Que faire ? Après réflexion, nous trouvons la situation en France trop préoccupante, trop risquée, et après seulement 1 mois de voyage, nous n’avons pas du tout l’envie d’abandonner cette nouvelle aventure. Nous décidons donc de rejoindre l’île en ferry, plus sûre qu’Athènes, en mode camping sauvage / koh-lanta pendant 7 à 10 jours pour s’auto-confiner. Coïncidence, le lendemain, 17 mars, les autorités grecques prennent une nouvelle disposition : 14 jours d’auto-confinement pour tous les voyageurs à l’arrivée sur le territoire grec. Cependant, nous ne sommes pas vraiment concernés puisque nous sommes déjà en Grèce depuis 21 jours. Nous passons 10 heures sur le bateau à destination d’Amorgos, avec de nombreuses escales sur des îles intermédiaires, avec masques sur le visage et gel hydro alcoolique en quasi-perfusion. Arrivés sur l’île à 4h30 du matin, en pleine nuit, nous marchons environ 1km sur la côte pour s’éloigner du port et posons notre tente derrière une église. L’endroit est plutôt sympa, la nuit fut courte mais bonne et la vue au réveil magnifique ! Nous nous réjouissons de passer au moins une semaine dans ce cadre paradisiaque à faire de la rando et à se contenter du minimum en mode bivouac ! Nous plions bagages vers 10h, des travailleurs sont entrain de poser des canalisations pour l’assainissement, nous continuons vers le Sud de l’Île. Il y a 2 églises puis une pointe en cul de sac, nous sommes obligés de faire demi-tour et repasser par le centre de Katapola, la ville portuaire, pour démarrer sur les sentiers balisés. Nous retombons sur les travailleurs du matin, il est environ 12h, et là deux mecs en civils que nous pensions être les chefs de chantiers, nous interpellent en disant être de la police. Ils nous montrent leurs cartes et nous expliquent que le camping sauvage est interdit ! ET MERDE ! Ils précisent que le coronavirus est sur l’île et que le dernier bateau acceptant des passagers à bord est demain, après c’est fini !
Là pour nous, c’est l’effondrement, on comprend que c’est la fin de l’aventure sur Amorgos, voire la fin tout court ! et que demain nous devons partir … Dépités, nous prenons un café et une pâtisserie, à emporter bien sûr, et nous nous posons sur les bancs de la place centrale. Jérôme repart chercher une bière, je lui suggère de prendre au moins une Corona ! Là une voiture noire s’arrête, la dame me salue en Grec. Jérôme revient avec une bière « Mythos » et je lui dis « ben tiens, tu n’as pas pris de Corona finalement ? » et là, la dame nous lance « Mais vous êtes Français ?? » C’est Géraldine, originaire de Bretagne, elle vit ici depuis 2 ans et souhaite nous aider à trouver quelque chose pour dormir et éviter de retourner en France. Après plusieurs coups de fil et échanges directs avec les locaux, tout le monde refuse. D’une part, ils ont tous très peur car l’île accueille une population plutôt âgée puis il y a un médecin sur l’île mais pas d’infrastructures médicales dignes de ce nom. D’autre part, la police surveille et tout se sait sur une île et les amendes sont très très salées pour les hôteliers qui ouvriraient leurs portes aux touristes (5000 euros) !! Chez elle, pas possible, son terrain n’est pas adapté pour poser une tente et son compagnon, Pierre, n’est pas très chaud. Ils sont autant déboussolés que nous par la situation, ont peur pour eux mais aussi pour nous car ils ont tous les deux mal à la gorge donc ils ne sont pas surs non plus de ne pas nous filer quelque chose. Bref, finalement, elle nous propose de nous emmener sur une plage de l’extrême Sud de l’île vers une partie quasiment abandonnée pour poser notre tente tranquille et nous apporter quelque chose au besoin sachant qu’un distributeur d’eau potable et une petite supérette sont à 10 minutes à pied. Super ! L’endroit est idyllique mais le vent est cinglant, ça caille un peu. Nous installons notre campement à l’abri du vent, coin couchage, cuisine et bien sur toilettes ! Nous sommes vraiment pas mal du tout !
Nous avons passé une super nuit, réveil quasiment à 10h, contrairement à Géraldine qui s’est inquiétée ! Il fait gris et froid. Avant de partir pour une rando à la journée, nous décidons tout de même de contacter l’ambassade de France pour prendre la température … Elle fut glaciale ! Ce fut le couperet pour notre aventure ! La dame à l’autre bout du fil s’étonne que nous soyons encore sur une île et nous incite plus que fortement à rejoindre le continent dans un premier temps. Elle nous assure que le système de santé grec est défaillant suite à la crise de 2008 et qu’il vaut vraiment mieux pour notre sécurité sanitaire rentrer en France le plus vite possible avant que les vols ne soient interrompus définitivement. Pour l’instant, aucun rapatriement n’est mis en place, c’est à nous de nous organiser. La douche froide !! On appelle Géraldine dans la foulée qui nous explique qu’elle s’est fait presque insulter par les habitants de l’île pour nous avoir transporté. Elle nous propose de nous emmener à Aegliari, l’autre ville portuaire au Nord pour prendre le bateau du lendemain et essayé de trouver une solution pour la nuit. C’est décidé, on lève le camp, amers, mais conscients des risques qui pèsent sur nous, et potentiellement sur les insulaires, si nous restons en Grèce. De plus, la situation sur une autre île, Lesbos, avec des camps de migrants est une véritable bombe sanitaire si un cas est déclaré là-bas. Nous serions les premiers à vouloir partir si les choses évoluent comme en France et c’est très probablement le cas … Géraldine sera adorable jusqu’au bout, elle nous fera une halte touristique au monastère de l’île, puis nous trouvera une chambre clandestinement (à 50 euros la nuit tout de même) après des heures d’acharnement ! Nous passerons la nuit au chaud. Nous nous réveillons avec la gueule de bois au propre comme au figuré ! Départ de l’île à 7h20, c’est reparti pour 8h de bateau.
Arrivés à Athènes, Alexandra et HELLESCC nous sauvent encore une fois la mise avec un hébergement dans leurs bureaux pour la nuit. Nous avons réservé, à contre cœur, un vol Athènes-Paris et un TGV Paris-Strasbourg pour la modique putain de somme de 500 euros ! … ou quand le destin nous force à prendre l’avion !!
Finalement, le TGV est supprimé mais heureusement Sébastien rentré, comme nous en urgence, depuis la Colombie, propose un covoiturage avec la dernière voiture de location disponible jusqu'à Rosheim (67) ! Il aura la gentillesse de nous conduire jusqu'à Muttersholtz en Audi A4 automatique 3,5L svp ! (Nous avons évidemment gardé nos masques, nous nous sommes tartinés de gel et sommes restés à l'arrière du véhicule avec nos autorisations de sortie en poche et une autorisation verbale de la Police de Roissy-CDG.) Pas le choix ! Cependant, nous sommes étonnés de n'avoir subi aucun contrôle à l'arrivée à l'aéroport ainsi que sur les 470 km de route. Nous avons, par contre, croisé approximativement qu'une dizaine de voitures, ça fait bizarre !
Nous voilà donc en confinement dans le F1 de maman / belle maman avec balcon et vue sur le magnolia en fleurs ! Y'a pire.