Comment retourner à Toulouse en commençant par s'en éloigner le plus possible dans une sorte de vaste mouvement spiral, de façon à retarder au maximum le moment d'arriver et en atténuer la conscience ?
La voie des Pyrénées s'y prête assez bien, par le Conflent puis le Capcir. À l'approche de Prades sous un ciel encore orageux, commençons par saluer de loin le pic du Canigou (2784 m), évoquant non sans nostalgie les souvenirs triomphants de notre jeunesse sportive...
Glory Days, chantait le Boss.
À la sortie de Prades, quittons le fond de vallée de la Têt et dépassons l'abbaye de Saint-Michel de Cuxa, en nous élevant vers les villages de Taurinya, Fillols, Vernet-les-Bains.
Abbaye bénédictine de Saint-Michel de Cuxa ; village de Vernet-les-Bains et vue sur le massif du Canigou.Toujours à la recherche infatigable du plus perdu des trous perdus, il advint que je m'intéressai au singulier village de Mantet, ainsi décrit dans Wikipédia : "Mantet, protégé par un splendide isolement, rompu par l'arrivée d'une route du bout du monde qui, en 1964, l'a enfin rattaché à ses contemporains, a connu ainsi l'épilogue de la légende du « dernier village de France » qui parlait de ce hameau, aux confins des terres d'Espagne, enclavé entre des monts de plus de deux mille mètres, où ne pouvaient parvenir que chèvres et mulets pratiquant un affreux sentier bordé de précipices, où les maisons, bâties sur un fumier millénaire, abritaient une race de contrebandiers sales et sauvages menant leur fragile existence parmi les aigles, les isards et les sangliers."
Un lieu aussi peu accueillant à la foule, aussi retiré et sauvage, avait forcément pour mon âme insociable des appas irrésistibles. Il fallait aller voir ! Pour atteindre Mantet, on passe par le village de Py ; et le calembour qui en résulte sied assez bien à la route qui nous y fait grimper. Une longue et étroite route en lacets, où chaque véhicule à croiser apporte sa petite dose d'adrénaline.
Village de Py - descente finale du col de Mantet - aperçu du village en contrebas - les montagnes environnantes.Sans être d'une beauté à couper le souffle, l'endroit tient au moins sa promesse d'isolement : peu de monde, quelques voitures au parking (le village est interdit aux véhicules non riverains). Des randonneurs, des résidences principalement secondaires tout en pierre, un gîte de montagne au jardinet fleuri, une mairie, car Mantet, loin de tout, a conservé le statut de commune. Le tout plutôt bien entretenu.
Concernant la technologie, la 4G passe étonnamment bien, mais le compteur mouchard Linky, lui, ne passera pas, si j'en crois l'avertissement affiché sur un boîtier électrique cadenassé.
Petite promenade au milieu des maisons :
Étant redescendu dans l'étroite vallée de la Têt, juste en amont de Villefranche-de-Conflent, on tombe face au Fort Libéria, qui verrouille le passage du haut de son éperon rocheux.
Le Fort Libéria dominant Villefranche-de-Conflent.Nous approchons du terme de ce voyage au cours d'un amusant chassé-croisé avec le fameux Train Jaune, aujourd'hui essentiellement touristique. Une belle route suit la même vallée, et son allure de tortillard permet aisément de le dépasser pour aller l'attendre un peu plus loin, appareil photo en main.
Le Train Jaune remontant la vallée de la Têt.Terminus, en tout cas pour le carnet de route : nous voici à Mont-Louis, dont la citadelle est établie aux confins de trois vallées : La Cerdagne, tributaire du bassin versant de l'Èbre ; La vallée de la Têt (pays de Conflent) qui prend sa source au pied du pic Carlit et coule vers Perpignan et son embouchure à côté de Canet-en-Roussillon ; et enfin le Capcir, où naît le cours de l'Aude.
La citadelle de Mont-Louis, à 1600 m d'altitude, surveille la très haute vallée de la Têt.