Carnet de voyage

L'aventure cambodgienne

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Troisième étape : le Cambodge
Mai 2019
10 jours
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J1

Nous voilà donc prêts à quitter le Laos pour découvrir une nouvelle contrée : le Cambodge.

Nous avions acheté nos billets de bus la veille, et à 8h tapantes nous voilà à attendre la pirogue qui nous fera quitter les 4 000 îles. Tout se déroule bien, la promenade sur le Mékong est agréable et nous profitons d'être à l'air libre avant de faire nos heures de bus.

Notre itinéraire est des 4 000 îles jusqu'à la frontière Laos/Cambodge et de la frontière jusqu'à Siem Reap.

Arrivés au débarcadère, nous cherchons (et trouvons, ouf) l'arrêt du bus. Là, nous attendons 30 minutes que le bus arrive, un peu vieillot mais grand et avec la clim, très bien.

Trois quarts d'heure plus tard, nous sommes à la frontière où le bus nous dépose, et là, les galères commencent...

Il faut savoir que sortir du Laos n'est pas une mince affaire, finalement ils les aiment bien leurs touristes et veulent visiblement les garder. Nous sommes un groupe de voyageurs à nous approcher des guichets (dont quelques français) où on doit nous faire un tampon pour nous autoriser à sortir du territoire. Bien, jusque là tout va bien. En face de ces guichets, un homme à une table essaie de nous vendre des visas cambodgiens pour 40 dollars, mais nous nous sommes renseignés (tous) et ils les vendent 30 dollars à la frontière plus loin, donc nous refusons son offre. Je tends mon passeport au guichet et là le charmant monsieur sourire (qui tirait une tête de six pieds de long) me demande 2 dollars. Je lui demande mais "pourquoi 2 dollars ?" Mais pour payer l'encre du tampon enfin !

Chez nous on appelle ça du racket organisé, ici ce sont eux qui font la loi. Nous sommes un petit groupe à essayer de négocier et de faire notre petite révolution française, ça avait bien fonctionné en 1789, mais il nous manquait sûrement la guillotine, ils ne cèdent pas et nous payons.

Nous traversons à pied avec nos sacs le no man's land entre le Laos et le Cambodge et nous arrivons enfin au bâtiment suivant.

Là nous remplissons un papier pour faire nos visas et nous avançons au guichet. Le monsieur encore plus charmant que le précédent prend mon passeport et me demande 35 dollars au lieu de 30 ! Nous étions avec des français qui étaient entrés au Cambodge quinze jours auparavant et qui avaient payé 30 dollars, ce que nous essayons d'expliquer. Il ne veut rien entendre, sort de sa guérite et s'en va. Il revient 10 minutes après et rebelote, il redemande le même prix et à nos réponses repart encore.

Nous sommes toujours le petit groupe de français (toujours les mêmes qui mettent la pagaille haha) et nous attendons. Un homme vient nous voir et nous dit que le bus ne nous attendra plus, il faut bien se résoudre à payer puisque ici aussi, ils ont le pouvoir et pratiquent les prix qui leur plaisent...

Nous payons nos 35 dollars et sortons de là. Un terrain vague avec quelques bicoques nous attendent. Nous rejoignons un autre groupe qui nous dit que le bus n'est pas encore là et qu'il faut attendre (à part ça il devait partir...). Nous attendons donc 1h, heureusement en bonne compagnie, avec le toulousain que nous avons retrouvé et un couple de parisiens (très sympas pour des gens de la capitale haha).

Quelqu'un nous fait signe de venir vers un minibus qui a l'air d'avoir fait plus que son temps... Sur notre billet il est inscrit "bus VIP", sur celui du toulousain "bus express", ce ne fut ni VIP, ni express, je vous le garantis...!

Le conducteur n'arrive pas à démarrer le minibus, rassurant, il fait signe aux garçons de pousser, ce qu'ils font, et nous remercie avec un bon coup d'accélération et une belle fumée du pot d'échappement sur tout le groupe qui était derrière lui...

Nous commençons à monter dans le bus, ils essaient d'entasser les valises et les gens, bref nous sommes tordus et ne pouvons bouger que les cils, c'est parti pour 360km autrement dit 6h de bus...

Après 1h30 de route, le minibus s'arrête et fait descendre tout le monde, nous allons changer de bus. On se dit "chouette, on sera moins serrés !"...

Là, nous attendons 1h30... Un autre minibus arrive, plus récent, mais nous sommes toujours le même nombre et nous nous entassons de nouveau à l'intérieur. Il est 15h30, il nous reste 300km à faire, donc 5h de route, un rapide calcul nous apprend que nous ne serons jamais à Siem Reap à 19h...

Nous commençons à rouler, nous faisons en moyenne du 60km/h sur une grande route, et le chauffeur (très désagréable) n'a pas l'air de vouloir avancer...

La nuit tombe petit à petit, et là, nous nous rendons compte qu'en réalité l'homme qui conduit est une taupe ! Il n'y voit rien ! Dès qu'une voiture arrive en face avec les feux de croisement il se déporte dans le fossé, il ne coupe pas ses phares pour les voitures d'en face malgré leurs appels, bref nous avons frôlé la mort une bonne vingtaine de fois...! Et là, nous faisons du 30, 40km/h maximum... C'est long, très très long...

Nous arrivons ENFIN à Siem reap à 23h, levés depuis 7h le matin et dernier repas datant de la veille au soir... Nous descendons avec bonheur du bus et prenons un tuk-tuk pour aller à l'hôtel, mais la galère ne s'arrête pas là... Arrivés là bas, ils ne trouvent pas notre réservation, puis après maints essais, miracle ils la retrouvent 30 minutes plus tard ! Nous montons dans la chambre prendre une douche, la clim fonctionne très mal mais on se dit pour une nuit tant pis on changera demain, et là, j'ouvre le lit : les draps pleins de taches marrons !

Pas possible de dormir là dedans, la clim ok mais là c'est trop. Nous redescendons à l'accueil et demandons au réceptionniste de venir voir, il nous propose donc d'autres chambres, une dans laquelle la clim ne marchait encore pas, une dans laquelle les draps étaient tachés de sang, et enfin une troisième qui a l'air propre et où la clim fonctionne ! Miracle ! Il est 1h30 du matin nous allons ENFIN nous coucher !!

Afin de mieux comprendre ce pays, je vous propose une parenthèse histoire (bien loin d'une romance, j'en ai peur) très intéressante, bonne lecture !

Jusqu'au XIXe siècle le pays est la proie d'invasions menées par les pays voisins. Le Cambodge est le théâtre de beaucoup de tragédies de palais : trahisons, coups de poignard, assassinats et autres décapitations (un vrai Game of Thrones !). En 1722, pas moins de quatre rois complotent les uns contre les autres. Le Siam (Thaïlande) et le Vietnam se le disputent et le pays finit par passer sous le contrôle vietnamien. Plus tard il repasse au Siam, puis en 1813 le Vietnam réplique et annexe le Cambodge de nouveau. Evidemment les Thaïs répliquent et commencent guerres, dévastations, etc...

En 1863, le roi cambodgien Ang Duong conclut une alliance avec l'empereur des Français (Napoléon III) : c'est le début du protectorat.


Les cambodgiens en veulent à la France, alors maîtresse de la Cochinchine (actuel sud du Vietnam), de ne pas leur avoir rendu les régions annexées jadis par les vietnamiens, mais les français obtiennent du Siam qu'il renonce à ses prétentions sur le pays, ainsi qu'aux provinces conquises de Battambang et d'Angkor. Après encore quelques batailles politiques, le Cambodge commence enfin à ressembler à un pays. Parallèlement la France colonise : routes, plantations d'hévéas, hôpitaux, écoles publiques, trains... L'enseignement bouddhique est maintenu, les vieux textes sacrés traduits...


En 1940 le royaume thaï, profitant de la défaite française au début de la seconde guerre mondiale, attaque avec succès le Cambodge et le Laos et reprend Battambang et Angkor. En 1941, le Japon occupe l'Indochine, attaque Pearl Harbor... mais attendra le,9 mars 1945 (juste avant la capitulation) pour investir Phnom Penh (capitale du Cambodge) et jeter tous les français en prison. Trois jours plus tard, le nouveau roi, Norodom Sihanouk (encore un super nom), dénonce le protectorat français et proclame l'indépendance.


Définitivement débarrassé des ingérences françaises, le Cambodge ne l'est pas pour autant de ses propres démons. Pour mieux riposter aux attaques de ses opposants, Norodom Sihanouk abdique en mars 1955 et laisse le trône à son père. Un peu comme de Gaulle (qu'il admirait), Sihanouk (de son petit nom Norodom) a toujours demandé des preuves d'amour à son peuple. Le Sangkum, "communauté socialiste populaire" qu'il met sur pied, lui permet de gagner les élections de septembre 1955 et de se faire nommer premier ministre. Cinq ans plus tard, à la mort de son père, il ne reprend pas le trône mais accède au statut de chef de l'Etat. Un nouveau référendum national confirme que les cambodgiens approuvent sa politique de neutralité dans le conflit vietnamien.

Les Américains (les revoilà) vont faire payer cher à Sihanouk son non-alignement. La CIA arme le mouvement khmer Serei qui tente de l'éliminer. Aidée également par la Thaïlande et le Vietnam Sud (tous deux pro-américains), la guérilla de droite cambodgienne sape soigneusement durant 10 ans toutes les tentatives de paix du gouvernement, incitant inévitablement Sihanouk à rechercher l'aide de la Chine et du Vietnam Nord. En 1965, la rupture entre le Cambodge et les Etats-Unis est totale.


Suite aux élections de 1966, le général Lon Nol, qui a su gagner la confiance de l'armée cambodgienne et de la bourgeoisie toutes deux inquiètes de la montée du péril communiste, devient premier ministre.

Aussitôt, Sihanouk forme un "contre gouvernement" dans lequel on retrouve diverses personnalités de la gauche cambodgienne, dont de futurs khmers rouges. Pris dans un inextricable engrenage politico-militaire, le Cambodge sombre dans l'anarchie. Des émeutes éclatent dans les zones rurales réprimées par les hommes de Sihanouk, grave erreur qui lui vaudra la haine des campagnes.

Au même moment, les débuts de la révolution culturelle chinoise enflamment les esprits de la gauche cambodgienne : les Khmers rouges sont nés, ainsi baptisés par Sihanouk.


Le 18 mars 1970, le parlement proclame la destitution de Sihanouk. Le prince Sisowath Sirik Matak (à vos souhaits), responsable de cette trahison, a été encouragé par la CIA. D'ailleurs, Washingon reconnaît aussitôt le nouveau gouvernement composé du prince à vos souhaits et du général Lon Nol.

Sihanouk coincé à Pékin, appelle le peuple cambodgien à la résistance, ceux qui ne sont pas massacrés prennent le maquis et rejoignent les Khmers rouges. Enavril 1970, Nixon donne son feu vert aux forces américo-sud-vietnamiennes qui pénètrent au Cambodge pour en chasser les révolutionnaires vietnamiens. Les conséquences sont terribles pour la population, en l'espace de 14 mois, les américains vont effectuer plus de 3 600 raids. Terrorisés, les paysans des provinces de l'est se réfugient à Phnom Penh, dont la population passe de 600 000 habitants à 2 millions.


A partir de 1970, le Cambodge entre dans une guerre qui va se prolonger pendant plus de 20 ans. Malgré tous les efforts de Sihanouk (qui porte cependant une sacrée part de responsabilité), le pays est trop petit pour supporter la pression des Etats-Unis (via la Thaïlande et le Vietnam Sud), du géant soviétique et de la pieuvre chinoise (qui arme les Khmers rouges). Trop peu de voix s'élèvent pour sauver le peuple khmer plongé dans l'enfer de cette "troisième guerre d'Indochine".

Lon Nol décrète la loi martiale, condamne Sihanouk à mort et se fait nommer président de la République. Sous son régime, environ 800 000 personnes sont victimes des divers affrontements au Cambodge. Sihanouk crée le Front uni national du Kampuchéa et s'allie aux Khmers rouges pour s'opposer aux putschistes.


En avril 1973, Sihanouk retourne en secret dans son pays pour entreprendre une tournée des zones "libérées" par la guérilla khmère rouge. La république de Lon Nol, rongée de l'intérieur par la corruption et militairement battue sur tous les fronts, est prête à tomber. Phnom Penh est encerclée.

Le 17 avril 1975, les Khmers rouges sont maîtres de la capitale, les habitants accueillent les "révolutionnaires" avec enthousiasme.

Mais alors, sous prétexte de bombardements américains imminents, en l'espace de 48h, les "libérateurs" procèdent à l'évacuation TOTALE de la capitale ! Soit environ 2,5 millions de personnes sont déportées de force vers les campagnes du nord et de l'ouest du pays. Un exode qui coûtera la vie à environ 400 000 personnes...

En quelques jours, cette ville, considérée comme la plus belle d'Asie du sud-est, n'est plus qu'une ville fantôme, livrée aux rats et aux révolutionnaires qui saccagent tous les symboles de la société bourgeoise et capitaliste. C'est "l'année zéro", aube d'une renaissance totale proclamée par la radio khmère rouge.

Dans la foulée, toutes les villes du Cambodge sont évacuées : on ordonne à la population de gagner les rizières pour se mettre au travail. Durant sa déportation, la population est triée en trois catégories : les militaires sont conduits à l'écart pour être exécutés, les fonctionnaires et intellectuels (il suffit de porter des lunettes ou d'avoir un stylo) sont envoyés dans des "villages spéciaux", le reste classé sous l'appellation de "peuple" est prié de rejoindre son village natal et de travailler dans des conditions proches de l'esclavagisme...

Toute la société cambodgienne est réorganisée sur le modèle d'une armée. L' Angkar (organisation suprême des Khmers rouges) régit désormais le pays sans que personne ne connaisse vraiment les responsables. Tout est remis en question : les gens doivent changer de nom, le salut avec les mains est banni, la lecture est remplacée à l'école par des danses et des chants révolutionnaires... Les enfants appartiennent à l'Angkar, c'est la période "papa-maman" ainsi baptisée par la radio officielle...!

Le mariage n'échappe pas à la révolution : les époux sont choisis au hasard, plus de 600 personnes pouvaient être unies en une seule fois au cours d'une cérémonie express ! Ces mariages forcés seront considérés comme des crimes en 2009.

Les religions sont persécutées et massacrées, les vénérables statues du Bouddha sont décapitées et Sihanouk rappelé dès 1975 pour participer à la "reconstruction", se retrouve prisonnier pendant 3 ans dans son propre palais.

Cloisonnés dans les campagnes dont ils n'ont pas l'habitude, en proie aux maladies, au soleil, à la faim et aux travaux de force, les citadins sont condamnés à une brève échéance. Les hôpitaux des villes sont interdits d'accès, les médicaments réservés aux combattants, les médecins traqués pour cause d'appartenance à la bourgeoisie... D'incessantes extractions sont commises sur la population sous prétexte de non conformité idéologique : les jeunes aux cheveux longs sont exécutés, de même que toute personne susceptible de connaitre une langue étrangère ! Les Khmers rouges haïssent les signes d'intelligence, "il vaut mieux tuer un innocent que de garder en vie un ennemi" disent-ils pour se justifier... On estimera à 2 millions le nombre de victimes. Ils ont appliqué sur le peuple khmer un génocide proportionnellement plus important que celui des nazis, à la différence qu'on peut parler d'auto-génocide puisque c'est leur propre peuple qui en a été victime...


Ils rêvent de reconstituer l'empire angkorien, et l'erreur du nouveau gouvernement est de s'en prendre au régime de Hanoi. En décembre 1978, l'armée vietnamienne envahit le Cambodge et chasse les Khmers rouges de Phnom Penh.

Les vietnamiens installent des cambodgiens au pouvoir, dont Hun Sen un khmer rouge repenti (fastoche). Mais ils ne se débarrassent pas des Khmers rouges, acculés à la frontière thaïlandaise... Ils reprennent la guérilla, pour cela ils vont utiliser un moyen diabolique pour tenter de déstabiliser le nouveau régime : les mines, de fabrication chinoise (ils fabriquent vraiment tout ces chinois), elles sont conçues non pas pour tuer mais pour mutiler. Ils les placent dans les rizières et les champs pour empêcher les paysans de travailler...

C'est le début de la famine et d'un nombre considérable de mutilés, ce qui incite des organisations caritatives à aider le peuple cambodgien (enfin), mais une partie de l'aide (qui passe par la Thaïlande) est détournée par les Khmers rouges.


Le 23 octobre 1991 , les accords de paix sont enfin signés à Paris. La plus importante opération de l'histoire des Nations unies peut commencer pour un budget estimé à 2 milliards de dollars : rétablissement de la paix, retour des réfugiés, mise en place d'un nouveau pouvoir politique, organisation d'élections libres et reconstruction du pays.


Le 24 septembre 1993, Sihanouk redevient roi du pays, 38 ans après avoir abdiqué (ce qui en fait du même coup le plus ancien souverain asiatique), il désigne le prince Ranariddh (son fils) comme premier ministre et Hun Sen comme second ministre. La démocratie est revenue, Sihanouk a retrouvé son trône (ce que tout le monde voulait) et la reconstruction du pays est bien entamée.


En 1998, Hun Sen remporte les élections "démocratiques" et devient Premier ministre. Les Khmers rouges ralliés ont obtenu un poste de député, ceux qui choisissent d'intégrer l'armée gardent leur grade et leurs avantages (bonjour l'ambiance dans les casernes !!) !!! Sihanouk ne peut rien dire, muselé par son premier ministre...


En 2001, le conseil constitutionnel du Cambodge donne son accord pour la création d'un tribunal chargé de juger les Khmers rouges, mais pas tous, certains ont obtenu de Hun Sen, lui-même Khmer rouge repenti, une amnistie pure et simple !!

Le nouveau roi est Norodom Sihamoni, plus jeune fils de Sihanouk, qui abdique de nouveau en 2004.


Finalement, après 30 ans d'attente, le procès des Khmers rouges s'ouvre le 17 février 2009. Cinq personnes se retrouvent sur le banc des accusés, seulement cinq... En effet, l'opposition du gouvernement cambodgien brandit habilement le spectre d'une blessure nationale qui pourrait entraîner le retour de l'instabilité.

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Après nos péripéties nous voilà enfin posés dans la ville de Siem Reap. C'est un grand retour à la civilisation après notre voyage au Laos ! Une grande ville animée, avec même de petits supermarchés ! Bon pas encore de building, mais ça fait déjà du bien aux petits citadins que nous sommes.

Siem Reap, ou "Siamois battus" a été nommé ainsi au XVIe siècle quand les pilleurs siamois furent expulsés du royaume..

Nous nous sommes dit : "aujourd'hui ce sera une journée off !"

Nous avons commencé à nous promener dans la ville, interceptés par les conducteurs de tuk-tuk à peu près tous les 20 mètres, mais nous avons découvert un tuk-tuk particulier : celui de Batman, avis aux fans !

Le Bat-tuk-tuk 

Le midi, point de ralliement avec nos compatriotes français au... Burger King ! Il faut savoir que ce genre de fast-food est inexistant au Laos, alors évidemment quand nous avons vu l'enseigne, aucun de nous n'a pu résister !

Après ça, voulant aller visiter les temples d'Angkor le lendemain, nous sommes partis en quête d'un office de tourisme. Trois kilomètres plus tard : fermé.

C'est donc le moment pour nous d'aller dans la pub street, petite rue de Siem Reap très animée où la bière est à 50 centimes, après avoir sué, la réhydratation fait du bien !

Là, nos amis parisiens ayant pris le numéro du tuk-tuk de la veille, le contacte pour savoir si il pourrait nous emmener le lendemain aux temples. Il nous répond qu'il est dispo et nous propose d'aller chercher les billets en fin d'après-midi et de nous emmener voir le coucher du soleil à Angkor (le billet étant valable 24h).

Nous voilà donc entassés dans le petit tuk-tuk de notre jeune conducteur (oui, il est jeune, il a notre âge), direction les temples.

Après avoir grimpé (oui encore) les marches du temple Pre Rup, imposante pyramide sur plusieurs niveaux - il s'agit d'un ancien temple funéraire brahmanique datant de 961, dédié à Shiva et dont le nom signifie "retourner le corps" - le coucher du soleil nous a malheureusement été caché par un gros nuage... Mais la vue reste magnifique.

Pre Rup 

La soirée se finit dans la même rue, atour d'un bon repas en bonne compagnie !

Pub street 
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La visite incontournable du Cambodge est bien évidemment les temples d'Angkor. Pas moins de 5 millions de visiteurs par an ! Et effectivement ça vaut le détour ! Heureusement, nous sommes en saison basse ce qui fait que nous n'avons eu aucune attente, le seul point difficile a été la chaleur, le soleil tape très fort sur les temples, surtout quand on monte les centaines de marches toute la journée, mais la beauté du lieu vaut bien cet effort.

Point histoire :

Le site d'Angkor aurait été trois fois plus vaste que celui que l'on connait aujourd'hui, environ 3 000 km² et 800 000 habitants selon les archéologues, une sacrée cité.

La glorieuse capitale de l'empire khmer aura vécu plus de 500 ans, de sa fondation auIXe siècle jusqu'à son déclin au XVIe. Est-ce que ses bâtisseurs s'imaginaient que des siècles plus tard des millions de visiteurs viendraient arpenter les ruines du travail de toute leur vie ?

En 889, le roi Yasovarman Ier, héritier des royaumes de Funan et de Chenla, fonde une capitale qui porte son nom (le prétentieux), mais les cambodgiens l'appelleront Angkor qui signifie "capitale" en langue khmère. Le site fut choisi pour sa proximité avec le grand lac Tonlé Sap, mais aussi pour ses collines, sa rivière, et ses plaines fertiles.

Le roi avait besoin d'une montagne sacrée pour y installer les dieux : le lieu fut idéal, capable de garantir la prospérité et l'invulnérabilité du royaume khmer.

Hindouistes et bouddhistes se livrent bataille au cours des siècles, mais Bouddha finit par l'emporter. Selon la légende, un jour, le chef des jardins tua "par méprise" le souverain qui s'était introduit dans le potager (ben oui normal, raison valable). Il ne fut pas exécuté car il était bouddhiste et on le fit roi (fastoche). Dès lors les souverains bouddhistes issus du peuple ne pensent plus en pharaons et préfèrent des pagodes en bois aux gros temples de pierre. Angkor entame son déclin... Puis en 1351, les thaïs assiègent la cité, la prennent, la pillent et réduisent en esclavage ses 100 000 habitants. Le prince khmer Soryotei parvient à la reprendre 6 ans après, mais la cité est délaissée.

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Notre ami tuk-tuk vient donc nous chercher à 7h30 tapantes et nous nous entassons à cinq dans la voiturette qui nous emmène à Angkor. Même à cette heure là il fait déjà très chaud, heureusement notre super conducteur a prévu une glacière pour l'eau et... les bières !

Notre premier stop a été le temple Ta Prohm. Il fut abandonné durant des années volontairement afin que les visiteurs puissent ressentir l'émotion éprouvée par les premiers découvreurs.

Construit par Jayavarman VII en 1186, il fut autrefois l'un des plus gigantesques temples d'Angkor. Aujourd'hui, certains arbres menacent les ruines en poussant à l'intérieur et en abîmant les pierres avec leurs racines, mais cela fait partie aussi de son charme. Ce temple fut également le décor du fameux Tomb Raider et de son aventurière Lara Croft interprétée par Angelina Jolie.

Ta Prohm 

Notre deuxième arrêt fut le Bayon. Construit entre la fin du XIIe siècle et le début du XIIIe, sous le règne de Jayavarman VII après la victoire sur les Chams. Son nom signifie "montagne magique" et il l'est, montagne de 54 tours (il n'en reste aujourd'hui que 37), représentant les 54 provinces de l'empire khmer. Chacune ornée de quatre visages censés illustrer les quatre vertus de Bouddha : la sympathie, la pitié, l'humeur égale et l'égalité.

Le Bayon 

Troisième étape : le Baphuon. Implanté au cœur de l'ancienne cité royale d'Angkor Thom, il constitue l'un des plus grand édifices religieux du Cambodge ancien.

Autrefois il était comparé à une montagne d'or, son nom signifie "le père caché". Il fut construit au milieu du XIe siècle. Construire une telle pyramide relevait de l'exploit pour l'époque ! Je ne vous raconte pas le sport pour monter tout là haut !!

Le Baphuon 

Notre quatrième découverte fut le Preah Khan. C'est une antique ville disparue de plus de 50ha entourée de douves, la "ville de la fortune royale victorieuse", elle abritait un monastère et ses 430 divinités, ainsi qu'une université bouddhique.


Preah Khan 

Puis après un bon repas recommandé par notre guide Mr Jack, nous nous sommes rendus à l'Angkor Wat, le plus grand, le plus connu et le plus majestueux des temples.

En khmer Angkor Wat signifie "la pagode de la ville". Commencé au XIIe siècle, juste une année avant le début de la construction de la cathédrale de Notre-Dame de Paris (lui, visiblement, a échappé aux flammes...), il fut terminé 37 ans plus tard ! C'est le plus grand monument de l'Asie du Sud-Est et le plus grand édifice religieux de la planète. Ce temple montagne était entièrement dédié à Vishnou, dieu suprême de l'hindouisme.

Angkor Wat 

Voilà, notre visite des temples d'Angkor s'achève et nous en avons pris plein les yeux, nous avons eu bien chaud, nous avons bien rigolé, nous avons bien grimpé, et nous avons bien bu (enfin la pub street nous attend haha) !

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Notre quatrième jour fut repos et farniente au bord de la piscine, avec petite balade dans la ville et petit verre en terrasse en bonne compagnie, en bref des vacances dorées. 😊

Siem Reap 

Puis, le lendemain, visite du Tonlé Sap, plus grand lac d'Asie du Sud-Est. Il se gonfle et se dégonfle au rythme des moussons. Nous, nous sommes en période sèche, le lac n'a donc pas plus d'un mètre de profondeur sur toute sa surface (on peut aller jusqu'à la capitale à pied dans le lac si on aime marcher dans la boue !), mais en période de pluie, il multiplie sa surface par 4 et sa profondeur par 10 !

Nous sommes allés visiter un village flottant qui se déplace en fonction des pluies. Le bateau ne passant pas à certains endroits trop peu profonds, le conducteur devait pousser avec une rame, nous avons manqué chavirer une bonne dizaine de fois !

C'est une vraie petite ville qui prend vie sur les eaux avec des marchands qui se déplacent en bateau, une école flottante, un commissariat, une église, un temple bouddhique et même un stade de foot sur deux étages (mais qui était en réparation sur la terre). Bon par contre, les toilettes sont déversées dans l'eau et la vaisselle se fait au même endroit, du coup le resto flottant est peut être à éviter pour nos estomacs de touristes...

Tonlé Sap 

Ensuite, visite de la ferme à lotus, endroit très agréable où nous avons pu faire voler le drone pour la première fois à l'étranger !

Ferme à lotus 
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Phnom Penh, capitale du Cambodge, était surnommée "la perle de l'Asie du Sud-Est" à l'époque coloniale. Les français ont conçu une ville quadrillée de larges avenues bordées de luxueux bâtiments.

Mais la guerre a bien sur laissé des traces... Les édifices religieux sont ceux qui ont le plus souffert, rasés en grande partie par les Khmers rouges.

La ville commence à se réveiller doucement de ses années de souffrance, et partout on peut voir des constructions en cours.

Point histoire :

Au XVe siècle, le nom de la ville est "capitale des quatre bras, heureuse maîtresse du Cambodge, nouvelle Indraprashtha, noble fortunée et frontière du royaume" (c'est un peu comme Daenerys du typhon de la maison Targaryen, première du nom, Reine de Meereen, reine des Andals, de Rhoynar et des premiers hommes, bla bla bla etc... il faut trois jours pour tout prononcer !). Les quatre bras sont ses cours d'eau.

A partir de 1863, Phnom Penh commence à ressembler à une capitale, elle restera florissante grâce au commerce durant plus d'un siècle.

En 1975, la déportation de ses 2,5 millions d'habitants par les Khmers rouges en fait une ville fantôme livrée à la végétation. Mise à sac par les révolutionnaires, la capitale perd non seulement ses trésors mais aussi sa mémoire : les archives disparaissent et les bibliothèques sont brûlées.

Depuis l'arrêt des combats et la fin des derniers maquis khmers rouges en 1998, l'espoir d'une paix durable s'installe et anime la population.

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Nous avons pris un minibus de Siem Reap pour nous y rendre : 320km, 5h30 de route annoncée, et, miracle, nous n'avons mis que 5h !! Une grande première !

C'est une ville très vivante, il y a du mouvement partout. Nous nous sommes promenés dans beaucoup de ses rues et même de ses ruelles lorsque le GPS nous a lâché (😂). Nous avons échappé de justesse à l'orage, mais le côté positif c'est qu'il ne dure pas longtemps (même si la route est inondée tellement la pluie est intense).

 Phnom Penh 

Notre visite du jour a été le Tuol Sleng ou camp S-21, ancienne prison khmère rouge. La visite a été très enrichissante, mais difficile. Je la recommande à ceux qui auraient l'occasion d'y aller, avec un audioguide, tout est très bien raconté (déconseillé aux enfants).

Quand on pénètre dans l'enceinte de la prison, encore entourée de fils barbelés, on se retrouve dans un jardin, tout à l'air paisible, entouré de bâtiments. Cet endroit était un lycée construit en 1962 avec l'aide des français. Mais d'avril 1975 à janvier 1979, ce lieu devint la prison la plus terrifiante du Cambodge des Khmers rouges. Environ 20 000 personnes y subirent les pires tortures, seulement quelques uns d'entre eux survécurent...

Les prisonniers étaient amenés dans cet endroit, les yeux bandés, car le lieu était gardé secret. Une fois sur place, on les photographiait et on inscrivait leur biographie et leur délit présumé, puis ils étaient enfermés dans des cellules, soit en groupe, soit individuellement.

La personne qui nous parle dans l'audioguide est un petit fils d'un homme qui fut détenu et tué dans cette prison. On y entend aussi les témoignages de certains rescapés, marqués à vie par des souvenirs atroces.

Intellectuels, étrangers, familles entières, personne n'était épargné. On entend l'histoire d'un jeune néo-zélandais parti faire le tour du monde en bateau avec ses amis, arrivés au large du Cambodge, ils furent arrêtés et conduits à S-21, où ils furent torturés, puis exécutés. Les cambodgiens expatriés furent rappelés au pays, pour "participer à la mise en place du nouveau régime", on entend une jeune femme raconter que son père est parti, fier de pouvoir aider son pays, mais n'en est jamais revenu, elle et son frère ont fait toutes le salles de la prison dans lesquelles se trouvent des panneaux entiers de photos de détenus afin de pouvoir le retrouver...

On peut voir également un hommage à Bophana (photo plus bas), jeune fille devenue le symbole de toutes ces victimes, elle résista à la folie des Khmers rouges en écrivant des lettres d'amour à son mari, tout deux le paieront de leur vie à S-21...

Autant d'histoires horribles qui nous montrent une fois de plus l'horreur humaine, autant de souffrance pour les idéaux de quelques uns...

Les gardiens de la prison avaient entre 10 et 25 ans et étaient formés par le grand chef en personne : Kaing Guek Eavun, alias Duch, un ex prof de maths, qui fut, à l'ouverture des procès condamné à seulement 35 ans de prison (pour avoir torturé, tué des centaines de personnes c'est peu cher payé), mais il eut la bonne idée de faire appel et allongea sa peine à la perpétuité, malgré son repentir.

A leur arrivée, les détenus étaient dépouillés de tous leurs biens, ainsi que de leurs vêtements, puis un numéro leur était attribué. Ils étaient alors torturés jusqu'à parfois trois fois par jour, afin qu'ils finissent par avouer quelque chose, vrai ou pas, pour que leurs bourreaux puissent avoir une raison "valable" de les exécuter.

Le régime Khmers rouges était de venu tellement paranoïaque que beaucoup de partisans finirent à la place de leurs victimes.

Lorsqu'ils entendirent que les vietnamiens avaient gagné et qu'ils marchaient sur la ville, le personnel d'S-21 tenta de détruire le plus de documents possibles (ils n'ont pas eu le temps de se débarrasser des photos d'arrivée des prisonniers qui tapissent les salles, ce qui a permis à quelques familles de savoir ce qu'étaient devenus leurs proches) , puis ils achevèrent les prisonniers. Les survivants seront surtout des personnes qui avaient des compétences utiles telles que la peinture, comme le peintre Bou Meng, toujours vivant, ou son ami Vann Nath, décédé en 2012, qui n'a eu de cesse de peindre des scènes de détention et de torture afin de rendre hommage aux victimes de la prison. Un enfant âgé de 8 ans et son frère survécurent également, après avoir été séparés de leur mère, ils se cachèrent sous un tas de vêtements, nous entendons le témoignage de cet enfant, adulte aujourd'hui, nous racontant comme il a couru dans toute la prison à l'arrivée des vietnamiens, à la recherche de sa mère, qu'il ne retrouvera jamais.

Puis à la fin de la visite, nous nous sommes assis devant les stèles portant les 12 000 noms des victimes de Tuol Sleng... Un étrange calme habite ce lieu, même les gens qui le visitent sont silencieux, et par ce silence et l'écoute de ces histoires douloureuses, c'est un mince hommage qui est rendu à toutes les personnes ayant souffert ici.

S-21 
J8àJ9
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Et voilà, dernière étape de notre périple cambodgien : Kep, l'extrême sud.

Petite ville construite en 1908par les français sous le nom de Kep-sur-Mer (un peu comme Fos-sur-Mer mais version asiat).

Nous avons voulu aller sur une petite île, appelée l'île aux lapins, non loin de Kep, mais le mauvais temps que nous avons eu pendant deux jours nous en a empêchés, étant donné que les bateaux qui font navette ne sont pas faits pour la haute mer, avec le mauvais temps ils se renversent, nous avons donc fait l'impasse sur l'expérience.

A la place, baignade à la piscine sous la pluie et petit resto entre amis, petite promenade en bord de mer, les journées off ça fait du bien aussi !!

Kep 

On se retrouve pour notre aventure au Vietnam, notre dernière étape asiatique !!