Ty'mer

M
Par
L'histoire de la construction d'une petite huttopie féministe. Sur les sentiers du vivre-autrement, infime désobéissance, une poésie politique qui devient foyer.
Dernière étape postée il y a 323 jours
Du 1er février 2020 au 1er juillet 2022
126 semaines
1
1
Publié le 6 août 2020

Cela fait presque un an et demi que je parlerêveparlebeaucouprêvebeaucoup de construire une tiny house. Pendant le confinement, je me lance concrètement dans l'aventure

Objectif : emménagement fin 2021 !

 hum c'est quand même un sacré truc et tu n'y connais rien  

Voici donc cette petite histoire racontée mois par mois. Les découvertes, les étapes, les rencontres, les galères, les réflexions, les poésies...

• • •

Vite, des cabanes. Pas pour s’isoler, ou tourner le dos à notre monde abîmé ; mais pour braver ce monde, l’habiter autrement : l’élargir, (...) y refaire des liens, des pratiques, y réinventer les façons de se tenir, au sens le plus physique. Des cabanes pour imaginer un mode de vie dans ce monde abîmé. Une cabane qui est tout à construire, à construire avec des mots, des poèmes, des mains tendues. Une utopie, n’existant pas tout à fait sinon dans nos désirs.


- Marielle Macé

2
2
Publié le 7 août 2020

D'abord, poser des mots, et les garder près de soi.

• • •

Pourquoi une tiny ? 

Pour la liberté de mouvement, et l’idée d’être mobile, la poursuite du frisson, la découverte perpétuelle. Vivacité, fluidité. Car je ne sais pas encore où je veux vivre et ça me dit bien d'habiter plusieurs endroits dans l'année.

Pour la liberté économique, car je n’ai pas encore trouvé une unique place dans ce monde, que j’ai plein d’idées (psychologue gestalt - chercheuse en sociologie de l’imaginaire et études de genre - éveil à la CNV - militantisme radical - éducation alternative pour les enfants - médiation poétique et philosophique dans la nature - conteuse), que j'aimerais faire conjointement et agilement, tout en ayant beeaaaucoup de temps pour autre chose (l'amour, l'amitié, faire du pain, du fromage, du macramé, un potager, danser, lire, cuisiner, créer, nager, de longues marches, de longues discussions, jouer) sans que la question de l’argent soit un frein. Gagner peu, dépenser peu, vivre beaucoup !

Pour rejoindre des gens cool, appartenir à une communauté, se greffer à un projet d’alter-village, d’éco-lieu quer, dans lequel incarner les principes de décroissance, harmonie, gourmandise, poésie, magie. Des habitats légers et des lieux communs, un potager, des arbres fruitiers, des poules, des chevaux, des guitares et une belle lumière du soir.

• • •

Puis, prêter attention à soi, ses usages.

De quoi ai je besoin ?

Une empreinte mini mini : matériaux écologiques/biodégradables et de récup', au maximum. Viser l'autonomie énergétique, l'autosuffisance alimentaire et en eau.

Pouvoir monter sur le toit : y poser une serviette, du houmous et une bouteille de vin.

De la lumière, beaucoup de lumière : sentiment d’être dehors même dedans, de vivre avec les éléments, tout en étant protégée dans son lit.

Pouvoir accueillir du monde : après-midi jeux de société, journées en amoureux·ses, dîners entre ami·es, dodo avec la famille.

Avoir beaucoup d’endroits différents où se poser : assise avec mon ordi, lire dans un fauteuil, rêvasser là-bas, déjeuner encore ailleurs et le petit moment café-chocolat juste ici.

Pouvoir la réaliser en auto-construction : apprendre, décrasser son cerveau, rencontrer des gens. Comprendre sa maison et comment en prendre soin. Sortir de l'injonction à la consommation.

Et puis : de l'espace pour danser, un plan de travail pour cuisiner, une bibliothèque à coeur ouvert, une fenêtre devant l’évier pour faire la vaisselle en regardant la mer.

Je me pose mille et une questions. Combien de temps je passe en cuisine, sous la douche ? Ai-je beaucoup de produits de beauté ? D'habits ? De livres ? Est-ce-que j'utilise un four, un frigo, un lave-vaisselle, un lave-linge ? Est ce que j'aime m'étendre sur les canapés, dans les lits ? Comment je dors ? Comment je me réveille ? Comment je mange ?

C'est rare de prêter tant attention à ses besoins et habitudes du quotidien. C'est comme si je me suivais discrètement, en notant tout dans un petit carnet, avec bienveillance et tendresse. Sentiment de se connaître un peu plus.

• • •

Votre maison est votre corps déployé. Elle s'épanouit au soleil et dort dans le silence de la nuit ; et ne reste pas sans rêves. Votre maison ne sera pas une ancre, mais un mât. Elle ne sera pas une étoffe chatoyante qui couvre une plaie, mais une paupière qui protège l'œil.

- « Le Prophète », Khalil Gibran

3
3
Publié le 7 août 2020

En mars, je m'inspire. Pinterests, vidéos dont je screenshot les idées que j'aime, lecture de références sur le sujet. Je regarde autour de moi, les couleurs, les dimensions. Les astuces de rangement, de modularité, la déco, la lumière.

Une banquette modulable, des étagères un peu partout, une grande fenêtre, un accès toit depuis la mezza.
Un escalier sur lequel on tient debout à la sortie du lit, avec des marches rétractables.
Des toilettes sèches "tiroir", une grande baie vitrée.

Une penderie sous l'escalier, une porte de commode qui se déplie en table de salon, une banquette modulable en lit 1 place - sièges indépendants - canapé - rangements, une cloison coulissante "porte-épices" etc, un plan de travail repliable au dessus des plaques de cuisson, un tiroir "étendoir à linge", des meubles en cartons, des finitions intérieures en toile de lin etc, etc, etc

C'est la phase où l'on rêve, sans penser aux contraintes de poids ni de prix. J'en papote avec beaucoup de gens pour récolter plein d'idées. C'est très enthousiasmant !

• • •

Le moment auto-construction

Après un benchmark et des discussions avec des auto constructeurices, je fixe un budget à 25 000 (dans les mois qui suivent, je réalise que je peux tenter les 20 000 car je prends beaucoup de temps à recup des outils et des matériaux de seconde main, à me creuser la tête pour des choix plus économes et à fabriquer moi même les objets d'aménagement). Depuis quelques années déjà j'économisais dans l'optique d'une tiny sans prêt ! C'est pas facile, mais j'y crois. C'est très motivant de réduire ses dépenses pour un projet de vie comme celui-ci

4
4
Publié le 7 août 2020

En avril, les premiers plans prennent forme. D'abord, version papier.

 Je gribouille, je gribouille, je gribouille.

Puis en 2D.

C'est pas facile du tout, car chaque décision à des conséquences sur d'autres et inversement chaque choix dépend des précédents. Par exemple pour positionner les meubles il me faut statuer sur l'épaisseur des murs (et donc sur les choix d'iso, de composition, blablabla). Pareil pour la hauteur de la mezzanine qui dépend de l'épaisseur du plancher, de celle du matelas, de la hauteur nécessaire pour être à l'aise sous les poutres de la mezza et sur le lit sous le toit, de la forme du toit, tout en respectant les 4m15 de hauteur autorisée. Les noeuds au cerveau s'enchainent, mais peu à peu certains se délient et c'est là qu'on réalise qu'on avance !

• • •

Le moment auto-construction

Toute cette phase n'est pas seulement de l'ordre de la rêverie. C'est très vite technique. Au fil des recherches je tombe sur beaucoup de mots étranges, complexes, un peu effrayants (tasseau et solives, faîtière, acrotère, pare vapeur, différent du frein vapeur bien sûr, pont thermique, contreventement, fraiseuse...) qui jour après jour se chargent de sens et deviennent de bons copains. Je crée un lexique pour les garder près de moi. Peu à peu, on s'apprivoise.

Je crée aussi un méga doc pour rassembler TOUTES les infos que je lis-regarde-entends. Il y en a tellement que je ne fais pas confiance à mon cerveau pour s'en souvenir et pour savoir les sortir au bon moment. Dans ce méga doc, je compare les poids et prix de tous les matériaux (bois, menuiseries, isolants, couverture), je benchmark des remorques, des outils, je compare les pratiques et choix de fabrication, et je répertorie tous les conseils - astuces techniques - avis des autoconstructeur‧rice‧s du web (étapes, calcul du poids, équilibrage, dimensions, sécurité sur le chantier, etc)

5
5
Publié le 7 août 2020

Et enfin je me lance dans la modélisation 3D sur Sketchup. Après tout une phase d'auto-formation sur Youtube, beaucoup d'heures à faire des bêtises, défaire, refaire, pas comprendre, s'arracher les cheveux, douter sur chaque centimètre, en rêver la nuit, j'obtiens quelque chose dans lequel il est aisé (et si chouette !) de se projeter !

Une première ébauche visuelle, c'est de l'enthousiasme et de l'énergie pour se lancer dans la réalisation du rêve ! 
• • •

Tiens, un nom me vient.

Ty'mer.

 Ty'mer car le "ty" breton, la mer, mère et chimère. 

Depuis qu'il s'est installé, il ne quitte plus le petit coin de ma tête réservé aux idées fixes, la petite voix qui aime nommer les fleurs et oiseaux qu'elle rencontre.

• • •

Le moment auto-construction

Une décision majeure, cruciale, capitale (que dis-je, fondatrice !) est prise. LE CHOIX DE LA REMORQUE. Je pars sur un modèle récent, chez Vlemmix, sans passage de roue ! Elle est légère, raisonnablement chère mais elle ne vient pas de tout près ... J'aimerais comptabiliser l'empreinte carbone de mon projet (entre les déplacements de la matière première, les recherches web et heures de visionnage Youtube, mes propres déplacements à la rencontre de "tinyistes", ...)

• • •

Quelle joie de s’allonger un midi dans un hamac. La brise légère qui efface les angoisses. Il y a de ces plaisirs si simples qu’ils contestent la vie radicalement violente que nous vivons.

- Danny Laferrière

6
6
Publié le 7 août 2020

En juin, le thème c'est : rencontres !

Au quotidien, je regroupe sur une carte interactive les contacts sur lesquels je tombe dans mes recherches : entreprises de construction de tiny, auto-constructeurs et auto-constructrices, ateliers bois, scieries, villages d'habitats légers, etc. Il y en a partout en France. Après quelques visites dans les Alpes au début du mois, c'est depuis la Bretagne que ce tour de France des tiny se poursuit ! Je profite de plusieurs semaines là-bas pour rencontrer des auto-constructeurs (mais pas encore d'auto-constructrices, ça me démange !).

Ma soeur Oriane m'accompagne, c'est très apaisant et sacrément enthousiasmant d'en discuter avec elle. Car, au-delà des aspects esthétiques et fun qui engagent beaucoup de mes proches, il y a toutes les contraintes techniques et matérielles dans lesquelles on se sent vite dépassée, et parfois un peu seule.

Je rencontre donc Michel, Noé, Alexandre, Gautier, Jean-Daniel, Emilien. Je pose beaucoup de questions techniques, qui, il y a quelques semaines à peine, m'auraient paru vraiment tarabiscotées, mais d'en discuter avec des inconnu·es, je réalise qu'on partage un langage commun, qu'on fait partie du même groupe de chipies.

  Pose le steïco après l'équerrage de tes solives hein. Tu ajoures ton bardage, prend du ampack3m! Et comme satu', t'as quoi toi ?

Emilien me propose même de donner un coup de main sur son chantier. Pendant plusieurs jours avec son fils, on mesure + découpe + pose l'iso dans le toit et le plancher (attention aux gaines des réseaux et aux évac' et puis aux poussières de BioFibTrio dans les yeux bien sûr), puis le frein vapeur sur les murs (c'est toute une galère pour poser le rouleau droit et que le scotch assure l'étanchéité partout tout en le laissant caché sous le lambris). C'est super pour moi, car ce sont des manip' qu'il faut faire (et rater) une première fois (et même plusieurs) avant de choper le coup de main ! Je note bien précieusement toutes les petites astuces.

• • •
 Petit à petit, je rencontre les outils : faire confiance, s'habituer à leur bruit, leur poids dans la main. Devenir amies.
• • •

Le moment auto-construction

C'est le moment de se lancer dans la planification concrète et précise du chantier ! Sur un giga doc excel je rassemble tout ce qu'il m'a semblé comprendre du déroulement d'une construction de tiny. Je définis 8 grandes phases :

PHASE 00 La préparation

PHASE 01 Le volume

PHASE 02 Hors d'eau hors d'air

PHASE 03 Les fenêtres

PHASE 04 Bardage/ cloisons / réseaux

PHASE 05 Finitions #1

PHASE 06 Mezza et ameublement

PHASE 07 Finitions #2

• • •

Pour chaque phase, je décris les étapes, les sous-étapes, les sous-sous étapes et enfin tout le matériel nécessaire, des machines aux outils à mains en passant par les vis, les clous, les sections de bois, les protections ... C'est titanesque ! Ce document, je le complète presque tous les jours et je pense qu'il sera modifié jusqu'au jour J du début de la construction (et sans doute pendant ..). Il permettra aussi une bonne organisation / délégation des tâches lorsque les copinous viendront (je l'espère) passer quelques jours avec moi, les mains dans la sciure. Il faut donc qu'il soit intuitif, compréhensible par tou‧te‧s et rapide d'utilisation.

C'est un peu comme une boussole. D'ailleurs, je m'en vais le renommer de suite !

7
7
Publié le 17 août 2020

Je découvre le monde foisonnant des déchèteries, dans lesquelles je fais de merveilleuses trouvailles. Entre la déchèterie de Pont-Croix, celle de Primelin, et la bien-connue-par-nous ressourcerie CapSo' à Plozevet, je parviens en quelques semaines à récupérer de belles planches de bois, du lambris, des plaques de contreplaqué.

Stockage du bois chez papy et mamie ! 
• • •

Quand on tourne en rond dans sa tête (il faut se fixer sur un degré de pente du toit et je ne m'y résous pas), rien de mieux que de mettre ses mains en action. Je raconte mon projet fou à Papy ("c'est gros, très gros, mais je t'aiderai ") et on se lance dans la fabrication d'un des sièges mobiles en forme de cube qui composent la banquette du salon (cf la modélisation du mois de mai).

L'objectif est surtout de s'essayer aux outils ("que tu apprennes à ne plus avoir peur d'eux"), de se familiariser avec les méthodes de dessin, les organigrammes de production et d'acquérir les bons réflexes ("mieux vaut passer 5 minutes de plus à réfléchir que de faire des bêtises qui te couteront 5 heures plus tard").

Les mains de Papy. Dessinent, et dessineront toujours.

Après de longues heures à l'atelier, à tester plusieurs façons de faire pour minimiser le poids du siège (eh oui, une tiny en dessous de 3 tonnes 5 ça se mérite jusque dans les plus petits détails !) tout en maximisant sa résistance (je me connais, c'est sûr je voudrai danser debout dessus un jour), on arrive à quelque chose de vraiment chouette ! Dont je suis très fière. Merci, Papy.

 Je vous présente : "Le Cube". Version #1, déjà ma préférée !
 Tadaaa !

1,3 % de la tiny est achevé !

• • •

J'apprends à prendre le temps. A chercher le devenir plutôt que le fixe. Jusqu'au dernier moment on ajuste le cube en fonction d'intuitions, d'idées nouvelles, d'expérimentations. C'est une bataille de l'égo et de la flemme versus l'incessant mouvement qui caractérise le vivant. Et puis à un moment on s'arrête et on se dit "ok, ça me plaît".

• • •

Ni le vent ni la brume ne se lassent de moduler de neuf les formations de nuages. Et qui oserait prétendre que les nuages sont moins réels que les massifs granitiques ?

- Christiane Senger

8
8
Publié le 11 septembre 2020

Le mois d'Août. Le mois doutes ? - dit mon père.

Oui. Les premiers questionnements : quand fixer la date de début de chantier ? Je dis à tout le monde "printemps prochain" mais "printemps prochain" est-ce dans 7 mois ou 10 ? Est-ce trop tôt ? Vais-je me sentir assez formée ? Est-ce trop tard ? Car alors il y aura encore plus de gens souhaitant ce mode de vie et donc encore moins de hangars pour la construire ! Comment faire co-exister la tiny, si chronophage, si énergivore, avec le master en études de genre que je commencerai en octobre et s’annoncent très intenses ?

Les premiers vacillements : j’ai l’impression d’oublier au fur et à mesure ce que j’apprends, je me sens très seule, je n’arrive plus à concevoir un « après » la construction. Où la poser ? Pour faire quoi ? Avec qui ?

Et les premières remises en question : ça n’est pas assez radical, pas assez low-tech et surtout pas assez low-cost. Le mouvement semble parfois si élitiste, presque bourgeois. Tous les propriétaires de tiny me paraissent se ressembler. Juste une caste de plus, exclusive et homogène. Et très privilégiée. Un projet d'habitat à 25 000 euros peut-il se revendiquer d'être un modèle social viable ? Peut-il vraiment convoquer un imaginaire alternatif à l'économie de marché ? Et si c’était simplement égoïste, une façon pour moi de m’éloigner des combats, de ne plus voir autour de soi les raisons de la lutte. Cacher la misère alimentaire derrière un potager d'été, isoler son corps de femme pour ne plus avoir à le défendre, marcher en forêt et non plus dans la rue. J’imagine mal ma petite tiny-mimi sur une ZAD. Deux esthétiques semblent s'opposer. Le douillet s'accorde-t-il avec la rage ? Peut-on désobéir confortablement ? Comment combiner habiter et résister ?

• • •

Je décide que ma tiny sera cabane.

• • •

Heureusement, je découvre l'art subtil, précis et oh combien analgésique du Macramé. Ma grand-mère est la première à en faire les frais, pour son plus grand bonheur et celui de la "boule de pêche" qui trouve sa place au-dessus des toilettes. Suspensions de plantes, bracelets, déco de miroir, j'en sème un peu partout où je trouve des ami·es bienveillant·es envers chacune de mes nouvelles passions.

Je fais des noeuds pour dénouer les doutes. Mettre en mouvement les doigts et le reste. Lier. Se nouer.

• • •

« Être vivant, c’est être en mouvement - à l'extérieur et à l'intérieur de soi-même - et c'est être lié aux autres, à son environnement, aux gens, être présent au monde. La combinaison presque paradoxale entre le mouvement et le lien. Les tisser ensemble. Cela me parait être le cœur du vivant. » - ce cher Alain Damasio héhé


9
9
Publié le 4 février 2021

Avec la nouvelle année, la tiny reprend du service !

Après avoir hiberné les 4 derniers mois - pendant que je prenais mes marques dans la nouvelle école, la nouvelle maison (en Bretagne youhou), les nouvelles amitiés - l'aventure Tiny repart de plus belle.

Ça commence par une tisane - à 8 !! - dans la tiny d'un ami (hyper cosy !) et puis la rencontre de personnes merveilleuse, aussi complètement folloux, qui souhaitent vivre en collectif, en harmonie avec le vivant (et proche de la meeer) et en habitat léger (tiny bien sûr, mais aussi yourte, caravane, cabane, kerterre) ! On se nomme collectif Kerwagenn et on enclenche l'opération : un hameau léger en Baie d'Audierne ! Si quelqu'un‧e a un terrain de plusieurs hectares à donner contre des navets, des soirées contes et des oeufs frais .... vous savez où me trouver !

 Kerwagenn, en breton, ça veut (peut-être) dire "hameau de la vague", ça nous va bien !

Au programme auto-construction en janvier :

J'ai trouvé un hangar ! Et quel hangar... ! Grand, tout équipé, proche de la maison et surtout dans un super endroit : l'Écolieu Kervillé. On s'arrange au troc : j'anime pour elleux un séminaire CNV et en échange je construis la tiny. Iels sont adorables et plein·es de vie, j'ai hâte de passer du temps la-bas !

Côté logistique, ça y va fort aussi ! Avec Papy on compare la liste des outils/machines dont j'ai besoin avec l'inventaire de son atelier aux mille trésors. Il a presque tout ! Sauf une grosse scie circulaire à onglet... que Papy et Mamie décident de m'offrir. Je suis touchée !

En termes de commandes :

- la remorque est en cours de livraison ! (ouch, le porte monnaie)

- les échanges se poursuivent pour du bois (ossature, parquet, lambris, bardage...). C'est un peu difficile compte tenu de mes demandes (des sections non standard, des longueurs excessives) et du contexte (il y a parfois 1 an de délais pour du Thuya et, pour du Douglas, on me dit carrément que cette année c'est mort...) Mais je ne désespère pas, c'est en bonne voie !

- pour les fenêtres, je rencontre un fournisseur très sympa qui a déjà vendu pour des tiny ! Il connait donc bien la fameuse contrainte de poids et sait me conseiller côté matériaux et budget.

• • •

Je rencontre plein de gens super qui m'offrent un peu de leur temps et de leurs conseils : un menuisier à la retraite, un charpentier naval, un ami d'ami qui vient de finir sa tiny, un couple d'éleveureuses de brebis (pour l'isolation à la laine de mouton !), un père, un fils et leur scierie ! On me propose des voiles de bateaux, des coups de main, des machines ... c'est si rassurant ! Je commence presque à avoir l'impression d'appartenir à une communauté !

Le chantier se dessine sur les mois de mars et avril. D'ici là, je compte les pleines lunes en espérant être prête à commencer au plus vite !

Allez, en bonus, des petits aperçus de l'ossature :

Face Nord et face Sud . C'est tout coloré, ça parait presque simple vu comme ça .. en tout cas, ça donne envie de s'y mettre ! 
• • •

Je vous laisse sur une jolie pépite qui a animé mes journées de janvier...

Pour rêver, il faut être déplacé. A-gîtée. C'est pour ça que je ne reste jamais trop longtemps chez moi."

- Daria, femme évène d'Icha, rapportée par l'anthropologue Nastassja Martin.

10
10
Publié le 7 mars 2021

Incroyable mais vrai : fin février, le chantier a commencé. Tout juste un an après le début du rêve, les premiers bouts de bois viennent attester de sa prochaine réalité.

Mais revenons quelques semaines en arrière.

• • •
une sacrée bête ! 

Tout d'abord, la remorque pointe le bout de son nez.

Puis c'est au tour du bois, qu'on me livre avec une grue ! Et le devis des menuiseries est signé, la commande lancée !

Jean vient m'aider quelques jours à la mettre à niveau (ahlala on s'en fait, des noeuds au cerveau, et puis finalement à un moment ça se déplie et on prend une décision, la bonne !). Ensemble, on fait le premier coup de scie : le jour 1 du chantier est officiellement proclamé et on célèbre ça comme il se doit !

Pendant la semaine #1, je travaille deux jours seule au montage du solivage, à la découpe des encoches pour les étriers et au perçage des passages des gaines d'eau.

On contrevente avec des écharpes temporaires pour éviter que le solivage ne se déforme lors qu'on va le retourner.

Puis, des copaines (merci les copaines!) viennent m'aider pour qu'on le retourne comme une crêpe (au beurre salé) afin de travailler sur ce qui sera le "dessous" : on trace les encoches des réseaux élec, on pose le parepluie et le grillage anti rongeur.

La première semaine se termine donc sur un plancher presque achevé. Au programme des prochains jours : le re-retourner puis tranquillement commencer à découper et assembler les murs.

Ça, c'est pour la partie chantier ... en parallèle, à la maison, il reste du boulot pour bien finioler l'étanchéité, choisir le chauffeau-eau, intégrer un système de récup' d'eau de pluie, choisir les planchers et revêtements des murs, dénicher un bac de douche et un évier dans les ressourceries du coin, bref on ne s'ennuie jamais !

ANNONCE : je suis en pleine finalisation de mon électricité ! Si vous connaissez un‧e électricien‧ne qui accepterait de papoter avec moi ça serait avec grand grand plaisir (et avec soulagement, aussi, car c'est quand même une étape qui me rassure pas beaucoup beaucoup)

  J'ai l'impression d'accumuler quantité de pièces de puzzle depuis 1 an, qui peu à peu viennent s'imbriquer.
• • •

Côté Kerwagenn, on rencontre des mairies, on visite des terrains privés. On continue à beaucoup beaucoup beaucoup discuter ! Le collectif, c'est une invention de tous les jours. On tente de faire meute, de se rendre disponible à toutes les voix et toutes les voies, d'être attentif‧ve à la diversité de nos manières d'être au monde et d'accueillir la complexité que cela représente d'articuler nos besoins sans les juger ou chercher à se changer. C'est fantastiquement sensible, douloureusement énergisant et intimement intimidant, en un mot : vitalisant. C'est du lien et du mouvement. Pour inventer l'alliage des deux, il nous faut écouter, formuler, désapprendre, s'écorcher un peu parfois, en rire, se réconforter et apprendre. Ensemble. Il n'y pas de mode d'emploi tout prêt à la vie en communauté. Mais c'est ce qui rend l'aventure enthousiasmante ! D'ailleurs, une jolie citation de la chercheuse et militante féministe Monique Wittig qui évoque l'importance des utopies concrètes pour faire advenir des futurs souhaitables ..

Fais un effort pour te souvenir. Ou, à défaut, invente.

- Monique Wittig, Les Guérillères, 1969

11
11
Publié le 4 avril 2021

Mars est la saison des cabanes.

Avec le chant des oiseaux, le retour des poissons, la floraison des cerisiers, Ty'mer pousse, se déploie, s'étire comme si elle sortait d'une hibernation, une gestation sous la mine de mon crayon depuis 1 an.

Ça commence sous la remorque pour proposer les futures frontières, plus ou moins troubles, de l'habitat de l'humaine (pose des grilles anti-rongeurs).

Puis, la construction et la pose du premier mur !

Une fois que le premier bourgeon est là, les autres s'enchaînent sans tarder, avec enthousiasme, impatience, curiosité ! En même temps que la cabane prend forme, je prends confiance.

Beaucoup de copinous sont venu‧es aider Ty'mer à germer. Toi avec un sourire et un câlin, toi avec un goûter à prendre au soleil dans l'herbe, toi avec tes habits de chantier, perceuse en main. A la question "tu construis ta maison toute seule ?", la réponse est non ! Je la construis avec beaucoup d'amour, de gourmandise, d'amitiés, et de plein plein de mains, petites et grandes, toutes jeunes ou toutes ridées, immaculées ou déjà pleines d'échardes, toutes excitées ou très concentrées, des mains dessinatrices, bâtisseuses, artistes, poétesses, rêveuses. Toujours des mains bienveillantes et encourageantes !

On porte fièrement les rayures bretonnes ! 
• • •

4 semaines seulement et déjà le volume est là ! Ça n'a pas été tous les jours facile (en fait, jamais, c'est une complexité de chaque instant) - il y a eu des rires et des pleurs, des nuits d'insomnie et des siestes de fierté, des erreurs à rattraper et des bonnes idées. Mais toujours un même élan, une même vitalité.

• • •

J'ai l'impression d'écrire une histoire à plusieurs voix, à plusieurs voies. La voix au fond de moi qui refuse et désire en même temps ; la voix du collectif aussi, de cette amie d'enfance qui me soutient à chaque folie depuis plus de 10 ans à ce garçon rencontré sur les routes (qui m'a pris en stop) et qui devient un ami à force de ponçage-vissage-masticage, en passant par les soutiens familiaux, les solidarités entre constructeurices de tiny ; et toutes les voix de ces gens qui essayent de raconter de nouvelles histoires, d'écrire par leurs choix et leurs gestes de tous les jours de nouveaux récits (ici, beaucoup de gratitude pour les membres de l'écolieu merveilleux qui accueille le chantier). Et puis aussi, l'impression de faire quelques pas sur toutes ces voies (celles de l'entraide, de l'attention, de la responsabilité, de la provocation, de la circulation des biens et des savoirs, de la résistance, de la sobriété, de la décroissance, de la désobéissance, de l'empreinte légère et discrète, de la co-existence métamorphe, des égards ajustés) qui pourraient bien mener à cet "autre monde possible", en floraison dans les ruines de l'ancien.

• • •

Apprendre à raconter des histoires amorales parce qu’à voix multiples, à conséquences en cascades, qui ne respectent pas la différence entre ce qui compte et ce qui peut être négligé, c’est peut-être apprendre à cultiver un savoir crucial s’il s’agit d’apprendre à vivre dans les ruines

- Isabelle Stengers dans la préface du champignon de la fin du monde - Sur la possibilité de vivre dans les ruines du capitalisme, de Anna Lowenhaupt Tsing, Éditions La Découverte, 2017.


12
12
Publié le 1er juin 2021

Pendant deux mois, je laisse la tiny se reposer pour aller vadrouiller : Toulouse, Eindhoven, Paris ...

Mais si le chantier est en pause, la tiny continue d'exister dans le coeur, les mains, les pieds, les idées et les liens.

Dans le coeur,

  • elle m'accompagne partout, comme une mini fée au creux de la poitrine, excitée à l'idée de ce qu'on a déjà vécu ensemble et de ce qui nous attend.
  • les personnes fantastiques auprès de qui j'ai l'immense chance de cheminer, elles, ne s'arrêtent jamais et continuent à faire naitre des petits bouts de Ty'mer : céramique soleil et céramique océan, la première assiette et ses couverts, une nappe de pique-nique pour rêver au soleil, une calligraphie florale.
26 ans ont rimé avec amour, malice et liberté
• • •

Dans les mains, ça continue de créer. Grâce aux intuitions créatives d'une mère-magicienne, j'apprends à fabriquer des meubles en cartons ! Une petite table de nuit et une étagère. Reste à les décorer aux couleurs du bonheur !

• • •

Dans les pieds, je déménage définitivement ! Mettre en carton 6 ans de vie et tenter de les faire rentrer dans l'idée d'une tiny. Oui, oui, c'est une vision qui me plait.

Dans les idées,

  • on me parle d'une couturière dans le Cap Sizun, qui a mon âge, qui travaille des tissus de récup', et avec qui on se marrerait beaucoup ! J'ai hâte de la rencontrer pour imaginer ensemble la banquette du salon.
  • j'imagine, dessine, schématise, modélise, les futurs meubles de la tiny : le vaisselier-table à manger, les toilettes-tiroir, l'escalier-penderie.

Dans les liens : je rencontre celles et ceux qui ont rendu, via les réseaux sociaux et chaines Youtube, ce projet possible. Gratitude.

Et puis, de-ci de-là, les pas me mènent vers de nombreuses bestioles du monde alternatif. On s'invite à boire le thé en yourte, on récolte des algues pour en faire de la tisane, on prévoit des chantiers participatifs entre femmes, on parle magie, écoféminisme, rituels subversifs, politisation du moindre geste, on imagine des colos inter-écohameaux, on rêve d'un collectif Queer Paysan...

  Sentiment de vivre dans la chair et à chaque instant"les étoiles s'aligner", mélange grisant de confiance, d'attention et de joi...
• • •

Être à la juste place,

celle où l'on respire, celle d'où l'on guérit

celle d'où l'on écoute, celle où l'on s'hybride

celle où l'on s'attache et où l'on rêve

à plusieurs.

13
13
Publié le 3 août 2021

- Quelles sont tes intentions, maman ?

- Prendre le soleil, tu ne le vois pas ?

L'art de la joie, Goliarda Sapienza

En juin, pause estivale. Après des semaines intenses d'écriture du mémoire, du déménagement depuis Paris, de l'installation en Bretagne, j'ai passé quelques semaines à vadrouiller en famille, auprès d'ami·es, de potentielles futures cohabitantes ou simplement avec tente, maillot et doudou.

Mais le chantier m'appelle. Ça démange là où ça rêve, à l'endroit où naissent les projets, là où pousse la l'excitation, où se cultive la motivation et qui ne nous laisse jamais tranquille tant que l'aventure n'est pas achevée.

Et puis un sentiment d'urgence aussi.

Pendant les vacances, je ne peux m'empêcher de modéliser les premiers meubles : l'escalier-penderie, la bibliothèque-table à manger, le plan de travail. Prêts à la découpe ! (Encore faut-il que j'arrive à me fournir en contre plaqué malgré la pénurie de bois ... la réponse à la prochaine étape).

Dès mon retour en Bretagne fin juillet, je reprends à fond. Qu'elle est belle, cette tiny en gestation. Je passe les premières heures à me souvenir, m'émouvoir, m'enorgueillir aussi, j'avoue.

Renouer le contact avec elle, toute poussiéreuse qu'elle est après plusieurs semaines toute seule ; et avec le lieu, qui a bien changé. Reprendre mes marques, installer les outils et ma petite organisation bien comme il faut. Et puis peu à peu se dérouiller les muscles, se rappeler les bons réflexes, se réhabituer à découvrir, à chaque douche, de jolis bleus qui ont poussé d'on ne sait où, et dans des endroits improbables.

Après les ajustements mineurs (une vis récalcitrante par ici, un bout de bois en trop par là), c'est une grande étape qui nous attend : la pause des fenêtres. Papa, Oriane, et des ami·es de la famille sont là, et heureusement car la pose est ardue - il faut qu'elle soit rapide et précise, les vitres sont lourdes, et l'enjeu est grand.

On pose aussi la porte de la mezzanine et ... le balcon !! Quel bonheur, le fameux balcon !
J'ai encore du mal à y croire mais... voilà que les fenêtres semblent posées ! 
• • •

A la maison, je m'attelle à la confection de nouveaux meubles : les sièges-rangements du salon, aussi appelés "cubes" (cf été 2020). L'année dernière j'en ai fait un en bois et cet été, je tente en carton ! L'épicerie bio d'à côté me fournit en emballages de récup' et Maman me prête son matos.

C'est une activité qui demande beaucoup de patience (il faut découper moult et moult pièces, agencer, coller, poncer ..) mais que je peux faire par fragments : le matin quand tout le monde dort, après le café pendant la sieste ou encore entre deux sorties à la plage. Ça me plaît beaucoup, c'est rapidement gratifiant et reposant pour l'esprit.

• • •

Et, si j'aime la solitude du travail manuel, je suis toute heureuse de jouir d'une douce (et un peu folle) compagnie :

Louise Michel (surnomé·e Michou) et sa soeur Marlo (surnomé·e Marlita) ont débarqué vallée du Fautec ! 

Et bien sûr, ma copine de chantier qui est on-ne-peut-plus ravie de me retrouver !

Je me sens revigorée par cette reprise de chantier et, si c'est épuisant physiquement, c'est aussi très vitalisant ! Une énergie nouvelle grandit chaque jour et apaise ces dernières semaines difficiles, une énergie qui ouvre aussi sur de merveilleux moments à côté du chantier : des temps de peinture, de guitare, de lecture, de surf, de baignades, d'écriture, de jardinage, de cuisine ... bref c'est l'été, il fait beau, les crêpes sont bonnes et la joie est un art que les mains connaissent bien.

14
14
Publié le 5 septembre 2021

Pose du bardage.


C'est long. C'est si long...


Un peu le stress de pas tenir les délais, le budget, la santé, le moral.

Mais le bois sent bon, des ami‧es viennent m'aider et la pose de chaque planche est très satisfaisante.

Allez, j'y retourne. Courage Maudou.

15
15
Publié le 3 novembre 2021

Ouf !

C'est ce que corps, coeur et tête expriment de concert lorsque je pense à ces dernières semaines de Tiny.

Depuis le 1er septembre, ce fut chantier presque tous les jours. C'est qu'il fallait que la Tiny quitte le hangar où elle était née en mars le 23 octobre.

Ça a donc été des semaines d'étanchéité : fin du bardage, joints des fenêtres, baguettes d'angles, portes du coffre technique, membrane epdm sur le toit, gouttière, et tant d'autres micro tâches invisibles, peu gratifiantes et souvent très ... chiantes.

Penser comme une goutte d'eau, penser comme une goutte d'eau, penser comme une goutte d'eau. Monter 4m à l'échelle. Descendre 4m. Monter 4m. Faire tomber une planche huilée. Redescendre 4m. Nettoyer la planche. Remonter 4m. Oublier la visseuse. Redescendre 4m. Remonter 4m. Réaliser que la planche est 2 millimètres trop courte. Penser comme une goutte d'eau de moins de 2 millimètres. Comprendre qu'il faut refaire toutes ces étapes avec une nouvelle planche. Sentir les gouttes d'eau sur ses joues.

• • •

J'ai perdu plusieurs kilos, ai collectionné les micro-entorses aux doigts, ai bleui des surfaces d'épiderme que je ne pensais jamais bleuir un jour (genre derrière les genoux). Et j'ai craqué. Beaucoup.

• • •

C'est sans doute une des épreuves les plus éprouvantes de ces 26 dernières années. Sur tous les plans. Ton corps n'en peut plus, ton coeur n'en peut plus, ta tête n'en peut plus. Avant de dire ouf, iels ont dit STOP ! Alors tu vacilles, tu bégayes, tu perds de vue le sens de tout ça, tu te blesses, tu regrettes, tu réfléchis mal, tu baisses les bras dès le moindre défi technique.


Mais les amies sont là, la famille aussi. Et toutes les personnes merveilleuses rencontrées grâce à la Tiny, qui offrent un sourire, un coup de main, un peu de leur temps. Qui te font voir que c'est gros, que c'est beau. Que c'est normal de fatiguer, de questionner, de craquer. Elles te disent aussi que c'est inspirant tout ça, qu'elles ont appris au contact de ce projet, que ça leur donne envie et courage de se lancer, et que, se faire aider, faire à plusieurs, s'épauler, se donner, ça fait partie du monde qu'on veut contribuer à façonner.

 Ça devient une petite aventure collective, inscrite dans une plus grande !

Le déplacement fut épique aussi. Ça a pris deux jours, sous la pluie, à force de cordage, bastaings, palans, d'un tracteur tout doux, de voisins un peu mascu, d'un prunier oublié, d'un pommier déplacé. Et de stress dans tous les os.

Le soir même, tu t'effondres.

Et puis, le lendemain, au réveil, et la Tiny est là, dans le jardin. Elle a survécu à la pluie et à la nuit. Elle rayonne. Alors, on monte sur le toit avec Papa. Et tout fait sens à nouveau.

• • •

A présent, je me prends quelques semaines de repos, d'autres projets (et des ami‧e‧s à aider) appellent mes doigts, mes yeux et les minutes de mes journées. Reprise du chantier en janvier pour l'aménagement intérieur ! En attendant, quelques vidéos du déplacement.

• • •

OUF !

16
16
Publié le 2 février 2022

En janvier, c’est la reprise des travaux !

Gorgée de joie et d’énergie après des fêtes de fin d’année toutes en douceur, je me sens légère et enthousiaste !

Carte piochée pour le mois de janvier héhé ! 

Bon, les premières fois c’était quand même dur d’être seule dans la tiny. Alors, dès qu’une copine passait, hop je l’emmenais faire un tour dedans juste pour apprendre m’y sentir bien à nouveau. Apprendre à profiter de ce foyer en devenir, sans penser (et donc paniquer) à l’immeeeeeensité des heures de travail, noeuds au cerveau, sous, bobos, bêtises qu’il me restait à faire.

Michel découvre les lieux, ronronne d'encouragements et surtout plonge ses patounes dans l'isolation toute moelleuse 
• • •

Peu à peu, j’ai repris confiance, j’ai repris joie.

Et j’ai repris le chantier.

Ardemment.

• • •
• • •

Avec Papa et l’amoureux, on pose le parquet de la mezzanine et du salon. Il est magnifique, il sent bon. C’est gratifiant. Première danselibre seule dans la tiny. Une respiration toute en mouvement et en sourire. Mes chaussettes roses et les rayons du soleil de l’hiver breton dansent aussi.

Un soir, on apporte la lumière pour le premier apéro kombucha-houmous ! La semaine d'après, le premier goûter tisane-chocolat !
• • •

L’électricité c’est le kiff ! Après des heures et des heures de forage cérébral depuis l'été dernier, tout s’éclaire enfin ! Ça connecte dans ma tête avec fluidité. Et ça connecte aussi sur le tableau qui trône maintenant dans le futur salon !

Sur le tableau, ça connecte avec un peu moins de fluidité que dans ma tête : il faut dénuder, pousser, tirer, clipser...
• • •

Il fait si bon, dans le ventre de Ty'mer. On respire à pleins poumons comme si on était dehors, mais on a chaud comme dans un nid douillet.

• • •

À la fin du mois, avec le parquet posé, quelques timides lames de lambris également, la jute au plafond, et les voiles de bateau derrière les meubles, je commence à ressentir l’ambiance visuelle à venir. J’imagine déjà une banquette d’un beau tissu bleu canard, les coussins de velours jaune-orange cousus l’été dernier dans les rideaux de Maman, les céramiques fabriquées par l’amoureux pour mon anniversaire, les mille et une plantes qui voyagent avec moi depuis quelques années déjà, et toutes mes bricoles de déco qui attendent sagement dans les cartons.

• • •

Et bien sûr, le pouf en jute que Michel adore plus que tout au monde !

• • •
17
17
Publié le 12 janvier 2023

Je n'ai pas écrit sur ce carnet depuis le mois de janvier dernier. C'est avec émotion qu'en ce début janvier 2023 je reprends le récit de l'aventure tiny.

• • •

En février et mars, je finis l'électricité. C'est un véritable chantier dans le chantier qui exige de la précision tout en gardant une vision d'ensemble, de la patience et persévérance au milieu du fouillis sans nom des câbles enchevêtrés, de la rigueur dans l'archivage des emplacements des tasseaux et des circuits des câbles (car quand tout sera recouvert par le lambris, qui pourra dire où visser telle ou telle étagère ?) et surtout, chose que je n'avais pas anticipée : des bouts des doigts sacrément musclés pour faire les raccords dans les prises (toutes différentes évidemment, car récupérées sur Le Bon Coin ..).

Maman et Oriane viennent quelques jours en Bretagne, on branche la première lampe !

• • •

En avril et mai , je fais une pause tiny avant la dernière ligne droite. Ces deux mois sont consacrés à la rédaction du mémoire de fin d'études que je dois soutenir fin juin et à prodiguer du soin à des êtres aimés qui en ont besoin. Mais le chantier n'est jamais très loin ; ces deux mois sont aussi un temps de planification minutieuse du mois de juillet. Car ce printemps là, je me fixe deux dates clefs :

  • un chantier participatif en non-mixité la deuxième semaine du mois du juillet.
  • une date de crémaillère-anniversaire-emménagement : le 16 juillet.

J'envoie les invitations. Je ne peux plus repousser. Ce sont deux horizons qui me boostent, m'animent d'une vitalité de fin de projet, me font me lever le matin, m'invitent à puiser dans mes dernières forces physiques et intellectuelles, m'aident à acter des décisions difficiles (comme celle de ne pas avoir d'eau chaude, ni de douche, ouf quel soulagement technico-financiaro-émotionnel !).

Alors fin juin, c'est reparti. Je me coupe les cheveux courts courts et m'y remets à fond !

Pendant trois semaines, je donne tout pour être prête pour le chantier participatif : pose du lambris intérieur, pose des plans de travail en bois massif, découpe et pose de l'évier, raccordement en eau, construction de la structure de l'escalier, la bibliothèque, la banquette, la cloison. Chaque meuble demande un effort intense de visualisation dans l'espace pour la conception des plans, provoque des noeuds cérébraux sans fin en lien avec leurs futurs usages concrets dont je n'ai alors que de vagues fantasmes (quelle hauteur sera la plus confortable pour faire la vaisselle ? Quelle hauteur de marche ? Quelle largeur pour les étagères à assiette ?), exige des découpes précises des tasseaux et des énoooormes plaques de contreplaqué et des vissages bien à angle droit au millimètre près. Je m'y remets sans doute un peu trop à fond car deux jours avant le chantier participatif, entorse à la cheville droite en descendant de Ty'mer. Une belle grosse entorse. Mais de beaux meubles en devenir !

• • •

Le chantier participatif a lieu en mixité choisie (sans mec cishet). On passe de l’huile de lin sur le bardage et le lambris et du brou de noix sur les solives. On ponce les parquets, on pose des plaintes, des baguettes de finition, on fabrique les toilettes sèches à roulettes, on pose des étagères (celles à épices, celles des vêtements, celles dans la salle de bain), on coud les rideaux de la penderie. On apprend ensemble ; on rigole, beaucoup.

Au total, 13 êtres participent tour à tour sur 5 jours de chantier. 13 personnes assignées femmes donc (pas né·es avec une perceuse dans les mains) construisent une maison ; découvrent et consolident leur être bricolage, s'écoutent, s'entraident, s'allient. C'est magique. C’est politique. En dehors des heures de chantier, on va se baigner, on danse, on rit, on tire des cartes, on papote sous les étoiles, on cuisine, on joue, on se masse, on fait des collages, de la broderie, des cercles rituels.

L’emménagement est très émouvant. Plusieurs processions ritualisent l’installation du matelas, des livres, des plantes, de la vaisselle, du pouf des chats. Il y a la renaissance de tous ces objets-mémoire qui m'accompagnent depuis des années et attendaient sagement dans des cartons ; il y a tous ces nouveaux talismans, offerts plus récemment par les personnes qui font aujourd'hui partie de ma vie.

Je fais mon premier dodo tiny, bercée par la joie qu’existent ces amouramitiés.

  Petit "avant - après"  du chantier, la magie est bien présente.
 Et d'autres photos de l'intérieur.

Le 16 juillet arrive, c’est à la fois la clôture du chantier, le départ des copines, l’arrivée d’êtres aimés pour les vacances et la préparation de la fête du soir. Une journée importante, intense, inoubliable.

 Une amie pose un joli ruban autour de Ty'mer. La cérémonie est parfaite ! 
• • •

Depuis le 16 juillet, j'y habite complètement, entièrement, follement, tendrement. Les mois de septembre, octobre, novembre et décembre sont l’occasion de petits ajustements et finitions ; ma boite à outils n’est jamais très loin et il restera encore quelques bricoles à fignoler en 2023 (l’aménagement du coffre technique notamment). Mais Ty'mer est née, elle est passée d'un chantier à un foyer.

 Il y a eu moult premières fois : premier petit dej’, première sieste, première vaisselle, premières algues, premier dodo-copines.

Michel et Marla l’ont de suite adopté (même si l’utilisation de la chatière fut un sacré apprentissage pour Marla !). Chacaine à ses petits coins préférés, on dort toutes les trois pelotonnées dans la mezzanine.

 Parfois, un troisième chat apparait d’entre sous les coussins et les plaids. Saurez-vous le reconnaitre ?
• • •
• • •

Cette tiny est comme une deuxième peau, j’ai l’impression qu’on respire ensemble, qu’on vieillit ensemble. J’en connais chaque aspérité, chaque parfaite imperfection. Chaque matin, le réveil est un délice. J’ouvre mes yeux, il y a le son de la mer. Je caresse les chatons, m’étire avec elleux et, pleine de gratitude pour toustes celleux sans qui cette aventure n'aurait été possible, j'ouvre la porte du balcon, juste derrière l'oreiller ...

• • •