Pendant un mois, nous parcourrons la Normandie et la Bretagne à vélo, toujours à la recherche d'initiatives écologiques et solidaires...
Du 21 mars au 16 avril 2021
27 jours
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Bonjour et bienvenue dans ce nouveau carnet de voyage consacré à la Velomaritime, qui nous mènera du Havre à Roscoff ! 

On vous écrit aujourd'hui depuis Cherbourg, la capitale de la péninsule située au nord du département de la Manche - connue sous le nom de Cotentin.

Nous y sommes arrivés hier après 6 jours et 350km de vélo depuis Le Havre. Par rapport à l'Eurovélo 6, on a nettement réduit notre moyenne journalière, mais qu'est ce qu'on profite !!! Le beau temps ne nous a (presque) pas quittés et chaque jour nous offre des paysages plus beaux que ceux de la veille.

Le moment épique au cours duquel on a traversé le Pont de Normandie, passant ainsi de la zone confinée à la zone libre. 

On a commencé par les stations balnéaires branchées de Deauville et Trouville, vides de tout touriste, et enchaîné sur les plages du Débarquement, avec des dizaines de mémoriaux et sites commémoratifs. Le plus impressionnant est sans aucun doute le cimetière américain d'Omaha Beach qui, avec ses 9338 croix blanches entretenues au quotidien par 20 jardiniers, fait froid dans le dos. A Ouistreham, l'itinéraire cyclable passe devant une "mini-jungle" de migrants soudanais qui, comme à Grande Synthe et Calais, tentent leur chance pour passer en Angleterre. On a échangé avec les bénévoles des Restos du cœur présents sur place et on a été rassurés d'apprendre que la police a l'air plus coopérative, et que les migrants sont quand même un peu mieux lotis que dans le Nord...

 Dans l'ordre : Honfleur, Deauville, Ouistreham, Cabourg, Arromanches, Bayeux, Omaha Beach 

Quelques kilomètres plus tard, l'arrivée dans la péninsule du Cotentin nous a offert de superbes panoramas dont les photos parleront mieux que nous. Mention spéciale aux villages de Barfleur et Fermanville qui nous ont éblouis. Même l'énorme averse que l'on s'est prise en arrivant sur Barfleur, l'un des Plus beaux villages de France, n'a fait qu'ajouter au charme de la côte. Un beau cliché de la tempête normande : le phare au loin, les vagues s'écrasant contre les rochers, et les deux cyclistes rendus sourds par le vent pédalant sur un chemin caillouteux entre champs de carottes et falaises.

J'en viendrais presque à être fière de mes origines normandes, que je ne revendique jamais car Évreux n'a quand même pas le même cachet. Antoine, en revanche, ne perd pas une occasion de raconter au premier venu qu'il connaît très bien le Cotentin car sa sœur est née à Coutances (une ville qui ne fait pas partie du Cotentin 🙄).

Niveau confort, on est mille fois mieux que sur l'Eurovélo 6, vive le printemps ! On savoure de longues pauses pique nique sans devoir sautiller ensuite dans tous les sens pour se réchauffer, et on n'a (quasiment) pas froid la nuit. On a décidé de faire un mois sans supermarché et on se régale de fruits de mer, tartinades, soupes de poissons, jus de pommes, fruits et légumes achetés exclusivement chez des petits producteurs ou sur les marchés.

Crevettes, bulots, galette au camembert : spécialités locales. Banana bread : spécialité d'Antoine préparée avant notre départ 😋

On a aussi trouvé de supers spots de bivouac sur la plage, et également dans 2 campings qui, comme ils n'étaient pas encore officiellement ouverts, nous ont laissé planter la tente gratuitement.

La cinquième nuit, on s'est dit qu'une douche ne nous ferait pas de mal et on a été accueillis en Warmshowers chez les propriétaires du camping de Sainte Mère Église (là où un parachutiste était resté accroché à l'église pendant le Débarquement... Un mannequin est là pour témoigner de ce moment également immortalisé dans Le jour le plus long). Merci Frédéric et Ophelie pour vos anecdotes sur vos deux années à vélo autour du monde !

Et le sixième soir, celui de la tempête, on a pu dormir dans la salle d'animation d'un camping entre baby-foot, bibliothèque et... bouteilles d'alcool. L'histoire ne dit pas si on s'est servis au passage...

Ces deux dernières nuits, on a été accueillis à Cherbourg par Florence et Nicolas. On a eu leur contact via le Mouvement des Colibris, et on s'est rendus compte que je connaissais leur fille, qui était dans ma promo à Sciences Po ! Florence, élue Europe Écologie Les Verts à la mairie de Cherbourg dans la précédente mandature, était l'une des organisatrices de la Marche pour le climat, qui a eu lieu partout en France ce dimanche pour réclamer une vraie loi climat au lieu des demi-mesures qui vont être débattues ces prochaines semaines à l'Assemblée nationale. On a ainsi rejoint le cortège qui s'est rendu à vélo à la plage, où on a eu la surprise d'entendre le témoignage de l'une des 150 citoyen.ne.s tirée au sort pour la Convention citoyenne pour le climat. On est ensuite passés dans un jardin partagé, les Incroyables Comestibles, où les habitant.e.s sont libres de jardiner, cultiver et récolter graines et légumes en plein centre-ville. Une chouette initiative visant à créer du lien social tout en sensibilisant la population à l'art du mieux-manger, dans un objectif final (et très lointain) d'auto-suffisance alimentaire.

Florence et Nicolas, ainsi que leur (belle)-sœur, sont également bénévoles auprès des réfugiés (il y en a quelques-uns à Cherbourg) et on a pu partager nos expériences respectives autour d'un apéritif dînatoire. On les remercie encore pour leur accueil au pied levé !

Demain, on laisse les vélos pour une randonnée de 3 jours sur le GR, tout au nord du Cotentin, avant de reprendre la route vers la Bretagne.

 Bonne semaine à toutes et à tous ☀️
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Nous revoilà ! Ça fait un mois qu'on vous a laissés sans nouvelles, et pour cause, le confinement numéro 3 ! Mais bon, on aurait quand même pu vous dire où on est.

Quand on vous avait laissés à Cherbourg la dernière fois, on partait pour deux jours de rando sur le GR223, vers la Pointe de la Hague au nord-ouest du Cotentin. Ça a donné ça :

Une baignade bien frisquette, des paysages de rêve et un spot bivouac exceptionnel 

Après, on a pédalé une journée, et le soir, il y a eu ça :

Encore lui put*** 

Alors on a encore pédalé deux jours, on a passé une super soirée dans la famille et dans la caravane de Lisa (merci encore à vous !), et on a vu ça :

Et puis au final, on est arrivés là :

Et voilà ! Après deux bonnes semaines de pédalage le long des côtes normandes, des plages du Débarquement au Tour de Manche, on a garé nos vélos en face... du Mont Saint Michel, où on a loué un gîte à prix imbattable. On y a passé tout le mois, partagés entre la lassitude de changer nos plans, tout le temps, constamment, et la détermination à continuer malgré tout.

Antoine, toujours hyperactif, s'est pas mal occupé et a trouvé des personnes à aider : il a passé un temps considérable à planter des oignons et ramasser des poireaux et navets chez Michel et Valérie, des maraîchers bio, et a consacré ses vendredis aux distributions alimentaires des Restos du Cœur dans la ville la plus proche.

On a profité de la chance qui nous était offerte de découvrir la Baie du Mont Saint Michel vide de tout touriste, à pied, à vélo, et même... à cheval ! Une expérience originale, cadeau d'Antoine pour mon anniversaire, qui m'a laissée avec des courbatures impressionnantes et qui a laissé Antoine... sur les fesses, après un mouvement d'humeur de son cheval !

Le Mont Saint Michel dans tous ses états 

Et puis, comme chaque fois qu'on est confinés, on a développé nos compétences culinaires, apprenant à cuisiner les spécialités locales - coquilles Saint Jacques et camembert !

Et puis pour nos anniversaires respectifs, on a été bien gâtés en colis nourriture par nos familles ! Merci ❤️❤️❤️

Mais ce dernier mois a aussi et surtout été l'occasion de faire le point, et de regarder en arrière avant de regarder vers l'avant.

Vous vous souvenez de notre programme initial ?

Autant vous dire qu'il n'a pas grand chose à voir avec ce que l'on a fait réellement. Nos modifications d'itinéraire se font à un rythme aussi frénétique que l'apparition de nouveaux variants du Covid. Ce qui ne change rien au fait que depuis notre départ, le 9 octobre, nous avons vécu tout un tas de belles choses. La Grande Traversée du Jura, le bénévolat à l'association des Sheds en Alsace, la découverte de l'accueil social en Terre Amoureuse, le vélo en plein hiver de Mulhouse à Orléans, la visite d'une école démocratique, la semaine aux Restos du Coeur... Mais ce qui nous a le plus marqués tous les deux, sans hésitation, c'est notre expérience à Grande Synthe auprès des migrants. C'est ce qui a fait le plus de sens, ce dans quoi nous nous sommes sentis les plus utiles, ce que nous avons eu le plus de mal à vivre, puis à quitter. Pendant ce confinement, nous avons approfondi le sujet via quelques lectures et documentaires, dont on vous recommande d'ailleurs deux titres :

Butterfly, de Yusra Mardini, une réfugiée syrienne devenue athlète olympique après avoir tiré à la nage son bateau de fortune menacé de naufrage dans la mer Egée.

Lesbos, la honte de l'Europe, écrit par Jean Ziegler en sa qualité d'observateur du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés auprès du camp de réfugiés de Lesbos, en Grèce.

On a été tellement marqués par ce qu'on a lu, que pendant une semaine on a sérieusement envisagé de sauter dans un avion pour la Grèce et de passer six mois là-bas pour aider les dizaines de milliers de réfugiés qui y sont parqués dans des conditions inhumaines.

Et puis on a décidé, finalement, de rester en France, d'une part car on a dit qu'on ne prendrait plus l'avion, d'autre part car il y a aussi des réfugiés en France, et encore d'autre part car on a à peine fait la moitié de notre Tour de France.

Notre voyage est, par essence, écologique, puisque nous nous déplaçons à vélo ou à pied, ou en train lorsque les circonstances (au hasard, le Covid) nous y obligent. Nous achetons de quoi manger auprès des producteurs locaux, le plus souvent bios, nous boycottons les supermarchés, nous récupérons des livres dans les boîtes à livres et nous vivons du contenu de nos sacs à dos.

Puisque tout cela est acquis, et qu'il faut bien faire des choix, nous avons décidé de recentrer notre programme autour de deux alternatives davantage solidaires qu'écologiques, et nous avons redessiné notre itinéraire.

Dès lundi, si Macron le veut, nous reprendrons donc nos vélos direction l'ouest, via la suite de la Vélomaritime (EV4), puis le sud par la Vélodyssée (EV1). La jonction entre les deux se fait à Roscoff, à 5km de Santec, où nous avions passé le premier confinement et eu l'idée de ce tour de France.

Au programme donc, la traversée de la Bretagne puis la descente de la côte atlantique jusqu'aux Pyrénées.

Au début du mois de juin, nous arriverons au Village Emmaüs de Lescar-Pau, où nous participerons à la vie locale pendant trois semaines aux côtés des autres habitants (dont des migrants et personnes démunies) qui vivent et travaillent pour la communauté, dans un environnement très éco-responsable.

Début juillet, nous abandonnerons nos vélos pour rejoindre en stop Menton, où nous passerons l'été dans une nouvelle association d'aide aux réfugiés, à la frontière franco-italienne : Kesha Niya, littéralement "pas de problème" en kurde.

A la mi-août, pour clôturer cette belle aventure, quoi de plus beau et logique que de faire notre retour dans les Alpes par... la montagne ! Un mois et 500 kilomètres de randonnée à travers ce massif exceptionnel, de Nice à Chamonix. On devrait avoir plus chaud (et grimper davantage - 30 000 mètres de dénivelé positif) que dans le Jura !

Et puis ce sera le retour à la vraie vie, mais on n'en est pas encore là.

Voilà donc notre nouveau programme, même si on se rend bien compte qu'il risque encore d'évoluer pas mal de fois.

En tout cas, le beau temps a l'air bien installé et ça nous réjouit de laisser enfin l'hiver derrière nous. Le meilleur est à venir !

Ps1 : Suite à un incendie des serveurs de MyAtlas, la plupart des photos de tous les articles ont été perdues. On les remet au fur et à mesure, mais on ne vous cache pas que c'est un peu fastidieux, surtout sans ordinateur !

Ps2 : Maintenant que les déplacements vont être autorisés et que les terrasses vont réouvrir (inch'allah), n'hésitez pas à nous faire signe si vous voulez vous joindre à nous le temps d'un verre ou d'une étape !

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Bien arrivés à Santec, Finistère ! 😀

Après huit nouvelles journées de vélo sur la Vélomaritime, du Mont Saint-Michel à Roscoff, nous voilà installés pour quelques jours dans la maison d'Hélène et Hervé, la tante et l'oncle d'Antoine, où nous avions passé notre premier confinement l'année dernière et eu l'idée de ce Tour de France. Tout un symbole pour nous, et on est très contents de se retrouver ici malgré la météo désastreuse.

La première journée commençait pourtant bien, sur du plat le long de la côte jusqu'à Saint-Malo, une dégustation d'huitres à Cancale pour le déjeuner, une glace à Saint-Malo pour le goûter, un soleil éclatant.

Un énorme WOW pour cette première journée du Mont-Saint-Michel à Saint-Malo 

Et puis dès le lendemain sont arrivés la pluie et le vent, ainsi que les bonnes grimpettes. 500 à 600 mètres de dénivelé positif par jour face au vent et sous la pluie : on n'a pas toujours rigolé ! Un proverbe breton dit : "Quand l'horizon n'est pas net, reste à la buvette". Mais le proverbe n'avait pas anticipé le Covid. Alors en lieu et place des buvettes, on a développé une grande habilité à repérer auvents, abris bus et porches en tout genre. Les églises, généralement ouvertes, font aussi de supers endroits où se réfugier. La nuit, les arbres dans les bois servent de toit naturel, et lorsque la forêt est venue à manquer, le hall d'un gymnase a fait l'affaire. Sauf qu'un capteur captait le moindre de nos mouvements pendant notre sommeil, et que la lumière a passé la nuit à s'allumer et à s'éteindre ! Bref, on a été beaucoup, souvent trempés, mais vu d'ici, assise sur le canapé sous le plaid, je n'ai que des bons souvenirs et je suis super contente d'avoir réalisé cet itinéraire à vélo.

En attendant le beau temps... 

Au cours de ces 466 kilomètres (le double depuis Le Havre), on a vu des paysages exceptionnels et, bien que toujours maritimes, d'une grande diversité. Le port et la ville fortifiée de Saint-Malo, le phare et les falaises du Cap Fréhel, la côte de Granit Rose, l'Île fleurie de Bréhat où nous avons fait escale le temps d'une journée. Les maisons bretonnes typiques, les beaux villages aux belles églises, les immenses plages de sable blanc. La Bretagne n'a pas failli à sa réputation, sur le plan météo comme sur le plan patrimoine ! D'ailleurs, difficile de parler patrimoine sans parler gastronomie... et on a fait honneur aux galettes bretonnes et au Kouign Amman, dont la quantité astronomique de beurre nous a fait regagner ce que l'on a perdu en pédalant... On a continué notre défi "sans supermarché" et on s'est approvisionnés uniquement auprès des marchés locaux et de petits producteurs, pour des pique-niques de qualité !

Mais la Bretagne ce n'est pas encore fini pour nous : dès ce dimanche, on repart sur un nouvel itinéraire - la Vélodyssée, direction les Pyrénées, pour un périple de 1200 kilomètres. Ce qui nous fera traverser la Bretagne en diagonale et découvrir le Morbihan, avant de continuer vers les Pays de la Loire, puis la Nouvelle-Aquitaine ! Alors à très vite pour de nouvelles aventures 😀

 Breizh 3/4