Nous voilà donc repartis à bord du Shinkansen, depuis le temps que je vous en parle voilà une petite photo de ce train au long nez qui entre en gare.
Shinkansen Donc nous embarquons en direction du sud pour rejoindre la tristement célèbre ville d'Hiroshima.
Et vous savez ce qui suit maintenant, bien sûr, un petit point historique pour changer un peu !!
Point histoire :
A la fin du XVIe siècle, le clan Mori, qui contrôle la région, fait construite un château à Hiroshima. Puis les occupants successifs étendent cette ville d'eau grâce à des remblais. Lorsque éclatent les guerres contre la Chine à la fin du XIXe siècle et contre la Russie au début du XXe, elle est toute désignée pour devenir une base logistique indispensable à l'armée japonaise, et l'empereur y établit un QG. Pendant la seconde guerre mondiale, les chantiers de construction navale turbinent sans relâche tandis que les usines produisent des gaz toxiques à la chaîne.
Alors que l'Allemagne a déjà capitulé le 7 mai 1945, l'armée japonaise subit de lourdes pertes. La population souffre des bombardements intensifs des américains sur les villes principales et de la famine. 23 000 enfants sont évacués dans les campagnes par peur des attaques. Dans ce contexte, les japonais veulent mettre fin à la guerre. En juillet, l'empereur annonce une rédition et envoie des émissaires négocier les termes de la capitulation. En vain. Le 26 juillet un ultimatum est signé par les américains et les britanniques et il stipule que "si le Japon ne capitule pas, il s'expose à un anéantissement rapide et total". Le maintien de l'empereur sur le trône n'étant pas garanti, le Japon refuse.
Une fois Kyoto extraite de la liste (comme vu dans l'article précédent) Hiroshima arrive en tête des cibles potentielles suivie de Niigata, Kokura et Nagasaki.
La ville offre plusieurs "avantages" :
- topographique : la zone d'impact circonscrite entre les montagnes d'un côté et la mer de l'autre permettra de mesurer les effets avec plus de précision
- stratégique car les services de renseignements occupent le château et la ville abrite une base militaire de première importance
- architectural : la plupart des habitations sont construites en bois et papier de riz ce qui les rend facilement inflammables
Seule la météo reste incertaine.
Le 6 août au matin trois avions partent en repérage météo vers Hiroshima, Kokura et Nagasaki. Au dessus d'Hiroshima, le ciel dégagé autorise le largage...
La bombe explose à 600 mètres d'altitude, une hauteur calculée pour causer le plus de dégâts possibles. La population est d'abord aveuglée par une lumière éblouissante avant de subir l'onde de choc qui se propage à 1600 km/h. Quelques secondes après, le grondement de la déflagration arrache tout. Une minute plus tard, une colonne s'élève vers le ciel, s'ouvre et forme un nuage en forme de champignon couleur feu. Il est composé de gaz brûlant et de particules radioactives. Il prend de plus en plus d'ampleur pour atteindre 17 000 mètres d'altitude, 800 mètres de diamètre et recouvrir la ville toute entière. 10 km² sont atomisés. Selon les américains, 80 000 personnes meurent en 5 secondes...
Sur 1,5 km autour de l'épicentre, la température est 5 fois plus élevée qu'à la surface du soleil. Les survivants recherchent partout de l'eau pour apaiser leurs brûlures. Soudain, une pluie noire se met à tomber, éteignant le feu par endroit, mais cet apparent bienfait ce révèle issu du nuage atomique. Il contamine le fleuve, les rivières, les puits et les gens qui s'y soulagent et s'y abreuvent. Seuls résistent les structures en béton et en acier.
Ceux qui n'ont pas succombé sur le coup tombent malades 10 à 15 jours après. Au bout d'un mois d'autres symptômes apparaissent, les décès se multiplient. Fin 1945, le nombre de morts est évalué à 140 000. Mais même si les radiations ont diminué, combien d'autres sont morts déclarant des années plus tard des pathologies cardiaques, osseuses, digestives ou des cancers ? Parmi les enfants évacués un mois plus tôt, 6000 deviennent orphelins et finissent par rentrer à Hiroshima.
Pendant quelques jours, personne dans le reste du Japon ne sait ce qu'il s'est passé. Le journal utilise tardivement le terme de bombe atomique et minimise les dégâts pour ménager la population. Entre 1945 et 1951, l'occupant américain censure les médias japonais qui n'ont pas le droit d'évoquer l'ampleur de la tragédie. En Occident, au contraire, les Etats-Unis nourrissent une propagande sur les effets pacificateurs de cet arsenal et justifient l'emploi de la bombe par le fait qu'une invasion de l'archipel aurait causé la mort d'un million de soldats américains.
Dans la zone touchée, les rumeurs sur les effets de la radiation enflent. Par méconnaissance des risques encourus, de nombreuses femmes avortent, les survivants se retrouvent discriminés car on pense qu'ils peuvent être contagieux et mourir à tout moment et que l'irradiation se transmet de génération en génération. Ils trouvent difficilement du travail et ont du mal à se marier.
Le calvaire physique et psychologique n'échappe pourtant pas à tout le monde : des survivants sont utilisés comme cobayes par des scientifiques japonais qui étudient les effets de la radiation. D'autres atterrissent dans un centre de recherche américain qui s'intéresse aux irradiés vivants... et morts. Aucun traitement n'est mis en place.
La non prise en charge des orphelins par l'état les a rendus vulnérables au trafic humain : certains sont vendus, d'autres enrôlés par les yakusas (mafia), beaucoup sont morts de faim.
Il faudra attendre 1957 pour que le statut de survivant soit officiellement reconnu. Un traitement gratuit est enfin mis en place. En 1965, ils sont enfin recensés et en 1994 symboliquement indemnisés. L'empereur présente ses condoléances aux familles en juillet 1995, un demi-siècle plus (trop) tard.
Barack Obama sera le premier président américain en exercice à rendre hommage aux victimes en 2016et à rencontrer les survivants.
Notre visite commence par le musée commémoratif du 6 août 1945, dont je n'ai pas pris de photos mais les images présentées étaient assez impressionnantes et éprouvantes.
Devant le musée se trouve un cénotaphe (monument élevé à la mémoire des morts mais qui ne contient pas de corps), couvert par une structure qui rappelle le toit d'une ancienne demeure japonaise et abrite les âmes des défunts. Un cercueil enterré y renferme une centaine de registres d'environ 300 000 victimes, dont un vierge pour les personnes non identifiées. Derrière ce monument ce trouve la flamme de la paix qui brûlera tant qu'il existera des armes nucléaires.
Cénotaphe En alignement avec ce monument, de l'autre côté de la rive, se trouve le "dôme de la bombe A". Situé à 160 mètres de l'épicentre, il est étonnant que le bâtiment ait résisté en partie à la déflagration. Deux raisons principales ont contribué au maintien de la structure : le bâtiment est composé de béton, d'acier et de brique, des matériaux solides, et l'explosion verticale et non horizontale a maintenu l'édifice en place. En revanche tous les gens qui s'y trouvaient furent tués sur le coup. Il s'agissait du palais d'exposition de la préfecture d'Hiroshima conçu en 1915.
Puis, nous promenant le long du fleuve, nous apercevons le château d'Hiroshima construit en 1591qui servit de quartier général pendant la guerre sino-japonaise de 1894-1895. Il fut entièrement détruit par la bombe en 1945. Seules les fondations subsistèrent, et il fut rebâti en 1958. Le tout agrémenté des belles couleurs automnales.
Le château d'Hiroshima Nous croisons dans le métro des wagons avec l'intitulé "women only", ce sont des wagons où seules les femmes ont le droit d'aller afin de lutter contre le harcèlement dans les transports en commun.
Nous profitons du beau soleil d'Hiroshima qui est devenue une belle ville où il est agréable de se promener. Dans les points d'eau, des carpes s'agglutinent lorsque les passants leur jettent de quoi manger, le bruit de succion est assez impressionnant !
(Ce ne sont pas des carpes sur la première photo)Notre appartement à Hiroshima est vraiment top. Il est meublé dans le style japonais et nous avons beaucoup d'espace. Il sera notre QG pendant quatre jours.
QG Le lendemain, nous prenons le ferry pour nous rendre sur l'île de Naoshima, petite île au large d'Hiroshima. On y trouve de curieuses sculptures.
Le soleil est au rendez-vous et nous passons une bonne journée à faire le tour de l'île à pinces.
Aujourd'hui, nous nous rendons à Onomishi, ville portuaire située à 90km d'Hiroshima (toujours grâce à nos supers pass). De là, nous louons des vélos et empruntons un ferry qui nous amène sur une île en face de la ville.
Nous commençons à pédaler et nous passons d'île en île puisqu'elles sont reliées par des ponts. Les paysages sont magnifiques, les garçons forcent beaucoup et moi je profite de la vue sur mon beau vélo électrique (70 km de vélo dans la journée, ils étaient jaloux de mon joujou).
Le soir, nos jambes apprécient la douche chaude !!
Pour notre dernière journée dans les environs d'Hiroshima, nous nous rendons toujours en ferry (et toujours pas à la nage) sur l'île de Miyajima qui est jumelée avec le mont Saint-Michel.
Nous tombons une fois de plus sur des bambis en liberté et Mika a eu le malheur de vouloir manger une gaufre qu'ils se sont empressés d'essayer de voler (je suis un dommage collatéral).
Observez bien la tête de Mika protégeant sa gaufre contre Bambi sur la première photo Evidemment, Mika se fait encore interroger par un groupe d'enfants pendant que je fais mine de prendre des photos du petit village (pas folle la guêpe haha).
Nous promenons dans le parc au pied du mont Misen qui surplombe l'île. Les couleurs d'automne sont vraiment magnifiques ! Rouge pour les érables, doré pour les ginkos.
Nous prenons ensuite un téléphérique qui nous amène sur le mont Misen, puis de là, une petite marche bien pentue nous attend pour atteindre le sommet et sa belle vue.
Pour notre dernière soirée à Hiroshima avant de poursuivre notre route un peu plus au sud du Japon, nous testons un resto de grillades. Vous faites votre propre barbuc sur la table ! Sans oublier la bière pour les garçons et un petit alcool de prune made in Japan pour moi ! Bon appétit !!