Même si le trajet était déjà long, nous avons fait que la moitié pour atteindre la dernière étape : Darwin. Cette fois nous forçons un peu le pas. Cette zone semble encore plus reculée et le seul stop digne de ce nom se trouve à Tenant Creek. Une bourgade peuplée quasi-exclusivement d'aborigènes. L'ambiance est encore différente que dans les villes rencontrées auparavant. C'est comme rentrer dans un nouveau pays avec une nouvelle population et une nouvelle culture. Pourtant même au fin fond du désert nous pouvons constater les ravages de la colonisation britannique. Même dans un territoire qui leur appartient, le chômage est massif et le niveau de vie semble incomparable avec le reste de l'Australie... Mais le désert suit son cours. Il fait toujours aussi chaud, les animaux morts foisonnent tout comme les gros "Wedge-tailed eagle". Au bord de la route, d'immense termitières s'élèvent arborant des tee-shorts où des chapeaux, donnant un peu d'humanité au lieu.
Tout à coup, quelques buissons apparaissent, puis de l'herbe sur le bord de la route. Et en un rien de temps, des arbres se transforment en palmes et des rivières à sec deviennent des billabongs. Pas de doutes, nous sommes de retour dans les tropiques ! Sur le papier ça parait rassurant, mais la nature est encore plus menaçante. Les crocos sont déjà mentionnés partout et la paranoïa commence à monter. Mais la peur ne résistera pas à la tentation des sources d'eau chaude de Mattaranka. Au beau milieu de la forêt tropicale et à quelques pas d'une rivière infestée de crocodiles, cet eau limpide forme une piscine naturelle surplombée par différentes palmes. C'est sans surprise que nous y passerons 2 jours. Même la nuit ne parvient pas à nous sortir d'ici. Au contraire, la lune traversant les arbres et se reflétant dans l'eau nous à sembler être le cadre idéal pour quelques bières.
C'est l'esprit encore embrumé que l'on rejoint Katerine le lendemain. Les nuits commencent à devenir difficile. La chaleur ne descend pas et nous avons en plus affaire au fléau qu'est l'humidité. Le van est une fournaise et rien ne peut sécher ici. Même pas Salomé qui commence à sentir l'aborigène...! Étonnamment nous étions mieux dans le désert. La cerise sur le gateau fut le remplacement des mouches par les moustiques. Des chasses sont organisées dans le van où une 20aine, gorgés de sang, trépassent chaque soir sous la main de Salomé. Je pense que cette nuit-là fut mon coup de grâce. Bien installé, un orage éclate nous obligeant à tout rentrer en urgence avec la casserole de pate bouillante. La température doit atteindre 40°C dans le van. 600 millions de moustiques entrent avec nous dans la précipitation. Il devient alors impossible d'aérer le van. Coincé dans la forêt nous n'avons pas une brise. Je me suis retrouvé à 3h du matin en caleçon dehors avec une assiette comme éventail et à utiliser ma dernière énergie pour râler et faire des rondes vérifiant si une bête ne nous attaquait pas.
Le lendemain fut, a priori, un bon moment de répit au fameux Litchfield National Park où l'on se baigne aux Florence Falls (avant que je tombe nez à nez avec un bébé croco espérant qu'il ne cache pas la mère). La nuit est encore agitée malgré notre nuit en tente. Le freecamp est à côté d'une rivière fermée à la baignade car il y a des crocodiles. Je n'ai pas fermé l’œil de la nuit...! Psychologiquement et physiquement ça devient difficile. Et ma petite randonnée le lendemain m'a mis à bas l'once de moral qu'il me restait. Alors que je me suis arrêté 15 secondes pour apprécier la vue, des sangsues s'en prennent à moi ! J'arrive à les enlever avant qu'elle ne morde trop fort mais l'une d'elle cherche à entrer dans ma chaussure par un trou. Je la vois se dandiner pour passer au travers le textile. Une horreur. Et le pire sera la réaction de Salomé m'affirmant que c'est aussi grave que les tiques. L'hypocondrie, endormi en moi, ressurgi à pleine puissance ! On fonce au centre médical. Fermé. Paniqué, j'insiste bien sûr. Tant pis pour leur pause déjeuner. La chute de l'histoire est que l'urgentiste m'a ri au nez en me conseillant de revenir quand je me "serait fait mordre par un serpent"... Ma dignité s'envolent comme l'amour que je porte à Salomé, qui est déjà entrain d'appeler tout le monde pour raconter une nouvelle histoire. Ca en est trop ! Fini la nature, on trace vers Darwin. Ironiquement, c'est de ces malheurs que naitre la plus belle fin imaginable de l'Australie : rencontrez des locaux et vivre chez eux pendant un mois ! Merci la météo, merci les sangsues, et surtout, merci Salomé et son "besoin" de clim !