J'écris cet article pour répondre aux questions qui reviennent souvent.
Sommes-nous devenus hippy ?
"Est-ce que comme en voyage, vous continuez à vivre dans le froid ? À dormir par terre ? À prendre des douches tous les deux-trois jours ? À manger dehors sur un banc quand il fait -5° C ? à vous habiller en vêtements de randonnée ? à vivre avec 10 € par jour ?"
Et bien... pas vraiment non.
Après un an sans confort, on apprécie aujourd'hui d'avoir une douche, de l'eau chaude et potable, des toilettes, des casseroles, une cuisinière électrique, un four, des vêtements de ville, du CHAUFFAGE, et plus de sac à dos de 16kg à porter. C'est super agréable.
On a croisé des gens qui sont devenus un peu hippy sur les bords après leur voyage. Certains ont laissé tombé leur mode de vie d'avant et vivent dans un endroit pas très propre qui ressemble un peu à un squat, il y a toujours plein de gens chez eux et ils ne se prennent pas trop la tête. Nous on aime bien notre chez-nous alors je ne pense pas que notre maison finisse par ressembler à un squat. Par contre, dès qu'on aura un travail, on compte activer notre compte Couchsurfing pour héberger des gens, alors effectivement, il y aura peut-être souvent du monde chez nous.
Le voyage, ça nous a changés ?
Le voyage a quand même changé notre comportement et notre vision des choses. Quand on voit des sans-abris dans le froid, on ne réagit pas de la même façon, parce qu'on sait ce que c'est que d'avoir froid et d'avoir la dalle. On a plus de facilités à parler aux gens qu'on ne connait pas, aussi. En ce qui me concerne, quand je suis avec des gens, j'ai tendance à moins parler et à plus écouter les autres. À chaque fois qu'on montait dans une voiture ou qu'on était hérbergés chez des gens ont devait raconter notre voyage, et je crois qu'au fil du temps je me suis lassée. Maintenant, je me dis que quand j'écoute quelqu'un, j'apprends des choses, alors que quand c'est moi qui parle, je n'apprends rien.
Et avec nos 10€ par jour, on a appris à faire gaffe à ce qu'on dépense, c'est devenu automatique. Et quand on sort, ne serait-ce que quelques heures, on prend toujours de quoi survivre dehors : de l'eau, à manger, des mouchoirs et des vêtements de pluie. On a gardé l'habitude, ça finira sûrement par nous passer. On a dormi dans tellement d'endroits pas sécurisés qu'on a le sommeil plus léger maintenant. La nuit, on est plus à l'affût des petits bruits et on se réveille plus facilement. Les premières nuits qu'on a passées dans la maison, je pensais par moment que quelqu'un s'était introduit chez nous, et je mettais du temps avant de me rappeler que la porte était fermée à clef et qu'on était chez nous. Mais ça aussi, ça va finir par nous passer. On s'oriente beaucoup mieux avec et sans carte, et on arrive à savoir en combien de temps on peut parcourir une distance à pied. Et on a vécu tellement de situations où on était épuisés, où on ne savait pas où dormir, où il fallait quitter un endroit à cause d'un souci, qu'aujourd'hui on gère beaucoup mieux les problèmes. On le fait beaucoup plus calmement et de manière beaucoup plus pragmatique.
Qu'est-ce qui nous a le plus marqué ?
L'Europe, on y habite mais on ne la connait pas
Un certain nombre de personnes nous ont dit et nous disent encore "Vous n'avez fait QUE l'Europe ?" Et ça nous fait sourire. On a été a été frappés de constater à quel point on ne connaissait rien de l'Europe. On n'est pas allés bien loin, et pourtant on a découvert plein de choses. On a découvert qu'il y avait des cultures différentes au sein même de l'Europe, des religions différentes, et beaucoup de différences entre les pays au sein d'une même religion. En Sicile, on nous disait souvent "Ici, c'est déjà l'Afrique". En Bosnie-Herzégovine, on avait l'impression d'être à Istanbul. Ce qui a construit l'Europe, ce qui en fait sa puissance et sa beauté, c'est justement ce grand mélange de cultures et de religions, et je ne pense pas que ce soit une bonne idée de vouloir tout uniformiser dans le cadre de l'Union Européenne. Parce que cette uniformisation se fait sur le modèle de l'Europe occidentale : France, Bénélux, Allemagne, Autriche. Et les pays européens ne ressemblent pas tous à l'Europe Occidentale. Selon moi, cette uniformisation ne peut pas fonctionner partout, ou alors c'est au détriment de l'identité, et donc de la force de chaque pays.
Les humains sont gentils (sisi !)
J'ai été frappée par l'hospitalité et la générosité des gens. Souvent, on n'ose pas demander, on se dit que les gens vont nous envoyer promener. Alors que la plupart du temps, il suffit de demander. Et puis si quelqu'un nous dit "non", c'est pas grave. Des gens qui nous connaissaient depuis 2 minutes nous ont laissés leur maison. Des maraîchers nous ont donné des sacs énormes de fruits. Une fois, on marchait dans un vent glacial en Italie, et on a demandé s'il n'y avait pas des invendus dans une pizzeria ; le patron a dressé une table pour nous et nous a préparé une pizza. Je suis épatée. Ça montre que nous les humains, on est vraiment stupides et on passe notre temps à faire des conneries, mais on a quand même un bon fond !
L'Albanie, c'est un pays génial
J'ai été frappée aussi par les conditions de vie en Albanie. C'est un pays qui a beaucoup souffert de la dictature et qui a été isolé pendant très longtemps. L'albanie a beau faire partie de l'Europe, l'eau potable y est une denrée rare. En été, il y a souvent des pénuries. Nous avions entendu que dans certains endroits, les enfants n'avaient jamais vu de touristes, alors ils leur jetaient des cailloux. Nous avons vécu ça à Gjirokaster, qui est pourtant une ville touristique (pour l'Albanie). On marchait autour du château avec un Suédois qu'on avait rencontré à l'hostel, et un gamin s'est mis à le suivre en lui jetant des cailloux. Désemparé, le Suédois a souri au gamin en lui faisant coucou et en se prenant des cailloux dans le dos, et le gamin a fini par se lasser. Cet épisode n'a en rien altéré mon respect et mon admiration pour les Albanais. Ils en ont bavé, ils en bavent encore, mais ils m'ont donné l'impression de faire face à l'adversité avec calme, bienveillance et détermination. J'ai vraiment trouvé que les Albanais étaient des gens cools qui ne se prenaient pas la tête avec des considérations inutiles. Hier j'ai entendu une famille parler albanais dans un magasin, et ça m'a fait super plaisir d'en croiser dans ma ville. J'adore l'Albanie = )
Les migrants, leurs conditions de vie et l'accueil qu'ils ont reçus
Et bien sûr, j'ai été frappée par le nombre et la situation des migrants, et l'accueil qui leur a été fait. En 2015 a commencé une crise migratoire sans précédent au Moyen-Orient et en Europe. Et nous, on est parti en 2016, année pendant laquelle le flux de migrants a continué d'évoluer. Voyager dans 27 pays en un an, ça nous a donné du recul sur la situation. C'est un peu comme si on avait vu la situation des migrants en Europe vue du ciel. Évidemment, en 2015, on suivait l'actualité depuis la France à ce sujet, on entendait les débats houleux, les gens qui disaient "Il faut ouvrir nos frontières, nos maisons", ceux qui disaient "Il faut fermer nos frontières" ou "Il faut d'abord s'occuper de nos sans-abris", et ceux qui disaient "Il faut faire quelque chose, mais quoi ?" Et nous aussi, comme tout le monde, on avait un avis sur le sujet, et comme tout le monde, on se demandait comment ça allait évoluer. On a suivi ça avec nos yeux de Français en France. Et là, pendant le voyage, on a vu les situations dans chaque pays, les réactions des locaux, et on a rencontré des gens qui travaillaient avec les migrants, au sein de la Police et dans des associations. On a aussi rencontré des migrants qui nous demandaient de l'argent, parfois de manière agressive, et on a vu des douaniers fouiller les trains. Et tout ça, ça a complété notre vision des choses, nos informations sur la situation.
Il y a plusieurs choses qui m'ont beaucoup marquée concernant les migrants. On s'est très vite aperçu que comme en France, l'amalgame terroristes/musulmans/migrants/Syriens était à l'honneur dans beaucoup de pays. On a été choqués par la réaction de pratiquement TOUS les Polonais, les Tchèques et les Slovaques qui nous ont pris en stop quand on disait être Français. Les premiers mots, c'était "C'est vrai qu'en France vous avez plein de Noirs/d'Arabes ?", et après, ils demandaient souvent pourquoi on les laissait entrer chez nous, ou d'autres questions comme ça. Ce phénomène de racisme est notamment dû au fait que dans ces pays, il y a peu de personnes de couleur. Ces populations ont souvent dans la tête l'image d'une intégration râtée des immigrés musulmans en France, avec attentats à la carte. Mais c'est aussi dû à l'ignorance. Et c'est tellement dommage. On a bien senti que ce n'était pas dû forcément à de la méchanceté quand on est intervenu dans une classe de collège en cours de géopolitique en République Tchèque. Un professeur nous avait hébergé pour la nuit et le matin, il nous avait proposé d'intervenir dans sa classe sur notre ressenti en tant que Français ET en tant que voyageurs en Europe au sujet des attentats en France. En fait, en discutant avec ces ados, on s'est rendu compte que pour eux, les musulmans pratiquaient TOUS une religion qui les obligeait à tuer, à soumettre les femmes, à être barbus et à se comporter en connards. J'ai été obligée de leur expliquer qu'une religion touche à une partie très intime de chacun, donc qu'elle n'est pas considérée de la même manière par tout le monde, et surtout, que les religions ne se pratiquent pas de la même manière dans tous les pays, et qu'il est important de souligner qu'elle joue un rôle dans le fonctionnement de certains Etats. Bref, que c'est hyper compliqué. Et là, un blond aux cheveux longs de 13 ans m'a demandé "Ok, je n'avais pas pensé à tout ça. Mais moi, je ne sais pas du tout ce que c'est un Musulman. Dis-moi ce que c'est un musulman." Les gamins ont dans la tête le schéma "musulman = bombe+barbe+femme violentée", grâce à nos amis les média notamment. Mais en fait, concrètement, ils n'ont aucune info sur la religion musulmane. La porte ouverte aux amalgames dangereux. Cet ado m'a vraiment prise au dépourvu. Du coup, je lui ai parlé de la vie quotidienne d'un ami musulman que je connais qui habite en France. Je lui ai dit que ses parents sont nés en Algérie, que lui a grandi en France. Il est professeur de français, il s'habille normalement, il a des lunettes, quand il est avec des amis et qu'il y a du porc dans un plat, il mange autre chose parce qu'il ne mange pas de porc, exactement comme quelqu'un qui ne mange pas de poisson parce qu'il n'aime pas ça. De temps en temps il va peut-être à la mosquée de sa ville, je ne sais pas, il ne me l'a jamais dit. Je pense qu'il croit en Allah, je ne sais pas, il ne me l'a jamais dit. Il a une petite amie, il n'est pas marié, il est très sympa et très ouvert d'esprit. J'ai essayé de lui expliquer que la plupart des musulmans en France sont des gens normaux avec une vie normale. Et ça l'a étonné. J'ai bien souligné que les terroristes qui avaient commis les attentats à Paris étaient des terroristes, qu'ils n'ont pas fait les attentats PARCE QUE ce sont des musulmans. Et j'ai senti alors que quelque chose s'était débloqué dans la tête de ces ados tchèques. En fait, ils ne savaient pas ce que c'était un musulman, il fallait juste qu'on leur explique que c'est quelqu'un de normal. J'ai ajouté que tout le monde n'était pas comme mon ami professeur, que certains enfants d'immigrés, incapables de mettre le doigt sur leur identité, devenaient du jour au lendemain extrémistes dans leur pratiques religieuses, pour essayer de trouver une place dans la société. Et que ça, c'était en partie dû à l'incapacité des gouvernements à assumer leur passé. Des gens aujourd'hui sont perdus parce qu'on n'a rien fait pour les intégrer, eux et leurs familles.
On nous a alors demandé pourquoi il y avait autant de musulmans en France, et là on a mis les pieds en plein dans une autre cause de cet amalgame infernal : beaucoup ignorent le passé colonial de la France (y compris les Français). J'ai alors expliqué un petit peu que le Maghreb et la France, c'était une longue histoire, et que les Maghrébins n'avaient pas décidé d'émigrer en France juste comme ça pour le fun, histoire d'aller voir la Tour Eiffel.
Bref, après démêlage de l'amalgame, je me suis rendue compte qu'avec toute cette ignorance et ce mauvais traitement de l'information par les média et les esprits apeurés, on était grave dans la merde.
En Italie, on a rencontré plusieurs personnes qui travaillaient avec les migrants. Elles nous ont toutes dit que la prise en charge des demandes d'asile étaient mal encadrée. Par exemple, si on donne à un Lybien un papier de droit de séjour d'une semaine, il peut le jeter à la poubelle et il continuera à rester sur le territoire. Parce que le système est hyper mal fait. La loi prévoit qu'un demandeur d'asile puisse raconter son histoire, pour que l'Etat puisse accepter ou refuser la demande. Mais beaucoup de demandeurs ne connaissent pas leur droits, ni les démarches qu'il faut faire, et ainsi, beaucoup de gens errent dans les rues et attendent.
J'ai été choquée par les douaniers qui ont fouillé le wagon dans lequel on était. On était en Serbie, et on allait à Budapest, en Hongrie, donc on entrait dans l'UE. Ils ont fouillé le wagon comme s'ils s'attendaient à ce qu'un migrant sorte d'un accoudoir ou d'une poubelle. On aurait dit un sketch.
Et surtout, j'en ai déjà parlé dans l'article "De Prizren à Budapest", j'ai été choquée de voir les locaux de l'ancienne gare de Belgrad juste après leur destruction par la mairie. Des centaines de gens avaient passé l'hiver là, à se laver dehors par -15°C, vivant dans un bâtiments ouvert, dans des conditions inhumaines. Je remets ici le lien de la page du Courrier des Balkans qui traite de la situation des migrants dans les Balkans en temps réel. Et ici, je mets le lien d'une BD qui m'a beaucoup plus sur les sans-papiers, que j'ai trouvé très bien faite et très complète. Et oui, je vous saoule peut-être avec mes histoires de migrants, mais on a été projetés en plein dedans, alors ça m'a beaucoup marquée.
Le point de vue de Vivien sur ce voyage :
Les étapes de notre voyage d'un an. On a commencé par le trajet en violet, ensuite en orange, jaune, vert puis bleuQuand on pense à un "voyage d'un an", on s'imagine avoir assez de temps pour parcourir le monde et voir tout ce dont on rêvait. Sauf que quand on commence à y regarder de plus près, on s’aperçoit qu'un an ça peut passer très vite ! D'ailleurs, pendant notre voyage, beaucoup de gens nous on demandé pourquoi on se limitait seulement à l'Europe, alors qu'on aurait pu en profiter pour visiter l'Asie par la même occasion. Et on sentait une certaine incompréhension quand on leur répondait que non, on n'avait pas le temps et que notre emploi du temps était déjà trop chargé. C'est normal, en même temps, quand on travaille et qu'on a que quelques semaines de vacances par an, on se dit qu'avec une année entière on pourrait tout faire.
Pourtant, quand on regarde le tableau ci-dessous, on s’aperçoit que finalement on a pas passé énormément de temps dans les pays qu'on a visités. Alors si on avait entrepris de visiter un ou deux autres continents en plus, notre voyage aurait été bien différent ; on aurait dû se limiter à passer quelques jours dans une capitale ou un lieu hautement touristique avant de le quitter pour aller dans le pays suivant. Mais nous, on a préféré passer un peu plus de temps dans chaque pays. Des pays pas toujours très attractifs pour les touristes, d'ailleurs.
(Oui, c'est pas tout à fait un voyage d'un an, il aura plutôt duré 11 mois)Finalement, voyager pendant 11 mois à travers 26 pays, ça revient à passer "seulement" deux semaines par pays, en moyenne. Et avec notre rythme, en deux semaines, on arrivait à visiter environ cinq lieux différents. Que ce soit pour les randonnées, les villes ou les villages, pour chaque endroit ça donnait en gros 1 jour de trajet + 2 jours sur place. Alors, dans certains petits pays comme les États baltes, on a réussi à faire le tour en moins de deux semaines. Mais pour beaucoup d'autres pays, visiter seulement 5 ou 6 endroits, ce n'était pas suffisant et on aurait loupé trop de choses qui valaient le détour. C'est pour ça qu'on a passé trois mois en Italie par exemple : on n'arrivait pas à quitter ce pays tellement il y a de choses à voir. Et même en Italie, il y a plusieurs endroits qu'on voulait voir mais qu'on n'a pas pu visiter, faute de temps. D'ailleurs, voici quelques photos des lieux qu'on a retiré de notre trajet pour ne pas que notre voyage d'un an se transforme en voyage de deux ou trois ans.
De jolis endroits qu'on espère visiter un jourDonc pour un voyage aussi long que le notre, il faut quand même faire une liste des priorités, et ne pas trop s’attarder en ajoutant d'autres destinations au fur et à mesure. Parce qu'on se retrouve inévitablement face à des opportunités uniques qui n'étaient pas prévues ; comme se faire inviter sur une île grecque, tous frais payés, pour naviguer sur un voilier avec des dauphins. Et c'est un peu frustrant de devoir répondre "Non, désolé, mais on a des trucs plus urgents à faire sur notre liste."
Mais tout dépend de la façon dont on voyage. On aurait aussi pu se laisser aller au gré des opportunités, Par exemple :
"On veut aller en stop à Berlin, vous allez où ?
- A Stockholm.
- C'est joli comme ville ?
-Oui c'est super, montez je vous y emmène !"
Ou alors on aurait pu avoir une organisation plus stricte. A peine arrivés quelque part, on réserve le billet de train pour le départ vers la destination suivante. Et s'il faut plus de temps que prévu pour visiter, eh ben tant pis, on avance.
Bref, il faut trouver un équilibre qui corresponde à nos envies. D'ailleurs, nous, on a décidé de s'enfoncer dans les zones reculées et les petits villages pendant notre voyage. Mais avec un an devant soi et un peu d'argent, tout le monde n'a pas forcément envie, comme nous, d'aller se perdre au fin fond de la Slovaquie dans un petit village peuplé de manouches juste pour admirer une chute d'eau. On peut aussi choisir de ne visiter que des lieux très touristiques, et dans ce cas, on peut voir carrément plus de choses incroyables en un an. Tout dépend de ce que l'on recherche. En tout cas, nous ce qu'on voulait éviter, c'était de faire un tour du monde ponctué de files d'attente dans les aéroports. On voulait rester immergés dans notre voyage, se déplacer en bus sur les routes moldaves avec leurs nids de poules, en wagon couchette en Turquie, etc.
Il y a une autre chose importante quand on veut entreprendre son "tour du monde", c'est d'éviter de se prendre pour un reporter photographique dont l'objectif est de bombarder ses réseaux sociaux avec des photos. Parce que dans les Hostels, on a rencontré pas mal de voyageurs qui donnaient l'impression de ne pas vraiment profiter de leur voyage. Ils publiaient des belles photos chaque jours pour leurs amis (qui devaient être émerveillés et jaloux), mais nous, ce qu'on voyait, ça ressemblait plutôt à une corvée : Levé à 7h00 pour prendre "La" photo incontournables avant que les touristes n'envahissent les lieux ; ensuite, manger en triant ses photos, rentrer à l’hôtel, répondre aux commentaires et faire ses valises pour le prochain selfie dans la ville suivante.
Bref, il faut essayer de voyager pour soi, et pas uniquement pour être celui qui a le CV de voyageur le plus impressionnant. Car oui, il y a une sorte de compétition entre voyageurs pour savoir qui a visité le plus de pays, ou qui a fait la randonnée la plus éprouvante. Et il ne faut pas rentrer dans cette compétition pour éviter, par exemple, de finir par gravir une montagne alors qu'on n'en a pas vraiment envie, juste parce qu'on veut se prouver qu'on est aussi courageux que les autres voyageurs.
En général, face à un randonneur qui se vantait de ses exploits, nous on avait pas (trop) honte de dire qu'on marchait à une moyenne de 2 km à l'heure sur une journée entière (avec des sacs a dos de 15 kg, et en comptant les pause photo, repas et l’installation de la tente). On savait très bien qu'on passait parfois pour des amateurs, mais on a quand même continué avec ce rythme au lieu de se dire qu'on devrait voyager comme les autres, plus vite.
D'ailleurs, on peut reparler un peu de notre façon de voyager. On a fait un choix parmi plusieurs possibilités qui sont plus ou moins confortables et coûteuses quand on veut voyager pendant un an. Donc si vous n'avez pas l'habitude, ou pas l'envie de porter un sac à dos lourd comme nous, c'est tout à fait possible. Il suffit de faire une croix sur le camping et de se replier sur les autres solutions d'hébergement (couchsurfing, hostels, airbnb, train de nuit, etc). Ca permet d'alléger le sac à dos et aussi de réduire pas mal les dépenses avant le départ (matelas, sac de couchage, tente, réchaud, gamelle). Bref, ça coûte moins cher au départ, c'est plus léger, moins dangereux et ça demande aussi moins de logistique. Alors pourquoi s'embêter à faire du camping pendant un voyage si long, me direz-vous ?
Eh bien, ça permet quand même plus de liberté. Quand on veut faire une longue randonnée et prendre le temps d'admirer le paysage, c'est possible. Si on est fatigué et qu'on n'est pas arrivés au bout, on peut dormir sur place. La tente nous a aussi permis d'éviter de payer l’hôtel quand c'était trop cher. Mais il faut relativiser ce point, car on aura seulement dormi 70 nuits dans notre tente, c'est à dire un quart du temps. Et comme on a acheté du matériel de camping ultra léger et ultra cher, je pense qu'on a à peine remboursé cet investissement. D'ailleurs, dans beaucoup d'endroits comme en Amérique latine, on peut passer une nuit à l'hôtel pour 5 € seulement. Et souvent, dans ces pays, le camping est a éviter à cause de l'insécurité.
Donc à vous de choisir, camping ou pas camping : c'est surtout une affaire de goût. Si vous avez peur des renards qui fouillent dans vos affaires la nuit, des ours qui hurlent et des branches qui bougent, optez pour l’hôtel. Mais si vous aimez vous réveiller dans des paysages magnifiques, cuisiner au feu de bois, et que vous laver a l'eau froide ne vous fait pas peur, prenez une tente !
Comme je suis en train d'évoquer les différentes solutions d'hébergement, j'en profite pour vous donner un petit résumé de tout les types d'endroits dans lesquels on a dormi pendant notre voyage. Il y a peut être quelques oublis*, mais cette liste vous donnera une bonne idée de notre façon de voyager.
* Je n'ai pas compté les nuits passées en France, parce qu'on a surtout été hébergés par notre famille et on n'était pas vraiment dans les mêmes conditions que pendant le reste du voyage.
Le nombre de nuits en hébergement gratuits :
(Total : 175 nuits)
- 75 - Couchsurfing
- 30 - Camping sauvage
- 28 - Amis/famille
- 13 - Chez l'habitant
- 10 - Woofing
- 6 - Bâtiments religieux
- 3 - Hôtels gratuits
- 3 - Jardins
- 2 - Maisons abandonnées
- 1 - Garage
- 1 - Caravane
- 1 - École
- 1 - Refuge catholique pour sans abris
- 1 - Camping non payé (c'est pas bien mais bon, c'était juste pour une douche ; en plus on avait mal dormi)
Le nombre de nuits en hébergements payants :
(Total : 69 nuits)
- 33 - Hôtels ou logements Airbnb
- 31 - Camping
- 4 - Bus ou train de nuit
- 2 - Refuge de montagne
Quelques mots sur notre budget
Pendant le voyage, on aura dépensé en moyenne 25.3€/Jours au lieu des 20€ que l'on s'était fixés (soit 760€ par mois). Ce qui revient à environ à 8 500€ en tout, sans compter le matériel acheté avant le départ. On n'a pas calculé, mais à nous deux, on a sûrement acheté au moins 6 000€ d'équipement. D'ailleurs, certains achats se sont révélés inutiles et ont dus être remplacés avant même de partir. Donc au total, ce voyage nous aura coûté environ 14 000 €. D'ailleurs j'en profite pour remercier ma mère qui nous a un peu aidé financièrement. Sans elle, on aurait dû dormir plus souvent dans notre tente au bord des route, ou alors on aurait surement dû écourter notre voyage.
Finalement, un an après, on est presque revenus à notre situation financière initiale. On a un peu moins d'argent sur notre compte, on a plus de voiture et on doit finir de rembourser un petit emprunt (auprès d'un proche) mais on peut presque dire qu'on a déjà remboursé ce voyage.
D'ailleurs, on peut même dire que dans quelques années, ce voyage nous aura rapporté de l'argent. Je m'explique : après avoir établi des dizaines de budgets prévisionnels, les avoir confrontés à la réalité, et après avoir fait des économies partout ou c'était possible, on est devenus très attentifs avec notre argent. Aujourd'hui on a l'impression de beaucoup moins gaspiller.
En tout cas, si vous prévoyez un grand voyage, je ne peux que vous conseiller de garder une bonne somme d'argent de côté. Le budget que l'on prévoit pour un voyage voyage, c'est comme le budget pour les Jeux Olympiques : on est sûrs qu'il sera dépassé !
Quelques remarques sur notre équipement :
Je vous donne mon avis subjectif sur certains éléments de notre équipement.
- Les chaussures de randonnée en Gore-Tex ne sont pas si imperméables que ça, et pas si respirantes que ça. Pour la prochaine paire que j’achèterai, j'éviterai.
- Les marques que je conseille pour les chaussures de randonnée : Meindl et Lowa.
- Exped est une marque de sacs à dos que je trouve vraiment solides, bien conçus et confortables. Par contre ils sont quand même très chers.
- Les matelas gonflables Exped sont hyper légers et confortables (pour du matériel ultra léger) mais très bruyants. Et là encore, ils sont très chers. Pour un quart du prix, on trouve des matelas très corrects chez Décathlon.
- D'une manière générale, chez Décathlon on trouve du matériel correct, et surtout, pas à des prix prohibitifs. Car si on veut bénéficier des dernières innovations et des meilleurs matériaux, ça coûte extrêmement cher. Si on ne fait pas des randonnées de plusieurs semaines ou de l'alpinisme, alors pas besoin de chercher à avoir du haut de gamme. Si vous cherchez du matériel que vous ne trouvez pas chez Décathlon, faites un tour Au vieux Campeur à Paris, ou sur www.arklight-design.com. Avec ces trois vendeurs de matériel de randonnée, vous devriez trouver votre bonheur.