ce trek permet une appréhension plus intérieure et spirituelle, dans les montagnes d'abord détachés des monastères, et ensuite en arrivant à Samye, lieu de l'école Nyingmapa, moins tournée vers l'enseignement et davantage vers la pratique.

Ce faisant, on avait bien envie de continuer à marcher, limite étions nous prêts à demander au guide de changer le programme pour faire un autre trek !

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Si nous étions quelque peu amers à notre retour de Shigatse, les 5 jours qui viennent de s'écouler ont été merveilleux. Comme nous l'espérions, notre trek / pèlerinage entre les monastères de Ganden et de Samyé nous a offert liberté, spiritualité et sérénité.

D'abord, changement de guide au premier jour. Si nous continuons avec un guide anglophone, le nouveau est tibétain, et son anglais est compréhensible. Mais surtout, nous avons trouvé le guide parfait : il marche beaucoup plus, nous faisons les khoras, il a des explications fort intéressantes sur le bouddhisme, qu'il pratique, et nous fait vivre des expériences authentiques.

Ensuite, le monastère de Ganden est un écrin de spiritualité et de beauté. Même si le ciel n'était pas beau quand nous y sommes allés, ce monastère perché a 4400m est superbe. Il a été restauré après la révolution culturelle car les gardes rouges s'y sont fortement attaqués. Nous avons commencé par La Khora, passant par un petit ermitage où Tsongkhapa, fondateur du monastère et de l'ordre des Gelukpa (bonnets jaunes) a médité. Puis nous avons visité le monastère, très riche, où nous avons pris plaisir à reconnaître les différentes figures et à en découvrir d'autres.

Il était temps de démarrer le trek, mais nous ne sommes pas partis de Ganden directement.. Nous avons certes manqué une partie de cet itinéraire de pèlerinage mais pour la bonne cause : après un déjeuner dans un restaurant "local" que nous payons deux fois moins cher que d'habitude, et où nous partageons la table avec notre guide et notre chauffeur (enfin), nous passons chercher notre cuisinier qui nous invite gentiment chez lui, l'occasion de découvrir l'intérieur d'une maison tibétaine. Nous installons le campement à Trubshi village puis nous partons crapahuter au dessus, histoire de se défouler un peu...

Nous reviendrons en detail sur chacune des étapes qui ont suivi à partir du lendemain prochainement. Pour l'instant quelques mots et images pour résumer ce trek :

  • Altitude : notre nuit au camp de base de l'Everest nous a permis d'être bien acclimatés puisque nous n'avons pas eu de problèmes. Bien sûr, nous avons dû avancer lentement et nous étions essoufflés et un peu fatigués en passant nos deux cols a 5200m, le Chuga La et le Chitul La. Mais nous arrivions bien avant les deux autres groupes présents sur l'itinéraire, parfois avant nos yaks portant les affaires. Et Benjamin a pu profitera du beau temps de la fin de journée pour pousser un peu plus haut sur des cimes autour du campement, atteignant presque 5600m le mardi. Nous avons passé en tout plus de 24h au dessus de 5000m.
  • Authenticité : pendant cet itinéraire, nous avons croisé de nombreuses tentes nomades. Nous avons eu la chance d'être invités à plusieurs reprises à déguster du thé au beurre de yaks sous les tentes, et à assister à la préparation du beurre et du fromage. L'occasion aussi de découvrir leur mode de vie.
  • Liberté : pas de Checkpoints, nos passeports sont restés au fond du Sac pendant cinq jours et ça fait du bien. Et le droit d'aller où l'on voulait sur La Montagne : pas de limites, pas de barrières !
  • Spiritualité : ce trek est en fait un pèlerinage que les tibétains effectuent en 1,5 jours, entre deux Grands monastères du Tibet. Nous aurions pu le faire en 3 jours, mais nous avons pris le temps d'observer, de contempler, de réfléchir, d'échanger de longues heures avec notre guide, sous la tente Mess, sur le bouddhisme. Nous avons accroché notre drapeau à prière en haut du Chitul La, où tous les éléments sont présents, assurant la diffusion de son mantras qui y sont inscrits (pour un tibétain, c'est davantage la présence des éléments qui compte que l'altitude). Aujourd'hui, Benjamin a fini le trek au temple de Yimaling, moyennant l'ascension de quelques 1000 marches et 200m de dénivelé. Ce fut l'occasion d'assister à la prière de nonnes, dans une salle accolée a une grotte de méditation de Guru Rimpoche, le lama qui répandit le bouddhisme au Tibet.
  • Nature : les paysages sont magnifiques. Nous marchions au milieu des gentianes et des edelweiss, et nous avons croisé des yaks à chaque pas. Les marmottes étaient aussi présentes. On a même pu apercevoir des "Naya", sorte de mélange entre une gazelle et un chamois. Et un petit chien sauvage nous a adopté le long de l'itinéraire, très mignon, qui n'aboyait jamais.
  • Fraîcheur : nous n'avons pas eu trop froid, malgré le temps qui était assez nuageux, voire pluvieux ou orageux quelque fois. Nous avons fréquemment démarré nos étapes dans la purée de pois, a l'exception du mercredi. Si c'est moins bien pour les photos, nous avons en réalité été chanceux car le soleil tape très fort au Tibet quand il se dévoile.
  • Gastronomie : notre cuisinier était aux petits soins, presque trop, alors qu'il faut en principe éviter de trop manger, et bien boire, pour faciliter l'acclimatation. Si nous n'avons jamais fini tous les plats qu'il nous a préparés, c'était excellent, même si on commence à saturer de la viande de yak.

Autant vous dire que l'arrivée à Samyé, alors qu'une route est en construction dans la vallée où nous arrivions, a été difficile ! A nouveau, il faut faire attention aux passeports, on ne peut pas aller n'importe où. À nouveau, il faut monter dans la voiture (notre chauffeur est venu nous chercher pour écourter la dernière partie de l'itineraire, qui ne présente aucun intérêt...

Si nous avions su que l'acclimatation se passerait si bien, nous aurions programmé un deuxième trek pour cette dernière semaine. Mais il est difficile de changer l'itinéraire prévu... Ce n'est pas faute d'y avoir pensé.

Heureusement, Samye ne présente pas (encore) le caractère d'une grosse ville. Elle est empreinte de spiritualité, autour de son monastère circulaire, l'un des premiers du Tibet. Nous sommes montés sur une colline sacrée, l'Hepo Ri, pour l'admirer d'en haut. Nous y consacrerons un billet spécifique après avoir visité le monastère.

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Ca matin, afin d'égayer une journée pluvieuse, nous avons été re-baptisés sous des noms tibétains par notre guide. Pour Benjamin c'est Tashi (ça renvoie au Bouddha Sakyamuni) et pour Aline c'est Drölma (qui renvoie à la divinité Tara).

Nous avons pris plaisir à visiter Samye, hier après-midi et ce matin.

Hier, nous sommes montés sur l'Hepo Ri, colline sacrée posée au milieu de la vallée du Yarlung Tsampo. Elle offre une vue panoramique sur cette vallée, où se mêlent le Brahmapoutre gorgé d'eau à cette époque, et des dunes de sable. Surtout, elle permet d'observer le monastère de Samye d'en haut, qui adope la forme caractéristique d'un mandala. Aux alentours, très peu de maisons ou bâtiment mais cela ne devrait pas durer, il y a beaucoup de travaux aux alentours.

Hepo Ri et vue du sommet 

Ce fut l'occasion pour notre guide de nous narrer l'histoire de ce monastère, construit au VIIIeme siècle grace a Guru Rimpoche, Maître bouddhiste venu d'Inde. Un peu d'ésotérisme nous avait manqué : on est là dans le tantrisme, la magie, le Maître indien ayant vaincu les demons présents dans cette vallée, pour construire ce monastère. Des contes et légendes qui font un peu penser aux chevaliers de la table ronde, et auxquels nous pourrons nous intéresser en rentrant.

Cette colline est vraiment magnifique et on n'en a presque pas assez profité. Nous ne sommes montés qu'une fois car il faut y aller avec son guide... Le soir, après avoir partagé un repas avec le guide et notre chauffeur, où il fut notamment question de la roue de la vie et de la réincarnation, nous avons fait la Khora du monastère en compagnie de quelques pèlerins.

Ce matin, Benjamin a pu se lever en avance et parcourir le monastère, seule la partie centrale de celui-ci requérant ticket et permis. 3 tours et quelques chapelles en compagnie des pèlerins, au calme, c'est agréable de sentir ce lieu se réveiller. C'est une pluie diluvienne qui est néanmoins venu y mettre fin 😛.

Apres le petit déjeuner, nous sommes allés visiter la partie centrale et principale de ce monastère, dénommée l'Ütse. On commence à être habitués et il faut dire un peu saturés des différentes statues, pour la plupart reconstruits car le monastère a subi de nombreux sévices pendant la révolution culturelle. On a beaucoup vu Guru Rimpoche, figure locale, ainsi que des peintures murales originales, assez abîmées mais néanmoins intéressantes. Une belle statue du bouddhissatva de la compassion également avec ses 1000 mains et 1000 yeux !

L'originalité de cet édifice réside dans la superposition de 3 styles architecturaux : à chaque étage, un bouddha en compagnie des différents boddhisattvas, mais un premier étage en style tibétain, un second en style chinois et un troisième en style népalais. Assez impressionnant et appréciable.

L´Utse, édifice central du monastère, est très agréable à visiter compte tenu de la diversité architecturale et il offre des vues ...

Le guide nous a également narré sa propre histoire puisqu'il a été moine dans ce monastère, jouant visiblement le rôle du cancre.

Par la suite, nous avons parcouru le monastère, beaucoup plus aéré que les précédents, avec de nombreux espaces verts. Nous avons visité deux des quatre chortens (le vert et le noir) situés aux quatre points cardinaux, conformément à la forme du Mandala.

Nous avons fini par une chapelle ou de nombreux pèlerins priaient et où les tambours retentissaient. Très intéressant et captivant sauf que nous avons fini par le début, cette chapelle renfermant les divinités protectrices, traditionnellement installées à l'entrée des édifices religieux.

Un monastère très vert !  

Voilà, c'était notre dernier monastère pour ce voyage. On en a beaucoup visité mais à choisir nous ne saurions pas lequel éliminer, ils sont inhérents à la culture tibetaine, imprégnés de religion. Pour varier, il semble néanmoins opportun de visiter quelques ermitages et de randonner a l'occasion.

Nous sommes partis en direction de Tsetang. Après 1h30 de voiture nous offrant une vue splendide sur le Yarlung Tsanpo, nous sommes arrivés dans cette ville très sinisée, qui affiche ostensiblement la puissance militaire chinoise, des casernes étant disposées sur un kilomètre sur le côté de droit de La route. Cette ville est néanmoins une étape nécessaire pour visiter la vallée du Yarlung, qui constituerait le berceau de la civilisation tibétaine. Notre guide nous a obtenu un permis pour visiter le Yulbulakang, forteresse édifiée sur un promontoire rocheux. Il nous a permis de nous dégourdir les jambes, en y montant sans mule, puis en s'amusant un peu sur la crête qui le surplombe. La vue sur la vallée du Yarlung, très fertile, y est splendide. Le Yumbulakang permet également de découvrir un peu plus l'histoire des rois tibétains.

Le Yumbulakang permet de randonnée un peu notamment sur une petite crête couverte de drapeaux à prière  

Néanmoins, cet édifice, de même que la vallée du Yarlung, présente un caractère très touristique, nous a-t-il semblé. Certes, les touristes étaient nombreux dans les monastères, temples ou Palais précédemment visités ; mais ils cohabitaient avec des pèlerins et/ou des moines, ce qui permet de conserver une certaines authenticité. Au Yumbulakang, les tibétains étaient à l'inverse peu nombreux...

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Dimanche et lundi, le lac Namtso a été une belle surprise ! Pourtant, nous étions partis et arrivés sceptiques.

Un peu atteints par le mal du pays à notre retour à Lhassa samedi, nous redoutions de traverser de trop nombreux Checkpoints durant ces 6 heures de route. Si la route ne fut pas très agréable, marquée par des radars tronçons a 30km/h tout le long, elle fut moins désagréable que celle du camp de base de l'Everest. Tout au plus un ou deux contrôles de police.

Nous sommes néanmoins arrivés sous une pluie battante et en plein orage, frigorifiés (le lac est plus au Nord et le paysage plus dégagé donc il fait plus froid). Au demeurant, la chambre qui nous était réservée était très peu accueillante, sans parler du personnel, chinois, carrément impoli et désagréable.

Mais passons ces points négatifs car une fois l'orage passé, le Namtso nous a offert une ribambelle de couleurs et nos émotions ont varié avec lui ! Pour l'admirer, nous dormions à Tashi D'or, ancienne île constituée de deux ou trois cimes devenue, avec le réchauffement climatique, une presqu'île.

Alors que le temps tourne au clair, nous partons faire le tour de la presqu'île avec le guide et le chauffeur. De nombreux petits monastères et grottes de méditation sont disposés dans la roche le long de cette Khora. Les chinois ne les visitent pas et préfèrent aller sur les rives du lac, parfois pour des photos de mariage, nous nous éloignons de ce tourisme de masse... De ce fait, nos visites sont assez intimes, notre guide prenant le temps d'échanger avec les moines présents et de nous partager les réflexions.

Khora de Tashi Dor, monastères et grottes avec nos guides et chauffeurs 

Aline ressentira avec joie le calme et la tranquillité de ce lieu, quasiment marin car il s'agit d'un lac salé, le plus haut du monde (4700m). Paradoxalement, Benjamin était plus triste et mélancolique à ce moment : sous les quelques nuages encore présents, le lac est noir, et, en l'absence de vent, statique, presque mort. Personne ne s'y baigne puisqu'il est sacré (il doit être froid aussi). Son niveau a baissé et ses rives se sont éloignées des monastères... Alors, c'est toute une symbolique de fin et de retrait de la culture tibétaine, dont on s'éloigne, que lui inspire ce lieu... Qui se mêle aussi avec le fait que ce voyage vient progressivement à sa fin.

Le tour prend une heure et c'est l'occasion de passer de bons moments avec notre guide et notre chauffeur (ce dernier se joint désormais à nous et profite des explications du guide).

Une fois ce tour terminé, Benjamin décide de monter au sommet de la presqu'île admirer la vue. A la faveur de cette petite grimpette, a l'altitude du Mont-Blanc, l'aspect du lac change, de même que l'impression qu'il génère. Le ciel se découvre aussi. Décidément, impossible de l'empêcher de prendre de la hauteur pour ressentir du positif !

Nous sommes remontés pour le coucher de soleil, Aline étant initialement restée dans cette chambre moins accueillante que l'environnement qui l'entoure. Les teintes furent notamment un peu orangées mais surtout violettes. La vue sur le Nyangchen Tanghla, une chaîne de Montagne enneigée juste en face, s'est aussi devoilee.

Vue depuis le sommet de Tashi Dor au soleil couchant  

Le lendemain, lever de soleil également splendide a 7h, cette fois au bord de l'eau, et vue sur les Montagnes. Ce sera sans doute le plus beau paysage de ce Voyage, on admire l'immensité du plateau tibétain ! Le lac s'est aussi animé, a la faveur du vent, ce qui a plutot plu à Benjamin, qui le préfère ainsi... vivant.

Lever de soleil et matinée à Namtso 

Globalement, le Namtso est un superbe endroit, mais un bémol particulier peut être souligné : les hébergements tenus par les chinois sont très inconfortables et inhospitaliers. Bref, on n'y passerait pas une nuit de plus... Sauf à envisager de camper plus loin, sur plusieurs jours, comme le suggère notre guide.

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Nous avons passé nos dernières heures à Lhassa, en plein festival du Shoton (c'est à dire le festival du "Yahourt"), mardi.

Ce festival célèbre l'unification des différentes communautés tibetaines par le cinquième Dalaï Lama au XVI ème siècle. Voulant faire une offrande aux dieux, mais refusant de verser le sang d'un animal à cette occasion, le 5eme Dalai Lama choisit d'organiser l'offrande de Yahourt aux dieux. On remarquera au passage que le bouddhisme tibétain est l'une des seules religions à ne pas pratiquer d'offrandes rituelles avec le sang des animaux... plutot sain.

Depuis, les tibétains dévoilent un immense Thangka (tissu comportant une illustration de bouddha) au monastère de Drepung le lundi avant de se réunir toute la semaine dans les jardins du Palais d'été du Dalai Lama, pour un Pic Nic, et écouter gratuitement des concerts d'opéra tibétain.

Ce fut donc l'occasion pour nous de découvrir le palais d'été, ou "Norbulingka". Belle découverte car cet immense jardin est en fait composé de plusieurs petits bâtiments : les Palais sont plutot des résidences, donnant accès à des petites maisons de méditation places au milieu de l'eau. Le lieu est très vert. Nous visitons notamment le Palais d'été du quatorzième Dalaï Lama, d'où il a fui pour gagner l'Inde.

Dans les jardins du Palais d'été  

Une fois cette visite terminée, nous avons assisté aux festivités : les jardins étaient remplis de tibétains venus pique niquer. Ils étaient néanmoins moins nombreux que l'année précédente, les autorités chinoises ayant tenté de faire passer le message que ce serait interdit cette année, par le biais des nombreux fonctionnaires, enseignants y compris. Oui, les chinois sont suspicieux vis à vis de tout rassemblement des tibétains, surtout a l'occasion d'une célébration politique. "Tibetans are auspicious whereas chinese are suspicions"....

Pique nique pour les festivités du Shotün 

Jamais vu le parc de la tete d'or comme cela. Au centre, des concerts d'opéra tibétain : loin de constituer un spectacle élitiste (du moins pour cette occasion), cet art mêle costumes traditionnels, chants, et scènes de la vie quotidienne voire burlesque. Compte tenu du monde présent, seul Benjamin a vraiment pu voir, sinon il fallait jouer des coudes assez violemment !

Opéra pendant le festival du Shotün 

Notre après-midi fut l'occasion d'acheter quelques souvenirs, en compagnie de notre guide, et de visiter quelques maisons de thé, ou restaurants locaux. Nous avons notamment découvert une nonnerie, a l'écart du Barkhor, engagée sur le plan politique et vendant quelques produits bien sympathiques.

Derniers tours sur le Barkhor le soir pour Benjamin, plein d'émotion. Le matin, nous recevons une nouvelle écharpe blanche d'au revoir de la part des gérants de l'hôtel House Of Shambhala, qui furent très sympathiques. Nous les recommandons chaudement, cet hôtel situé au cœur de la vieille ville tibétaine est à la fois confortable et authentique, et dispose d'un rooftop avec vue sur Lhassa.

Derniers tours dans la vieille ville de Lhassa et sur le Bharkhor 

Le mercredi matin, nous mettrons une heure pour atteindre l'aéroport, situé assez loin de Lhassa dans la vallée du Brahmapoutre. Dans l'aéroport, les annonces sont incessantes, c'est tres bruyant. Tous les avions auront entre 2h30 et 4h de retard, en ce compris le notre, les chinois ayant choisi cette semaine de festivité pour faire des exercices militaires avec leurs avions. Les chinois ne disent rien, et préfèrent faire des photos de leurs avions de chasse au décollage.

Drôle de "puissance" militaire tout de même puisque sa seule réalisation au cours des cent dernières années est d'avoir envahi un pays dont le peuple ne s'est pas défendu par les armes...

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Nous sommes arrivés le mercredi soir à Chengdu en fin d'après midi, avec un peu de retard ce qui nous empêchera de visiter beaucoup cette ville.

Tout de même, le trajet en voiture entre l'aéroport et cette ville moderne et détendue nous a fait du bien : nous ne passons aucun check-point. Par ailleurs, et paradoxalement, à l'inverse du Tibet, on ne voit pas un drapeau chinois sur les toits de chaque maison... Le soir nous ferons une petite balade agréable à People's parc, nous permettant de voir les chinois faire leur exercice du soir : petites danses, Taï Chi... Nous n'avons pas pu déguster le Mapo Dofu (spécialité de Chengdu au Tofu) ne trouvant pas le restaurant recommandé par notre guide en raison de travaux. Finalement, le restaurant de l'hôtel nous réservera des plats chinois assez cher, qui ne plairons guère à nos estomacs, en particulier celui de Benjamin forcé de le rendre.

Balade au soir dans Chengdu 

Le lendemain, nous nous sommes levés tôt, et faisons l'impasse sur le petit déjeuner de l'hôtel pour être à 7h30 au centre de recherche sur les pandas. Il élève 120 pandas géants et 70 pandas roux. Les parents du petit panda né au zoo de Beauval au début du mois d'août viennent de ce centre.

Nous avons trouvé un taxi facilement à cette heure. Cette précipitation matinale valait le coup, même si nous commençons notre visite sous la pluie. Si la plupart des visiteurs prennent une sorte de "pandamobile", cela vaut le coup de marcher... Très rapidement, nous apercevons plusieurs pandas, d'abord des jeunes qui s'amusent, puis un panda adulte assis plantureusement à manger du bambou. Il y a quelques attroupements aux endroits où on les voit mais globalement pas trop de monde à cette heure ci, le parc reste calme.

Nous avons également visité les pandas roux, plus timides, et croisé quelques grues ou paons.

À partir de 9h, la foule commence à arriver et les lieux deviennent bruyants, a la faveur du vol de quelques hélicoptères. Les pandas dorment désormais qu'ils ont mangé ; on se demande comment ils font avec cette foule qui crie !

Quelques pandas dans le centre  

Bref, la visite est intéressante et plaisante au petit matin. On s'attendait à plus de liberté pour les animaux mais ils sont parqués dans des enclos assez modestes. On est pas loin du zoo... Nous sommes aussi passés près d'une vitre au travers de laquelle on voyait un panda dormir dans sa résidence nocturne, relativement petite. Bon. Tout le monde se presse à la "nurserie" qui consiste en une vitre a travers laquelle on a le droit de voir un bébé panda. Captivant certes mais qu'en pensent les pandas ? L'effet zoo devient d'autant plus visible que le monde afflue et se presse pour voir, photographier les animaux...

Des citations d'hommes célèbres sur les animaux étaient disposées le long du parcours, notamment celle de Mahatma Gandhi : "La grandeur et le progrès d'une nation se mesurent à la manière dont sont traités ses animaux"... Autant vous dire que nous sommes restés circonspects quand aux pratiques de ce centre, et ce qu'on a vu.

Reconnaissons que si l'on se fie au résultat, ce centre semble réussir à préserver cette espèce menacée. Malheureusement, la rentabilité économique semble commander d'exposer les animaux à la vue d'une foule nombreuse comme dans un zoo.

Nous sommes par la suite retournés dans le temple Wenshu, et dans sa maison de thé à la nourriture végétarienne et plutôt saine. Nous étions trop fatigués pour visiter d'autres endroits dans Chengdu l'après midi...

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Nous pensions que nous n'avions pas eu de chance à l'aller, et que nous avions cumulé à ce moment là tous les ennuis possibles, le retour pouvant alors bien se passer.

C'est tout de même avec une certaine angoisse que nous parcourons l'aéroport de Chendgu jeudi soir, notre départ étant prévu à 20h35 pour Pékin, où nous sommes censés arriver à 23h15 pour une correspondance vers Manchester à 01h45. Première surprise : Hainan Airlines, qui gère les deux vols, ne prend pourtant pas en charge le transfert des bagages. Il nous faudra donc les récupérer et nous réenregistrer à Pékin.

Dans la salle d'embarquement, l'attente est longue. Tellement longue qu'à 20h35, l'écran affiche toujours un départ à 20h35, et nous n'avons pas commencé à embarquer. Les chinois, bien disciplinés, font tous la queue pour monter dans l'avion, mais mis à part quelques personnes demandant des nouvelles, personne ne bronche. Nous finissons par monter dans l'avion vers 21h, mais nous attendrons quasiment une heure pour décoller, très longue et éprouvante pour nos nerfs.

Nous aurons à peu près 45 minutes pour gérer la correspondance, ce qui semble impossible. Alors, nous demandons aux hôtesses si elles pourront nous placer devant à la fin du vol pour descendre plus vite. On nous dit oui, puis finalement qu'il n'y a pas de places, mais que le staff sera là pour nous aider. Bien évidemment il n'en sera rien.

A Pékin, c'est parti pour un sprint d'anthologie... Benjamin attend les bagages, Aline court entre les deux terminaux (voyons si l'altitude à fait d'elle une Emelie Forseberg) pour aller tout de suite à l'embarquement au moins pour commencer le check-in. Nous sommes finalement rassurés, le vol pour Manchester ne partira qu'à 4 heures. Mais la compagnie Hainan Airlines veut nous garder... Motif pris que nous allons louper la correspondance pour Lyon, et qu'il faudrait attendre un vol pour Bruxelles, un jour après, qui nous permettra d'aller ensuite à Lyon. Hors de question. Tout ce que la compagnie Hainan Airlines a fait dans ce voyage a foiré, nous n'arrivons pas à nous comprendre, et nous sommes pressés d'atterrir sur le sol européen pour nous débarrasser de ces foutus chinois. Bref, il nous tarde d'avoir en face de nous des gens qui parlent anglais, qui ne crachent pas à tous les coins de rue, avec lesquels on pourra se débrouiller.

Nous finissons par avoir nos billets pour Manchester, il faut dire que nous avons été bien aidés par une franco-chinoise, passagère également, qui parle mandarin, mais nous avoue elle même avoir du mal à les comprendre. Mais c'était oublier une étape, celle du passage de la frontière chinoise, où l'on nous avait dit, à l'entrée, que la sortie du territoire ne poserait pas problème... Et bien non, les chinois choisissent ce moment, alors que le vol est en partance dans 1h30, pour procéder aux mêmes vérifications pour le passeport d'Aline.

Nous pouvons vous le dire maintenant que nous sommes rentrés : le passeport d'Aline a été déclaré volé en 2012 (nous ignorions comment), et n'est donc plus valide. Ce fait est signalé à toutes les douanes du monde, en principe, par Interpol. Mais cela ne nous avait pas empêché de voyager au Maroc en 2016, personne n'a rien vu... Les chinois ne l'ont pas détecté non plus à la délivrance du visa. Mais là, à chaque passage de frontière depuis Bruxelles, cela pose problème.

On comprend rapidement que la douane chinoise n'a gardé aucune trace du passage de Aline lors de l'entrée sur le territoire. Cette fois, nous voyons néanmoins ce qu'ils font... Visiblement un peu perdu, le douanier regarde une procédure éditée par Interpol, puis scanne le passeport, ce qui lui prend... 10 minutes. Par la suite, Benjamin hallucine quand il voit le douanier ouvrir le logiciel Paint, pour faire des traits sur l'image du passeport. Sans doute une technique de vérification de la validité, mais cela fait tout de même un peu amateur.

Benjamin comprend rapidement qu'il n'y a pas plus de solution qu'à l'aller, à part les presser pour qu'on puisse avoir notre vol... Il leur montre l'heure d'embarquement, dans 15 minutes. Pendant ce temps, Aline commence clairement à nous voir rester ici, et pique une crise d'angoisse. Les chinois finissent par nous libérer pile à l'air de l'embarquement en nous disant de ne pas revenir ici avec ce passeport. Merci... Nous piquons un nouveau sprint pour monter dans l'avion, et c'est bon, nous décollons pour Manchester dans un avion plutôt confortable par rapports aux précédents de la compagnie.

L'atterrissage sur le sol européen fait figure de soulagement. Nous sommes dans un pays libre. Nous avons à nouveau accès à l'internet sans restrictions, et aux réseaux sociaux. A la sortie de l'avion, nous sommes accueilli par un agent anglais de la compagnie Hainan, très attentionné, qui nous informe quant aux correspondances. La prochaine pour Lyon est le lendemain à 18h...

Le passage de la douane est à la fois plus radical et plus agréable. Le douanier anglais nous explique clairement ce qui se passe quant à la déclaration de vol du passeport (ça change...). Il se renseigne sur notre voyage. Il part dans son bureau et met 10 minutes à revenir pour nous expliquer que ses instructions sont de conserver le passeport pour le remettre aux autorités françaises, de nous donner une photocopie tamponnée par la douane, et de voir avec la compagnie si elle accepte de nous prendre avec ce document. Sinon, il faudra demander un document provisoire de voyage aux autorités française, ce qui peut prendre un certain temps...

La solution est bien plus ferme, on pourrait presque dire stricte, mais en même temps rassurante quant aux compétences des douanes dans un contexte marqué par la menace terroriste. Bref, nous avons continué de nous inquiéter pendant l'heure qui a suivi, avant que la compagnie nous dire qu'on pouvait embarquer avec ce document dans la mesure où nous rentrions chez nous.

Cela n'était néanmoins pas fini... La compagnie Hainan devait en effet gérer notre retour sur Lyon. Les passagers français qui étaient avec nous parviennent à prendre les deux dernières places pour Paris le matin (une maman et son enfant). On nous donne le choix entre Toulouse aujourd'hui, et Lyon demain à 18h... Nous optons pour Toulouse et achetons notre billet de train. La fin de l'embarquement est dans 1h30. Le très sympathique agent anglais de Hainan appelle pour faire le check-in et nous dit que ce sera ok. Il attend avec nous mais on ne voit rien venir... Il tente de rappeler à de multiples reprises mais la compagnie (ou l'agent certainement situé à Pékin chargé de s'en occuper), ne fait rien... ça tombe à l'eau. Encore un coup de la Hainan, l'agent anglais semblant par ailleurs vraiment désolé.

On finit par se dire que c'est un coup des chinois pour nous punir d'être allés au Tibet. En attendant, on nous paie cette fois une nuit à l'hôtel Clayton, à côté de l'aéroport, ainsi que les repas. Nous ne sommes pas allés visiter Manchester, l'essentiel du temps ayant été consacré à du repos dans cet hôtel très confortable, et au personnel très accueillant.

A 15h, le lendemain, nous nous présentons au check-in avec de l'avance... On ne sait jamais. Rapidement, on comprend qu'il y a un nouveau problème. Au bout d'une heure, on nous explique que la Hainan Airlines n'a effectué qu'une pré-réservation, qu'elle n'a pas payé, pour Benjamin... Et pour Aline, eh bien rien n'a été réservé... Ils ne sont pas ailleurs pas joignables. Coup de grâce final. Par chance, grâce à l'habileté de l'hôtesse de Flybe, nous parvenons à avoir deux places (c'est un coup de chance car il ne restait qu'une seule place en plus de celle vaguement réservé pour Benjamin...), que nous devons néanmoins payer nous-mêmes. Si on avait su, on aurait pu prendre un vol chez Air France ou tout autre vol hier (le vol initial étant chez Flybe, Hainan ne pouvait réserver de vol que chez eux).

Nous embarquons dans un avion assez rudimentaire, après le passage du contrôle des bagages, très méticuleux, et rassurant, chez les anglais. Nous atterrissons à 22 heures à Lyon, enfin, après un joli coucher de soleil admiré depuis l'avion.

Le passage de la douane française confirme finalement ce que nous pensions. Aline n'avait qu'une photocopie, et a exposé toutes ses péripéties une fois à l'agent. Il n'a pas compris. Elle a répété l'histoire, mais au milieu, il lui a dit "Aller, c'est bon, passez". Bref, ça nous a bien arrangé, mais on trouve quand même ça très limite du point de vue du contrôle de nos frontières nationales...

J'imagine qu'à la lecture de ces lignes, vous devez vous dire : "les pauvres", "c'était leur voyage de noces" ou "ils n'avaient pas mérité toutes ces emmerdes" (ou si). Ou alors "ça va les refroidir de partir si loin". A vrai dire, même si ce furent des moments angoissants, ces péripéties ont pimenté notre voyage de noces et les avoir affrontées - et résolues - renforce notre tempérament aventurier. On a déjà bien envie de repartir, notamment Benjamin, qui pense déjà aux cimes du Népal, du Pérou ou du Canada.

Alors oui, ce sera avec des passeports valides ! Et nous ferons aussi plus attention aux vols que nous réservons. Mais pour une aventure avec quelques péripéties, histoire de repartir avec plein de souvenirs !

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Nous avions lu que le Tibet n'était pas du tout une destination "gastronomique". Il est vrai que les plats tibétains n'offrent guère de diversité, et qu'ils ne sont pas non plus extrêmement raffinés. Pour autant, leur façon de se nourrir est marquée par une certaine simplicité.

Commençons par le petit déjeuner. Nous avons fréquemment eu le choix de nombreux mets dans les différents hôtels où nous étions, et même pendant le trek, le cuisinier essayait de nous proposer des plats occidentaux (omelettes, tartines, café). Mais la plupart des tibétains se nourrissent de Tsampa, de la farine d'orge grillée que l'on mélange avec du thé au beurre de yak, et, le cas échéant, du sucre. On peut en ajouter plus ou moins, pour aboutir à une sorte de crème, ou alors à de petites boules de farine, comme le faisait notre guide. Benjamin a plutôt apprécié, en mangeant d'ailleurs à chaque petit déjeuner, plutôt en format crème, en ramenant même un paquet.

A noter que lorsque les tibétains partent en pèlerinage, ou en exil, pour plusieurs jours, ils voyagent avec leur tsampa, qui constituera leur nourriture pour plusieurs jours.

Le déjeuner et le dîner se ressemblaient pour nous. On notera néanmoins que les choses sont moins "séquencées" pour les tibétains, qui semblaient accorder guère d'importance au repas du midi. Il est fréquent qu'ils ne mangent qu'une seule fois, au milieu de l'après-midi, voire le soir. Au point que pendant notre trek, les paniers repas étaient pour le moins léger, si ce n'est quelques biscuits à grignoter et éventuellement quelques œufs et fruits.

La base de la plupart des plats est bien sûr le yak. Il est souvent servi en petits morceaux très cuits, format viande bouillie, ce qui peut se comprendre quand on voit la viande sur des étals au milieu de la rue, en dehors de toute chaine du froid. Il se déguste alors en sauce, avec des légumes : Benjamin a notamment apprécié le Shapta, c'est-à-dire du yak cuisiné avec des poivrons. Pendant le trek, notre cuisinier le faisait aussi avec des aubergines, des carottes, du chou... etc. A Lhassa, nous avons visité plusieurs restaurants, mais les meilleurs plats que nous avons goûtés sont ceux de l'hôtel, et ceux du petit restaurant tibetan family kitchen (un peu cher néanmoins).

Un soir nous sommes allés dans un "Steakhouse", restaurant s'il en est pour occidentaux, mais cela nous a permis d'avoir un steak de yak saignant : la viande a vraiment du caractère cuite de cette manière !

D'autres viandes existent : poulet, bœuf, mouton, parfois du porc, mais jamais de poisson : les tibétains n'en mangent pas.

Nous avons aussi beaucoup mangé de nouilles : les chinoises sont plus sûres sur le plan digestif, mais les pâtes tibétaines, fraiches, et plus épaisses, étaient les plus excellentes. Ce que nous avons eu de meilleur, nous l'avons bien souvent trouvé dans des restaurants locaux, amenés par notre guide. On mange alors une soupe de nouilles pour 5 Yuan, soit moins de un euro...

Aline a pour sa part beaucoup apprécié les momos, en particulier les cheese momo, très régressifs et bourratifs. A l'exception seulement du dernier soir, où les cheese momo étaient faits à partir d'un fromage de yak assez fort, ce qui nous a surpris. Une fois rentrés, elle se lance maintenant dans quelques essais adaptés à notre culture culinaire.

Enfin, on a également apprécié les naan, même s'ils ne viennent pas à proprement parler du Tibet.

Nous ne vous parlerons pas des desserts, car il n'y en a pas. Les tibétains n'ont pas cette culture. Le repas se finit par des discussions autour d'un thé, soit du sweet tea, soit du butter tea.

C'est l'autre addiction tibétaine après le yak. Ils en boivent une quantité phénoménale, et nous descendions régulièrement plusieurs thermos au cours de la journée. Le butter tea, que l'on nous décrivait comme mauvais, est assez original, quoiqu'il ne faille pas en abuser ; il a un léger goût salé, qui le rapproche du bouillon. Nous avons plutôt apprécié son caractère réparateur. Nous avons beaucoup apprécié le sweat tea, qui est un thé non seulement sucré mais aussi au lait, d'où cette douceur. C'était notre préféré. Les tibétains boivent également du thé salé, mais les occidentaux ont généralement plus de mal avec ce thé...

Au final, malgré cette absence de diversité, on y trouve son compte avec des plats adaptés à un voyage en altitude où on bouge beaucoup. Bien plus qu'en Chine où, si les plats sont multiples de même que les viandes, on a bien du mal à ne pas avoir une préparation dans une sauce grasse et indigeste.

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Notre voyage a été intense, il y a eu de nombreuses péripéties que vous avez pu suivre avec plus ou moins d'angoisse (on pense à nos parents). Prendre du recul était nécessaire pour en tirer le bilan. Cela a aussi permis de compléter ce blog : notamment en ajoutant un billet pour chaque jour de trek, et en mettant davantage de photos (si d'aventure vous souhaitiez aller les voir).

A bien des égards, le Tibet ce n'était pas des vacances "reposantes" ou "confortables". Bien sûr, parce qu'on y bouge beaucoup. Mais surtout, parce que nous avons été sans arrêt questionnés, interrogés, chamboulés dans nos habitudes, notre compréhension des choses. En tant qu'européens, nous avons ressenti chaque jour de ces trois semaines dans un pays occupé et martyrisé comme une provocation, une invitation à se révolter, à les libérer.

Et pourtant, quelle belle réponse que celle offerte par les tibétains. 50 ans après la révolution culturelle, ce peuple est certes politiquement soumis, mais culturellement, religieusement et spirituellement, plus que jamais vivant. Il semble même résister à l'écrasante "supériorité" du nombre et de l'argent en lui opposant son âme et son humanité. Sans aucune haine. Sans aucune guerre. Sans aucune violence, pas même morale.

Ce n'est pas dans notre culture de révolte, de résistance à l'oppression. Et pourtant c'est admirable.

Ainsi, à Lhassa, on pourrait croire que la présence de millions de chinois aurait anéanti les 50.000 tibétains qui y vivent. Il n'en est rien : au cours des nombreux jours passés au cœur de cette ville, c'est bien la ferveur de ces derniers qui vous marque. L'agitation qui peut régner à côté parait bien superficielle !

Dans les autres villes, notamment Gyantse, Shigatse ou Samye, la présence chinoise est très désagréable quand elle se caractérise par des travaux de construction nombreux, aboutissant à des bâtiments uniformes. Mais les monastères, les temples, les pèlerins qui y prient vous marquent bien plus, vous faisant oublier la laideur de cette croissance économique qui a finalement si peu de consistance...

Dans les montagnes, nous voulions "plus". Plus de marche, plus de kilomètres, plus de dénivelé, plus de photos. A notre habitude finalement. Mais nous avons vu les chinois qui voulaient "encore plus", au point de faire l'aller - retour à l'Everest, sans d'autre objectif que faire une selfie devant une stèle indiquant "Everest Base Camp", la bouteille d’oxygène dans la main...

A cette consommation d'espace et de temps, les tibétains opposent un calme et une sérénité du temps présent, de la méditation. Leur mode de vie, leur religion, leurs habitats, leurs montagnes en sont imprégnés. Les chinois y voient de la paresse. Nous y avons vu une richesse.

Richesse qui s'exprime d'ailleurs dans la reconstruction des monastères : en réalité, beaucoup de ce que nous avons vu résulte de politiques de reconstruction, menées par les ordres religieux, parfois aidés du Bouthan (notamment pour Samye). Malgré les ravages du communisme, la culture tibétaine est toujours vivante, renaissante même !

Grâce à ce que nous avons vu et vécu, aux questionnements qui ont pu être les nôtres pendant ce voyage, nous sentons quelque chose infuser progressivement notre mode de vie.

Il ne s'agit pas de devenir bouddhistes, comme certains ont pu le croire. Mais de regarder nos modes de vie avec davantage de recul. De constater qu'à trop avoir d'impératifs, à trop nous empresser, nous stresser, nous courrons après le temps, sans profiter du présent. Et qu'ainsi, nous devenons mus par beaucoup de superficialité.

Ce voyage au Tibet a aussi changé notre rapport aux religions. Si la laïcité, à laquelle nous sommes très attachés et dont nous parlons souvent ensemble, permet la neutralité de espace public, et ce faisant l'égalité de toutes les religions sur notre sol, en faire une arme de destruction de toute forme de spiritualité est dangereux car nous ne sommes pas sûrs d'avoir ensuite mieux à proposer que le nihilisme...

Nous regardons de plus en plus nos propres politique de "croissance" économique avec beaucoup de circonspection. Lorsque Benjamin traverse Lyon en vélo, au son des grues, des marteaux piqueurs, et de tous les travaux, il ne peut s'empêcher de faire le parallèle entre cette activité économique et les politiques chinoises de construction. Il est légitime de vouloir changer, bouger, progresser pour atteindre plus de confort, de bonheur et de prospérité, mais nous ne devrions pas oublier que la finalité n'est pas en tant que telle de bouger et changer. Plutôt que calculer le "produit" national brut, donnée purement économique, nous devrions peut-être plutôt nous interroger sur le bonheur national brut. Enfin, ça c'est peut-être pour un autre voyage...

Fréquemment, retourner en pensée sur le Barkhor, dans les montagnes entre Ganden et Samye, ou au bord du lac Namtso, nous ramène une sérénité dans nos vies pressées. Nous nous sommes pris à avoir envie d’aller tourner le soir après une journée bien chargée.

Le Tibet c'est donc un authentique voyage, de ceux qui, à grande force d'aventures, vous confrontent à des situations qui vous changent et vous inspirent pour longtemps. Nous vous remercions de nous l'avoir offert : ce fut un beau voyage d'un mois sur le plan "physique", mais au delà, le voyage intérieur qu'il a initié est loin d'être terminé !