Et voilà, après 35 h environ sur le Yaghan (le nom provient de celui du peuple Amérindien originaire de l'île Navarino), nous sommes arrivés à Puerto Williams samedi 16 février vers 5h du matin. Ca y est, je suis au bout du monde ! Le village le plus austral de la planète !
L'équipage nous a gentiment permis de finir notre nuit jusque vers 8-9h... Pas de trop avant de débuter la rando !
Je ne regrette en rien le choix, un peu coûteux et long certes, de ce moyen de transport pour venir ici. L'autre moyen de transport aurait été l'avion. Environ 3 fois moins cher mais je n'aurais pas vu de baleine (à une centaine de mètres mais sympa quand même!), de pingouins, d'otaries, les magnifiques fjords et glaciers du canal de Beagle... et je n'aurais pas rencontré Maxime, Alexandre (Français) et Antonio (Chilien) avec qui nous avons formé une équipe pour se lancer dans la rando de Los Dientes de Navarino. La rando est réputée difficile et dure généralement 4 jours, je ne me serais donc pas lancée seule dans cette aventure ! Sur le bateau, les repas permettent de vite tisser des liens comme il faut partager les tables faute de places pour tout le monde.
Quelques photos de ce périple qui sont loin de rendre la beauté des paysages que j'ai vus !
Après avoir débarqué, direction le refuge El Padrino et l'accueil chaleureux de Cécilia. Je pourrai y prendre une douche, bienvenue après ces 35 h de bateau ! C'est ici, que nous pourrons laisser les affaires que nous ne prendrons pas pour la rando. J'allège mon sac au maximum. Pas de locker mais je laisse quand même la tablette, la liseuse... pour ne pas me charger de trop ! (Je les retrouve effectivement au retour). Pendant que je prends ma douche, les gars vont nous déclarer au poste de police (même formalité administrative que pour le Monte Tarn, on s'y déclare à l'aller et au retour comme la rando est réputée difficile). Après des courses rapides pour acheter de quoi manger pour 4 jours (pain, fromage, soupes et vermicelle) et du gaz. Et c'est parti ! Cécilia aura la gentillesse de nous emmener au départ de la rando à 4 km.
J1 : il est 11h30, on débute dans la forêt, le chemin est très bien balisé. La boue et les arbres couchés me rappellent le Monte Tarn. Plusieurs miradors se succéderont avec de belles vues sur Puerto Williams, le canal de Beagle et la Terre de Feu. Un premier sommet avec une très belle vue mais on ne s'y attarde pas vu le vent ! C'est à peu près là que les chemins se séparent entre ceux qui se lancent dans Los Dientes et ceux qui redescendent. On a d'ailleurs croisé plusieurs passagers du bateau sur le chemin. On continuera sur du pierrier jusqu'au premier campement (Laguna del Salto). Quelques passages assez vertigineux et pas toujours évidents avec le vent ! Mais de belles vues sur des lacs bleus azur ! On arrive au campement vers 15h30. Il y a un autre campement plus haut à environ 1h30 de marche mais on fait le choix de rester là comme on a trouvé des emplacements permettant de s'abriter (relativement) du vent. Je me balade un peu aux alentours, discute avec un couple d'Allemands qu'on recroisera plusieurs fois le long de la rando. Vers 18h30, dîner puis direction le duvet pour essayer de se réchauffer ! Je dormirai assez bien la première partie de la nuit mais une vague d'humidité me réveillera vers 1h30. J'ai remis la polaire mais tout de même un peu froid !
J2 : Réveillée vers 5h... j'attendrai que les gars se lèvent. Le début de matinée c'est le plus dur ! Il fait super froid en attendant que le soleil arrive ! On part vers 8h30-9h. Une très belle montée, à travers un ruisseau, pour se mettre en jambe. Encore de la boue ! En haut, on découvre le campement 2 sans regrets comme il a l'air plus exposé au vent. Un peu plus haut, encore une très belle vue sur les lacs. Dans la matinée, on passera deux cols. Encore pas mal de pierriers, avec des pentes toujours aussi impressionnantes ! Il faut souvent mettre les mains ! On verra des traces de pumas (mais pas les pumas ! 😔) Du col de Los Dientes, une très belle vue sur l'extrémité sud de l'île. On devine le cap Horn à travers la brume. On déjeunera au bord du lac Los Dientes. A partir de là, la fin de la journée se fera essentiellement le long des lacs. Marche plus tranquille. Pour arriver aux campements entre les lacs Hermosa et Martillo, on devra franchir encore un col (Ventarron)... Et qui dit col, dit pierrier ! Il est environ 16h. Pas facile cette dernière montée avec la fatigue qui commence à se faire sentir... mais la perspective de finir la rando en 3 jours et de ne refaire qu'une nuit avec ce froid nous motive ! On arrive au lac Martillo vers 18h30. Pas facile de trouver un bon emplacement pour 2 tentes. On séparera donc les tentes pour cette seconde nuit. Les gars font un feu. Malheureusement après 30 min, la pluie arrive. On finit donc rapidement le repas pour filer sous les tentes. Les fringues auront le temps de bien se mouiller. De mon côté, la bâche extérieure au sol prend l'eau. On la roule en boudin pour éviter que l'eau ne s'infiltre dans la tente. Le fait d'avoir roulé la bâche ne me permet pas de laisser mon sac dans l'auvent, je le laisse donc dehors sous sa bâche, contre des arbustes, en croisant les doigts pour qu'il passe la nuit ! J'avoue que ce soir là, le moral est en baisse avec l'humidité et le froid dans la tente. Dur de se réchauffer... cette seconde nuit sera assez courte !
J3 : Réveillée vers 6h30. On visait un départ vers 7h30 comme 9h de marche nous attendent encore ! Bonne et mauvaise surprises quand je sors de la tente : un ciel dégagé (c'est la bonne !) mais un froid mordant (c'est la mauvaise !) ! La tente est couverte de givre. Mon sac a bien tenu mais est également givré. Pas facile de remettre les fringues encore humides. Mes gants sont inutilisables, trempés de la veille et gelés... J'attends (difficilement) que les gars s'activent ! De mon côté, avec le froid, je suis au taquet !! On part vers 8h. Se mettre à marcher fait du bien ! Mes pieds se réchauffent ! Après une petite heure de marche, pause soleil ! Ça permet de faire sécher les gants et de grignoter un peu au soleil. Si on avait réfléchi la veille, si on avait été moins fatigués, on aurait mis la tente de ce côté là du lac pour bénéficier du soleil le matin ! Pas mal de passages en forêt ou à travers des marécages sur la matinée... le GPS et Maps.me nous seront bien utiles pour trouver le chemin, un peu moins bien indiqué que les deux jours précédents. Le début de la montée au dernier col n'est pas des plus faciles, à travers la forêt, beaucoup de boue, des arbres couchés et une montée bien raide ! La fin sur le pierrier sera plus facile... mais on essuiera une petite tempête de neige au col. Pas moyen de profiter de la vue sur le lac Los Guanacos. Et un début de descente difficile sur le pierrier avec la neige et le vent. Par chance la tempête ne dure pas et le ciel se dégagera vite, nous permettant de découvrir le lac. La descente se simplifiera aussi avec le pierrier qui se transforme des grosses pierres du début en gravier permettant une descente plus sûre et rapide ("comme dans du beurre !"). On déjeunera vers 14h au bout du lac avec le soleil qui nous permettra de faire sécher les tentes. Nous rencontrerons des difficultés jusqu'à la fin de la rando. Après le lac, 2h de marche en forêt le long d'une rivière avec beaucoup d'arbres couchés... après 2 jours et demi de rando, ça devient dur de les enjamber ! On hésite pas mal comme le chemin est décalé d'une centaine de mètres par rapport à Maps.me. Mais il est bien tracé donc on continue ! On trouvera finalement une dernière balise 7/1 avec un point de vue et on finira la rando (comme beaucoup d'autres) à travers champs en filant droit vers la route qu'on a en ligne de mire. Pour clôturer cette rando, un plouf rapide dans le canal de Beagle, quand on rejoint la route, avec des baleines ou orques en vue (à quelques centaines de mètres).
Quand on s'apprête à prendre une photo de groupe, une jeep passe et s'arrête. On se serrera à 4 à l'arrière pour les 8 km de route qui nous séparent de Puerto Williams. Arrivés au refuge il reste 3 lits. Les gars auront la gentillesse de m'en laisser un et s'orienteront vers le camping. Après la douche, on ira se faire un resto pizza. Le resto faisant aussi hôtel, les gars prendront finalement une chambre à 3 plutôt que le camping.
Sélection des "petites" difficultés de cette dernière journée...
Avec tout ça, couchée vers minuit... le lendemain, je dormirai sans problème jusque 10h malgré le bruit du dortoir... ce mardi sera une journée plus que tranquille. Météo assez bof, je ferai un petit tour dehors vers 15h pour aller au musée (histoire des Yaghans et des premiers colons) puis petit tour dans le village jusqu'à la place de la Vierge et goûter au café en face du refuge. Puis je ferai mon sac car le lendemain, départ à 9h pour aller prendre le bateau pour Ushuïa que Cécilia m'a réservé dans la matinée. Vers 13h, il n'y avait déjà plus de place ! Le bateau circule tous les jours sauf le dimanche et mauvaises conditions météos mais ne propose que 14 places, ça part vite !
Ces deux jours au refuge El Padrino auront été très chouettes ! L'occasion d'échanger nos impressions sur la rando avec ceux qui en reviennent, de donner des conseils à ceux qui vont la faire autour de repas partagés. J'aurai eu droit à un couscous de Jonathan d'Israël. Petit bémol, je m'aperçois le mardi matin qu'il me manque 150 dollars... je vais redoubler de vigilance avec mon argent mais ça fait partie des aléas du voyage... et je prends ces pertes avec de plus en plus de philosophie !