Il s'agit d'un échange de bons et justes services où nous troquons quelques heures de travail contre un toit et de la nourriture. Nous nous retrouvons donc chez Gaye, une marginale qui vit dans une maison autonome en plein bush. Elle a sa source d'eau, son énergie solaire et cultive la quasi totalité de ce qu'elle mange. Bien que le logement soit rustre, une tente planté dans un "donga" (sorte de mobil-home un peu pourri), l'expérience est riche. Nous peignons, désherbons, prenons soin des "pineapple patch" ou encore de ses arbres fruitiers. Un jardin d'Eden où on trouve goyave, mangues, gingembre, curcuma, ananas, etc. C'est encore l'occasion de découvrir un autre style de vie qui, en l’occurrence, rejette une partie des fondamentaux de la société capitaliste. Mais le manque assez brutal de confort (et de sécurité !) commence à peser à Salomé. Et même si elle supportait le hurlement des dingos pendant la nuit, les araignées dans la douche ouverte, tout comme les bêtes qui viennent gratter le mobil-home quand on dort, la vue, d'un peu trop près d'un serpent fut de trop. Nous quittons donc notre HelpX avec pour objectif le plus gros parc d'Australie : Kakadu.
Le parc est très symbolique du Nord de l'Australie. On se retrouve à mi-chemin entre le désert et les tropiques, et avec une nature particulièrement hostile. Le parc est d'ailleurs quasi totalement fermé. Nous sommes toujours dans la "wet season" et une partie des routes et sentiers sont submergés. D'autant plus que c'est une période où pullulent les crocodiles. Il y en a environ 10 000 ce qui représente 10% de tous les crocos du Northern Territory.
Nos randonnées sont donc limitées mais nous pouvons tout de même apprécier les collines sacrées de Nourlangie, les terrifiants billabongs ou la mystique Adelaide River. Nous essayons d'aller jusqu'à Ubir, le lieu le plus connu du parc, mais nous tombons sur une route inondée où un aborigène vient... s'y baigner. Il mériterait un Darwin Awards ! Ne voulant pas rester sur ma fin, je traîne Salomé sur un des seuls sentiers ouverts. A priori tout était très bien avant qu'un ciel menaçant s'amène. On force un peu le pas et, dans sa course, Salomé se prend une énorme toile d'araignée en pleine tête. C'est la crise ! Surtout quand elle verra la bête ensuite, une belle "golden orb" de la taille de ma main. Et les mauvaises surprises ne vont pas s'arrêter là. Le sentier se rapproche dangereusement d'un billabong où la végétation est si dense qu'on ne voit à peine l'eau. Ça devient inquiétant. On tombe sur un panneau qui se veut explicite : "Des crocodiles marins ont été aperçus TRES proche du sentier" suivi de l'inutile"soyez vigilants". On traversera ce passage au pas de course et sur nos gardes. En arrivant au van Salomé est dans une colère noire comme si je pouvais être responsable de la faune locale ! Dans la précipitation, je ne fais ps le plein et je pensais être "laaarge". Et mes calculs auraient été bons si... la pluie n'avait pas recouvert notre route de 80cm d'eau ! Une vraie rivière qui serait apparue en 30mn.
Nous faisons donc demi-tour pour nous retrancher dans un superbe camping où les wallabies, par dizaines, viennent nous saluer. Il y a une belle piscine et des petites ballades autour qui remplaceront celle de Kakadu. Le lendemain je pars donc avec ma petite carte qui indique tout de même des crocos dans tous les plans d'eau. La dame de l'accueil m'a aussi mis en garde en m'interdisant de m'en approcher. A croire qu'un client y est passé ! Faut dire qu'ils exagèrent un peu, ils ont même mis un pont balançant traversant le billabong. Et c'st à peine s'il touche pas l'eau. je me croirai dans un remake raté d'Indiana Jones. Et c'était un leurre de penser que le sentier serait entretenu. Je croise des dizaines d'énormes araignées avant de me retrouver dans les hautes herbes à côté d'un point d'eau que je ne peux même pas apercevoir. Je crois que mon hypocondrie a laissé le pas au masochisme et je me demande ce que je suis venu faire ici seul. Tout ça pour me prouver en être capable. L’ego des hommes...! Et alors que je marchais, je distingue enfin le billabong et le fameux pont prêt à craquer. Par challenge, je me parie pouvoir monter dessus. C'est à ce moment qu'un énorme bruit résonne. Comme si quelqu'un avait fait une bombe dans ce petit lac. Je ne l'ai pas vu mais j'en suis sûr : c'est un crocodile. Heureusement qu'il a eu peur de moi, il m'avait probablement pas bien vu non plus ! Fini les challenges, je rentre en courant jusqu'au van. En plus il est l'heure de partir car aujourd'hui nous allons au... "jumping crocodile".
Nous sommes fans de ces bêtes, que voulez-vous ! Je vous passe notre arrivée dans le centre où un croco est déjà affaissé sur le bord de la Mary River et l'animateur vient avec un anaconda de 3m sur les épaules. Quel accueil ! On monte à bord et on aperçoit déjà une femelle foncer sur nous. A force de les nourrir, ils ont compris quand venir. Le show commence et le présentateur accroche un bout de viande au bout d'une longue perche. L'idée est de montrer que l'animal peut littéralement sortir de l'eau à la verticale pour venir chercher son goûter. Et avec un mâle de 5m c'est plus qu’impressionnant, surtout dans un bateau qui en fait 10 ! Et la chance est avec nous car l'animateur aperçoit un aigle marin sur le retour. A peine montre-t-il le bout de viande que le rapace s'élance et l'attrape en plein vol.
Là c'est sûr, nous avons fait le plein d'aventures et nous pouvons rentrer à Darwin avec de nouvelles histoires à raconter.