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Neuf mois qu'elle rongeait son frein à disque, et que je m'étiolais dans mon exil suburbain. Il était temps de lâcher les chevaux ! À moi, chaos granitiques, flots bleus, plaisirs gourmets...
Juin 2021
10 jours
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11
juin

Avant tout fuir la ville ! pour aller pas loin, peut-être, mais peinard.

(source IGN - Géoportail) 

Je n'ai pas photographié Castres et ses sempiternelles maisons sur l'Agout (prononcez "la goutte", gens du nord de la Loire...). Le centre-ville est certes pittoresque, mais déjà abondamment documenté dans la littérature touristique. Castres est assez vivante pour sa taille, seulement la fréquentation du samedi soir peut laisser un peu à désirer.

12
juin
On dirait l'entrée d'un temple. En haut à droite, le "chapeau de Napoléon", que ses détracteurs auront du mal à démolir.
 Dans la forêt du Sidobre, les gros cailloux poussent encore mieux que les champignons.
Le lac du Merle offre un peu de profondeur au paysage.

Un peu au nord, quelques roches remarquables sont dispersées aux alentours du village de Lacrouzette.

La silhouette la plus emblématique est la Pierre clavetée (Peyro Clabado), bloc estimé à 780 t, en équilibre surprenant.
 En progressant sur un plateau au-dessus de 650 m, on découvre le Roc de l'Oie.
D'autres formes émergent parmi les arbres clairsemés : à droite, certains ont reconnu un éléphant... 
13
juin

Après une journée ponctuée de sauts de puce en voiture et de balades à pied courtes mais crevantes, une cavalcade en terrain plus ouvert s'imposait. Direction Brassac pour franchir l'Agout, puis arrivée à Lacaune sous une tempête de ciel bleu, à l'heure de passer à table.

Fin de marché dominical au pied de l'église de Lacaune 

Établi au fond d'une large cuvette relative entourée par les monts de Lacaune, le bourg éponyme présente un visage assez accueillant pour une localité de moyenne montagne (800 m environ). Le climat y est favorable au séchage du jambon, faisant de l'artisanat charcutier une spécialité locale.

Après un bon repas, les sommets de la modeste chaîne, tout proches, n'attendaient que ma visite. En s'élevant au-dessus du plateau verdoyant autour de Lacaune, une sensation d'air un peu plus vif et de légèreté nous gagne. Le paysage s'agrandit, la perspective se perd dans les brumes d'un horizon rongé d'azur laiteux. Les arrondis débonnaires du relief proche évoquent quelque chose entre l'ondulation rassurante de mon Charolais natal et les pentes un peu plus affirmées des monts du Lyonnais.

Vue à mi-pente en direction du nord-ouest

Seule vient rompre le charme, en direction de l'est, l'accumulation insistante de hauteurs hérissées d'éoliennes cyclopéennes, tel un moderne Golgotha répliqué ad libitum. C'est le paysage qu'on crucifie.

(Je n'en montrerai rien ici, mon appareil photo refuse d'en retenir la silhouette funeste.)

Les deux points culminants, Puech de Rascas (1270 m) et Montgrand (1269 m) sont inaccessibles à cause des installations qu'ils accueillent : dispositifs militaires probablement de surveillance aérienne pour l'un, antennes de télécommunications pour l'autre. Reste le roc de Montalet (1259 m), surmonté d'une Sainte Vierge qui, au moins, se laisse approcher.

Sommets des monts de Lacaune : à gauche, le Puech de Rascas, à droite, le roc de Montalet - deuxième dauphin. 

En redescendant par le versant est du roc de Montalet, la route arrive en vue du village de Nages :

 Nages, petit village du Haut-Languedoc sur la bordure sud-est des monts de Lacaune

Après cette courte boucle, retour vers Lacaune, avec une brève halte-menhir. Toujours inclure une halte-menhir dans un voyage, c'est vite vu et ça permet de cocher la case : anthropologie/histoire - ça, c'est fait !

 Voilà, c'était Robert le menhir. À l'arrière-plan, le roc de Montalet.
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La dernière partie de la journée fut consacrée au retour à Castres, en suivant la vallée du Gijou jusqu'à son confluent avec l'Agout en bordure du Sidobre. Voici quelques vues de bourgades traversées.

Lacaze, sur le Gijou. On peut remarquer la protection par des ardoises des façades ouest. 
À gauche, Vabre (sur le Gijou) ; à droite, Roquecourbe (sur l'Agout tout près de Castres). 
14
juin

De Castres, on rejoint Mazamet, dont le principal titre de gloire est d'avoir vu naître le cycliste Laurent Jalabert. Mazamet est une ingrate petite ville tassée au pied du versant nord de la montagne Noire. Une certaine touffeur y règne, dans un lacis de petites rues malaisées, parmi des façades affichant plus de vétusté que de cachet. On y entre poussé par le hasard, on en sort mu par la nécessité !

La départementale 54 remonte le modeste cours de l'Arnette et permet de franchir la ligne de crête non loin du pic de Nore (1211 m), point culminant de la montagne Noire, coiffé d'une haute antenne. Au col de la Prade, on bascule vers la vallée de la Clamoux dans une descente généreuse en épingles, freinages et relances, menée pour ma part avec rythme et entrain au son de la radio, où l'autrefois délicieuse Corynne Charby rebondissait comme une boule de flipper, jusqu'à ce que Johnny vînt se mêler d'allumeeeeeeeer le feu... des vieilleries de ma génération, quoi. Tout ça pour arriver au patelin de Cabrespine, un peu en aval des gorges de la Clamoux.

 Le patelin de Cabrespine

La Clamoux rencontre ici un massif karstique et son réseau souterrain, auquel une partie de ses eaux vient contribuer, alimentant sous forme de résurgence le bassin de l'Orbiel, dans lequel se jette aussi plus loin son cours principal - et l'Aude collecte tous ces apports qu'elle conduit à la Méditerranée, ouf.

Qui dit réseau karstique, dit grottes, galeries, siphons, concrétions, et ici, gouffre annoncé comme "géant".

Et il est vrai que... cette passerelle en porte-à-faux domine plus de 200 m de vide, dont le fond se perd dans l'obscurité. Tout au bout sur la petite terrasse en verre épais, personne ne fait trop le malin et notamment votre serviteur, qui ne s'y attarda pas plus longtemps que nécessaire.

Point de vue abyssal sur le gouffre géant de Cabrespine 

Il s'agit de la deuxième plus grande cavité d'Europe, après la salle de La Verna du côté de La Pierre-Saint-Martin dans les Pyrénées-Atlantiques. Ici, le volume est un peu inférieur mais le trou est plus profond, ce qui ne manquera pas de fasciner tous les gynéco... pardon, tous les géologues. De plus, le réseau comprend d'autres grandes salles à travers lesquelles, moyennant un billet spécial, on peut se lancer sur plusieurs tyroliennes, ou une rivière souterraine sur laquelle canoter.

Je me suis contenté d'admirer les assez belles concrétions qui tapissent la grotte principale :

Le calcaire peut cristalliser sous forme d'aragonite (formes étoilées ci-dessus) ou de calcite (gros plan à droite). 

Après cet intermède bienfaisant (la grotte est à 15 °C toute l'année) au milieu d'un après-midi brûlant, il était temps de rouler vers le littoral, à travers le Minervois - modeste vin mais joli pays.

Villeneuve-Minervois, et, à droite, Castelnau-d'Aude 

Et me voilà arrivé à Canet-Plage, où il y a la mer, toute la mer, rien que la mer.

Qu'est-ce que je vous disais ? - et un petit bout de Pyrénées dans le coin à droite. 
15
juin

Entendez par là que c'est l'intellect qui est en vacances - mais alors complètement. Voici la vue le matin, depuis la chambre au 6ème étage :

Et puis les jours suivants, le vent marin s'est mis de la partie, soulevant des vagues et transformant la baignade en thalassothérapie. Cette petite houle courte typique de la Méditerranée est plus brutale qu'il n'y paraît de prime abord.

 Vagues et courant de fond dû au ressac massent et fatiguent les muscles.

Il s'est mis aussi à faire souvent gris, humide, voire orageux dans la région environnante. Pas de quoi inspirer de grandes virées exploratrices dans l'arrière-pays. Ou était-ce simplement la grosse flemme ?

J'ai tout de même assez fortuitement découvert un curieux village de cabanes de pêche traditionnelles :

Le "village de pêcheurs" de l'étang de Canet 
20
juin

Comment retourner à Toulouse en commençant par s'en éloigner le plus possible dans une sorte de vaste mouvement spiral, de façon à retarder au maximum le moment d'arriver et en atténuer la conscience ?

La voie des Pyrénées s'y prête assez bien, par le Conflent puis le Capcir. À l'approche de Prades sous un ciel encore orageux, commençons par saluer de loin le pic du Canigou (2784 m), évoquant non sans nostalgie les souvenirs triomphants de notre jeunesse sportive...

Glory Days, chantait le Boss.


À la sortie de Prades, quittons le fond de vallée de la Têt et dépassons l'abbaye de Saint-Michel de Cuxa, en nous élevant vers les villages de Taurinya, Fillols, Vernet-les-Bains.

Abbaye bénédictine de Saint-Michel de Cuxa ; village de Vernet-les-Bains et vue sur le massif du Canigou.
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Toujours à la recherche infatigable du plus perdu des trous perdus, il advint que je m'intéressai au singulier village de Mantet, ainsi décrit dans Wikipédia : "Mantet, protégé par un splendide isolement, rompu par l'arrivée d'une route du bout du monde qui, en 1964, l'a enfin rattaché à ses contemporains, a connu ainsi l'épilogue de la légende du « dernier village de France » qui parlait de ce hameau, aux confins des terres d'Espagne, enclavé entre des monts de plus de deux mille mètres, où ne pouvaient parvenir que chèvres et mulets pratiquant un affreux sentier bordé de précipices, où les maisons, bâties sur un fumier millénaire, abritaient une race de contrebandiers sales et sauvages menant leur fragile existence parmi les aigles, les isards et les sangliers."

Un lieu aussi peu accueillant à la foule, aussi retiré et sauvage, avait forcément pour mon âme insociable des appas irrésistibles. Il fallait aller voir ! Pour atteindre Mantet, on passe par le village de Py ; et le calembour qui en résulte sied assez bien à la route qui nous y fait grimper. Une longue et étroite route en lacets, où chaque véhicule à croiser apporte sa petite dose d'adrénaline.

Village de Py - descente finale du col de Mantet - aperçu du village en contrebas - les montagnes environnantes.

Sans être d'une beauté à couper le souffle, l'endroit tient au moins sa promesse d'isolement : peu de monde, quelques voitures au parking (le village est interdit aux véhicules non riverains). Des randonneurs, des résidences principalement secondaires tout en pierre, un gîte de montagne au jardinet fleuri, une mairie, car Mantet, loin de tout, a conservé le statut de commune. Le tout plutôt bien entretenu.

Concernant la technologie, la 4G passe étonnamment bien, mais le compteur mouchard Linky, lui, ne passera pas, si j'en crois l'avertissement affiché sur un boîtier électrique cadenassé.

Petite promenade au milieu des maisons :

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Étant redescendu dans l'étroite vallée de la Têt, juste en amont de Villefranche-de-Conflent, on tombe face au Fort Libéria, qui verrouille le passage du haut de son éperon rocheux.

Le Fort Libéria dominant Villefranche-de-Conflent.

Nous approchons du terme de ce voyage au cours d'un amusant chassé-croisé avec le fameux Train Jaune, aujourd'hui essentiellement touristique. Une belle route suit la même vallée, et son allure de tortillard permet aisément de le dépasser pour aller l'attendre un peu plus loin, appareil photo en main.

 Le Train Jaune remontant la vallée de la Têt.

Terminus, en tout cas pour le carnet de route : nous voici à Mont-Louis, dont la citadelle est établie aux confins de trois vallées : La Cerdagne, tributaire du bassin versant de l'Èbre ; La vallée de la Têt (pays de Conflent) qui prend sa source au pied du pic Carlit et coule vers Perpignan et son embouchure à côté de Canet-en-Roussillon ; et enfin le Capcir, où naît le cours de l'Aude.

 La citadelle de Mont-Louis, à 1600 m d'altitude, surveille la très haute vallée de la Têt.

Les Salvages, à côté de Castres (juste au nord, rive droite de l'Agout) :

Les Mets d'Adélaïde

https://www.lesmetsdadelaide.fr/

Cuisine fine et soignée, assez relevée, bien maîtrisée. Le cadre, une ancienne école communale, est mis en valeur par une décoration dans le thème ; et aux beaux jours le préau offre une terrasse à l'ombre bien abritée.

J'ai dégusté :

Tartare de thon rouge de Méditerranée, émulsion wasabi

Minute de seiche au chorizo, barigoule d'artichauts et écume d'aïoli

Fleur de vanille comme un fraisier

Tout était très bon, des amuse-gueule au dessert.

Lacaune, au centre-bourg :

Le Relais de Fusiès

https://www.hotelfusies.fr/pages/le-resto.html

Après un hors-d'oeuvre assez simple (des crudités de saison), j'ai particulièrement apprécié une jambonnette de poulet farcie en plat principal, avec une bonne sauce. Le dessert, une mousse aux fruits exotiques si mes souvenirs sont exacts, manquait certes un peu de relief.

Au bout du compte, le rapport qualité-prix de l'ensemble du repas était excellent.

Cet établissement d'ambiance plutôt bourgeoise semble être une adresse appréciée par les autochtones pour le repas dominical.

Canet-Plage, sur le front de mer, à environ 400 m au sud du mini-golf :

La Marée de Joe

Spécialités de poissons et fruits de mer.

Passé le premier moment d'étonnement en constatant que la serveuse ignorait tout de ce qu'était une sole meunière ("Si elle est ? mulière ?? - Meuh-gniè-reuh ! - Elle est fraîche, pêchée de ce matin" [donc probablement meunière, à son avis]), le repas s'est bien déroulé. Le patron, Joe je suppose, un grand costaud du genre rugbyman, m'a montré sa sole, qui avait une bonne tête d'honnête sole, puis l'a cuisinée à la plancha et servie avec notamment différents poivrons légèrement piquants et un aïoli de bon aloi. En dessert, j'ai apprécié le carpaccio (et non "gaspacho", Mademoiselle...) d'ananas.

C'est ici que j'ai pris mon meilleur repas à Canet-Plage, à un prix justifié par la qualité.

Au Petit Cactus

Spécialités mexicaines, crêpes, glaces...

Cette petite cantine dépourvue de salle offre seulement une terrasse extérieure. Elle ne paie pas de mine, et pourtant apporte la preuve que restauration rapide ne signifie pas nécessairement malbouffe débitée à la chaîne.

- La serveuse, une authentique Mexicaine de Veracruz, est vraiment sympa et son amabilité ne se dément à aucun moment du repas.

- Outre les spécialités - tacos, tortillas, enchiladas et tutti quanti (tuttas quantas ?) - on y sert diverses salades plus classiques, simples, fraîches et bonnes. J'en ai pris une aux crevettes.

- Si vous passez par Canet, allez-y au moins manger une glace, elles sont excellentes !

Idéal pour faire un bon petit repas rapide et peu cher à midi (le soir, ferme assez tôt).

J'ai été plutôt agréablement surpris par la restauration à Canet-Plage (citons le Galion, quoique un peu cher, ou encore le Miramar). Pour une station balnéaire pas spécialement chic, je m'attendais au pire ; or on mange en général au moins correctement. Il faudrait voir jusqu'à quel point c'est toujours vrai en haute saison, j'ai quelques doutes à ce sujet.


Vernet-les-Bains (au-dessus de Prades) :

Bistrot Le Cortal

https://bistrot-lecortal.fr/

Restauration traditionnelle de bonne facture. Ce petit restaurant niché dans la montagne ne néglige pourtant pas la cuisine des produits de la mer.