Il aurait pu s’appeler : Quand le sort nous empêche de dépasser l’Europe, L’hémisphère Sud, un rêve inaccessible ?, Les Français, les parias du Monde, Quand le voyage vert devient noir bis !

[J+ 38] Dimanche 22 mars 2020,

C'est l’âme en peine, que nous vous annonçons que notre rêve de tour du monde se brise … encore une fois ! Retour sur ce que nous avons vécu.

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Le jour de notre départ, le lundi 17 février, nous nous demandons si nous allons pouvoir aller en Chine en novembre. Ce jour là, 71.335 cas ont été diagnostiqués depuis le début de l’épidémie, dont 70.552 cas en Chine. En France, on compte une dizaine de cas, rien d’affolant mais nous sommes contents de partir. Nous sommes alors loin d’imaginer la propagation du virus, telle qu’elle est aujourd’hui, sur le territoire national.

[ITALIE] Traversant la suisse et arrivant à Trieste, dès le 1er jour, nous sommes contents de notre progression et hésitant à longer la côte italienne pour rejoindre la Grèce en bateau vers la ville de Bari, dans les pouilles, ou passer par la Slovénie, la Serbie, etc. Nous avons choisi la deuxième option et apprenons quelques jours plus tard que de nombreux cas sont recensés dans le Nord de l’Italie. Ouf, nous étions passés juste avant et avons quitté le pays juste à temps. Le Coronavirus nous suit mais nous réussissons à l’éviter.

[GRECE] Arrivés le 28 février à Thessalonique, nous apprenons que 2 jours auparavant, 4 cas sont déclarés dans le pays dont un à 2 cas recensé(s) dans la ville. Le carnaval est annulé par mesure de précaution. Nous restons 2 jours puis rejoignons les montagnes de Zagorie, où nous croisons très peu de monde, voire parfois personne lors de nos randos. L’objectif est de rejoindre le Nord du Péloponnèse, Bozika, près de Kiato, pour commencer notre wwoofing. Nous arrivons à destination le 04 mars, à ce moment là, 9 cas sont dénombrés dans toute la Grèce. Nous sommes alors isolés dans la montagne pendant 10 jours avec la famille composée de 4 personnes : le père, Maik, la mère Zeta, et leurs deux enfants, Yannis et Athina. 2 jours après notre arrivée, les écoles ferment soit 5 jours avant la France. Les Grecs anticipent pour éviter au maximum la propagation du virus. Seulement, les cas augmentent de jours en jours, à la fois en France et en Grèce. Les restrictions en Grèce tombent chaque jour, les bars, restaurants ferment quelques jours avant la France. Lors de notre départ de la ferme, le 16 mars, il y a 352 cas en Grèce et 5 morts contre 6633 cas en France et 148 morts.

Isolés avec la Famille Augousti ! (Il manque Yannis sur la photo).  
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Au vu des chiffres, notre choix est vite fait de rester en Grèce et de ne pas retourner en France cependant l’étau s’est resserré petit à petit sur nous et nous n’avons bientôt plus eu de choix…

Suite à l’expansion rapide du virus en France avec plusieurs milliers de cas déclarés dont un foyer en Alsace, les gouvernements des pays du monde entier prennent des mesures de restrictions. En effet, une carte des pays interdisant l’accès aux Français est diffusée. Le Kazakhstan notamment nous interdit l’accès, le Kirghizistan, le Tadjikistan et la Géorgie nous mettent en quarantaine. Nous comprenons que nous allons devoir trainer en Grèce et en Turquie. Mais dans la foulée, une loi grecque interdit l’accueil des touristes dans les hôtels, campings et autres lieux jusqu’au 30 avril, l’étau se ressert encore d’un cran.

La carte d'accès du monde  aux Français au 13 mars. 
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Suite à l’annonce de la fermeture des frontières de plusieurs pays et aux différentes restrictions (fermeture des bars, etc.), les grecs nous ferment les portes les uns après l’autre. Nous avions prévu un couchsurfing à Athènes pour la nuit du 16, seulement ce dernier annule pour cause de Coronavirus. Nous nous tournons alors vers Daphné, notre prochain wwoofing, prévu à Corfu fin du mois, pour savoir si nous pouvons avancer notre arrivée. Celle-ci annule également. En effet, les autorités grecques préconisent de limiter les contacts et de rester chez soi. Notre idée est alors de rejoindre l’île d’Amorgos, dans les cyclades. Nous contactons les deux campings et une pension là-bas, tous les retours sont négatifs … Nous contactons également une association de préservation des chevaux de l’île de Skyros, espèce endémique de l’île et menacée de disparition : https://skyrosislandhorsetrust.com/ qui cherche des volontaires pour aider à préserver la race en s’occupant des chevaux. Très intéressés par notre demande, ils refusent au vu des circonstances … Notre dernière chance de ne pas finir à la rue est Alexandra, de l’association HELLESCC, des malades de Crohn. Comme vous l’avez peut-être lu dans le précédent article celle-ci nous répond qu’elle ne peut nous accueillir, trop risqué pour elle et Jérôme, en tant que malades chroniques. Elle nous met cependant à disposition les locaux de l’association pour la nuit. Cette nuit du 16 mars nous a permis de nous poser et de réfléchir à la situation …

A la gare d'Athènes !  
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Que faire ? Après réflexion, nous trouvons la situation en France trop préoccupante, trop risquée, et après seulement 1 mois de voyage, nous n’avons pas du tout l’envie d’abandonner cette nouvelle aventure. Nous décidons donc de rejoindre l’île en ferry, plus sûre qu’Athènes, en mode camping sauvage / koh-lanta pendant 7 à 10 jours pour s’auto-confiner. Coïncidence, le lendemain, 17 mars, les autorités grecques prennent une nouvelle disposition : 14 jours d’auto-confinement pour tous les voyageurs à l’arrivée sur le territoire grec. Cependant, nous ne sommes pas vraiment concernés puisque nous sommes déjà en Grèce depuis 21 jours. Nous passons 10 heures sur le bateau à destination d’Amorgos, avec de nombreuses escales sur des îles intermédiaires, avec masques sur le visage et gel hydro alcoolique en quasi-perfusion. Arrivés sur l’île à 4h30 du matin, en pleine nuit, nous marchons environ 1km sur la côte pour s’éloigner du port et posons notre tente derrière une église. L’endroit est plutôt sympa, la nuit fut courte mais bonne et la vue au réveil magnifique ! Nous nous réjouissons de passer au moins une semaine dans ce cadre paradisiaque à faire de la rando et à se contenter du minimum en mode bivouac ! Nous plions bagages vers 10h, des travailleurs sont entrain de poser des canalisations pour l’assainissement, nous continuons vers le Sud de l’Île. Il y a 2 églises puis une pointe en cul de sac, nous sommes obligés de faire demi-tour et repasser par le centre de Katapola, la ville portuaire, pour démarrer sur les sentiers balisés. Nous retombons sur les travailleurs du matin, il est environ 12h, et là deux mecs en civils que nous pensions être les chefs de chantiers, nous interpellent en disant être de la police. Ils nous montrent leurs cartes et nous expliquent que le camping sauvage est interdit ! ET MERDE ! Ils précisent que le coronavirus est sur l’île et que le dernier bateau acceptant des passagers à bord est demain, après c’est fini !

Là pour nous, c’est l’effondrement, on comprend que c’est la fin de l’aventure sur Amorgos, voire la fin tout court ! et que demain nous devons partir … Dépités, nous prenons un café et une pâtisserie, à emporter bien sûr, et nous nous posons sur les bancs de la place centrale. Jérôme repart chercher une bière, je lui suggère de prendre au moins une Corona ! Là une voiture noire s’arrête, la dame me salue en Grec. Jérôme revient avec une bière « Mythos » et je lui dis « ben tiens, tu n’as pas pris de Corona finalement ? » et là, la dame nous lance « Mais vous êtes Français ?? » C’est Géraldine, originaire de Bretagne, elle vit ici depuis 2 ans et souhaite nous aider à trouver quelque chose pour dormir et éviter de retourner en France. Après plusieurs coups de fil et échanges directs avec les locaux, tout le monde refuse. D’une part, ils ont tous très peur car l’île accueille une population plutôt âgée puis il y a un médecin sur l’île mais pas d’infrastructures médicales dignes de ce nom. D’autre part, la police surveille et tout se sait sur une île et les amendes sont très très salées pour les hôteliers qui ouvriraient leurs portes aux touristes (5000 euros) !! Chez elle, pas possible, son terrain n’est pas adapté pour poser une tente et son compagnon, Pierre, n’est pas très chaud. Ils sont autant déboussolés que nous par la situation, ont peur pour eux mais aussi pour nous car ils ont tous les deux mal à la gorge donc ils ne sont pas surs non plus de ne pas nous filer quelque chose. Bref, finalement, elle nous propose de nous emmener sur une plage de l’extrême Sud de l’île vers une partie quasiment abandonnée pour poser notre tente tranquille et nous apporter quelque chose au besoin sachant qu’un distributeur d’eau potable et une petite supérette sont à 10 minutes à pied. Super ! L’endroit est idyllique mais le vent est cinglant, ça caille un peu. Nous installons notre campement à l’abri du vent, coin couchage, cuisine et bien sur toilettes ! Nous sommes vraiment pas mal du tout !

Nous avons passé une super nuit, réveil quasiment à 10h, contrairement à Géraldine qui s’est inquiétée ! Il fait gris et froid. Avant de partir pour une rando à la journée, nous décidons tout de même de contacter l’ambassade de France pour prendre la température … Elle fut glaciale ! Ce fut le couperet pour notre aventure ! La dame à l’autre bout du fil s’étonne que nous soyons encore sur une île et nous incite plus que fortement à rejoindre le continent dans un premier temps. Elle nous assure que le système de santé grec est défaillant suite à la crise de 2008 et qu’il vaut vraiment mieux pour notre sécurité sanitaire rentrer en France le plus vite possible avant que les vols ne soient interrompus définitivement. Pour l’instant, aucun rapatriement n’est mis en place, c’est à nous de nous organiser. La douche froide !! On appelle Géraldine dans la foulée qui nous explique qu’elle s’est fait presque insulter par les habitants de l’île pour nous avoir transporté. Elle nous propose de nous emmener à Aegliari, l’autre ville portuaire au Nord pour prendre le bateau du lendemain et essayé de trouver une solution pour la nuit. C’est décidé, on lève le camp, amers, mais conscients des risques qui pèsent sur nous, et potentiellement sur les insulaires, si nous restons en Grèce. De plus, la situation sur une autre île, Lesbos, avec des camps de migrants est une véritable bombe sanitaire si un cas est déclaré là-bas. Nous serions les premiers à vouloir partir si les choses évoluent comme en France et c’est très probablement le cas … Géraldine sera adorable jusqu’au bout, elle nous fera une halte touristique au monastère de l’île, puis nous trouvera une chambre clandestinement (à 50 euros la nuit tout de même) après des heures d’acharnement ! Nous passerons la nuit au chaud. Nous nous réveillons avec la gueule de bois au propre comme au figuré ! Départ de l’île à 7h20, c’est reparti pour 8h de bateau.

Les réfugiés à Amorgos ...  

Arrivés à Athènes, Alexandra et HELLESCC nous sauvent encore une fois la mise avec un hébergement dans leurs bureaux pour la nuit. Nous avons réservé, à contre cœur, un vol Athènes-Paris et un TGV Paris-Strasbourg pour la modique putain de somme de 500 euros ! … ou quand le destin nous force à prendre l’avion !!

Finalement, le TGV est supprimé mais heureusement Sébastien rentré, comme nous en urgence, depuis la Colombie, propose un covoiturage avec la dernière voiture de location disponible jusqu'à Rosheim (67) ! Il aura la gentillesse de nous conduire jusqu'à Muttersholtz en Audi A4 automatique 3,5L svp ! (Nous avons évidemment gardé nos masques, nous nous sommes tartinés de gel et sommes restés à l'arrière du véhicule avec nos autorisations de sortie en poche et une autorisation verbale de la Police de Roissy-CDG.) Pas le choix ! Cependant, nous sommes étonnés de n'avoir subi aucun contrôle à l'arrivée à l'aéroport ainsi que sur les 470 km de route. Nous avons, par contre, croisé approximativement qu'une dizaine de voitures, ça fait bizarre !

Nous voilà donc en confinement dans le F1 de maman / belle maman avec balcon et vue sur le magnolia en fleurs ! Y'a pire.

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Nous sommes rentrés oui ! et nous avons du interrompre pour la deuxième fois notre rêve oui !

MAIS …

Nous sommes sains et saufs, nous n’avons pas de symptômes liés au coronavirus pour l’instant et nos proches non plus.

De plus, voyager est déjà un privilège en soi et nous avons vécu de très belles choses pendant ces 5 semaines : rencontres, paysages, aventures …

Enfin, nous ne nous laissons pas abattre et comme en 2019 nous avons décidé de repartir en 2020 et bien là, nous persévérons encore et partirons dès que possible !

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Cette situation de crise nous amène à nous reposer les questions de notre système et nos modes de vie à la fois économiques, sociales, politiques et environnementales. En effet, la mondialisation/le capitalisme montrent aujourd’hui ses limites. Nos Etats, soit disant grandes puissances mondiales, se croyaient intouchables grâce à la croissance mais ce virus nous montre le contraire et nous met face à nos responsabilités. Il démontre notamment que les choix gouvernementaux, depuis des décennies, de destruction des services publics sont évidement des erreurs lorsqu’on s’aperçoit qu’on ne peut compter que sur le personnel soignant, en manque de moyens, pendant que la bourse dégringole et les actionnaires s'envolent. Cela pose aussi la question des inégalités sociales face au virus quand des personnes se lèvent chaque matin pour assurer la continuité de la vie sociale comme la sécurité des personnes ou l’accès à l’alimentation, aux transports alors que d'autres ont la possibilité de faire du télétravail, de s'isoler. Ou l’inégalité du confinement entre ceux qui ont une maison avec jardin ou encore une résidence secondaire au vert et ceux qui doivent se contenter de leur clapier sans balcon, une chambre universitaire. Et la solidarité ou plutôt la désolidarisation quand certains ne respectent pas les mesures de confinement par bien-être personnel au risque de propager le virus ou celle que nous avons vécu au sein de l’Europe quand tout le monde nous a rejeté car nous avions un passeport français, similaire à la stigmatisation des asiatiques en France lorsque le virus s’est déclaré en Chine !

Et enfin, sujet cher à nos cœurs depuis longtemps, ce cher virus qui a stoppé la frénésie de notre système de consommation, a permis de mettre au jour plusieurs bénéfices environnementaux. Apparemment, le ralentissement des activités industrielles aurait déjà des effets bénéfiques sur la qualité de l’air. Les rumeurs sur la transmission du virus à l’Homme par le pangolin ou les chauves-souris, espèces menacées, a permis d’étendre l’interdiction de commercialisation à tous les animaux sauvages en Chine et à freiner les consommateurs. Et les mesures de restrictions et de confinement qui obligent les gens à limiter la consommation au strict minimum permettront peut-être de créer de nouvelles bonnes habitudes comme le fait-maison, le renforcement du lien social dans le cercle familial, etc. Nous avons lu cette phrase qui nous a beaucoup interpellé : et si le virus était l’espèce humaine et le coronavirus, le vaccin ? Peut-être que c’est notre chère planète surpeuplée et asphyxiée qui veut nous fait passer un message : ça ne peut plus continuer comme ça !

Alors on espère juste que quand ce virus sera derrière nous, le monde ne se ruera pas dans les magasins pour combler sa frustration suite au confinement et que les entreprises ne produiront pas à outrance pour rattraper « le temps perdu » car finalement et si c’était du temps gagné ?!

Nous sommes persuadés que si nous continuons dans ce système, ce virus n'est que le premier d'une longue série ...

Et en maintenant, le coronavirus à l’air de servir d’alibi à tous les courants de pensée (https://www.franceculture.fr/emissions/la-transition/la-transition-chronique-du-lundi-10-fevrier-2020) … vous aurez eu, en tous cas, le nôtre.

A chacun de méditer pendant le confinement … #Restezchezvous #stayathome !

Bon courage à tous.

Ravie de vous savoir en bonne santé et merci pour vos réflexions plus que pertinentes...

Des gros gros bisous à vous prenez soin de vous Mathilde

J
Julie et Wani

Et bin ! Quel acharnement contre ce beau voyage ! Bravo en tout cas pour ce début d'aventure, vous faites preuve d'une belle philosophie ! Bon retour, même si je crois que les plages grecques resteront plus attrayantes que le confinement d'ici...

Et sinon, Hadra est né ! Sauf qu'il s'appelle Max 😉 Lui et sa maman vont bien, c'est la joie dans le confinement !

Bisous à vous et à bientôt, si on se voit avant que vous repartiez !

M, J & W

Heureuse de vous savoir rentrés et d être en forme comme dit ce n est que partie remise je vous fais de gros bisous et prenez soin de vous 😘😘😘

L
Les Baudry à velo

On est de tout cœur avec vous pour digérer ce 2ème coup dur. .. Mais supers contents de vous savoir en forme et en sécurité ! On pense bien à vous, courage, ça n est que partie remise !! Bisous de nous 4 !

coucou les jeunes

Bon sachez qu on va bien. C était certainement un coup de froid avec ce p...... de vent

j ai fais ce que j ai pu

j ai adoré vous rencontrer

vous m avez bcps apporté aussi

je vous embrasse très très fort et n oubliez pas votre promesse on recommence votre tour du monde la ou il s est terminé c est a dire a Amorgos

Géraldine

ps/ les habitants ne m en veulent pas ils ont compris que l erreur était plutôt de vous avoir vendu des billets pour l ile et ont compris aussi qu en tant que française et humaine il m était impossible de vous laisser comme cela

Salut vous deux,

J'ai beaucoup pensé à vous quand l'épidémie a touché l'Europe et je n'avais que peu de doutes quant à l'issue de votre périple, notamment au vu de la maladie de Jérôme...

C'est vraiment dommage, certes, mais ce n'est que partie remise ! 😉

Je suis ravi de vous savoir rentrés et en bonne forme, même si vous n'avez pas rejoint l'endroit le plus safe qu'il soit...

Prenez bien soin de vous et au plaisir !

Raph.

Salut les collègues

Ben on est bien contents que vous soyez en bonne santé ... eh oui la solidarité et le fait maison sont de rigueur. Va falloir que certains se bougent un peu et change leur mode de vie et de consommation.

Gros gros bisous

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