Je n'ai pas écrit sur ce carnet depuis le mois de janvier dernier. C'est avec émotion qu'en ce début janvier 2023 je reprends le récit de l'aventure tiny.
En février et mars, je finis l'électricité. C'est un véritable chantier dans le chantier qui exige de la précision tout en gardant une vision d'ensemble, de la patience et persévérance au milieu du fouillis sans nom des câbles enchevêtrés, de la rigueur dans l'archivage des emplacements des tasseaux et des circuits des câbles (car quand tout sera recouvert par le lambris, qui pourra dire où visser telle ou telle étagère ?) et surtout, chose que je n'avais pas anticipée : des bouts des doigts sacrément musclés pour faire les raccords dans les prises (toutes différentes évidemment, car récupérées sur Le Bon Coin ..).
Maman et Oriane viennent quelques jours en Bretagne, on branche la première lampe !
En avril et mai , je fais une pause tiny avant la dernière ligne droite. Ces deux mois sont consacrés à la rédaction du mémoire de fin d'études que je dois soutenir fin juin et à prodiguer du soin à des êtres aimés qui en ont besoin. Mais le chantier n'est jamais très loin ; ces deux mois sont aussi un temps de planification minutieuse du mois de juillet. Car ce printemps là, je me fixe deux dates clefs :
- un chantier participatif en non-mixité la deuxième semaine du mois du juillet.
- une date de crémaillère-anniversaire-emménagement : le 16 juillet.
J'envoie les invitations. Je ne peux plus repousser. Ce sont deux horizons qui me boostent, m'animent d'une vitalité de fin de projet, me font me lever le matin, m'invitent à puiser dans mes dernières forces physiques et intellectuelles, m'aident à acter des décisions difficiles (comme celle de ne pas avoir d'eau chaude, ni de douche, ouf quel soulagement technico-financiaro-émotionnel !).
Alors fin juin, c'est reparti. Je me coupe les cheveux courts courts et m'y remets à fond !
Pendant trois semaines, je donne tout pour être prête pour le chantier participatif : pose du lambris intérieur, pose des plans de travail en bois massif, découpe et pose de l'évier, raccordement en eau, construction de la structure de l'escalier, la bibliothèque, la banquette, la cloison. Chaque meuble demande un effort intense de visualisation dans l'espace pour la conception des plans, provoque des noeuds cérébraux sans fin en lien avec leurs futurs usages concrets dont je n'ai alors que de vagues fantasmes (quelle hauteur sera la plus confortable pour faire la vaisselle ? Quelle hauteur de marche ? Quelle largeur pour les étagères à assiette ?), exige des découpes précises des tasseaux et des énoooormes plaques de contreplaqué et des vissages bien à angle droit au millimètre près. Je m'y remets sans doute un peu trop à fond car deux jours avant le chantier participatif, entorse à la cheville droite en descendant de Ty'mer. Une belle grosse entorse. Mais de beaux meubles en devenir !
Le chantier participatif a lieu en mixité choisie (sans mec cishet). On passe de l’huile de lin sur le bardage et le lambris et du brou de noix sur les solives. On ponce les parquets, on pose des plaintes, des baguettes de finition, on fabrique les toilettes sèches à roulettes, on pose des étagères (celles à épices, celles des vêtements, celles dans la salle de bain), on coud les rideaux de la penderie. On apprend ensemble ; on rigole, beaucoup.
Au total, 13 êtres participent tour à tour sur 5 jours de chantier. 13 personnes assignées femmes donc (pas né·es avec une perceuse dans les mains) construisent une maison ; découvrent et consolident leur être bricolage, s'écoutent, s'entraident, s'allient. C'est magique. C’est politique. En dehors des heures de chantier, on va se baigner, on danse, on rit, on tire des cartes, on papote sous les étoiles, on cuisine, on joue, on se masse, on fait des collages, de la broderie, des cercles rituels.
L’emménagement est très émouvant. Plusieurs processions ritualisent l’installation du matelas, des livres, des plantes, de la vaisselle, du pouf des chats. Il y a la renaissance de tous ces objets-mémoire qui m'accompagnent depuis des années et attendaient sagement dans des cartons ; il y a tous ces nouveaux talismans, offerts plus récemment par les personnes qui font aujourd'hui partie de ma vie.
Je fais mon premier dodo tiny, bercée par la joie qu’existent ces amouramitiés.
Petit "avant - après" du chantier, la magie est bien présente. Et d'autres photos de l'intérieur.Le 16 juillet arrive, c’est à la fois la clôture du chantier, le départ des copines, l’arrivée d’êtres aimés pour les vacances et la préparation de la fête du soir. Une journée importante, intense, inoubliable.
Une amie pose un joli ruban autour de Ty'mer. La cérémonie est parfaite ! Depuis le 16 juillet, j'y habite complètement, entièrement, follement, tendrement. Les mois de septembre, octobre, novembre et décembre sont l’occasion de petits ajustements et finitions ; ma boite à outils n’est jamais très loin et il restera encore quelques bricoles à fignoler en 2023 (l’aménagement du coffre technique notamment). Mais Ty'mer est née, elle est passée d'un chantier à un foyer.
Il y a eu moult premières fois : premier petit dej’, première sieste, première vaisselle, premières algues, premier dodo-copines.Michel et Marla l’ont de suite adopté (même si l’utilisation de la chatière fut un sacré apprentissage pour Marla !). Chacaine à ses petits coins préférés, on dort toutes les trois pelotonnées dans la mezzanine.
Parfois, un troisième chat apparait d’entre sous les coussins et les plaids. Saurez-vous le reconnaitre ?Cette tiny est comme une deuxième peau, j’ai l’impression qu’on respire ensemble, qu’on vieillit ensemble. J’en connais chaque aspérité, chaque parfaite imperfection. Chaque matin, le réveil est un délice. J’ouvre mes yeux, il y a le son de la mer. Je caresse les chatons, m’étire avec elleux et, pleine de gratitude pour toustes celleux sans qui cette aventure n'aurait été possible, j'ouvre la porte du balcon, juste derrière l'oreiller ...