Du 8 au 12 janvier 2024
Au Cambodge, le soleil se couche et se lève à peu près à la même heure toute l’année : 6h du matin et 6h du soir. Donc pour être productif quand il fait le moins chaud possible, les cours commencent à 7h. Heureusement que je n’en ai pas encore, ça pique. Toute cette semaine, les emplois du temps n’étaient pas encore fixés, les élèves devaient choisir leurs clubs et options donc je n’ai pas encore animé de classe à proprement parler. Mais je n’ai pas chômé pour autant.
En début de matinée, je travaillais avec certains collègues de l’équipe d’anglais. J’ai eu une formation sur le management d’une classe : différentes idées d’activités à proposer aux élèves, les règles, les punitions, les astuces pour attirer et garder leur attention, etc. J’ai également eu une petite formation pour bien comprendre où trouver chaque document, vidéo, support à utiliser sur l’ordinateur en classe.
En deuxième partie de matinée, je participais à un projet partagé entre l’équipe de communication et l’ensemble des volontaires. Une fois par jour, de 11h à midi, PSE est ouvert aux visites. Donc après avoir assisté à deux visites faites par Ombeline et appris le texte par cœur, j’ai pu faire visiter le centre à déjà deux groupes, dont le nombre allait jusqu’à neuf personnes. Sourire, parler fort, distinctement, répondre aux questions, tout ce que j’aime. Je n’étais pas peu fière que mon groupe de neuf personnes dévalise la boutique souvenirs de PSE et fassent un chèque de 10 000 euros au nom de leur entreprise.
A midi, je retrouve mes copains volontaires à la cantine pour le deuxième service. Les élèves mangent presque tous à 11h. Midi et soir, il y a du riz, et soit du poisson, soit de la viande en sauce. Suivi d’un dessert sucré. C’est franchement bon et varié, malgré le riz qui revient à chaque fois. Quand on sait que 7000 repas sont servis par jour, c’est impressionnant. Aussi, tous les employés de la cantine sont des parents d’élèves qui étaient sans emploi. Une autre info sur cette cantine qui est une vraie réussite je trouve : chaque enfant possède sa gourde et sa cuillère. Et en fin de repas, chacun lave sa vaisselle dans de grandes bassines. Ils apprennent les gestes du quotidien aussi à PSE. Internes comme externes. Parce que les jeunes qui séjournent à PSE la nuit sont aussi ceux qui ont les familles les plus difficiles. Donc à l’internat et au pensionnat, ce sont bien sûr eux qui font le ménage, lavent leur uniforme, etc. Durant le déjeuner, soit je mange avec les volontaires français, soit avec mes collègues profs d’anglais. Avec les volontaires, on va parfois s’acheter un jus de fruits ou un smoothie dans un café de la rue de PSE pour le dessert. Et c’est l’occasion pour nous de faire le point sur notre grand projet de ce début d’année : PSE a un incroyable talent. Nous planifions tout de A à Z pour que les élèves et le staff y participent : posters, communication sur les réseaux de PSE, bouche-à-oreille. Chacun peut participer aux auditions, puis si il ou elle est sélectionné, performer sur la scène du spectacle final qui aura lieu le 20 février. Donc outre la com, on a beaucoup de choses à faire : demander à certains profs et membres de l’administration de faire partie du jury, préparer le déroulement de la soirée, la décoration. Trouver un aménagement horaire pour que les jeunes puissent quand même dîner à la cantine. Et il y a 6000 élèves donc ça n’est pas une mince affaire. Je suis chargée de la logistique. Répertorier tout le matériel dont on aura besoin, où le trouver et à qui l’emprunter.
Une fois par semaine, également sur la pause déjeuner, nous avons cours de khmer. Cela va me forcer à m’y mettre de mon côté aussi et c’est une bonne chose. Ce n’est pas une langue qui va beaucoup me servir dans la vie mais j’aimerais vraiment pouvoir communiquer un minimum avec les gens que je rencontre au Cambodge et qui ne parle pas anglais. Et les enfants de PSE n’en parlons pas. La grammaire n’a pas l’air bien complexe, mais qu’est-ce que la prononciation est rude ! Quand je m’exerce en posant des questions à des enfants, ils ne comprennent absolument pas ce que je leur veux. La honte.
L’après-midi, je continue mon travail de préparation de cours dans le bureau des profs avec Marion et Mealea, les deux autres volontaires de l’équipe. On commence à contacter les bonnes personnes pour organiser un atelier karaoké une fois par semaine. Les profs qui partagent notre bureau sont très sympas et rigolos. Ils parlent en anglais en permanence, même quand on n’est pas concerné par la discussion. A la fin de la pause déjeuner, beaucoup de khmers font une sieste. Tous les élèves ont des salles de sieste faites exprès et certains profs dorment sur leur bureau. Au début, ça fait bizarre. Mais vu la chaleur, je comprends. Une autre manie des profs d’anglais : une fois par jour, souvent dans l’après-midi, quelqu’un va acheter des fruits et des épices pour le goûter à partager dans la salle. Alors attention, au Cambodge, ils adorent manger des fruits absolument pas mûrs, avec différentes sauces pimentées. J’ai goûté une fois, pas deux. C’était très amer et ça arrachait.
En fin d’après-midi, tous les enfants ont accès à plein d’activités sportives et culturelles. Ils font ce qu’ils veulent : foot, volley, badminton, boxe, karaté, musique, chorale, danse, etc. L’ambiance sur les terrains de sport est assez magique avec la lumière qui décline. Je me suis achetée une slackline chez Decathlon. J’ai trouvé deux arbres près des terrains pour en faire et c’est un franc succès auprès des enfants. Pendant une heure trente non-stop, j’ai quelques loulous de tous les âges qui viennent essayer. Certains restent plus longtemps que d’autres et réussissent même à faire quelques pas ! C’est vraiment chouette parce qu'on n'a pas besoin de parler la même langue pour comprendre le principe.
A PSE, le dîner de la cantine est servi entre 17h et 18h. J’avoue que cela fait un peu tôt pour moi. Alors soit je vais à la cantine pour remplir un tupperware que je me réchauffe un peu plus tard, soit nous allons au QG des volontaires “Chez Chanton”. C’est un boui-boui à deux rues de PSE qui ne paye pas de mine. Mais les quatre plats de la carte sont délicieux, coûtent deux euros chacun et personne n’a jamais été malade. Chanton, à force de servir des étrangers, parle franchement bien anglais. Il vit avec sa femme et ses enfants, dont le salon est quasiment là où on est attablé. Nous avons droit à chaque fois à du thé glacé et des plateaux de fruits, le tout gratuit bien sûr. On lui rend bien en faisant tourner le commerce deux ou trois fois par semaine. Ce lieu nous permet de dîner avec certains membres du staff khmer de PSE. Et aussi avec certains des salariés français qui travaillent au siège social à Versailles et sont en visite annuelle. PSE emploie six personnes en France pour s’occuper de la récolte de fonds, la communication, etc. Donc j’ai déjà dîné avec le directeur général, Thomas, qui était venu deux semaines. Puis plus récemment Constance et Sophie, qui s’occupent de la com et du recrutement des volontaires, qui sont là pour un mois. Alors forcément, elles sont contentes de revoir sur place les volontaires à qui elles ont fait passer des entretiens d’embauche en France.
Et pour finir, je me couche assez tôt le soir. Mais on se retrouve toujours à jouer aux cartes sur notre terrasse ou dans une des cuisines. Parfois on discute tout simplement. Et nous avons réussi à nous réunir à douze quelquefois pour des soirées plus spéciales. Le dimanche 7 janvier, pour l’épiphanie, nous avons trouvé une galette des rois dans une boulangerie française. Donc on a organisé un dîner avec Mamie, la créatrice de l’association. Elle était ravie. PSE a été fondé en 1996 par Christian et Marie-France Des Pallières qui ont découvert avec horreur la décharge de Phnom-Penh sur laquelle des enfants travaillaient, mangeaient et vivaient dans la plus grande misère. Depuis, ce beau projet a bien pris forme. Au tout début, les enfants voulaient les appeler Papa et Maman. Ce que le couple trouvait gênant puisque certains enfants ont encore de vrais parents. Donc ils ont opté pour Papi et Mamie, et tout le monde les appelle désormais ainsi. Papi est décédé en 2016 mais Mamie, à 82 ans, vit toujours dans le centre de PSE. Plus récemment, nous avons aussi organisé une soirée terroir à la coloc. Trois volontaires ont reçu la visite de leurs familles pendant les vacances de Noël donc les frigos étaient plein de charcuterie et de fromage. Ils ont eu la gentillesse de tout partager avec nous le temps d’une soirée. Saucisson, noix de jambon, comté, camembert, cantal, puis chocolat. Un vrai bonheur.