Carnet de voyage

Transhumance muletière

10 étapes
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Retour aux pays du Buëch - Transhumance muletière, plus ou moins printanière !
Du 18 au 30 avril 2021
13 jours
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Dehors, petit retour tardif de la neige, dedans la finition toute fraîche de l'enduit terre de notre poêle de masse (merci Gilles) ; Au chaud dans la maison, au coin du feu, températures encore hivernales dans le vallon, on a regardé la météo et c'est confirmé, arrêté, dimanche nous serons en selle, prêts pour décoller de chez Michel et Emma, Salon de Provence, et commencer ainsi notre transhumance de retour aux pays du Buëch, pour et avec Mistral et Maé. Mais d'ici là il y a matière à s'activer. Sitôt les truelles rangées, nous avons sorti les selles, tapis, filets, ajusté les sacoches, les fontes, vérifié les attaches, graissé les cuirs, évalué contenus et contenants. Le pari : il est bien connu, ajuster notre petit confort minimum pour une quinzaine de journées aux tailles des sacoches de selle et boudins... Je (Philippe) rentre tête baissé dans la plaisir d'être ainsi de nouveau dans le voyage et passe 2 bonnes et plaisantes journées à évaluer, tester les rangements et équilibres...

Ca à l'air au point ! 
Aller on s'y croit ! 
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Bien belle journée que cette première étape. Sous le guidage de Michel, qui, en VTT, nous aura accompagné presque toute l'étape pour nous faire découvrir de magnifiques sentiers. Cistes, thym en fleur, romarin, arbres de Judée resplendissants, aphyllante... Un festival printanier, alors que nous venons de laisser l'hiver à la Jarjatte.

Bravo à Michel, nous n'avons presque pas foulé de goudron. Bel enchaînement de sentiers et chemins... pour finir sur les galets des rives de la Durance.

Soirée au bord de l'eau, avec de magnifiques lumières et couleurs dans le ciel et en prime pour accompagner notre première nuit sous tente : concert de grenouilles.

Départ bien entouré, Michel en vélo ouvre la voie, La Durance, les mules sur leur îlot, et nous autour du petit réchaud à bois... 
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Début de journée un peu fraîche : la veille, pour que les mules aient un peu de quoi brouter, nous les avions mis sur un petit îlot herbeux. Traverser au soleil couchant, avec les galets bien chauds aux pieds sur le bord, c'est un plaisir , mais aller récupérer les mules dans la fraîcheur matinale, c'était une autre aventure !!!!

L'étape s'est faite à pied pour Philippe, et globalement à dos de mule pour Véronique. En effet des amorces de blessures des mules, au passage de sangle, nous ont contraint à un bâtage mode portage (équilibrage des charges sans serrer la sangle) plutôt que mode cavalier (serrage à fond).

J'ai donc renoué avec les km pédestres. Il n'empêche ce fut une bien belle étape qui nous a vu gravir le petit Luberon jusqu'à la forêt de cèdre et rebasculer versant nord, sur Bonnieux .

Arrivant aux premières maisons, nous interrogeons le premier monsieur croisé sur les possibilités de nous installer "à la sauvage" (il faut préciser que nous sommes au pays des belles baraques ! Alors vaut mieux montrer patte blanche).

Du coup moment très sympa, bout de pelouse à brouter pour les mules, de l'eau pour chacun, et une petite fille ravie de voir des mules dans le jardin 😀.

Les lentilles sont dans la cocotte, bien assaisonnées. Hum voici qui va réchauffer, miam miam....

Et à demain si vous le voulez bien !!!

Fraîche le matin la Durance,  espaces sauvages du sud du Lubéron, pose à midi, la forêt de cèdres, fdescente sur Bonnieux
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Désolé pour l'absence hier soir, nous étions au paradis, et au paradis il n'y avait pas de réseau !!!!

Pourtant il y avait de jolies choses à raconter. D'abord d'avoir pris tranquillement notre temps, au soleil, le matin pour démarrer, puis pour faire qlq courses en traversant Bonnieux. Mais le sympa de la journée c'était d'arriver sur le vallon de l'Aiguebrun. Ce petit ruisseau chemine de vasques en charmants tunnels de verdure, sur le versant nord du grand Luberon au fond des gorges fraîches qu'il a creusées. Site spot d'escalade (ça ne semble pas pour débutants !), le vallon est aussi dominé par les ruines du fort de Buoux. Nous y avons été accueillis par le gardien du lieu, fort curieux et heureux de nous voir arriver avec notre équipage muletier. Site fortifié occupé depuis qlq milliers d'années, il reste juste ce qu'il faut de vestiges de la vie et des batailles humaines pour nourrir tous les imaginaires du visiteur.

Puis en soirée, nous nous sommes enfilés le long du sentier au creux des gorges se resserrant, l'Aiguebrun n'apparaissant plus que par intermittence sous l'aspect de séduisantes vasques .

C'est au bord de l'une d'elle sous une végétation luxuriante que nous avons posé la tente, tentés par la salle de bain ; plutôt fraîche, mais que c'est bon !

Boisson chaude, sourire, et soleil matinal pour débuter cette journée 
Harnachement 2ème méthode, mais on ne monte plus dessus ! ; fraîcheur au bord de l'Aiguebrun ; les mystères du fort de Buoux 
Notre bivouac et... sa salle de bain 😀
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Des averses étant annoncées pour la journée au fond de nos gorges plutôt fraîches, nous avons apprécié le ciel encore bleu au petit matin. Mais du coup nous n'avons pas traîné et à 9h nous étions en selle ( oui après 2 journées marche à pied, j'ai repris la version cavalier 😀). Sortie des gorges, traversée du plateau des Claparedes, champs de pierres et bories le long de la route, puis traversée de la large vallée du Cavalon (ancienne voie romaine), l'étape nous amène au pied du Colorado provençal en tout début d'après-midi, juste aux premières gouttes. Nous n'avons pas chômé et nous nous en félicitons, repos au bord d'une jolie prairie juste délaissée par le troupeau de brebis .

Je remonte en selle, sangle lâche, il ne faut pas que ça tourne ! Le plateau des Claparèdes, ses cailloux, et ses Bories 
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Donc ça se confirme, au paradis, pas de réseau !

Et hier soir encore, au bord de notre petite rivière aux vasques translucides nous étions de nouveau au paradis, et... De nouveau sans réseau, pour vous en faire part.

La journée avait bien commencé, par une petite échappée sans mules, à travers le dédale des falaises et ravins d'ocres multi nuances, multi lumières. Plaisir d'aller se perde ainsi au milieu des jaunes, des rouges, des blancs ou des verts.

Puis revenus à notre bivouac, tandis que la tente avait eu le temps de sécher, nous avons pris la route, plein est, sur la fin de matinée. Depuis nos selles, au sud de Gignac, nous avons pu constater que les ravines colorées ne se limitaient pas au secteur de Rustrel. Le cheminement n'en est que régal, jusqu'au franchissement de la colline, et c'est sous le soleil, et sur la caillasse austère que nous poursuivons jusqu'aux gorges d'Opedette.

Balade recommandée par temps frais, nous apprécions néanmoins le site, et poursuivons maintenant plein nord, pour rejoindre notre petit coin de paradis du soir, à proximité de Valsaintes.

Festival de chaudes couleurs matinales ; champ de lavandes pour midi, et vasques translucides pour notre toilette du soir...
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Bon hier, sacrée étape ! On a démarré tardivement, ayant attendu les premiers rayons du soleil pour nous activer vraiment, et surtout ayant confectionné un nouveau mode de portage de nos affaires, une de nos paires de sacoches ayant complètement explosé sur les sentiers de la veille. Je réorganise le paquetage, la paire de sacoches restante sur une mule, et sur le mulet, les 2 boudins, s'équilibrant de part et d'autre de l'arrière de la selle et solidement saucissonnés avec la grande corde (vous ne voyez pas, un coup d'oeil sur les photos !). Bref tout cela prend du temps et c'est vers 11h que nous décollons pour cette étape que nous savons longue. Incroyable le nombre de creux et de bosses, de vallons et de collines qui s'enchevêtrent dans ce pays. Estimant de manière un peu optimiste avoir bien avancé nous nous autorisons en début d'après midi, une sieste magistrale - bonheur ! Mais bon cela ne nous fait pas avancer, il en reste encore des vallons et des bosses avant l'arrivée, et c'est vers 20 h, que nous débarquons (ouf) chez Pascale et Pierre, au Revest St Martin, plutôt fourbus après il est vrai : 28km environ et 7 heures, à cheval et à pied... Mais pas de tente à monter, repas juste à déguster, bon lit nous attendant, et journée de repos en perspective pour le lendemain, ça valait le coup de faire un peu tirer...Pierre est le collègue accompagnateur en montagne avec qui j'ai proposé ces dernières années les séjours Giono. Il a retapé, ou plutôt carrément rebâti sa belle maison de pierres qu'il habite avec sa compagne Pascale.

Réapprovisionnement à Forcalquier, pour la matinée, séance de Qi Gong collective sous la direction de Véronique pour l'après midi, mais surtout de chaleureux moments d'échanges, entrecoupés, de courses à Forcalquier, lessive et soins aux copines, au repos bien mérité... Cette journée fort cool aura fait du bien à tout l'équipage ; demain on passe la montagne de Lure, une bonne journée nous attend, on ne va pas se coucher tard !

3ème et définitif harnachement :  je saucissonne les 2 boudins, bien équilibrés, de part et d'autre à l'arrière de ma selle. 
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2 journées silencieux, toujours des questions de réseau, plutôt normal vu les endroits qui nous accueillent chaque soir.

Nous sommes maintenant à Eourres, chez Rob et Caroline, qui ont créé ce havre de verdure et de vie, "Les Damias" et nous accueillent pour une nouvelle journée de pause.

Dimanche, c'est aux premières heures de soleil que nous avons quitté Pascale et Pierre, avec pour objectif, plein nord les crêtes de Lure. Premières hauteurs conséquentes de notre itinérance à 1700m d'altitude, nous les atteignons finalement assez rapidement pour une pause pique-nique, avec vue sur le Dévoluy enneigé, et la tête de Garnesier brumeuse : la maison est presque en vue !

Joli parcours sur la crête pour se remettre en route, puis la descente versant nord, sur un épais tapis de feuilles des faillards et par un sentier plutôt raide qui offre quelques sensations de luge... même pour les mules ; Maé experte en mode ski sur pattes arrière, Mistral plus contrôlant !

Nous avancerons un peu plus loin que ce que nous avions prévu, puisque l'après midi nous laisse encore le temps de rejoindre la vallée du Jabron, à proximité de Noyer/Jabron. Au pied du sentier caillouteux, nous trouvons un joli pré bien vert, de bonne herbe, avec comble du confort un petit torrent frais, ensemble fort accueillant pour y poser notre tente.

Plic ploc, les premières gouttes n'attendent pas que nous soyons glissés dans nos plumes pour nous signaler que la suite du parcours se fera sous un autre ciel, que le provençal qui nous a offert douce fraîcheur et bon cagnard jusque là.

Plic, ploc, elles sont toujours là au petit matin, nous ne nous bousculons pas pour sortir de nos duvets. Mais le temps de petit déjeuner, et de tout plier (même la tente mouillée, ce qui est moyennement sympa), et le temps nuageux mais sec, attendra finalement notre arrivée aux Damias à Eourres pour se remettre à la pluie en soirée.

Joli sentier balcon, sur les hauteurs de la vallée, puis longue piste caillouteuse, nous amènent au col St Pierre, puis à l'oasis de verdure que représente le hameau de Damias, chez Rob et Caroline.

Lieu de vie pour plusieurs familles, lieu d'accueil, de maraîchage, incroyable réalisation humaine, projet d'une vie, qui aujourd'hui se poursuit à plusieurs jeunes familles, nous y sommes chaleureusement accueillis, et à l'invitation de Caroline, y prendrons une nouvelle journée de repos, bienvenue je crois, pour nos montures, et appréciées par nous deux. Chouette moment partagé avec le collectif, Philippe en charpente sur le toit, et Véronique en appui cuisine (15 personnes à table et faut pas croire que les rôles soient pré-déterminés !)

Ilot de fraîcheur avant l'aridité de l'adret de Lure  
Depuis la crête, Dévoluy en vue. A l'ubac, le terrain humide est propice aux glissades sur le tapis de feuilles...
Amélanchiers, Hépatiques et Fritillaires, avant de découvrir notre petit coin de paradis pour la soirée
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J'ai de nouveau fait faux bon, hier soir, à ce petit journal de voyage, mais cette fois, ce n'était pas faute de réseau. Simplement nous étions magnifiquement et chaleureusement reçus par Brigitte, dans sa maison d'Orpierre. Comme quoi, il n'y a pas que les jolies vasques d'eau transparentes des petits torrents, et des vallons secrets qui constituent le paradis, les soirées chaleureuses et partagées y souscrivent aussi 😀

Hier donc nous avions quitté le hameau des Damias, à Eourres, aux premières heures, météo bien humide étant annoncée pour l'après-midi. Un joli sentier grimpant que nous enfilons au petit trot, nous met au rythme de cette journée qui nous verra avancer souvent à cette allure régulière et efficace. Les méandres du vallon nous conduisent au pied de Salérans, puis par une longue piste en fond de vallée nous remontons vers le col de la Crouzette. Nos montures ont toujours bien du jus, et elles acceptent généreusement de nous porter jusqu'au col de Saint Ange, par un sentier caillouteux et bien raide, mais qui par beau temps doit être superbe. Le Col de St Ange nous permet de franchir la montagne de Chabre qui s'étire en une fine et aérienne arête rocheuse. Mais l'humidité et le froid de cette petite pluie fine ininterrompue depuis le départ commence à nous pénétrer, intensifiant l'envie d'arriver. Courte pose sous un abri bien venu pour grignoter quelques graines et fruits secs, et nous dégringolons jusqu'à Orpierre, regrettant que l'absence de soleil nous empêche de prendre notre temps sur ces jolis sentiers.

L'après-midi bien au chaud dans un petit appartement de Brigitte aura été agréablement remplie par une bonne sieste, et par un intéressant partage entre Béné , la fille de Brigitte, et Véronique à propos des langues, des sons et de la Turquie... Soirée très chaleureuse (et gourmande) avec Brigitte.

Ce matin, la météo annonçant une accalmie pour la matinée, et une pluie continue et importante l'après midi, nous avions de nouveau prévu un réveil bien matinal, afin d'arriver chez Laurence à Savournon en milieu de journée. Manque de chance, dès 9h. , moment de notre mise en selle, la pluie s'installe en continu pour la matinée. J'ai prévu de tirer au plus court, quitte à faire pas mal de route. Chacun sous notre protection, grand manteau pour Véronique, large cape pour moi, nous sommes au petit trot ininterrompu, sur nos montures, comme "confinés" sous nos protections respectives, mais malgré tout avec l'humidité qui doucement s'installe de la capuche au fond des chaussures. En fin d'étape nous laissons le goudron pour le sentier qui remonte les gorges du Riou jusqu'à la forêt de Jubéo. Sous le soleil ça doit encore être superbe, mais là nous avançons, avançons, et... alors que la pluie commence enfin à faiblir, nous débarquons dégoulinants chez Laurence dès 13h. Bravo la météo, c'est l'après-midi qui finalement aurait été la plus clémente. Ce n'est pas grave, une chouette et réparatrice après-midi nous attend chez Laurence.

Demain, dernière étape pour arriver chez Christian, à Veynes. Passera t on par la montagne d'Aujour et ses sentiers ou par la route et ses petits vallonnements ? On verra demain en levant le nez vers le ciel...

Les Damias, à Eourre, verdure et convivialité
Passage de la montagne de Chabre dans des conditions qui n'incitent guerre à la photo... Arrivée dégoulinante chez Laurence
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Départ sans trop s'être pressés de chez Laurence, et de sa jolie maison accueillante. Le ciel n'est pas trop menaçant, le vent du sud fait défiler les nuages, mais quelques rayons de soleil percent néanmoins. Echaudés par les 2 étapes précédentes on ne tente pas le diable, et choisissons l'option route. Une quinzaine de km, souvent au petit trot jusqu'à St Auban d'Oze. On coupe parfois quelques détours de la route, en traversant le ruisseau, où en enfilant les rangées de fruitiers, abondants. Puis alors que la pluie devient menaçante nos montures nous portent vaillamment jusqu'au col d'Oule, les 500 derniers mètres de dénivelé du voyage. Christian et Marie sont venus à notre rencontre. Ils font connaissance avec les copines qui resteront chez eux quelques temps pour profiter de la bonne herbe, à volonté. Et c'est sur ce petit coin de paradis pour mules et mulets que nous redescendons à travers une magnifique hêtraie, Maé devenue virtuose de la glissade, skiée !

Fin d'une bien belle aventure. Le petit piquant de l'itinérance, le bonheur des imprévus et des belles surprises, le printemps naissant, arbustes et bords de sentiers fleuris, les petits coins de paradis qui ont accueillis notre tente, et les chaleureux amis qui nous ont reçus... c'est tout cela le voyage ; on rentre à la maison, mais déjà de nouvelles cartes sont sur la table 😀 et la révision, matériel, harnachement, soin aux animaux qu'aura constitué cette transhumance nous invitent aux prochains départs...


De la chaleureuse maison de Laurence...
... à la verte prairie au-dessus de Veynes