Carnet de voyage

Escal' à 2 roues

226 étapes
257 commentaires
226 abonnés
Dernière étape postée il y a 138 jours
Deux vélos, du matériel d'escalade, des petits coeurs qui volent et plein de temps devant nous !
8
mai
8
mai
Publié le 8 mai 2022

Et voilà, deux zozos en vacances ! ... "encore des vacances ?!" allez vous nous dire ! Non, mais cette fois, c'est pour de vrai ! Les graaaanndes vacances, voyez vous ?!

"Escal' à 2 roues", c'est deux vélos, deux paires de mollets, plein de bazar pour camper, grimper et réparer, des petits cœurs qui volent partout et plein plein plein de temps devant nous !

Tente, pinceaux, doudounes, chaussons d'escalade, réchaud, gants, corde, rustines, culottes, appareils photos, lunettes, buffs, sacs de couchage, liseuses, mousquetons, stylos, polaires, frontales, bols, casques, t-shirts, inreach, casserole, sac à pof, carnets, shorts, tapis de sol, tournevis, chaussettes, crème solaire, bonnets, palette d'aquarelle, casquette, pompe...

Voilà le nouveau jeu de ces jours ci : Faire rentrer tout ça dans 8 sacoches !

Rentrera, rentrera pas ? Réponse au prochain épisode !

10
mai
10
mai
Publié le 10 mai 2022

Et voilà ! Chaque chose a finalement trouvé sa petite place dans une de nos sacoches...

Et une fois n'est pas coutume, nous sommes même prêts avant l'heure du départ !

Pour autant ces dernières heures, il a fallu faire des choix et pendant que Bruno s'allégeait considérablement en ne prenant qu'un seul slip pour tout le voyage, je m'allourdissais (considérablement !) en ajoutant encore un joli carnet à dessin et un foulard supplémentaire !

Mais chuuuut ! Il ne s'est encore rendu compte de rien...

Je me suis quand même retrouvée à aller faire les dernières courses avec dans mon sac à main la balance de la cuisine pour gagner trois grammes sur une batterie externe. C'est comme ça quand on est amoureuse d'un stacano du light !

Tant que ce n'est pas moi qu'il fait monter sur la balance, tout va bien !

Bref, résultats des courses une quarantaine de kilos pour chaque vélo chargé.

17kg de vélo et un peu plus de 20kg de bazar... Correct quand on emporte à la fois, sa garde robe, sa chambre à coucher, sa cuisine, son local à matos, sa salle de bain, son tiroir informatique et sa boîte à outils en vacances, non ?!

Pourtant j'en vois déjà un faire des bonds du fin fond de sa vallée d'Ossau ! On n'aura ni la même vitesse de croisière, ni le même dénivelé au compteur, c'est certain !

"Light is rigth !" Je la connais la chanson... et pour sûr, elle me reviendra en tête bien assez tôt !

On en reparle bientôt !


10
mai
10
mai
Publié le 10 mai 2022

"Et rontonton, demain nous partons,

Et rintintin, nous partons demain,

Et rititi, nous voilà partis !"

Voici la formule magique qui a depuis toujours rythmé chacun de mes départs en vacances. Aussi loin que je me souvienne, à peine le portail du jardin franchi, le voyage commençait. Mon papa au volant du camion poussait la chansonnette, ma maman, le nez dans le grand atlas jaune levait les yeux amusée et moi, le sourire jusqu'aux oreilles, assise au milieu, je clamais les couplets avec joie, tellement impatiente de partir pour de nouvelles aventures !

... alors cette fois, pas de volant mais un guidon, pas d'atlas Michelin mais une carte du monde, pas de papa ni de maman mais un amoureux. Quant à ma curiosité débordante et à mon envie de partir à la découverte de la planète, je crois que rien n'a changé. L'horizon m'apparaît chaque jour toujours plus vaste.

Alors si on n'échappe pas à la traditionnelle ritournelle du départ, on pourrait ce coup-ci l'enrichir d'une strophe ou deux.

"Et rololo, nous partons à vélo,

Et rantantan, nous partons longtemps !"


Ces dernières semaines, ces derniers jours, chaque embrassade, chaque au revoir et chaque "à bientôt" maladroit ont pris des airs bien différents de d'habitude. Comme un air de nostalgie déjà perceptible à l'instant présent.

Comme une envie de nous garder avec vous et à la fois de vous sentir ravis de nous voir nous envoler, comme si nous laisser partir était gage d'histoires à vous raconter au retour ou en cours de route, comme si on se quittait vite pour mieux se retrouver bientôt !

Pour nous, comme une réelle envie de vous embarquer d'une manière ou d'une autre avec nous dans cette folle aventure.

Il faut dire que ce mois d'avril a été pour moi un tel condensé de partages, de joies de vivre, d'expériences vécues un peu partout et d'émotions fortes que laisser tout ça derrière fait tout bizarre.

Mais je sais aussi qu'en regardant de temps à autre dans le rétro, toutes ces images et éclats de rire me reviendront en tête ! Merci à toutes et tous pour vos petits mots, vos petites attentions ces jours-ci. Merci pour toutes vos bonnes ondes, on embarque un peu de vous tous dans nos bagages !

Vous pourrez donc nous suivre ici de près ou de loin, régulièrement ou non, en ayant peut-être parfois les mains mointes ou les mollets qui chauffent...

Il paraît que vous pouvez même vous abonner pour ne rien rater et surtout pour ne pas vous fatiguer à pédaler dans la semoule pour produire assez d'électricité pour arriver jusqu'ici alors qu'il n'y aurait rien de nouveau à lire.

L'humeur et la connectivité décideront de la fréquence des différents épisodes. Et n'oubliez pas... pas de nouvelle, bonne nouvelle !


12
mai
12
mai
Publié le 12 mai 2022

Pourquoi choisir d'attaquer le périple en Grèce et pas depuis la maison ? Bonne question !

Notre idée étant de pouvoir rejoindre la Turquie pour y grimper avant que la trop grosse chaleur ne soit là, gagner quelques semaines sur le calendrier estival n'a pas de prix pour la peau des doigts des grimpeurs que nous sommes ! Perte considérable cependant pour les fabricants de magnésie.

Pour autant, prendre un avion pour aller si peu loin ne nous satisfaisait pas complètement et c'est pour une petite mission bus, bateau, vélo, bateau... que nous avons opté.

Rejoindre Milan puis Ancone avec 2 vélos et 12 bagages c'est un peu comme jouer à tetris dans une soute d'un Flixbus.

Flixbus, les seuls bus équipés pour faire voyager les vélos en théorie. En pratique, c'est comme ailleurs dans le monde, tu te dépatouilles comme tu peux. Des tendeurs pour les accrocher à l'arrière et les perdre sur l'autoroute ou bien en rampant dans la soute au milieu d'une certaine de valises. Le spéléo met ses qualités à l'œuvre et en quelques minutes, on est prêt pour le depart. C'est parti pour 22h de bus.

A chaque arrêt, à notre plus grand désarroi les valises viendront s'empiler une à une sur nos belles roues (pas encore voilées) et sur nos porte-bagages (pas encore tordus !). Je me demande bien si d'ici la fin de ce trajet en bus, nos montures se seront transformées en trottinettes ou en monocycles ! Contrairement à Bruno, je ne suis une spécialiste d'aucun de ces deux engins.

Arrivés à Ancone, on se dégourdie les jambettes dans un rallye cyclo en direction du port et on saute dans un ferry à 18h30 pour un départ prévu initialement à 16h30. Comme quoi, la non anticipation c'est parfois la clé du succès ! On grimpe sur le pont et le bateau largue les amarres ! C'est parti pour 22h sur les flots !

Enfin, 22h plus tard, on s'offre nos premiers tours de pédales sur le sol grec !

Quelques kilomètres vers l'Est... 18km selon Bruno, 32 km selon le compteur, cherchez l'erreur (!). C'est comme dans les manifs... ce coup-ci, j'aurais tendance à croire le moins engagé des deux !

Et déjà la nuit est là et la faim aussi... Pour cette première soirée greque, on a droit à un accueil collector !

On vous raconte ça plus tard !

12
mai

Première soirée du voyage ou comment tester l'accueil à la mode grecque...

20h, la nuit pointe son nez et les estomacs commencent à crier famine. Grands coups de frein devant le premier bar venu. Quelques vieux sont assis là et regardent, l'air blasé, le match de foot à la télé.

Le temps d'attraper deux ou trois trucs dans les sacoches, lorsque j'arrive dans le bar, mon Bruno est déjà installé comme un roi et semble avoir déjà tapé la causette à tout le monde. Le festival peut commencer...

Deux grandes bières arrivent, offertes par ce monsieur là nous explique-t-on.

Ah... Et ben, efcharistó !

On commande ensuite une salade grecque. Notre voisin nous explique que ce qui irait très bien avec, ce serait des brochettes et des frites. Bingo, ça arrive justement. Miaaam ! Et c'est déjà réglé par ce même voisin. Ah... Efcharistó !

Le bar se remplit peu à peu. A la télé on passe du foot au basket puis re au foot. Public de toutes les générations mais exclusivement masculin.

Évidemment, on nous demande d'où on vient et où on va. Un peu gênés, on explique qu'on a de grands projets mais que pour le moment, on a roulé à peine une trentaine de kilomètres et que c'est notre premier jour ! Peu importe, on est déjà leurs héros !!

Lorsqu'on nous demande où on compte dormir ce soir, on fait un vague signe du bras pour montrer que l'on n'en sait réellement rien mais qu'en même temps ce n'est pas tellement un problème.

Le téléphone grec semble marcher à toute vitesse dans ce petit bar de pêcheurs et entre plat et dessert, deux gars nous emmène, non loin, visiter la terrasse intérieure d'un restau fermé appartenant à sa sœur où nous pourrons passer la nuit... Royal !

Efcharistó les mecs !

On enchaîne avec un gros morceau de gâteau au chocolat et une énorme part de mille-feuille offert par quelqu'un d'autre encore. Efcharistó !


Bouquet final, quand on croit le repas enfin terminé, John, sûrement le seul irlandais du Péloponése vient discuter avec nous (en français s'il vous plaît !)

Il voudrait lui aussi nous offrir quelque chose : ce sera le café ! Thank you !


Et le comble c'est que quand John nous demande ce qu'on fait dans la vie, c'est le voisin grec déjà bien renseigné qui répond en français : guides de montagne. Ben ouais quoi ?! On n'a pas gardé les cochons ensemble mais on a mangé des brochettes à des tables voisines pardi !

Alors là évidemment, la montagne, ça lui rappelle son bon copain d'école en Angleterre. Il faisait de l'alpinisme. Il était fort. Malheureusement ce dernier est mort à l'Everest en 82 avec son compagnon de cordée.

Ah oui ?

His name was Joe Tasker.

Et Bruno qui rétorque dans la seconde : Ah oui il était avec Peter Boardman, ils sont super famous !

L'irlandais n'en croit pas ses oreilles et moi je n'en crois pas mes yeux. J'ai l'impression d'être dans un bon film ! Au fin fond de la Grèce, on parle de vieux copains morts à l'Everest.


Au moment d'aller nous coucher dans notre palace, il nous reste tout le bar à remercier. Efcharistó encore et bonne nuit !

Au petit matin, c'est la propriétaire du restau où nous dormons qui nous offre café et bouteille d'eau fraîche, pas plus étonnée que ça de découvrir deux clodos sur sa terrasse ! Efcharistó et bonne journée !


Bref, une soirée comme une autre en voyage !


15
mai

Rejoindre Athènes depuis Patras nécessite d'avoir quelque tours de pédales dans son sac. Pas franchement de gros dénivelé au programme de ces trois jours puisque nous longeons la côte mais de là à parler de plat, il ne faut pas rigoler non plus ! Ce serait trop facile et puis il faut bien se mettre dans le bain...

Le bain ? Ne croyez pas que je me sois mise à l'eau mais croyez bien par contre que cela fait au moins un an et demi que je n'ai pas posé les fesses sur un vélo !

Ces deux cent cinquante premiers kilomètres permettent donc de prendre un peu la température et ce n'est pas peu dire !

Sous le soleil du Péloponnèse, il n'y a pas que les mollets qui chauffent, les fesses s'échauffent sur la selle, les épaules, les cuisses et le dessus des pieds grillent au soleil comme des merguez. Le mode bronzage cycliste est activé !

Tongs, short, lunettes et casquette, voilà la parfaite tenue des vacanciers qui pédalent, sous un soleil de plomb, le long du Golfe de Corinthe.

La pause s'impose aux heures les plus chaudes de la journée et c'est aussi l'occasion de reprendre quelques forces. Pour ces premiers jours d'efforts, il n'y a pas de secret : pour avancer, il faut manger ! Et comme on n'a pas de nourriture dans nos sacoches, la réciproque est vraie aussi : pour manger, il faut avancer !

Salades grecques et souvlakis (brochettes) font le job à merveille.

Pour le dessert, point de raisin sans pépin, on n'a pas vu une vigne aux alentours de Corinthe... cherchez l'erreur !

Avec un peu d'élan, on saute le canal du même nom et nous revoilà sur le continent (mais pas pour longtemps...)

D'Athenes, nous voguons en une nuit vers l'île de Kos puis vers Brodum.

Youpi, nous sommes en Turquie !

16
mai
16
mai
Publié le 18 mai 2022

[Quand Bruno prend la plume...]

Ce qu'on laisse...


Un balcon au sud-est, où il faisait bon boire son café au réveil, et souvent un maté au retour d’une sortie. Un endroit où "fare niente" et regarder passer le temps. Dedans, la pièce bicentenaire offrait cette douce quiétude au coin du feu. Heureusement, l'étable remisée accueillait toutes les extensions matérielles qu’on accumule au fil du temps… whish bone, bâtons, haches, kites, diapos, jumar, machine à coudre, piolets, quelques milliers de mètres de corde, des courriers, etc... Manu et Armelle m’y avaient accueilli avec toute la bienveillance qui les caractérise à un moment où je n’en menais pas large… L'art s'y était même invité au gré de l’existence sans qu’on aurait pu s'en douter !

26 ans de boutique, c'est quand même pas rien. L'école des guides, on finit par avoir des espérances… Bon, je vous rassure tout de suite, sitôt terminé mon tout premier contrat d'été, j'embarquais sur Pétrel pour traverser l'Atlantique. Destination le Brésil puis la Patagonie pour ce qui allait devenir une véritable addiction.

Tout jeune guide, mes qualités d'enseignant étaient à l'image des innombrable doutes qui inévitablement m’assaillaient. Et je suis sûr que mes premiers stagiaires garderont de nos échanges la stricte rigueur que je rapportais de ces campagnes Patagones : « l’à peu près » n'était pas de mise.

Certains collègues, à mes yeux charismatiques, m'ont nourri. Ce contexte professionnel, associé au fait de presque continuellement devoir se remettre en question a été source de dynamisme et d'élan. Le terrain était au centre de nos préoccupations, l'administration n'était qu'une lointaine nébuleuse.

Puis la roue a tourné, d’autres têtes sont apparues, la confiance et la solidarité « des potes de boulot » s'est perdue… L'absentéisme pour soulever des causes m'a pesé. Bref, cette prise d'année de dispo signe très probablement ma sortie par la petite porte, j'n'en attendais pas plus ! Sentiment de nostalgie, quand même ?...

Ma Twingo rouge, aux bonnes mains de ma chère filleule ! Longue route à vous, et n'oublie pas, avec Renault chaque jour un bruit nouveau ;-)

Des mètres de découverte karstique juste au dessus de la maison! Qu'ils continuent donc à se creuser…

Mes petits. Que les adieux furent émouvants… Je souhaite que cet intermède vous fasse réaliser de l'importance de chaque moment échangé, peu importe la forme. Gagnez en indépendance, en capacité à choisir par vous-même. Qu'ils soient assidus aux études devrait d'une certaine façon me rassurer, j'ai cependant envie de leur dire trouvez vous un centre d'intérêt, quel qu'il soit ! L'avenir tient plus à être motivé par une cause qui nous anime, le reste suivra… Quel regret d'avoir si peu partagé ces dernières années…

Nôtre VW volant, bien au chaud chez les parents de Lara, désassuré. Et oui, on peut, il suffit de demander !

Un truc électronique de 13cm sur 7, voyeur à outrance qu'on passe son temps à charger, inimaginablement chronophage…

Plus qu'une lassitude, une incompréhension de cette pensée dominante à valoriser les gens qui travaillent ?! Ou comment le travail devient une fin en soit alors qu'il devrait être relégué à un simple moyen. Cet anti capitalisme primaire ne serait-il pas LA solution ?

Les montagnes. Plus aucune attirance alpinistiquement parlant. La récurrence des disparitions associée n'est sûrement pas étrangère. Et quoi faire de cet aléa qui devient trop prégnant à mes yeux ... Comment, et pourquoi continuerais-je à l'accepter ?

Des voiles de traction… je ne vous cache pas que j’étais à deux doigts d’en tasser une au fond d'une sacoche. Rhâ… avancer grâce à Éole !!

Ça s'appelle comme ça, une forme de routine...

N’est-ce pas la méga suerte de s'être trouvés, et de partager les mêmes aspirations ? Lara croque la vie, et nous avons cette évidence commune qu'on n'en aura pas deux !

19
mai

A l'heure où on vous écrit ces lignes, cela fait une grosse semaine que nous sommes partis et nous avons parcouru en vélo environ 300 km. Soit même pas la moitié de ce que vient de parcourir Rémi ces trois derniers jours pour relier Hendaye à Cerbère pour une traversée des Pyrénées versant sud. Trois étapes de respectivement 245, 212 et 270 km pour un dénivelé de près de 13000m au total ! Une vraie machine à pédale !

Autant dire, qu'à côté, on se sent un peu comme la tortue de cette photo !

N'avons nous pas, nous aussi notre maison sur le dos ? Ici en Turquie, le décor semble bien vallonné et on a vraiment failli tomber à la renverse quand en pianotant sur le GPS et en y entrant nos hypothétiques prochaines destinations, on a vu s'afficher le chiffre de 7km de dénivelé positif.

Et en même temps, il paraît que "rien ne sert de pédaler (fort !), il faut partir à point".

Alors, pas de vélo ces jours-ci, on sort corde, chaussons et ce qu'il reste de bras à Datça !

24
mai
24
mai
Publié le 24 mai 2022

Nous étions à peine partis, en escale à Milan, que justement un vieux Milanais croisé dans un marché de primeurs, à la vue du vélo se remémorait ses Paris-Brest, Marseille-Paris et plein d'autres virées… L'heureuse évocation le fit même quelques minutes plus tard, revenir avec comme cadeau, un demi-kilo de mandarines fraîches.

Depuis toujours, un guidon était pour moi conçu pour être tenu à deux mains. En Grèce, il semble que la priorité numéro un soit la consommation du café frappé. Et les conducteurs de scooter de devenir livreurs avec jusqu'à quatre breuvages dans une main, l'autre servant éventuellement à se diriger dans le dense flux des autres véhicules, et ce le plus rapidement possible : faudrait pas que le café se réchauffe !

Quel bel engin pédagogique que ces scooters pour se familiariser à la conduite. Dès leurs plus jeunes âges, même en cours d'apprentissage de la marche, agrippés au guidon les enfants peuvent s’y tenir debout, entre les jambes du soit disant responsable. Parfois même, un troisième passager chevauche l'engin chargé de quelques cartons hétéroclites au milieu desquels pointent des yeux canins. Mais qui pilote ? …

À Bodrum, classe oblige, les casques tiennent lieu de parures de mode. Génial la multitude de formes et de design, généralement assorti à la couleur de l'engin. La sangle sous le menton, c'est selon… Si on est livreur, on ne coche pas la case obligatoire. Si notre coiffure est imposante non plus. Enfin s'il fait vraiment chaud, c'est le casque lui-même qui est remis en cause. Quel pragmatisme finalement, et quelle capacité d'adaptation !

Les quelques individus qui nous ressemblent, sur des engins non motorisés, sont le plus souvent des jeunes. Et faut assurer pour tenir la roue arrière le plus longtemps possible sur la cannebière locale, zigzaguant entre tous les étals. Le top dans ce registre, c'est au milieu de la foule de touristes entre tables de restaurant et alignement de yachts à quai. La marge est ténue, yessss 🤘 !

Bon, on a aussi partagé quelques belles heures de grimpe avec Claire et Adrien, des Belges en césure qui aussi roulent. Mais eux c'est vraiment la mala-suerte ! Figurez-vous qu'ils sont trois avec Albert, et n’ont que deux roues. Les pauvres… Si vous voulez leurs apporter votre soutien, c'est ici.


Bruno.

25
mai
25
mai
Publié le 26 mai 2022

Ces derniers jours se suivent et se ressemblent...

Comme deux parfaits petits ouvriers de la grimpe qui bosseraient en trois 8, on est soit du matin, soit de l'après-midi (quant à la nuit on essaie de se reposer entre hurlements de chiens et aboiements de coqs !).

Travail à la chaîne, on empile les longueurs. Monoactifs, grimpeurs en quête de falaises ombragées.

Ouf ! Un jour de repos hebdomadaire réclamé par la peau des doigts est obtenu de justesse après quelques négociations, on a frôlé le mouvement social.

Les autres jours, c'est la routine : métro-boulot-dodo à peu de choses près... vélo-grimpe-dodo.

Un détail de taille, notre usine est un paradis, caillou gris ou oranger piquant ou grand porche plein de colos.

Philippe Poutou l'a si bien dit à son meeting, on pourrait très bien vivre sans travailler, on s'en sortirait très bien et on ne s'ennuierait très certainement jamais. Ce qu'il faudrait néanmoins c'est un salaire. Nous n'avons ni l'un ni l'autre mais apprécions grandement cette saveur de liberté retrouvée.

Aussi ces jours-ci, ce n'est ni la rentabilité ni le profit que l'on recherche mais plutôt l'ombre et la fraîcheur toute relative à la Turquie en un début d'été ! On jongle donc avec les faces Est et ĺes faces Ouest, avec les levés un peu tôt et les couchés un peu tard, avec la grimpe du matin ou de l'après-midi et avec les murs raides et les dévers à colos.

Can baba, Sucuk, les Frouzes, que de merveilles pour les grimpeurs gâtés que nous sommes !

On pofe, on dégouline, on repofe, on rerepofe encore et parfois ça fonctionne. On clippe les relais souvent tout transpirants mais heureux !

La plupart du temps quand je retouche le sol, je ressemble davantage à une peintre en bâtiment qu'à une élégante grimpeuse !

Ajoutez y quelques bleus et quelques croûtes et c'est parfait ! Un genou coincé par ci, un autre coincé par là... en short évidemment ! J'adore tellement ce style de grimpe où on passe son temps à chercher des repos. Une grimpe d'oso perezoso !

Reprise du travail pour les petits autistes. J'ai même mis deux essais consécutifs dans la même voie, suffisamment rare pour être souligné !


Matériel de grimpe vieillissant destiné à être abandonné d'ici quelques semaines. Corde ressortie du carton des cordes remisées pour usure avancée et dégaines dépareillées des années 90. Évidemment qu'on enchaîne les voies, qui voudrait tomber sur de telles vieilleries !

Datça nous aura offert son lot de pépites minérales et de belles journées verticales.

Retour à l'horizontale maintenant... quoique, quand on voit ces milliers de mètres de dénivelé à gravir pour rejoindre la région d'Antalya, on se demande si les prochains jours seront si horizontaux que ça !

En tout cas, on range les bras, on ressort les mollets !

26
mai
26
mai
Publié le 30 mai 2022

Vous connaissiez certainement "un dimanche aux Goudes" ?

https://youtu.be/nxbgdLIzeBU

Ben là, c'est un mercredi aux Frouzes. C'est un peu pareil dans une ambiance cependant un peu moins chill'. Point commun, vue sur la mer mais ça s'arrête à peu près là !

"Datça… N'oubliez pas d'aller jeter un œil au canyon des Frouzes !" Nous avait dit Nastro, le plus turc des ouvreurs montpelliérains. C'est chose faite !


La journée commence en fanfare.

Étape 1 : session vtt sur une piste caillouteuse qui grimpe, qui grimpe et qui grimpe encore. On zigzague sous un soleil de plomb entre les tortues énervées et les meutes de chiens impassibles...

A peine a-t-on avalé tout plein de mètres de dénivelé qu'on dégringole à nouveau jusqu'au niveau de la mer. Dommage !

Lorsqu'on arrive enfin tout dégoulinants au départ du sentier menant à la falaise, il fait une chaleur assommante. Le genre de température où si tu étais chez toi, tu resterais l’ombre sur ta terrasse à siroter un pastis en regardant la mer et en écoutant du reggae marseillais ou bien tu ferais une sieste dans ton hamac avec ce même son dans les oreilles. Bref, à ce moment précis, on est déjà cuits-rôtis, assoiffés et on a déjà les jambes ramollies par cette petite virée matinale. On songe déjà au long chemin du retour et aux quelques gouttes d'eau qu'il va falloir gérer au mieux pour tenir la journée !

Qu'à cela ne tienne, on ne s'est pas donné tout ce mal pour arriver jusqu'ici pour ne pas grimper !

Étape 2 : randonnée à pied sous les tropiques.

Évidemment, dans ce canyon, il n'y a pas un brin d'air et la chaleur est étouffante. La falaise, pourtant orientée Est, est encore en plein cagnard, aussi on temporise sous des buissons en cassant la croûte. Enfin, pour ma part, je ne fais que regarder Bruno manger son bout de pain parsemé de points vert parce que moi, je ne me suis toujours pas résignée à manger du moisi… ça arrivera certainement à un certain stade du voyage mais ce coup-ci, j’aurai plutôt opté pour de l’eau croupie mais le canyon est sec et resec ! Jeûne solide comme liquide donc.

Quand la paroi passe enfin à l’ombre, on se jette sur la voie la plus facile du secteur, 6c+, ça tire un peu à la chauffe mais on n’est plus à ça près ! Peut-on même encore parler d'échauffement vu le climat ?

On se faufile entre les frelons déshydratés qui viennent se délecter des quelques gouttes qui suintent de certaines concrétions. Niveau hydratation, on semble tous être dans le même bateau ! Même les chèvres qui se baladent au pied de la falaise économisent leur salive et ne bêlent pas une seule fois.

Privilège du spot sauvage, ça croustille. Inconvénient d’une face Est qui a déjà bien chauffée, le caillou rayonne de mille feux. Inconvénient d'ouvreurs forts grimpeurs, il y a bien de l'air entre les points pour autant, aucun refroidissement notoire à déclarer. Ce combo parfait associé à ces grosses bestioles volantes m'oblige à râler un peu alors que moi aussi, je ferai bien d’économiser ma salive !

Étape 3 : marathon vertical dans un four solaire.


Chacune des voies est une perle et on tente d'y faire honneur en les enfilant comme il se doit. Grandes envolées d’une quarantaine de mètres, caillou neuf, choux fleur, colos et lunules pour des voies de pure conti où l'escalade, toute proportions gardées, est plutôt aventureuse ! Magique ! Merci les ouvreurs pour ces petits bijoux !

J’aurai même eu la chance, aujourd'hui, de me retrouver nez à nez avec une grosse chauve souris avant que celle-ci ne saute dans ma brassière ! …il y a des jours comme ça...

Sinon ici, c’est comme à la salle d’escalade, plus tu montes et plus il fait chaud. Je perd encore le peu d’eau qu'il reste dans mon corps et je transgoutte à grosses pires quand je clippe le relais du dernier 7a+ de la journée. C'est dégoulinante que je rejoins le sol, ce qui n’échappe d'ailleurs pas aux frelons qui doivent me prendre à cet instant pour une stalactite toute humide et se rapprochent dangereusement de moi ! Pas folles les guêpes !

La journée pourrait évidemment s’arrêter là. Plus d’eau, plus de peau sur les doigts, retour à la casbah !

Mais évidemment en voyage à vélo, ça ne se passe pas comme ça, surtout quand tu as la grosse flemme de repédaler encore jusqu'au sommet de la colline, que tu as peur de la descente version trial de l’autre côté avec tes pneus lisses et surgonflés qui dérapent et que tu entends déjà de là, effrayée, les canines des chiens qui claquent en bas de la pente.

Voilà comment, pendant que Bruno refaisait le chemin parcouru le matin en sens inverse, je décidais d’emprunter avec mon petit vélo une variante : un sentier de randonnée longeant la côte. Sur le papier, cela semblait être la solution parfaite : 2,5km de distance et peu de dénivelé pour une balade sur un GR en mode sentier littoral, quoi de mieux pour conclure cette belle journée ? Vous vous en doutez, une fois encore, la réalité a rattrapé la fiction.

Le guide au guidon m’avait pourtant mis en garde avant de me laisser filer dans cette jolie excursion : « un sentier de randonnée, c’est fait pour les randonneurs, pas pour les cyclistes en carton et encore moins pour les vttistes en herbe. »

«T'inquiète mobylette !» Bille en tête, trois gouttes d’eau dans ma bouteille, pas un moyen de communication avec moi, me voilà partie sur les sentiers douaniers turcs… «Rendez vous au bar du port !» … Et dire qu'un temps, j'ai même cru que je pourrai y arriver la première et l'y attendre mémère en sirotant un pastis comme un dimanche aux Goudes. Évidemment c’est l’inverse qui se produisit et ce n’est pas un pastis qu’il aurait eu le temps de boire mais quatre ou cinq pour l'apéro, suivi d’une bouillabaisse, d’un dessert, café et même d’un digestif !!

Étape 4 : bike & walk. Ce raid multisport me réservait encore quelques petites surprises !

Alors oui, j'avoue que je n'ai pas mis une seule fois les fesses sur la selle parce que ce n'était absolument pas roulant. Oui, c'est vrai que le sentier n'étant pas très large et il fallait que je pousse le vélo sur la bande la plus roulante en marchant à côté dans les bartas et que ça piquait parfois beaucoup les jambes. La vérité, c’est aussi que je me suis mangée les pédales dans les tibias environ 578 fois et c'est vrai, qu’il a fallu porter souvent quand de gros cailloux barraient le passage. En descente, le vélo voulait filer à toute vitesse sans moi et sauter dans la mer juste en dessous et qu'il fallait tenir fort les manettes des freins. En montée, il ne pensait qu'à m’aplatir et c’est quand même vrai que ça m’énervait un petit peu ! La vérité, c’est aussi qu'à quelques endroits le sentier s'était éboulé et que passer là, quelques dizaines de mètres au dessus de la mer avec un vélo sur le dos devenait un peu expo. Il est aussi vrai que je pétais de chaud et qu'au moment où je pensais avoir parcouru la moitié de la distance, j’ai bu une gorgée d’eau que j’ai savouré longtemps dans ma bouche avant de déglutir. C’est vrai aussi que j’ai failli me casser la figure quelques fois et que je me suis dit que me faire mal ici toute seule, c’était quand même un peu stupide ! Je me suis parfois demandée où Bruno en était de son parcours, tout en croyant encore que j’allais gagner la course ! Bon, j’avoue aussi qu'à un moment je commençais à fatiguer un peu et que j’avais hâte que la balade se termine. En regardant la suite qui ressemblait à une grande zone raide en terre déboisée, je me suis demandée où ce fichu sentier pouvait bien passer mais que je me suis aussi dit que ça irait… De toutes façons, faire demi tour ? Pas question, ce n’était même plus une question d'honneur mais de faisabilité ! Enfin, quand je suis arrivée devant ce passage étroit au milieu de cette falaise qui dominait la mer et que j’ai essayé de passer en portant mon vélo sans réussir, je me suis dit que je n’étais pas loin du bout du sentier et que Bruno allait sûrement venir à ma rencontre !! Bon… c'est vrai, j'ai laissé mon copain à deux roues ici et j’ai marché pas mal en direction du port. Et voilà que Bruno n’était pas venu à ma rencontre mais m’attendait gentiment au bar, comme prévu. Alors l’air de rien, j'ai débarqué toute ébouriffée sur la terrasse du bar, je lui ai dit comme si tout ça était normal, qu’il fallait venir m’aider ! Entre temps, le soleil s’était couché et la nuit était tombée. Alors l’air de rien, on a repris le chemin en sens inverse. Lui sur son vélo, moi en courant à côté.

Étape 5 du raid multisports du jour : bike & run.

Résultat des courses, retour à 22h au camping un peu fatigués et un peu déshydratés. Il avait raison le guide au guidon ! Quant à moi, maintenant je le sais : les GR ça ne passe pas forcément en vélo. En même temps en France non plus, j'aurai pu m'en douter !

Bref, c’était un mercredi aux Frouzes.


Ps: Ah oui, et si jamais une tête de turc était planqué là, à nous observer... Sans aucun doute, premièrement il se marrerait bien et deuxièmement, il dirait que les "frouzes"... C'est nous !

1
juin

Pris dans une espèce de course contre la montre pour essayer de prendre de vitesse l'été qui déjà, en cette fin de mois de mai, semble bien motivé à s'installer... à Geyikbayri, c'est la résilience (et oui, ce mot à la mode) que nous avons appris !

Les journées de grimpe à Datça, aussi géniales niveau grimpistique qu'éprouvantes niveau calorifique, nous ont laissé comprendre que si on voulait espérer grimper encore un peu avant de continuer le voyage et d'abandonner tout notre matériel, il ne fallait pas trop traîner. Autrement dit, il n'était peut-être pas question de faire des tours et détours de bicyclette et de passer des jours et des jours à défier les 7000m de dénivelé et à parcourir les 500 km nous séparant de la région d'Antalya. Aussi après moultes réflexions éthiques, écologiques, humoristiques, thermiques et physiques, la raison du grimpeur l'a emportée sur celle du cycliste.

On pédalera plus tard, la grimpe d'abord !!

En sautant dans un bus de nuit en direction d'Antalya, on gagne ainsi quelques jours de printemps qui, espérons le, nous seront précieux !

Il est 5h du matin lorsqu'on débarque à Antalya où l'ambiance n'est, avouons-le, pas franchement fraîche. On prend aussitôt la route en direction de Geyikbayri, un des plus fameux spot de grimpe turc. Après quelques efforts et pas des moindres, pentes à 13% au menu, on finit par arriver à destination, avec les jambes un peu en compote et avec un sacré coup de chaud sur le casque. A cet instant, on se dit que les montées turques c'est du sérieux et que s'il fait déjà si chaud à 9h du mat', ça risque d'être compliqué !

On peut maintenant le dire : "Geyikbayri, on n'a pas tout compris !"

Geyikbayri, des falaises de toutes les orientations, rocher gris, blanc et oranger, concrétions, grottes, peu d'approche, petite rivière qui coule au milieu, joli camping, ouverture des voies relativement récente... sur le papier, tout semble parfait ! Dans les faits, très chaud, trop chaud. Les grimpeurs semblent d'ailleurs avoir déserté les lieux pourtant il semble en rester quelques-uns qui traînent là au camping... des durs à cuire ?

On enfile nos chaussons et c'est la désillusion : rocher super patiné et cotations pas données, l'un ayant sûrement l'autre pour conséquence. Dans tous les cas, il semblerait que Geyikbayri ait vieilli...

Quand tu allies ces deux ingrédients, rocher lustré et mains toutes moites, le mélange est détonant : Zipettes à tout instant !

On n'a quand même pas fait tous ces kilomètres pour se retrouver à grimper en plein juillet à la Clape ou au Biclope (chacun ses souvenirs d'enfance...) !

Les premières impressions ne sont pas toujours les bonnes, aussi on se donne trois jours pour tenter d'apprécier à sa juste valeur ce spot fameux ou ce fameux spot. Et trois jours à se battre avec son sac à magnésie, sa transpiration, ses pieds gonflés dans les chaussons et à se faire rouster, c'est déjà pas mal long ! "Hot niveau".

Bruno tire pas trop mal son épingle du jeu alors que moi je suis littéralement scotchée au sol, ce qui évidemment m'énerve énormément !

Molle attitude au programme.

On tente les falaises orientées Ouest le matin tôt, les faces Est l'après-midi, les voies équipées dans les années 2000, celles équipées une quinzaine d'années plus tard, rien n'y fait. Quand un local nous dit que pour lui la saison est tout simplement fini, on comprend qu'il est temps de plier bagage et de filer un peu plus loin, un peu plus au nord, un peu plus haut ! Il nous ouvre sa bibliothèque afin que l'on y choisisse notre prochaine destination. Teşekkür ederiz !

La belle session grimpe à Geyikbayri, ce ne sera pas pour cette fois-ci ! Ça ressemble bel et bien à un beau but cette histoire !

On s'offre quand même un regain de vitalité et un sursaut d'énergie avant le départ en trouvant enfin une fraîcheur toute relative à Çitdibi.

Çitdibi, c'est la falaise du futur, 150 mètres de haut, ticket d'entrée 7b+ et puis hop, presque que du 8 dans du caillou relativement neuf. Le genre d'endroit où tu ne peux pas être trop ramolo des biscotos.

Une falaise perchée en haut d'une colline et qui reste à l'ombre la majeure partie de la journée. Pas question de monter jusqu'ici en vélo et on profite d'un trajet motorisé avec d'autres grimpeurs pour découvrir l'endroit.

L'occasion de discuter un peu avec eux et de comprendre qu'à priori eux aussi sont complètement scotchés par la chaleur à Geyikbayri et que grimper relève du défi !

Voilà qui ce explique qu'on ne les voyait que se balader au ralenti entre les sanitaires, le bar et la cuisine commune du camping et faire une traction ou deux, de temps en temps, sur la poutre en bois accrochée devant leur petit chalet. Quant aux autres habitants du camping, il s'agit de nombreux russes venus chercher le calme en Turquie d'où ils peuvent télétravailler en paix depuis leurs cabanes en bois. Tout s'explique ! Il nous fallait bien quatre jours pour élucider le mystère de Geyikbayri !

Avant de se transformer définitivement en guimauve, on reremplit nos sacoches et on prend la direction des sommets !


1
juin
1
juin
Publié le 8 juin 2022

Sur la route, quand l'ambiance devient canine, on aimerait bien avoir des yeux derrière la tête, on voudrait pouvoir appuyer très fort sur les pédales pour déguerpir à toute vitesse et on rêverait de devenir invisible. On espère aussi de tout coeur ne pas être pris pour une saucisse.

Certains jours, il n'y a pas une minute durant laquelle on ne craint pas de voir une bête à poils surgir de nulle part en aboyant, en montrant les crocs ou en remuant la queue !

Quand la bestiole se présente, on saute tout d'abord sur les freins même s'il arrive d'accélérer mais il faut alors que la situation nous soit très très favorable (un teckel boiteux et une descente à 18%). On lui raconte ensuite des banalités du genre : "Eh salut toi ? Comment tu vas ? Qu'est ce que tu racontes le gros ?"

Pendant ce temps, on prend des indices (retroussage de babines ou remuage de queue...), on étudie le profil (sympatochien?), on sort le trombinoscope (Attends... je pense que je connais ton cousin !). On intercale un objet entre lui et nous (le plus souvent, un vélo !) et puis on évite de se regarder entre quatre yeux tout en faisant semblant d'être super mega rassurés (brrr, même pas peur !)


Tout ça me rapelle les rencontres faites un matin sur les routes turques. Quelques kilomètres à peine et toute la SPA est au rendez vous !

Un chien qui aboie, un deuxième qui nous court après, un troisième qui veut nous manger les mollets, un quatrième qui n'aime pas trop les vélos, un cinquième tout marron, un sixième handicapé, un septième qui s'allie avec plusieurs potes pour nous impressionner, un huitième qui veut participer à la course cycliste, un neuvième qui roupille tranquille, un dixième très très gros, un onzième petit mais teigneux, un douzième tout maigrichon, un treizième presque mignon, un quatorzième qui est attaché (oufff !), un quinzième à qui on dirait qu'on a piqué sa gamelle, un seizième affalé en plein milieu, un dix-septième tout hirsute, un dix-huitième borgne, un dix-neuvième avec les oreilles coupées, un vingtième court sur pattes, un vingt et unième âgé de quelques mois, un vingt-deuxième qui a la langue qui touche par terre, une vingt-troisième qui a un gros ventre, un vingt-quatrième couvert de tiques, un vingt-cinquième qui a pété sa longe, un vingt-sixième croisé avec un rat, un vingt-septième croisé avec un ours, un vingt-huitième en fin de vie, un vingt-neuvième tout crado, un trentième tout frisé, un trente et unième comme une barrique.... et un trente-deuxième qui décide de faire sa petite balade de santé en faisant toute la fin du trajet du jour à nos côtés. Quel courage !

Une dizaine de kilomètres et une pente à parfois 13% en plein cagnard ! Si j'étais lui, c'est sûr, je serai restée à me la couler douce devant une pâtisserie en quémandant des baklavas aux passants !

Chienne de vie...

https://youtu.be/NemrmdFbBHA

10
juin
10
juin
Publié le 10 juin 2022

Un mois sur la route c'est :


◇ 3 pays 🇮🇹 🇬🇷 🇹🇷

◇ 840 km 🚲

◇ De chouettes rencontres...

◇ Et des rencontres chouettes...

◇ 4 spots de gimpe...

◇ Des belles voies...

◇ Des faits marquants...

◇ Quelques KO ❌


◇ 5 bus et 6 bateaux...

◇ 20 journées d'escalade

◇ 7 jours complets de vélos

◇ De jolis bivouacs...

◇ Des ptits dessins...

◇ Baklavas et thé à volonté !

15
juin
15
juin
Publié le 19 juin 2022

Dire qu'on aurait véritablement découvert l'hospitalité, l’accueil ou la bienveillance turque, une fois nos premiers tours de roues effectués dans le pays ne serait pas vraiment exact.

En mars dernier, alors que l'on venait tout juste de casser notre tirelire pour acquérir d’occasion nos deux engins à pédales, nous nous sommes empressés d’aller les essayer lors d’une petite balade dominicale dans l'arrière pays héraultais. Évidemment, la simple balade sur jolies petites routes s'était alors rapidement transformée en sortie VTT sur pistes, chemins scabreux, où il a parfois fallu pousser les vélos et traverser quelques passages à gué en se mouillant les pieds. C’était d'ores et déjà avoir oublié la marque de nos deux bicyclettes de voyage : « vélos de ville » !

Ce jour-là, notre pique-nique avait été un peu trop rapidement englouti au premier tiers de l'itinéraire et la sortie s'était avérée plus longue que prévue. Après avoir parcouru 80km, nous n’étions pas encore tout à fait arrivés et nous étions subitement tout flagadas ! Un seul remède pour les deux ramollos : manger !

Pas un magasin ouvert ce dimanche en fin d'après-midi et pas un sou en poche de toute façon ! Au premier village, nous demandions donc à une grand-mère qui prenait le soleil assise devant chez elle si elle ne pouvait pas nous dépanner d’un petit quelque chose à se mettre sous la dent. Pas simple de se faire comprendre, pourtant nous parlions la même langue. Le voisin, un poil plus jeune, dans son jardin à quelques mètres à peine, écoutera nos échanges mais ne tournera même pas la tête vers les deux mendiants que nous sommes. Heureusement, la mamie semble savoir ce qu’avoir faim veut dire, elle a sûrement connu la guerre et nous déniche un petit bout de pain dur (qui a lui aussi peut-être bien connu la guerre !). On se régale de ce petit en cas sous son regard un peu surpris.

Ne voyant pas d’autres mets nous être proposés, nous la remercions grandement et nous nous remettons en selle, un peu requinqués par cette pause mais pas vraiment ragaillardis par ce ravitaillement improvisé.

Quelques kilomètres plus loin, une aire de pique-nique, des barbecues encore fumants et des gens assis par terre un peu partout. On saute sur les manettes de freins pour retenter notre chance. Ce coup-ci, nous ne parlons pas la même langue. Turcs et maghrébins sont venus passer le dimanche en famille, à la campagne.

A peine avons-nous posé le pied à terre et avons-nous pointé nos bouilles d’affamés que nous nous retrouvons avec une assiette chacun et deux grosses parts de gâteaux posées dedans. Nous avons juste le temps d'avaler une bouchée, qu'on nous apporte deux cannettes de Coca. Bonheur en boîte ! Évidement dans notre état, tout ça passe comme une lettre à la poste !

Le feu est réactivé pour nous et s'en suit brochettes, saucisses grillées, concombres et galettes. Quel festin ! On englouti tout ça comme des bienheureux qui n’auraient pas mangé depuis un mois ! On nous ressert encore et on nous regarde manger avec bienveillance. On lit dans les regards la satisfaction de pouvoir offrir quelque chose et de partager. C’est ensuite l’heure des gâteaux et du thé préparé sur le petit poêle à bois. Nos hôtes sont turcs et c'est à deux pas de la maison que nous apprenons notre tout premier mot : « Teşekkür ederim ».

Google trad nous permettra de dialoguer davantage avant de remettre le nez dans le guidon. En quittant nos bienfaiteurs du jour, je crois bien que nous avons déjà l'intime conviction que notre prochaine virée passera par la Turquie !

Quelques mois plus tard, nous y voici ! Vagabonder sur les routes turques, c’est être surpris à chaque rencontre. Les journées où l’on ne nous offre rien sont finalement bien rares. Cela va d'un « çay » (thé), à un gâteau, une boisson fraîche, un repas, un spot où dormir, des chaises pour se reposer, un canapé pour la sieste, une douche ou bien un sourire, un salut de la main ou encore un coup de klaxon d'encouragement !

Illustre journée :

Quelque part entre Konya et Niğde, au centre de la Turquie, des dizaines de kilomètres sur une voie rapide avec une bande d’arrêt d’urgence confortable. Peu de villages en chemin, pas de commerce si ce n'est une station service régulièrement implantée tous les trente kilomètres. C'est dans une de celles-ci que nous avons fait halte hier soir, deux paquets de chips auront fait office de dîner puisqu'il n'y avait rien d’autre en rayon ! Thé à volonté, douche chaude et soirée devant une bonne série passant à la télé turque avec le gérant de la pompe à essence.

Au lever du jour, un thé et c'est reparti ! Les coups de klaxon de quasi chaque véhicule qui nous double ou nous croise nous accompagnent sur cette espèce d'autoroute. Une trentaine de kilomètres plus tard, bonheur ! La station service suivante ressemble à vraie une petite épicerie et on s’offre notre premier « véritable » repas depuis 24h. Entre deux rayons, on nous offre le second thé de la journée. On se remet en selle et nous avons juste le temps d’ajouter une quinzaine de kilomètres de plus au compteur que deux soudeurs nous invitent dans leur atelier pour le troisième thé du jour. Inutile de préciser, qu'à chaque fois nous avons droit à plusieurs tournées et parfois à un selfie. Le soleil commence à cogner dur et il n’est pas si simple de trouver un peu d’ombre dans ce paysage composé essentiellement de champs de blé. Finalement quelques kilomètres plus loin, ce sont des ouvriers agricoles qui nous invitent à nous mettre au « frais » à l’ombre sous leur tracteur. Quelques verres de Fanta orange bien frais, quelques échanges sur la France, la Turquie, l'économie, notre cher roi de France, l'UE, le maïs, l'irrigation, une photo et c’est reparti !

Remarquez la marque du pare-flamme...

A ces heures les plus chaudes de la journée, nos peaux grillent et le goudron fond. La pause s'impose. Elle a lieu dans un restaurant ce coup-ci. Comme on est affamé, on nous fait griller de la viande qu’on tente de manger en répondant aux mille questions de tout un groupe de jeunes se trouvant là. Ils veulent tout savoir : d'où on vient, où on va, ce qu’on fait dans la vie, combien de kilomètres on fait par jour, depuis combien de temps nous sommes partis, où on va dormir ce soir, si on est marié, si on a des enfants, si on aime le foot, si on croit en dieu… Et là, ça se complique. Autant ne pas être marié ou ne pas aimer le foot ne semblent être que des demi problèmes, autant ne pas croire en Jésus semble les interloquer… Finalement , comme il semble si important de croire en quelque chose, on s’en tire en leur avouant que nous, on croit au père noël. La situation se débloque tout pile à l'heure de la sieste. Oufff ! Comme on est crevé, on nous invite à passer dans l’arrière boutique qui sert à la fois de lieu de prière, d’entrepôt de marchandises et d'hôtel à touristes exténués ! Un canapé, un tapis et des prises électriques, on recharge les batteries en tout genre ! Enfin, comme nous avons débarqué ici tout transpirants, on nous invite avant de repartir à prendre une petite douche et ce n’est pas de refus ! Quelques photos avec toute la troupe et c’est avec quelques « followers » instagram supplémentaires que nous reprenons la route.

Les kilomètres défilent et il est dur de garder les deux mains sur le guidon tant il faut saluer en permanence les gens à droite, à gauche. Des « merhaba » s'échappent des jardins, s'élèvent des champs et s'envolent des fenêtres… Parfois, des voitures ralentissent à notre hauteur pour prendre en photos les aventuriers, tout relatif, que nous sommes pour eux.

Pour clôturer en beauté cette folle journée, à la tombée de la nuit, alors que l’on s’apprête à quitter la route goudronnée pour s’enfoncer dans les champs de blé. Une voiture s'arrête, le conducteur baisse la vitre et nous offre ce qui sera notre repas du soir : un délicieux pain plat et rond qui semble tout juste sorti du four. Dans le chemin en terre qui nous écarte de la civilisation afin de planter la tente tranquillement, notre dernière rencontre du jour, un jeune en scooter nous souhaite une « good night » !

Ce jour-là, 100km dans les pattes et tellement de belles choses dans la tête et dans le cœur !

Teşekkür ederim !

18
juin
18
juin
Publié le 19 juin 2022

Cela fait quelques jours que nous pédalons au milieu de champs de blé à perte de vue. Peu à peu ces derniers ont laissé place à des vergers de fruitiers. Partout la main d'œuvre est au travail : installation de tuyaux d'irrigation ou d'arroseurs automatiques, forages, cueillette, plantation... Des tracteurs avec les bennes chargées de travailleurs nous doublent régulièrement, en route vers le champs. On nous salue. Pas un bout de peau ne dépasse sous les voiles, foulards, masques, casquettes, gants... Le soleil cogne très fort ces jours-ci et les pauses à l'ombre ont souvent lieu sous les tracteurs.

Nous sourions en pensant que nous sommes finalement tous les travailleurs immigrés de quelqu'un. En France, les ouvriers agricoles ou les maçons maghrébins sont maintenant plutôt turcs. Ici ce sont les syriens qui font le job...


Aujourd'hui nous roulons depuis quatre bonnes heures quand le décor se redresse franchement. La petite route qui remontait gentiment cette vallée verdoyante se transforme subitement en route de montagne serpentant dans un paysage désertique. Chaque petite flaque d'ombre devient quelque chose de précieux. Est-il vraiment raisonnable de s'engager dans l'ascension de ces trois cols successifs aux heures les plus chaudes ou ne vaut-il pas mieux opter pour une bonne sieste ? Le kilo de cerises avalé directement sur l'arbre le matin même, nous donne les vitamines nécessaires alors que les fontaines qui jalonnent la route assurent un rafraîchissement régulier, nous permettant d'éviter l'insolation qui nous guette. C'est bien simple, il y a en a une tous les trois kilomètres et dans chacune d'elle, on y trempe entièrement notre t-shirt. Le temps d'arriver au point d'eau suivant, on est déjà complètement sec ; au sens propre comme au figuré ! Deux hypothèses : soit il fait très chaud, soit on met vraiment du temps à parcourir cet intervalle. On peut sans aucun doute valider les deux hypothèses à la fois !

La pente se redresse encore, on frise les 13% à plusieurs endroits. Difficile d'imaginer circuler sur ces routes lorsqu'elles sont enneigés. Point positif, on prend de l'altitude à vue d'œil mais le mercure du thermomètre ne faiblit pas pour autant !

1850m. Encore quelques coups de pédales bien appuyés et nous sommes récompensés de nos efforts : les sommets enneigés apparaissent enfin !

L'Aladaglar : Cette grande chaîne de montagnes de l'Anti-Taurus sera notre prochaine halte.


Depuis notre belvédère, les cimes semblent bien lointaines et si proches à la fois. On a hâte de découvrir tout ça de plus près. Pour rejoindre le pied du massif, il suffit maintenant de se laisser rouler !

La pente étant encore plus marquée de ce côté-ci, on se cramponne aux poignées de freins pendant que les jambes se remettent de leurs émotions !

Comme pour retarder encore un peu la rencontre avec ces montagnes et prolonger l'excitation qui précède la découverte, nous posons notre maison de toile sur une butte un peu plus loin.

Une soixante de kilomètres et 1400m de dénivelé : la pause est méritée.

Ce soir, nous bivouaquons face au massif léché par les derniers rayons du soleil. Magique !


Bonsoir l'Aladağlar !


22
juin
22
juin
Publié le 24 juin 2022

A l'Aladağlar, nous étions venus chercher un coin sauvage, du caillou et la fraîcheur des montagnes.

Ces ingrédients furent au rendez-vous. On aura même eu la chance de partager du temps avec Maud et Florence, venues grimper par là, alors qu'on aurait certainement eu un mal fou à faire coïncider nos agendas en France ! Comme quoi le hasard fait parfois bien les choses !

Grâce à elles, on agrandit même le champs des possibles !! Un brin de corde de 60m, de la cordelette pour rappeler, quelques friends, parfois un taxi et la possibilité de faire quelques grandes voies va s'offrir à nous !

Grand merci les filles !

C'est dans Kazikli canyon que nous nous mettons en bras. Escalade dans un style plutôt physique au programme sur ce conglomérat orangé. Falaises verticales voire déversantes de toutes les orientations ou presque ! On peut donc grimper à l'ombre et même sous la pluie dans les gros devers ! Renversant !

Ici il nous faudra jongler avec les averses quasiment tous les jours. L'orage semble avoir une ponctualité assez redoutable ! Parfois même la grêle s'en mêle.

"L'après-midi, mieux vaut déguster des pâtisseries et boire du thé qu'être sur les sommets." (Proverbe de montagnard turc)

On grimpe la plupart du temps la toute dernière voie dans un concerto de coups de tonnerre, sous les éclairages intermittents des éclairs et sous les premières gouttes.

Une bonne solution pour enchaîner à toute vitesse !


En se levant très tôt, on parvient à grappiller quelques longueurs dans la paroi de Yelatan où souffle soit disant un "vento d'estate". Finalement, il ne fait pas si chaud que ça et l'affaire est vite pliée avant que le soleil n'ait le temps de pointer son nez ! 7 longueurs, 6c+ max, semi équipées et un itinéraire un peu tiré par les cheveux....

De retour, on arrive juste à l'heure pour un barbecue improvisé sur le parking par Valentine et Philippe. Un chouette couple en vadrouille avec leur van, leurs skis, leur matériel d'escalade et leur enthousiasme depuis des mois !

Le lendemain, on change radicalement de style dans Pinarbaşi Canyon. Étroite et profonde gorge, rocher gris peu adhérant et lignes parfaites. Aujourd'hui, on sort les coincements en tout genre, grimpe en fissure au menu !

L'une d'elle capte notre attention depuis notre arrivée : fissure fine et élégante qui raye un grand mur gris. Oserons-nous aller y coincer nos doigts ?

On finit par se décider et c'est "so perfect" !

Le jour suivant apparaît comme LA belle journée sur le diagramme météo. On fonce en montagne !

Réveil matinal, vélo, auto-stop, marche à pied... quelques heures plus tard, nous sommes au pied du mur où plutôt de l'aiguille !

Parmakkaya, un monolithe de presque 300 mètres de haut qui nous fait penser au Naranjo de Bulnes sous son angle le plus impressionnant. On se croirait face à "Orbayu" !

C'est raide et le caillou orangé semble bien compact !

Cotations soutenues dans le 7ème degré dans un style "pas grand chose dans les mains & tout sur les pieds". Ajoutez à cela un point tous les 5 ou 6 mètres, parfois plus et des départs de relais quasi toujours expo. Ambiance garantie !

"Orient" est une belle balade verticale engagée voire exposée, mieux vaut ne pas tomber... Pour clipper les deux premiers points de la dernière longueur, c'est presque un crashpad qu'il faudrait pour parer le crash sur la vire !

Ces sept longueurs nous occupent la tête et le corps toute la journée.

Nous allons ensuite visiter Çimbar canyon. Ce coup-ci, ce sont des murs orangés qui nous attendent.

Petites prises sur lesquelles il faut s'agripper fort si on veut avoir une chance de clipper le relais !

Journée plus qualitative que quantitative : deux voies pour quatre grimpeurs !

Ça laisse le temps de faire plein de photos, de manger, de papoter de méthodes, de se reposer et peut être même d'enchaîner !

Enfin pour notre dernière journée de grimpe dans le massif, nous optons pour une valeur sûre : Karayalak, une belle paroi de presque 300m. Dalles compactes, cannelures, fissures, piliers orangés, tout y est !

L'équipe s'agrandit. Maud et Flo s'encordent avec Christophe rencontré sur place et partent dans la classique "Freedom", tandis qu'on grimpe en parallèle dans une voie plus récente, "Kung Fulanda".

Les deux équipes ne tardent pas à se rejoindre dans la belle longueur 7a et c'est finalement une chouette combinaison de ces deux voies que nous grimperons. Pas une longueur à jeter, tout est beau !

Les jours suivants s'annoncent plus humides que la normale. Il est temps pour certaines de mettre le cap à l'Ouest alors que d'autres se remettent au guidon et continuent leur petit bout de chemin vers l'Est.

Nous profitons de cette rencontre improvisée pour alléger considérablement nos sacoches en confiant tout notre matériel d'escalade aux filles pour un retour en France plutôt que de l'abandonner dans quelques semaines en Géorgie, Arménie, Iran ou ailleurs comme initialement imaginé.

De toute façon, l'été semble avoir pris ses quartiers et nous, il nous faut bien avancer un peu !

... et peut-être qu'en laissant corde, baudrier et dégaines, on aura la place pour garder les p'tits dessins et la palette d'aquarelle !

Quitter ce bel endroit où nous venons de passer une petite dizaine de jours nous fait tout drôle. Poursuivre le voyage sans notre matériel de grimpe nous rend presque déjà nostalgiques. S'il fallait voir le bon côté des choses, on dirait qu'on se sentira probablement encore plus libres en étant plus légers pour passer les cols haut perchés. Evidemment qu'il nous tarde de nous remettre à grimper, dans quelques mois peut-être, à l'autre bout du continent... à condition d'y arriver !

Inchallah !


16
juin
16
juin
Publié le 25 juin 2022

Bien des gens nous renvoient nos saluts lorsque nous pédalons. Souvent leur enthousiasme se manifeste par un coup de klaxon, venu de derrière et bien appuyé.  Frayeur … Mais ça redonne un peu d'énergie quand le faux plat s'éternise. L'ambiance, les codes changent un peu au gré des villages traversés. Qu’il est bon ce rare « merhaba » tout sourire venu de cette  femme au détour d'une ruelle. Le commun étant ces regards masculins qui se braquent sur nous dès l'angle de la place tourné. Que dire des entrées dans les cafés ! Il ne m'a pourtant pas semblé voir un écriteau interdit aux femmes 🤔… Le thé souvent offert compense-t-il ce sentiment trouble ?


Pas vraiment … Nous nous régalons d'un kilo de cerises sur un banc qui jouxte le café.  Les thés s'enchaînent. De l'autre côté de la rue une enseigne de vétérinaire me fait sourire… Les cerises fraîchement ramassées sont divines. Soudain, une scène capte mon attention. Ça va très vite. À l'arrière d'un camion d'éboueurs, deux hommes empoignent par la peau du dos un de ces gros vieux chiens crème. Ses yeux disent tout… pas même un jappement, et il est dans la benne. Un troisième homme vient prêter main forte. 


Dans l'indifférence totale, le camion poursuit … Nous sommes sans voix … Ces paroles de Renaud me viennent aussitôt en tête  :


https://m.youtube.com/watch?v=v28HCO71AxQ


Bruno

22
juin
22
juin
Publié le 28 juin 2022
22
juin

Quelques jours pluvieux nous mènent jusqu'aux portes de la Cappadoce. L'avantage de pédaler sous la pluie, c'est qu'on ne meurt pas de chaud, surtout quand les poids lourds nous arrosent à chaque flaque !

L'inconvénient, c'est que sous ma capuche enfoncée jusqu'au bout du nez, je n'y vois pas grand chose et que je rate donc la sortie d'autoroute.

Heureusement, après quelques kilomètres à pédaler seule sur la bande d'arrêt d'urgence, Bruno qui a fini par s'inquiéter (si, si, ça peut arriver !) de ne pas me voir arriver parvient à me rattraper :

"Demi-tour ! La Cappadoce, c'est par là bas !"

Les pauses dans les cafés pour se faire un peu sécher autour d'un thé chaud sont toujours les bienvenues. Station-services en état ou non, nous offre aussi un toit le temps de laisser passer le déluge.

Peu dans le paradis géologique qu'est la Cappadoce. Canyons, cheminées de fée, falaises de sable, habitats troglodytes... je ne vais pas vous faire un dessin (quoique, je pourrais essayer !), les photos parleront d'elles mêmes. C'est magnifique !

Dans ce parc national, point de réglementation, pas d'interdiction, pas d'accès payant ou je ne sais quoi... C'est bien appréciable de pouvoir se balader librement, de faire du vélo au milieu de ces tours de sable et dans ces petits canyons, de bivouaquer dans un cadre de rêve et même de grimper où bon nous semble, qui plus est, sans corde !

L'envers du décor, c'est que si tout le monde peut faire ce qu'il veut, c'est vite la foire à la saucisse. L'activité principale des beaufs, venus de tout horizon en vacances, semblent être la balade en quad. Imaginez-vous des centaines de quads qui se suivent à la queuleuleu au milieu de ce cadre idyllique ! Le moniteur devant et tous les pinpins derrière : la cata !

Évidemment c'est bruyant, c'est moche, ça pue, ça défonce les chemins et puis c'est dangereux pour les cyclistes qu'ils manquent d'applatir de justesse sur leurs passages !

Heureusement comme la tendance est de tous faire la même chose au même moment, quand l'heure de l'excursion en quad est passée, tout redevient désert, calme et magique !

On est seul au monde ! Comme quoi les p'tits moutons, ça a du bon...


On ne pourrait vous parler de Cappadoce sans vous parler de cette explosion de montgolfières qui a lieu tous les matins au lever du jour. Un ballet de couleurs dans le jour naissant.

Des dizaines de ballons qui flottent dans un ciel éclairé par les tout premiers rayons du soleil. Ça monte, ça descend, ça se gonfle et se dégonfle.

Tout se déroule si vite que cela donne un véritable caractère éphémère au spectacle.

On se sent presque chanceux d'avoir ouvert l'œil à 4h30, éveillés par le ronflement des moteurs de ventilateurs et d'avoir pu apercevoir les toutes premières flammes emprisonnées dans ces immenses bouts de tissu. Telles des lucioles, les premières lanternes se gonflent d'air chaud et s'élèvent lentement : le défilé peut commencer.

La nuée se déplace, se densifie, se disperse. Très vite, il y en a dans tous les coins du ciel et déjà trop pour pouvoir les dénombrer alors on profite de ce spectacle incroyable qui s'offre à nous dans ces paysages splendides.

A 6h30 du matin, tout est déjà replié et rangé. C'est à s'en frotter les yeux et à se demander si finalement on n'a pas simplement rêvé !

Et si le monde appartenait à ceux qui se lèvent tôt ?...

Alors oui, les places dans les paniers d'osier semblent demander un petit budget, le voyage dans les airs de courte durée, un diplôme et une coupe de champagne sont délivrés aux touristes volants à l'arrivée (!!). Ils repartent ensuite dans leur hôtel, dans le même minibus pour prendre probablement le même petit déjeuner !

Bref, ce commerce de la montgolfière florissant, c'est très certainement la "beauf attitude" qui a encore une fois frappé mais quand même...

Cap ou pas cap(padoce) de voyager en Turquie sans venir profiter de cet incroyable spectacle ?

28
juin
28
juin
Publié le 28 juin 2022
28
juin
28
juin

Pour fêter notre départ de Turquie, je n'ai rien trouvé de mieux que de me payer une galipette à vélo.Aussi, c'est avec un coude abîmé, une hanche éraflée et une ou deux côtes félées ou cassées que nous passons la frontière Géorgienne.

Pour la première et sûrement seule fois de notre vie, nous doublons une centaine de poids lourds en une quinzaine de minutes. Nous filons à toute allure et eux sont à l'arrêt forcé pour des heures voir des jours. La queue pour passer la frontière est interminable. On révise notre géographie avec les plaques d'immatriculation et on s'amuse du comportement des uns et des autres conducteurs. Certains discutent entre eux, d'autres en profitent pour faire l'entretien du moteur et d'autres encore le ménage de la cabine. Les chauffeurs turcs bien à l'ombre du camion lancent à notre passage de grands "merhaba", les conducteurs russes, affalés sur des chaises de camping, torse nu, en mode bronzette en plein soleil, restent impassibles. Vu la durée de l'attente, on espère pour eux que la douane géorgienne laisse entrer les écrevisses dans le pays !

En tout cas, ils laissent passer les cyclistes et même les cyclistes un peu handicapés et on a droit à notre deuxième tampon sur les pages de nos passeports.

Je n'ai pas souvenir d'avoir déjà vu un changement aussi radical au passage d'une frontière. Routes goudronnées et parsemées d'énormes nids de poule, pistes en terre boueuses, maisons basiques en pierre, on ne nous offre plus de thé mais du café et de la vodka. L'attitude des hommes à mon égard, change aussi un peu. Quelques croix et de discrets clochers remplacent les minarets. Tracteurs et camions d'un autre âge, wagons de trains désaffectée, préfabriqués métalliques rouillés jusqu'aux os ponctuent le paysage, maisons à l'abandon, grandes forêts et vastes étendues fleuries, visages plus fermés aussi... Tout a un peu cet air sinistré ou de désolé...

On vient de faire un bond en Russie !

Les formules russes "Priviet" et "Spasiba" sont d'ailleurs de mise avant qu'on ne les remplace quelques kilomètres plus loin par "Barev" et "Abris" tant la proportion d'Arméniens est grande dans la région.

Un coude tout gonflé, un bras douloureux et des côtelettes qui font mal, je ne pouvais espérer mieux comme programme de convalescence que cette toute première semaine en Géorgie !

L'état des routes principales n'est déjà pas irréprochable mais lorsque le GPS vous joue des tours et vous conduit sur des pistes en terre ou des sentiers et qu'à cela s'ajoute quelques jours de pluie d'affilés, c'est juste cadeau pour les bobos ! J'ai l'impression de passer des heures dans un shecker !

Ici on ne parle pas d'asphalte abîmé, on parle de flaque de goudron au milieu d'un champs de nids de poule, et d'îlots terreux au milieu de lacs d'eau boueuse. Et encore je ne vous parle pas de nos labourages de champs, des garde-boue qui bourrent, des roues bloquées, des herbes hautes et des traversées de rivières et de canaux ! Que du bonheur !

On a beau dégonfler les pneus, chaque secousse est pour moi une véritable petite torture.

Après quelques jours à s'entêter, la météo nous oblige à temporiser et c'est finalement pas si mal car cela me permet d'enfin, pouvoir me reposer un peu.Un jour et demi à écouter tomber la pluie sous la tente me fait le plus grand bien ! Sans compter que je viens soudain d'avoir la lumineuse présence d'esprit que nous avons dans nos sacoches une pharmacie ! Cinq jours après m'être gamellée... mieux vaut tard que jamais !

Cette pause forcée nous permet d'étudier aussi davantage la carte. Il faut se rendre à l'évidence : il y a erreur sur l'itinéraire et craquage en règle de l'appli GPS. Une partie du profil présente une belle aiguille avec des soit-disant pentes à 35%. On croirait la Dibona !

Un dafalgan ou deux et on saute sur la première éclaircie venue pour s'échapper de ce traquenard ! Le plan B sera LA plus belle journée de vélo depuis le début du voyage. 70km de pistes d'états variables, du dénivelé, un beau col dans des conditions hivernales. La descente sur l'autre versant sera si longue qu'il nous faudra même la couper en deux ! Tout vient à point à qui sait attendre !

De l'autre côté de la montagne, on enrichit encore notre lexique : "Camadjoba" et "Madloba". Ici on parle géorgien. Asphalte confortable et bande d'arrêt d'urgence d'autoroute nous conduisent jusqu'à Gori. Ce sont les vacances ou presque...

"Méfiat", quand même aux voitures et aux camions qui nous frôlent de près et aux chiens qui surgissent, de nulle part, babines retroussées !

5
juil
5
juil
Publié le 9 juillet 2022

La frontière Géorgienne vient d'être franchie, à nous la Géorgie !

Tous deux, nous fonctionnons aux gré des envies, tendance dernière minute …Comme diraient d'autres, on se laisse aller dans le flot (flow), le courant quoi. Les infos pour aller plus à l'Est, provenant d'un big groupe Whatsapp entre autre, sont assez confuses.

Pas d'urgence alors , plutôt que rejoindre directement Tbilisi, la capitale, on envisage d'aller jeter un œil à la ville qui a vu naître Staline. Pour nous aider à naviguer, point de cartes papier mais la plébiscitée application Komoot, reine des cyclos du moment ! Un p'tit tour par les montagnes est bien alléchant.

Cette App te détaille tout : le nombre de kilomètres sur goudron, celui sur asphalte ( ?! ), sur route nationale voire autoroute et même chemin. Si ça va monter, descendre, tourner beaucoup ou pas trop ! Bref on sait tout avant d’enfourcher nos montures… C'est parti après un bon décrassage à « la bassine » du coin, comprenez piscine dont seul l'accès aux douches sera possible.

Les petits hameaux se succèdent, les 1400 m d'altitude sont tout juste assez rafraîchissants et on finit par installer le campement dans de la belle herbe grasse à l’abri du vent d'une croupe. Curieusement, dès le lendemain matin, une piste bien cassante s'offre à nous en guise de petit déj ! Un tenancier de Market nous offre le café. Deux belles épingles goudronnée s’étirent au dessus du village et nous font gagner bien 300 m jusqu'à nouvelle interruption de ce doux revêtement.

L'imminence d'un lac proche nous stimule et on avance cahin/ chaos sans trop y prêter attention. La vue est belle et on parvient à un village de pêcheurs bien typique à l'ambiance plutôt morne pour cause d'enterrement.

Casse-croûte au coin d'une épicerie et c'est reparti tout en surveillant le ciel qui s'obscurcit plutôt rapidement… S'ensuit une montée sablonneuse, technique. Lara-leuse pour l'occasion- me rejoint en poussant d'une main tant mal que bien son tank. Je mets ça sur le compte du sable ; il n'en est rien, ce sont ces foutues côtes froissées et ce coude choqué qui la font souffrir.

La proximité d'un poste de police nous oblige à prendre un peu le large mais le ciel s'ennoircit soudainement. Les 5 mètres en contrebas du chemin feront l'affaire. La tente est jetée in extremis avant le déluge … sieste obligatoire malgré ce début d'après midi.

Avant la fin du jour, l'accalmie m'invite à aller reconnaître ce qui se profile derrière l'épaule. La vue d'un grand plateau bordé par un cours d’eau avec ces tâches de couleur laissées par les tentes des bergers nomades est saisissante de beauté. Quelle attirance !

Mais le lendemain, alors que la situation nous invite à une journée de repos dans nos 1,79 m2, ça gamberge… étrange cette belle route jaune qui déroule son trait sur l'écran du téléphone. Je pousse un peu plus loin la reconnaissance, mais surtout embarque ce fameux téléphone. Tiens, là ça quitte la piste principale et ça chemine à flancs de relief. Toujours des traces de véhicules, oui, mais plutôt piétinées par les majoritaires représentants des lieux, les brebis…

Une attentive étude de la carte aurait du me faire passer droit dans ce pré à 25° ?!... De retour à la tente, on dissèque la suite de ce tracé alléchant… « tient, alors que tu étais en double traits pleins, ça devient des pointillés ensuite ! Et là, on passe même à un unique filigrane… qu'est ce que dit la pente ? Ah, oh !!! 35% ».

Le lendemain, un ô combien subtil sens du terrain bordé d'un soupçon de sagesse nous invite à rebrousser chemin. Belle descente dans les épingles, après ce gimkhana improvisé entre les baignoires de géant.

« Hé, si on coupait par là ?!! »

...


10
juil
10
juil
Publié le 10 juillet 2022

On a tellement rit...

Avec ton air naïf de toujours tout découvrir à la vie.

Avec tes grands yeux de biche qui savaient si bien charmer le monde et dont tu abusais délibérément.

Avec cette manière que tu avais de renifler la nourriture avant d'y goûter pour décider souvent de ne même pas y toucher !

Avec tes histoires de cœur rocambolesques où on ne comprenait jamais rien. Tous ces nœuds à dénouer et ce grand besoin de tendresse...

Avec cette capacité à te mettre une pression monstre et à te stresser pour un petit rien.

Avec ton petit côté hypocondriaque qui nous faisait trop marrer.

Avec tes goûts étonnants pour des trucs vraiment trop chelou !

La dernière fois, on t'avait envoyé une photo d'un dauphin mort échoué sur une plage en Sicile. Évidemment, tu avais adoré !

Avec cette manière de te brosser les dents en t'en foutant partout...

Avec cette détermination et ce sérieux qui pouvaient aussi être tiens. Tu savais te donner les moyens, t'entraîner dur pour poursuivre tes rêves.

Avec ces cris poussés quand tu te mettais au taquet. A l'assurage, on tremblait de trouille pour finalement entendre au beau milieu du combat : "Ah non, en fait ça va !"

Nos rires reprenaient alors de plus belle.

Avec ce tour de biceps qu'on ne pourra jamais égaler...

Avec cette capacité folle à parfois ne rien savoir décider.

Avec cet art incroyable de tout mettre sur le dos des autres.

"Mais vous m'aviez pas dit qu'on allait faire de l'escalade et qu'il fallait prendre des chaussons !" "Pourquoi vous m'aviez pas dit de prendre davantage de vêtements ?"

Tu savais nous agacer et c'est bien comme ça qu'on t'aimait !

Avec cette capacité à garder ton sérieux tout en racontant les pires conneries alors que nous, on riait comme deux tordues.

Avec cet air malicieux communicatif, c'était toujours la surenchère de la bêtise.

Quand on piquait dans les magasins, tu choisissais toujours les trucs les plus moches puisque c'était les moins chers. "Mais Marine, puisqu'on te dit que c'est gratuit !"

On a grimpé déguisées en drapeau américain. Au relais, on a mangé des m&m's géants, on a dansé, rigolé, écouté de la musique, fait des photos et des vidéos et puis on a terminé comme trois nouilles avec une frontale pour trois. On a appris à tricoter au pied d'une falaise et on a essayé de faire du yoga dans le désert. Pour nous deux, c'était plutôt laborieux !

Avec tes caprices auxquels on était bien obligé de céder, tu nous as même fait faire du grand huit à Las Vegas !

C'tte flèche que tu étais !

Ces derniers temps, tu avais su trouver ton équilibre, tu vivais et tu travaillais dans ce coin que tu aimais tant. Trop calée. J'étais heureuse de te savoir apaisée. J'aurai adoré que tu me fasses visiter tes montagnes et tous ces sommets.

Je n'aurai jamais cette chance de t'avoir comme guide, je ne fabriquerai jamais la vaiselle de ta future maison comme tu me l'avais demandé, on n'aura jamais la chance de connaître la mini Margaux et pourtant on aurait été deux super tatas !

On aurait pu être collègue à l'éducation nationale mais on a toutes les deux préféré fuir le chemin de l'école pour suivre nos rêves pour finalement devenir collègue à la montagne.

Mais tu étais surtout une amie et je voudrais encore une fois, décrocher et entendre ce "Coucou Lara !" si bienveillant à l'autre bout du fil et papoter des heures !

Je voudrais encore voir ton visage radieux et tes grands yeux dévorant le monde.

Je voudrais encore vous serrer fort dans mes bras toutes les deux ensemble. Simplement.

On aurait tellement pu rire encore...

Marine, on aurait adoré t'embarquer dans tellement plus d'aventures passées et futures. La vie, le travail, l'amour, le temps, la montagne et cette foutue journée là en ont décidé autrement...

On rira encore en pensant à toi, à nous et à nos folles aventures mais pour le moment, on pleure.

Tu vas tellement nous manquer.

Marine, tu es notre "cas soc' préféré" pour toujours. 🧡

10
juil
10
juil
Publié le 11 juillet 2022

Rouler à vélo vers l'Est, c'est un peu comme jouer à une partie géante de milles bornes. Disons même dix milles bornes pour être plus juste.

Non seulement tu dois pédaler pour avancer mais tu dois aussi éviter les crevaisons et les chiens enragés. Tu dois trouver des endroits chouettes pour bivouaquer chaque soir et tu dois aussi déjouer les problèmes mécaniques et les chauffards bourrés à la vodka. Quand tu pioches la carte "Patatra", tu dois aussi patienter ou être ralenti pour cause de bobos, de mal aux fesses ou aux mollets. Même combat pour la carte "météo" : pluie, reste à l'abri.

Avec la carte "diplomatie", il te faudra aussi jongler avec les visas, les frontières fermées pour raison politique ou celles fermées pour cause de covid, avec les états d'urgence et les couvre-feu en vigueur. Enfin avec la carte "survie", il faudra aussi jouer fin et composer avec les hautes températures estivales, les déserts, la neige et les cols à 4000 mètres d'altitude...

Un bon programme.

A Tbilissi, on tombe sur la case, "pose toi un peu et réfléchis". C'est la première fois depuis le début de la partie. Ça tombe bien, on pioche également le joker "hôtel avec wifi".

L'Azerbaïdjan, toujours fermé pour cause de covid (?), n'ouvrira pas ses portes avant le 1er septembre, la rumeur s'est officialisée. L'entrée par voie aérienne dans le pays semble pour autant fonctionner mais pas par voie terrestre...

L'accès à la mer Caspienne est donc impossible aux voyageurs souhaitant rejoindre l'Asie centrale et tous les pays en "stan" depuis Baku en bateau.

Une autre option serait de traverser l'Arménie, de rejoindre l'Iran et puis de remonter par le Turkménistan. Là encore, ce dernier a ses frontières fermées pour une durée indéfinie et ce visa semblait de toute façon déjà quasi impossible à avoir obtenir depuis des années.

Une dernière option terrestre serait de traverser le Caucase, d'entrer en Russie pour rejoindre le Kazakhstan. Pas simple à l'heure actuelle.

Pas d'autre alternative que piocher. On tombe sur la carte "voie aérienne" pour faire un bond au dessus de la Caspienne... depuis Tbilissi, depuis Erevan ou depuis Téhéran, c'est au choix !

Nous n'avons pas de visa iranien, l'été est déjà bien trop installé pour espérer y pédaler au mois de juillet et très peu d'avions décollent depuis Téhéran.

La carte "curiosité" nous pousse donc à rouler jusqu'à Erevan d'où nous essaierons de nous envoler pour Aktau, sur la côte de la mer Caspienne au Kazakhstan.

Reste à passer par la case "déchetterie" pour trouver deux grands cartons pour emballer nos vélos puis rejoindre la case "aéroport".


Entre temps les infos défilent sur ce gigantesque groupe whatsapp de cyclistes roulant vers l'Est. Certains y demandent des infos sur des hôtels en Turquie quand d'autres galèrent à Islamabad, quand d'autres encore essaient désespérément de réparer leur réchaud ou leur roue à Bichkek et que d'autres déjà bien plus à l'Est veulent entrer au Myanmar.

Au beau milieu de tous ces échanges, on peut maintenant lire que la route du Pamir serait actuellement fermée, la frontière entre le Tadjikistan et le Kirghizistan également, tout comme la frontière entre le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. Ça commence à faire mal en une seule partie... et ça n'arrange pas trop nos affaires.

Mais comme on dit au jeu des dix milles bornes : Qui roulera, verra !

En plus, aujourd'hui, c'est bonus. On a passé les 2000 km, on peut passer deux fois au ravito et avoir double ration de cerises ! Youpi !


13
juil
13
juil
Publié le 13 juillet 2022

Vaste étendue bleue à l'horizon, le Lac Sevan se dévoile à nous, au terme d'une sacrée journée.

60 km et 1600 mètres de dénivelé dans un flux quasi continu de voitures et de camions. C'est dimanche et aujourd'hui tout le monde est de sortie. Quelle idée avons-nous eu de faire cette étape ce jour-là !

Ce serait un peu comme aller faire ses courses à vélo au Pas de la Case, un week-end ! Le profil du terrain, la chaleur et la conduite arménienne nous malmènent un peu.

En Arménie, tout comme en Géorgie, les deux roues sont des espèces rares et par conséquent menacées. Manque d'habitude ou simple négligence, c'est bien simple, on semble parfois être invisible !

On prend peu à peu de l'altitude en remontant une à une les épingles et en se frayant tant bien que mal un chemin au milieu de ce trafic bien dense. Imaginez deux pauvres bagnoles égarées au milieu du peloton cycliste du tour de France. C'est à peu près à ça que l'on ressemble !

"Refus d'obstacle" à l'entrée du tunnel, long de quelques kilomètres, qui évite la partie haute du col ("passer le tunnel du Mont Blanc à vélo un dimanche soir, c'est niet !") nous permet de retrouver une route déserte, de profiter du calme dans les derniers lacets, de s'offrir un bonus de 300 mètres de dénivelé supplémentaires et un beau bivouac frais au sommet.

Le lendemain, nous voici en route pour le Lac Sevan, la perle de l'Arménie ! 78km de long, 56km de large, perché à 1900 mètres, deuxième plus grand lac d'altitude après le lac Titicaca parait-il... Et si on en faisait le tour ?

A la force des mollets, sur la petite reine, voyons, quelles surprises la route du tour a, à nous offrir...

Km 0 : Tente pliée, sacoches bien ficelées. Top départ !

Km 2 : Grande descente pour rejoindre le lac et petite pause dans ce village perché à 2100 mètres d'altitude pour une partie de foot aussi endiablée qu'improvisée. Chacun y va de son coup de pied !

Km 8 : Passage au stand pour l'achat du p'tit dej' : le kilo de cerises quotidien accompagné de beignets à la patate. L'épicière déclare à notre grand étonnement et en français :

"Bonjour, je m'appelle Ovasanna."

Avant le départ, elle viendra m'offrir une rose qui trônera sur mon guidon durant quelques kilomètres.

Km 10 : A peine avons-nous rejoint la berge du lac que je manque voir disparaître mon Bruno sous les roues de la première voiture venue. Mais pourquoi passer si près de nous alors qu'il n'y a personne sur la voie opposée. On vote à l'unanimité l'adoption de l'écarteur biodégradable. Entendez par là, une branche avec une touffe de feuille au bout, accrochée à notre porte bagage. Cela marchera un certain temps ou un temps certain.

Km 12 : Magnifiques hôtels soviétiques sur notre droite. Architecture coupée à la faucille et toit martelé au marteau. C'est à en faire frémir Steiner avec tous ces angles droits. La vue du balcon doit être superbe. On réserve pour ce soir ?

Km 19 : "Oh le train !" Coups de klaxon et grands signes à la fenêtre de la locomotive adressés aux coureurs du tour. Mythique ! Km 23 : "Wouah, t'as vu le bâtiment là-bas ?" Demi-tour !

En passant sous une palissade en béton éventrée, on entre dans l'ancien complexe hôtelier. Cela fait quelques temps que le jardinier ne fait plus le job. Allées envahies de buissons, réception en ruine, bungalows abandonnés, tout est charmant. Mais c'est pour la salle de restaurant panoramique que j'ai le coup de foudre. Chapiteau métallique et verrière arrondie avec vue sur le lac. Trop la classe !

Une sieste sur la terrasse ensoleillée et c'est reparti !

Km 31 : Pause ravitaillement dans l'une de ces épiceries de bord de route où il n'y a quasiment rien à acheter si ce n'est des chips et de la vodka. On opte pour le premier ingrédient, alors que l'on mange assis par terre, à l'ombre du préfabriqué métallique, la vendeuse nous invite à entrer pour prendre un café. Ce dernier sera aussitôt accompagné de bonbons et d'une glace. Autour de ce goûter, nous discutons de la pluie et du beau temps, c'est à dire du nombre de kilomètres jusqu'au prochain vrai supermarché et de la glace qui se forme ou pas sur le lac en hiver. En quelques minutes, la petite dame devient pour nous la Maman de Sergueï. Sergueï, 18 ans, mort à la guerre contre l'Azerbaïdjan tout proche, en 2021. Il y a quelques mois à peine, cette maman perdait son grand garçon pour des querelles absurdes entre deux nations voisines. Tristesse, colère, incompréhension... Pourquoi encore ces horreurs aujourd'hui ?

Nous l'embrassons, la remercions, lui souhaitons plein de courage et reprenons la route. C'est tout chamboulés que nous quittons ce village nommé Drakhtik.

"Drakhtik" veut dire "Paradis".

Km 41 : Shorzha. Une épicerie un peu plus digne de ce nom qui va nous permettre de faire notre premier vrai repas de la journée. Ce soir : pain, fromage, saucisse, tomates. Épicières aimables comme des portes de prisons russes. On ne s'attarde pas, on continue !

Km 45 : Au niveau de ce cap, la route quitte la côte. Et si on coupait par ce chemin en terre. 5 km de tôle ondulée plus loin, nieto, ça ne passe pas ! Peu importe, le spot est royal pour dormir. On pause le bivouac et on profite encore de quelques heures de soleil.

Trop calés !

Km 61 : Alors que l'on mange trois graines en guise de p'tit déj' assis sur le parapet d'un pont, un 4x4 arrivant en sens inverse se gare à notre hauteur. On comprend plus ou moins que le conducteur réclame une photo. Pas bien réveillée, je lui montre l'appareil mais il nous fait comprendre qu'il souhaite être lui aussi sur la photo. Pendant que Bruno installe l'appareil en mode déclencheur automatique sur le toit de la voiture, le gars se rapproche louchement de moi.

Le temps que les dix interminables secondes du retardateur ne s'égrainent, il m'agrippe par la hanche et me plaque contre lui. Je déteste. Clic, clac ! La photo est dans la boîte, il va me lâcher maintenant. C'était mal connaître l'animal.

Le temps que Bruno se retourne pour aller récupérer l'appareil et voilà sa main sur mes fesses. Je lui retourne la mienne dans la figure mais comme il est grand et surtout gros, elle ne lui giflera que l'épaule.

Peu importe, l'intention y était. Il me regarde surpris avec son air de gros malin puis tend sa grosse main à Bruno. Pas gêné le type ! On lui fait signe de remettre ses fesses dans sa voiture et de dégager vite alors qu'il insiste encore pour une poignée de main amicale. Le 4x4 finit par repartir, on se regarde, scotchés.

La photo finit dans la poubelle dans la même minute.

Km 72 : Retour à l'humanité. On fait un stop dans une énième micro-épicerie pour boire un café et là encore, on nous offre une glace pour l'accompagner. Bientôt, cinq papis débarquent, les bras chargés de sac remplis de commissions. En quelques minutes, certains organisent table et chaises pendant que d'autres coupent légumes, fromage et pains. Les derniers sortent les verres et les bouteilles. Efficaces.

Très vite, les voilà à table pour un repas entre vieux copains d'enfance. Évidemment, on nous invite à trinquer : vin, vodka ou bière, on a le choix ! On parvient à décliner l'offre liquide et on opte pour du solide, un bout de pain et du fromage avant de se remettre en selle. Une fois encore, on ne nous laissera rien payer.

Km 78 : A l'ombre du tracteur, au milieu du champ, des ouvriers agricoles nous interpellent. Ils nous invitent par de grands gestes à boire un coup avec eux. On fait mine de ne pas tout comprendre, on les salue et on évite avec brio ce "traquenard vodka" à 11h du mat' !

Km 88 : "Oh un copain !"C'est toujours chouette de croiser un voyageur à vélo. Les questions sont souvent les mêmes... D'où viens-tu ? Depuis combien de temps es-tu parti ? Où vas-tu après ?

Ce jeune belge avait commencé son voyage avant la pandémie et a du l'interrompre au bout de 6 mois. Son vélo l'a sagement attendu pendant presque deux ans en Turquie, avant que ne sonne l'heure des retrouvailles en avril dernier. Comme il fait le tour du lac en sens inverse, nous nous donnons rendez-vous à Erevan dans quelques jours. Qui sait !?

Km 90 : On choisit de prendre ce raccourci en terre pour éviter la grande ville de Vardenis... C'est beau, c'est calme mais il n'y a rien à manger !

Km 103 : On rejoint la grande route, et faisons une halte devant une station essence. Les stations essence sont assez semblables aux nôtres, à un détail près. Pas de pompes mais quelques bouteilles en plastique remplies de carburant sont posées au sol. En même temps, ici, on roule au gaz.

"Barev barev, restaurant ?" : 1km par là.Ce n'est pas la bonne direction mais la faim nous pousse en contre-sens !

Km 104 : Un grand bâtiment avec de grandes baies vitrées noires et quelque chose écrit en haut.

"Restaurant ??"

"Da, da" "OK, cool !"

Un petit espace sur le côté du bâtiment sert de bar, on nous conduit par un couloir dans une petite pièce à l'arrière. Des toilettes ? Non.

Dans ce cagibi, il y a la place pour une seule table où le couvert est installé pour quatre personnes. On se regarde un peu interloqué. Le patron ramène bientôt avec lui, une nana en mini-jupe, couverte de maquillage et avec de grandes boucles d'oreilles. On est tombé dans une discothèque ou quoi ?! Cette dernière nous montre sur son téléphone des photos de frites et de salade trouvés sur le net.

Affamés comme nous sommes, on salive déjà ! On a cependant la présence d'esprit de demander le prix. 7000 dram... 7000 ??!?On mange habituellement pour 1000 chacun. Décidément, ici, c'est vraiment louche...

On renfourche nos vélos, le ventre toujours aussi vide et sans avoir vraiment compris où on venait de mettre les pieds !

Km 117 : Une voiture arrivant en sens inverse nous fait des appels de phare et s'arrête à notre hauteur. Une main se tend à la fenêtre avec des biscuits. "Abris, Abris !" Ils sont tout mous mais c'est bien chouette quand même !

Km 120 : Décidément sur cette grande route, les voitures jouent avec nous comme avec des boules de flipper. Je suggère de rallonger l'écarteur mais ce serait exagéré de trimballer un rondin sur le porte-bagage. On opte pour le maillot jaune. Ce sera peut-être le seul tour où il y en aura deux leaders sur la même étape. De toute manière, l'important n'est pas de gagner mais de participer, non ?

Km 132 : Une pseudo épicerie de plus, c'est à dire une pièce quasi vide avec 30 bouteilles de marque diffrentes de vodka, 9 de soda, 6 de biscuits et 3 de chips. Ce coup-ci, c'est grand luxe, il y a aussi du pain. On en dévore un gros sur place. On nous offre deux bouteilles de limonade. C'est frais, c'est bon. C'est donc ça le "Sevan Up" ?

Quand on demande à payer le pain, là encore, c'est cadeau !

Km 138 : Une belle route bordée de pins qui longe la côte, on se croirait dans les Landes.

Km 139 : La plage, des jeunes en maillots de bain et une vielle voiture jaune, on se croirait dans un film des années 60.

Km 141 : Fin d'étape à Martouni, 96km dans les pattes aujourd'hui.

Km 158 : Le paysage est magnifique. Falaises de basalte, grandes étendues vertes, lac couleur menthe à l'eau et grand vent qui souffle.

Et si on se posait un peu sur la plage par là ?

Pour une fois, qu'on veut se la couler douce à la plage, c'est un troupeau de vaches qui débarque ! On fuit illico !

Km 162 : Des préfabriqués métalliques et des marchands de poissons séchés jalonnent la route et nous interpellent. Du poisson au p'tit dej', ça te branche ?!? Hi !

Km 180 : Pause chez un marchand de caillou.

Des énormes blocs, une très grosse machine qui les coupe en tranche avec un système de scies et d'eau qui asperge les fissures et puis un pauvre homme qui sculpte, plié en deux, le dos cassé, en plein soleil, des pierres... tombales.

Km 185 : Des champs de patates en fleurs, des gens qui font les foins et des vielles carcasses de voitures plantées à la verticale qui servent de barrières entre les parcelles.

Km 190 : Deux motards en vadrouille qui ont emmené leurs chiens sur leurs porte-bagages nous saluent.

Km 195 : Un groupe de cyclistes déguisés en coureurs du tour, avec vélos à assistance électrique et avec une voiture suiveuse font mine de ne pas nous voir. Ben ouais... On ne joue pas dans la même catégorie... Nous, on pédale en tong !

Km 212 : Zone habitée en vue : demi-tour pour retrouver un coin sauvage. Un Kebab, un podcast very good trip qui nous transporte à Woodstock et au lit.

Km 230 : La route est bien trop étroite et bien trop fréquentée pour ne pas rouler de temps à autre dans le bas-côté. Hâte de fuir le trafic !

Km 242 : Sevan, retour à la civilisation !La grande ville du coin, cerises, abricots, croissants au chocolat et café !

Papotage avec deux touristes suisses qui reviendront quelques minutes plus tard nous offrir un "sujukh".

Sucrerie Géorgienne et Arménienne : noix enrobées de sirop de raisin effilées sur une ficelle. Merci !

Un autre homme nous offre aussi un espèce de thé chaud aux fruits rouges. "Abris" !

Cette fois, la boucle est bouclée. Il ne reste plus qu'à se laisser filer, vent dans le dos sur l'autoroute en direction de Yerevan !

Bref, c'était l'épopée de deux cyclistes sur la route du tour... du lac Sevan.

11
juil
11
juil
Publié le 15 juillet 2022

Un deuxième mois sur la route, c'est :


◇ 5 pays 🇮🇹 🇬🇷 🇹🇷 🇬🇪 🇦🇲

◇ 2058 km 🚲

◇ De belles rencontres encore 🙋🏽‍♀️

◇ Des invitations 🍽

◇ De chouettes découvertes toujours 🌍

◇ Deux défilés de montgolfières 🌈

◇ Une gamelle et quelques bobos ❌

◇ 1 bus 🚌

◇ 2 journées d'escalade 🧗‍♂️

◇ 25 jours de vélos ce mois-ci 🚵‍♂️

◇ 23 nuits en bivouacs et 7 nuits à l'intérieur 🏕 🏠

◇  4 jours de vélos sous la pluie 🌧

◇ Des petits dessins ✏

◇ 1 cuite 🍷

◇ 1 interview pour la télé 📺

◇ 1 bain en piscine 💧

◇ 12kg de cerises 🍒

15
juil
15
juil
Publié le 18 juillet 2022

...Et peut-être même un peu plus puisque quand on porte les vélos, ce n'est pas comptabilisé au compteur, si ?!

18
juil
18
juil
Publié le 18 juillet 2022

Voilà plus de deux mois que l'on parfait notre bronzage pour être au top pour nos futures vacances à la plage...

Y a des zèbres par là ?!


Mer Caspienne, nous voilà !


Ps: on a enfin compris à quoi sert le support Gopro sur le casque !


18
juil
18
juil

Il est 6h quand nous sortons de l'aéroport d'Aktau où nous avons atteri quelques heures plus tôt et à l'intérieur duquel nous venons de prolonger, tant bien que mal, notre nuit, à même le carrelage.

La journée ne fait que commencer et le mercure du thermomètre semble déjà atteindre des sommets. Bien que le soleil soit encore relativement bas, la luminosité a déjà cet aspect bien particulier : tout brûle les yeux.

Un bâtiment perdu au beau milieu de la pampa, une route qui y arrive, une autre qui en repart, rien d'autre à l'horizon.

Pour "uniques" bagages, deux sacs à dos et deux grands cartons plats dans lesquels, nous avons réussi, comme par enchantement, à faire entrer vélos et nombreuses sacoches quelques heures plus tôt.


Il aura fallu jouer fin pour parvenir à tout démonter, à tout empiler, à tout emboîter, à tout faire entrer et à tout ficeler à grands coups de scotch. Pourtant l'hôtesse de la compagnie aériennne avec laquelle nous voyageons n'a pas été du même avis. Deux kilos de trop sur l'un des deux cartons et c'est le caprice ! "Nieto de chez nieto !"

Il faut alors réouvrir, réorganiser, refermer et rescotcher la valise de papier géante. Dommage quand on sait que le second carton a lui, deux kilos de marge et que l'avion décolle dans moins de 30 minutes.

A l'instant présent, c'est le scénario inverse qui nous attend. Comment appelle-t-on une partie de "Tetris" à l'envers ? Un "chamboule-tout" ? Un puzzle ?

Nous remettons une à une, bout à bout, les pièces de ce grand jeu sous les regards quelque peu interrogatifs des autochtones.

Quelques heures plus tard, les vélos ont repris leurs allures habituelles : un guidon, un cadre, deux roues, une selle.  Chaque chose a retrouvé sa place dans une sacoche. On a plus que triplé de volume en quelques minutes à peine et nous sommes prêts à pédaler vers de nouveaux horizons !

Une bonne vingtaine de kilomètres, c'est la distance à parcourir pour rejoindre la ville la plus proche et c'est tout ce qu'il nous faut pour prendre la mesure de là où nous venons de mettre les pieds. Une micro traversée initiatique du désert en plein mois de juillet : le Kazakhstan en plein été, quelle bonne idée !

Vingt-trois kilomètres, vent dans le nez, quarante-cinq degrés passés, c'est juste assez pour avoir déjà trop chaud, pour avoir très soif et faire l'expérience de nos premiers mirages !

Quelques véhicules et quelques troupeaux de chameaux seront nos seules distractions sur le trajet. Sable et minuscules buissons d'épineux à perte de vue. Bienvenue dans le désert !

Les premiers immeubles finissent pourtant par apparaître au loin, complètement flous, complètement fous, semblant flotter tels des flammes au dessus de ce sol brûlant. Nos bouches sont tellement sèches que nous peinons à parler lorsqu'il s'agit de demander un peu d'eau à une voiture que l'on a arrêtée en chemin.

Après une course effrénée contre le vent, on finit par rattraper ces bâtiments qui reculent pourtant sans cesse. Plus une goutte d'eau dans nos gourdes, températures corporelles à point, nos peaux sont grillées comme celle d'un poulet et salées comme des harengs.

On se regarde et nos yeux disent tout : "ça promet !"

Des immeubles neufs sans cachet, alignés comme plantés en rang d'oignons. Cette entrée d'agglomération semble être sortie du sol si récemment.

Quelques kilomètres plus loin, le vieux style soviétique reprend le dessus.

Les voitures de toutes générations ne s'écartent guère à notre hauteur et nous obligent à parfois squatter un peu les trottoirs, les coups de klaxon sont une nouvelle fois monnaie courante.

La proximité de la mer Caspienne de l'autre côté de la ville tarde à se faire sentir, pas de fraîcheur notable ni d'air marin à déclarer...

Même un saut à la plage et un bain quelques heures plus tard, nous rafraichira à peine !

Les devantures des magasins ne laissent transparaître aucun indice, si ce n'est quelques enseignes composées d'un enchaînement de lettres, de mots en sylirique auxquels nous ne comprenons évidement rien.

C'est ainsi que, quand on pense entrer dans une banque, c'est dans un magasin de vêtements qu'on atteri ! Faute de pouvoir retirer nos premiers "tenges" à un distributeur, c'est avec deux verres d'eau offerts à la main qu'on finit. L'image est belle, c'est bien ça l'essentiel !

Avec cette chaleur étouffante, la solidarité est de mise, l'humain est tout simplement en mode survie.

Pas de pitié pour le moindre rayon de soleil, qu'il reste dehors ! Vitres teintées, portes en métal, rideaux hermétiques aux fenêtres, tout est bien colmaté.

Ces allures de commerces fermés, combinées au fait que les gens évitent naturellement de sortir aux heures les plus chaudes de la journée ou longent méthodiquement les murs ombragés donnent une impression de ville vide, désertée. Pourtant derrière chaque porte, il y a de la vie et de l'air climatisé, il suffit d'oser la pousser.

Chaque lieu habité est comme une oasis dans ce désert de sable.

Les yeux se brident et les visages sourient, les peaux se tendent et sont plus mates, les voiles et les robes fleuries apparaissent, les hommes sont parfois coiffés de casquettes en feutre.

La curiosité envers les cyclistes européens que nous sommes grandit considérablement.

Pas de doute, ce coup-ci nous avons véritablement changé de continent !

Ce matin là, nous venons de donner nos premiers tours de pédales en Asie Centrale.


A peine quelques heures, quelques kilomètres, quelques expériences et nous aurons compris que vouloir pédaler dans le désert au mois de juillet, ce n'est pas gagné !

On pourrait évaluer ainsi notre faible autonomie :

- entre deux zones ombragées : 20 minutes

- entre deux endroits climatisés : 2 heures

- entre deux douches : 12 heures

- entre deux siestes : 6 heures

- entre deux gorgées d'eau : 15 minutes

- entre deux gorgées d'eau fraîche : 3 heures

- entre deux cornets de glace : 4 heures

Aussi, si nous ne voulons pas mourir lyophilisés et réussir à rejoindre des contrées plus montagneuses avant la fin de l'été, il va nous falloir optimiser cette traversée estivale du Kazakhstan.

Le réseau ferroviaire offre cette opportunité à merveille mais encore faut-il en comprendre les horaires mais ça, c'est une autre histoire que nous vous raconterons plus tard !

18
juil
18
juil
Publié le 20 juillet 2022

Le Kazakhstan c'est géant : neuvième plus grand pays au monde.

Logiquement, l'heure n'est pas la même dans tout le pays. Après tout, on pourrait vivre au rythme du soleil et simplement adopter l'heure locale mais l'affaire se complique lorsque l'on veut prendre un train et surtout être à l'heure sur le quai !

+1h, -2h, +30 minutes, heure de la capitale Noursultan en référence, heure locale du point de départ ou heure locale du point d'arrivée ?

On n'a pas tout saisi.

Comprendre les horaires sur un billet de train n'est pas chose aisée... D'autant plus, qu'il faut non seulement comprendre l'heure du départ du train mais aussi l'horaire auquel il faut être sur le quai (jusqu'à 1h30 avant parfois !) pour charger les bagages et s'installer.

Détail de taille quand on a 2 velos et 12 bagages... bien entendu, ces informations doivent apparaître sur le billet ou sur les panneaux d'affichage mais là encore, pour nous, c'est du chinois !

Comprendre les tarifs est encore une autre histoire...

Un vrai casse-tête Kazaque !

Pourtant, ici, tout le monde semble s'y retrouver. On a donc imaginé les petits Kazaques s'exercer à de tels problèmes et ce, dès l'école maternelle.

Énoncé du problème :

Bruno et Lara, deux petits touristes accompagnés de leurs vélos traversent le Kazakhstan en train.

Ils embarquent tout d'abord à Aktau à 09h05, heure locale, le 14 juillet pour arriver à Beyneu après 9h de voyage et 464 km parcourus.

Ils voyagent en couchette 2ème classe sur ce trajet.

Ils repartent 24h et 30min plus tard pour rejoindre Aralsk et parcourent ainsi 852 km supplémentaires en 13h27.

Pour ce trajet pour lequel ils n'ont pas de billet, ils se partagent une couchette en 3ème classe en versant un bakchich au prodovnik, le chef de wagon.

Ils repartent ensuite d'Aralsk à 6h27, heure locale, soit 22h18 après y être arrivés pour rejoindre Turkistan en 14h36 de train. Ils disposent d'une couchette en 2ème classe chacun pour ce voyage de 742 km.

En arrivant, ils doivent enlever une heure à leur montre pour se mettre à l'heure locale.

Ils quittent ensuite Turkistan le lendemain à 15h59 pour rejoindre Chimkent en 3h52 de train dans une couchette 3ème classe. 171 km de plus au compteur.

Vous suivez ?!

Enfin, ils tentent de repartir de Chimkent à 5h53 le lendemain matin mais se font refouler et restent sur le quai comme deux couillons (avec les vélos, ça fait quatre !) avec leurs billets à la main...

(Billets non remboursables... mais n'en tenez pas compte pour vous simplifier un peu la tâche !)

La suite est une histoire de fou mais vous verrez ça à votre prochain cours d' "Education civique & savoir vivre". Le titre de la leçon sera "Entraide et solidarité Kazaque".

Sachant qu'Aktau se situe à l'extrême Ouest et que Tachkent se trouve à l'extrême Sud-Est du pays. (Quatre fuseaux horaires officiels mais deux heures différentes officieusement)

Quel jour et à quelle heure, Bruno et Lara arrivent-ils à destination ?

Convertissez votre réponse en heure locale du point de départ, heure locale du point d'arrivée mais aussi en heure de référence du pays.

Combien d'heures de train ont-ils dans les pattes après ce grand voyage ?

... même eux ne le savent pas !!

Sachant qu'une couchette en 1ère classe coûte environ 49 Ť/km, qu'une couchette 2ème classe revient à 14,5 Ť/km et qu'une couchette en 3ème classe coûte 7 Ť/km.

Sachant qu'aucun supplément n'est demandé pour les vélos.

Sachant aussi que le montant d'un bakchich se chiffre à la tête du client et dépend de l'humeur du "prodovnik".

Combien leur aura coûté approximativement ce voyage ?

Vous pourrez donner votre réponse encadrée dans une fourchette de tarifs possibles, pour le couple, puis par personne. Exprimez ce montant en tenge (Ť), en euros (€) et en dollars ($).

N'oubliez pas de rédiger des phrases pour donner chacune de vos réponses.

Bon courage et bon voyage !

(Souvenir de Georgie)

Ps: Notez (qu'exceptionnellement !) cet exercice scolaire, vous sera très probablement utile dans votre vie future et qu'il ne sera pas simple de réfléchir à toutes ces questions quand votre cerveau sera tout ramolli alors que la température atteindra 48 degrés à l'ombre en plein mois de juillet !

Alors ? A vous de jouer !

22
juil
22
juil

Chimkent, 5h00 du matin.

Nous venons de traverser la ville encore endormie à la lueur de nos frontales. Lorsque nous arrivons sur le quai de la gare, nous même à moitié réveillés, il fait encore bien sombre.

Quelques personnes terminent leur nuit, allongées sur un banc, d’autres attendent patiemment leur train qui n'est pourtant prévu que dans deux heures. Les kazaques sont toujours en avance lorsqu'il s’agit de sauter dans un train !

On échange les banalités classiques. «D'où venez-vous ? Aimez-vous le foot ? Êtes-vous mariés ? Quel âge avez-vous ?»

Alors qu’on a presque fait le tour des présentations, notre train ne tarde pas à faire retentir son sifflement et à pointer son nez. Nous sommes à présent rodés, c’est le sixième train dans lequel nous allons grimper au Kazakhstan en l’espace de 5 jours. Celui-ci nous mènera à Tashkent en Ouzbékistan. Les sacoches sont toutes retirées, la cordelette qui nous sert à ligoter les vélos à la verticale entre deux wagons est délovée, notre téléphone prêt à dégainer nos billets électroniques. Le temps d’arrêt peut varier de quelques minutes à plus d’une heure mais là encore, nous n’avons pas tout saisi, alors il vaut mieux ne pas trop traîner.

Le train stoppe sa course et la prodovnik de notre futur wagon saute sur le quai. Elle a à peine le temps de nous apercevoir qu'elle déclare que pour nous, c’est d’accord mais que pour les «velocipèdes», c’est «nieto» ! Elle nous invite donc à monter dans le train en laissant les vélos sur le quai. À notre tour de lui dire que : «Désolé mais là, c'est niet» !

Zut, nous aussi, on peut le faire… Un partout, balle au centre !

S'en suit une partie enflammée de «ni oui ni non» mais avec toutefois beaucoup plus de «non».

On sort alors le grand jeu : notre bon ami polyglotte, «Google Trad». Ce dernier tente alors d'expliquer à l'employée de la société de chemin de fer que nous avons déjà parcouru plus de 2000km en train à travers le Kazakhstan accompagnés de nos vélos sans soucis, celui-ci sera le dernier. La riposte ne tarde pas à arriver et l’interprète en ligne nous informe que ce train étant plus rapide et plus étroit que les autres, la règle est différente. Dans le Talgo, pas de vélo.

Si on change les règles en cours de partie aussi…

On sort alors notre plus bel atout : LA photo de nos deux bicyclettes bien rangées dans le train précédant. «Vous voyez, ça fonctionne !»

Le joker «illustration» ne fait aucun effet sur notre adversaire et les «nieto» s’intensifient encore. On tente le chantage version Monopoly : «Mais quand même, on a payé !!!»

Comme si tout pouvait s'acheter… Y compris la sympathie d'une prodovnik à l’air sévère. On joue ensuite la carte «yeux de cocker» espérant lui faire pitié : «Mais on ne peut pas pédaler avec cette chaleur, vous comprenez ?!» Échec cuisant. Pendant ce temps, l'heure tourne. Elle joue la montre : on est battu, je m'y résigne.

Mauvais perdant, Bruno tente le tout pour le tout et se met en colère. Il hausse le ton et rapproche dangereusement son visage de l'autorité en question. Je le vois même sauter de force à l'intérieur du wagon quelques secondes avant le départ.

«Tu vas voir si je ne peux pas monter dans ton train !!» … Oups !

Je vais quand même pas rester plantée là, toute seule, sur ce quai avec tout ce barda pendant qu’il part poursuivre les vacances en Ouzbékistan !! On pourra même pas se téléphoner, on n’a qu’un portable pour deux !!

Ouf ! Pour mon plus grand soulagement, il se fait jeter sur le quai à temps, les portes se referment, un coup de sifflet et le train démarre. Parfois on perd… C'est la vie !

Reste à trouver une solution mais pour le moment, nous sommes un peu décontenancés.

Tous les trains qui passent la frontière sont-ils identiques ? Quand passera le suivant ? Y aura-il de la place pour nous ? Peut-on se faire rembourser nos billets ? …Et dire qu'on s’est levé à 4h du matin pour en arriver là…

Je tente de parlementer avec une caissière complètement hermétique assise derrière le guichet. Un seul mot à la bouche «nieto» ! Pas gagné cette histoire !

La suite est complètement surréaliste . Un couple de personnes un peu âgées (disons des gens un peu plus âgés que Bruno !) avec qui nous avions échangé quelques minutes avant l’entrée en gare de notre futur ex train vole à notre rescousse.

En quelques mots accompagnés de quelques mimes, ils nous expliquent que l'on va prendre un taxi jusqu'à la frontière Ouzbek (environ 150km) puis que l’on roulera en vélo ensuite jusqu'à Tachkent, ville relativement proche.

Un taxi ? Avec les vélos ?? Ils sont fous !!! Et puis un taxi se doit être hors de prix…

Oui, ils sont fous. Complètement fous de gentillesse et de bienveillance pour nous.

Sans que l’on ait le temps de nous préoccuper de quoi que ce soit, un taxi est commandé et une collecte est organisée.

Oui, oui, vous avez bien entendu : une collecte d'argent sur le quai. Comprenez par là que la dame et le monsieur en question s’approchent de chaque personne et de chaque attroupement sur le quai pour exposer notre situation. En moins de dix minutes, les billets circulent de main en main, les téléphones se rapprochent et des transferts d'argent, via une application, ont lieu. On ne sait combien de personnes ont-ils réussi à rallier à notre cause, tant tout se passe en un clin d’œil, avec discrétion.

Mais que font-ils ?? Impossible de les stopper dans cet élan de générosité, le budget est bouclé. Le taxi est là, il nous attend.

On nous propose même de nous acheter de quoi boire pour le voyage, on décline évidemment. Il ne manquerait plus que ça !

C’est toute un petite troupe qui nous accompagne à la sortie de la gare. Je n'ai déjà plus mon vélo en main, un jeune se charge de le conduire jusque sur le trottoir. Effectivement une voiture est là, coffre ouvert. Je ne peux m’empêcher de sourire quand je repense à la tête de Bruno quand il aperçoit notre futur taxi. Une berline.

Dans son regard, je lis ça : «Comment voulez-vous qu’on fasse entrer deux vélos dans une voiture pareille ?»

Par politesse, il ne dit rien et de toute façon dans cette histoire, nous n’avons rien à dire, juste à nous laisser conduire.

En quelques secondes, nos vélos sont chargés dans le petit coffre. Empilés l’un sur l'autre, une roue, le guidon et une partie du cadre qui dépassent. Le tout est ficelé, nos sacoches sont empilées sur la banquette arrière et on nous pousse à l’intérieur de la voiture dont le moteur tourne déjà !! C’était quoi déjà notre problème !?!

C’est tout juste si on a le temps de faire une petite photo souvenir avec nos bienfaiteurs du jour, en tout cas avec ceux qui sont là, les nombreux autres étant restés sur le quai pour ne pas rater leur train.

S’en suit environ 150km parcourus à 150km/h. Quand on sait que pour l’équivalent ou presque de la même distance, le voyage en train aurait duré 4h, c’est à se demander pourquoi on n’a pas penser plus tôt à demander à un chauffeur de taxi équipé d’une Renault Mégane de nous faire traverser le Kazakhstan en un éclair !!

Notre sympathique chauffeur nous déposera juste devant la douane Ouzbek, si la voiture était au calibre du portique de sécurité, sûr qu’il nous aurait même conduit plus loin encore !

On veut lui offrir à manger et aussi nos derniers « tinges », la monnaie locale qu’il va nous falloir échanger à présent contre des « sums ousbek ». Il décline fermement.

Une grosse heure plus tard, nous sommes arrivés à destination, Tachkent. On n’y croit toujours pas ! On est tellement en avance qu’on émet même l’idée d’aller attendre notre prodovnik préférée sur le quai car notre train va bientôt entrer en gare, après tout, on a nos billets ! La revanche, imaginez sa tête !

Parfois on perd, parfois on gagne et parfois on hallucine complet !

Happy end au Kazakhstan !

24
juil
24
juil

Environ 41 h et 2229 km parcourus sur les rails à travers le Kazakhstan pour rejoindre l'Ouzbékistan... (...pour ceux qui auraient lâché l'affaire du casse-tête Kazaque de l'article précédent !)

Cinq jours de voyage en train, ça peut paraître un peu long et ennuyeux mais détrompez-vous, en chemin, on vit des choses très chouettes !

On a tout d'abord tout son temps pour apprécier le paysage. A la fenêtre, c'est toujours le même : désert à perte de vue. C'est à croire qu'on aime les choses monotones. Tout comme la forêt de Sibérie enneigée ce n'est pas très varié : du sable et un peu d'herbe sèche, parfois un lac de sel asséché et de temps en temps quelques chameaux qui bronzent...

On a aussi le loisir de bouquiner à volonté. Une liseuse pour deux, parfois l'un doit faire la lecture à l'autre.Guy de St Cyr et ses histoires à coucher dehors nous tiennent en haleine. Un vulcanologue se baladant entre des coulées de lave rouge, inhalant toutes sortes de gaz toxiques, jouant entre les projectiles brûlants, il n'en faut pas moins pour réchauffer l'atmosphère quand il ne fait que 49 degrés dehors !

Dans le train, on fait aussi de belles rencontres. Un "wagon lits" en 3ème classe, ça veut dire être à soixante personnes dans la même chambre à coucher et à soixante personnes dans la même salle à manger ou le même salon ! C'est convivial !

C'est un peu comme la promiscuité d'un refuge mais là, tu y restes nuit et jour. Le prodovnic tente de faire régner l'ordre et se contorsionne dans tous les sens pour passer le coup de balai quotidien entre les bagages et les pieds de chacun. Quel job ! Le "samovar" tourne à plein régime fournissant de l'eau bouillante à tous les voyageurs. L'odeur de soupe chinoise lyophilisée embaume tout le wagon.

Bonbons, beignets, melon, épis de maïs, thé, bouteille d'eau fraîche, lait de chamelle... Miam ! On reçoit des cadeaux gustatifs et nos estomacs sont plutôt ravis ! On est encore pas très au point sur les ravitos...

"Rarkmed" à tous et une fois encore Google Trad pour les échanges !

On dort aussi, bien calé dans nos couchettes. Comme tous les trajets sont longs, tous les trains ou presque proposent des couchettes et non des sièges.

Et sinon, lorsqu'on embarque dans un train sans billet, ça se passe comme ça :

La nuit c'est dans le rak à bagages que ça se passe ! C'est pas bien large mais quand on n'est pas épais, ça peut fonctionner ! Du coup, j'ai laissé ma place !

On fait des petits dessins même si parfois ça bouge beaucoup trop ! Le "tremblotant style", ça a son charme non ?

On écoute des podcasts sur tout plein de sujets divers et variés. Entre autres l'histoire de deux cyclovoyageurs qui sont partis d'Alaska pour rejoindre la Patagonie en plus de 2 ans et demi. On partage, c'est ici ! A chaque escale, on découvre aussi des choses incroyables : * Une mer avec davantage de serpents qui nagent que de baigneurs. La mer Caspienne nous rafraichira à peine !

* En pleine nuit, une station service d'autoroute peut faire office de formidable terrain de camping.

* Se lier d'amitié avec un chameau, c'est cadeau ! Ainsi, ce dernier nous expliquera pourquoi certains de ses copains n'ont qu'une seule bosse sur leur dos. Croisements effectués entre chameaux et dromadaires pour avoir un rapport optimal pelage (pour les basses températures hivernales et pour le lainage) et production de lait.

* Qu'au milieu du désert, l'eau peut couler à flot et qu'on peut y jouer comme des enfants !

* Improvisation musicale dans un jardin public.

* Contemplation d'un bien triste spectacle : une mer quasiment entièrement asséchée par le détournement successif de deux grands fleuves, utilisés aujourd'hui pour l'irrigation des cultures intensives de coton.

Plus d'eau pour les poissons de la mer d'Aral, plus de poissons pour les pêcheurs de la mer d'Aral, plus de pêcheurs pour les bateaux de la mer d'Aral...Véritable cimetière marin.

* Devenir les invités d'un jour ! Petit dej' et visite guidée à Aralsk... What else ?!

* Découvrir comment se faire refouler d'un train peut se transformer en une histoire de fou ! (Article précédent)

* Déguster des "Samsas", chaussons, cuits collés aux parois de fours en terre sèche.

Quel labeur pour leur fabrication : le nez dans le four alors qu'il fait si chaud dehors. Les décoller des parois brûlantes sans les faire tomber est tout un art pour lequel il faut manier baguette en métal et épuisette avec brio !

* Rencontrer en Ouzbékistan nos toutes premières pistes cyclables depuis le début du voyage. Comme quoi ! Bon... Pour les jonctions à chaque intersection mieux vaut savoir lever la roue avant !

* Déambuler au bazar local :

* Enfin, rester scotchés devant des monuments grandioses et éblouissants de par leurs couleurs, leurs architectures et leurs histoires. Turkestan, la petite sœur et Samarcande la magnifique !

Ce soir là, on aurait pu rester des heures à admirer ce mausolée à la lumière des projecteurs.

Quel spectacle !

Il est temps à présent de se remettre en selle et de prendre un peu de hauteur.

Après tous ces jours dans la civilisation dense, aussi riches soient ils, je crois qu'on a tous les deux comme une envie qui se précise de fuir la chaleur, de retrouver des contrées un peu plus sauvages, de revoir des montagnes et aussi de bivouaquer où bon nous semble.

La route continue toujours plus à l'Est... Une fois encore la prochaine destination se termine en "stan", alors ?

Le pédalistan a encore sans nul doute de belles choses à nous offrir !

28
juin
28
juin

Un texte qui date de quelques semaines déjà mais reste d'actualité...

Sauter toutes ces frontières, passer d'un pays à un autre et d'une civilisation à ses voisines me renvoie à ce constat :

C'est assez fou comme l'Humain ne fait pas dans la demie-mesure.

C'est tout ou rien. Il adore ou il déteste, bon ou mauvais, virevoltant d'un extrême à un autre, constamment... non sans être influencé par les "bonnes manières", les "règles de conduite" et une "pseudo morale" sortie d'on ne sait où.

En l'espace de quelques kilomètres, tout change brutalement. On ne parle plus la même langue, on n'utilise pas la même monnaie, les maisons sont bâties différemment, on achète des véhicules différents, on ne boit pas et on ne mange pas les mêmes choses, on croit en un dieu autre... sans transition aucune.

Si souvent, on nous interpelle, on nous accueille très chaleureusement, on nous invite, on nous offre à boire ou à manger et quand ce n'est pas le cas... on nous ignore littéralement : pas un bonjour, pas un sourire, pas même un regard parfois... rien, nada, nieto !

Quand bien même dans la froideur, on se déciderait à nous parler, à la simple évocation du mot "France" et là encore ça peut changer du tout au tout ! On nous aime ! C'est vrai un peu partout mais d'autant plus en Arménie. La France... Nous sommes pourtant en tout premier lieu de la même espèce... Humain.

De "je t'admire" à "même pas je ne te calcule", il n'y a, semble-t-il, pas tant de degrés intermédiaires. En somme, il n'y a qu'un pas, c'est dire si ces extrêmes ne sont finalement pas si extrêmement éloignés !

Au volant, le constat est d'autant plus évident... Soit on te frôle et on manque de justesse de t'applatir, soit on te fait des grands signes sonores ou visuels, souvent les deux, pour te saluer, t'encourager et on s'écarte démesurément...

De ces femmes si peu présentes et qui réapparaissent subitement. De l'ombre profonde à la lumière peut-être excessive. Des djellabas où rare sont les bouts de peau qui dépassent aux images de corps dénudés placardés sur certains murs. Aux multiples salons de beauté qui offrent des ongles colorés démesurément longs, aux chevelures bien cachées sous les voiles et aux salons de coiffure où toutes ces nanas avec des papillotes en aluminium sur le crâne attendent que la chimie fasse effet. Quand ce n'est pas la chirurgie pour d'autres...

Du corps à cacher au corps objet... Et sinon, on pourrait pas juste faire simple ?

De ces cafés dépouillés et calmes, exclusivement masculins, où les hommes chapelets à la main regardent le temps filer à ces bars bruyants où des pin-ups servent des breuvages à ces pourtant "mêmes" mâles... ah non, pas exactement les mêmes... histoire de religion, parait-il.

Et qui dit que ces derniers ne les négligent pas autant si ce n'est plus ?

Et qui du plus lourdot, celui qui t'ignore complètement parce que tu es une moins que rien ou celui qui te pose sa main aux fesses, rien de moins ?

A propos de verres, évoquons leurs contenus et la nature des liquides. Là aussi, c'est intéressant. Boire, en voilà un point commun à l'humanité. Avec modération, disent même certains hypocritement...

Des pays musulmans où l'on sirote du thé en quantités démesurées à longueur de journée et où si l'alcool est pourtant présent, il en reste néanmoins tabou. Comment expliquer qu'il faille faire le tour d'une ville entière pour dénicher une canette de bière dans LE magasin officiel de boissons alcoolisées que probablement tout le monde sait situer mais que personne n'ose indiquer clairement ? Comment se fait-il que personne n'achète de bière, que personne n'en boive mais que les fossés de bord de routes soient remplis de bouteilles de bières... vides.

Oui oui, à vélo, on voit tout ;)

Pour vivre heureux, vivons cachés. Buvons la nuit en bagnole et balançons les bouteilles par la fenêtre !

A quelques pas de là, quelques kilomètres plus à l'Est, les bouteilles d'alcool en tout genre sont exposées tel des trophés dans les vitrines des supermarchés. C'est à croire que ces gens-là mangent plus liquide que solide. Vodka en tête de gondole, si tu ne bois pas, tu n'es pas un homme !

Merde alors... Chez vos voisins, on était des mécréants !

Être obligé de boire jusqu'à tomber raide ? Les traditions, nous dira-t-on... ah bon, alors...

On trinque aux rencontres, à la paix, à la bonne santé, à l'argent, aux enfants, aux morts à la guerre, aux voisins, au soleil, aux récoltes, et puis quand on manque d'idée... aux femmes : ça n'en finit jamais !

Comment déjouer le piège ?

Pour t'en sortir vivant, vide trois verres sur cinq sur tes pieds ! Aucune civilisation ne semble voir d'un mauvais œil celui qui finit la soirée les pieds mouillés ! ... Bien que, ce soit encore à vérifier.

Que dire encore de ces petits villages isolés, de ces longues pistes défoncées pour y accéder, de ces maisons au sol de terre battue, de ces rues boueuses et bouseuses, de ces gens qui vivent de la manière la plus basique qui soit, sans eau courante et avec tout juste un peu d'électricité. Travailler la terre pour manger, souvent ne pas vivre bien vieux... 2000 mètres d'altitude, l'hiver ça doit être rude.

Quelques kilomètres à peine à vol d'oiseau, juste sur l'autre versant de la même montagne : une station de ski.

Hôtels de luxe, remontées mécaniques, belles bagnoles, économie du loisir et du superflu.

Une dame à quatre pattes, devant le cinéma, un petit couteau à la main, en train de racler un peu de terre entre deux pavés et de couper trois pauvres brins d'herbe qui y poussent. Ça fait désordre un peu de verdure sur ce béton.

Tout le monde sur son téléphone, dans sa voiture, pressé par le temps, guidé par l'argent, pris dans le flot.

Décidément, pas de demie-mesure pour l'être humain.


25
juil
25
juil
Publié le 12 août 2022


En ces temps où les montagnes tendent à s'écrouler...

À l'approche de la capitale d'Arménie,  une petite équipe de tournage nous met le grappin dessus.  Quel opportunité,  deux cyclos pour égayer un reportage sur un bled de la périphérie d'Erevan. Vite, le trépied de la caméra  est déplié quasi au beau milieu de la route,  il ne s'agit pas qu'ils nous filent entre les doigts se dit le réalisateur !  

Ce probable passage aux infos locales me ramène à celui effectif d’un de ces jours d'août de l'été 2017. Nous nous bidonnions dans notre tente tel deux vers dans nos duvets de ce camp spéléo des Picos de Europa : « ça ne te démange pas un peu partout toi ? bah, c'est p't'être qu'on est craspouilleux à force de se traîner dans ces innombrables méandres. Les jours d'après sous la yourte commune « ça ne vous gratte pas vous aussi ? «  je m'adressais naïf au reste de l'équipe.  Ben non… De retour à la civilisation,  le verdict tombait après une entrevue chez le toubib. La gale, brrrrr… Il nous administrait quelques comprimés à reprendre sous huitaine. Par précaution, j'en informais la médecin de la boutique avant de reprendre l'encadrement d’un stage. Collectivité rimait avec fort risque de contagion. La sentence fut alors 15 jours d'arrêt maladie par ces belles journées estivales !

Des boutons, aussi nombreux soient-ils, ont-il déjà empêché la pratique de la varappe ? Tiens, cette belle face nord du Piz Badille là-bas semble être en condition.

Nous allions être témoins de l’un des plus importants écroulements de nôtre bonne vieille planète. 3 500 000 m³ de rocs collapsaient littéralement sous nos yeux, à quelques kilomètres à peine et pile en face, alors que nous n’étions qu'à mi-paroi ( https://laraamoros.blogspot.com/2017/10/spectacle-son-et-lumiere-pour-une.html?m=1  ).

Après avoir rejoint le sommet, puis le pied de notre montagne et enfin le refuge,  c'est par la voie des airs que nous étions détournés au village par les autorités. « Pour vôtrre vaan, on verrah aprês, la route à été toute emmportée…». Même si ce dit village avait été promptement évacué dans les règles de l'art, les experts du coin s'en doutaient, une effervescence toute particulière régnait sur la place devant la mairie. À peine sortis de l'hélico, une journaliste,  un caméraman et un preneur de son nous sautaient dessus : « âlorhs,  komment c’était là-haut ? »

On avait du faire le 20h. 

Fin de la mise en quarantaine, je reprenais mon emploi et me prenais une remarque de la part de ma directrice : « Je vous ai vu à la télé… vous étiez en arrêt n'est ce pas … ça ne se fait pas… bala, bala, bala… »

Ou comment l'assimilation à un arrêt dicté par un professionnel de la santé devient règle sociale communément admise qu'il ne faut pas bouger de chez soi car l'administration compétente pourrait éventuellement venir vérifier que vous êtes bien à compter vos boutons sous votre couette, s'agirait pas qu'il y'en ait un qui s'échappe !!! 

Heureusement que je n'en étais pas à ma première dans ce registre 😋…


Bruno

14
août
14
août
Publié le 15 août 2022


Trois mois sur la route c'est :


◇ 8 pays 🇮🇹 🇬🇷 🇹🇷 🇬🇪 🇦🇲 🇰🇿 🇺🇿 🇹🇯

◇ 3102 km 🚲

◇ De belles rencontres encore et toujours 🙋🏽‍♀️

◇ 1 maximum à 62 degrés 🥵

◇ 1 minimum à -2 degrés 🥶

◇ De chouettes découvertes 🕌

◇ 2 mers 🌊 1 désert 🏜 des montagnes 🏔

◇ Des paysages magiques 🏞

◇ 1 avion ✈  6 trains 🚂 5 taxis 🚕

◇ 3 cols à plus de 4000 mètres d'altitude ⏲

◇ Des bivouacs trop canons 🏕

◇ 1 sauvetage de chien 🐕

◇ Des journées raplapla 🤒

◇ Des petits dessins ✏

◇  Trois gouttes de pluie ☔

◇ 92 litres d'eau à filtrer 🍼

◇  29 journées en tongs 🩴

15
août
15
août
Publié le 15 août 2022

Pistes cyclables, voies vertes, eurovélo, vélodysée... Certains de ces tracés suivent d'anciennes voies de chemin de fer, d'autres reprennent d'anciens chemins de halage le long d'un canal et d'autres encore longent les berges d'un fleuve. Ces itinéraires réservés aux deux roues ont fleuri, un peu partout ces dernières années, pour le plus grand bonheur des petits et grands équilibristes à deux roues.

La route de nos vacances est parfois plus large mais souvent bien moins carrossable et nous devons aussi la partager avec quelques rares "machines", comme on dit ici, et aussi parfois avec quelques animaux.

Cet itinéraire un peu fou serpente au beau milieu du massif du Pamir, il remonte d'interminables vallées, gravit des cols en altitude, franchit des montagnes, traverse des hauts plateaux, longe des lacs et saute des rivières.Il mène à la grande nature, belle, sauvage, rude et aride...

La "Pamir highway", ou route M41, est cet axe qui relie le Nord Est de l'Afghanistan à Douchanbé au Tadjikistan puis à Osh au Kirghizistan avec à mi-chemin, une bifurcation menant à la frontière chinoise. Aujourd'hui quand on parle de la "Pamir Highway", c'est au tronçon Douchanbé-Osh auquel on fait allusion.

Elle a été construite sous l'ère soviétique dans les années 40 en un temps record. On évoque une centaine de jours à peine pour la partie Douchanbé-Khorog, soit près de 500 km, c'est à dire une avancée d'environ 4km par jour. Vu le relief géologique et les moyens supposés de l'époque, c'est juste lunaire !

À cela doit-on ajouter que bien que soutenu par le gouvernement de la république soviétique, le chantier a été réalisé dans un effort commun et collectif ("khashar", effort mutuel en persan ) comme c'est seulement imaginable dans des états communistes !

C'est aujourd'hui un des réseaux routiers principal du Tadjikistan même si l'aspect de la route peut parfois sembler bien éloigné de celui d'une nationale tel qu'on se l'imagine ! Principalement fréquentée par des poids lourds chinois chargés d'énormes containers, on peut également y croiser quelques 4x4 faisant office de taxis et aussi... quelques vélos !

La "Pamir Highway" est très certainement un rêve pour beaucoup de cyclovoyageurs. Elle est pour certains, qui viennent spécialement la parcourir, un réel objectif à elle seule. Pour d'autres, elle est une étape de taille dans un voyage au plus long cours en Asie Centrale.

Une parenthèse.

Un voyage dans le voyage. Nous ne sommes pas encore de grands cyclovoyageurs mais cette route à travers les montagnes du Pamir nous faisait rêver.

Cyclorêveurs, cyclovoyageurs... Peut-être qu'au terme de cette épopée sur cet itinéraire mythique, serons-nous un peu des deux ?!

Brut mélange d'asphalte décrépis, de nids de poule géants, de terre battue, de sable, de gravier, de galets, de tôle ondulée, de flaques, de passages à gué, de vents durement établis, de poussière qui vole, elle met voyageur comme matériel à rude épreuve sur plus de 1000 km.

Suite à des affrontements armés, plus ou moins récents, entre Tadjiks et Kirghizs, la frontière entre ces deux pays est désormais strictement fermée. Impossible donc de parcourir les deux cents derniers kilomètres de la célèbre route se trouvant en Kirghizie. Dommage...

Pour autant, une fois la déception passée et après réflexion, ce nouveau paramètre s'avère finalement être une sacrée aubaine.

Quand une traversée des montagnes du Pamir se transforme en une boucle, cela signifie que l'on passe deux fois plus de temps dans ces paysages splendides, davantage de jours en altitude et que l'on reste plus longtemps au cœur du massif.

Afin de ne pas emprunter le même chemin à l'aller qu'au retour, on se met alors en quête de variantes et de vallées habituellement délaissées, de pistes peu parcourues, de chemins plus que de routes à proprement parler. On prend alors des voies beaucoup moins carrossables où les véhicules motorisés disparaissent parfois complètement.La "Pamir Highway" est à réinventer !

Autre avantage à cette frontière condamnée, il n'y a plus aucun camion à destination du Kirghizistan sur la M41 et seuls quelques poids lourds chinois empruntent toujours une partie de l'itinéraire mais là encore, covid oblige, leur nombre est beaucoup plus restreint qu'habituellement.

Les quelques véhicules de touristes, quant à eux, contraints de faire l'aller-retour par la même route se font également plus rares. Nous n'en croiseront aucun.

Bref, la route est libre.

À nous la "Pamir Highway" !

Nos passeports tamponnés, il nous faut maintenant également composer avec un délais de trente jours maximum dans le pays, créneau déjà quelque peu grignoté par le temps de rejoindre Douchanbé depuis Samarkand et un peu de logistique sur place :

S'alléger de ce qu'il peut rester de superflus dans nos sacoches et effectuer les quelques démarches administratives nécessaires pour entrer officiellement dans la région du Pamir.

Permis GBAO en poche, courses pour être un peu autonomes en nourriture, taxi rudement négocié et partagé avec trois autres cyclos.

Vélos ficelés sur le toit, excitation à son comble, c'est parti pour 17h de voyage : Pamir en ligne de mire !

C'est à Khorog que débutera notre épopée Pamirienne ! À la classique M41 plus directe, nous préfèrons tout d'abord emprunter le chemin des écoliers : la Whakan valley (en bleu sur la carte !).

Cette interminable vallée remonte sur plusieurs centaines de kilomètres la rivière Panj, énorme cours d'eau et frontière très naturelle entre Tadjikistan et Afghanistan. Les eaux grises sont déchaînées et les vagues parfois gigantesques.

Nous remonterons plusieurs jours durant ce corridor dans lequel le vent s'engouffre avec fureur chaque après-midi. Pour notre plus grand bonheur, il souffle dans notre dos et ça file parfois à toute vitesse !

On peut profiter ainsi du panorama sur les grands sommets enneigés de l'Indu Kouch et saluer de temps à autres les afghans sur la rive opposée. Côté Tadjik, ce sont les militaires qu'il faut "saluer" à intervalle régulier. Checkpoints et patrouilles qui se baladent en permanence, arme à la main et œil fixé sur les Afghans bien occupés, quant à eux, à vaquer aux simples tâches de la vie quotidienne !

Quelques petits villages ou simples hameaux rencontrés égayent le trajet.

Des enfants qui courent à nos côtés ou qui pédalent quelques centaines de mètres avec nous, des paysans au retour des champs tout sourire qui nous saluent, une micro boutique et une boisson fraîche à se mettre dans le gosier !

Après quatre jours à jouer aux montagnes russes le long des flots, on quitte la vallée principale pour prendre de la hauteur et aller à la rencontre des montagnes Tadjiks.

Adieu l'asphalte ! Bonjour le sable, les cailloux et la tôle ondulée !L'altimètre grimpe et les pédales moulinent....

À 4300 mètres d'altitude, tout le monde stoppe sa course : Voilà un premier col dans la poche ! En short et en jupette s'il vous plaît !

Le paysage s'ouvre plus largement et chaque virage est une jolie surprise à condition de pouvoir lever le nez de son guidon !

La descente s'avère être presque plus exigeante que la montée : Piste raide, caillouteuse et grand plat dans lequel on s'ensable copieusement.

De la tôle ondulée de qualité supérieure fait suite et nous mène de lac salé en lac salé... Dommage, on avait justement une grande soif !

Il faudra encore patienter quelques dizaines de kilomètres...

Enfin un dernier virage et une surprise de taille nous attend : noire, lisse et chaude.

Aurait-on pu un jour imaginer que retrouver du goudron provoquerait en nous une si grande joie ?

Bien que défoncée et au dénivelé largement positif, on se laisse porter par l'enthousiasme de l'asphalte retrouvée (et aussi par la soif !) le long de ce tronçon de la M41 que nous venons de rejoindre (en jaune sur la carte !).

Du vélo jusqu'à ce qu'il fasse nuit noire suivie d'une grande étape de cent kilomètres au milieu de paysages incroyables, sur cet immense plateau, le lendemain nous mène jusqu'à LA ville du coin : Murghab.

Changement de décor : C'est par une grande plaine verdoyante et humide que l'on rejoint la civilisation.

Un ultime checkpoint et contrôle de nos passeports. Il ne s'agirait pas que l'on soit deux afghans déguisés en cyclistes ayant traversé la Panj à bord de nos pédalos pour venir acheter deux cannettes de bières à Murghab !

Douche chaude, lits, bières (justement !), soupe et emplettes au bazar local.Changement d'ambiance, ici on porte des chapeaux en feutre et des foulards fleuris, on vend fromage et viande à l'intérieur de yourtes en béton (!) et un village de containers décrépis abrite tout plein d'autres petites boutiques.

Ce petit bazar est un vrai spectacle dans lequel on serait tenté de déambuler des heures.

Les sacoches reremplies de ce qu'on a pu trouver à acheter au container épicerie et c'est reparti ! La M41 fait une grande courbe vers le nord en direction du Kirghizistan.

À présent, le vent est contre nous et il va bien falloir s'y résoudre. Sauf imprévu ou conditions climatiques exceptionnelles, le vent dominant et nous, serons désormais à contre-courant !

La route pour la Chine ayant bifurquée à droite, on a la M41 juste pour nous ! Plus un camion et deux ou trois voitures par jour tout au plus !

Pas un chat et pas un chinois, pourtant la Chine et sa grande muraille de barbelés sont à quelques mètres à peine ! Des kilomètres et des kilomètres de poteaux et de clôtures plantés au milieu de ce no man's land minéral.

Sait-on jamais qu'un Tadjik veuille aller cueillir un caillou sur ce flanc là de la montagne ! Vu la taille du pays, si tout le périmètre est barricadé ainsi, ils ont intérêt à être nombreux les planteurs de poteaux chinois !

La route se redresse peu à peu, la terre et la poussière reprennent leurs droits sur l'asphalte et quelques épingles s'enchaînent.

Ak Baïtal en vue !

Un joli col à 4660 mètres. Qui aurait dit qu'on grimpe un jour si haut... à vélo !?

L'idée nous vient alors qu'on a, enfouis au fin fond de nos bagages deux paires de baskets. Et si on les emmenait se balader un peu ? Des globules plein les sacoches, c'est le moment d'en profiter !

Un peu de marche à pied pour se dégourdir les gambettes et rejoindre cette crête haut perchée. L'alti affiche 4900 mètres.

La barre du "record" annuel est dépassée mais croyez-le ou non, cette presque traditionnelle virée estivale à 4810 mètres ne me manque pas du tout.

La cohue de guides, les refuges blindés et les cailloux qui dégringolent encore moins !

Y retournerai-je, je me le demande à cet instant...

Sur mon vélo, je me nourris parfois néanmoins de ces belles journées d'avril qui ont précédé notre départ. Atlas marocain, sierras espagnoles, caillou chaud, calme, tranquillité, sourires et bonheur d'être là...

En écrivant ces lignes, je pense aussi inévitablement à Marine, déjà un mois ; à Adèle, quelques jours à peine... Chutes fatales encordées à leur client(e). Des vies parties en poussière en montagne mais surtout au travail.

"Métier passion", le mot est beau mais le jeu n'en vaut largement pas la chand'elles...

Cette grande descente dans une tôle ondulée impeccablement sculptée me sort de ces sombres réflexions. Se faire secouer de la sorte est non seulement désagréable mais il semblerait que cela accentue irrémédiablement les effets de l'altitude. Un mal de tête tenace s'installe !

C'est un peu sonnés que nous crloisons nos premières yourtes et apercevons nos premiers yaks au loin. Avec ces nomades là, nous nous observons un moment, incrédules. Je ne sais pas qui prend le plus l'autre pour un extra-terrestre !

Quelques dizaines de kilomètres plus tard, il est temps de quitter à nouveau la M41 pour se jeter à corps perdu dans la grande nature sauvage.

La Bartang valley (en rouge sur la carte !) mériterait un récit à elle seule. De vagues traces de roues dans la pampa, une vallée mal définie, un cours d'eau qu'il faudra parfois traverser...

Ici le goudron n'est plus qu'un très lointain souvenir, les ponts sont en option et mieux vaut avoir fait ses provisions de nourriture et de carburant avant de s'engager plus profondément dans la Bartang.

Pour peut-être la toute première fois depuis le début du voyage, nous roulons vers l'Ouest !

Le soleil nous réchauffe le dos quand nous pédalons aux premières heures du jour où la gelée blanche est encore installée. L'après-midi, il nous brûle le nez et nous le poursuivons jusqu'à installer notre bivouac et le voir jouer à cache-cache entre les sommets, pour finalement disparaître derrière l'horizon acéré.

Le vent, quant à lui, est ici désespérément établi, il nous souffle de reprendre notre chemin vers l'Est ! En milieu de matinée, il se réveille timidement puis par quelques bourrasques s'installe confortablement jusqu'en milieu de nuit. Il lève alors la poussière, le sable, il assèche la peau, la bouche, il pique les yeux. Il ralentit les cyclistes qui tentent de se frayer un chemin à contre-vent, il secoue la toile de tente et vient perturber la flamme du réchaud.

Après quelques jours sur ce grand plateau à pédaler entre 3800 et 4000 mètres, nous plongeons dans la vallée à présent mieux dessinée. Coulée de boue durcie, pont écroulé, passages à gué nombreux, champs de galets, avalanches d'éboulis qui ont envahie un bout de piste, blocs qui ont degringolés, chemin trop raide et trop caillouteux, route parfois rongée par les eaux en furies.

Il y a quelques fois tout juste de quoi laisser l'espace pour le passage d'un vélo et on comprend mieux pourquoi ce sentiment de solitude se ressent si fort ici.

Pas de village à des kilomètres, pas de nomade en estive, le haut de la vallée est isolée, comme coupée du reste du monde. Quel privilège !

Dire qu'il suffirait de se laisser glisser le long de la vallée, de suivre les flots de la Bartang ne serait pas vraiment réaliste. Bien que majoritairement descendant, il faut ici être présent à tout moment. Les yeux rivés sur les quelques mètres à venir, concentré sur où va passer sa roue avant et tonique pour maintenir le cadre dans l'axe de sa trajectoire.

En montée, on guidonne, on mouline, on souffle. En descente, on se cramponne aux freins, on tente d'amortir les chocs trop nombreux et de se frayer un chemin entre les obstacles en maintenant un équilibre plus ou moins précaire.

Serait-ce cela que l'on appellerait le vélo tout terrain ?

Une fourche avec amortisseur nous aurait très certainement bien soulagé les poignets. Pour autant, bien qu'ayant parfois la sensation d'être dans un shecker, on ne lâche ni guidon ni l'affaire ! Une fois n'est pas coutume !

Dans une grande descente, j'enfilerai même mon casque. Si on quittait nos tongs, on ressemblerait peut-être même à des vttistes !

Une fatigue (bien crevante) accompagnée de quelques problèmes gastriques (bien emmerdants) me videront de toute mon énergie quelques jours durant. Je ferai mon possible durant une semaine pour avancer d'une distance correcte chaque jour, dans cette vallée qui me semble de plus en plus interminable, jusqu'à ce qu'une pause d'une journée s'impose.

Dur cependant de reprendre des forces quand il n'y a rien à manger. Nous avons cinq jours d'autonomie et en avançant plus lentement que prévu cela s'avère être un peu léger.

Je pédale au ralenti, je pousse parfois le vélo dans les montées ou dans les descentes trop techniques mais je teste quand même un truc assez génial, le VAM : vélo à assistance musculaire.

C'est assez simple, il suffit d'un vélo, d'une meuf complètement carpette et de son copain qui pousse tout ça !

Et dire que le soir, ça écoute des podcasts féministes... Au secours !

Le retour à la civilisation est lent, progressif, réconfortant... Premier signe de vie humain, une yourte inoccupée puis quelques dizaines de kilomètres plus loin, une bergerie perdue au milieu de nulle part et une poignée de personnes qui y passe l'été avec leurs troupeaux.

Une centaine de kilomètres plus tard, un tout premier village sans véhicule et sans boutique mais déjà une invitation à partager le thé.

Il faudra encore attendre une quarantaine de kilomètres supplémentaires pour reremplir notre garde manger en s'offrant deux paquets de pâtes dans une épicerie qui n'a de l'épicerie que l'appellation !

Peu à peu les habitations se font plus nombreuses, plus élaborées, les jardins sont agrémentés de fleurs, les premiers véhicules motorisés réapparaissent et la tôle ondulée qui y est associée.Les invitations se multiplient, on ne peut toutes les honorer.

De fil en aiguille, le chemin s'élargit pour devenir une route et, cerise sur le gâteau, une dizaine de kilomètres avant de sortir de la vallée et de rejoindre la M41, l'asphalte réapparaît comme par enchantement. Évidemment, le revêtement est loin d'être parfait mais cela nous donne l'impression qu'un boulevard s'offre à nous pour rejoindre Rujan.

Ce coup-ci, c'est le retour à la vraie ville : un hôtel, une douche et un restaurant.

Voilà déjà dix-sept jours que nous pédalons dans ces fabuleux paysages si sauvages. Aujourd'hui, nous avons un peu de mal à réaliser que ça y est... le Pamir, c'est terminé.

Il ne reste plus qu'à se reposer un peu et à inventer le prochain épisode !


On rêverait bien de plage et de farniente mais il n'y a encore rien de tout ça à proximité...

Il va falloir pédaler vite ou patienter encore pas mal !

20
août
20
août
Publié le 21 août 2022

Sur quelques centaines de kilomètres,  la rivière Panj a délimité sa frontière. Nullement arbitraire, l'impétuosité des flots avait cette évidence naturelle pour nous séparer de l'Afghanistan.

Même si l'existence d'une frontière peut interroger, la rive gauche était parsemée de hameaux reliés par une étroite piste. Fort peu de trafic en comparaison avec la nôtre déjà bien réduite,  des piétons majoritairement accompagnés parfois d'un âne,  de rares motos et de plus rares autos encore.

Mais si le photographe avait inversé la photo,  je défie quiconque de nommer les états. Architecture basique en terre ou pierres, l'existence d'un lieu de vie tient ici du génie de l'irrigation.

Soudain,  alors que le minéral règne en roi, des générations ont eu l'intelligence par la création de réseaux d’amener l'eau sur des distances parfois considérables et de faire naître tout simplement et justement la vie. Chacun s'affaire indifféremment,  et avec le même savoir, à la faire naître, prospérer et s'épanouir.

Et il en faut de l'inventivité et du labeur pour "boucler confortablement l'année" !

Les cultures sont identiques, et pour notre plus grande chance, cette saison, les abricotiers croulent sous le poids des fruits. Une harmonie, un équilibre existent dans ce recoin du monde qui est ni plus ni moins l'œuvre de l'homme.

Si l'on se prend au jeu du photographe : y a-t-il une rive mieux qu'une autre ?

Les mains se lèvent pour nous saluer, il y a fort à parier que la rive gauche envie celle où nous sommes de ne pouvoir aussi offrir le thé de bienvenue…

Mais alors,  je reformule la question : existe-t-il une rive « mieux » qu'une autre pour pointer son nez dans ce monde ? 

Là où nous roulons, le choix pris a été de faire patrouiller, à intervalles réguliers, des très jeunes soldats armés.

Rien de bien exaltant dans leur journée, ils marchent par trois à cinquante mètres de distance les uns des autres, sans lunettes de soleil ni même d'iPod ! Bon, ils font de l'exercice au moins…

Aucune présence de cet ordre en face ! Ça vaque aux occupations quotidiennes des champs et de l'élevage.

Sur le site Web dédié aux voyageurs comme nous, par exemple, la région est rouge…

Parfois, un gamin au biclou déglingué qui nous accompagne quelques centaines de mètres lâche au cours de la conversation minimaliste le mot "taliban" avec de gros yeux tout en matant la rive opposée.

Mais dans les faits rien, nada… ah si, il y a quelques temps,  au beau milieu de cette interminable vallée se tenait sur une espèce d'île un bazar où le troc devait régner en maître. Mais ça, c'était avant…

Alors, il me plait d'imaginer,  d'espérer qu’ici, au Pamir,  le milieu et sa rigueur impose plus qu'ailleurs sa condition et que ses habitants vivent dans une sorte d'harmonie dictée par les saisons et les récoltes, et non pas par l'interprétation et l'imposition de croyances dont personne n'a besoin en définitive !

J'aimerais tellement que l'humanité grandisse autour du respect mutuel, du libre arbitre et de la bienveillance.

L'accueil prodigué tout au long de cette Pamir highway avait en tout cas ces fondements ! 

Merci merci …


Bruno


29
août
29
août
Publié le 29 août 2022

La bicyclette: Un nouveau jour se lève sur les montagnes du Pamir. J'ai encore dormi debout et à la belle étoile à côté de leur abri de toile.

J'aime cette vie de nomade. Je vois défiler du paysage et je me nourris de tous ces kilomètres.

Le vélocipédiste : Qu'il fut bon ce bivouac dans l'herbe moelleuse avec la tente pour maison et le glouglouti du ruisseau pour berceuse.

Le confort est une perle rare ces jours-ci. Aussi chaque instant de repos, chaque zone ombragée, abritée du vent ou de la poussière et chaque aliment s'en trouve transformé en un véritable petit trésor.

Petits plaisirs simples du voyageur mis à rude épreuve.

Le toutou : Lorsque je suis allée vers ces deux bipèdes là, au delà d'un peu d'eau et d'un manque cruel de nourriture, je crois que c'est surtout d'un peu affection dont j'avais besoin.

J'ai vu le jour, il y a quelques mois à peine, sur les hauteurs de la vallée du Whakan. J'y ai fait mes premiers pas face aux grandes montagnes Afghanes... depuis j'erre à la recherche d'un cœur qui m'adopterait.

Peut-être aurais-je eu davantage de chance sur la rive voisine ?

Cette nuit, alors que je frissonnais, je me suis délicatement glissée sous l'auvent en toile et me suis blottie contre l'un d'eux endormi. Délicieuse chaleur !

La bicyclette : Je me demande bien pourquoi ce jeune chiot se fatigue à nous suivre depuis deux jours.

Il gambade à mes côtés, parfois il me devance même lorsque que le terrain fait des siennes.

Dans chaque descente, je l'entends au loin japper et pleurer parce que mes roues tournent beaucoup trop vite pour ses petites pattes.

Le vélocipédiste : Cette petite chienne, arrivée de nulle part, nous a adopté depuis deux jours.

Elle ne semble encore appartenir à personne. Preuve en est, ses oreilles encore intactes. Ici, on les coupe à ses congénères dès leurs plus jeunes âges. Elle a au moins échappé à cette torture mais pour autant je crois qu'elle donnerait tout (y compris ses oreilles !) pour devenir la compagne d'aventure d'un humain.

Le toutou : Je suis toute flagada. Mes cousinets sont tout usés, mes pattes sont bien fatiguées, mon ventre est vraiment vide...

J'ai tellement faim, j'ai si soif et j'ai juste une profonde envie de fermer les yeux, pourtant je me relève, je me secoue et je me remets en chemin après chaque pause.

Je suis tant bien que mal, cette drôle caravane. Pas question de les lâcher d'une semelle !

Un regard, un mot, une caresse et mon cœur est tout rempli de bonheur !

La bicyclette : Voilà maintenant six jours que mes roues tournent sur ce qu'ils appellent la Pamir Highway.

Tu parles d'une route... cela avait pourtant bien commencé, mais peu à peu la route asphaltée a rapidement laissé place à un chemin de terre. On suivait tranquillement un énorme fleuve mais voilà que maintenant on s'élève à vue d'œil sur les flancs de la montagne...

Mon compteur altimètre s'affole...

Le vélocipédiste : Aujourd'hui nous quittons le Whakan corridor et la rivière Panj pour basculer sur l'autre versant de la montagne et rejoindre la classique M41, Alichur puis Murghab.

Sur l'altimètre, ça défile... on prend doucement de la hauteur. La route est loin d'être parfaitement carrossable et il nous faut parfois descendre du vélo, marcher, pousser dans des bancs de sable ou dans des champs de galets !

Grrr le sable... ça fait grincer les dents et cela nous stoppe instantanément !

Le toutou : Malgré les kilomètres qui défilent, je tiens le rythme. Je gambade à côtés de ces deux équilibristes, parfois même je baisse la cadence pour les attendre un peu.

Seraient-ils fatigués, serait-ce le pourcentage élevé de la pente qui les ralentit ou l'altitude qui les assomme ?

Je saute de galets en galets, c'est assez ludique cette randonnée ! Et ce sable est si doux pour mes coussinets meurtris. Un délice, le rythme ralentit et j'ai même le temps de rêvasser un peu : La plage, les cocotiers, une glace à la vanille, une sieste...

La bicyclette : Ces galets sont affreux. Ça ricoche sous mes pneus encore un peu surgonflés, ça cogne dans mes jantes et ces chocs répétés vont finir par me faire mal au cadre !

Quant à ce sable qui bloquent net les roues et fait grincer des mécaniques !

Un grain de sable dans l'engrenage, l'expression est toute trouvée !

Le vélocipédiste : Encore quelques lacets et le col se dévoile enfin : 4300 mètres d'altitude. Bonheur d'avoir grimpé si haut à vélo !

On partage quatre graines, deux photos et trois caresses avec la petite chienne.

Nous arrivons à la fin de notre autonomie en nourriture, au bout de nos réserves en eau. Voilà plus de deux jours que nous n'avons pas croisé un seul village dans lequel on espérait "abandonner" notre jolie boule de poil.

Bientôt la descente du col puis l'asphalte, jamais elle ne tiendra ce rythme effréné...

Le toutou : Deux graines... Ce n'est pas ça qui va remplir mon estomac mais je vois bien qu'ils n'ont rien de mieux à m'offrir. Eux aussi semblent un peu affamés ! Ne vous souciez pas de moi, je peux encore tenir le coup et vous accompagner sur un bout de chemin...

La bicyclette : Place à la descente ! Je sens qu'on se cramponne à mes freins, on lève les fesses de ma selle, on serre mon cadre entre les cuisses et mes deux pédales sont au même niveau. Ça guidonne entre les cailloux mais ça file à bonne allure !

Déjà, j'entends couiner le p'tit chien. Déjà il est loin... ce coup-ci, il semblerait qu'on l'ait perdu !

Le vélocipédiste : On plonge dans la descente avec entrain, on sait que tout au bout, il y a de la vie, de l'asphalte et de quoi manger ! Ça secoue pas mal mais ça reste agréable.

Ce qui devait arriver, arriva... La chienne est vite distancée et nous faisons quelques pauses régulièrement. Un petit point noir au loin qui s'accroche de toutes ses forces !

A chaque fois, qu'elle nous rejoint, elle semble de plus en plus épuisée et finit parfois par se coucher avant même arriver à notre hauteur et tarde de plus à plus à se relever quand nous nous remettons en selle.

Le toutou : Cette descente m'épuise, ça va décidément beaucoup trop rapidement pour moi. Et s'ils partaient trop vite devant, si personne ne m'attendait, si je me retrouvais à nouveau seule dans ce désert minéral ? Je suis tellement fatiguée !

La bicyclette : Qui a dit que les descentes étaient plus faciles que les montées ?Celle-ci est vraiment l'exception qui confirme la règle !

Me voici en train de ramer dans une immense flaque de sable... C'est éreintant !

Le vélocipédiste : Ensablage en règle ! On pousse, on marche, on tire, on s'en met plein les pieds, on grogne...

Ce sable, quelle horreur !

Le toutou : Ce sable ! Quel bonheur ! Ça avance tout doucement...

On y va ou quoi ?! Ce n'est pas à ce rythme que vous rejoindrez ce soir la civilisation !

La bicyclette : Finalement, il y a pire que le sable. Il y a ce sol couvert de vaguelettes qui te secoue pire qu'un prunier. Ça en décrocherait presque une de mes sacoches et ça en ferait presque tomber mon rétro... Quel enfer !

Je vibre de tout mon être ! Il ne manquerait plus que mes soudures lachent ici, on aurait l'air malin, tient !

Le vélocipédiste : Tôle ondulée party ! Les bras tremblotent, les mains sont pleines de fourmis, les dents claquent et les yeux essaient de maintenir le cap !

Oh hé, c'est pas bientôt terminé ce chantier ?!.

Le toutou : J'adore ces petites vagues ! Je rebondis d'une bosse à l'autre et j'ai l'impression d'aller à toute allure, c'est tellement amusant !Je vais plus vite que tout le monde sans me fatiguer plus que de mesure et on avance tranquillement ! Que demander de plus ?!

Un peu plus de tôle ondulée s'il vous plaît !

La bicyclette : Hors de question ! Je préfère encore rouler dans les cailloux !

Le vélocipédiste : Moi aussi !

Tiens un lac ! Ça tombe bien on commençait à terriblement manquer d'eau. Mais pourquoi les berges sont-elles si blanches ?

Le toutou : Morte de soif ou presque ! Je me rue sur cette immense flaque.Trois lapées par ci, deux par là... ce n'est pas très bon tout ça !

Essayons encore là où là bas ou bien par ici... Pareil !

Je rêve ou j'ai encore davantage soif à présent ?!

La bicyclette : Appuyée sur ma béquille, je profite de la pause. La vue est magnifique ! Une succession de lacs, des jolis blocs, des couleurs magiques !

Finalement, tout le monde revient de la corvée d'eau avec sa gourde vide... Étrange.

Le vélocipédiste : Quel piège ! Ces lacs sont salés ! Pour se désaltérer, il faudra encore patienter...

Le toutou : Faim, soif, fatiguée... ce coup-ci, je n'en peux plus les amis ! J'en ai vraiment plein les pattes !

Vous me voyez ?!  J'ai l'air maline là non ?

La bicyclette : Encore une dizaine de kilomètres sur cette piste dont l'état laisse clairement à désirer, c'est usant. J'en ai plein les pédales...

Le vélocipédiste : Rira bien qui crevera le dernier ! Mais que vois-je là ?

Le toutou : Un truc noir, lisse, dur, qui chauffe les pattes... c'est bien la première fois que je vois une chose pareil !

La bicyclette : Asphalte chérie te revoici !

Le velocipédiste : Le goudron, c'est si bon !

Le toutou : La suite est un peu floue... Je me retrouve, par je ne sais pas quel miracle enfouie dans un grand sac jaune. La route défile à toute vitesse devant mon nez sans que je produise le moindre effort !

J'en profite pour admirer le paysage puis assommée de fatigue, je m'endors comme un bébé !

La bicyclette : 5 kg supplémentaires sur mon porte-bagage pour finir cette épuisante journée ! En même temps, je ne peux pas vraiment me plaindre, c'est de l'asphalte et ce n'est pas moi qui pédale !

Le vélocipédiste : Mode "sauvetage de chien" activé ! Encore 20km de goudron et on débarquera notre petite migrante à bon port !

Il fait quasiment nuit lorsque nous débarquons la mini passagère clandestine. Elle sort du sac en frétillant puis s'assied face à ce nouveau spectacle. Nous profitons qu'elle admire toute surprise son nouveau village pour nous éloigner rapidement après lui avoir donné un caresse d'adieu. Une route, des véhicules, des gens, des fermes, des chiens, des épiceries, des poubelles, une rivière et des fontaines... Ça en fait des choses à regarder !

Bienvenue à Alichur !

Le toutou : Il y a tant de bruits, d'odeurs et de choses qui s'agitent ! C'est donc ici que je vais vivre ?

Mince... ils sont déjà partis...

Aujourd'hui était donc le premier jour du reste de ma vie...

La bicyclette : Née dans la Whakan, passé un col à 4300m et grandi de l'autre côté de la montagne à Alichur. Il n'y a que nous qui connaîtront cette petite histoire.

Ce sera notre secret de ce 6ème jour sur la Pamir Highway.

Le vélocipédiste : Ce soir, en me couchant, j'ai le cœur un peu lourd et la gorge toute serrée... C'est fou comme on peut si vite s'attacher à ces bestioles. Néanmoins, on s'endort en ayant la certitude que l'on aura fait notre possible... On se souviendra de cette sixième journée !

Aujourd'hui la Whakan valley, c'est terminé. Une première page du Pamir est déjà tournée...

En souriant, nous nous prenons à penser que, si durant le long périple qui nous attend, nous devions nous faire attaquer par un énième chien, ce ne serait vraiment pas juste !

Karma, quoi ! Je te sauve, tu m'épargnes !

Peut-être qu'aujourd'hui dans cette aventure, nous avons même gagné notre immunité face aux molosses qui aboient et aux crocs qui claquent, qui sait ?!

1
sept
1
sept
Publié le 3 septembre 2022

Douchanbé-Bichkek.

850 km et 10 000 mètres de dénivelé, ça use les mollets !

Croisière en velocipède,TadjikiSTAN-KirghiziSTAN avec virage énergiSTAN par l'OuzbékiSTAN...

PASseports à présenter, PAStèques à déguster.

Grimpettes de cols, bivouacs dans les tournesols,

Interminables lacets ( toujours sans chaussure) pour rejoindre le sommet et enfiler enfin une veste...

Plantations de poivrons, citrouilles, tomates, concombres, pommes, prunes, maïs... cocktail vitaminé, ah les champs !

ASphalte sans AS du volant...

Toujours l'œil dans le rétro si tu ne veux pas finir KO...

Lac menthe à l'eau et collines couleur paille.

Chut... chanvre en train de pousser et fleurs de coton en éclosion !

Chevaux, moutons, vaches en troupeaux, berger en estives, ours et loups à l'affût...

Ruches arc en ciel, abeilles qui butinent et "med" en pot qui attend le gourmand.

Yourtes à gogo et yaourt fermenté pas gégé...

Roulottes sans roue, wagons sans rail, maisons sans voisin.

Camionstop : tunnels tout noir, fumées asphyxiantes , nids de poules et grands coups de klaxons...

Bruyères en fleur, foin en meules, gens en joie, cœurs en fête.

Bières en bouteilles plastiques et pots de glace en papier...

Orages d'étoiles, retour des goutes et des éclairs... plus de deux mois qu'on ne s'était pas fait mouiller le nez !

Montagnes russes, des haut, des bas... un seul panneau dans un sens comme dans l'autre et deux seuls chiffres : 12%. Menu unique !

Soleil levant sous le nez, soleil couchant dans le dos, soleil écrasant au dessus de la tête...

Nuits dans l'herbe et sous la voie lactée, journées au guidon, programme simple du voyageur selleste.

3
sept
3
sept
Publié le 3 septembre 2022

Là-bas au loin, des peupliers qui dansent dans le vent.

Oasis de verdure, oasis de vie dans ce désert de pierres, de terre et sable.

L'eau.

Elle jaillit du captage de la source puis et acheminée par des béals pour enfin être répartie ici et là dans chaque champs. Donner l'eau et donc la vie à chaque lopin de terre, à chaque graine plantée est une préoccupation quotidienne. Une pelle sur l'épaule pour seul outil, de petits bourrelets de terre humide et l'eau circule d'un canal à l'autre, d'une culture à sa voisine...

Sans eau courante dans les maisons, la fontaine du hameau est un lieu névralgique, point de rencontre, de partage, de vie. On y remplit ses seaux, on y lave ses patates, on y fait sa lessive, sa vaisselle, on y boit une gorgée en passant à proximité, on s'y retrouve pour discuter, on s'y amuse. Des fois même, on y observe, curieux, des voyageurs y remplir leurs gourdes ou s'y asperger.

Des murets en pierres sèches soutiennent ou délimitent les parcelles et des jardins parfois tout fleuris. Ils servent d'enclos à quelques animaux qui pâturent. Ici et là, des véhicules délabrés, souvent à l'état d'épaves dont on se demande par quels moyens ils sont arrivés jusqu'ici.

Des enfants qui jouent quand ils ne vaquent pas aux mêmes tâches que les adultes.

Des habitations basiques en terre sèche aux petites ouvertures et de formes rectangulaires. Sur leurs toits plats, du foin qui sèche ou les abricots de l'année, étalés sur des nattes, attendent que le soleil fasse son œuvre.

A l'ombre de la végétation, des plates-formes en bois ou en métal couvertes de matelas colorés et garnis de cousins fleuris offrent un repos mérité.

Parfois une petite boutique. Cela peut être l'épicerie au comptoir bien agencée où l'on trouve presque tout, excepté fruits, légumes, pain, viande et fromage ! Avec un peu de chance, un réfrigérateur en état de marche et une boisson allant de tiède tirant sur le chaud à bien fraîche.

Parfois le "magazine" est une simple petite pièce ouverte à la demande où l'on ne trouve presque rien. Des denrées posées à même le sol, mélange de sable et de gravier. Deux cartons ouverts de biscuits en vrac se remplissant de poussière, une bouteille d'huile, quatre paires de chaussures d'enfants et trois cahiers d'écoliers. En insistant un peu, on vous dénichera sûrement un paquet de pâte ou de riz sortis d'on ne sait où !

Depuis les champs, les jardins, l'entrée des maisons, des mains se tendent, des "salamalekums" s'élèvent.

Et toujours cette même question : "Atcouda ?" ... D'où venez-vous ?

Évidemment, d'où peut-on bien arriver à deux roues... De l'autre bout du monde peut sembler si surréaliste. La curiosité n'est alors pas un vilain défaut. Elle ouvre au monde et élargit l'esprit.

Pour ceux qui n'ont pas la chance de pouvoir bouger c'est alors un peu le monde qui vient à eux, comme par magie.

Les invitations au thé sont nombreuses et nous ne pouvons pas toutes les honorer.

Assis sur des tapis, autour d'une table basse sur laquelle trône la théière fumante, un peu de pain, parfois même une soupe ou quelques abricots, la discussion se poursuit.

Elle est entravée par la barrière de la langue mais à l'avantage d'aller très vite à l'essentiel sans détour et sans gêne.

Ici avec les gens du Pamir, dans le train au Kazakhstan, avec les marchands de pastèques en Ouzbékistan, lors de pauses en Arménie ou en Géorgie, avec les Turcs croisés et j'en passe, c'est à très peu de chose près le même déroulé à chaque fois. Je laisse souvent Bruno répondre car c'est en général les hommes que l'on salut, à qui l'on serre la main et à qui l'on s'adresse.


Dessins à l'aide d'un bout de bois ou du doigt dans la terre, gestes et mimes sont de rigueur.

Sans fausse hypocrisie, les regards et expressions du visage parlent d'eux-mêmes à chacune des réponses.

Ton âge ? 54. S'en suit un geste pour dire que tu sembles plus jeune.

Et elle ? 34. Une légère incompréhension raye le visage...

Mariés ? On fait dans un premier temps mine de ne pas comprendre la question.

"Copine". A leur tour de faire semblant de ne pas comprendre. Le traducteur est sorti mais la traduction ne semble pas les convaincre.

Quand cela devient un peu insistant, on cède : Da, da... mariés.

Enfants ? 4. Illico, on me montre à nouveau du doigt.

Non, une autre femme.

Un regard méprisant s'en suit à moins que ce soit celui de la pitié, peut-être différent d'ailleurs qu'ils s’agissent d'une femme ou d'un homme. Dans tous les cas, on ne me considérera plus du tout dans la suite de la conversation.

Leur âge ? Il ne sait pas. Ça change tout le temps !

Tu vas où ? Par là !

"Paca paca !"


Bien que redondants et quelque peu intrusifs, ces échanges me confortent dans l'idée qu'être curieux, qu'aller vers l'autre et que s'intéresser à comment il vit à l'autre bout de la planète, est bien dans la nature humaine. L'indifférence n'est donc pas généralisée et c'est une bonne nouvelle.

Ces réactions spontanées et sans filtre me permettent néanmoins de comprendre un peu mieux pourquoi si loin, ailleurs, chez nous, on considère si peu "la copine" de second choix... Comme quoi, sans parler la même langue, je peux presque mettre des mots et appréhender un peu mieux ce malaise.

Il m'aura fallu traverser un bout de continent, pédaler des heures, des jours, des semaines et des mois. J'aurais vu défiler ces paysages, il m'aura fallu faire toutes ces rencontres pour cerner cette "non place", ce "rien" de la famille...


Nous quittons alors le village avec des enfants qui courent à nos côtés, qui expérimentent leurs quelques mots d'anglais ou qui nous accompagnent sur un bout de chemin, sur leur vélos déglingués...

Insouciance de l'enfance, bonheur partagé d'équilibristes !

Ça rend le cœur un peu plus léger...


Quelques dizaines, parfois quelques centaines de kilomètres de solitude et d'effort avant d'apercevoir à nouveau là-bas, au loin... des peupliers qui dansent.

Ce qui est bien avec les peupliers, c'est qu'ils ont beau onduler, il savent garder leur ligne et rester droits comme des "i".

Ce qui est sûr aussi, c'est qu'il y aura toujours du vent et que quoiqu'il arrive les peupliers danseront toujours.

6
sept
6
sept
Publié le 6 septembre 2022

C'est en poussant les vélos dans ces galets du Pamir que l'on a passé les 3000km... glorieux non ?! 😅


Au moins, on use un peu moins les pédales !


Et c'est en pédalo... euh en pédalant au lac Issy Kul qu'on a passé le cap des 4000 !

3
sept
3
sept
Publié le 9 septembre 2022

Bichkek !

En fait, je viens de me souvenir que j'avais déjà fait du vélo une fois dans ma vie dans tes rues !


En mémoire, me reviennent aussi cette folle équipe du Groupe Excellence d’Alpinisme National de la FFCAM , ces jolies longueurs de granit fissurées sous la neige, ces hauts sommets du Pamir et cette épique fin de soirée avec des flingues braqués devant notre nez !


Un peu de lecture de cet épisode Kirghiz qui date déjà un peu par ici :

https://laraamoros.blogspot.com/2014/10/expe-pamir-episode-1-visa-pour-laventure.html?m=1


Là pour la grimpette :

https://laraamoros.blogspot.com/2014/10/expe-pamir-mission-tour-russe-episode-2.html?m=1


Et aussi ici pour la fiesta et l'after au poste :

https://laraamoros.blogspot.com/2014/11/expe-pamir-tout-est-bien-qui-fini-bien.html?m=1

9
sept
9
sept
Publié le 10 septembre 2022

Un quatrième mois sur la route c'est :


◇ 9 pays 🇮🇹 🇬🇷 🇹🇷 🇬🇪 🇦🇲 🇰🇿 🇺🇿 🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬


◇ 4253 km 🚲


◇ Des cols qui grimpent fort 🥵


◇ De belles rencontres toujours 🍀


◇ Une capitale 🗽, une fête nationale 🎉


◇ Des bazars 🛒


◇ De chouettes découvertes 🧐


◇ Des paysages magiques 🌄


◇ Du camion et du bus-stop 🚛


◇ Des bivouacs au bord de la nationale, dans les champs et au bord des rivières 🛣


◇ Échec de Visa Russe ❌, Visa Indien réussi ✅ et un changement de direction ⤵️


◇ 1007 chevaux 🐎, 876 moutons 🐑, 764 vaches 🐄,  37 yaks 🦬, 5 chameaux 🐫


◇ Des champs 🍅🥒🌶🌿🌽🍉🌻🌾


◇ Des yourtes 🛖


◇ Des wagons 🚃


◇ Des jolis lacs 🏞



◇ Des petits dessins ✏


◇  Un orage 🌩


◇ Du repos 😴


◇  10 kg de pastèque 🍉


◇ Du lait de jument fermenté 🥛


◇ 15 (petites) glaces chacun🍦


10
sept
10
sept
Publié le 10 septembre 2022

Aujourd'hui, on plonge dans le carnet de voyage pour illustrer ces lignes... Bienvenue !

Le 10 000 bornes, le jeu qui fait mal aux mollets... et parfois aussi aux méninges !

En rejoignant Bichkek, on accroche à notre tableau de cyclotouriste, notre sixième entrée dans une capitale sans se faire écrabouiller.

Après quelques tours de chauffe à Athènes, Tbilissi, Yerevan, Tachkent et Douchanbé, on commence à négocier à merveille le trafic citadin aux heures de pointe : minibus, camions de livraison, bus sur cable, taxis, quelques vélos, motos et voitures de gens pressés.

Toujours est-il qu'ici, on reste aussi parfois bien sagement sur le trottoir... S'offre alors à nous, une belle partie de slalom entre les piétons qui marchent de travers en regardant leur portable et ceux qui ont des écouteurs dans les oreilles n'entendant pas les sonnettes. Il y a aussi les poussettes, les enfants qui jouent, les personnes âgées qui tentent d'avancer, les bébés qui apprennent à marcher, les handicapés en fauteuil, les marchands de fruits et légumes installés sur les trottoirs, les arbres, les bouches d'égout sans plaque, les caniveaux profonds, les poteaux et les grilles avec des fentes bien ajustées, pile à la largeur de nos pneus...

Autant dire que l'on n'a pas le loisir de flâner le nez en l'air.

Bref, retour sur la case "grande ville"... Une capitale, le jour de la fête nationale en plus...

Bon, pour être honnête, en ce 31 août, à part quelques drapeaux qui flottent et un peu de musique le soir, il ne se passe pas vraiment grand chose. Je crois bien que Lénine ne se retournerait pas dans sa tombe s'il voyait cette fête de l'indépendance !

La véritable fiesta, c'est plutôt tous les jours au grand marché de Bichkek.

Faire un tour de vélo aux alentours du Osh Bazar c'est comprendre véritablement le vrai sens du mot "bazar"

Y a-t-il quelque chose qui porte aussi bien son nom ?

Au bazar, il faut se faufiler entre les piétons chargés de commissions, éviter les pastèques qui traversent, se méfier des livreurs en chariottes, des bagnoles qui nous reculent dessus, des étals qui envahissent la route... ça grouille de partout et on vient nous-même, avec nos deux roues et nos trajectoires quelque peu aléatoires, apporter notre part d'eau à ce drôle de moulin !

Mais ce n'est pas dans ce grand marché que notre voyage prend un nouveau virage mais devant l'ambassade de Russie.

Pénétrer dans l'enceinte de l'ambassade sans rendez-vous semble au moins aussi compliqué que vouloir sortir d'un goulag.

Une fois à l'intérieur, tout semble étonnamment simple comme bonjour, enfin disons plutôt, simple comme "priviet".

Mais arracher un sourire ou un "priviet" à un russe n'est pas toujours aisé. Les choses se compliquent...

Infos contradictoires et voucher (lettre d'invitation) hors de prix...

Bref, c'est la retraite de Russie !

Bilan des opérations : Impossible de faire une demande de visa hors de son pays de résidence.

On patine quelques jours sur la case "réflexion".

Vous vous demandez comment font donc les voyageurs qui sont loin de chez eux depuis des mois ?

Ligth is rigth, ils allègent sacrément porte-monnaie ! On est toujours mieux à voyager léger.

Une agence qui gère toute la paperasse pour eux, des passeports qui font un aller-retour en France grâce à un transporteur privé.

Agence+envoie du passeport+voucher+prix du visa = environ 400€ !

Le visa Russe, c'est niet ! On laisse passer notre tour.

C'est comme ça que nos rêves de rejoindre le bout du continent asiatique par voie terrestre (en passant par le Kazakhstan, la Russie, la Mongolie et re par la Russie) s'envolent... C'est le cas de le dire !

Alors que nous sommes un peu perdus, le jeu prend une nouvelle direction inattendue.

Nous avons la possibilité de jouer deux fois d'affilées. Je pioche la carte "voyage dans les airs".

Bruno reçoit, lui, la carte "destination". Sur celle-ci, nous lisons d'une même voix : "Rendez-vous chez les indiens !"

Ah chouette, l'Amérique du Nord, on va ressortir les chaussons d'escalade et les gants de fissure !

Non, non...pas les indiens avec des plumes et des tipis ! Les indiens d'Inde.

L'Inde...

Peut-être un des seuls pays où je ne m'étais jamais imaginée aller pédaler.

L'Inde...

Ça grouille de monde, c'est bruyant, il fait chaud et humide, les odeurs fortes, la saleté, les castes, la nourriture épicée, le trafic, les singes...

L'Inde, c'est dur, c'est rude.

L'Inde ce n'est pas les vacances.

L'Inde à vélo, c'est chaud.

L'Inde... s'en faire sa propre idée.

Quelques appréhensions déjà mêlées à la curiosité de découvrir tout ça, de mes propres yeux, par mes propres narines, papilles et oreilles...

À la fois un peu peur et à la fois hâte de découvrir ces indiens et ce "nouveau monde".

Aussitôt un nouveau défi s'offre à nous, se mettre en quête du graal du cycliste téléporté : le carton à vélo.

Ce précieux trésor de papier est l'objet de toutes les convoitises et fait circuler bons nombres de rumeurs chez les cyclos.

"J'ai lu dans le journal que deux bike box auraient été aperçues vers tel hôtel."

"Mais on me dit dans l'oreillette, qu'une aurait déjà disparu."

"J'ai entendu dire qu'il y en aurait dans ce bikeshop.

"Non, impossible. Le magasin est minuscule, pas de place pour des cartons."

"Allez voir du côté de ce bar, il y en avait la semaine dernière."

"Des cartons auraient été abandonnés suite à une course cycliste."

... les mecs viennent faire une course au Kirghizistan et repartent sans leurs vélos ?!?

Billets d'avion en poche, la chasse aux cartons est ouverte !

Bingo, ils sont toujours là, dans l'enceinte du jardin de ce bar à l'autre bout de la ville. Sauf que le portail est fermé. Quelques pas de varappe, une traversée au dessus d'un chien plutôt vénère, un p'tit saut et Bruno en déniche deux d'un coup.

Bien joué ! Droit de rejouer !

Doublé gagnant, nous nous retrouvons avec deux visas indiens en poche.

Reste plus qu'à s'envoler le 11 septembre... (Une bonne date pour embarquer dans un avion, vous ne trouvez pas ?!)

India nous voilà, Delhi nous voici !

Que la partie continue !

12
sept
12
sept
Publié le 11 septembre 2022

Une balade en images au pays des montagnes, des yourtes, des chevaux, des chapeaux en feutre, des foulards fleuris, des bonbons au fromage, des ruches en roulottes, des gros raviolis, du plov et du lait fermenté...

Bref... mieux que des mots, des images !

Ici, pas de nomades mais des saisonniers. L'été, on le passe en estive.
Les troupeaux broutent l'herbe verte, les yourtes, roulottes, wagons, tentes et containers fleurissent un peu partout !
Bivouac 5 ☆
L'automne pointe son nez... on aura vu défiler des milliers de bêtes qui descendent des alpages...
Le pays du cheval et des cavaliers....
Et ça maîtrise la discipline dès le plus jeune âge !
Finalement, en voyage, on est rarement seuls.
Bienvenue au bazar...
Bonbons au fromage (!!) hyper secs...
Pourtant dans "bonbon", il y a deux fois "bon" !
La partie sommitale des yourtes est tout un symbole. On le retrouve même, entouré d'un soleil, sur le drapeau du pays.
Les mantis, raviolis géants cuits à la vapeur.
Plov, plov, plov... plat traditionnel, riz, carottes, oignons, viande, pas mal d'huile et parfois des pois chiches et des raisins.
Samsas, chaussons à la viande cuits sur les parois de fours en terre sèche...
Cimetière typique...
Tombes en terre sèche
... Et yourtes métalliques, parfois miniatures.
Le souvenir de l'Urss n'est jamais loin...
... la Chine non plus !
Ruches ambulantes, abeilles voyageuses...
Et pour finir, un biscuit et un petit mot doux parce que ça fait toujours plaisir !
16
sept
16
sept
Publié le 16 septembre 2022

Kim, le cyclonaute dit :

"Pamir is the moon. Ladakh is like Mars."

Sans autre explication, sans autre précision... Quelles seront les impressions de deux cosmonautes à deux roues ?

Le Pamir était magique, pur, désertique, magnifique et d'une simplicité basique.

Le Ladakh en est tout proche en terme de paysages mais ici il y a de la vie ! Des couleurs éclatantes et des sons qui éveillent. Il y a des artisans qui créent. Il y a de l'art et de l'esthétisme. Il y a des goûts qui attisent les papilles.

Que le Pamir, que les pays en "stan" nous paraissent à présent bien tristounets à côté de cette explosion de couleurs.

Une lune immaculée qui observe passer le temps, subit les assauts du climat et la rudesse du milieu sans broncher.

La nuit, nous étions comme des particules de la voie lactée. Le jour, on courbe le dos et on regarde défiler les saisons.

Mars est tout autre, plus solaire, plus éveillée, plus créative, plus subtile, plus espiègle. Inévitablement le milieu met, ici aussi, le voyageur selleste à rude épreuve. L'eau est une denrée rare et les pics n'offrent de passages sur leurs flancs qu'à plus de 5000 mètres d'altitude !

Malgré l'hostilité apparentes des éléments, l'humain a semble-t-il davantage investi les lieux et y a créé quelques cocons réconfortants, lumineux, colorés...

Quel bonheur de se balader dans cette étrange galaxie minérale !

Quelle chance de pédaler d'un astre à l'autre !

17
sept
17
sept
Publié le 17 septembre 2022

Les vacances en guise d'acclimatation...

Repos, balade dans les dunes et un grand tour de moto au pays des "Royal Enfield".


250 km, 4000m de dénivelé, un col à 5300m, conduite à gauche, trafic banzaï, pistes, retour de nuit... 9h30 en mode "Easy rider" !!!

Croyez le ou non, nous étions, au final, bien plus rôtis qu'après une journée de vélo !!

Maintenant, que nous avons des globules plein les sacoches, nous sommes prêts à nous lancer dans la traversée du Ladakh à vélo !


C'est reparti pour quelques semaines hors du temps et loin de tout !

29
sept
29
sept
Publié le 30 septembre 2022

Ce n'est un secret pour personne, en septembre, c'est le grand retour à "les cols".

Habituellement, on tire un peu la tronche et on traîne un peu les pieds.

Oui mais voilà, ici, l'école est belle. La cour de récré est sublime et les petits camarades, à l'exception d'un, sont tous des petits nouveaux. Que de nouvelles surprises à découvrir !

L'été semble déjà loin. L'automne pointe son nez. On remballe les shorts et les tongs, on sort les doudounes et enfin... on va même enfiler des chaussettes !! On réorganise sa trousse :

- De réparation, avec quelques rustines en cas de coup de mou.

- De secours, avec un peu d'aspirine, en cas de MAM (mal aigu des méninges).

On change également le rétro de côté. Ici, c'est à gauche qu'on circule !

On affûte ses mollets, on recompte ses sommets, on remet le nez dans le grand atlas du monde, on refait la pression et c'est gonflé à bloc qu'on attaque cette nouvelle année !

Petit cours de géographie pour ouvrir le bal : "Ouvrez vos manuels au chapitre Inde !

"Consignes de l'exercice : Rechercher une région montagneuse du pays, faiblement peuplée, où vous pourriez imaginer circuler à vélo sans risquer de vous faire aplatir, où vous pourriez bivouaquer tranquillement et profiter de paysages incroyables.

Pensez également que le climat doit être adapté à cette période de l'année !

Le Ladakh !

Ici, sur la carte, tout au nord ! Région de l'union indienne à l'altitude moyenne la plus élevée, 4,6 habitants au km², de nombreux cols routiers culminant à plus de 4500 mètres.

Ça peut faire mais il ne faut pas traîner, la neige va bientôt arriver !

Le retour à l'école, ce n'est pas toujours agréable et comme pour tout changement brutal, il faut bien quelques jours pour s'acclimater, se remettre dans le bain, pour ainsi dire. Surtout quand la baignoire est haut-perchée à près de 4000 mètres d'altitude. Ici, les bulles de savon d'oxygène ont plus de mal à prendre leur envol.

Dès les premières heures de classe, c'est mal de crâne généralisé pour tous. On opte donc tout naturellement pour une leçon de SVT, thème physiologie du petit corps de l'homme sur les hauts sommets.

Problématique: "Que se passe-t-il quand, début septembre, on passe de la plage, altitude 0, à la salle de cours située entre 4000 et 5000 mètres d'altitude ?

"A vos hypothèses !"

C'est parti pour une série d'expériences en tout genre, avec Leh et ses alentours comme laboratoire. L'un propose de courir pour monter jusqu'au grand monastère situé tout en haut de la colline surplombant la ville pour y observer le soleil couchant et voir ce qu'il se passe. Axphysie garantie.

Un autre propose de boire des milkshakes à la banane, de manger des croissants et de faire des siestes... on aura largement le temps de se fatiguer plus tard !

Une autre proposition consiste en une méthode d'acclimatation motorisée. Le protocole est relativement simple : il s'agit de monter très vite en altitude (5300m) d'en redescendre aussi rapidement puis d'y remonter pour enfin en redescendre en nouveau, complètement épuisés après avoir parcouru 250km et passé plus de 10h au guidon d'une Royal Enfield.

Confrontation des hypothèses, l'une d'elles semble se vérifier ! On retient aussi que chaque petit être a son fonctionnement bien à lui. Ne pas brusquer les choses, prendre le temps, ne pas trop forcer, faire comme on le sent, s'adapter au rythme de chacun semble être la meilleure recette. Vive la méthode Freinet et la pédagogie différenciée !

Il est temps à présent de faire marcher un peu ses mains et son sens pratique. Classe de technologie :

Mécanique et remontage des vélos alors démontés et enfermés dans de grands cartons après un voyage dans un avion en papier. "Le guidon par ici, les pédales par là... la pédale gauche, le sens est inversé. Eh, t'as pas vu ma selle ? Tu me passes la clé de 13 ?"

Temps calme... petite session de phonologie : on frappe les syllabes. LA-DAKH. Deux syllabes. Bien.

Et si on faisait un peu de sémantique. Prenez votre dictionnaire Ladakhi, que signifie "la" ?"Baralacha La", "Kardung La", "Taglang La", "Lachung La", les exemples ne manquent pas... "La" signifie "col".

Le Ladakh serait-il donc le pays des cols ??

Des cols oui mais aussi des colliers de turquoise.

A vos cartes, on va imaginer un petit parcours afin de jouer tous ensemble à saute-cols ! (...les moutons aillant tous été bouffés par la panthère des neiges...)

La highway Leh-Manali agrémentée de quelques variantes semble l'itinéraire parfait. Remonter le fleuve Indus sur quelques dizaines de kilomètres, puis gravir le "Namshang La 4960m" pour aller découvrir le lac de Tso Moriri, revenir sur ses pas, puis passer le "Polokongka La 4970m" pour rejoindre la route classique et grimper jusqu'en haut du "Lachung La 5100m", du "Nakee La", débarouler les vingt et une épingles des "Gata loops", regrimper le "Baralacha La" pour enfin se laisser glisser jusqu'à Manali. Sur le papier, c'est un bel itinéraire et chouette programme !

Dans les faits... C'est parti pour un peu de mathématiques. Additions, soustractions, conversion pieds-mètres pour savoir combien de kilomètres et de mètres de dénivelé, il va falloir empiler pour aller boire un chocolat chaud à Manali !

595 km et 7330 m de dénivelé et une dizaines de jours à plus de 4000 mètres d'altitude. Rien que d'y penser, vous êtes déjà fatigués ?!

Aller... Pause ! Ah oui... Ne cherchez pas la cantine. Ici, il vaut mieux avoir quelques chapatis dans son cartable et vous comprendrez vite qu'il faut manger n'importe quoi, à n'importe quelle heure et profiter simplement de l'occasion gastronomique qui se présente.

Les ravitos sont peu nombreux, les épiceries inexistantes et c'est ainsi que l'on se retrouve à manger une soupe chinoise à 9h du matin, à manger trois biscuits à midi, un dal à 16h et à se coucher le ventre à demi rempli à 19h alors qu'il fait déjà nuit noire.

Les soirées sont plutôt longues et obscures mais cela laisse le temps pour effectuer les devoirs du soir à la frontale. Lectures en tout genre : Bruno prend de l'avance, toujours plus à l'Est, il plonge dans la littérature Japonaise.

Quant à moi, à 4500m en ce début d'automne, je gèle ! Je tente donc de me réchauffer avec la meilleure bouillotte dans mon duvet : "D'un volcan à l'autre" et les aventures aussi farfelues que torrides de Guy de St Cyr.

Séance d'écriture également pour que vous puissiez lire justement ces quelques lignes. Des lignes et des heures de cols... à peu de chose près on pourrait croire qu'on enchaîne les punitions, il n'en est rien ! Sages comme ces belles images...

Les sujets du cours de dessin sont très nombreux et les pages du carnet se remplissent à vue d'œil.Ici, l'art est partout. Les couleurs vives explosent, l'architecture en impose, les paysages inspirent et la calligraphie intrigue. Tout est prétexte à un coup de crayon.

Ça griffonne, ça pinceaunne et quelquefois ça gomme... Quel bonheur d'avoir emporté ces pages de papier, je rayonne !

Au cours de langue, après une fin d'année en compagnie du prof de russe, c'est le grand retour du prof d'anglais. Encore un qui vu mes talents va s'arracher quelques cheveux. Peu importe, à l'interro, je pomperai sur le camarade Bruno ! Ici encore, langage des signes et sourires font le job à merveille et puis les Ladakhis ont tout compris, un seul mot pour trois choses. Bonjour, Au revoir, Merci = "Julley".

Enfin après la torture du cours de langue, vient enfin l'heure de mon cours préféré : le cours d'éducation physique.

J'ai, par le passé, souvent trouvé qu'on ne bougeait jamais assez en cours d'EPS, qu'on ne prenait pas assez l'air et qu'on en ressortait tout compte fait, pas si fatigués !

Ce coup-ci, je suis servie ! Sûr que si on me collait à la suite un cours de français, je m'endormirai sur mon plumier. D'ailleurs, à ce sujet, vous remarquerez que j'ai fait l'impasse sur le cours de français à cette rentrée. (Pour une fois qu'on a l'opportunité de choisir son emploi du temps, il ne faut pas s'en priver !)

Au cours d'education physique, on donne tout ! Ainsi chaque jour, ça pédale, ça mouline, ça trialise entre les cailloux, ça maintient l'équilibre dans la boue et ça zigzague entre les flaques.

Ça joue à cache-cache avec les camions et à trap-trap avec les motos, ça se balade sous les flocons, ça grille sous le soleil d'altitude, ça lutte à contre vent, ça tétanise sur les manettes de freins ou ça force sur les pédales et parfois ça pousse !

On a beau passer des heures et des heures sur nos vélos, l'ennui n'arrive jamais. Ici, il y a toujours quelques choses à regarder !

Des décors incroyables, des villages animés, des ouvriers qui travaillent, des geysers d'eau bouillante, des nuages qui envahissent brutalement le ciel, des lacs turquoises, des chevaux sauvages, des cols enguirlandés, des motos chargées et des camions joliment décorés.

Des ponts délabrés, des épingles à compter, des routes taillées dans la parois, des cérémonies bouddhistes, des falaises géantes, des mouflons, des murs à mani et leurs beaux cailloux gravés, des tentes et un tchaï fumant.

Des rivières bleues, des sourires et des "juley", des cheminées de fée, des moulins à prières gigantesques, des cailloux peints, des bornes kilométriques et humoristiques.

Devant chacune d'elles, on pourrait aisément s'installer, assis en tailleur, pour philosopher un peu...Écrit noir sur jaune, certaines formules sont de vraies pépites... Inspirée la DDE locale !

Enfin quand il s'agit de l'heure du cours d'education civique et de découverte des religions, il suffit d'oser pousser la porte...

Battements de tambours qui donnent la mesure, son de voix guturale, cors qui retentissent, symbales... Nous voici comme deux petites souris dans un coin de cette pièce aux mille détails, aux mille recoins et aux couleurs éclatantes.

Des moines vêtus de teintes prune et safran, concentrés à leurs tâches nous ont à peine aperçu passer la porte. Ils lisent des prières, jouent d'un instrument, reçoivent des offrandes... se marrent aussi parfois.

Ces drôles de cimagrés s'enchaînent, tout semble rodé, codifié, ordonné, chaque détail semble avoir son importance, les accessoires sont nombreux, de la nourriture circule, des statuettes sont installées au sol, puis des tissus blancs étendus ça et là. On sort le gros coquillage qui produit un son de corne de brume, puis vient le moment de l'eau chaude puis du thé, enfin de la pause... Et puis ça reprend, cela dure des heures et des heures...

Certains religieux paraissent imperturbables, d'autres un peu éprouvés, d'autres ne pensent, semble-t-il, qu'à s'amuser avec leur voisin, puis tous se ressaissent et la cérémonie suit son cours de longues minutes encore... Quel spectacle !

La récitation à apprendre par cœur pour demain est simple, 6 syllabes : "Om, ma, ni, padme, hum".

Enfin comme à chaque rentrée des classes, c'est la même rengaine : les poux sont de retour ! Comme d'habitude, on ne sait jamais d'où ils viennent, qui les a ramené de ses vacances et qui ne fait pas son petit shampoing à la lavande ou au vinaigre pour s'en débarrasser.

Ce coup-ci, c'est sur ma tête qu'il font une partie de foot. Ça galope, ils ont l'air de s'amuser comme des petits fous ! Sport-étude les mecs !

Bientôt le retour à la civilisation, la dégringolade à 3000 mètres d'altitude, le retour des restaurants, des arbres, des chauffards, de la douche... les vacances ? Déjà deux semaines dans cette cour de récréation géante.

A coup sûr, c'est mon retour à "les cols" préféré !

7
oct
7
oct
Publié le 7 octobre 2022

Leh. Monastères accrochés à la montagne, drapeaux à prières dans le vent qui flottent au- dessus d'une rue piétonne, stuppas blanches, moulins à prières gigantesques, marchés de réfugiés tibétains sur fond de chant du muezzin...Transportés ailleurs pour notre plus grand bonheur...

L'Indus. Qu'il est émouvant de voir un grand fleuve mythique presque à son commencement. On est bien loin de l'immense fleuve qu'il deviendra. Ici, l'Indus est une rivière tranquille qui pourrait être assez facilement traversée !

On l'imagine ensuite cheminer sur des centaines de kilomètres, ralliant à sa cause chaque filet d'eau, chaque ruisseau, chaque torrent et chaque rivière, faisant d'eux ses affluents.

Méandres et lit immense, on l'imagine alors devenir le très grand fleuve qui traverse des régions entières, croisant de grandes villes et se polluant inexorablement, en chemin...

 Plaine de l'Indus...

Sur la route, des sourires, des colliers de turquoises, des tabliers de toile épaisse rayée, des yeux bridés et des "julley julley" qui s'envolent. Au mur, des portraits du Dalaï-lama aux côtés de Shiva ou de Vishnu. Des drapeaux tibétains qui flottent librement.Il y a des airs de Tibet dans ce coin de L'Inde.

Au volant des Tata, au guidon des motos, une pelle à la main dans un fossé, des visages à la peau plus foncée, au trait plus fins, aux yeux noirs persans. Travailleurs et touristes indiens, saris colorés et turbans.

Au loin, le chant d'un muezzin qui s'élève, les hommes qui se hâtent, les femmes qui disparaissent sous les voiles...Il y a des airs d'Inde dans ce "petit Tibet"...

Ladakh. Comme un bout de Tibet en Inde, comme un morceau de Tibet sans chinois, comme une sorte de Népal sans business...

Pays de hauts cols et de grands sommets, de plaines désertiques et de vents, de lacs et de torrents, de neige et de cailloux, pays où bouddhisme et islam se partagent l'esprit des gens, saupoudré d'une légère dose d'indouisme.

Ici, sur le bord de la route, un mur à mani et ses gros galets, ses belles ardoises faisant office de parchemins sacrés.

"Om mani padme um" gravé dans le minéral. Qu'y a -t -il de plus éternel qu'un rocher ?

Ici, la même formule répétée ou là, un grand bouddha coloré peint à même la falaise.Des murs de pierres séparant les parcelles, des maisons de terre aux toits plats, des bouses séchées et des racines pour se chauffer ou pour cuisiner.

La route, parfois de terre et de poussière, des fois de galets, quelquefois de tôle ondulée, souvent de goudron... l'asphalte gagne chaque jour davantage de terrain. Ça bosse dur et partout. Machines en marche, goudron en fabrication, ouvriers qui y mettent toute leur énergie et offrent un bout de leur vie pour ce tronçon.

Campements en bord de route sous de simples bâches, coup de pelle, chargement de cailloux à la main dans des bennes, dures conditions de travail, visiblement sept jours sur sept et probablement payé une misère... Travailleurs jeunes, venus du sud du pays.

.. C'est fou comme chaque partie du monde trouve sa main d'œuvre bon marché... et vient-il toujours du sud ce vivier d'ouvriers ?Esclaves des temps modernes, ça en a tout l'air...

Ces gros camions comme principaux compagnons de route. Des Tata colorés, décorés, aux mille détails à découvrir. On pourrait rester planté, là, des heures à observer sans en avoir vu chaque recoin.

Et que dire de l'intérieur de la cabine... La déco est plus que chargée et le confort au rendez-vous...Leurs klaxons aux mélodies inspirées rebondissent sur les murs de ce canyon annonçant l'arrivée d'un convoi coloré et bruyant.

Petites phrases bien placées, c'est ainsi, que l'on peut lire sur l’arrière d’une benne : "Vas -y, champion, teste ton airbag ici !"Rarement, ils nous frôlent, la plupart du temps, ils s'écartent, respectueux et solidaires des routiers, à deux roues, que nous sommes.Nos montures semblent bien fades à côté de toutes ces couleurs. On rêverait parfois d'être équipés d'un pareil klaxon !

Souvent, nous avons droit à leurs encouragements, à leurs saluts et à leurs gros nuages de poussière qui nous avalent et dans lesquels on disparaît presque tout entier !

Le ciel d'altitude, limpide, pur, intense, bleu cobalt tranche sur le caillou qui est partout. En un coup d'œil, il se charge de nuages et laisse échapper quelques gouttes, parfois quelques flocons qui tourbillonnent...

Les sommets se nimbent alors d'une couverture blanche qu'ils garderont les jours suivants. L'hiver arrive, les cols ferment puis reouvrent avant d'hiverner finalement jusqu'au printemps suivant.

Même programme pour les grosses marmottes qui profitent encore et gambadent sous le soleil d'automne.Et les Wild asses, ces chevaux sauvages tibétains, où vont-ils passer l'hiver ? Avec leurs ventres blancs, on les repère facilement !

Ici, des Blue sheeps, ces espèces de mouflons, broutent sous les flocons qui tournoient, sans nous prêter attention.

Et ces paysages... Vastes étendues de roches croustillantes, lacs couleur menthe à l'eau, grosses montagnes de meringue.Élégamment plantées ça et là, des cheminées de fée... Magique !

Dans ce monde minéral, je suis comme immergée au cœur de la fabuleuse "panthère des neiges". Immenses pierriers ocres, petites barres rocheuses, arêtes déchiquetées, canyons secrètement masqués par les reliefs, ébauches de grottes, de baumes, d'abris, d'arches, de piliers verticaux... Perchoirs pour observer, vires pour se reposer...

Je pense à elle, reine du camouflage. Il me plait de me dire qu'elle pourrait être partout autour, dissimulant son pelage sans difficulté, noyée dans ce rocher...Qu'elle puisse être là, quelque part, majestueuse et immobile, sur un promontoire rocheux, cette idée me ravie.

Évidement j'adorerais l'apercevoir mais je crois que ce qui me réjouis d'autant plus, c'est qu'elle puisse être là à nous observer sans que nous le sachions, sans que nous la voyons, sans même que nous nous en doutions. L'ordre des choses rétablis. La suprématie du sauvage. Nous sommes bien comme deux intrus qui nous baladons dans cet univers qui n'est définitivement pas le nôtre...

Encore quelques coups de pédales durement donnés. La barre des 5000 mètres n'est plus très loin, parfois même, elle est franchie. L'air se fait moins riche, le vent joue avec nous. Il nous souffle dans le nez, nous malmène en nous faisant zigzaguer. Le froid rougit les joues et glace nos doigts...

Parfois l'asphalte n'est plus ou n'a jamais été. Des galets et des flaques ont envahi la route et pris possession des lieux. Le passage est étroit. On se fait bousculer au sens figuré par des coups de klaxons bien appuyés, mais rarement au sens propre... quoiqu'en se faisant parfois généreusement éclabousser aux abords des grandes flaques... Le propre est tout relatif !

Le col est franchi. Les drapeaux volent au vent et une borne en béton indique une altitude fluctuant d'une carte à l'autre. On touche la première neige de l'hiver (la dernière peut-être aussi...)

Et puis c'est la grande dégringolade, le petit bonheur du cycliste après l'ascension, l'immense descente, les épingles qui s'enchaînent, les mètres si durement gagnés, quelques heures auparavant, perdus à folle vitesse.Le fond de l'air se réchauffe, la vie reprend, quelques maisons, un village...

Un premier brin d'herbe apparaît puis un premier buisson et plus vite que l'on puisse l'imaginer, c'est le premier arbre qui pointe sa cime. Non pas qu'il cache la forêt, il ne faudrait pas non plus exagérer, mais ses congénères se multiplient à présent.Des animaux qui pâturent, des parcelles en terrasses, des sacs de patates remontés d'un champs quelques dizaines de mètres plus bas, attendent sur le bord de la route qu'on les emmène je ne sais où...A présent, tout semble devenir un peu plus commun, plus familier. Une végétation que l'on reconnaît, une vallée encaissée bordée par des hauts sommets blanchis par les toutes dernières précipitations... On pourrait un temps se croire dans n'importe quel massif, n'importe où ailleurs dans le monde. L'esprit s'évade, passe en revue les destinations, cherche les similitudes... jusqu'à ce qu'au détour d'un virage, sur cette route vertigineuse taillée à flanc de montagne, un Tata pointe son nez et fasse retentir son klaxon unique...

... Jusqu'à ce que sur le bas- côté, presque dans le fossé, on aperçoive des ouvriers en train de casser la croûte dans leurs gamelles métalliques... jusqu'à ce que des drapeaux à prières virevoltant au vent se distinguent au sommet de cette bute... jusqu'à ce panneau planté et cette jolie écriture qu'on ne sait pas lire...

Alors un soulagement m'envahit. Tout va bien... Le décor change, il change vite, mais on est toujours là.Les cheveux dans le vent, les doigts sur les manettes de freins, un "namaste" arrive à la volée jusqu'à mes oreilles... On n'a pas vraiment changé de monde, juste de région .

Une page se tourne, le Ladakh est désormais dans le rétro. Julley, julley !

Une nouvelle page s'ouvre, Namaste l'Himachal Pradesh !On dégringole encore...

Des forêts, de grands arbres et des rivières. Des maisons de bois aux toitures de pierres plates, des champs, des bêtes et des hottes qui débordent de fourrage.

Des jardins, des temples et des fleurs !Oui des fleurs !Flower power...

Œillets d'Inde en guirlande sur les temples, fleur de chanvre dans les pipes, marguerites en couronne dans les cheveux... Peace and love dans le cœur !

Namaste Manali !

9
oct
9
oct
Publié le 9 octobre 2022


Le cap des 5000 kilomètres à 5000 mètres. ..

Raccord non ?!

10
oct
10
oct
Publié le 11 octobre 2022

Un cinquième mois sur la route, c'est :


◇ 10 pays 🇮🇹 🇬🇷 🇹🇷 🇬🇪 🇦🇲 🇰🇿 🇺🇿 🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬 🇮🇳


◇  5067 km 🚲


◇ De belles rencontres toujours 🍀


◇ 3 avions ✈, 1 tour de moto 🏍, 1 bus 🚍


◇ De chouettes découvertes 🧐


◇ Des yaks 🦬, des chevaux sauvages 🐎, des marmottes 🦫, des souris 🐀, des mouflons 🐐, un renard 🦊


◇ Des hauts sommets 🏔 et des paysages fous 🌄


◇ 7 cols à plus de 4500 m 🥳


◇ Des bivouacs magiques ⛺


◇ De la neige ❄, du soleil ☀️ et un peu de pluie ☔


◇ 1 balade à pied 🥾


◇ Des monastères 🏯


◇ Des petits dessins ✏


◇ Un anniversaire 🎂


◇  25 Dal 🍛, 50 momos chacun 🥟, des lassis 🥛, des chapatis 🫓


◇ 15 litres de tchaï chacun 🍵


13
oct

Vallée de Spiti, pour quelques coups de pédales de plus et pour quelques instants encore au calme des montagnes...

Allons de surprise en surprise, retardons encore un peu le fatidique moment de sauter dans le grand bain, profitons encore un peu de ce qui nous correspond le mieux, nature calme, grandes montagnes et bivouacs sauvages... Le reste nous rattrapera bien tôt ou tard !

Continuons la route vers le sud, pédalons le nez en l'air pour admirer tous ces grands sommets enneigés, enchaînons une bonne vingtaine d'épingles jusqu'à ce col à 4500 mètres d'altitude (encore !), débaroulons sur l'autre versant et rejoignons la rivière Spiti, le nouveau fil conducteur des tout prochains jours.

Rencontrons des yaks et des grosses souris. Retrouvons à nouveau ce petit Tibet, ces portraits du Dalaï-lama, ces monastères haut-perchés, ces stupas, ces temples aux mille couleurs et ces villages aux maisons aux toits de branchages, accrochées à la montagne...

La récolte des patates bat son plein puis quelques centaines de mètres plus bas, ce sont les pommes qu'on met en caisses...

Des mains se tendent, le fruit défendu (why ?) est attrapé au vol.

Remontons une nouvelle fois à 3900 mètres en suivant cette piste caillouteuse, zigzaguons entre les engins de chantier et appuyons plus fort encore sur les pédales à cause de ce vent terrible qui chaque jour nous souffle dans le nez. Nuages immenses de poussière dans lequel on disparaît tout entier et sable qui se glisse partout !

Redescendons encore au petit matin dans ce froid glacial et hâtons nous jusqu'au prochain tchaï fumant. Réconfort.

Gorges encaissées, routes creusées dans la falaise, millions de tonnes de roches en suspension au dessus de nos têtes sur des dizaines de kilomètres...

Pédaler sous la voie normale de la Tour Ronde en une fin d'été, quelle belle idée !

Le Tibet, le vrai, n'est plus qu'à une quinzaine de kilomètres à vol d'oiseau.

Ça se voit : barbelés, checkpoints, fusées de détresse dans le ciel.

Ça s'entend : bruits de tirs successifs... Militaires partout.

Passons notre route... et laissons nous encore glisser le long des flots.

3000, 2500, 2000 mètres... Depuis combien de jours, de semaines ne sommes-nous pas descendus si bas ?

Et là, cette forme marron qui fouine dans les détritus... un singe !

Changeons à présent de monde, d'univers et presque de pays !

Partons à la rencontre de la "vraie Inde", armons nous de courage et de patience, soyons prêts à être étonnés par le pire et le meilleur dès aujourd'hui !

17
oct
17
oct
Publié le 17 octobre 2022

2000 m d'altitude, une altitude bien clémente pour séjourner… Tellement, qu'à la sombre époque coloniale, les Anglois avaient établi sur ce relief marqué leur capitale d’été. "The place to be" semble être « the ridge », une rue piétonne bien agréable sur une crête. Partout autour, ce n'est que pentes à 40°. Néanmoins, des toits colorés émergent sur tous les versants. Ils sont fous ces Anglais !

Si certains semblent s'être bien accommodés de la complexité topographique, ce sont les singes.

Nous, on a lâché l'affaire et rejoint ce lieu en bus : 100km en plus de trois heures. Le tout sur une route majoritairement goudronnée, mais qui affichait plus de 2000m de dénivelé positive. Le chauffeur, loin d'être un endormi, aurait facilement pu prétendre s'inscrire au rallye Monte-Carlo. Après cette distance, on était rincés…. Lui, il n'avait qu'à ramener son véhicule à bon port. Et pour optimiser, ce dernier fut bien évidemment prestement rempli. C'est rien de le dire, adopter le rôle de passager m'a pompé réellement. Que penser de la charge du dénommé chauffeur ?...

Mais revenons à nos moutons... Pour notre bien-être mental, le hasard a fait que l'on est descendu de nos montagnes. Des hauteurs enneigées aux reliefs arides, la densité de population a graduellement crû. Enfin, c'est façon de dire car ici tout est démultiplié… Comment dire... C'était comme des sas de je ne sais quoi et plutôt « progressivement » on s'est retrouvé dans de denses, voir de très denses flux de population. Et ici, il n'y a pas que la sorte de bipède que nous connaissons. Tant est si bien, qu'au début de cette marée humaine, on essaie seulement d'adopter les codes pour simplement se déplacer. La proximité est de rigueur. Encore une fois, c'est rien de l'exprimer… Avec le temps, notre espace corporel s’élargit tant bien que mal et subrepticement notre œil accroche un de ces « brothers » aussi accroché aux fils, juste en travers de la rue ! On tâche alors de s’immobiliser, et on découvre alors une famille, une communauté qui vadrouille dans le coin.

Le plus stupéfiant et saisissant est leurs regards. On ne descend pas simplement de nos montagnes, ni de nos arbres mais bien d'eux ! Les habitants paraissent faire avec. Enfin, c'est selon… Les balcons sont grillagés, les containers d'eau aussi, des fils barbelés et toutes sortes d’appendices pointus et saillants sont disposés un peu partout.

Eux, ils trouvent ça plutôt sympa tous ces agrès mis à disposition. Quoi de mieux pour évoluer dans les hauteurs ! Quand ils abordent l'espace public, à même le sol, les réactions de nos proches vont du rire aux détours marqués, des fois accompagnés d'un cri. Il semble que tant que tu n'as rien « d’attrapable » sur toi, du style écharpe, banane, big-burger, tout va à peu près bien tant que tu ne les regarde pas dans les yeux de manière appuyée. Si donc tu soutiens leur regard, ils ont bien vite fait de montrer les dents… et là, ça fait moins rire…

L'aisance dont ils témoignent dans tous les terrains nous rend carrément jaloux.

Bien souvent les mères ont, en plus, un petit qui s'accroche désespérément sur leur dos, ou sous leur ventre. On se laisserait aller à l'amusement, si on trouvait un endroit cool où se dorer paisiblement au soleil. Mais eux, au-delà de leur continuelle recherche de nourriture, ils vivent véritablement en communauté. Ce qui implique l'instauration d'une hiérarchie, et pour la mener à bien, ça passe par de sérieux coups de speed accompagnés de poursuites effrénées qui alors glace tout l'entourage !!!

Bienvenidos à SHIMLA…

Bruno

20
oct
20
oct
Publié le 20 octobre 2022

Sur combien d'écrans de smartphones d'indiens sommes-nous ?

La question à 1000 roupies !


Ça va de la demande faite le coude à la portière en nous doublant en pleine montée (ils n'ont peut-être jamais vu quelqu'un de si rouge 🥵 ?!), à l'enfant que l'on colle à nous de force (et qui tire une de ces tronches sur la photo 🥴 !), et parfois l'un de nous est volontairement écarté de la photo de famille... (mal rasé, mal peigné, les jambes à l'air, les bras trop dénudés, sacoches rouges ou bleus...) 😳

Ah, les goûts et les couleurs !


Aller... clic, clac, c'est dans la boîte ! 🎞

27
oct
27
oct
Publié le 27 octobre 2022

Ici comme ailleurs, ce coup-ci comme souvent.. Une fois de plus, la facilité a été de trouver refuge dans les hauteurs. Au calme des cimes, au frais des sommets, s'élever pour prendre un peu congé de l'humanité, souffler, avoir le loisir de voir défiler le temps qui passe et en prendre plein les yeux dans des paysages sompteux.

Pourtant une fois encore, on est redescendu. Le retour à la vraie vie, là en bas, là où il fait meilleur, là où l'air est plus riche, là où les routes se croisent et se recroisent, là où on mange des croissants et où on boit des milkshakes.Où qu'il soit, ce retour vers le monde d'en bas est toujours un petit choc. Le retour en vallée est toujours un moment étrange. J'imagine le retour à terre après des jours passés en mer comme similaire... Il y a toujours ce vrai plaisir du "retour". Le réconfort retrouvé après l'effort fourni et l'inconfort subis. Il y a ces petites choses simples qui paraissent alors démesurément douces : une bière fraîche, une douche chaude ou un lit douillet.

On pose alors son sac, sa maison de voyageur. Ce dernier légèrement alourdi par ces souvenirs encore tout frais, parfois aussi par un caillou rigolo, une jolie plume rencontrée là haut ou une carte SD bien remplie. Qu'on le veuille ou non, une part de ce qui s'est passé, de ce qu'on a vécu, de ce qu'on a partagé, restera un peu là haut. Et si la réciproque est assez vraie, c'est bien pour cela qu'on s'évade si souvent en prenant de la hauteur, même si parfois, c'est aussi sous terre qu'on trouve refuge !

Bref... Ces moments de transitions sont à chaque fois, un peu comme un changement de monde. Ce coup-ci, nous ne changeons pas de monde, nous changeons carrément d'univers !

Certes, on s'y attendait et on s'y préparait. Comme tous les voyageurs, on avait lu un peu sur le sujet mais les bruits et les odeurs, ça ne s'écrit pas, ça se vit ! Comment se préparer au tumulte permanent si ce n'est en appréciant d'autant plus les derniers instants au calme ?

La pente, la gravité et la roue libre ont fait le reste... Nous avons, au fil des jours, degringolé des montagnes. Minute après minute, kilomètre après kilomètre, nous nous approchions davantage de la vraie Inde, nous le sentions, nous le savions. Nous avions pris quelques précautions semblables à des sas de décompression ou sortes de pauses pour optimiser notre acclimatation. Les bivouacs devenaient chaque jour un peu plus urbains et plus compliqués à trouver...

Les températures, la densité humaine et le flux routier, le nombre de singes aperçus grimpaient en flèche alors que l'altitude chutait à pic !

Rampur, sa rue principale animée et ses ruelles en pentes raides bondées tout d'abord. Puis nous fîmes une halte à Shimla, la reine des collines.

C'est ici que nous perdons les pédales.

Trafic plus dense sur routes étroites et tortueuses combiné à une envie curieuse de grimper à bord d'un train mythique, la ligne Kalka-Shimla, classée à l'Unesco.

Pensée et construite pour rejoindre, depuis les plaines, la ville haut-perchée de Shimla, ancienne capitale d'été du temps de l'Inde britannique. Quelques chiffres sont assez parlants pour se faire une idée de cette ligne et de cet incroyable train.

Une centaine de passagers, 109 tunnels, 969 ponts, 919 courbes en 96 kilomètres de distance, en... 7 heures de trajet ! Une belle partie de saute-collines. "Himalaya queen" ... Bienvenue à bord !

Bercés par le ronronnement du train, un paysage verdoyant défile à la fenêtre. Nous tentons d'imaginer à quoi pourraient ressembler les prochains kilomètres et les prochains jours...

Tu penses qu'il y aura aussi des singes à Delhi ? Et tu crois qu'on sera où pour la grande fête de Diwali ?

Je repense à nous deux, cyclistes, au milieu de notre tout premier vrai joyeux et bruyant bazar, quelques jours plus tôt, à Rampur. Assourdis par les klaxons, sonnés par la chaleur, frôlés par les touk-touks, les gros tatas, des piétons, des vendeurs ambulants, des motos, des porteurs lourdement chargés, des bus...

Je souris en repensant à Bruno qui avec son air un peu surpris me demande : "ça peut pas être vraiment pire que ça Delhi, si ?!?"

Hmmm... comment dire ? Je crois bien que là, on est encore au pays des bisounours !

Les trains s'enchaînent à merveille, si bien qu'après 7h de voyage, nous descendons de notre tortillard de montagne pour sauter dans un vrai train, genre TGV local mais en mieux... Premièrement, il est à l'heure et deuxièmement, on a droit à un apéro, un repas, un dessert, de l'eau et du thé alors qu'on n'est qu'en seconde classe ! Donnez à manger à des cyclistes et vous marquerez à coup sûr des points !! On est sous le charme de la "SNCF" indienne, et ce, jusqu'à nos prochains voyages inversement proportionnels à cette bonne expérience ! Mais ce sera une toute autre histoire...

Quelques heures plus tard, il est 23h et nous sommes prêts à sauter enfin dans le grand bain. Bienvenue en gare de Delhi !

Baptême du feu sur une grande avenue dans la nuit presque noire. Petit gilet fluo sur le dos, petite loupiote allumée, nous voici partis pour "Delhi by bike by night" ! Vendeur dans un programme de tour operator, non ?!

Motos, touk-touks, voitures, charrettes tirées par des buffles et rikshaws systématiquement à contre sens (pourquoi ?), tout ce petit monde sans lumière (évidemment !) mais avec la main bien coincée sur le klaxon. Enfonçons-nous ensuite dans les mini ruelles, scooters, vaches sacrées, bouses sacrées , flaques, porteurs en tout genres, mendiants, chiens affalés au milieu, détritus , dormeurs, balayeurs, motards...

Ce coup-ci, je crois bien que l'on y est !

Nous nous garons et entrons dans un hôtel environ une fraction de seconde avant qu'un sac de vomis version bombe à eau ne tombe du ciel et s'éclate à un mètre des vélos. Premier piège déjoué !

On est pret à affronter la suite mais d'abord on se régale d'un lit propre et même d'une douche chaude. Demain sera un autre jour ! Le premier jour dans le grand bain de la vraie Inde.

A suivre...

1
nov
1
nov
Publié le 1er novembre 2022

Par où commencer ? Comment décrire l'environnement qui est le "nôtre" ces derniers jours ?

Toute la difficulté ne résiderait-elle pas justement, dans le fait qu'il ne soit pas vraiment "nôtre" ?

Tellement surprenant, déroutant et aussi éreintant qu'il faudrait un minimum de répit pour pouvoir y penser, poser quelques mots sur le papier.

Mais ici, ce répit n'existe pas... L'Inde vit, elle vit jour et nuit, elle vit dans le bruit et le mouvement permanent.

On avait vraiment du mal à imaginer quelles surprises l'Inde pourraient bien nous réserver. Intrigués, un peu effrayés et à la fois curieux de nous en faire notre propre idée, découvrir ça de nos propres yeux.

Dès les premiers instants dans ce grand bain humain, on comprend rapidement qu'il faut être réveillé si on veut rester à la surface ! Pas de place pour les ramolos sous peine de couler à pic ou de se faire écrabouiller par le premier touk-touk déchaîné ou par la première charette et son buffle lancés à vive allure.

Regarder devant, derrière, sur le côté, par terre... Avoir les yeux partout !

C'est parfois même du ciel que le miracle peut arriver ! Un sac de détritus jeté d'une fenêtre ou le plus classique, un crachat qui arrive de droite ou de gauche... Le bruit de raclement de gorge bien caractéristique le précèdant de quelques fractions de secondes à peine, est un bon indice, mais laisse bien peu de chance de se trouver un abri !

Bref, les indiens crachent beaucoup et partout, et parfois c'est sur tes pieds que le mollard atteri, tant que ce n'est pas sur ta tête... tout va bien !

 Old Delhi... aller, je vous ai fait un petit dessin !

Dans ce tumulte, tous les sens sont stimulés et ce n'est rien de le dire !

Ici, on en prend plein les yeux, il se passe dans la même seconde une telle multitude de choses que pour tout voir, il faudrait immortaliser le moment et observer ensuite la photographie pour comprendre tout ce qui se jouait simultanément !

On en prend plein les narines.

Comment autant d'odeurs peuvent se mélanger, se succéder, cohabiter dans une même rue ? Encens puissants et odeur vive d'urine. Effluves d'ordures et senteurs épicées.

Parfum réel de vomis et arômes à la rose aux allures surnaturelles. Vapeurs de pain chaud mêlées à celles des crottes d'animaux à quatre ou à deux pattes... Eh oui !

L'ouïe n'est pas en reste, je dirais même que c'est peut-être le plus fatiguant. Ici, le silence n'existe pas, le bruit est omniprésent. Il devient juste plus supportable quand il se calme un peu de temps en temps... ça va du klaxon strident qui te perce un tympan, à la cacophonie de plusieurs dizaines de klaxons simultanés, aux chiens qui aboient, aux singes qui hurlent en se disputant en passant par les gens qui s'interpellent d'un côté à l'autre d'une rue ou dans le couloir d'un hôtel. Ça va du marchand qui vente haut et fort sa marchandise, à celui qui veut vendre ses bouteilles d'eau ou ses paquets de chips sur un quai de gare, à celui ou celle qui regarde sur son smartphone le dernier clip du groupe indien à la mode juste à côté de son voisin qui écoute le dernier morceau du groupe concurrent. Je vous épargne tout ceux qui téléphonent en mode haut-parleur et qui hurlent en retour dans le micro comme s'ils avaient 90 ans et étaient sourds comme des pots !

Il y a aussi des mendiants et leurs tambours qui offrent un peu d'animation en échange de quelques roupies.

Bref, le silence n'existe definitivement pas... Qu'il est loin, le temps du Ladakh et de ses moines bouddhistes qui chuchotaient tout bas. Qu'il est loin, le temps de ces villages du Pamir silencieux et figés... Qu'il est loin le silence naturel des montagnes...

Dans la famille des cinq sens, pas un n'est épargné. Le goût est probablement celui dont la sollicitation est la plus agréable. Après des semaines de nourriture plutôt fade et très basique, les pays en "-stan" ne riment définitivement pas du tout avec "gourmand". En Inde, on se met toujours à table avec plaisir ! Ici c'est l'explosion des papilles. C'est bien simple, même le thé est épicé !

Aurait-on pu imaginer pouvoir ingurgiter le même menu que le commun des indiens ?

Certainement pas et pourtant... si on s'en tient au plat de base sans l'agrémenter de piquant supplémentaire et si l'on accepte de terminer le repas avec une petite goutte de transpiration qui perle sur le front, on peut s'aventurer à tester presque toute la carte (qui même dans le moindre boui-boui est bien fournie) !

Passons au toucher... ici ça se joue au contact ! On est nombreux, partout et tout le temps. Dans la foule, les corps se frôlent souvent, se touchent parfois mais se heurtent rarement. Mais quand il s'agit de grimper dans ce train bondé quelques jours avant la grande fête de Diwali, c'est encore différent. Les corps sont collés, empilés, pressés les uns contre les autres, ils se déforment, sont écrasés. Ça crie, ça tire, ça pousse, on disparait noyé dans cette marée humaine... on se perd de vue puis de voix : Rendez-vous à l'intérieur !

Quand la porte s'ouvre enfin, après ces longues minutes à se faire écrabouiller, c'est la ruée ! Ça court dans les couloirs, ça se jette sur les banquettes, ça grimpe dans les couchettes...

Si en bons petits européens, on aurait envie de dire : "Ne poussez pas, il y en aura pour tout le monde ! Euh, pardon, mais là c'est ma place !"

Mais ici, c'est différent, il n'y en aura pas pour tout le monde. Chacun n'aura pas sa place, certains se la feront tant bien que mal dans un coin du wagon alors que d'autres resteront sur le quai comme cet homme au regard désespéré qui courra quelques instants aux côtés du train qui démarre.

La suite est encore plus inimaginable que cette montée sauvage dans le train.Il y a les tickets avec des places numérotées et puis il y a tous les autres tickets... Le surbooking indien, vous connaissez ? En quelques minutes, nous nous retrouvons dans un compartiment prévu pour 8 personnes à plus de 22 voyageurs ! C'est bien simple, il y a des gens partout, partout, partout.

Au moins la SNCF locale ne pourra pas prétexter que la ligne n'était pas rentable ! Le train croule sous les voyageurs ! Parfois 3 ou même 4 personnes par couchette, parfois assis ou allongés à même le sol, la scène est surréaliste.

Au beau milieu de la nuit, alors que nous choisissons ce meilleur moment et ce meilleur endroit pour attaquer notre super gastro, il n'y a plus un centimètre carré de libre au sol pour pouvoir poser un pied et se rendre aux toilettes ! Qu'à cela ne tienne, un petit sac en tissu étanche fera office de bassine ! Un système D qui se révèle plutôt très efficace...

Pas d'inquiétude, on est bientôt arrivé plus que 11h dans ce train de l'enfer !!! On vous rassure aussi, on a choisi le train dernière classe, ceci expliquant cela !

L'Inde a aussi cette caractéristique de vivre non-stop, d'être en mouvement perpétuel : un flot permanent.

Le seul pays qui a une roue de vélo sur son drapeau mais dans lequel tu peux finir à chaque instant aplati comme un chapati.

La circulation indienne... Pourrait-elle seulement fonctionner autrement ?

Vu le flux et la densité de véhicules, ce serait une opération escargot si on n'avait à faire qu'à des endormis du volant ! Et si on n'avait à faire qu'à des petits nerveux sanguins, la route serait un ring de boxe où les vaches sacrées seraient les arbitres.

Les indiens ont trouvé un compromis, conduire comme des fous en restant impassibles comme des sages. Et ça fonctionne ! Ça se faufile partout, ça klaxonne beaucoup, ça recule en plein milieu, ça se gare en double-file n'importe où, ça accélère à fond, ça pile d'un coup, ça double à droite comme à gauche, ça roule dans un sens ou dans l'autre, ça zigzague entre les vaches sacrées qui mangent du carton et les chiens qui roupillent en plein milieu, ça frôle les piétons, ça roule sur les trottoirs...

Voilà.

Il y a l'Inde.

L'Inde bruyante, remuante, fatiguante...

Et puis, il y a encore pire.

Il y a l'Inde dans l'effervescence des préparatifs de festivités. Et puis, il y a l'Inde, un jour de fête !

Happy diwali !

Une journée encore plus bruyante et plus colorée que les autres. Une nuit où le bruit des klaxons est remplacé par les détonations et les explosions continues de pétards et de feux d'artifices. Tintamarre de ces bombes de joie non-stop jusqu'au lever du jour et le matin à la toute première heure... tous ces gens toujours aussi en forme !

Jamais fatigués...

Martiens ?!?? ... non, Indiens !

Définitivement, l'Inde est le pays le plus vivant que l'on ait pu rencontrer jusqu'ici !

6
nov
6
nov
Publié le 6 novembre 2022

Tourbillon d'agitation. Ici la journée dure au moins 28 heures et à chaque seconde une chose improbable pourrait bien te surprendre ! Imaginez le nombre de surprises potentielles à la fin d'une journée !!

Alors que tu peines déjà à te faufiler dans ces étroites ruelles, zigzaguant entre flaques louches, crottes de toutes origines confondues, scooters bruyants, marchands ambulants, vaches parait-il sacrées, carioles chargées, chiens endormis et mendiants insistants, soudain il faut s'écarter et laisser passer ce convoi lancé à vive allure.

Des pas déterminés, un chant scandé, un brancard chargé sur l'épaule, tout ce petit monde fonce vers la plage... "Un homme pressé est un homme mort." Ce coup-ci, le dicton se vérifie.

Chaque vingt minutes, les pieds devant, un mort passe...


Sur le ghat, les bûchers sont prêts. Parfois douze grands feux crépitent simultanément. Simple, rapide, efficace. 250 corps par jour, ici, le crématorium tourne H24.

Deux ou trois heures sur le grill et les chiens du quartier se chargent de finir les "restes" jetés à même la plage. Les cendres, quant à elles, rejoingnent les eaux du Gange.

Quelques dizaines de mètres plus loin, dans ces mêmes eaux troubles, certains "s'ablutionnent" de bon cœur, quand d'autres ferment avec précautions tous les orifices ou presque avant d'oser s'immerger.

Certains remplissent des récipients, s'aspergent ou éclaboussent les voisins quand d'autres tentent de prier ou de faire voguer des offrandes, précaires embarcations de papier ou de feuilles entre de petits garnements qui se croient à Aqualand ! (📸 comme ici)

Il y en a aussi qui méditent imperturbablement pendant que d'autres nettoient les quais à grands coups de balais et jettent les ordures dans cette même baignoire !

Quel spectacle !

Je ne sais pas ce que se disent là-haut, Vishnu, Ganesh ou Shiva, ni même s'ils existent vraiment ces gens-là... Mais ce que je crois, moi, c'est que sur ce coup-là, la vie est un peu injuste :

Ce sont CES indiens qui boivent cette eau couleur smecta et c'est NOUS qui avons une méga gastro !


Vous pensez qu'on devrait opter pour un bain sacré ??!

Ps: Il y a la caste des intouchables, bientôt il y aura aussi celles des invisibles...

Cette nouvelle caste, c'est nous, maigrichons comme deux fils de fer, après presque 10 jours sans pouvoir trop rien avaler !

12
nov
12
nov
Publié le 12 novembre 2022

Un sixième mois sur la route c'est :

◇ 10 pays 🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳

◇ 5746 km 🚲

◇ 1 milliards 400 millions de visages

◇ 8 cyclos croisés en chemin 🚴‍♀️

◇ 1 bus 🚍, 5 trains 🚂, des touk-touks 🛺

◇ De chouettes découvertes 🧐

◇ 1 capitale 🏙

◇ Des montagnes grandioses 🏔

◇ 1 fleuve sacré 🌊

◇ 1 merveille du monde 🕌

◇ Des coins sauvages et d'autres beaucoup beaucoup moins 😳

◇ Des dizaines de singes 🐒, quelques moustiques 🦟

◇ Une fête 🥳, une nuit pétaradante

◇ Des concerts de klaxons 📣

◇ Des petits dessins ✏

◇ 58 diarrhées 💩 & 5 vomitos 🤢

14
nov
14
nov
Publié le 14 novembre 2022

"Incredible India", le slogan du tourisme indien est si bien choisi !


"Incroyable Inde" où il faut être prêt à se laisser surprendre par tout, partout et tout le temps.

"Incroyable Inde" où le meilleur comme le pire se côtoient à chaque instant. "Incroyable Inde" où tu passes de l'un à l'autre en quelques minutes, dans un grand écart permanent.

"Incroyable Inde" où une surprise t'attend à chaque coin de rue. "Incroyable Inde" où il faut avoir les yeux partout, les oreilles un peu bouchées, le nez bien accroché et l'estomac solide !

"Incroyable Inde", celle qui t'émerveille, celle qui t'émeut, celle qui te dégoûte, celle qui si elle ne te tue pas, te rend plus fort... celle qui faut voir pour le croire !

C'est ainsi que dans ce chaos bruyant, dans ce tumulte coloré, dans cette marée humaine, dans ce flot souvent sale et malodorant, une merveille emmerge.

Îlot de lumière, murailles lisses, architecture pure, lignes parfaites.

Formes régulières. Teintes claires. Beauté immaculée.

Qu'a-t-on vu de si blanc depuis si longtemps ?

Pays aux milles couleurs, où on aurait tout simplement pu croire le blanc absent, disparu, inconnu.

Sortant de la brume, semblant flotter au dessus de ces nuages matinaux, le teint légèrement rosé par les premiers rayons du soleil naissant, le fantastique palais apparaît.

Beauté parfaite. Trop beau pour être vrai ? Trop parfait pour exister ?

Démesure de la vanité humaine dans un pays où les intouchables n'ont aucun droit. Mausolée mortuaire géant, quand tant de gens n'ont même pas un toit pour vivre dignement...

Le jour se lève à peine, premiers rayons de lumière, la nuit a été courte. On se pince : serions-nous en train de rêver ? Ou viendrions-nous, une fois encore, de changer de monde ?

Ce coup-ci, ça se joue à trois fois rien : une rue en terre, un portail et "Disneyland" derrière !

Touristes très bien peignés, vêtements blancs impeccables, vierges de toutes tâches, pas une trace d'éclaboussures, pas un pli mal placé. Ont-ils été parachutés ? D'où peuvent-ils bien arriver ?

C'est comme si on ne passait pas nos vacances dans le même pays. On ne doit pas avoir marché dans les mêmes rues pour parvenir jusqu'ici ?! Sinon leur pantalon serait blanc, à pois marron, genre dalmatien. Je ne vois pas d'autre alternative !

Selfies et stories en live, les #TajMahal s'envolent de partout, montent dans la galaxie, tournent en orbites et redescendent à l'autre bout du monde.

"Incredible India", même ses touristes, elle a su les garder secrètement et les dévoiler délicatement accompagnés de cette 7ème merveille du monde !

La énième surprise du monde... Un touriste en Inde peut finalement ressembler à un parisien qui visiterait Amsterdam. Pas forcément à un participant de Koh Lanta, après l'épreuve du parcours du combattant.

Nos pieds sont poussiéreux, nos vêtements sont sales, la peau de nos visages est tannée par le soleil, nos cheveux sont ébouriffés, nos visages sont fatigués et nos corps sont tout maigrichons. ..

Mais comment font-ils pour voyager ici, en étant aussi parfaitement mis ?

Des heures de train, serrés comme des sardines vaseuses, un hôtel sans eau chaude, un lit sans drap, un dortoir pour chambre, 168 moustiques affamés avec qui batailler.. Lever 5h, c'est la tête de travers qu'on se retrouve ébahi, devant cette folie des grandeurs et ce beau lever de soleil.

Surpris face à tout ces gens qui ont réussi à traverser une partie de la planète sans se décoiffer pour venir admirer ces tonnes de cailloux blancs si parfaitement agencés. Une quantité astronomiques d'heures de travail effectuées, une architecture raffinée, des ouvriers sûrement exploités pour que le grand sultan, de je ne sais quoi, fasse honneur à son épouse préférée, sous'entendu d'ailleurs, qu'il en avait plusieurs ! Offrir une tombe, certes grandiose, mais une tombe quand même à son amoureuse : en voilà une idée !

Décidément qu'il soit touriste en pantalon blanc ou grand maradja au palais immaculé, l'être humain m'étonnera toujours !

20
nov
20
nov
Publié le 20 novembre 2022

Comme le Pamir, le Nord de l'Inde restera dans nos mémoires comme une parenthèse, un voyage dans le voyage, un temps fort de ce périple à deux roues.

Est-ce un hasard si les points communs de ces deux étapes sont les montagnes, une nature sauvage, l'autonomie, les bivouacs, un climat un peu rude, les bonnes grimpettes en l'altitude ?

Probablement pas...

Toutes ces images, ces rencontres, ces paysages désertiques, ce sentiment de solitude parfois, ces grands cols qui s'enchaînent, ces bivouacs magiques, ces nuits fraîches, resteront bien au chaud dans nos cœurs pour longtemps, c'est certain.

On nous demande parfois si quelques choses "de la maison" nous manque... Finalement, pas vraiment.

A part un plat special ou une pâtisserie en particulier, rien ne nous vient vraiment à l'esprit mais lorsqu'il s'agit de préparer un petit montage vidéo et de gérer les milliers de photos, j'avoue que j'échangerais bien mon smartphone à la mémoire ultra saturée et impuissant contre un vrai ordinateur et un bon disque dur.

Ne serait-ce que pour sauvegarder un peu ces souvenirs numériques et éviter que, par accident, tout ça ne parte en fumée ! Un sac et une gopro oubliés sur un banc puis retrouvé par miracle après un long aller-retour ou un appareil photo définitivement noyé lors du dernier gros orage...

Ça reste que du matériel me direz-vous, mais lorsqu'il s'agit de souvenirs, ça rend un peu triste quand même...

En souvenir de ces chouettes moments sur les hauteurs indiennes, un petit film "fait maison" par une nomade sans maison. Cherchez l'erreur ! Pas simple avec les moyens du bord mais mieux que rien et même si le montage n'est pas parfait, les paysages restent toujours aussi incroyables à admirer.

Bonne balade à vous et attention au MAM (mal aigu des montagnes si vous n'êtes pas acclimatés !)

27
nov
27
nov
Publié le 27 novembre 2022

Vous êtes quelques un(e)s à vous/nous demander quel style de vélos nous avons choisi pour nous emmener jusqu'ici !

Alors voilà... Je vous ai fait un petit dessin !

Nous avons des vélos finalement très basiques. Des cadres en acier, qui peuvent être ressoudés n'importe où si nécessaire. Assez lourds donc, environ 17kg pour les pépères !


Pas de suspension qui pourrait les fragiliser même si on aurait parfois bien apprécié davantage d'amorti notamment sur les pistes du Pamir ou du Nord de l'Inde.


Vive la tôle ondulée et la sensation d'être dans un mixeur géant ! Bras qui vibrent et dents qui claquent...


Ne pas avoir d'amorti demande un temps d'adaptation, un gros caillou sur une piste, un bon trou ou un ralentisseur mal signalé et il arriverait vite que le guidon nous échappe !


Des porte-bagages à l'avant et à l'arrière pour les sacoches, une petite lumière devant et derrière (rechargeable par dynamo sur moyeu) lorsque les réveils sont matinaux, lorsque la nuit arrive trop tôt ou lorsque le spot de bivouac tarde à se laisser trouver.

Un guidon papillon pour varier la position des pattes avant ou un simple guidon droit.

Un bon p'tit rétro pour jeter un œil sur tout le trajet déjà effectué et les chauffards un peu allumés à la vodka qui aiment un peu trop la proximité.

Une béquille pour l'un et deux pour l'autre. Le tout est que le vélo tienne debout.

Un chargeur Usb avec un système de dynamo pour recharger les batteries (à condition de pédaler assez vite (12 km/h) et longtemps !).

Des garde-boues pour les jours de pluie et les grandes flaques !

Un pouet-pouet et une sonnette mais on peut largement s'améliorer sur ce point pour concurrencer les klaxons indiens ! 

Des sacoches "Ortlieb"... 5L au guidon, 12,5L à l'avant, 25 et 35L à l'arrière, un sac étanche en travers et l'affaire est dans le sac !

Des selles en cuir "Brooks" qui coûtent cher mais qui étaient déjà sur les vélos quand on les a achetés de "segunda mano". Se sont-elles faites à nos fesses, ou serait-ce nos fesses qui se sont faites à ces selles ? On n'a toujours pas éclairci le mystère ! Toujours est-il que quand nous roulons régulièrement, nous n'avons pas mal au cucu !

Pas de short de cycliste ou de couvre-selle en gel...


Selles en cuir et humidité ne font pas bon ménage. C'est à dire que si l'on s'assoit sur ces selles alors qu'elles sont mouillées, celles-ci vont se déformer de façon irréversible. Dommage, après toutes ces heures à les roder !

On peut une fois sèche tenter de les retendre un peu sans que cela ne semble ni simple, ni vraiment efficace...

On croise aussi vraiment beaucoup de cyclistes portant des casques. On ne peut pas dire qu'on ait vraiment fait le pas de pédaler avec quelque chose sur la tête. Sauf situations très exceptionnelles où on se sent un peu en danger, le reste du temps, ils restent sagement accrochés aux porte-bagages. Peut-être des casques de vélos seraient plus supportables, plus aérés que les casques d'escalade...

Nous avons néanmoins opté pour des gilets fluo allégés au maximum grâce à quelques coups de ciseaux, à une machine à coudre et aux doigts de fée de Bruno. Nous les avons portés de temps en temps. Ça nous permet d'être vus de loin et aussi de pédaler torse nu en faisant semblant d'être un peu habillés dans les pays où le rapport au corps n'est pas vraiment neutre. J'ai ainsi pu pédaler en brassière par 40 degrés en Turquie !

Les pneus, des "Swalbe Marathon" que l'on gonfle et que l'on dégonfle suivant le terrain et l'altitude pour optimiser l'amorti. Visiblement increvables... On aura été crevés avant eux !

Le fait d'avoir des vélos identiques permet de mutualiser les pièces de rechange et d'emporter aussi la même boîte à outil. Pratique !

Et sinon ces vélos allemands ont un petit nom bien frenchies, ils s'appellent "vélo de ville". On roule avec partout, partout, partout... et finalement presque pas en ville ! 

Voilà, vous savez tout ! 

Reste plus qu'à appuyer sur les pédales !

7
déc
7
déc
Publié le 7 décembre 2022

▪︎ De cyclistes à backpackers...

Novembre, nous passons de 4 à 8 pattes et nous tronquons les vélos pour des sacs à dos… Vacances en famille, Noël avant l'heure !Les premiers jours sur Java sont comme un sas de transition avant cette nouvelle aventure.

Joie des retrouvailles, changement de culture pour tous, nouveau rythme de voyage pour nous, repères différents... Nous passons d'une équipe 2 à 4 et nous passons de cyclistes à piétons. Séisme sur l’une des îles les plus sujettes aux tremblements de terre !

Il va falloir composer avec tout cela et trouver un équilibre qui convienne à peu près à chacun. L'occasion aussi de se rendre compte que ces quelques mois de voyage nous ont déjà sûrement profondément transformés... Nous ne sommes plus tout à fait les mêmes qu'il y a six mois lorsque nous enfourchions nos vélos pour la toute première fois.

Finalement, en écrivant ces lignes quelques semaines plus tard, je dirais que l'adaptabilité et le bonheur de se retrouver auront triomphé !

▪︎ Dansons la Javanaise…

Java marque pour nous, l'arrivée en Asie du Sud-Est et une virée dans l'hémisphère sud. Ce sont aussi les retrouvailles avec l'océan, la plage, les bateaux… La découverte de fruits multicolores, parfois inconnus. Un changement de climat et un saut dans une végétation luxuriante.

Sols chauds, entrailles de la terre brûlantes, fumées denses, vapeurs souffrées, geysers bouillants, cratères béants, lacs d'acide…

Bienvenue sur l'île aux volcans !

L'Indonésie compte pas loin de 500 volcans dont 126 sont clairement actifs. 45 de ces volcans parsèment la seule île de Java.

À Java, c'est aussi le grand retour des voiles et de la culture musulmane. Ici la grande majorité des femmes ont la tête et parfois même une partie du visage couvert. Même les toutes petites filles, âgées d'une dizaine de mois à peine sont soigneusement emmitouflées. On s'était, pour le coup, agréablement habitués aux ventres dodus débordants des sarhis colorés et aux cheveux couleurs d'ébène, libres comme l'air.

Les mosquées aux coupoles vertes parsèment chaque quartier et les haut-parleurs relaient par-ci, par-là la bonne parole. Il ne s'agirait pas de rater un mot du discours divin. Volume sonore au maximum, muezzin qui braille à toutes heures du jour et de la nuit et élucubrations interminables. Le micro passe même parfois aux mains d'enfants !

Sans transition aucune avec les jours précédents, les peaux s'éclaircissent brutalement, les nez sont plus épatés, des regards rieurs s'échappent des yeux bridés, les esprits semblent curieux. De grands sourires rayent les visages, les bouches sourient de toutes leurs dents ou du moins de ce qu'il en reste ! Tout le monde est prêt à nous apporter de l'aide même lorsque nous n'en avons pas vraiment besoin...

Le contraste avec l'Inde est frappant. Ces derniers jours à Delhi, combien de personnes nous ont-elles réellement souris ou salué ?

Probablement moins, en une dizaine de jours, qu'en quelques heures ici... On a tendance à penser que la surpopulation dégrade ces liens entre humains. Pour autant, Jakarta est la capitale du troisième pays le plus peuplé du monde.

Une fois encore, nous venons de changer de monde. L'Asie est décidément aussi riche que variée. Qu'elle est loin, à présent, la Turquie, ses champs de blé et ses thés sucrés. Les paysages et les bâtiments abandonnés de Géorgie ou d'Arménie semblent être un lointain souvenir. Qu'elle nous semble éloignée la sobriété des pays de l'ex URSS, qu'elles sont loin les montagnes abruptes de l'Himalaya et la vie bruyante des villes indiennes !

Une nouvelle page du voyage va s'écrire ici, sur cette île... Hâte de la découvrir !

▪︎ Jakarta, premiers pas à Java.

Jakarta, une grande ville à la veille du G20, c'est bien simple, les beaux quartiers sont tout barricadés. Barrières, plots en béton, fils barbelés, police...

Sauvons-nous dans ce dédale de minuscules ruelles où règne une ambiance bien plus populaire.

Dans la vielle ville, les grands bâtiments blancs de style colonial et les vélos multicolores sont les derniers témoins du passage des Hollandais.

Nos biclous à nous prennent des vacances ce mois-ci. Pas un tour de roue pour eux en Indonésie, vacances de fêtards pour ainsi dire : un mois en boîte !

Nos premières marques prises, nous nous mettons en route vers l'Est... Nous sautons dans un train et passons huit heures à voir défiler les rizières, les chapeaux pointus en paille et les averses par la fenêtre de notre wagon.

▪︎Yogyakarta, terminus du train. Tout le monde descend !

Une ville à taille plus humaine dans laquelle nous passerons quelques jours avant de partir vadrouiller dans les environs.

Un gigantesque bazar à étage, des boutiques de Batik (tissu peint) en pagaille, du street art et même des potiers avec des tours qui ne tournent pas !

J'ai ainsi pu remettre la main à la pâte même si ce ne fut pas vraiment concluant ! Finalement, on a opté pour le travail en équipe, la poterie version tandem, le tour à moteur musculaire, une qui façonne et un qui tourne !

Yogyakarta est une ville qui grouille sous le regard d'un volcan qui somnole. Le Merapi est l'un des principaux volcans javanais, il domine la grande ville et sur ses flancs sont accrochés une multitude de villages. Quand on connaît la violence de ses éruptions passées, cette cohabitation paraît quelque peu osée ! Pourtant, ici comme à bien d'autres endroits en Indonésie, les gens semblent vivre paisiblement avec cette espèce d'épée de Damoclés au dessus de la tête et ce chaudron bouillonnant sous les fesses...

Fatalité, résignation ? Et si c'était simplement nous les intrus face à ces éléments si puissants ?

Les jours suivants nous voyons successivement le soleil se lever sur le temple de Borobudur et sur ses dizaines de boudhas, sur les collines verdoyantes du plateau de Dieng puis sur le Merapi depuis le sommet du Sumbing.

▪︎Borobudur, des boudhas et des éléphants.

Borodupur, c'est un des plus grands temples bouddhiste de l'île. Ce qui est surtout fou, c'est que comme le Machu Pichu, il est resté enfouis sous une luxuriante végétation et oublié durant des siècles avant d'être re-découvert plus récemment. Rochers sombres, architecture en escalier, fresques décoratives sculptées, stupas ajourées et un nombre incalculable de boudhas assis dans des niches.

C'est bien simple, ici pour s'endormir, on ne compte pas les moutons mais les boudhas !

Après une inspection des quatre faces du temple dans le sens réglementaire des aiguilles d'une montre, nous observons, curieux une bande d'éléphants qui vaquent à leurs occupations.

Un qui mange une branche, un qui se gratte les fesses contre un poteau, un qui barbote comme un canard dans une mare et un qui fait la courte échelle, à l'aide de patte, à un humain qui grimpe sur son dos. C'est génial de voir avec quelle délicatesse, ces gros patapoufs évoluent.

▪︎Dieng, un plateau aux pays des collines...

S’il y a bien un endroit où nous n'avons pas regretté de ne pas avoir nos vélos, c'est à Dieng ! Les pourcentages de pente sont renversants et l'endroit est bien arrosé ! Combien d'averses avons-nous essuyé ici ?

Dieng est un peu le potager de Java et c'est bien connu : dans un jardin, de l'eau, il en faut ! Collines immenses aux flancs hyper raides, ici le maraîcher doit être aussi cordiste ! C'est presque encordé que l'on va ramasser ses navets.

Des millions de terrasses, parfois si étroites qu'elles n'accueillent que deux ou trois plans de patates. Chaque centimètre carré de terre est exploité et impossible de dénombrer combien de variétés de légumes différents nous avons rencontrés !

Mais il n'y a pas que des patates, des choux, du thé, des carottes, des salades, des papayes... qui poussent ici. Au milieu de toute cette verdure, il y a aussi des fumerolles blanches, une odeur de souffre, des cailloux jaunes poussin, des flaques grises qui bouillonnent, des lacs acides fluo et des geysers d'eau bouillante qui giclent en l'air.

Le centre de la terre est en ébullition et on le sent tout proche !

▪︎Sumbing, les vacances avec des randonneurs !

Voilà ce qui arrive lorsque l'on part en vacances avec des randonneurs... On démarre la balade à 23h30, on marche toute une nuit, on grimpe 1700 mètres de dénivelé, on redescend en courant et puis on a des courbatures de malades pendant trois jours...

Presque six mois que nos pieds ne s'étaient pas retrouvés enfermés à l'étroit dans des baskets et que nos jambes n'avaient pas enchaîné plus de 500 pas d’affilés. Quant au dénivelé avalé, nous étions jusque là toujours assis, jamais debout ! Ajoutez à cela un mois de tourista en mode raplapla et sous-alimentés et vous vous retrouvez avec deux ex-cyclistes à la forme physique de deux lapins nains et grabataires. Et j’exagère à peine…

Bon, on a quand même fait la séance de step du siècle, on a aussi vu le soleil se lever sur le Merapi et on a aperçu les fumerolles au sommet du Sumbing... et c'était chouette !

▪︎Malang au chat...

C'est dans la fraîcheur toute relative du matin que nous sautons du train à Malang.

La première chose que nous rencontrons est ce premier grand rond point, couverts de banderoles, de photos et surtout entouré d'imitations de cercueils... Il semblerait que des choses graves se soient passées ici récemment. On comprend que pas mal de ces jeunes gens décédés auraient été victimes de violences policières.

Par cette mise en scène, les militants ont réussi leur coup, ce funeste spectacle fait vraiment son effet. Mais que s'est-il passé ici ? Je donne Malang au chat...

Après quelques recherches Googlelisées, nous apprenons que suite à la fin d'un match de foot qui a dégénéré le 1er octobre dernier, 127 supporters ont trouvé la mort sous les coups et les gaz policiers. Cata…

Après ce sombre épisode, quelques centaines de mètres plus loin, nous entrons dans la ville multicolore ! C'est depuis un pont que nous assistons au spectacle en contre bas. Maisons arc en ciel d'une part, camaïeu de bleu d'autre part : Kampung Jodipan et Kampung Biru Arema.

On se croirait dans un joli album de littérature jeunesse. Le nuage bleu de Tomi Ungerer serait-il passé par là ? Ou serait-ce « petit bleu » et « petit jaune » qui se seraient embrassés ici à l'infini rejoint par quelques amis ?

Je donne Malang au chat...

A l'initiative de quelques étudiants et avec l'aide de magasins de peinture, ces kampungs (quartiers) pauvres de la ville ont été dynamisé, il y a moins d'une dizaine d'années. Égayer les lieux de couleurs arc en ciel et les rendre plus attirants et plus joyeux à vivre. En voilà une belle idée ! Le résultat reste rustique mais mignon !

Quelques rues plus loin, nous nous retrouvons au milieu de cages de toutes tailles, habitées de spécimens en tout genre. Bienvenue au marché aux oiseaux ! Les indonésiens adorent les oiseaux en cage. C'est bien simple, il y en a partout mais ce coup-ci, ces animaux sont de drôles d'oiseaux...

Lapins, serpents, souris, iguanes, cochons d'Inde, écureuils, hamsters, singes, chiens, chauves-souris... Tout ce petit monde dans des cages microscopiques, mais pourquoi ?!?

Je donne Malang au chat... ah mais même les chats sont en cage ici.

▪︎Rêveurs éveillés…

Premiers rayons du soleil éclairant une mer de sable, vaste étendue de poussière grise, plaine suspendue, boulevard de cendres : la Caldeira de Tengger s'enflamme.

Cône parfait, strié à la perfection, jeu d’ombre et de lumière sur ces cannelures aux premières heures du jour : le Batok s'illumine.

Masse sombre qui sommeille au loin, poussant un soupir fumant de temps en temps… le calme avant la tempête : le Semeru veille.

Montagne aux flancs arides et au cœur fumant, bouche béante, puis plongeant au centre de la terre, ronflement du monstre endormi, fumée sans feu : le Bromo s’éclaire lentement.

Île aux enfants, Île aux volcans...

Quand chaque colline est conique,

L'équilibriste évolue sur le fil,

Cratère vrombissant, fumant, étouffant,

Un pas de travers, le vide, le centre de la terre, un gouffre vertigineux brûlant, la gueule béante du monstre,

Alpiniste des ténèbres, funambule des caldeiras, personnage de papier,

Course d'arête circulaire, balade sans fin, tourner en rond, perdre le Nord,

Pisteur de lave, cueilleur de souffre, baigneur acidulé, chasseur d'images, rêveur éveillé, spectateur bouche bée.

Jouer avec le feu.

"Hati hati"(*), la suite des aventures de la famille Riquiqui tralara en Indonésie arrivent bientôt !

(*) Doucement

Affaire à suivre…

9
déc
9
déc
Publié le 12 décembre 2022

Un septième mois sur la route c'est :


◇ 11 pays 🇮🇹 🇬🇷 🇹🇷 🇬🇪 🇦🇲 🇰🇿 🇺🇿 🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬 🇮🇳 🇮🇩


◇ 5846 km 🚲 (les vélos sont restés dans leurs cartons à Jakarta 😔)


◇ Des retrouvailles 💛


◇ Des vacances de backpackers : des bus, des taxis, des touk-touks, des trains, des bateaux, des scooters 🚅🚍🚗🛵🛺🚢


◇ Des fruits inconnus 🍈🥭🍌🥥🥑🍍🍉🌶


◇ Des animaux 🐒🐈🐃🐡🐀🐘🦚🐿🕷🦎🐦🐓🦦🦇🐠🦟🐛🐟🐜🦋🦖


◇ Des fleurs multicolores 🌈


◇ Des volcans 🌋


◇ Un sommet à 3300m 🗻 et des réveils nocturnes ⏰ et des balades à la frontales 🕯


◇ Des temples 🏯


◇ Des sourires ☺


◇ 56 averses 🌧, 4 parapluies achetés ☂️, 1 appareil photo noyé


◇ 1 nouvelle coupe de cheveux ✂️


◇ Des baignades 👙


◇ Des lacs multicolores 🟢🟤🔵🟠🟡


◇ Des petits dessins et un carnet terminé 📙✏


14
déc
14
déc
Publié le 14 décembre 2022

La suite des aventures de la Riquiquitralara familly en Indonésie...

▪︎Kawa Ijen, vous prendrez bien une tasse de soufre au p'tit déj' ?

Le Kawah Ijen a tenu ses promesses.

Un réveil nocturne suivi d'un rallye en scooter sur des routes aux allures de montagnes russes, à la lueur des phares, puis quelques centaines de mètres de dénivelé dans le halo de nos frontales. Lorsque le jour se lève, nous sommes déjà au cœur du cratère. Les premières lueurs dévoilent la scène.

En quelques minutes, la fumée sombre dore à vue d'œil, les cailloux prennent la couleur du soleil, les flammes bleues s’évaporent peu à peu, le lac d'acide apparaît lentement. Ses eaux turquoises attirent autant qu'elles repoussent...

Le spectacle bat son plein. Puis d'un seul coup, le vent tourne.

Rebondissement : ça pique la gorge, ça arrache le nez, ça fait pleurer les yeux, nos poumons se remplissent malgré eux. Nous retenons tous notre respiration quelques instants, attendant avec suspens le dénouement de l'histoire... Quel scénario !

Mine de soufre à ciel ouvert, porteurs lourdement chargés, souffrants, ambiance martienne…

Les travailleurs d’Ijen, ces extra-terrestres…

Toute une vie à avaler de la fumée et des vapeurs de soufre, à cueillir des cailloux fluorescents, à soulever de très lourdes charges, à descendre dans le noir au creux du cratère, à gravir les centaines de mètres de dénivelé pour en extraire sa récolte, à marcher dans les blocs, chaussés de tongs et à la lueur d'une lampe torche, un chiffon humide dans la bouche en guise de masque, une barre en fer pour seul outil.

Recommencer chaque jour ce dur labeur, au bureau de l'enfer, dans la gueule du diable.

Et avoir encore la force d’un « halo » et d’un sourire pour les badauds.

▪︎ Baluran, un tour dans la savane…

Deux scooters, des oiseaux multicolores, des singes espiègles, une forêt tropicale, des paons qui font les beaux, des cerfs balèzes, la mer bleue, des mangroves labyrinthiques, des crabes tout jolis et des bestioles aquatiques un peu zarbi.

Ici les singes sont à la fois voleurs, moqueurs, agitateurs, goinfreurs, prestigitateurs, énervateurs grimpeurs et baigneurs...

Des arbres isolés, de la terre rouge, de l’herbe sèche... une journée dans la savane africaine où il ne manquait finalement que les girafes !

Quoique…

▪︎Karimunjawa, enfin des vacances !

On a trouvé plus crevant que pédaler 10h par jour et plus fatiguant que guider sur les sommets...

Un mois à jouer aux guides touristiques vulcanogues et à l'agence de voyage tout compris, c'est usant !! Réserver des hôtels, acheter des billets de trains, négocier des taxis, louer des scooters, dénicher des bus de nuits, dégoter des bateaux, faire des plans, les défaire, les refaire, marchander les prix, regarder la météo, trouver les bons restaurants, jouer avec les averses et les orages, passer entre les gouttes, gruger les rangers, organiser les visites, se tenir au courant des dernières éruptions, des accès possibles, jouer aux traducteurs, se lever à minuit et marcher…

Et un jour qui l'eut cru, on nous donne une journée de congé ! Devinez pour quoi on a opté ?! Les vacances à la plage !

L'archipel de Karimunjawa, c'est une réserve naturelle de 27 îles, situé au large de la côte nord de Java.

L'île de l'île... Vie insulaire, incitant à ralentir un peu le rythme… Images de baigneurs, cocotiers et plages de sable blanc, profitez-en, parce que ce n'est pas souvent !

Je me suis même jetée à l'eau (et c'est suffisamment rare pour être signalé !) espérant peut-être secrètement déclencher l'éruption du siècle !

Il n’en fut rien… Juste quelques litres d'eau salée avalés, des coups de soleil sur les fesses et un grand défilé de poissons multicolores.

Tel de vrais vacanciers, équipés de palmes, masque et tuba, nous avons nagé dans un aquarium géant, au milieu de poissons arc en ciel et de coraux bleus.

Nous avons vu des étoiles de mer, des coquillages et des bateaux de pêche aux mille couleurs !

▪︎ A l'affût du Krakatau...

Rendez-vous sur Pulau Sebesi, toute petite île de pêcheurs située entre Java et Sumatra.

Sebesi est l'île habitée la plus proche du monstre du détroit de la Sonde : le Krakatau ! Connu pour ses réveils soudains, ses éruptions dévastatrices, ses effondrements sur lui-même et les tsunamis qu'il déclenche.

Le Krakatau est classé niveau 3 depuis le mois d'avril dernier : « mode veille » selon les spécialistes. Ce qui veut dire que si l'animal n'est pas franchement réveillé, il n’est pas vraiment endormi non plus !

Jusqu'où pousser le bouchon ? A quel moment faut-il arrêter de jouer ? Où placer le curseur ? Jusqu'à quelle distance minimale s’approcher ? Telles sont les questions qui tracassent les vulcanologues en herbe que nous sommes.

Serait-ce ces mêmes interrogations qui hantent les rêves des grands vulcanologues ?

Nous passons nos vies professionnelles à jongler avec des risques, à tenter de les évaluer, les limiter, les accepter ou refuser tout simplement de les prendre parfois. Mais là, on ne parle pas d’une pierre qui roule au dessus de votre tête, d’une pente de neige qui se décroche sous vos pieds ou d’un abîme de glace prêt à vous avaler tout cru…

Ce coup-ci, c’est avec les caprices du centre de la terre qu'il faut composer. On se sent encore plus minus !

Il y a "jouer avec le feu" et sa propre pomme et "jouer avec le feu" accompagné d'une bande d’illuminés qui vous paie à la fois pour que vous les accompagniez voir de la lave rouge, des projectiles qui volent, des fumées toxiques et à la fois pour rentrer vivant et si possible sans être cramé au dixième degré !

Quel job ! Quel engagement et quelle exposition pour ces passionnés de montagnes fumantes et pour tous ces guides des cratères !

Pas difficile d'imaginer que tel Icare, l’on puisse s’y brûler les ailes.

Curiosité débordante et soif infinie de découverte, spectacle captivant et souvenir de cette folle soirée de février où sous nos yeux éberlués, l'Etna s'embrasa.

Dans un rayon de cinq kilomètres autour du volcan, la zone est chaudement déconseillé !

 Pulau Sebesi est l'île toute ronde au nord du Krakatau...

L'accès depuis les côtes Javanaises coûtant un saladier, nous prenons le chemin des vulcanogues fauchés. Un bus, un ferry pour Sumatra, un minibus jusqu'à un débarcadère en bois où des tonnes de régimes de bananes « made in Sebesi » sont en train d'être déchargées d'un bateau en bois.

Comment imaginer que des touristes puissent embarquer ici ?

Pourtant quelques heures plus tard, c'est bien nous qui remplaçons les bananes à bord. Quatre touristes dans la cale, au milieu des sacs de riz, de tomates, de piments, de piles d'œufs de 18 étages et de carcasses de poulets ...

De loin, le Krakatau est facile à repérer, bas sur l'eau et tout couvert de fumée. Lors d'une des dernières éruptions, le cône a perdu plus de cent mètres de hauteur... par temps calme, la rando montant au sommet est donc passée d'une durée de 2h30 de marche autrefois à 40 minutes aujourd'hui !

Bon sinon sur Sebesi, les gens semblent vivre à un rythme plutôt pépouze. Le petit bateau qui y accoste et en repart une fois par jour rythme les journées des habitants... On troque les bananes dans un sens contre des colis Amazon dans l'autre. Les bufles broutent le gazon du terrain de foot, les fèves de cacao sont énormes et les cocotiers faciles à grimper !

Et pour la petite histoire, Sebesi est probablement l'île où les gens sont les plus mirots au monde. Un bon projet humanitaire serait d'envoyer, ici, un ferry rempli de paires de lunettes tant la vue des habitants semble défaillante...

Tout du moins si l'on s'en tient à tous ces "hello mister" qui fusent dans les allées et les chemins !

Que l'on soit quatre, parité respectée, que l’on soit deux filles ou que je sois toute seule, c'est la même chose ! "How are you Mister ?"

Je tente un peu de pédagogie en ajoutant à leur lexique anglophone le "miss" et le "missis" mais le "hello mister" semble être la formule toute prête pour saluer un farang ou une faranguette ici !

 Finalement,  se faire appeler "mister", c'est moindre mal !

En parlant de lunettes, il nous en faudrait peut-être un paire chacun également parce que, même de nuit, même après avoir gravis des mètres de dénivelé dans les plantation de bananiers, de cacaoyers, de cocotiers et bartas en tout genre, après des heures d'attente, à l'affût... nous n'avons rien vu du tout !

Juste beaucoup de fumée, pas mal de bruit mais pas de lave rouge tant attendue ! Le Krakatau a poursuivi sa veille... Et notre curiosité est restée suspendue à l'horizon !

Ici comme ailleurs, le temps file à toute allure… nos visas arrivent déjà à leur terme.

C’est l’heure de refaire les bagages. Pour certains les valises se sont considérablement allégées, alors que pour d’autres, les sacoches se sont considérablement alourdies...

Deux tupperwares de bugnes sitôt arrivées, sitôt avalées !

Corde, baudriers, chaussons, dégaines, mousquetons, friends, sacs à magnésie… que de petits trésors ramenés de nos caisses à matériel restées en France et qui laissent présager de belles journées minérales pour les mois à venir !

C’est le moment de conclure cet intermède javanais…

Merci à nos deux facteurs préférés, merci papa, merci maman !

C'était un peu noël avant l’heure !

« Terima kazih » l'Indonésie, on se souviendra de tes sourires et de tes montagnes fumantes !

19
déc
19
déc
Publié le 19 décembre 2022

"Il n'y a que les montagnes qui ne se croisent pas."


Le hasard des rencontres...

Il y eu d'abord Florence et Maud, deux copines françaises retrouvées par hasard dans les montagnes turques et avec qui nous avions partagé quelques journées de grimpe en mai.

Dans ces mêmes montagnes, il y a eu Valentine et Philipp qui viennent vers moi en me demandant avec un joli accent : "Tu es Lara, non ?" "Je te suis sur Insta..."

Nous partagions les jours suivants café, barbeuc, grimpe, camion-taxi et repas... sûr qu'on cherchera à se revoir au retour !

Puis il y a eu ce matin à demi-réveillés au fin fond de la Turquie où un cycliste nous a rattrapé, Nico. Nous roulions quelques centaines de kilomètres ensemble, partagions quelques casse-croûtes et même deux bivouacs. 6 mois plus tard, c'est une après-midi à New Delhi que nous passions ensemble.

Par le plus grand des hasards, on se rend compte que nous avons une connaissance commune : sa cousine, Johanna !

Puis il y a eu Joan, un cycliste avec qui nous avions partagé une bière à Tbilissi en Géorgie au mois de juin et que nous retrouvons sur les falaises vietnamiennes ces jours-ci !

Enfin, deux cerises sur le gâteau : Francis et Véro.

Dernière journée au Vietnam pour eux, première journée pour nous, à quelques heures près et on se ratait !

On n'aurait sûrement eu un mal fou à faire coïncider nos agendas à Béziers et là, c'est à Hanoï qu'on boit un café (aux oeufs) comme si de rien n'était !

Surréaliste comme au milieu de 8 milliards de visages et sur une planète immense, on peut se croiser et se recroiser par le plus pur fruit du hasard !


Morale de l'histoire : "le monde est tout petit et le hasard fait bien les choses" !


21
déc
21
déc
Publié le 21 décembre 2022

D'une pierre, deux coups ! Ou d'une épine, un trou et une rustine...

Aujourd'hui on fête à la fois nos 6000 km parcourus et notre toute première crevaison depuis le début du voyage !

La prochaine, pour les 12 000 km ?!

26
déc
26
déc
Publié le 26 décembre 2022

Ici, on offre des gribouillis à Noël !

Page après page, kilomètre après kilomètre, mois après mois, pays après pays, le carnet de dessin a fait son chemin...

Et puis un jour, il a été plein à craquer : Mélange de traits, d'histoires, de cartes, de couleurs et de souvenirs !

Le carnet est rentré à la "maison", à l'abri des goutes de pluie et des sacoches pas toujours étanches, à l'écart de la poussière qui se glisse partout et sauvé de la perte ou de l'oubli sur un coin de table quelque part...

J'en ai gardé ces quelques images en guise de souvenirs et pour les partager un peu avec vous !

Trente nouvelles pages vierges... Que le voyage et l'aventure continuent !

29
déc
29
déc
Publié le 29 décembre 2022

S'il y a bien un endroit où le temps s'est subitement accéléré, c'est durant notre passage au Viet Nam...

Un Visa imposé de 30 jours et voilà que deux lettres jouent à saute-buffle : le "i" prend un "thé" avec le "e" et nous, nous voyageons comme deux éclairs (au café) au "Vite Nam" !

Nous ressentons ces contraintes temporelles et administratives comme de plus en plus oppressantes, cela le devient d'autant plus maintenant, que nous sommes à nouveaux cyclo-grimpistes.

Grimper, rouler, grimper, rouler... dans un pays de 1800 km de long, ce sont des mois de 85 jours et des visas pour voyageurs escargots qu'il nous faudrait ! Grimper ou rouler, faudrait-il choisir ?

Un compromis, trouvé ce mois-ci, est de pédaler sur les petits trajets de moins de 300 kilomètres, d'utiliser les vélos pour se déplacer sur les spots de grimpe, de rentabiliser, autant que nos muscles et notre peau des doigts nous le permettent, les journées de grimpe et d'optimiser les grandes distances en comptant qu'un bus ou qu'un train compréhensif nous embarque avec tout notre bardas.

Un pied posé à Hanoï et le compte à rebours est lancé.

Passeports tamponnés : Paf ! Vous avez jusqu'au 31 décembre, profitez en ! Pour le réveillon 2022-2023, ce sera donc à califourchon sur une frontière on ne sait où !

Le sablier retourné, le temps s'égraine à toute vitesse dans un voyage où l'on a juste envie de prendre le temps. D'autant plus que vu notre petite forme physique des dernières semaines, nous aurions juste besoin de nous arrêter un peu et de ne plus bouger pendant quelques jours ! Le covid ramené dans mes sacoches de Java finit de m'achever dans cette course effrénée.

Après sept mois de voyage, on touche un peu du doigt la réalité et les limites de cette vie de nomades : on ne se pose pas souvent et on ne se repose jamais vraiment. Mais comment ne pas avoir envie de courir partout quand on a le monde à découvrir ? Cet équilibre à trouver ne résumerait-il pas la sagesse du voyageur au long cours...

En un mois, nous aurons, au final, vu bien peu de pays mais finalement peu importe... Nous avons pu profiter de chacun des endroits où nous avons posé nos sacoches, planté notre tente ou déroulé notre corde.

En chemin, nous avons vu le soleil briller fort et se coucher sur l'horizon dès la fin d'après-midi. Nous avons vu les arbres fruitiers de toutes sortes défiler dans le rétro, les rizières assèchées ou déjà inondées, les chapeaux pointus de paille émerger des champs et les scooters chargés comme des semi-remorques. Nous avons vu les bufles luisants dans leur costume de boue, les plantations d'eucalyptus bien rangées et des machines à déshabiller leurs troncs. Taille-crayons géants et grandes feuilles de bois souples prêtes à être "contre-plaquées" mises à sécher.

Nous avons sursauté à chacune des poules remuant dans un buisson à quelques centimètres de nos pneus. Réactions ancrées d'un lointain souvenir de contrées où le chien était la bête noire du cycliste. Mémoire d'un temps où les chiens n'étaient pas sur les étals du boucher.

Ici au Vietnam, le chien, c'est mort ou vif !

Nous avons vu ces collines aux formes extraordinaires. Des dos de chameaux de pierres couvertes de végétation émergeant des plaines. Nous avons vu des forêts si vertes et si denses qu'on n'oserait tenter d'y pénétrer. On a croisé des scooters et des vélos comme principaux et presque uniques moyens de déplacement à la campagne comme à la ville. Nous nous sommes noyés, mélangés, confondus, empêtrés dans ce flux continue de deux roues.

A la sortie des écoles, sur les autoroutes, dans les chemins de campagnes, sur les ponts, dans les grands carrefours, dans les ruelles étroites, entre les étals des marchés, dans des rues en travaux et au passage à niveau, à la seconde, où tout le monde redémarre en trombe !

Nos petits vélos apparaissent finalement peu chargés et assez bien éclairés dans ce chao organisé, nous y roulons de jour comme de nuit. Et puis aussi le jour et la nuit de Noël ! Une autre histoire encore !!

Dans ce flot, il y a de rare autos, quelques camions, deux ou trois bus et des centaines de milliers de scooters chargés de mille et une choses, des centaines de vélos croulant sous les paniers de fleurs ou de fruits, transportant d'énormes poteries, des ballets hirsutes ou des gadgets de toutes sortes. Des piétons qui zigzaguent à toute hâte et d'autres l'épaule lourdement chargée de palanche. Équilibre précaire mais impeccable de cette barre de bambou et de ces deux paniers plats qui y sont accrochés. Rouler au milieu de toute cette vie agitée fut une expérience certaine !

Hanoï... Qu'elle devait être chouette cette ville avant l'arrivée des scooters ! Des vélos et des piétons aux chapeaux pointus partout !

A la tombée de la nuit, nous avons bivouaqué à l'écart des regards ou sur le stade de foot avec la visite de l'équipe locale ou du village tout entier ! Dans la nuit noire, nous avons reçu en cadeau des fruits, des œufs et des biscuits.

Aux premières lueurs du jour, la vie reprenait, les coqs chantaient sans ne s'être jamais arrêtés et les scooters repartaient aux champs.Dans ces campagnes, le long des routes, dans les villages, nous appris qu'ici, un sourire, un salut n'est pas offert sur un plateau, qu'il faut aller le chercher...

Pas de "Xin chào" qui vole au vent, pas de sourire qui dévoile les dents. Parfois quelques "hello, what's your name ?" bien appuyés des enfants en nous voyant et puis des rires moqueurs de tous âges sur notre passage.

Le Vietnam marque pour nous l'arrivée en Indochine. C'est par la jolie porte d'Hanoï que nous entrons dans ce grand royaume qu'est l' Asie du Sud-Est. Le Vietnam marque pour nous le retour sur la selle après un mois de pause à Java.

C'est aussi le grand retour de la conduite à droite. La dernière fois, autant qu'on s'en souvienne, c'était l'été au Kirghizistan. Le Vietnam, c'est notre retour sur le rocher après sept mois d'arrêt. On avait quitté les chaussons au printemps à l'autre bout de l'Asie, en Turquie.

Ici comme à chaque nouveau changement de pays et de culture, nos références doivent être réinitialisées une fois encore... Modifier nos attentes, ne pas faire de suppositions, changer notre lexique de base...Un passé traumatique, une histoire déchirante, une population qui a trop souffert. Quelle place pour nous voyageurs venant de loin ? Pouvons-nous prétendre être les bienvenus en tant que craignos de français ?

Il restera néamoins de cette époque cette étrange mode de se trimballer en treillis militaires et coiffé d'un casque de l'armée en toutes circonstances ! Tour à tour, casque de scooter, couvre-chef pour se protéger du soleil ou de la pluie, casque de chantier, chapeau chic etmême le bob parfait pour aller travailler aux champs !

Le Vietnam c'est aussi pour nous, le retour de la nourriture qui a du goût sans être trop épicée. C'est l'arrivée des temples aux écritures chinoises et des lampions rouges. C'est le retour des cochons et des églises (aucun lien entre les deux, quoique...).

C'est le retour des sandwichs et du pain. Le retour du vrai café d'adultes, d'adultes sérieux même !!

C'est le retour de la fraîcheur et des doudounes et puis c'est le retour d'un temps sec sans parapluie !


Qui nems nous suivent ?

La suite des aventures des cyclogrimpistes au ViteNam au prochain épisode ! Restez à l'écoute !

31
déc
31
déc
Publié le 31 décembre 2022
2
janv
2
janv
Publié le 2 janvier 2023

Que 2023 soit pleine de surprises et de découvertes, de rencontres en tout genre et de chouettes aventures ; que des petits cœurs volent partout et que les étoiles brillent fort !

Que cette nouvelle année soit illuminée de mille couleurs, de millions de visages, de doux sons et de délicieuses odeurs !

Bonne année à vous tous, aventuriers de la vie !


4
janv
4
janv

Entre la liste au père Noël, la fabrication des petits sablés et le choix de la tenue du réveillon, le mois de décembre est passé à toute allure et je n'ai même pas eu le temps de vous raconter toutes ces chouettes découvertes vietnamiennes ! Mais par où commencer ?

☆ Hanoï, Hanoï... Vous connaissez la chanson ?

Je pourrais tout d'abord, vous parler de cette jolie capitale dans laquelle on a envie de faire une pause.

Hanoï, c'est vivant sans être trop agité, c'est animé sans être trop bruyant, c'est remuant sans en être pesant.

Dans la fraîcheur de ce premier matin vietnamien, nous avons rendez-vous ! Dans le registre des rencontres improbables à l'autre bout du monde, c'est Francis et Véro, deux amis de toute la vie qui nous attendent pour le café sur ce bout de trottoir d'Hanoï !

C'est en cette excellente compagnie que nous goûtons notre premier café aux oeufs vietnamien.

Guidés, de bonne adresse en bonne adresse, nous dégustons notre premier "Bun Cha" (soupe avec de la viande de porc, des nouilles de riz et plein d'herbes) suivi de notre premier "sua chua nep cam", yaourt, riz noir et glace pilée.

Les saveurs et l'appétit sont définitivement de retour et ça fait plaisir !

Après plus d'un mois et demi raplapla, nos estomacs reprennent du service, nos papilles frétillent à nouveau et l'aiguille va pouvoir regrimper sur la balance ! Reste un petit covid à évacuer, quelques gélules de vitamines à avaler et l'énergie devrait revenir petit à petit.

Ce jour là, il y a tant de choses à se raconter que je consomme ce qu'il me reste de voix : le repos des cordes vocales ce sera pour plus tard !

Quels bons moments !

Que pouvions nous espérer de mieux pour fêter cette toute première journée ?

Les jours suivants sont comme une partition qui se déroule sur ce pays encore inconnu.

Hanoï, Hanoï... Sur un air musical et sur les belles paroles de la Grande Sophie, Hanoï, nous te découvrons.

Nous marchons sur tes trottoirs encombrés de deux roues stationnés ou slalomant entre tous ces minis tabourets servant de terrasses aux restaurants ambulants.

Nous nous promenons autour de ton lac et observons ces gens qui flannent, ces enfants qui jouent, ces amoureux pour qui la terre s'arrête un temps de tourner. Nous traversons tes ruelles, zigzaguant entre scooters et klaxons, entre vélos et chargements, entre piétons et palanches...

Nous profitons de tes soirées animées et nous découvrons tes jeunes danseurs connectés. Devant tes temples nous nous arrêtons et écoutons de longues minutes tes musiciens, souvent malvoyants, promener leurs doigts sur cet incroyable instrument monocorde.

A cet autre croisement, nous regardons tes artistes et ces pièces de théâtre de rue.

Tes fameux rails urbains et ton train qui semble rouler dans une ruelle, juste sous le nez des badauds occupés à boire un café.

Tes façades coloniales un peu délabrées et leurs balcons envahis de végétation...

Sur tes placettes, tes marchés matinaux sont un vrai petit spectacle. Vendeuses assises à même le sol, étals de fruits de toutes formes, de légumes frais, de viande en train d'être découpée, de poissons encore vivants, de grenouilles qui se demandent ce qu'elles font là ou encore de fleurs multicolores.

Au beau milieu de ce petit bazar, des piétons chargés de leurs commissions, des vélos qui roulent ou encore ces hommes et ces femmes coiffés de chapeaux de paille pointus équilibristes, palanches sur l'épaule. Contenants en équilibre qui rasent le sol sans jamais le heurter.

Nous patientons à tes carrefours où le flux peut être ininterrompu. Avec nos vélos, nous apportons notre eau au moulin et nous nous noyons dans ce véritable flot humain.

Partout, tes drapeaux rouges étoilés flottent au vent. Jamais loin le marteau et la faucille s'affichent fièrement.

Ton ciel gris et tes températures fraîches, nous font faire un saut illico dans l'hiver ou l'automne, tout du moins !

Ici, nous partageons quelques journées avec Laure, ma tante voyageuse, appareil photo en bandoulière.

Quelle joie de se retrouver à l'autre bout du monde et de partager ces quelques instants ensemble !

3 éléphants dans un magasin de porcelaine...

Une journée à passer d'atelier de potier en atelier de potier en découvrant des techniques industrielles, des savoir-faire ancestraux et des fours grands comme notre camion !

Travail à la chaîne et industrie monumentale de la poterie, le rendement est juste incroyable et les stocks vraiment énormes. Pour autant entre un bout d'argile et une pièce prête à l'emploi, les étapes et les gestes à accomplir sont incalculables et le travail considérable !

Je suis comme un poisson dans l'eau dans ces immenses ateliers poussiéreux, à essayer de mémoriser chaque geste et à avaler ces relents d'émaux.

Si vous vous retrouvez un jour avec une poterie style chinois entre vos mains, pensez y, elle vient sûrement d'ici !

☆ Cat Ba, camp de base

Cat Ba ne ressemble pourtant en rien au campement au pied d'une montagne. Ici, pas de tente mais des hôtels de plusieurs étages ; pas d'alpinistes mais des pêcheurs ; pas de sommets pointus à l'horizon mais l'océan et des collines aux formes originales.

Mais sur l'île de Cat Ba, il y a quand même des falaises et c'est ici que nous remettons nos chaussons d'escalade pour la toute première fois depuis 7 mois. Approche à vélo et bonnes côtes, rocher gris et renversant, prises crochetantes. Back sur les bacs !

Devers et caillou tranchant comme des lames de rasoir, il n'en fallait pas plus pour nos petits bras de cyclistes, nos doigts d'artistes et nos pieds de vacanciers !

La joie d'être de retour à la verticale, nous fait, dans un premier temps, oublier tous ces désagréments avant qu'il ne faille se rendre à l'évidence : très vite un jour de pause s'impose !

Nous visitons tour à tour différents secteurs, les bras reprennent du service alors que les pieds comprennent que le confinement est à nouveau d'actualité !

Et le jour de repos, pas de grimpe, pas de vélo...

Mais devinez ce qu'on fait ?! On pédale avec les bras, pardi !

Je vous raconte ça au prochain épisode !

À suivre...

8
janv
8
janv
Publié le 10 janvier 2023

Un huitième mois sur la route c'est :


◇ 12 pays 🇮🇹 🇬🇷 🇹🇷 🇬🇪 🇦🇲 🇰🇿 🇺🇿 🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬 🇮🇳 🇮🇩 🇻🇳

◇   6332 km 🚲

◇ 3 crevaisons ❗

◇ Des retrouvailles 💛

◇ Du bus, du train, du bateau, du kayak... 🚢🛶🚌 🚆

◇ Des fruits délicieux 🍉🍇🍌🍍🥭🍊

◇ De bons petits plats 🍲

◇ 69 repas aux baguettes 🥢

◇ Des animaux 🐒🐈🐃🐡🐀🕷🦎🐦🐓🐠🦟🐟🐜🦋

◇ Des millions de scooters 🛵 et des velos-boutiques 🚲

◇ Des sourires d'enfants 👧🏼🧒🏻👨‍🦰👨🏻‍🦱👩👶🏼👱🏼👶🏻👧🏽🧑🏻

◇  Une capitale ⛩

◇ Des potiers et des milliers de théières 🫖

◇ 2 averses 🌧

◇ 16 pamplemousses géants 🍊

◇  1 nouvelle coupe de cheveux ✂️

◇ 12 journées de grimpe 🧗‍♀️

◇ De jolies baies et une baignade 👙

◇ 1 Noël 🎅 et 1 réveillon du jour de l'an 🥳

◇ 1 mission Visa réussie ✅

◇ Des petits dessins ✏

11
janv
11
janv
Publié le 11 janvier 2023

Suite et fin… (enfin presque !)

☆ Ha Long la grandiose, Lan Ha la radieuse

Parlons à présent de la fameuse Baie d'Halong et de sa petite sœur la Baie de Lan Ha.

En voyage, il y a toujours ces sites incontournables qu'on aurait presque envie d'éviter ou du moins de visiter à notre manière... Ces baies-là font parties de ceux-là.

Vous nous imaginez sur une jonque splendide avec des cabines luxueuses embarqués pour une croisière de quelques jours dans la baie la plus célèbre du monde ?

Pas tellement, n'est-ce pas ?

Aujourd'hui, c'est avec les bras qu'on pédale !

Nous voici partis sur les flots pour nous perdre dans ce dédale d'îlots.

Que notre labyrinthe soit plus marin que le sien... ça vous rappelle quelque chose ? Quelqu'un ?

Non, ce n'était pas le radeau de la méduse ce bateau mais deux canoës deux places. Deux, parce que "les copains d'abord" d'accord mais nous, on ne partage pas nos bateaux ! Nous sommes donc chacun capitaine d'un canoë deux places avec nous seuls pour matelots !

Quelques moulinets de bras et le paysage de la baie défile sous nos yeux hébétés, nous laissant bouche "baie".

Parlons de ces 1600 îlots, de ces collines émergeant de l'eau, de ces villages flottant et de ces élevages de poissons démesurément gros.

Parlons de ces barques de pêcheurs en paille et à rame et de rocher gris incroyablement sculpté de cannelures géantes.

Disons aussi que lorsque la brume du matin enveloppe cet univers ou que quand le soleil de fin de journée et ses tout derniers rayons jettent leur voile sur tous ces îlots, on se croirait dans une double page d'un GEO...

Évoquons encore ces créatures géantes émergeant de l'océan. Tortues gigantesques, chameaux et dromadaires géants, chats faisant le gros dos rond, dragons à bosses, animaux imaginaires fossilisés à jamais et semblant jouer à cache-cache sous l'eau, comme on fait de l'apnée dans sa baignoire !

J'ai un secret. Ces monstres imaginaires, se sont déguisés en îlots pour égayer la baie.

Mais chut... Ne les dérangeons pas, ne les réveillons point, ne faisons pas de vagues !

Leurs dos bossus couverts d'une végétation luxuriante, leurs flancs abrupts au rocher sculptés, tantôt gris, tantôt orangé et leurs têtes bien enfouies à mille lieux sous les mers.

Nous regardent-ils voyageurs d'aujourd'hui avec un périscope ?

Se rincent-ils l'œil en regardant les filles en maillot de bain sur les bateaux de croisière !?

Paysages maintes fois aperçus sur le papier ou sur la toile...

Comme à chaque merveille du monde "vue de mes yeux vue", j'ai cette même pensée naïve : alors, c'est bien vrai... ça existe donc véritablement !

Le nombre d'îlots est incalculable, leurs visages changent dès lors qu'on modifie l'angle de vue et les chenaux entre eux est un vrai dédale.

Labyrinthe géant, nous nous y perdons une journée durant en donnant quelques coups de pagaies, tournant en rond à bord de nos embarcations.

On se faufile entre ces karts, on traverse des baies, on passe des caps sans cesse, on entre dans des grottes, on traverse des ponts de roche, on acoste sur des plages, on débarque sur des pontons de bois...

On perd le nord, l'eau s'invite à bord en même temps que notre imagination déborde de nos embarcations !

☆ Sur les routes Vietnamiennes...

Parlons aussi de ces quelques jours de pédalage, terrestre ce coup-ci.

L'itinéraire consistant à quitter la côte pour rejoindre, 200 km plus loin, à peu près le même paysage mais sans la mer !Ça paraît improbable mais c'est pourtant vrai !

Rendez-vous à Huu Lung ! La prononciation restera un mystère puisque pas une fois en 200km, quelqu'un n'a réussi à comprendre où nous nous rendions véritablement !

Les jambes reprennent du service et les fesses se refont à l'idée de rester posées toute la journée. Voilà quelques temps que nous n'avions pas enchaîné les journées cyclistes.

C'est cyclique : se réveiller, plier le bivouac, rouler, manger, rouler, manger, rouler, chercher un spot, monter la tente, se jeter dedans et roupiller avant que cela ne reprenne en boucle. Chaque jour le même programme. Le paysage défile.

Les routes changent de taille, de revêtement et d'inclinaison. La lumière varie et les températures aussi.

Des villes, des hameaux, des campagnes sont traversés à vive allure. Nous prenons gare, tour à tour, aux camions et aux bus, aux rares voitures, aux nombreux scooters. Nous sommes heureux de croiser un vélo ou de laisser la priorité à un buffle !

Les pensées vont et viennent...

Plus on roule, plus je me dis que ce moyen de locomotion est incontestablement le plus adapté pour se déplacer à « vitesse humaine ».

Le vélo a cette capacité incroyable de nous permettre de nous balader à des endroits où même un bus local ne nous aurait probablement pas déposé et il nous permet de croiser des gens à bonne allure mais laissant quand même le temps à un regard échangé ou à une parole qu'on laisse s'envoler. Le vélo, d'autant plus chargé, avec un gringo au guidon, a enfin cet avantage incontestable d'accrocher au minimum les regards, de susciter la curiosité la majeure partie du temps et d'attirer la sympathie lorsque la chance nous sourit !

En 8 mois de voyage, nous avons maintenant largement expérimenté ces trois degrés d'humanité.

Aussi en quelques kilomètres à peine, le ton est bien souvent donné... Coups de klaxon ou gestes amicaux aux fenêtres des véhicules, regards admiratifs des piétons, interrogations curieuses, signes de la main, saluts dans la langue locale, signes de sympathie des cyclos locaux, sourires des petits et grands enfants... Et ici... rien ou presque !

Il ne s'agit pas là de faire des généralités ni de mettre tous les Vietnamiens dans un même sac mais simplement d'observations faites au guidon.

Combien de nos "Xinchao" sont-ils restés sans réponse ? Combien de nos sourires sont restés suspendus ? C'est un peu contrariant mais après tout…

Pourquoi pas ?! Qu'en serait-il si nous voyagions en France ?

Voyons le bon côté des choses... Nous ne sommes pas sans cesse obligés de lâcher le guidon pour faire coucou de la main et nous n'avalons pas de moustiques en roulant sourires aux lèvres et bouche ouverte ! On ne perd pas non plus de temps avec des invitations et des arrêts improvisés en chemin, aussi les quelques centaines de kilomètres sont assez vite avalés.

Nous voici arrivés à destination !

☆ Huu Lung, paradis de la grimpe Vietnamienne

Huu Lung, c'est le "number one" des spots de grimpe vietnamiens.

Il faut dire qu'ils ne sont pas nombreux et pourtant le potentiel peut sembler infini. Il manque simplement d'un peu de main d'œuvre, de matériel et de quelques grimpeurs locaux supplémentaires. Ici comme ailleurs, même si le nombre de grimpeurs de salle se multiplie, aller grimper sur du rocher n'apparaît pas nécessairement comme une finalité.

Année après année, une petite équipe locale fait pousser les jolies lignes et fait naître peu à peu de beaux secteurs.

"Cảm ơn" à eux pour ces petits bijoux ! Rappelez-vous les dragons magiques fossilisés de la Baie d'Halong... ici, c'est sur leurs dos que l'on grimpe !

La mer s'étant retirée, toutes les zones plates ont laissé place aux rizières, aux prairies et aux villages.

Nous posons notre tente pour une petite semaine dans le jardin d'un homestay construit et géré par la boîte de grimpe locale, Vietclimb. Chaque soir, un délicieux repas nous y attend.

Cette sédentarité temporaire est tellement appréciable : ne pas démonter chaque jour la tente, pédaler un peu, grimper, se reposer parfois une journée, manger un vrai repas chaque soir...

C'est chouette les vacances comme ça !

Plusieurs jours durant, nous rayonnons autour du village et une fois encore le vélo apparaît comme le moyen le plus adapté pour rejoindre les différents spots souvent éloignés de quelques kilomètres et parfois accessibles par de petits chemins de terre.

Chacun d'entre eux est une belle découverte. Grands murs allant de la verticale à l'au-delà, rocher variant du gris à l'orangé en passant par le blanc. Mur à trous de toutes tailles, tufas (concrétions) extravagantes, fissures tranchantes comme des lames de rasoir...

Pas de répit pour les bras, ni pour la peau des doigts !

Un genou coincé derrière cette stalactite, une paire de fesses posée sur cette patate proéminente ou une hanche appuyée contre cette colonette.

Objectif, se reposer avant d'être fatigué !! C’est exactement la grimpe que j'aime : escalade version « oso peressoso » !

Bras tendus, repos optimisés et vitesse d'ascension qui frôle le record de lenteur ! J’adore, mais qu’en dit l'assureur ?

… oups, il s’est endormi !

Nous grimpons chaque jour des lignes incroyables et nous sommes quasiment tout le temps les seuls grimpeurs du secteurs.

Les journées se suivent et se ressemblent. Le temps semble suspendu, à un détail près : le nombre de jours restant sur notre visa continue de fondre comme neige des Pyrénées en décembre 2022...

Il est temps de plier bagages !

☆ Noël chez les viets...

Baisser le chauffage pour que cela ressemble un peu à l'hiver puis accrocher, une à une, toutes les boules dans l'arbre. Cette année, elles sont costaudes !

Glisser nos crocs au pied du tronc et attendre que le papa Noël les remplisse de temps libre, de joie, de rencontres, de découvertes, de bras et de chocolats, de mollets et de soleil, d'animaux extraordinaires, de fruits multicolores, de sourires, de jolis paysages et d'amour toujours !

Noël au balcon, baguettes au réveillon !

Giáng sinh vui vẻ ! Joyeux Noël !

Et vous, vous avez été gâtés ?!

Noël à Hanoï, qu'en dire ?

Il y avait ici ce côté bien sympathique des fêtes d'antan. Festif mais pas excessivement commercial pour autant. Nous n'avons vu personne sortir de boutiques encombrée de sacs démesurément gros, ni de gens traverser la rue les bras chargés de cadeaux, ni de poubelles débordantes de papiers froissés le 25 décembre au matin, ni même d'enfants essayer leurs tout nouveaux flingues en plastique.Juste une belle journée ensoleillée, du temps passé en famille, des rues qui vivent, des gens qui profitent de leur jour de congé…

Ces deux enfants de 6 et 9 ans puis, quelques minutes plus tard, ce troisième âgé de 8 ans qui viennent, tour à tour et spontanément, nous aborder et mettre en pratique leur anglais déjà parfait. Leurs parents, en retrait, semblent à peine s'intéresser à nous et à cet élan d'humanité de leur progéniture. L'initiative leur est propre et elle est belle.

Curiosité débordante, questions pertinentes, esprits cultivés, connaissances fournies et ouverture sur le monde…

Voilà qui donne espoir en l'avenir !

Par nos échanges, la graine du voyage et de la vie simple sont semées. Sans nul doute, elles feront leur chemin !

Observer la soif de découvrir illuminer leurs visages et la pétillance animer leurs regards transforment en quelques instants ce joyeux noël en noël joyeux !

Merci les p'tits vietnamiens !

17
janv
17
janv
Publié le 17 janvier 2023


Il y a presque 15 ans (quand la mobilité douce et qu'être écolo n'étaient pas encore à la mode !) lors de nos premiers voyages en vélo avec du matériel d'escalade et d'alpinisme dans nos sacoches, les gens souriaient lorsqu'on parlait d'un trip "vélo-grimpe".

Ils nous demandaient, un peu moqueurs, si on amenait vraiment nos vélos accrochés à nos baudriers sur les parois ou sur les sommets.


Ils semblaient même un peu déçus lorsque l'on répondait que nos vélos étaient simplement un moyen de déplacement permettant de perdre beaucoup de temps (tout en se fatiguant !) pour aller d'un spot de grimpe à un autre !


L'autre jour en descendant d'un bon petit dévers, je suis arrivée par hasard presque à califourchon sur mon vélo, pourtant garé assez loin de la paroi !

Bruno a immortalisé cette coïncidence.


Cette photo et ce sourire racontent beaucoup de choses.

C'est ça le voyage "vélo-grimpe" !



22
janv
22
janv
Publié le 22 janvier 2023

Pour entrer au Laos, il faut un visa, ça tout les petits voyageurs le savent. Il y a les touristes bien informés et puis il y a les autres...

Dans cette catégorie, il y a les petits têtes en l'air qui lisent un truc périmé sur le net qui dit que le visa se fait pépouze à l'arrivée, à la frontière. Tranquille quoi !

Il y a aussi une sous espèce : les cyclistes zen qui ne vérifient pas l'information, les mêmes d'ailleurs qui devraient s'en soucier encore davantage quand le poste frontière est au sommet d'un col haut perché ! Inutile de préciser que l'on fait parti de cette catégorie là !

Quand on n'a pas de tête, mieux vaut avoir de bons mollets !

C'est cadeau ! Une route défoncée, tantôt en travaux, tantôt en goudron dans un piteux état et quelquefois en terre et un ballet de camions-bennes chargés de terre et convois de poids lourds vides, roulant à toute blinde. 1300 mètres de dénivelé pour nos chers petits mollets !

Nous quittons Hanoï le jour de Noël via un train de nuit. Il est 22h quand nous grimpons à bord. Une fois encore l'organisation de la société de chemin de fer locale est bien rodée : cabine couchettes, draps propres, de la place pour ranger nos 11 bagages et une responsable de wagon attentionnée. Les vélos, quant à eux, ont trouvé leur place dans le wagon à marchandises.

Bercés par le ronronnement du train, nous nous endormons vite en rêvant déjà à la prochaine destination : le Laos.

Il est 4h30 du matin lorsque nous débarquons à Vinh, il fait encore nuit noire. Motivés, nous prenons illico la route encore bien calme à cette heure matinale. Le jour se lève peu à peu en même temps que nous quittons la route principale et que nous nous enfonçons dans des chemins de campagne. La saison est au labour des champs et c'est un véritable défilé de bufles.

La soixantaine de kilomètres de plat est vite avalée et à la mi-journée, nous sommes déjà au pied du col. On s'offre une pause de plusieurs heures, il n'y a pas d'urgence. Nous sommes le 26 décembre et nous avons jusqu'au 31 pour quitter le Vietnam. De plus, nous ne voulons franchir la frontière que le lendemain matin afin de ne pas perdre inutilement une journée sur le prochain visa.

Nous roulons vers le col aux heures plus fraîches pour autant la chaleur est bien pesante. Lacet après lacet, kilomètre après kilomètre, le but se rapproche.

Devrais-je dire "but", à tous les sens du terme !

Les camions nous doublent, les chiens nous coursent et les nids de poule nous secouent. Nous nous couvrons peu à peu de sueur et de poussière et l'heure tourne.

Lorsque nous plantons la tente sur un rebord de fossé et que nous nous jetons à l'intérieur, il fait nuit noire. Nous sommes aux premières loges pour le défilé de camions bruyants et aux phares bien éclairants !

Le lendemain matin, au réveil, le compte à rebours est lancé mais à cet instant, nous ne le savons pas encore...

Encore quelques kilomètres de grimpette et nous voici au sommet du col. Nam Phao checkpoint, devant nous la porte de sortie du Vietnam et ses gardiens en uniforme.

Nous prenons soin de dépenser nos derniers dongs dans le seul boui-boui à quelques mètres en mangeant une soupe à 10h du matin !

C'est lorsque nous présentons nos passeports aux douaniers vietnamiens que les choses se gâtent...

"Lao visa ?", ils n'ont que ces deux mots à la bouche. Autrement dit, sans visa, tu ne passes pas.

On tente en vain d'expliquer qu'on est monté jusqu'ici en vélo, que notre visa vietnamien expire dans quelques jours, que l'on a eu une info disant que le visa pouvait se faire à la frontière et que l'on ne va quand même pas retourner à Hanoï qui se trouve à presque 400km d'ici et surtout qu'on en vient !

Mais si un douanier faisait du social, ça se saurait... L'un d'eux nous colle sous le nez son écran de smartphone. Le verdict tombe :


27 décembre, 12h04, apprendre le sens de ce mot à la mode : « résilience »

Une foule de questions se bouscule dans nos têtes. Comment aller à Hanoï et revenir ici en moins de 4 jours ? Combien de temps faut-il compter pour faire une demande et recevoir un visa à l'ambassade ? Quels documents sont nécessaires ? L'ambassade sera-t-elle ouverte en cette période de fête et de week-end ? Que faisons-nous des vélos ? Et de nos bagages ? Pouvons-nous les laisser là ? Et si nous choisissons ensuite de repasser une autre frontière plus au nord car plus proche ? Y-a-t-il des bus qui passent par là dans lesquels on pourrait embarquer ? Combien coûte l'amende par jour de retard ?


Évidemment, ce n'est pas dans cette situation que la sympathie des Vietnamiens remonte dans nos estimes, quoique... la seule qui essaie de nous aider est la femme de ménage !

Un pick-up nous demande une somme astronomique pour nous conduire à la dernière grande ville. On décline l'offre.

On tente notre chance avec des poids lourds mais ce coup-ci ce sont eux qui déclinent la demande !

Maintenant, il faut agir et vite !


27 décembre 13h, demi-tour !

On perd donc à contrecœur tous les kilomètres et les centaines de mètres de dénivelé avalés la veille en dégringolant la pente.


27 décembre 15h, petite ville en vue !

Des bus peuvent nous conduire à la grande ville où nous pouvons reprendre un train pour Hanoï mais je me dis qu'il y a plus simple : opter pour un trajet direct d'ici à la capitale. C'est un peu comme espérer un bus pour Paris depuis Bourg d'Oisans mais figurez-vous que ça fonctionne !

La gare routière est déserte mais on comprend que le bus devrait passer vers 19h. L'incertitude demeure quant au transport des vélos.



27 décembre 19h, gare routière de ce patelin paumé…

C'est parti pour une discussion de marchands de tapis (ou de chauffeurs de bus qui essaient de vider les poches déjà vides de deux cyclistes en perdition !



27 décembre 21h, marché conclu !

Nous voici allongés dans un "bus cama grand luxe", une couchette chacun et les vélos en soute. Dodo !



28 décembre 3h30 du matin, Hanoï roupille.

Une dizaine de kilomètres by night à Hanoï jusqu'au centre ville, c'est chouette une ville la nuit !

Repérage de l'ambassade : ça n'ouvre qu'à 8h30.


28 décembre, 5h, Hanoï s'éveille.

Café sur un bout de trottoir dans le vieux quartier. Il fait encore nuit noire et déjà les scooters et les passants se multiplient à vue d'œil !


28 décembre, 7h02, même le ciel verse une larme !

Il pleut... et dire que cela fait presque un mois que l'on est au Vietnam et que nous n'avions pas vu une seule goutte de pluie. Un signe ?


28 décembre, 8h, mission "change money" !

Et oui, le visa ça s'achète et nous on n'a plus de sous... On trouve finalement un bijoutier intéressé par nos euros.


28 décembre, 8h29, Tic tac…

Seatting devant l'ambassade en Gore tex jaune.


28 décembre, 8h30, ouverture des portes !

Un peu comme le jour des soldes sauf que l'on est seul ou presque !

Bruno passe le portail et je le vois disparaître dans le bâtiment. Je garde les vélos et j'ai même le temps pour un petit dessin sur un bout de cahier...


28 décembre, 9h15, sortie souriante !

Voilà mon Bruno qui ressort avec le sourire et en compagnie de deux français que nous avions déjà aperçu, tenez-vous bien... hier à la frontière !

Même scénario pour ces deux cocos mais pour eux ça a été une mission "train+scooters de loc".

Mieux vaut en rire qu'en pleurer !


28 décembre, 9h30, une journée et une nuit à Hanoï en bonus !

Nos passeports décorés d'un nouvel autocollant devraient être prêts cet après-midi. C'est donc raté pour reprendre le même bus par lequel nous sommes arrivés en fin de nuit et qui est censé repartir à midi, tant pis !


28 décembre, 9h45, deuxième averse de la journée.

On débarque un peu humide dans une chambre d'hôtel et pour mon plus grand bonheur, je découvre dans la salle de bain... une baignoire !!! ...plus de 8 mois qu'on n'en avait pas vu !

Ni une, ni deux, je saute dedans ! Rassurez-vous les écolos, on n'a pas mis d'eau !



28 décembre, 11h31-14h38, Hanoï sous la flotte...

Une journée à profiter des joies de la ville en vélo et sous la pluie.

On mange, on boit, on remange et on remange encore !

Il faut dire qu'on a trouvé LA boulangerie du quartier... Combien de kouign-amanns avons-nous engloutis ce jour là ?



28 décembre, 15h46, youpi !

Retour à l'ambassade. En quelques minutes le comptoir recrache tous les passeports avalés ce jour !

Nos noms ne sont pas écorchés, nos dates de naissance correctes, nos numéros de passeport complets !

Bingo !

Les douaniers ne vont pas en revenir !!

Il y a juste un peu plus de 24h nous étions désespérés devant leur guichet.



28 décembre, 16h03, un tour à la prison d'Hanoï...

On profite de cette journée bonus à la capitale pour nous cultiver un peu. Quitter le Vietnam par la porte de l'ancienne prison, c'est comprendre pas mal de chose sur le pays, c'est mieux appréhender le contact avec les gens et avoir un peu d'empathie avec ces visages parfois fermés.

En résumé et comme souvent dans les ex-colonies :

Les français ont bien fait les craignos, les américains leur en ont mis plein la poire et se battre pour ses idées est toujours admirable.



28 décembre, 23h08, une journée bien rentabilisée !

Après un énième tour du lac d'Hanoï à vélo, un énième repas, un énième bain et avec une énième page de nos passeports remplie, nous pouvons dormir sur nos quatre oreilles !


29 décembre, 10h, c'est reparti en sens inverse !

Vélo, gare routière, bus... on commence à être rodé !



29 décembre, 21h, retour à la case départ ou presque !

Il fait déjà nuit noire quand on débarque du bus. L'heure est à la recherche du bivouac. Ce soir, pas d'hôtel, pas de baignoire, un terrain de foot plein d'herbes piquantes fera l'affaire !


30 décembre, 8h47, sur la route du col...

Refaire une grande montée, déjà gravie (et pour rien) deux jours plus tôt, ça fout un peu la flemme !


30 décembre 9h54, cyclos auto-stoppeurs !

On a beau tendre le pouce, arrêter les bus et faire des signes aux camions... rien n'y fait ! Personne ne semble avoir pitié de nous !


30 décembre 10h11, bingo un camion vide !

On saute dedans et ça tombe bien !

Brouillard à couper au couteau, on n'y voit pas à 20 mètres... la route est couverte de boue, les arbres dégoulinent et nous on est ravi d'être au chaud et au sec et heureux comme des paresseux de se voir épargner les derniers kilomètres.


30 décembre, 11h55, frontière en vue !

Dans cette brume humide, le poste de douane est encore plus glauque que d'ordinaire... On se croirait au poste frontalier du Pas de la Case une veille de rentrée des classes ! Tout est trempé, sombre et triste. Ici la chaussure officielle est la botte en caoutchouc !

Pour nous, c'est tongs, vestes et pantalons Gore Tex !



30 décembre, 12h07, "Xinchao messieurs les douaniers !"

72h tout pile que nous avons quitté ces mêmes bureaux tout penauds... Aujourd'hui avec nos visas en poche, nous sommes fiers comme des bars-tabac !

Bon ça a changé d'équipe et personne ne nous reconnaît !

On ouvre nos passeports à la bonne page et on les glisse par la lucarne.


30 décembre, 12h08, notre joie ne dure qu'un temps !

Les passeports des autres voyageurs qui passent sous notre nez depuis quelques minutes ont tous un billet qui dépasse de leurs pages. Les nôtres non.

C'est bien simple : pas de billet, pas de tampon autorisant la sortie du territoire. C'est quand même fou comme de petits fonctionnaires à képi peuvent faire leurs lois.

On vient de se taper un aller-retour de près de 800km, on arrive à temps pour ne pas se voir infliger l'amende pour dépassement de visa, ce n'est quand même pas pour se faire racketter maintenant pour un tampon, un peu d'encre et les yeux de chien battu d'un douanier !

Nous, on est contre les bakchichs, vous comprenez ? Ne vous inquiétez pas, on a une tente, un réchaud et tout ce qu'il faut pour tenir qq jours devant le guichet !

Visiblement, ça marche mieux qu'une grève, que des banderoles et des manifs, en quelques minutes, on nous tend nos passeports tamponnés !

Alors en voilà une idée ! À l'heure où les français sont en train de se faire escroquer leur retraite, on propose un bivouac géant devant l'Elysée.



30 décembre 12h38, La porte du Laos est devant nous !

Encore quelques formalités avec des laossiens souriants et ce coup-ci, nous pouvons enfin nous faire une tape dans la main accompagnée d’un bisou : mission accomplie !

« Allons voir Laos si j'y suis ! »


30 décembre, 13h02 le bout du tunnel et l'arc en ciel !

Quelques kilomètres sous la pluie et au détour d'un virage, tout s'éclaircit !

Le soleil réapparaît, ses rayons nous réchauffent, le paysage est magnifique et déjà des "sabaidi" s'échappent de toutes les bouches sur notre passage !


Bienvenue au Laos, le pays qui recule au fur et à mesure que tu t'en approches !

27
janv
27
janv
Publié le 27 janvier 2023

Si vous cherchez à nous joindre, nous ne recevons plus les messages Whatsapp car notre téléphone a déposé un préavis de grève illimitée... Aussi notre répertoire s'est envolé et tous nos contacts ont très probablement pris le large également...

Aussi vous pouvez opter pour un mail ([email protected] , [email protected]), un petit mot sur Insta ou FB, un commentaire sur le blog, une lettre, du morse ou des signaux de fumée !

En tout cas, n'hésitez pas à nous renvoyer vos numéros !


Ce qui est bien, c'est que nous n'avons plus ni GPS, ni carte non plus et que sur cette longue étape aux quelques 4800 mètres de dénivelé pour rejoindre la prochaine grande ville puis la frontière Thaï, on ne sait absolument pas où on en est !

De surprise en surprise !

5
fév
5
fév
Publié le 5 février 2023

En un mois sur les routes laotiennes, nous aurons croisé plus d’une vingtaine de cyclo-voyageurs.

Apercevoir un vagabond à deux roues fait toujours un petit quelque chose au cœur, d’autant plus que cela faisait maintenant quelques mois que nous n’en avions pas aperçu !

Des allemands, des néerlandais, un brésilien, un suisse, des français, un chinois, des espagnols, un malaisien, des couples, des voyageurs solo, des familles, des retraités, des enfants, un duo père-fils, des vtt, des vélos lourdement chargés et des plus légers, un vélo électrique, un tandem, un vélo qu’il faut pousser… Il y en a pour tous les goûts !

Une main qui lâche le guidon pour un salut, un sourire complice qui en dit long, quelques mots échangés au vol mais le plus souvent c'est lors d'une pause à l'ombre d'un arbre qu’on partage un bout du voyage passé et que l'on s’échange les bons plans.

Parmi eux, il y eut tout d’abord Tom, 12 ans et Lambert, son papa. Partis pour 4 mois de voyage avec pour fils conducteurs, suivre le cours du Mékong et passer de chouettes moments ensemble.

Entre un collage de rustine sur une chambre à air récalcitrante et une recherche désespérée de la pompe à air qui a fait un plongeon inopiné dans le ruisseau voisin, Tom jette un œil aux e-mails. Même si l’administration scolaire semble voir d’un bien mauvais œil que cet élève parte découvrir le monde sur son vélo, les profs, quant à eux, ont trouvé l’idée géniale et ont promis d’envoyer régulièrement les cours à Tom pour qu’il ne perde pas le fil en cours de route. Finalement, l’envoi des devoirs se trouve bien souvent résumé en ces quelques mots : « Laisse tomber Tom, on verra plus tard ! Pédale ! Profite ! »

Le voyage, la vraie école de la vie.

Vous pouvez les suivre par ici :

https://mastodon.in.th/@mekongtandem

Puis il y a eu ces deux hollandais de la soixantaine bien tassée lancés à vive allure aux manettes de leur tandem sur cette route de crêtes au dénivelé qui ferait sans aucun doute frémir un jeune cycliste.

Deux retraités filant comme deux fusées selon la célèbre formule « light is right », deux petites sacoches à l'arrière et un seul vélo pour deux !

En voilà qui ont tout compris !

Ensuite, il y a eu cette ribambelle de petits et grands cyclistes, 16 roues au total ! Un papa costaud, une maman motivée et quatre enfants épanouis, curieux et déterminés !

Ça donne « vivre à six à vélo », ce n'est sûrement pas tous les jours les vacances mais quelle expérience !

Âgés de 7, 9, 11 et 13 ans, ces quatre petits aventuriers ont pris le guidon durant 3 mois pour parcourir les routes d’Asie du sud-est et aller à la rencontre des petits Thais, Laotiens et Cambodgiens en leur rendant visite dans leurs écoles.

Chapeau aux enfants comme aux parents !

Enfin, il n'y avait que des espagnols et qui plus est, basques avec qui partager autant de bocadillos, de cervezas, de helados de chocolate, de bonnes parties de rigolades et de belles journées de grimpe !

Kattalin et Iñigo pédalent depuis 2 mois à peine avec tout leur matériel de grimpe sur leurs porte-bagages mais ont déjà tout compris du bonheur d’être cyclo-grimpeurs : La joie de s’amuser sur le rocher et la liberté du déplacement à vélo.

Nous roulons vers le nord, ils pédalent vers le sud, nous suivons le même itinéraire mais en sens inverse et quelle chance que nos chemins se soient croisés !

Entre belle journée de couennes sur « tuffas » gigantesques jusqu’au coucher du soleil, grande voie à l'approche épique et aux rappels de descente pas moins épiques jusqu'aux dernières lueurs du jour, soirées animées et discussions sans fin : un plaisir de partager ces deux petites journées qui ont semblé durer une éternité !

Gracias amigos ! Eskerrik asko lagunak !

Bon vent (dans le dos !) et bonne route à tous les cyclos !

8
fév
8
fév
Publié le 8 février 2023


"En janvier, fais ce qu'il te plaît pour bien commencer l'année !"

14 journées de grimpe, 4 spots différents et 2 grandes voies.

11 journées de vélo, 747 kilomètres et 9 565 mètres de dénivelé.

29 nuits sous la tente !

Les grimpeurs penseront que c'est un peu léger, les vrais cyclistes seront un peu dépités par si peu de kilomètres au compteur, les cyclovoyageurs chargés diront que c'est pas si mal pour autant de dénivelé et les cyclogrimpeurs penseront que c'était certainement un mois parfait !


Connectivité retrouvée... Bientôt des mots et des images sur ce mois extra !

11
fév
11
fév
Publié le 11 février 2023

Un neuvième mois sur la route c'est :

◇ 13 pays 🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦

◇ 7156 km 🚲

◇ Des rencontres et des sourires 👧🏼🧒🏻👨‍🦰👨🏻‍🦱👩👶🏼👱🏼👶🏻👧🏽

◇ 2 bus, 2 bateaux 1 pirogue,... 🚢🛶🚌

◇ 1 grand fleuve 🌊

◇ 58 repas aux baguettes 🥢

◇ 29 nuits sous tente ⛺

◇ 4 grottes 🔦

◇ Une capitale ⛩

◇ Des temples 🛕

◇ Des arbres magnifiques 🌳

◇ Des belles plantes 🌿

◇ 1 jour de pluie 🌧, 30 de soleil ☀️

◇ 14 journées de grimpe 🧗‍♀️

◇ 2 grandes voies

◇ 4 spots de grimpe

◇ 11 journées completes de vélo 🚲

◇ Des pistes poussiéreuses 🐷, des nids d'autruche 🪶

◇ 1 soupe aux yeux de poulet 🐓

◇ 16 pancakes 🥞

◇ Des beaux paysages ⛰️

◇ 1 bain dans des sources d'eaux chaudes 🩱

◇ 1 téléphone décédé ⚰️

◇ Des petits dessins encore ✏️

14
fév
14
fév
Publié le 14 février 2023

28 janvier, notre visa Laotien expire ce soir à minuit.

Il est 8h du matin et nous nous présentons à moitié réveillés devant le poste de douane Thaï. Alors que nous sommes en train de remplir un énième document pour le passage de cette énième frontière où l'on doit expliquer pour la énième fois que l'on n'a pas d'adresse dans le pays puisqu'on dort sous une tente, un français à moitié hystérique se jette sur nous.

- "Vous êtes français ?! Vous arrivez du Laos ?!

- Euh... oui.- Alors, qu'est ce qu'il faut faire ?!?

- Ben... remplir ce formulaire et le présenter au guichet.

- Non, vous m'avez mal compris. Je vais au Laos maintenant. Qu'est ce qu'il faut voir ? Où faut-il aller ? Qu'est ce que vous avez aimé ?

Dépêchez-vous, mon bus part dans 30 secondes !

- Euh...Alors !"

Il disparaît aussi vite qu'il était apparu, on se regarde un peu hallucinés.

"Va-t-en voir Laos si on n'y est !"

Nam Hin Boun, la perle Laotienne abandonnée.

Notre périple au Laos a véritablement commencé ici. Une jolie vallée agricole, des maisons de bois et de bambous, arbres incroyables, de belles parois et des grottes gigantesques.

Concrétions démesurées et montagnes trouées comme du gruyère. Ce n'est pas un hasard si ce sont des spéléos qui ont déniché cette petite perle. Une première virée pour des aventures souterraines dans la région leur a permis de prendre conscience du potentiel grimpesque des falaises aux abords des cavités.

Un deuxième voyage a donc été organisé en restant à la surface ce coup-ci.Ici tout est à inventer, du joli caillou, quelques hameaux et des villageois qui nont jamais vu un grimpeur. Ce n'est pas non plus un hasard que ce soit des Ariégeois qui aient dégoté ce joli spot sauvage.

Comme l'endroit a été équipé, puis plus tellement fréquenté par la suite, il a fallu jongler avec les toiles d'araignées, les fourmis rouges géantes, la poussière, le lichen et des plaquettes manquantes.

De belles lignes, du caillou sculpté et magnifique... Il ne manque que quelques grimpeurs de temps en temps !

Tham Nam None, "la grotte de la rivière qui dort"...

"Chassez le naturel, il revient au galop !" Que font deux taupes devant une grotte ?Elles planquent leurs vélos et leurs bagages dans des buissons et s'y engouffrent pour une grande randonnée underground de quelques kilomètres !

Cavité gigantesque, immense rivière asséchée, vaste courant d'air et galerie kilométrique pour une longue balade au frais. Ici le casque ne sert que de support à la lampe frontale, il faudrait être un géant et mesurer 50 mètres pour se cogner la tête au plafond.On parcoura quelques kilomètres dans cette énorme conduite forcée asséchée en étant subjugués par ces volumes disproportionnés.

Koglor cave : les passages secrets existent...

Un tunnel naturel de 7km de long, une rivière souterraine et deux pirogues pour traverser la montagne et changer de vallée...Il n'y avait pas de chemin ni plus direct ni plus logique pour relier ces deux spots de grimpe : de Nam Hin Boun à Thakhek via les flots de Koglor Cave.Quelle expérience !

Bateaux à fonds plats, remontant le courant et bateliers "underground" à la barre. Navigation dans l'obscurité, lorsque la lumière réapparaît, nous passons du minéral à une végétation luxuriante.

La suite sera tout aussi exotique mais un peu plus éreintante. Une quarantaine de kilomètres de pistes bien peu roulantes avec un dénivelé bien marqué et une poussière pulvérulente, "fech-fech" pour les intimes.

C'est bien simple, tout a une jolie teinte ocre ! Les buissons ont la couleur du sol et nous, nous avons la couleur des buissons !

On pédale, on force, on pousse, on glisse, on tombe, on transpire, on dort, on recommence le lendemain, on rebourine encore et on se recouvre de poussière au fil des kilomètres...On finit marron comme des petits cochons et lorsqu'on rejoint, quelques heures plus tard le goudron, il nous semble ressentir une sensation déjà éprouvée après toutes ces longues journées sur les mauvaises pistes des montagnes du Pamir ou du Ladakh ! Souvenir, souvenir... Quelle chance d'avoir emprunté cette variante et découvert ce passage secret !

Thakhek, colonie de vacances pour grimpeurs.

Collines émergeant de la plaine et faisant le gros dos.Rocher noir ébène, crêtes déchiquetées, telles du papier froissé fossilisé.Arêtes acérées, fissures tranchantes comme des rasoirs et picots piquants comme des clous, cannelures profondes et sculptées.Faces minérales vierges qui défendent leurs accès, forêts impénétrables et sol aux mille pièges à déjouer.Caillou dessiné par le vent, l'eau et le temps...

Montagnes de fakir.

Voilà à quoi ressemble le paysage aux alentours du célèbre spot de grimpe de Thakhek, mais détrompez vous, les grimpeurs ne sont ni des charmeurs de serpent et ni des marcheurs sur des clous. Ils se contentent modestement de la partie basse de ces grandes parois.

Souvent masqué par une végétation débordante, le soubassement de ces grandes murailles sombres offre un caillou orangé orné de stalactites.

Les secteurs sont disposés de part et d'autre d'une jolie petite vallée... Ici, pas question de grimper au soleil, on migre d'un versant à l'autre en suivant l'ombre. Lèves-tard ou couches-tôt, il y en a pour tous les goûts !

Thakekh, qu'en dire d'autre ?

Thakekh, c'est aussi un camping qui accueille les grimpeur, un restau qui les nourrit et un bar pour les abreuver. C'est également des tapis de yoga, des poutres d'entraînement et des élastiques... C'est pour nous l'occasion de découvrir ce nouveau virage que prend l'activité escalade et de faire une petite observation sociologique du grimpeur d'aujourd'hui...

Mais c'est une autre histoire, dont je vous parlerai plus tard !

Vientiane, notre dixième capitale

Vientiane est une grande ville surprenante. Komoot, notre appli de navigation spéciale "voyageurs à deux roues" nous conconcte une entrée dans la capitale Laotienne plutôt étonnante. C'est par une succession de chemins et de rues en terre battue que nous rejoignons le centre ville historique.

Ici le ciel est bleu, le niveau sonore est bas, la circulation est calme et les trottoirs ne sont pas encombrés.

Les avenues sont parsemées de bâtiments administratifs aux écriteaux en français, vestige d'une période coloniale pas si lointaine, de temples aux façades multicolores croulant sous la dorure et de maisonnettes aux airs européens d’une autre époque.

C'est en nous promenant dans ces rues que nous avons croisé un véritable petit miracle. Un grand arbre, des gros fruits tout ronds et tout marrons et des fleurs extraordinaires !

Après quelques recherches, il s'agirait du "Couroupita guianensis". Également appelé "l'arbre boulet de canon", un peu triste comme nom quand on a de si belles fleurs. Aurait-on pu imaginer découvrir un trésor de la nature dans une capitale ?!

[La suite de ce mois au Laos fut toute aussi chouette mais encore un peu longue à raconter, à écrire et surtout à lire...

Je vous laisse quelques jours de repos à contempler ces belles fleurs et je vous dis tout des semaines, des paysages et des rencontres qui ont suivi, dans quelques jours à peine !

A très vite ! ]

14
fév
14
fév
Publié le 18 février 2023


[Je vous avais laissé dans les rues de Vientiane, la capitale Laotienne dans les dernières lignes du dernier article.

Prenons maintenant la direction du nord, quittons le plat pour les routes vallonnées, retrouvons les rizières en eau et partons sur les flots sur ce grand fleuve au nom qui fait rêver !]

Vang Vieng : Bienvenue à beauf-land !

Il fait déjà nuit noire lorsque nous débarquons à Vang Vieng. Des lumières multicolores, de la musique, des restaus et des touristes en pagaille. Affamés nous nous jetons en terrasse, c'est alors que notre voisin de table nous bondit aussitôt dessus.

"Bonjour, vous allez faire quoi comme activités, vous ?!"

On se regarde un peu surpris mais je me hasarde à répondre tout de même...

"Euh... On fait du vélo, de l'escalade et aussi du dessin !"

Il n'a pas l'air de trouver ça fou...

Bruno tente alors de compléter ma réponse : "on fait aussi des pique-niques et des siestes parfois..."

Là, le gars prend un air dépité...

Alors que nous n'avons rien demandé, nous voilà prêts à écouter le programme chargé des vacances à Vang Vieng de Monsieur ToutlemondeenvacancesauLaos.

"Alors moi, demain j'ai réservé de la montgolfière, de la bouée, de la tyrolienne, du buggy, de canoë, du rappel, de la randonnée et dautres choses mais je ne me rappelle plus quoi..."

Tout ça dans la même journée, soit cinq minutes par activité : Zapping holidays !

On aura l'occasion d'observer un peu amusés ces vacanciers se laisser flotter, affalés comme des patapoufs dans leur bouée version donnut géant. Politique zéro effort, se laisser porter par le courant dans ces objets flottants dans lesquels plus tu es gros, mieux tu es calé et plus tu es mou, plus ton corps épouse la bouée !

Sinon pour le canoë, c'est un ou deux touristes assis à l'avant et un Laotien à l'arrière qui rame... pour trois !

Bref, Vang Vieng est un peu la Cappadoce Laotienne, des montgolfières, des mini 4x4 qui font du bruit et des beaufs un peu partout !

Pour autant à Vang Vieng, il y a aussi du joli caillou, des bons sandwichs et des voyageurs à pédales sympas avec qui partager tout ça !

Quelques belles lignes sur des tufas énormes dans un joli secteur qui domine la ville pour se mettre en bouche. Une grande voie sur du caillou piquant et une balade dans une jungle hallucinante pour s'en approcher en guise de plat de résistance. Et pour le dessert, c'est discussions à n'en plus finir et fous rire en espagnol avec Kattalin et Iñigo, deux basques cyclogrimpeurs avec qui nous aurons partagés ces deux journées.

Le soir, on profite des joies de la ville et des nombreux restaurants, des crêpes et des glaces au chocolat !

L'avantage de ces endroits peuplés d'européens et d'américains, c'est qu'on trouve des trucs exotiques à manger. Entendez par là bien gras et bien sucrés !

Alors comme deux gros beaufs que nous sommes, au petit déjeuner, nous nous goinfrons de Cinamon Rolls !

Pha Tang, les belles falaises naissent dans les choux.

Un chemin de terre se transformant en sentier, un ruisseau à franchir en se mouillant les pieds et puis des champs de choux géants à traverser. C'est ainsi que nous découvrons cette belle et grande paroi blanche.

Pha Tang pourrait être une falaise extraordinaire mais qui n'a jamais connu, semble-t-il, son heure de gloire. Équipée aussi vite qu'oubliée, faune et flore se sont ré-emparés du quartier.

On parvient à grimper quelques belles voies mais il faut composer avec poussière sur les prises, terre dans les fissures, insectes bien installés, prises branlantes, cordelettes abîmées et arbres qui ont investi les lieux, si bien qu'après une bonne bataille avec tous ces éléments, je suis si sale que je suis directement bonne pour un bain dans la résurgence qui sort du pied de la paroi !

Nord-Laos, une belle partie de "saute-collines"

Montée, descente, montée, redescente, remontée et descente encore... sur combien de collines avons-nous grimpé en trois jours ? Combien de cols avons-nous franchi ? Tellement qu'il est impossible de les comptabiliser...

On parle couramment de "montagnes russes" pour imager ce type de profil mais désormais, je penserais aussi aux collines Laotiennes !

230 kilomètres et 4790 mètres de dénivelé positif, qui dit mieux ?!?

Ajoutez à cela des températures chaudes et un soleil de plomb, de gros poids lourds chinois, des sections en terre, des nids d'autruche géants et un téléphone qui tombe en rade.

Plus de carte, plus de gps, plus d'horloge... C'est assez étrange de se retrouver embarqués pour plusieurs jours sur ces petites routes et de n'absolument pas savoir où on en est.

Combien de kilomètres avons-nous bien pu avoir parcouru aujourd'hui ? Combien de mètres de dénivelé peut-il bien nous rester encore à gravir ? Surprise...

Sur cette petite route de crêtes au profil en dents de scie, nous aurons pris de bons bains de sueur, de bons bains de poussière mais aussi un bon bain dans des sources d'eau chaude naturelle et un sacré bain d'humanité !

Ces hauteurs sont parsemées de petits villages bien sympathiques d'où les "sabaidi" s'envolent généreusement.

Les sourires, les gestes, les saluts et l'enthousiasme des enfants rencontrés à chaque hameau traversé récompensaient chaque fois nos efforts pour gravir la bosse précédente...

On a vu les paysages défiler de part et d'autre alors que nous roulions sur le fil des crêtes. On a vu ces paysages bouger au ralenti dans ces longues côtes interminables puis filer a toutes allure dans ces grandes descentes. On les a vu se teinter de jolies couleurs alors que le soir tombait et que la température baissait enfin. On a vu les gens partir au champs, machette à la ceinture aux premières heures de la matinée. Puis le dos chargé d'herbe, les scooters chargés de gros sacs de jute, on les a vus rentrer au village une fois le soleil couché. Chaque soir, la nuit arrêtait notre course. Chaque matin, le soleil la relançait...

Cette partie de saute-colline n'a duré que trois jours mais c'est fou comme coupés du temps, déconnectés du monde et sans carte en poche, cela nous a semblé durer une petite éternité.

Luang Prabang la ville aux 34 wats

Après une longue dégringolade et une dernière petite bosse parce qu'il ne faudrait pas non plus s'endormir sur son guidon, nous avons rejoint le niveau de l'eau. Ici pas d'eau salée mais de l'eau douce, pas de mer mais une rivière, que dis-je, un fleuve !

Luang Prabang est une jolie ville, sous ses balcons, au bord de ses quais, devant ses terrasses, en contrebas de ses jardins, vu de ses fenêtres, le Mekong coule...

Luang Prabang ne serait pas elle-même sans ce cours d'eau mythique, sans ces bâtiments coloniaux, sans ces maisons traditionnelles, sans son marché de nuit et sans ces temples.

Ici l'expression "à chaque coin de rue" prend tout son sens, à chaque croisement, il y a un "wat". Un grand mur, une belle entrée, de la dorure, un grand boudha et des toitures pointues bien reconnaissables.

Aux premières heures du jour, des hommes, cheveux rasés, enveloppés d'un grand tissu orangé en sortent, un grand bol sous le bras... Les moines "partent en quête d'offrandes", une figure de style pour dire qu'ils profitent de la générosité des habitants qui n'ont dautres choix que de nourrir ces hommes de foi.

Au petit matin, dans cette étroite ruelle, le marché fourmille et les paniers se remplissent de mille et une denrées...

Du riz sous toutes ses formes, des légumes et des fruits exotiques, des saucisses de toutes tailles, des poissons gigantesques et plein de surprises encore soigneusement emballées dans des feuilles de bananiers.

En journée, quoi de mieux que de s'accouder à la rembarde de cette école semblant tout droit sortie d'une autre époque.

Vieux bâtiments de style européen, préaux rappelant nos écoles du siècle dernier, salles de classe ouvertes sur l'extérieur, écritaux en français, enfants qui courent en uniformes et pieds nus, grimpent aux vieux arbres qui parsèment la cour de récréation, s'assoient à califourchon sur le mur séparant l'école de la rue. D'autres rentrent et sortent de l'école à leur bon gré pendant de petit temps de pause.

Ici rien ne ressemble à une prison et la curiosité nous inciterait presque à pousser le portail qui n'existe d'ailleurs pas pour profiter, de plus près de ce spectacle remuant et pas si bruyant.

Le soir venu, mille lanternes s'illuminent pour un marché de nuit animé. Des centaines de stands minimalistes s'installent en fin d'après-midi, la place se remplit de petites chaises basses multicolores en plastique et la rue se transforme en salle de restaurant avec vue sur le ciel étoilé.

Des sushis aux crêpes en passant par des huîtres grillées, des bouts de poulet croustillants et des brochettes de tout et n'importe quoi. Ici, il y a forcément quelque chose qui nous met en appétit !

Cascades de Kuang Si... une balade dans un poster.

Dans l'appartement de l'une de mes grands-mères, une grande tapisserie ornait le mur du salon. Une immense photo de paysage, qui était le Lac Louise dans les rocheuses canadiennes. Bien que l'endroit soit indiscutablement magnifique, j'ai toujours trouvé cette décoration d'un goût assez douteux surtout associé au mobilier Louis Philippe et à un canapé à pompons qui meublaient le reste de la pièce !

Ce poster de paysage parfait donnait une drôle de sensation. Trop beau pour être vrai ?

Les cascades de Kuang Si font partie de cette catégorie. L'eau est si parfaitement colorée, le débit si bien réglé et les flux si bien répartis que c'est à se demander s'il n'y aurait pas quelques tuyaux, quelques pompes et un peu de béton cachés là-dessous !

On s'attendrait presque à voir surgir de derrière une feuille géante, un personnage de Disney, du style Vahiné en bikini mais c'est plutôt un alpiniste en tongs qui apparaît !

Alors que les températures semblent être fraîches de l’autre côté de l'hémisphère et que l'heure semble être à batifoler sur des cascades glacées de l'autre côté de la planète, on s'est demandé depuis combien d'années n'avions-nous pas passé un hiver sans toucher un piolet ?!

Ici pas d'ice mais une jolie waterfall quand même... Évidemment on n'a pas pu s'empêcher d'avoir cette pensée : "t'imagines celles-ci si elles gelaient ?!"

Alors j'ai posé le glaciairiste devant ce grand poster géant. Et pour la glace, en pot ou en cornet ?!

Croisière en eau douce, 550 kilomètres sur les flots du Mékong

C'est le plus souvent à regret que l'on quitte un pays. La plupart du temps, nous sommes davantage poussés dehors par un visa qui expire que par une réelle envie ou un vrai besoin de changement.

À chaque frontière, il y a d'un côté, cette excitation d'entrer dans un nouveau pays, de découvrir un nouvel univers, d'imaginer la suite du voyage et d'un autre côté, le regret de quitter ce que l'on avait appris à connaître et à apprécier. Comme une sorte de nostalgie tout juste naissante, un genre de mélancolie du temps qui passe et d'une aventure qui file sur les chapeaux deux roues !

Cette fois encore, ne fait pas exception à la règle.

À l'heure de quitter le Laos, nous avons le cœur un peu lourd. Quitter ces beaux paysages et ces collines bossues, ces pistes poussiéreuses et ces rizières verdoyantes, ces falaises incroyables et ces parois noires toutes déchiquetées, ces villages aux maisons de bois et ces gestes d'amitié des habitants, ces arbres élégants et ces grottes gigantesques, ces sourires d'enfants et leur joie d'apercevoir des voyageurs passant devant chez eux, ces trente journées ensoleillées sur trente et une passées dans le pays !

Dans quelques heures, tout cela sera déjà du passé et toutes ces images et ces sentiments viendront étoffer encore davantage la belle et grande malle des souvenirs.

Mais ce coup-ci, c'est d'une si jolie manière que nous quittons le pays que le départ à un goût moins amer : le Mékong en guise de trait d'union entre le Laos, que l'on quitte, et la Thaïlande, que l'on s'apprête à rejoindre.

Un grand et long bateau à fond plat, une péniche-taxi remplie de voyageurs, un capitaine, un coq navigateur, des vélos et quelques cartons posés sur le toit.

Nous voici partis pour une longue croisière à contre-courant.

De Luang Prabang à Huay Xai, deux jours, 550 kilomètres et presque une vingtaine d'heures de navigation entre eaux calmes et rapides à franchir.

Deux journées à voir défiler des paysages magnifiques, à voir bufles ou cochons venir s'abreuver, à voir des gens pliés en deux, batée à la main remuant ciel, terre et sable, espérant trouver quelques pépites d'or.

Quelques arrêts au milieu de nulle part pour embarquer ou débarquer quelques voyageurs ou quelques marchandises, des enfants qui nous saluent depuis le sommet d'une dune au sable dorée, un bateau que l'on croise, des matins frisquets et puis un soleil qui chauffe fort, ainsi sont rythmées les journées sur les flots du Mékong.

Cours d'eau mythique long d'environ 4500 kilomètres et traversant tour à tour, la Chine, le Myanmar, la Thaïlande, le Laos, le Cambodge et le Vietnam. De petit ruisseau à jolie rivière, de grosse rivière à grand fleuve, que de chemin parcouru par ces eaux himalayennes !

Tantôt frontière naturelle, tantôt grand axe fluvial, parfois parsemé d'îles, parfois longeant des dunes ou des parois rocheuses, quelques fois bordant des villages comme des grandes villes mais tout en gardant toujours ou presque le même cap : plein sud. Après ce long voyage, rejoindre l'océan, l'épouser. y déverser ses eaux douces dans des plus salées. Enfin, fatigué par ce long voyage, se laisser aller, changer de lit. Ouvrir grand ses bras comme pour fêter pleinement la joie d'être arrivé à bon port et embrasser la côte en différents endroits. Un delta, quel bel épilogue pour une si longue aventure !

Le Mékong fait parti de ces grands fleuves dont on aimerait découvrir la source puis que l'on adorerait suivre des jours, des semaines et des mois durant. Évidemment une nouvelle idée, n'a pas mis longtemps à germer... Un jour, on descendra le Mekong à la rame avec nos petits bateaux !!

...En attendant, on a encore un bout de chemin à faire à vélo ! La Thaïlande est juste là, à portée de pédale ! Le touriste français, lui, s'est carapaté depuis belle lurette.

Et vous ? Vous êtes toujours là ?

La suite arrive...

Comment dit-on "à bientôt" en Thaï ?!

27
fév
27
fév
Publié le 27 février 2023

Nous faisons un peu peine à voir lorsque nous débarquons dans notre 14ème pays...

L'entrée n'est pas franchement triomphale mais heureusement, la Thaïlande reste fidèle à elle-même et ici nous apprenons à dire "merci" aussi vite que "bonjour" !

C'est tout d'abord avec un pneu à plat que nous nous présentons à la frontière. Non pas que nous ayons roulé sur des cactus, puisque durant les deux jours précédents, nos vélos sont restés sagement allongés sur le toit de notre grande péniche qui remontait les flots et les quelques rapides du Mékong.

La faute plutôt à ces rustines dernière génération... autocollantes, enfin presque ! Petites gomettes carrées et transparentes. Maintenant ne pas réussir a réparer une crevaison est aussi compliqué que de percer son pneu en roulant sur une aiguille dans une botte de foin !

Bien inspirés, ces petits patchs semblent pourtant prendre un malin plaisir à se dandiner entre chambre à air et pneu, un peu comme un pansement entre chaussette et talon blessé.

Je suis sûre que vous imaginez bien le concept du compeed qui à première vue, bien installé, se met subitement à plisser, à se décoller et à rouler sur lui-même pour finir comme un gros pâté gluant, ayant arraché au passage, ce qu'il restait de peau autour de l'ampoule 800 watts.

Bref, le résultat est moins douloureux mais à peu près similaire en terme de conséquences : impossible d'avancer !

Une fois, ce soucis réglé et le niveau d'air refait à neuf, nous enfourchons nos biclous regonflés à bloc, à la recherche d'un pont pour franchir ce grand fleuve, frontière naturelle entre Laos, d'où nous arrivons et Thaïlande notre prochaine destination.

Il paraîtrait même qu'en franchissant ce grand cours d'eau nous faisons illico un saut entre un des pays les plus pauvres de la planète et un des plus riches...

Après quelques tours de pédales, la nuit nous attrape rapidement. La faim aussi mais nous n'avons plus que l'équivalent d' 1,20 euros en monnaie locale. C'est un peu light pour espèrer pouvoir se payer un casse-croûte. C'est à peu près l'avis de ce patron de restau qui nous guette sur le trottoir. Par chance pour nous, il est cycliste à ses heures perdues et propose que l'on passe les trois sous qu'il nous reste pour boire une bière et qu'il s'occupe du reste.

Au final, on mange et on boit assez copieusement et pour finir nos 22 000 kips restent dans nos poches.

Kopchaï !

On est presque triste de déjà quitter le Laos mais le visa touristique en veut ainsi...

Une nuit dans un talus de bord de route et quelques kilomètres avalés plus tard, nous sommes devant le pont de l'amitié Laos-Thaïlande number 4 et le poste frontière Laotien.

On tend nos passeports à l'homme à képi pour un tampon de sortie, c'est alors que le racket à demi-officiel nous tombe, une nouvelle fois, dessus. C'est 18 000 kips par personne pour que la porte de sortie s'ouvre à nous.

Les fonctionnaires un peu véreux se contentent finalement des 20 000 pour nous deux et nous laissent filer.

Nous voici devant le pont. Nous qui nous imaginions franchir le Mékong, le nez au vent et en pédalo, euh... en pédalant, c'est raté !

Le pont long d'un kilomètre à peine est peut-être le kilomètre le plus cher au monde ! La circulation étant interdite aux vélos, nous devons nous et nos montures grimper dans un bus.

Retirer toutes nos sacoches, les ranger en soutes, porter les vélos pour les glisser dans la rangée étroite entre les sièges du bus, se trouver une place, refaire le même manège en sens inverse, deux minutes plus tard, et devoir payer l'équivalent de 8 euros pour cela...

Par chance, pour la suite de la journée (et pour nos estomacs !), il est possible de payer ce transport de luxe avec un billet de 10 euros. Monnaie rendue en bats, nous voici donc avec 60 bats exactement en poche (soit un peu moins de 2 euros).

Imaginions-nous à cet instant qu'il nous faudrait tenir la journée entière et parcourir une centaine de kilomètres avec l'équivalent de 2 euros pour manger toute une journée ?

Notre téléphone ayant rendu l'âme il y a plus d'une semaine déjà, nous voici sans GPS, sans carte, sans appli de navigation, sans montre, sans réveil, sans internet, sans traducteur, sans calculatrice... Nous n'avons donc pas d'autres choix que de suivre les panneaux routiers et d'emprunter les gros axes et de faire confiance à notre instinct.

À la sortie du pont, ce dernier nous souffle de prendre à gauche, dommage puisque les distributeurs d'argents et les banques étaient à priori à droite. (Comme toujours, en fait... On aurait pu s'en douter !)

Heureux d'avoir franchi cette nouvelle frontière sans encombre, nous roulons à toute allure sur une route encore calme en ces heures matinales...

Et tellement calme, qu'il nous faut quelques minutes pour nous rendre compte que nous roulons à contre sens.

Ici la conduite c'est à gauche et une nouvelle fois, nous changeons notre rétro de côté du guidon.

S'en suit un double marathon à deux roues, le genre d'étape où tu roules beaucoup et où tu manges peu. Aucun des distributeurs automatiques rencontrés en chemin n'accepte de nous donner de l'argent.

Aussi les kilomètres s'empilent au compteur (qui ne marche plus depuis des mois non plus.. ) en même temps que la faim torture nos ventres !

30, 50, 70 km et nous n'avons toujours rien avalé depuis hier soir... En milieu d'après-midi, nous croisons un petit marché et nous sommes comme deux enfants avec une pièce d'un euro chacun au creux de la main qui font le tour de tous les stands en demandant les prix et qui étudient ce qui pourra le mieux contenter leurs estomacs à moindre frais.

Finalement le repas sera composé de cinq petits raviolis vapeurs chacun et d’une demie gaufre. La pause de quelques minutes fera aussi son effet et nous reprenons la route en presque pleine forme !

On croise ensuite encore quelque machines à cash capricieuses et les banques sont toutes fermées en ce samedi après-midi mais finalement tout finit par s'arranger en début de soirée. Après avoir parcouru une distance de près d'une centaine de kilomètres, nous arrivons enfin à retirer l'équivalence de 15 euros tout en perdant l'équivalent de 7 euros en frais bancaire !

Bien joué ! Essaie encore...

On glisse la carte une nouvelle fois dans la fente et ce coup-ci, c'est un peu plus gagnant, 200 euros pour toujours la même commission.

La vie de vacanciers s'offre à nouveau à nous ! Un gentil thaï nous offre une boisson en guise d'apéro alors que nous sommes assis devant un supermarché et nous mangeons enfin notre premier vrai repas de la journée. Il est 21h.

Bien crevés de cette première journée bien fournie en terme de kilomètres avalés et assez pauvre côté diététique et calories ingurgitées, nous jetons le bivouac dans une rizière asséchée.

Dès le lendemain matin, les petits bonheurs du voyage à deux roues reprennent le dessus. À peine réveillés, on nous invite à venir utiliser les toilettes de la maison voisine. Thé et quelques biscuits en guise de petit déjeuner pour bien commencer cette nouvelle journée.

Ce qui est étonnant c'est que dans le jardin de cette maison là, il y a une église.

Un thaï et une chinoise aux manettes de cette mini paroisse nous demande si on connaît Jésus. On répond qu'on a déjà vaguement entendu parler de ce gars là puis ils nous invitent à se joindre à eux pour la messe qui a lieu dans le bâtiment voisin. On décline évidemment l'invitation. Ils semblent un peu déçus mais charité chrétienne oblige, nous invitent quand même pour le déjeuner de midi !

La route peut continuer, le ton est donné...

Le soir même alors que nous squattons au milieu de quelques maisons, un homme accompagné de plusieurs enfants qui ont pour l'occasion tous enfourché des vélos viendront nous saluer. Sur les ordres de l'adulte, chaque enfant part aussitôt à la recherche d'un bout de bois à jeter dans le feu qui illuminera la soirée. Pour le p'tit déj' c'est une vingtaine de bananes dont on nous régale.

C'est la chance du voyageur itinérant qui nous sourit pour fêter l'arrivée dans un nouveau pays !

Sabadica Thailandia ! Bonjour Thailandia ! Kapunka Thailandia ! Merci Thailandia !

8
mars
8
mars
Publié le 8 mars 2023

Un dixième mois sur la route, c'est :

◇ 14 pays 🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭

◇ 7722 km 🚲

◇ 10 journées complètes de vélo 🚲 et des bivouacs 🏕

◇ Des montées très très très raides 🥵

◇ 2 trains 🚂, 2 bateaux 🚤

◇ Des rencontres 👨👨‍🦳🙎👱‍♀️🧔🏽‍♂️👧🏼🧑👩‍🦰👴👩

◇ 18 Journées de grimpe

◇ 5 spots de grimpe 🧗‍♀️, 2 grandes voies

◇ 4 pains de magnesie 🙄

◇ Des bains à la mer 👙, des marées 🌊, des bateaux 🚤

◇ 1 bain dans des sources d'eau chaude 🛁

◇ Des animaux 🐒🐃🐕🐈🦎🐘🦇🦀🐝🐓🦜🐊🦟🐚

◇ 1 passage chez le coiffeur ✂️, 1 lessive 🧼, 1 arrêt chez le cordonnier 👡

◇ 1 chaîne et une cassette de pignons neufs ⚙️

◇ 1 tablette décédée et 1 téléphone neuf 📱

◇ Des temples ⛩

◇ 26 jus de fruits 🥤

◇ 38 pad thaï 🍜, des brochettes 🍢 et des bons fruits 🍉🌽🥥🥑🥭🍍🍌

◇ 39 litres d'eau perdus en transpiration ! 😰

◇ Des petits dessins toujours ✏️

8
mars
8
mars
Publié le 13 mars 2023

Un matin comme les autres à la différence près que ce coup-ci, c'est hôtel 5 étoiles... bon d'accord, il manque encore quelques petites finitions au palace mais c'est un détail !

On a testé pour vous la chambre 224 et la vue est pas mal !

Après 4 nuits passées dans ce bon petit squat, le chantier (qu'on pensait abandonné) a finit par reprendre son cours, les ouvriers se sont remis au boulot de bon matin alors qu'on roupillait encore et le proprio a débarqué pour le petit-déjeuner mais sans avoir pensé à nous apporter les croissants !

Il nous a gentiment demandé de partir et de ne pas revenir dormir ici. En voyant nos mines un peu déçues, il nous a proposé un super plan B : aller dormir dans les cabanes en tôle des ouvriers.

Un toit sur la tête, de l'eau, des toilettes et de l'électricité ! What else ?

16
mars
16
mars
Publié le 17 mars 2023

Dix mois sur la route, ce n'est désormais plus un secret : le voyage à vélo est une longue balade qui conduit de surprise en surprise.

Ce qui est d'autant plus étonnant c'est de se retrouver à parcourir à vélo un endroit déjà visité des années auparavant. Un lieu, une région ou un pays où vous n'auriez, lors de cette ou ces premières visites, probablement jamais imaginé revenir en étant assis sur une selle avec votre petite maison sur votre porte bagage.

Cette observation se vérifie d'autant plus lorsque l'endroit en question se trouve à l'autre bout de la planète, soit à des milliers de kilomètres du point de départ ou de votre maison de brique. Au delà de cette sensation agréable de se dire que, ce coup-ci, l'on est arrivé jusque là, par nos propres moyens ou presque. C'est aussi l'occasion de se rendre compte que le chemin parcouru commence à être un peu long !

Un signe qui ne trompe pas est, qu'à présent, lorsque nous énumérons aux curieux notre itinéraire et les pays traversés, nous en oublions en cours de route ou bien nous en omettons volontairement pour éviter que l'exposé ne dure trop et que l'on perde l'attention de notre auditoire !

C'est ainsi que la première semaine du voyage, nous avons sauté le canal de Corinthe à vélo, quelques mois à peine après l'avoir franchi en camion puis quelques milliers de kilomètres plus loin, nous avons roulé dans les rues de Bichkek au Kirghizistan quelques années après y s'être baladé à pied au retour d'une expé. Enfin nous avons débarqué en Thaïlande à bicyclette après avoir déjà découvert ce pays lors de précédents voyages en mode bagpacking.

Thaïlande.

Je me souviens d'un premier voyage en compagnie de ma tante puis d'un second quelques années plus tard où ma maman était venue compléter le trio.

Je me souviens de ces fous rire pour tout et surtout pour n'importe quoi. Je me souviens de ces collines du nord et de ces routes très raides en scooter, de cette gamelle dans un fossé et de mon mollet grillé. Je me souviens de ces coteaux abrupts plantés de théiers, de ces champs d'ananas, de ces plantations d'héveas, de plants de café et de cet amphithéâtre de fraisiers. Je me souviens de ces femmes Akhas en costumes colorés, des rives du Mékong, des noix de coco et des singes espiègles.

Je me souviens de ces poissons multicolores et de ces milliards de lanternes volantes qui illuminaient le ciel sombre telles une voie lactée mouvante. Je me souviens de ces temples dorés, de ces moines tout d'orange vêtus, de ces boudhas géants, de ces nights markets animés et de ce quartier chinois où, partout, pendaient des canards laqués. Je me souviens de ces ombrelles de papier, de ces bols de fer, de ces touk-touks qui se faufilaient partout et de ces bateaux-taxis sur les flots... Mais revenons à nos vélos !

Je me souviens de la vielle gare de Bangkok, de cet immense hall et de ces tout petits guichets, de ce carrelage et de tous ces voyageurs y faisant avancer leurs valises à roulettes. Je me souviens de ces panneaux d'affichage hors d'âge et de l'horloge qui égrainait les minutes avant le prochain départ.

Et puis, je me souviens qu'au milieu de cette agitation se trouvait un grand cube translucide et immobile. Une grosse boîte transparente à l'intérieur de laquelle on pouvait admirer deux vélos de voyage, chargés de leurs bagages et entourés d'une multitude de photos prises dans le monde entier. Un couple d'asiatiques (de mémoire des coréens ou peut-être des japonais) avait semble-t-il vécu une bien belle aventure et relatait par ce biais leur grand périple à roues.

J'observais admirative chacun des détails telle une enfant devant une vitrine de Noël, des étoiles plein les yeux et l'esprit qui moulinait dejà. La féerie "selleste" fit son effet.

Ce que je voyais là était comme un rêve sous une cloche de verre.

Depuis, le désir d'évasion a quitté son aquarium et les vélos enfourchés par deux rêveurs ont pris la route.

... Et quand la longue balade nous conduit sur ces mêmes routes Thaï, alors je n'en crois ni mes yeux, ni mes mollets !

17
mars

7000, 8000... On peut le dire, on était plus frais et beaucoup moins crados, pour fêter les 7000 km il y a un mois que pour fêter nos 8000 km aujourd'hui !

Ces cinq derniers jours, on aura fait grimper le compteur de + 595km !!! C'est qu'enchaîner les étapes de 120 bornes ou plus, ça use sacrément les mollets !

Regardez moi ces têtes de fatigués !

25
mars
25
mars
Publié le 25 mars 2023

Passer de cyclos à cyclo-grimpeurs et de cyclo-grimpeurs à grimpeurs demande un petit temps d'adaptation et un réajustement de quelques repères.

On ne parlera plus des pourcentages de pentes mais plutôt d'un passage de l'horizontale à la verticale, quand ce n'est pas au-delà parfois !

On troque alors les moulinets de jambes pour les fermages de bras, on passe des fesses qui chauffent aux bouts des doigts qui picotent ! Et que dire des pieds qui passent de 8 mois en tongs sur les pédales à des chaussons de trois pointures en dessous des leurs ?

Vagabonder de falaise en falaise donne un nouvel élan à cette longue itinérance : c'est une nouvelle motivation à se déplacer.

Notre envie de caillou et notre soif de découverte, nous ont menés ces trois derniers mois du Vietnam au Laos, du Laos à la Thaïlande et puis de la Thaïlande à la Malaisie.

On peut dire qu'on a passé du bon temps sur le rocher. Pendus au bout d’une corde, accrochés à du caillou génial, à se tortiller entre des stalactites géantes, à s'agripper à des tubercules de rochers dégoulinants de parois inclinées, à se dégommer la peau des doigts sur des pointes minérales hérissées, à se découper les mains sur des prises et des fissures acérées, à suivre ces lignes logiques comme ayant tout simplement été sculptées pour être grimpées.

Nous serons, tour à tour, passés de falaises sauvages, délaissées, oubliées où la nature a largement repris ses droits, aux spots organisés, sur-fréquentés, où il n'est pas rare que le même itinéraire soit gravi jusqu'à dix fois par jour. Du caillou qui ne tardera pas à s’user quand il ne l'est pas déjà complètement.

Ces derniers temps, j'ai appris trois choses sur la grimpe :

Premièrement, il est finalement possible de grimper par des températures très élevées, à deux conditions : transpiration maximale et utilisation de magnésie à gogo. Deuxièmement, il est finalement possible, et même tout compte fait pas si désagréable, de grimper sur du caillou usé, patiné, lustré... appelons-le comme on veut, le résultat étant le même : complètement glissant mais ayant pour avantage majeur de n'user ni la peau des doigts, ni la gomme des chaussons. Ainsi on peut grimper non-stop sur de longues périodes avant de reprendre son vélo !

Troisièmement, quand chaleur assommante et caillou poli se combinent, c'est encore une autre histoire ! Les meilleurs exemples sont ces fameuses falaises de bord de mer du sud de la Thaïlande, ajoutez alors un cadre exceptionnel et le tour est joué ! Même dans ces conditions déplorables, l'activité prend des airs de paradis exotique !

Entre ces spots à la mode et ceux n'ayant jamais connu leur heure de gloire, l'ambiance est bien différente.

Dans ces secteurs restés secrets, on alternera entre approches labyrinthiques dans une végétation luxuriante, entre balades verticales dans une jungle toute aussi verticale, entre prises couvertes de poussière, entre batailles pour se frayer un chemin au milieu de colonies de fourmis rouges furieuses et entre combat pour serrer des colonnettes pleines de lichen, attrapant des bacs remplis de terre, grimpant entre toiles et araignées à qui on envie largement l'agilité ! Usant d'ingéniosité pour ne pas se scratcher au sol en parvenant à clipper le troisième point, les deux premiers s’étant parfois miraculeusement volatilisés. Zigzaguant entre essaims de bêtes volantes et piquantes, entre nids et bestioles à plume, tout en craignant qu’un animal à pattes ou rampant ne surgisse par surprise d'un des très nombreux orifices.

À l'arrivée au sommet, pour seules récompenses, un costume avec tout un tas de « saletés » collées à nos peaux par la sueur nous donnant des airs de poissons panés largement décongelés ; un relais souvent relié par une cordelette hors d'âge et hors d'usage et la joie d’avoir crapahuté jusque- là !

Cotations fantasques ou inconnues, le degré de difficulté n'est plus un objectif en soi mais une simple indication à prendre en compte… ou pas avant de s'élancer.

A l'opposé, ailleurs, c'est rocher impeccablement propre, si fréquenté que même presque (ou totalement) lustré, pieds de paroi aménagés, prises juste assez usées pour offrir des préhensions non douloureuses, voies bien équipées, petits noms voir cotations inscrites aux pieds, relais bien placés et régulièrement entretenus. Le terme « escalade plaisir » prend alors tout son sens.

Ce sont les vacances !

La grimpe prend alors des airs de promenade minérale où trouver le bon itinéraire est synonyme d’arriver en haut sans s’être arrêté sur la corde en chemin et sans s'être trop fatigué !

Pour autant, lorsqu’en cours de route, une sorte de balisage devient un peu trop omniprésent et que chercher l'itinéraire le plus optimal se trouve résumé à suivre des marques blanches, ça surprend.

Est-ce qu’être grimpeur aujourd'hui, c'est trouver son chemin en suivant des traits blancs ?

Je me questionne toujours sur ces tickets de cake (traits de magnésie marquant les prises) et sur ces zones de rocher toutes tartinées de blanc… Peut-on vraiment toucher toutes ces prises sur son passage tout en grimpant ?

Parce que pour moi, je n’ai que deux bras et la peinture, c’est le soir au bivouac ! La plupart du temps, mes mains sont déjà bien occupées à s’agripper au rocher et je n'ai ni temps, ni énergie, ni capacité de réaliser toutes ces décorations au goût douteux ! On devrait peut-être songer à confisquer le sac à pof de Shiva...

Mais force est de constater que de plus en plus, on tente sa chance dans des voies un peu trop dures pour soi et on se retrouve souvent à avoir ses deux mains libres puisque c’est pendu à la corde que l’on est ! Je crois bien que c’est dans ce contexte que la peinture blanche apparaît ! C’est dans ces mêmes circonstances que les dégaines fleurissent un peu partout, que les voies sont assiégées durant des heures ou encore que la fameuse « canne à pêche » servant, à soit-disant, mousquetonner le premier point par sécurité se retrouve à prendre de la hauteur accrochée à un baudrier. Cherchez l'erreur… Quand la pêche à la ligne se transforme en pêche à la croix !

Est-ce qu’être grimpeur aujourd'hui c'est essayer des voies dures sans n'avoir encore tenté celles de son niveau aux alentours ?

Bon… Il paraîtrait aussi que c’est comme ça qu’on progresse alors voici qui explique que je suis toujours cantonnée (comme le riz !) dans des voies de mon niveau qui est d'ailleurs toujours le même depuis 15 ans ! Mon manque d’assiduité dans la pratique et mon manque de fréquentation des spots de grimpe ces dernières années y sont peut-être pour beaucoup mais ont l’avantage de me rendre spectatrice naïve de ces évolutions de pratique qui m’intriguent.

Au Vietnam, nous avons eu le privilège de grimper sur du rocher neuf, hyper agressif pour notre peau de doigts de cyclistes, dans des secteurs si tranquilles que nous n'avons croisé qu'une petite poignée de grimpeurs, le tout avec des températures plutôt très adaptées ! Easy life !

Catba et Huu Lung, combo parfait pour se remettre dans le grand bain de la grimpe après 7 mois d'arrêt !

À Ao nang dans le sud de la Thaïlande, nous avons eu la chance de grimper dans des secteurs relativement neufs : beau caillou, belle grimpe et déjà quelques régiments de grimpeurs à l'assaut de ces tout derniers bijoux. La nature faisant bien les choses, on peut aussi dénombrer quelques escadrons de moustiques afin de réguler la population précédemment citée.

En Malaisie, nous avons découvert de jolis petits spots aux potentiels énormes mais aux itinéraires encore très peu nombreux pour faire d'eux des spots majeurs.

Gunung Keriang proche de Kedah ou encore Bukit Ketri non loin de Perlis n'attendent que votre visite, vos goujons et votre imagination !

Fréquentés et entretenus par des grimpeurs locaux surmotivés, il ne manque que quelques nouvelles recrues venues d'ici ou là et qui apporteraient aides matérielles, compétences et expériences dans le domaine de l'équipement.

De notre passage à Perlis, nous aurons laissé quelques relais remis au goût du jour, une nouvelle falaise défrichée et une nouvelle ligne qui aura vu le jour sur celle-ci.

À Chiang Dao au nord de la Thaïlande, nous avons apprécié la tranquillité des spots sauvages. Un vrai patchwork de couleur dans des champs à la terre ocre et parsemés de bananiers. Pas un chat au pied des parois mais un gros Gecko Tokay avec qui nous avons dû partager les prises. Cette cohabitation et ces mâchoires solides qui nous guettent sont le "prix à payer" d'une nature restée encore préservée.

Dans la catégorie des jolis spots laotiens abandonnés, il y eut Nam Hin Boun. Une jolie vallée, de petits villages agricoles et une belle falaise posée sur une montagne de gruyère ! Les cavités qui parsèment le massif offrent des balades kilométriques, certaines permettent même de traverser la montagne par un tunnel naturel ! Aussi ce n’est pas vraiment un hasard si ce sont des spéléos qui ont repéré les parois de Nam Hin Boun et sont revenus armés de perfos pour y poser les tout premiers goujons. Une deuxième campagne d'équipement l’année suivante et puis plus rien… Les plantes grimpantes ont donc repris leur activité favorite, les premiers spits se sont volatilisés et les grimpeurs se sont plutôt multipliés et agglutinés à Thakhek, situé à une grosse centaine de kilomètres de là.

Même scénario plus au nord, à Pha Tang. Magnifique falaise mais restée dans l’ombre de Vang Vieng, la ville touristique du coin. À Pha Tang, des champs de choux géants émergent de grandes falaises blanches. Là encore, le potentiel est énorme et les quelques voies tracées sont sûrement magnifiques mais manquent cruellement de fréquentation pour que la grimpe soit agréable. On aura pourtant tenté notre chance même si cela ressemblait parfois davantage à une session de bartassage qu'à une séance de grimpe !

Avantage non négligeable, nous étions seuls au monde comme c’est souvent le cas dans les plans un peu foireux !

Ces falaises délaissées n'ont pourtant rien à envier en terme d'esthétisme et d'intérêt à leurs voisines. Alors si l'on jouait au jeu de 7 différences, quelles seraient-elles ? Pourquoi certains spots attirent-ils plus les foules que d’autres ?

Peut-être que les premiers critères seraient les infrastructures autour de la falaise en terme d'hébergement, de restauration et la facilité d'accès et d’organisation depuis l'aéroport ou la gare routière les plus proches. Ajoutez à cela un nom qui sonne bien et de la visibilité dans les magazines spécialisés associée à la visite médiatisée de grimpeurs fameux. Sans oublier la présence de voies bien dures mais des cotations plutôt commerciales et un style de grimpe assez moderne.

Évidemment les très fameux spots de grimpe autour de Krabi en Thaïlande remplissent tous ces critères. Mais Tonsaï comme Railay ont un atout supplémentaire : la mer. Un accès atypique depuis les flots et une vue sur l'océan turquoise quand on jette un œil par- dessus son épaule en grimpant, le côté exotique de devoir jongler avec les marées pour accéder à certains secteurs, les plages de sable blanc et des ilots émergeant de la ligne d'horizon...

On ferme alors les yeux sur la grimpe pouvant parfois s'apparenter à du patinage artistique, sur des températures rendant toute perf aléatoire, sur les nombreux grimpeurs qui attendent leur tour, sur le bruit incessant des moteurs de bateaux et on admire le paysage !

On nous avait décrit Tonsaï comme le paradis sur terre. Septiques, nous trouvions la formule un peu osée et tout un tas de questions jouaient au ping-pong dans nos esprits. Étions-nous vraiment prêts à plonger dans ce Disneyland de la grimpe ?

Les cyclo-grimpeurs croisés furent tous catégoriques : vous ne pouvez pas passer à côté sans vous arrêter. Le bon plan d'un bungalow à prix défiant toute concurrence finit de nous convaincre et c'est curieux que nous avons finalement franchi la porte du grand palais "Tonsai-Railay".

Venus pour y grimper deux ou trois jours, répartis finalement après une dizaine de jours sur place, qu'en avons-nous réellement pensé ? La réponse est dans la question !

Si c'est dans un spot comme ça qu'on atterrit après la mort, on veut bien aller au paradis !

Thakhek, LE spot de grimpe laotien a également, à peu près, tous les atouts du spot populaire. Site développé par une équipe d'allemands, il y a quelques dizaines d’années, le spot offre à présent une multitude de secteurs aux parois de toutes orientations, de toutes inclinaisons et aux itinéraires de tous niveaux ! Le cadre est superbe, le caillou est magnifique et le potentiel aux alentours est encore énorme !

Le « Green climber home » est un campement pour grimpeurs, une sorte de village vacances pour escaladeurs. Plus qu’un camping, c’est un hameau de bungalows avec quelques tentes en location, un restau et un bar situés au cœur du spot, tous les secteurs étant accessibles à pied. Une affaire qui roule. Une américaine à la gestion, des laotiens en cuisine et à l'entretien et de jeunes occidentaux qui travaillent gratuitement comme volontaires en étant nourris logés en échange. Leur travail consistant à réceptionner les nouveaux arrivants et à leurs expliquer les règles du camp (!!), à servir au bar et au restaurant mais aussi à donner les cours d'escalade. La plupart étant d’ailleurs aussi débutants eux même que les élèves qu’ils encadrent (!!). Évidemment les tarifs « dodo-miam-miam-glou-glou » sont adaptés aux visiteurs et n'ont clairement rien à voir avec ce qui se pratique dans le reste du pays. Ça fait partie du jeu ! (Et personne ou presque ne s’en rend d'ailleurs compte puisque les grimpeurs ne vont pas voir le reste du pays !)

Mais quand même…

Dans ce camping "à la cool" où l'on fait confiance aux hôtes en leur laissant noter leurs consos sur un petit carnet, tous les touristes, ne sont pas vraiment tous logés à la même enseigne. Ce qui est étonnant ici et qui en dit long sur l'état d’esprit des gérants (aussi grimpeurs qu’ils soient…), c’est que lorsque tu pédales depuis des mois, que tu arrives ici avec ton matos de grimpe sur ton porte bagage, que tu plantes ta propre tente au milieu des bungalows et bien, on te demandera de payer plus cher que deux vacanciers qui débarquent en taxi avec leurs valises à roulettes et qui louent une tente déjà installée pour leurs deux semaines de congés annuels.

Business is business, on n’est pas là pour faire du social et puis ici, c’est un camping de grimpeurs, pas de cyclistes !

J'ouvre une petite parenthèse pour illustrer mes propos :

Palme d'or du manque du savoir- vivre quand une famille de cyclo-voyageurs avec 4 enfants âgés de 7 à 13 ans vient faire une halte d’une nuit et qu’on leur demande de payer aussi cher pour dormir dehors dans leurs tentes que s'ils s’étaient payés le luxe d’un bungalow. Demander un tarif plus élevé pour un enfant de 7 ans, qui se donne chaque jour le mal de pédaler pendant deux mois et qui vient prendre une douche, qu'à un grimpeur adulte qui vient louer une tente parce qu’il n’en a même pas une chez lui…

Là je crois que c’est juste n’avoir rien compris à la vie ! Ce n'est ni valoriser la motivation, ni les efforts fournis, ni même l'originalité de la démarche… Ce n'est certainement jamais avoir posé ses fesses sur une selle, pédalé plusieurs jours d'affilés et n’avoir jamais eu à motiver des enfants à faire une activité physique et itinérante …

Finalement plus qu’agaçant, c’est triste pour ces grimpeurs entrepreneurs basicobasiques et c'est dommage pour l’image que ce feront ces enfants de ce camping « décontract' » et de la grande communauté grimpante !

En voyage à vélo, on se sent en général plutôt libre mais dès lors que l'on doit pratiquer une autre activité, stationner en ville, visiter un musée, faire des courses… c'est plus compliqué. Que faite de tous nos bagages ? Pouvoir poser sa tente et y laisser sans crainte toutes ses affaires le temps d’aller grimper est la solution de facilité. Nous avons ainsi passé une dizaine de jours dans cette sorte de grande colonie de vacances pour adultes aux pieds de ces belles falaises. La mauvaise surprise concernant le tarif spécial « voyageurs au long cours » étant réservée au dernier jour, nous passons ici un agréable séjour, l’esprit léger. Ne pas démonter chaque matin sa tente, ne pas chercher un spot à la tombée de la nuit chaque soir, grimper chaque jour, avoir du temps et de la lumière le soir pour dessiner, se doucher après avoir transpiré toute la journée, ça ressemble à de vraies vacances ! ... Parenthèse refermée.

Passer du temps au sein de cette communauté et observer tous ces grimpeurs est pour moi une vraie distraction !

À a grande surprise, j'ai eu ici, le temps et le loisir de découvrir l'orientation que prend l'escalade, ainsi que les manières de faire et d'être de ses pratiquants. Activité et communauté que je pensais pourtant connaître un peu et dont j’imaginais même faire un peu partie !

J'y ai d'abord vu des grimpeurs se lever tôt… très tôt même puisque ce sont les cris de grimpeurs tapant leurs essais dans les secteurs à proximité qui chaque matin ou presque m'ont sorti du sac de couchage.

J'y ai vu des grimpeurs les yeux encore embrumés de sommeil prendre des postures de yoga, la séance ne pouvant durer que quelques minutes à peine, l'important étant plutôt d’être à la vue de tous ! J'y ai aussi vu des grimpeurs se payer le petit déj le plus cher de la carte avec des fruits exotiques, du muesli (sans gluten), du yaourt (sans lactose) et des graines (inconnues !)… et laisser la moitié de leur bol ! Gâchis…

J’y ai vu des grimpeurs se pendre sur deux doigts sur des poutres, faire de la corde à sauter, tirer sur des élastiques et faire des pompes avant d’aller grimper… « Mais ils vont être complètement cuits-rôtis avant même de commencer à grimper, non ?!? »

J’y ai vu des grimpeurs tenter des voies plus dures que leurs niveaux, échouer, ne pas s’énerver, recommencer, tomber, recommencer encore, saucissonner des heures. Je les ai écoutés, dubitative, m’expliquer des méthodes… « Mais de quoi ils parlent au juste ?! »

Et en même temps, j'ai vu bien peu de grimpeurs enchaîner de belles lignes… Le temps du "à vue" et des beaux combats serait-il révolu ?

J’ai aussi vu des grimpeurs faire du « pan gullich » comme des hamsters dans une roue alors qu’il faisait grand beau, qu’ils étaient à l’autre bout du monde et qu’il y avait tout un tas de voies géniales sur du caillou de ouf à grimper….

Là, je commençais à ne plus rien comprendre... trop de choses m'échappaient !

Quant à la tombée de la nuit, j’ai vu des grimpeurs se ruer sur leur petit tapis de gym pour s’étirer dans tous les sens plutôt que de se ruer sur le frigo et sur la bière, ce fut la goutte de trop : j’ai commencé à vraiment m’interroger !

Est-ce que c'est ça être grimpeur aujourd'hui ?

Est-ce qu’être grimpeur aujourd'hui c’est prendre un avion pour un pays lointain pour passer deux semaines de congés au pied d’une seule et même falaise ? Sans aller se balader jusqu’au village voisin, sans aller découvrir la falaise tout aussi bien équipée mais moins connue à proximité, sans partir explorer un peu le reste du pays, sans pousser la curiosité plus loin que leur seule et unique activité ?

Est-ce qu’être grimpeur aujourd'hui, c'est essayer des dizaines de fois la même voie, le même mouvement, la même section quand la falaise regorge de petits bijoux qui pourraient être réalisés de la plus noble des manières, « à vue » ? Est-ce que c'est forcément toutes ces heures et ces heures de labeur et de frustrations pour quelques secondes de joie, une fois le relais flippé au terme de l’enchaînement tant convoité ? Est-ce qu’être grimpeur aujourd'hui c’est crier de toutes ses forces restantes lorsqu'on échoue ou lorsqu'on l'on attrape le bac salvateur ?

Est-ce qu’être grimpeur aujourd'hui c'est se poser dans un gîte ou un camping spécial grimpeurs, est-ce que c'est dormir dans un vrai lit parce que dormir par terre, ça fait mal au dos ? Est-ce qu’être grimpeur aujourd'hui, c'est forcément être végétarien, végan, sans lactose, sans gluten, sans sucre et sans gras ?

Je m'étais déjà étonnée à ce sujet, ce printemps de découvrir que le sucre avait disparu du thé à la menthe chez Saïd à Taghia à la demande des grimpeurs m'avait- on expliqué. Ici c’est le milkshake à la banane qui est non sucré. Tristitude.

Est-ce qu'être grimpeur aujourd'hui c’est savoir faire des tractions à deux doigts mais ne pas savoir pour autant tomber proprement ou assurer correctement ? Depuis quand prend-t-on le risque de chuter entre le premier et le deuxième point sur la tête d'un assureur qui a déjà ses lunettes à prismes vissées sur le nez !?

En quelques jours à peine, c’est pas moins de cinq personnes que l’on a vu revenir de la falaise en clopinant sur une seule patte, la seconde ayant sa cheville foulée suite à un mauvais plomb…

Est-ce qu’être grimpeur aujourd'hui c'est sociabiliser à outrance avec des gens de la même espèce et ne même pas s’apercevoir qu'il y en a d'autres un peu différents ?!

En deux semaines passées à leurs côtés, dans ce fameux camping pour grimpeurs, combien se sont interrogés sur le fait que nous étions les seuls à camper au milieu des bungalows, que nous étions les seuls à avoir notre propre tente ? Qui s'est demandé d'où nous arrivions ? Qui a été interpelé par l’idée que nous voyagions à vélo ? Qui nous a interrogé sur cette vie de nomades et qui nous a demandé depuis combien de temps nous roulions ? Personne ou presque…

Qui a jeté un œil par-dessus mon épaule alors que chaque soir dans l’espace commun je passais des heures le nez sur mon cahier et un pinceau à la main ? Personne ou presque….

Chacun s’intéresse à ce qu’il veut et chacun fait ce qu’il lui plaît me direz-vous… certes, c’est légitime. Les manières de pratiquer l'activité évoluent et c'est dans l’ordre des choses… peut-être. Évidemment si tout le monde s’empile ici, la tranquillité est à chercher ailleurs : c’est vrai aussi !

Mais ce que je me dis surtout c'est que "la curiosité est un bien chouette défaut" ! Plus que jamais, cultivons là ! Quittons les sentiers battus, sortons du moule, sortons du rang et éloignons nous un peu de la tribu des bipèdes qui jouent à imiter leurs très éloignés cousins !

Enfin je finirai ce trip asiatique de roc et de mots par vous parler de Crazy Horses.

Non loin de la bien animée Chiang Mai, nous avons découvert là- bas, du beau caillou à la fréquentation modérée. Spot fermé durant des années, la réouverture semble toute récente et c'était chouette de partager le temps d'un week-end, les falaises avec des grimpeurs locaux prêts à nous conseiller et à nous donner des infos sur leurs autres spots thaï préférés ! Une sorte de crémaillère pour fêter le retour des grimpeurs sur les rochers du secteur !

Ici, on a aussi rencontré d'autres cyclo-grimpeurs, on a grimpé sur des grosses concrétions, dans des murs à trous, au creux de drôles de goulottes et surtout, surtout... Le clou du spectacle : on a grimpé dans des grottes !

Accès improbables, éclairage minimaliste, silence assourdissant, tracés ingénieux et air conditionné garanti ! Il n'en fallait pas moins pour séduire les deux taupes que nous sommes !

Sur ces mots, je clôturerai cette modeste étude sociologique du grimpeur en voyage et ce petit tour d'horizon de cette virée grimpesque en Asie du Sud-Est...

De cette ligne incroyable dans l'obscurité de cette grotte, il me vient ces mots :

Et si grimper heureux était synonyme de grimper cachés, de grimper discret et d’être fous d'improviser sans arrêt ?

Et au risque de passer pour une rabat-joie sur le regard surpris que je pose sur les grimpeurs d'aujourd'hui et pour ceux qui connaissent « les bobos » de Renaud : qu’on le veuille ou non… on fait aussi partie du lot !

Mais rassurez-vous quand même... Comme des crevards, on a forcément fini les restes de ptit déj dans les bols de nos petits voisins. Comme des gourmands, on a ajouté 4 cuillères de sucre à notre banane milkshake et mangé une tonne de pancakes. Comme des voyageurs, on a dormi le plus possible par terre et on s'est douché le moins possible. On a utilisé des perches de bois pour aller clipper le troisième point quand les deux premiers manquaient à l'appel. Comme les anciens, on n'a presque pas volé et on n'a pas squatté les voies pendant des plombes. Promis, on n'a jamais laissé de dégaines installées parce qu'on n'en a pas assez… mais on a peut-être tchouré 2 ou 3 mousquetons inutiles, par ci par là mais ça … c'est un secret !

Enfin pour conclure la conclusion, voilà ce qu'on trouve dans les livres de grimpeurs de nos jours (on a pas tout compris, mais on va s'entraîner, on vous le jure !) :

3
avr
3
avr
Publié le 3 avril 2023

6 minutes sur les routes et sur le caillou Thaï et Malaisien... sortez les ombrelles et les boissons fraîches !

Pour une fin d'hiver, on peut dire qu'on n'a pas eu froid !

3
avr
3
avr
Publié le 7 avril 2023

Mettez un couple sur un tandem, il paraît qu'ils finiront tôt ou tard par se chamailler mais si vous choisissez de donner un vélo à chacun, la même chose pourrait bien finir par arriver !

On entend souvent dire que loin du confort d'une maison et que sortis de la routine rassurante, la relation de couple peut être mise à rude épreuve. En voyage, c'est assez radical : "ça passe ou ça casse" dit-on...

Alors c'est vrai, si souvent ça peut "passer" vraiment crème, parfois ça peut "casser" un peu les bonbons d'être 24/24h et 365 jours sur 365 ensembles.

Lorsqu'on a plus de 100 kilomètres dans les pattes, qu'on a mal partout (et surtout aux fesses !) ou encore quand on attaque la dixième journée s'en s'être lavé après un énième bivouac sur des matelas tout percés, lorsque l'on est rôti par un soleil trop fort ou atomisé par une chaleur accablante, lorsqu'il n'y a une fois de plus que trois pistaches en guise de repas du soir ou encore lorsque la route du col ressemble davantage à un chemin de vtt qu'à une route asphaltée, et que tout cela n'est évidemment la faute ni de l'un, ni de l'autre alors le moindre grain de sable dans un engrenage pourtant bien rodé peut produire une étincelle qui enflamme illico les deux voyageurs fatigués !

Comme une goutte d'eau faisant déborder un vase déjà plein à craquer comme une sacoche de cycliste : Imaginez quand l'un des deux (toujours le même) pète sur l'autre sous la tente, que l'une est contrariée d'avoir raté son 7b et que l'autre n'en a rien à cirer, que l'une veut visiter un musée quand l’autre veut bouquiner, quand l'une veut grimper quand l'autre veut rouler, quand l'un veut faire encore 30 kilomètres de plus et que l'autre est déjà complètement raplapla, quand l'une veut faire des photos et l'autre des vidéos, quand les deux en ont ras le bol (de riz) de manger toujours la même chose, quand il n'y a rien à bouffer du tout et qu'ils se couchent une fois de plus le ventre vide. Quand l'un voudrait installer la tente en bord de route et que l'autre rêvait d'un spot de bivouac idyllique, quand l'un est mollasson et l'autre en pleine forme,

quand les deux sont crevés, affamés, desséchés, crados, dégueux, poisseux, quand la poussière se glisse partout, que le sable leur pique les yeux, que les cailloux bloquent leurs roues, quand le GPS les prend pour des randonneurs à pieds ou quand il n'y a plus de GPS du tout, quand la pluie les trempe comme des serpillières ou que 40 ou 50 degrés leur chauffent les neurones... Forcément, parfois ça gonfle un peu !

Et imaginez des pneus déjà bien gonflés et la pression qui grimpe encore d'un cran... Ben oui, bien vu, ça éclate !

Il y a des jours comme ça où l'un sort de la tente du pied gauche, où la journée démarre sur trois roues au lieu de quatre et où ça ne tourne pas tellement rond du matin au soir ou disons plutôt que l’on tourne en rond toute la journée !

La 326 ème journée de l'année fait partie de celle-ci :

L'un dort comme un patapouf, la deuxième se réveille mal luné, le troisième met mille ans à boire son café, la quatrième veut aller grimper, le cinquième prend tout son temps pour déjeuner alors qu'il n'y a rien à manger et la sixième dit que bientôt la falaise ne sera plus à l'ombre, le septième lui répond de se détendre un peu, la huitième monte dans les tours, le neuvième ne comprend pas... bref ça ressemble à peu près à ça, sauf que nous ne sommes que deux !

Comment dire... disons qu'aujourd'hui nos atomes crochus se boudent et que l'ambiance est quelque peu électrique entre nous !

Tensions variées au fil de la journée et on frôle le court-circuit à plusieurs reprises.

La journée se déroule tant bien que mal entre coups de tonnerre et éclairs de colère. Râleries et grogneries...

Quelques étincelles le matin suivi une accalmie l'après-midi alors que chacun vaque à ses occupations fait redescendre la trop haute tension.

Il fait nuit noire lorsque nous nous décidons à reprendre la route. Nous ravalons notre rancœur et allumons nos loupiotes.

"On voit mieux les éclairs lorsqu'il fait sombre" La suite donnera raison à cette formule.

470 km à parcourir en 4 jours, il va falloir prendre des forces et les unir si on veut attraper cet avion qui n'attendra pas nos sautes d'humeur pour décoller en temps et en heure avec ou sans nous.

Avant de se mettre à la recherche d'un spot de bivouac, nous entrons dans un petit restaurant et mangeons comme des ogres. Le temps du festin, je me fais prêter une prise de courant afin de redonner un peu d'énergie au téléphone, un peu mollasson lui aussi.

Quand une heure plus tard, je vais pour débrancher le câble de la prise, je constate que la batterie n'a chargé que de 3% à peine. Le temps que l'information parvienne à mon cerveau et que je me dise que c'est un peu bizarre, je suis déjà en train de tirer sur le câble pour retirer le port USB de la prise.

En une fraction de seconde, un énorme bruit sourd retentit. Un grand flash jaune illumine la pièce en même temps que toutes les ampoules s'éteignent et qu'une étrange décharge me traverse le bras. C'est à peine si un cri de surprise a le temps de sortir de ma bouche tellement tout se passe à vitesse accélérée.

Un peu sonnée et le bras encore engourdi, je reste plantée là, dans le noir, quelques instants, mon téléphone dans une main, le câble encore fumant dans l'autre.

Des bruits de pas, des voix de femmes puis la lueur d'une lampe torche qui s'approche me sortent de ma torpeur. Dans le faisceau, je découvre que mon pouce gauche est complètement noir.

Puis dans la pénombre, je reconnais la voix de Bruno qui alerté par la grosse détonation pointe son nez un peu inquiet et me demande si ça va. Le pouce cramé pointé vers le ciel, je lui fais signe que tout semble être en ordre.

Après un rapide état des lieux, on se dit que je suis cuite à point et que l'on peut reprendre la route sur quelques kilomètres jusqu'à trouver où poser notre tente.

Lorsque nous quittons les lieux, les femmes ont sorti tout un tas de compresses et d'huiles pour soigner les brûlures et tout un groupe d'hommes s'affaire autour du boîtier électrique mais la lumière ne revient pas pour autant. Le câble cramé tout comme la prise toute noircie partent à la poubelle pendant que nous enfourchons nos biclous.

Une dizaine de kilomètres supplémentaires accompagnés de quelques fourmillements dans le bras, un petit mal à la nuque et une sensation étrange du côté gauche du corps, suivi d'un gros dodo où je boirai plus d'un litre d'eau dans la nuit !!

Ceux qui me connaissent savent que cela représente ma ration habituelle de liquide pour... un mois !

Cette électrisation viendra donc conclure cette journée sous hautes tensions.

Une électrocution entraîne la mort, une électrisation est le stade précédent. Elle remet simplement les pendules à l'heure et aura le mérite de m'inspirer ces mots.

Une journée à l'ambiance quelque peu électrique clôturée par un court jus, c'est finalement plutôt dans la logique des choses.

Et puis... il peut bien y avoir quelques chamailleries, ronchonneries, arc électrique et étincelles, la vrai conclusion qui me vient à l'esprit est celle-ci : Que voulez-vous, on ne choisit pas pour qui on a un coup de foudre !

20
mai
20
mai

Alors que nous étions assez persuadés de ne pas toucher un piolet cette année, voilà qu'un jour de pluie nous avons été conviés, dans une salle de bloc, à Tokyo pour un festival de dry tooling !

On nous a mis deux piolets dans les mains, un casque sur la tête, on nous a présenté à la foule comme des champions venus du pays du soleil couchant et on nous a jetés dans l'arène. Nous avons alors mis en scène nos fermetures de bras niveau petite section de maternelle et nos abdos chamallow sous des encouragements composés de "come on" et les "gamba" enthousiastes !

On s'est vraiment bien amusé mais le mieux était clairement d'être spectateurs de cette drôle d'activité indoor : où l'on fait du bloc avec deux armes dans les mains, où on s'écrase sur des tapis avec un piolet sur l'épaule ou un entre les dents, où l'on fait des yaniro à l'âge de 75 ans, où l'on grimpe sur des prises en métal qui font des étincelles et où le matin comme mise en bouche, on révise l'affutage des lames et le soir pour clôturer la journée on révise le règlement et on visionne les runs des vrais champions en coupe du monde !

En guise de récréation et pour remercier tout ce monde de l'invitation, on a eu l'idée de présenter un petit film... mais toute la difficulté était de rester dans le thème. On n'avait pas de vidéos où l'on pédale crampons aux pieds, la glace du Baïkal semblait beaucoup trop horizontale alors on a opté pour un petit concert en Patagonie : "Ritmo latino en la cara oeste del Cerro Torre".

Una pelicula signé del señor Ramiro Calvo, avec Bruno et toute une joyeuse bande dans le rôle des musiciens et surtout sous-titré en japonais pour l'occasion !!!

Cela a eu nettement moins de succès que les vidéos des acrobates grimpant sur la tour de glace de Champany en Vanoise et à vrai dire je crois qu'ils n'ont même pas vraiment saisi le rapport avec le thème de la journée !!

10
avr
10
avr
Publié le 10 avril 2023

Un onzième mois sur la route c'est :

◇ 16 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵

◇ 8769 km 🚲

◇ 1 avion ✈️, 1 mini bateau 🚤

◇ 2 pays, 2 ambiances 🧕👘🪭

◇ 16 journées complètes de vélo 🚴‍♀️

◇ 13 journées de grimpe 🧗‍♀️

◇ 4 spots de grimpe 🧗‍♀️

◇ 1 festival de dry tooling ⛏️

◇ 2 capitales 🕌⛩️

◇ Des rencontres et des retrouvailles 🧔🏽‍♂️🧑🏻‍🦱🧑🏽‍🦱👶👨🏻🧔👧🏽🧑‍🦳🧑👩🏻🧒🏽👴🏻👩🏻‍🦱

◇ 7 varans🐊, 68 singes 🐒, 22 chiens 🐕 dont 9 en costumes 🎩, 57 chats 🐈, 18 vaches à bosse 🐃, 8 chauve-souris 🦇, 5 serpents écrabouillés 🐍, 25 frelons et des guêpes 🐝, 5 calaos 🦤, 56 coqs 🐓

◇ 1 printemps 🌸🌺⚘

◇ Quelques KO ❌️

◇ 4 patins de freins neufs ⚙️

◇ 2 mers 🌊

◇ 11 bains chauds 🛁

◇ 2 projections 📽

◇ Du jus de citron 🍋, du thé ☕️, du saké 🍸

◇ Des petits dessins et un second carnet presque terminé ✏️

12
avr
12
avr
Publié le 16 avril 2023

"Quand on aime trop le rocher, mieux vaut avoir de bons mollets."

Dicton de cyclo-grimpeurs à la bourre...

Sud de la Thaïlande, fin février.

Nous enchaînons les journées de grimpe dans un cadre enchanteur, ce qui nous ferait presque oublier que le temps continue de filer à la vitesse grand V...

D'ici une grosse semaine, il nous faudra avoir quitté le pays, notre visa expirant le 8 mars.

C'est ainsi qu'un beau matin l'on passe quelques heures, le nez sur notre smartphone à fouiller les recoins de quelques sites internet de comparateurs de vols...

Le casse-tête commence. Si nous n'avons aucun doute sur la destination, en revanche, nous en avons quelques -uns concernant le point de départ et le vol à choisir.

De nos jours, voler avec des bagages n'est plus tellement une chose aisée puisque 90% des billets proposés ont tous une petite annotation du style "aucun bagage en soute". Et quand les bagages sont des vélos alors la chose se corse encore...

Aussi, on constate qu'il est de plus en plus difficile de trouver des vols directs et qu'il y a souvent un changement de compagnie lors de l'escale. "Escale autonome" selon le terme exact, soit deux vols complètement indépendants où le second n'attend pas les voyageurs du premier, qui a potentiellement pris du retard, pour décoller !

Ce qui veut dire que durant une escale classique de quelques heures à peine, il faut aussi, avec cette formule, récupérer ses bagages, passer les contrôles de passeports, sortir de l'aéroport, y reentrer, réenregistrer vos valises (et donc repayer un surplus de poids quand il y a lieu), repasser les contrôles de police et de sécurité et se rendre à la porte d'embarquement en espérant que l'avion n'est pas parti sans vous entre-temps !

Ainsi, les moteurs de recherche n'hésitent pas non plus à proposer des escales de ce genre dans des pays nécessitant un visa où la demande doit être faite des jours, voir des semaines au préalable sans même le stipuler.

Avec nos deux cartons à vélos d'une trentaine de kilos passée qui entrent dans la catégorie "hors size" et arrivent au point de collecte de bagages parfois des heures après les autres sacs et notre sac à dos plein à craquer de ferraille et pour lequel il nous est déjà arrivé de devoir payer l'équivalent de 15 à 20 € par kilo supplémentaire, on ne peut pas vraiment jouer à ce petit jeu. Aussi le nombre de pièges à déjouer est grand et la taille de l'écran du téléphone, tout petit. Sans oublier une connexion Wi-Fi capricieuse qui n'aide pas toujours dans le bon sens !

C'est ainsi que ce matin- là, nous mettons dans notre panier virtuel ce vol à destination de Tokyo au départ de... Kuala Lumpur, capitale de la Malaisie.

En changeant de pays, nous gagnons ainsi quelques jours en Asie du Sud-Est, tout en quittant la Thaïlande à temps. Et oui... Parfois, il ne faut pas faire que pédaler, il faut aussi réfléchir et compter les jours sur un calendrier !

... Et parfois, il faudrait réfléchir un peu plus ou compter un peu mieux !

La suite en est l'illustration parfaite.

Comme deux boulimiques, nous commençons par ne pas résister à nous offrir deux journées de grimpe supplémentaires avant de nous mettre en selle. Après s'être mis encore quelques belles lignes sous la dent et avoir les bras tout machouillés, nous reprenons finalement nos vélos : Malaisie en ligne de mire !

Nous franchissons la frontière avec brio, la veille de l’expiration de notre visa, pas peu fiers d'être dans le créneau parfait et tout heureux des premiers tours de roues dans ce nouveau pays.

Au menu, plantations d'hévéas et caoutchouc en préparation, palmiers à huile à perte de vue et magnifiques hibiscus. Mosquées et chants du muezzin nous accompagnent sur la route du sud.

Tout roulait comme sur des roulettes, jusqu'à ce que des collines et des grandes faces calcaires pointent leurs nez.

Perlis... Prochain arrêt, Perlis, tout le monde saute du vélo et enfile son baudrier !

On ne pouvait pas passer à côté du principal spot de grimpe malaisien sans aller y jeter un œil ! Et voilà, qu'on se ressert une assiette de beaux rochers et de belles lignes.

Il faut dire qu'on a, en plus, deux serveurs de choix : Amirul et Hafifi, deux grimpeurs locaux qui nous guident et nous font découvrir tous ces petits délices. On aurait pu évidemment se contenter d'une escale d'une seule journée mais la gourmandise était trop grande et les journées se succèdent. Sans compter, qu'on s'est trouvé un spot de bivouac de choix... la terrasse d'un restaurant, ça ne s'invente pas !

Chaque soir, une fois, le service terminé et avec l'accord des gérants, on pousse chaises et tables pour y installer notre cabane de toile. Eau, toilette et électricité, que demander de plus !?

Nous empilons les jolies lignes et nous oublions le calendrier.

Pourtant, il nous reste moins d'une semaine avant la date de notre vol et nous avons encore la moitié du pays à traverser. Un détail de six cents et quelques kilomètres sous une chaleur torride. Mais pas de stress, il sera toujours possible de sauter dans un train ou dans un bus pour avaler ces quelques centaines de kilomètres.

La logique aurait voulu qu'on se remette quand même en route mais c'était sans compter sur le fait que les deux loustics du coin déballent tout l'attirail du parfait équipeur. Il n'en fallait pas moins pour que Bruno saute sur l'occasion de s'adonner à ses occupations favorites

Donner des coups de machette dans tous les sens, faire résonner le perfo et enfoncer des goujons un peu partout !

Ainsi une nouvelle ligne est apparue sur la carte, bon appétit !

Rassasiés pour quelques temps, nous en profitons pour reprendre la route, azimut 180°.

Le timing commençant à être un peu juste, nous allons jeter un œil curieux mais confiant à la gare la plus proche et c'est facile puisqu'elle se trouve être pile en face du secteur de grimpe ! Cela se complique lorsqu'on nous apprend que les trains ne prennent pas les vélos...

Voilà qui ne simplifie pas nos plans mais pas de panique, on a encore une carte à jouer : deux vélos dans un bus à destination de la capitale...

Nous repérons sur la carte, la grande ville la plus proche et décidons de nous y rendre sans trop traîner.

Mais une fois encore, cela aurait pu fonctionner mais quelques kilomètres avant Kedah, il y avait un bout de falaise sur notre chemin... Au lieu de poursuivre notre régime vélo sans grimpe, nous nous laissons tenter et faisons un écart.

Une sieste en attendant que la paroi passe à l'ombre, ce n’est pas comme si on avait tout notre temps... Quelques jolies longueurs récompenseront cette attente et ses "heures de vélo perdues".

Il fait nuit noire lorsque que nous débarquons à la city. À la gare routière, il y a bien des bus à destination de la capitale, on peut même y mettre nos vélos en soute et s'asseoir dans de confortables fauteuils en regardant le paysage défiler à la fenêtre.

Mais voilà... c'est un peu facile et surtout un peu cher.

Un œil à la carte : 478 km

Un deuxième œil au calendrier : 4 jours

Un troisième œil à la calculatrice : 119,5 km/j

Un quatrième œil pour se regarder en coin... on tente ?

C'est comme ça que commence une grande course cycliste sous le soleil plombé de Malaisie.

Essayer de faire 120 km en un jour, c'est tentant. Empiler quatre journées en tenant ce rythme, c'est autre chose, surtout quand il fait plus de 40 degrés !

Nous voici donc partis pour d'interminables journées. Les mains sur le guidon, les pieds sur les pédales et les fesses sur la selle du matin au soir. Et des trois, c'est sans aucun doute ce dernier point le plus limitant...

Grandes journées et petites nuits.

Le matin c'est le réveil qui nous sort de la tente alors qu'il fait encore sombre et le soir, il fait déjà nuit noire lorsque nous installons le bivouac. Je vous laisse imaginer le style de campement... Nous n'avons ni temps, ni motivation de chercher vraiment le spot idyllique et autant dire qu'on est, chaque soir, tellement cuits qu'on se jetterait dans le premier fossé venu pour pouvoir profiter de quelques heures de repos !

Chaque journée commence plus ou moins de la même manière, lorsque le réveil sonne, on a l'impression que l'on vient à peine de s'allonger et de s'endormir. Recommencer, déjà ?!?! Remettre le compteur à zéro alors qu'on s'est donné tout ce mal pour lui faire franchir la barre des 100 la veille.

Pliage rapide de la cabane et premiers tours de pédales pour des jambes encore plongées dans un demi -coma et des estomacs tout vides. 15 ou 20 km aux heures "fraîches" avant le petit-déjeuner, c'est toujours ça de gagné.

Là, les malaisiens ont pensé à tout : on s'empiffre de crêpes bien grasses et on boit du thé avec de gros glaçons !

Oui, ici, à 7h du mat', il fait déjà 30 degrés !

Le déroulé de la journée est une succession de kilomètres avalés et de pauses pour se reposer et tenter de se rafraîchir un peu.

La logique aurait voulu que l'on fasse une grande halte aux heures les plus chaudes de la journée mais la raison nous poussait toujours à avancer encore et encore... et clairement la raison n'avait pas vraiment tort !

On adopte à nouveau le régime du cycliste : manger pour avancer, avancer pour trouver à manger.

Combien de kilos de nourriture avons-nous engloutis ces jours-ci ? Proportionnels au nombre de kilomètres roulés !

Combien de litres de liquide avons-nous perdus en transpiration en quatre jours ? Le mystère reste entier mais sûrement bien plus que la quantité que nous avons bue !

...Pas de bières pour se réhydrater en terre musulmane...

Le vélo a ce côté idéal en terme de vitesse de déplacement. Plus lentement on se lasse des paysages, plus rapidement, on ne voit pas la moitié des choses.

Et lorsque l'on fait des étapes à rallonge, le soir en fermant les yeux et juste avant de profondément sombrer, on a bien du mal à se remémorer tout ce qui a filé devant notre roue avant, en une seule journée, tant il y en a !

Monoculture de palmiers à huile à perte de vue et camions chargés de ces petits fruits orangés prêts à être pressés. Petits canaux d'irrigation et échassiers qui s'envolent à notre approche.

Varans qui barbotent, grimpent aux arbres ou déguerpissent juste devant nos roues.

Plantations d'hévéas et petits bols plein de sève blanche. Une multitude de mosquées et leurs cinq appels quotidiens à la prière. Singes jouant aux acrobates et se laissant tomber des fils électriques à notre arrivée.

Pamplemousses géants, pastèques juteuses et jus de citron glacés.

Champs de riz en feu, flammes géantes et nuages de fumées à traverser. Villages ou quartiers chinois, lanternes rouges et petits autels. Temples indous et dieux colorés. Femmes voilées de la tête aux pieds.

Concentration d'usine et ouvriers ébétés enfourchant leurs vélos une fois leur journée terminée. Mer... marées hautes et marées basses témoignent du temps passé à pédaler. Chats aux queues en tire-bouchon et vaches à bosses. Hibiscus aux belles fleurs roses, manguiers aux fruits encore verts et fleurs de bananiers spectaculaires !

Scooters side-cars chargés, petits marchés, vendeurs de boissons fraîches, enfants jouant avec des cerf-volants..Petits ponts de métal, chemins de terre, voies rapides, routes étroites et ralentisseurs te stoppant net.

Chemins sans issus, autoroutes interdites aux vélos, tunnels obscurs et pont où il ne reste plus que les piliers ! Demi-tour, variantes, vélo à travers champs, bras de mer à traverser, bateau et vélos sur la plage !

Et puis enfin... avenues, buildings et même pistes cyclables !

Toutes ces heures à appuyer sur une pédale puis sur l'autre et à voir le nombre de kilomètres, grimper parfois si péniblement, je n'ai pu m'empêcher de penser... Penser à tous ceux qui parcourent des distances similaires mais en courant avec leurs petits baskets et leurs deux petites jambes ; à ceux qui avec leurs vélos en carbone doubleraient nos étapes et y ajouteraient même des kilomètres de dénivelé ; à ceux qui empilent des marathons sur une seule jambe ; à ceux qui jeûnent en marchant, à ceux qui nagent des distances de dingues sans bras ; à ceux qui empilent les iron-mans ou les triathlons en ne mangeant que des gels et même pas de glaces au chocolat ; à ceux qui courent des ultratrails aux dénivelés à faire pâlir un chamois ; aux champions de patins à roulettes longues distances ; aux pèlerins à genoux ; à ceux qui font de l'itinérance en monocycle avec un sac sur le dos ; aux acrobates qui font le tour du monde en marchant sur les mains...

Finalement…On n’est pas si mal sur nos petits vélos !

Ainsi se passent les journées sur les routes malaisiennes du lever au coucher du soleil et même souvent au-delà. Une fois le contrat presque rempli et la nuit presque tombée, nous nous offrons une vraie pause, une heure parfois même deux... il faut bien laisser à la batterie du téléphone le temps de se recharger !

On refait alors, nous aussi, le plein d'énergie et c'est le ventre bien rempli que nous nous remettons en selle pour une quinzaine ou une vingtaine de précieux kilomètres nocturnes. Bonus du soir, espoir !

Là, on peut trouver un peu de repos mérité, enfin allongés, fini de mouliner, extinction des feux...

Il n'y a plus que les moustiques qui s'excitent sur les parois de la tente et les fourmis qui dévorent le tapis de sol. On est bien trop rôtis pour leur prêter attention. On roupille déjà.

On s'endort chaque soir si poisseux et si pègueux que le matin, se décoller du matelas demande un certain effort !

Les journées se suivent et se ressemblent jusqu'à ce qu'un beau matin au détour d'un col, des gratte -ciels apparaissent au loin !

Kuala Lumpur : terminus de cette épopée malaisienne.

Nous dégringolons jusqu'au centre- ville à la recherche de la ligne d'arrivée de la course. Le genre de truc, sur une grande esplanade décorée de banderoles et où il y a des distributions de bonbons, des mecs en costumes, des filles en mini-jupes, des bouquets de fleurs, des coupes en or et le test anti -dopage !

Étonnement nous ne rencontrons rien de tout cela et de toute façon, nous n'avons du temps à perdre ni avec des cérémonies à n'en plus finir ni de faire pipi dans des petits pots. Nous avons un avion ce soir et nous avons la journée pour trouver deux grands cartons à vélos, tout démonter, ranger et nous rendre à l'aéroport.

La chasse aux trésors est ouverte. Nous voici partis pour un marathon urbain à la recherche de deux boîtes à vélo. Alors que nous essuyons échec sur échec et sortons bredouilles de chaque magasin de cycles, nous commençons à perdre un peu espoir. Mais comment pourrait-on rater un avion après la mission que nous nous sommes mis pour arriver en temps et en heures, jusque- ici ?

Impossible.

Finalement, la chance nous sourit doublement en début d'après-midi. Deux cartons et un magasin accueillant qui nous laisse un espace et accès à l'atelier pour bricoler.

En quelques heures, guidons, pédales, selles et roues sont démontés. Les cartons sont une fois encore pleins à craquer. Nous sautons, sans plus attendre ,dans un taxi avec nos encombrants bagages à destination de l'aéroport et quelques instants plus tard, nous nous envolons.

Youpi, ciao la Malaisie !

Bingo, salut Tokyo !

16
avr
16
avr
Publié le 1er mai 2023
22
avr
22
avr
Publié le 22 avril 2023

Ce matin, nous avons pu observer tout un petit groupe de cigognes. Elles étaient là, debout, dans leurs costumes de plumes noires et blanches, surmontés d'un fin bec rouge. Plantées sur une patte ou deux, dans une rizière asséchée et fraîchement fauchée. Certaines pliées en deux, profitant de la halte pour se mettre dans le gosier les quelques grains qui auraient échappé au ventre gourmand de la moissonneuse-batteuse.

D'autres, le bec en l'air, admirant curieusement ce tout nouveau décor. Tant de paysages doivent défiler devant leurs yeux ébahis au fil de ces milliers de kilomètres survolés.Halte sur le trajet, courte pause dans un long voyage. Reposer ses ailes, se dégourdir les pattes et se mettre quelque chose dans le bec... voici ce qui semblait être le programme. Plus tard durant la même journée, nous avons pu observer à nouveau un groupe de cigognes en plein vol ce coup-ci. Un troupeau volant. Était-ce les mêmes ? Le voyage avait repris, le périple continuait...

Dans un schéma parfait, un graphisme épuré, l'une prenant l'aspiration de la précédente, unissant leurs forces pour parvenir à destination à moindre frais. Autrement dit, en laissant le moins de plumes possible dans la bataille.

Mais d'où venaient-elles ? Où allaient-elles ?Le nord ? Le sud ? L'hiver ? L'été ?C'est ainsi, que je me rends compte que je suis comme perdue, désorientée dans le temps, les saisons, les hémisphères et les climats...Ici en mars, il fait déjà 40 degrés bien tassés. Il faudrait être fou pour venir y chercher un climat propice. L’été va s'installer de jour en jour et les températures ne vont cesser de grimper... Mais c'est un bon climat pour une escale. Bien plus au sud, l'été touche à sa fin, l'automne s'installe probablement doucement et les températures se rafraîchissent peu à peu. Est-ce cela qui leur aurait fait faire leur baluchon ?Au nord, l'hiver est encore loin d'être terminé même si à coup sûr la neige disparaît peu à peu, les journées s'allongent et le soleil brille de plus en plus fort et de plus en plus haut.Mais qui aurait voulu passer tant de mois à grelotter ?Certainement pas ces bêtes à plumes cherchant un climat clément pour construire un nid et pondre leur oeuf.Certainement pas nous non plus avec nos trois poils sur le corps, nos minces habits, notre maison de toile sans chauffage et nos vélos sans carrosserie pour nous abriter des intempéries.Migrer du sud au nord."Cigognes-cyclistes", nous sommes tous dans le même bateau, confrontés aux éléments, soumis au climat et à la recherche de fraîcheur l'été, de douceur l'hiver. Nous errons du nord au sud, du sud au nord, nous suivons le soleil, nous fuyons la pluie, nous recherchons les longues journées et les courtes nuits, nous prenons ou perdons de l'altitude, nous grimpons jusqu'aux hautes latitudes. Été austral, boréal, hiver tropical ou équatorial...Nous tournons autour de la terre le nez en l'air, en quête de là où il fait bon vivre pour poser, un temps, nos valises.Nous faisons partie du grand peuple migrateur.Une vie de saisonniers climatiques, de nomades volants ou roulants, de voyageurs itinérants.Cette fois, à la force de leurs ailes, c'est l'hémisphère nord qu'elles rejoignent, à celle de nos jambes nous roulons vers notre prochaine aire de décollage. Nos ailes seront d'acier, c'est bien moins élégant mais bientôt nous rejoindrons le printemps.Combien de fois nos chemins convergeront ? Combien de fois nos routes se croiseront encore ? La dernière fois, que nous avions aperçu des cigognes, c'était il y a 8 mois dans les montagnes Géorgiennes. Bien installées au frais pour l'été, de beaux nids et des petits qui étaient déjà nés et qu'il fallait alimenter sans cesse afin qu'ils soient forts et prêts pour eux aussi pour entreprendre leur premier grand voyage lorsque l'automne pointera son nez.

Comme les fleurs qui éclosent, les bourgeons qui verdissent, les fruits qui grossissent, les feuilles qui fanent, les flocons qui tombent, les gouttes de pluie et le soleil qui brille, les allers et venues des oiseaux migrateurs rythment l'année du voyageur.

5
mai
5
mai

Un nouveau cap kilométrique franchi et surtout une occasion de rendre hommage à Marc qui aurait très certainement avalé ces milliers de kilomètres en quelques mois à peine et sans se fatiguer !

Le week-end dernier, Marc a été percuté par une voiture alors qu'il était justement en train de pédaler tranquillement sur ces petites routes des sierras espagnoles qu'il aimait tant sillonner.

Ces derniers mois, j'ai bien souvent pensé à Sophie et Marc qui dès que l'hiver tirait sa révérence, rangeaient les skis et enfourchaient les vélos. Me dire qu'ils parcouraient tant de kilomètres à chaque sortie et me remémorer ce que me disait toujours Sophie, "le vélo est un sport de bourrique" m'aidait à avancer alors que j'étais complètement cramée !

Aujourd'hui mon cœur a tant de peine que j'ai du mal à appuyer sur les pédales...

Une énorme et tendre pensée pour toi, Sophie mon amie et un gros câlin pour toi, petite Maria, mon bonbon rose préféré.

9
mai

365 jours sur les chemins du monde !

A cette heure-ci, nous devrions être en train de plier nos bagages pour rentrer à la maison.

La tentation de poursuivre vers l'Est fut trop forte. Il y a encore trop de lieux incroyables à découvrir, trop de rochers à grimper et trop d'humains fantastiques à rencontrer !

... et puis on n'a pas de maison pour poser nos valises ! C'est un bon argument non ?!

L'aventure continue, par contre, on s'est un peu embourgeoisé pour nos futurs déplacements !

10
mai
10
mai

Un an tout pile... 365 jours sur les chemins du monde !

Pas de gâteau d'anniversaire, pas de champagne mais la joie simple d'en être là et un condensé de quelques images pour lesquelles j'ai joué au difficile exercice de ne pas excéder une minute par mois !

Les souvenirs sont trop nombreux, le monde est trop grand et le temps passe trop vite !

À qui doit-on adresser sa demande quand on veut des jours et des jours de vie supplémentaires ?! 😳

12
mai
12
mai
Publié le 12 mai 2023

Konniti ha Japan !

Une nouvelle planète pour les vélos magiques, un monde nouveau pour les petits voyageurs.

Bienvenue au Japon ! Une fois encore, le changement est frappant . Ce coup-ci, il est même épatant. Quel contraste avec ce que nous avons connu jusqu'ici !

Une joie tout d'abord de quitter un aéroport international en pédalant sans prendre le risque de se faire aplatir sur la première bretelle de rocade triple voie. Il paraîtrait même que l'accès routier à certains aéroports est interdit aux vélos. Ici en sortant du terminal, c'est presque une piste cyclable qui s'offre à nous !

Quelques tours de roues suffisent déjà à donner les premières notes de cette toute nouvelle partition qui se déroule devant nos roues. Ainsi, en à peine quelques kilomètres parcourus, en quelques regards croisés et quelques véhicules rencontrés, nous prenons déjà un peu mieux la température de là où nous venons de poser nos pneus.

Calme et propreté nous sautent aux yeux et aux oreilles et déjà une vague de curiosité me submerge. Sur une île volcanique et aux antipodes de ce que nous connaissons, c'est presque d'un tsunami dont je devrais parler !

Cela fait quelques minutes à peine que nous roulons lorsque sur le bas -côté de la route, au sommet d'une butte, j'aperçois tout un tas de têtes, d'yeux et d'objectifs photographiques braqués dans la même direction. Qu'avons-nous raté de si fantastique ?

Un ours qui baille aux corneilles en se réveillant au sortir de l'hiver ? Une grue du Japon en train de prendre la pose ? Un phénomène rarissime à observer ? Des fleurs qui éclosent ?

Quelle n'est pas ma surprise quand je découvre que toute cette petite foule, tous ces regards ébahis et tous ces gros appareils photos posés attendent simplement que des avions décollent ou atterrissent pour faire d'eux des milliers de clichés ! Ornithologue spécialisé dans l'aéronautique, en voilà une passion !

Mon petit doigt me dit, qu'ici, nous ne sommes pas au bout de nos surprises. J’ai déjà hâte de découvrir le reste. Et la suite se déroule aux toilettes !

De toutes ces contrées et de toutes ces cultures rencontrées ces derniers mois ou depuis des années, j'ai fini par élaborer une petite théorie.

S'il y a bien un endroit qui ne trompe pas, un lieu qui est le reflet d'un bout de la société, un passage obligatoire pour toutes et tous et tous les jours, un petit coin qui souvent en dit long, c'est bien le trou où l'on dépose nos besoins quotidiens. Ainsi quand on va faire pipi, on peut aussi faire du tourisme, de la sociologie et de l'ethnologie !

D'un simple trou dans la terre à une machinerie de technologie incroyable, les toilettes sont un vrai témoin de la société dans laquelle nous mettons les pieds, ou devrais-je dire les fesses !

Écoutez les, observez les et respirez les : ils ont tout un tas de choses à nous raconter ! Vous y découvrirez tout d'abord quelques indices sur le rapport et le niveau d'exigence en terme d'hygiène.

Présence de papier ou d'eau, petit seau ou petit jet vous parleront très certainement de religion, tandis que les systèmes de camouflages du bruit ou de l'odeur diront tout d'une certaine forme d'hypocrisie sociétale !

Le papier doux, moelleux, épais, fin, rapeux, blanc, rose ou marron, lui aussi en dit long.

Cuvettes avec ou sans lunette, urinoirs, trou creusé à même la terre, simple orifice dans une dalle en béton, toilettes sèches ou à la turque, petite balayette, chasse d'eau, lavabo plus ou moins brillant, savon plus ou moins moussant, sèche-main en plus ou moins état de marche, dérouleur de papier automatique ou bout de tissu à la couleur douteuse, poubelle miniature totalement vide ou grand contenant qui déborde !

"Mieux vaut un petit chez soi qu'un grand chez les autres" entend-on parfois. J'ai toujours associé cette formule aux WC.

Le temps passé au petit coin pourrait donc être tout aussi révélateur du confort rencontré, à toutefois une exception près. Cette foutue tourista qui vous attrape toujours dans un pays où les toilettes incitent davantage à partir en courant qu'à y poser un bivouac. La densité de toilettes publiques au kilomètre carré est aussi un indice très intéressant, bien que je ne pense pas que certaines populations aient des envies plus pressantes que d'autres mais plutôt que certains peuples ont la chance de pouvoir se soulager plus facilement que d'autres.

Ici en terre nippone, la théorie des toilettes se vérifie, voir même elle s'étoffe grandement tant je découvre des choses que je n'aurais même pas imaginées ! Chaque mini supermarché, chaque parking, chaque parc a ses toilettes. C'est ultra propre, chauffé, éclairé, on y squatterait sans soucis !

Une cuvette impeccable, une lunette toute chaude (et oui !) et un boitier électronique digne d'un tableau de bord d'un avion, à portée de mains. À quoi peuvent bien servir tous ces boutons ? Jet d'eau tiède bien orienté et à pression variable, système de séchage et bruitage masquant le "plouf" de la crotte qui tombe.

Quelles dépenses énergétiques pour de malheureux WC mais quel bonheur lorsque des fesses gelées et douloureuses de cycliste y trouvent un peu de réconfort sur une lunette chauffante ! Pas de doute, ces endroits en disent long sur le Japon mais je referme cette parenthèse en même temps que la porte des toilettes !

Le printemps bat son plein sur l'île lorsque nous débarquons. Tous les arbres ont enfilé leurs costumes printaniers. Les jardins sont multicolores, les arbres croulent sous le poids des fleurs et des pétales blancs sont transportés çà et là par le vent.

Tous les regards sont tournés vers les cerisiers en fleurs et tous les japonais n'ont que deux mots à la bouche : "cherry blossom".

Ici c'est "hanami", une tradition japonaise qui consiste à apprécier la beauté des fleurs. Quelle poétique occupation ! On peut dire que niveau pétales, pistils et étamines, ils sont servis, tant il y en a. Mais quel peuple rencontré jusqu'ici se serait émerveillé devant un arbre fleuri ? Quelle civilisation aurait pris du temps pour s'adonner à une passion telle qu'admirer des fleurs ?

De petites routes parcourant une nature verdoyante et parsemée de temples nous conduisent , peu à peu, aux immenses avenues d'une grande mégalopole ultra moderne. Immenses carrefours, passages piétons en diagonale, énormes buildings vitrés, écrans lumineux géants... Larges trottoirs impeccables sur lesquels piétons et cyclistes cohabitent. Pas un klaxon qui retentit, des moteurs majoritairement électriques et des piétons silencieux . Comment une si grande ville peut-elle être étonnamment aussi calme ?

Un bivouac en campagne aux portes de la capitale nous conforte dans l'idée qu'il n'y a vraiment aucune raison de se tracasser pour camper. Au Japon comme ailleurs, nous dormirons partout sans nous poser tellement de questions !

Si poser sa toile de tente peut être un jeu d'enfant, faire la grasse mat' semble néanmoins ne pas apparaître dans le dictionnaire japonais. À 4h, l'aube pointe déjà son nez, à 5h les habitants commencent déjà à s'activer ! Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt au pays du soleil levant.

Et quel monde !

Un petit monde bien propre, bien ordonné, composé de gens bien disciplinés, respectueux à outrance les uns des autres, calmes et silencieux. Corps sveltes, yeux bridés, cheveux noirs, raides, peaux claires. Gens de tous âges en bonne forme physique. Ici, il semblerait que l'on vive jusqu'à 150 ans ! Sourires dissimulés sous des masques dévorant les trois quarts du visage. Les sentiments sont si bien dissimulés.

La barrière de la langue et une distance sociale imposée n'aident parfois pas vraiment à établir un contact quel qu'il soit. Mais dès lors que les masques tombent la bienveillance, l'accueil et la gentillesse rencontrée grimpent dans le top 3 des belles surprises du voyage.

Quel peuple surprenant !

Comment peut-on être si distant et si attentionné à la fois ? Leur arrive-t-il de ne pas s'excuser de simplement te croiser en s'inclinant je ne sais combien de fois devant toi ? Ouvrent-ils ne serait-ce qu'une seule fois la bouche sans qu'une formule de politesse n'en sorte ? Oseraient-ils même un jour exprimer un désaccord, leur colère ? Connaissent-ils le sentiment de révolte ? Un japonais est-il même capable de s'énerver ?

C'est assez incroyable comment ce peuple semble malléable au point de se modeler au cadre imposé, de s'accommoder de la règle édictée aussi ridicule soit elle.

Tout comme les toilettes, les transports publics sont en général un indice assez parlant. Ici on patiente sagement en retrait du quai dans des cases dessinées à cet effet sur le sol. On ne commence à bouger quand et seulement quand les voyageurs descendant à la station sont tous sortis du train. On se fait des politesses et on s'offre mutuellement la place assise, on ne mange pas dans les transports et on ne regarde pas des vidéos avec la musique à tue -tête sur son téléphone !

Globalement on réfléchit à deux fois avant de faire quelque chose qui pourrait gêner autrui.

Dans ce train calme, dans cet espace propre, spacieux, éclairé, sans odeur, avec un système de chauffage au niveau des pieds, et en observant tous ces visages inconnus, si différents de ceux que l'on a croisés jusque -là, en voyant défiler tous ces paysages boisés au travers de ces vitres impeccables, des souvenirs envahissent ma mémoire.

Je ne peux m'empêcher de repenser à ce fameux train en gare de New Delhi. Un train de nuit, la veille d'un jour de fête et une foule désorganisée attendant sur le quai. Personne ou presque n'avait de couchette réservée mais tout le monde en voulait une ! Des employés tentaient de faire respecter l'ordre et essayaient de maintenir une distance, dite de sécurité, avec les rails en donnant des coups de matraque en plastique sur les voyageurs. Rien ne semblait troubler la détermination de tous ces indous bien décidés à rejoindre le Gange pour fêter Diwali.

Cette attente entassée, s'était poursuivie par une bagarre incroyable pour monter à bord, les gens pressés comme des citrons dans une cohue sans nom. Ça tirait, ça poussait, ça criait, ça gémissait, ça bourrinait, ça s'agrippait aux vêtements, ça grimpait sur les wagons et ça entrait par les rares fenêtres sans barreau... Lorsque le train démarrait, certains forçaient encore le passage et tentaient leur chance en courant à ses côtés.

Une fois à l'intérieur, il avait fallu se faire une petite place sur une de nos deux couchettes déjà largement squattées par toute une horde d'indiens aux visages sombres et aux airs graves. Un hochement de tête comme, eux seuls en ont le secret, et qui peut signifier à peu près tout et n'importe quoi mais dans ce cas précis quelque chose comme "cause toujours" !

Pas loin de 25 personne dans un espace conçu pour 8 dans ce compartiment et que dire des couloirs de ce train où s'empilaient des centaines de personnes, assis ou allongés à même le sol. Odeurs des corps, de nourriture épicée, de tchaï fumant, de latrines spartiates s'entremêlaient, crasse sur les murs et sur le sol, ronronnement et bruit métallique des roues sur les rails venaient complètement le décor.

Pour nous petits européens le choc culturel était grand mais qu'elle ne fut pas notre surprise quand nous vîmes débarquer dans ce chaos humain une petite famille de... japonais.

L'homme portait une chemise de coton indien bien repassée dont les boutons avaient, semble-t-il résisté à l'émeute des dernières minutes. La femme était vêtue d'une grande robe grise, d'un petit gilet assorti et d'un petit chapeau de paille encore parfaitement posé sur ses cheveux bien peignés, l'enfant d'une dizaine d'années observait de ces grands yeux noirs en amande ce spectacle pour le moins surprenant. Il semblait tranquille, pourtant dans la bataille, il venait de perdre sa montre ultra-connectée, sûrement arrachée de son poignée dans la mêlée mais il ne laissait apparaître aucun remord bien qu'il fut sûrement un peu déçu.

Ils étaient tous trois chargés d'innombrables sacs et valises qu'ils avaient mystérieusement réussi à hisser à bord alors qu'entrer les mains vides dans ce train relevait déjà du défi !

Arrivés dans le compartiment, trois couchettes leur étant réservées, l'homme fit un geste pour demander qu'on leur cède la place appropriée. Aussi étonnant que cela puisse paraître les indiens s'exécutèrent presque sans rechigner dans un hochement de tête qui ce coup-ci était plutôt synonyme de "bon, d'accord...".

Nous étions scotchés. Parce qu'évidemment, nous avions, nous aussi, bien tenté notre chance en demandant qu'on nous laisse un petit peu d'espace. Et si quatre indiens s'étaient gentiment décidés à quitter notre lit, sept s'y étaient assis illico à la place ! Et cette fois, c'est certainement nous qui avions hoché la tête un peu désespérés !

Pendant qu'assis, pliés en deux sur notre couchette, nous passions la nuit entière à vomir la nourriture douteuse avalée la veille dans les rues du Old Delhi et à réaliser des allers et retours semblables à des parcours du combattant pour rejoindre les toilettes du train (qui évidemment, vous le devinez n'avait pas de lunette de cuvette chauffante et n'étaient pas insonorisés !), nos trois japonais semblaient dormir à peu près paisiblement. Trois ou quatre indiens s'étaient pourtant incrustés au fil de la nuit sur leurs couchettes notamment sur celle du petit garçon qui tentait tant bien que mal, en palabrant, de conserver sa place sans en inquiéter ses parents !

Aujourd'hui, confortablement installée dans ce train nippon, je serais si curieuse d'appréhender les sentiments qu'éprouvait à cet instant précis ce petit japonais.

Pour lui, c'est certain, ses parents ne l'avaient pas simplement emmené visiter un autre pays. Ils lui avaient offert la découverte d'un autre monde. Cette situation devait être aux antipodes de ce que ce petit japonais connaissait jusqu'ici ?

Elle dépassait déjà toute notre imagination de petits voyageurs européens un peu roots alors qu'en était-il pour celle d'un petit habitant du pays du soleil levant en visite dans le pays où le jour ne semble jamais se coucher tant l'agitation est permanente.

Quand bien même, ce dernier semblait plutôt bien s'accommoder de cette situation incongrue et je me souviens avoir aimé le voir observer avec curiosité le fonctionnement de ce nouveau monde qui l'entourait.

Quelle chance pour nous d'être témoin de ce choc des cultures et de cette capacité d'adaptation de l'être humain !

Quel spectacle avions-nous là, sous nos yeux !

14
mai
14
mai
Publié le 17 mai 2023

Ce premier mois au Japon a été comme des vacances. Alors oui, on est TOUJOURS en vacances, me diriez-vous, mais quand même...

Autrement dit, dans un grand voyage, il y a des moments qui ressemblent un petit peu moins à des vacances que d'autres. Et clairement les dernières semaines n'ont pas vraiment été de tout repos !

Lorsqu'on débarque sur l'île, nous sommes un peu fatigués, nos peaux sont grillées comme des merguez, nos corps sales comme des poux, nos vêtements crasseux et nous avons les mollets (et les fesses) un peu en compote !

Retrouver des températures plus clémentes, de la nourriture plus diversifiée et ralentir un peu le rythme étaient déjà de belles récompenses après des journées sous une chaleur assommante et bien remplies. Mais ce n'est pas tout... Au Japon, nous allons nous faire un peu chouchouter !

L'AGSJ (Alpine Guide Society of Japan), une association de guides de montagne pour laquelle Bruno avait joué le formateur tantôt en France, tantôt ici même, nous accueillera et fera en sorte que l'on se sente au Japon presque comme à la maison !

Malgré l'heure tardive et une erreur de notre part sur la date d'arrivée (cas soc' un jour, cas soc' toujours), à la sortie de l'aéroport, c'est Iku et Yuko qui nous attendent avec une voiture suffisamment grande pour qu'on l'on puisse y fourrer nos très grands cartons à vélo. Un hôtel, réservé pour nous, non loin nous offrira le repos mérité. Un vrai grand lit et notre première vraie toilette depuis... c'est si loin qu'on s'en souvient à peine !

Le lendemain matin, les vélos sont réassemblés pièce par pièce et sont fin prêts à reprendre la route !

Une centaine de kilomètres sur de jolies petites routes et un bivouac font office d'apéro ! Campaï !

De la campagne de Narita aux grandes avenues de Tokyo, la transition se fait en douceur, d'autant plus que, quand nous entrons dans la capitale, les rues sont étonnement désertes.

Circulation excessivement calme et personne ou presque sur les trottoirs, aurait-on raté quelque chose ?

Aujourd'hui, nous sommes le 21 mars et c'est un jour férié au Japon. On fête tout simplement le printemps ! À observer tous ces arbres couverts de milliers de fleurs, on aurait pu largement s'en douter.

Dès lors que nous passons le portail de l'enceinte d'un temple, l'atmosphère s'anime considérablement. Grands bâtiments rouges, lampions de papier, dames en kimono, musique traditionnelle, charrettes à bras, et pièce de théâtre en guise de mise en bouche.

En quelques secondes, nous plongeons dans une nouvelle culture et découvrons un nouvel univers. Hello Tokyo !

Depuis combien de temps n'avions-nous pas roulé sur des pistes cyclables ?

Pris un bain chaud ? Dormi dans un vrai lit ? Visité un musée ? Entré dans un magasin de beaux arts ? Vu des magasins de nourriture si bien achalandés ? Des boulangeries avec du vrai pain ? Des magasins de montagne avec des rayons plein de chaussons en taille 35 ? Une salle d'escalade de dry tooling ? Des écrans lumineux aussi gigantesques ? Des trottoirs aussi propres ? Des salles de jeux vidéos ? Des barbes à papa multicolores ? Des magasins de vêtements pour chiens ?Des voitures qui ressemblent à des cubes ?

La capitale nippone nous aura offert tout ça à la fois et même plus comme festin !

Durant cinq jours, nous mettons en pause nos vies de vagabonds. Les guides Japonais (on devrait d'ailleurs songer à leur délivrer la licence "tourisme"), nous dégotent un toit et ça tombe bien parce que la pluie ne tarde pas à s'inviter à la fête. Nous posons nos valises dans un studio photo transformé en "Air Bn'B" pour l'occasion ! Un petit lit pour deux, une mini cuisine, une minuscule baignoire, un chauffage soufflant de l'air chaud mais aussi des fauteuils dorés, des étagères remplies d'objets improbables et un décor digne d'une bonne pièce de théâtre à la française !

On ne se prive pas de prendre la pose devant l'objectif et de plonger dans la baignoire chaque soir. Un délice !

Les journées s'enchaînent et sont bien remplies. Entre des marathons cyclistes dans les avenues de Sinjuku à la recherche de nouveaux patins de frein, de magnésie et de papier à dessin, la dégustation d'onigiri, de sushis et de mochis, une séance de bloc en salle, la visite d'un musée sur la période Edo, une rencontre avec une potière et la visite de son atelier, des balades dans des parcs, des invitations au restaurant, un festival de dry tooling et une welcome party pour nous souhaiter la bienvenue dans le pays : nous n'avons pas le temps de nous ennuyer !

Nous donnons même nos tout premiers spectacles, présentations du voyage en projetant un petit film monté pour l'occasion. Le tout sponsorisé par "zéro budget production" avec un simple smartphone comme table de montage et de la mauvaise musique attrapée à la hâte sur le net. Notre public ne semble y voir que du feu et la participation libre de chacun va soulager notre porte monnaie à faire notre entrée dans ce premier pays dit "riche".

Nous profitons aussi de cet abri, d'être au sec ces jours de pluie pour bricoler notre maisonnette. "Atelier gomettes" : on colle tout un tas de rustines sur le tapis de sol de notre tente copieusement dévorée quelques semaines plus tôt par les fourmis thaïlandaises. Plancher refait à neuf !

Toutes les bonnes choses ont une fin et bientôt la vie de paillette sera hélas terminée et celle de clochards "sellestes" reprendra pour notre plus grand bonheur !

À suivre...

12
mai
12
mai
Publié le 14 mai 2023

Un douzième mois sur la route c'est :


◇ 16 pays 🇨🇵 🇮🇹 🇬🇷 🇹🇷 🇬🇪 🇦🇲 🇰🇿 🇺🇿 🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬 🇮🇳 🇮🇩 🇻🇳 🇱🇦 🇹🇭 🇲🇾 🇯🇵

◇ 9057 km 🚲

◇ du train et des sacs à vélos "home made" 🚞

◇ Des rencontres incroyables 🧔🏽‍♂️🧑🏻‍🦱🧑🏽‍🦱👶👨🏻🧔👧🏽🧑‍🦳🧑👩🏻🧒🏽👴🏻👩🏻‍🦱

◇ Un accueil de fou 🏠

◇ Des soirées partagées 🍻

◇ Des repas délicieux 🍣


◇ 13 journées complètes de vélo 🚴‍♀️

◇ 13 journées d'escalade 💪

◇ De la grimpe trad et des fissures 👍

◇ 4 grandes voies 🤗

◇ 5 spots de grimpe différents 🧗‍♀️

◇ 1 coupe du monde d'escalade 🤩

◇ Des balades dans la neige ❄️ et 2 sommets 🗻

◇ 1 nuit en refuge 🌄

◇ 14 nuits en bivouac 🏕

◇ Des milliards de fleurs 🌸

◇ 4 jours de pluie ☔️

◇ 1 épaule en compote 🙁 et 1 dent en moins 🦷

◇ 2 passages chez l'ostéo et 1 chez le dentiste

◇ 5 onsens et 11 bains chauds 🛁

◇ 3 projections de films 📽

◇ 1 séance de couture 📏, de la cuisine 🥞 et 1 match de basket 🏀

◇ Des temples ⛩️

◇ 1 saro 🐐, des biches 🦌, des lagopèdes 🐔

◇ Des dessins et un 2ème carnet rempli terminé 📔

◇ 3kg de nourriture sauvée de la poubelle 🍞

17
mai
17
mai
Publié le 22 mai 2023

Jogasaki ou la maison de vacances à la mer d'un alpiniste...

Les vacances des touristes à Tokyo touchent à leurs fins et les vacances des grimpeurs commencent.

Rejoindre ce premier spot de grimpe japonais nous demande deux jours de vélo depuis la capitale. En quelques dizaines de kilomètres, nous rejoignons la Péninsule d'Izu et la côte. C'est toujours chouette de longer une mer à vélo mais ce coup-ci la route est si étroite, le trafic parfois si dense et les pentes si raides que nous devons davantage faire attention à où nous mettons nos roues plutôt qu'à admirer le littoral.

Jogasaki est un des principaux spots de grimpe national. Célèbre également pour nous, Européens, car les images de ces falaises au rocher atypique et d'un fameux grimpeur agrippé dessus ont fait le tour de la planète dans les années 90 dans un célèbre livre : "Rocks around the world "

Les guides japonais rencontrés à Tokyo, n'ont pas manqué non plus de nous vanter les mérites de la falaise nippone. Ils nous ont toutefois mis en garde. En cette période, il peut déjà y faire très chaud. Il est certain que rocher noir, orientation sud et chaleur ne doivent pas faire vraiment bon ménage.

Ils ont même ajouté ceci en se fendant la poire : "クライマーは、テファルパンでステーキの空気にすぐに乗ることができます。"

Des japonais qui rigolent aux éclats, c'est plutôt louche alors j'ai sorti Google Trad et voici ce que j'y ai découvert : " Le grimpeur peut très vite prendre des airs de steak dans une poêle Téfal !"

Évidemment, nous nous disons que niveau chaleur, nous sommes à peu près acclimatés avec les températures supportées ces derniers mois et puis comment ne pas tout simplement visiter ce spot mythique ? (Même si Bruno y a déjà grimpé, il y a quelques années.)

Jogasaki, c'est une jolie forêt verdoyante et une côte rocheuse abrupte. Des falaises de rochers de couleur sombre plongeant à pic dans la mer. À marée basse, ce sont de courtes plages de gros galets aux subtiles nuances de gris.

La couleur noire de la roche et la présence d'îlots émergeant de la mer en forme d'orgues témoignent de l'origine volcanique du décor.

C'est par de petites désescalades ou parfois de courts rappels que l'on accède aux falaises. Voies sportives à l'équipement vieillissant et qui a un peu trop pris les embruns marins et voies trad à équiper soi-même se côtoient. Nous toucherons davantage aux secondes qu'aux premières pour deux raisons : Premièrement, poser ses propres protections est, une fois n'est pas coutume, moins effrayant que clipper des points déjà en place. Deuxièmement, le style de grimpe n'est absolument pas le même. Dalles, dévers ou fissures et dièdres, on opte pour les lignes de faiblesse.

Nous enfilons nos gants de fissures et accrochons tout un tas de ferraille de toutes les couleurs et de toutes les tailles à nos baudriers.

La grimpe est à la mode anglo-saxone, c'est à dire le minimum de matériel à demeure et pas même de relais en place si une solution naturelle est envisageable ! Ainsi lorsqu'on sort rôti de sa longueur, il faut encore fouiner dans les buissons pour trouver une racine suffisamment solide à laquelle s'amarrer pour redescendre !

Le rocher est tantôt ultra lisse semblant avoir été coupé au couteau, tantôt étrangement sculpté lui donnant des airs subtils de peau d'un très gros mammifère. Nous avons parfois la sensation d'être deux lézards grimpant sur le ventre d'un éléphant !

Du beau caillou, de jolies fissures, de la chouette grimpe, une chaleur printanière, une vue imprenable avec la mer et le bruit des vagues en fond sonore ? What else ?

Dans le programme de la formule tout-compris du tour opérator "bike and climb in Japan" concocté par l'AGSJ (Alpine Guide Society of Japan), des ex-stagiaires de Bruno, j'avais pu lire : "vacances à la plage à Jogasaki : n'oubliez pas vos coinceurs et vos mollets !" À cet instant précis, ce dernier mot aurait dû m'interpeler mais il n'en fut rien. Pour des vacances à la plage, j'aurai plutôt songé à emporter de la crème solaire ou un parasol...

Dans la rubrique "hébergement", on pouvait lire : "Kentaro vous prête sa maison de vacances à la mer".

Wouah, une maison !!! Et à la mer en plus, je suis remplie de joie et je saute au plafond ! Là, c'est sûr, nous allions être les rois du pétrole, les kings de l'asphalte... et à propos d'énergie et de revêtement de route, on ne pensait pas si bien dire !

C'est seulement lorsque nous entrons le point gps de localisation de la dite "maison à la mer" que nous comprenons illico que les vacances sont, pour nous, bel et bien terminées !

La maison se situe certes à proximité de la mer, moins de 3 kilomètres à vol d'oiseau de la côte à peine mais la principale ombre au tableau, c'est qu'elle se situe aussi à plus de 300 mètres de dénivelé au- dessus du niveau de celle-ci !

Je vous laisse imaginer le degré d'inclinaison de la pente... De mémoire de cycliste, c'est du jamais vu ! De mémoire d’alpiniste, la coutume veut que dans des pentes comme celles-ci, on sorte la corde. De mémoire d'automobiliste, c'est bien simple, si un flocon de neige venait à tomber ici, l'accès à tout le quartier serait littéralement impossible !

La maison de Kentaro, c'est une des toutes dernières habitations d'un grand lotissement sur pilotis, lui-même accroché aux flancs abrupts d'une montagne et c'est vrai que par la fenêtre, tout en bas, on voit la mer !

Dans le salon, un grand poster du Manaslu, dans la bibliothèque des tonnes de topos, de livres et de mangas d'alpinisme, au sous-sol un véritable petit musée de matériel de montagne d'une autre époque.

Voilà à quoi ressemble la maison de vacances à la mer d'un alpiniste !

Avoir réussi à pédaler jusque- là, avec nos vélos lourdement chargés de toutes nos affaires le premier jour après la journée de grimpe, relève encore du mystère.

Et chaque soir, après une bonne journée à jouer avec nos friends et à batailler dans les fissures de basalte, s'en suit un festival "petit plateau-grand pignon" pour remonter à la maison !

Alors que je suis à deux doigts de poser le pied à terre à chaque virage, je me demande si l'AGSJ ne nous aurait pas tout simplement tendu une espèce de petit piège !

Une sorte de mise à l'épreuve des petits cyclistes que l'on a prétendu être lors de notre projection de jolies photos à Tokyo, un petit défi lancé par des guides qui bossent, à des collègues qui se la coulent douce en vacance. Une espèce de bizutage des stagiaires au formateur, la sympathique vengeance des élèves au maître pour des sorties passées au dénivelé un peu trop important ou au rythme un peu trop harassant ?

On aurait évidemment pu facilement déjouer le guet-apens en faisant l'impasse sur le palace et en plantant notre tente sur les plages de gros galets aux pieds des falaises mais c'était sans compter que nous étions déjà devenus complètement addict à l' "ofuro".

L' "ofuro" (prononcé "ofulo"), c'est la grande baignoire que l'on trouve dans toutes les salles de bain japonaises. Un bain que l'on remplit d'eau bouillante et où l'on barbote seul ou à plusieurs. La même eau est conservée pour les bains des jours suivants ou pour celui des autres membres de la famille et elle est réchauffée par un ingénieux système de réchauffage intégré dans la baignoire. Ultra malin pour ne pas gaspiller d'eau mais énergivore en terme d'électricité. Sans compter qu'avant de plonger dans le bain, les japonais font couler des litres et des litres d'eau en se douchant et en se savonnant très très abondamment !

Les journées de grimpe se suivent et se ressemblent. De bon matin, on dévale tout d'abord la colline en s'échauffant les doigts sur les manettes de frein. S'en suit une petite marche d'approche pour le réveil des gambettes et puis c'est au tour des bras de se mettre en action.

Nous visitons, chaque jour, différents secteurs, nous nous essayons à des fissures de toutes tailles et de toutes formes. Puis lorsque le soleil décline, et après un passage au supermarché pour reprendre quelques forces, c'est les jambes qui s'enflamment dans cette grimpette du col du Tourmalet version courte, intense et nocturne. Lorsque les mollets sont carbonisés, c'est qu'on est relativement proche de la ligne d'arrivée !

On fête alors la victoire de l'étape par un bon repas cuisiné sur une vraie gazinière, un bain bouillant et un dodo sur nos tapis de sol ou du moins ce qu'il en reste, mais au chaud !

Merci Kentaro pour ces vacances à la plage et ce stage de remise en forme !

25
mai
25
mai
Publié le 28 mai 2023

Dans un pays où tout est normé, réglementé, surveillé, cela relèverait du miracle de ne pas se retrouver à un moment ou à un autre dans le rôle du "hors la loi".

C'est même finalement plutôt rassurant d'être parfois à cette place tant la règle peut paraître quelques fois absurde. Si nous devions même toujours être dans les clous, il nous faudrait très certainement nous interroger sur notre sens critique qui aurait pris un coup dans l'aile. Pour tout dire, ça m'inquièterait même un peu !

Être très souvent à côté du droit chemin japonais, ce n'est pas tant la faute à notre esprit rebelle tenace mais plutôt à la stupidité d'un règlement et à des citoyens vraiment très très droits.

Quel contraste avec ces sociétés rencontrées jusque- là où tout semblait fonctionner davantage au feeling plus qu'à la loi. Ici il y a toujours une règle à laquelle il faut se conformer, un petit panneau caché dans un coin, une consigne à respecter.

Et la règle, c'est la règle !

C'est assez fou la capacité qu'ont ces gens à s'y plier, aussi ridicule soit-elle, sans faire appel à une certaine logique ou faire marcher leur simple bon sens.

Quelques fois, c'est même pire, on semble prendre un malin plaisir à l'appliquer, à la rappeler et à veiller à ce qu'elle soit correctement respectée. Qu'il est parfois dur de comprendre ces non-sens. Enfants du slogan "interdit d'interdire", on aurait parfois envie de jeter un pavé... dans la mare !


Ce n'est pas une marche qu'il y a entre leur rapport à la règle et le nôtre, c'est un fossé, que dis-je c'est une faille tectonique !

Je vois bien que vous vous dites déjà que j'en fais des caisses pour quelques bouts de fromage français dérobés dans des magasins ou pour 6789 feux rouges grillés sous le nez de bons conducteurs japonais mais il ne s'agît pas de ça.

Dans la rubrique des choses ridicules, improbables mais véridiques, voici un petit aperçu :

■"Comment passer trois jours à courir après du carburant quand on voyage à vélo ?"

C'est simple, je vais vous l'expliquer !

Pédaler de station essence en station essence à la recherche de quelques gouttes de carburant à mettre dans notre réchaud : ici, c'est tout un programme !

Non pas qu'il y ait peu d'endroit où se ravitailler, bien au contraire. Les japonais ayant tous un ou plusieurs véhicules et ayant, en plus, la très fâcheuse tendance de laisser leur moteur tourner inutilement des heures et des heures, les passages à la pompe doivent donc être quasi journaliers ! Ici, on met son moteur en marche environ une heure avant de démarrer le trajet et on le laisse tourner lorsqu'on stationne : pendant qu'on fait ses courses pour que le chien profite de la clim, du chauffage ou de la musique, le temps de boire son café, de faire une sieste affalé sur le volant ou de lire un bouquin en attendant que madame revienne de son rendez-vous. Bref, il y a des fois où j'exagère mais là c'est vraiment n'importe quoi !

Et comme pour se donner bonne conscience, chacun a sa petite voiture hybride, équipée de son ingénieux système de stop&go qui coupe le contact au moindre arrêt. Ainsi le moteur s'arrête quelques secondes au feu rouge ou le temps de laisser traverser un piéton mais le système n'a pas été conçu pour empêcher le moteur de tourner quand on stationne ! Allez comprendre, moi j'abandonne !!


Bref, dans cette dépense inconsidérée d'énergie, on nous plaint 800 malheureux millilitres de gazole pour faire tourner notre réchaud et vous savez pour quelle raison ?

Tout simplement parce qu'il est strictement interdit de remplir autre chose qu'un réservoir de véhicule. Autrement dit, c'est 30 litres et une grosse voiture ou rien ! Quand je pense que dans nombre de pays, on nous faisait cadeau de cette infime quantité de carburant.

Mais ce coup-ci, c'est différent, c'est la panne sèche et nous sommes dans une véritable impasse législative !

Après moultes palabres et des négociations acharnées, il a fallu prouver que la gourde en métal servant de réservoir était bien conforme au règlement à la noix en recherchant des photos du même modèle sur le net.

Alors que la démonstration était sur le point d'aboutir et la partie semblait quasi gagnée, il restait un problème de taille : la bouteille trouvée sur internet avait bien la même couleur mais ne comportait pas exactement les mêmes autocollants que la nôtre.

L'employé de cette énième station- service nous expliqua donc qu'il était désolé mais qu'il ne voulait pas risquer de perdre son travail à cause de nous. Il a fallu alors passer à la démonstration suivante : lui montrer que même sans moteur on pouvait monter dans les tours !

Comme un japonais n'a jamais vu personne de sa vie se mettre en colère, nous voir devenir aussi rouge que la fameuse bouteille du réchaud, a fait son effet et il a fini par accepter de remplir notre réservoir afin que les deux malfrats que nous sommes débarrassent le plancher au plus vite. Évidemment on avait bien précisé 800 ml pas plus, mais dans le règlement, le tissu se vend au mètre et le carburant au litre. Notre cher pompiste a donc absolument tenu à faire rentrer un litre dans notre bouteille de 800 ml ! Débordement, dégoulinades le long du récipient, et odeur d'essence sur les doigts, c'est cadeau de la maison ! Enfin... passons à l'anecdote suivante.


■"Pas d'électricité pour les SDF !"


Ici, chaque supermarché, aussi microscopique soit-il dispose de toilettes et d'un petit espace avec tables, chaises, prises de courant, poubelles, micro-ondes et thermo d'eau bouillante à disposition des clients. Ainsi les papis-mamies se reposent les gambettes après avoir fait leurs commissions, les chauffeurs routiers font leurs pauses café et les voyageurs à vélo y trouvent un peu de réconfort.

C'est au sujet de cette dernière espèce que les choses se compliquent !

Alors non, nous n'avons pas installé notre bivouac ici, même si parfois on en meurt d'envie ! Nous y faisons simplement halte quelques minutes le temps de nous réchauffer un peu, de faire une pause pipi, d'acheter de quoi manger ou de se mettre un peu à l'abri. Il est fréquent que l'on remplisse nos verres de camping d'eau chaude pour boire un café soluble et il est arrivé que l'on nous fasse remarquer qu'il est interdit de remplir un récipient qui ne provient pas du magasin. Comprenez par- là, un verre en carton à usage unique. Le Japon et la notion d'écologie est une histoire qui n'a pas encore commencé...

Il est arrivé aussi que l'on branche notre téléphone pour qu'il regagne un peu de batterie et que le GPS puisse nous guider sur les quelques kilomètres suivants. Là encore, alors que la prise était inutilisée et qu'à deux pas, des sortes de grands frigos tournent à plein régime jour et nuit pour garder fraîches ou chaudes (!!) des boissons conditionnées dans des cannettes ou des bouteilles en plastique, on nous explique qu'utiliser l'électricité du magasin est formellement interdit.

Il faut alors inviter l'employé du magasin à sortir de sa boutique, lui montrer les vélos et faire les imbéciles en mimant qu'on ne trouve pas de prises électriques sur ces derniers. Parfois ça fonctionne mais la plupart du temps, c'est non, puisque la règle l'interdit !


Ferait-on désordre ?

Enfin, dernière anecdote :

■"20 minutes, pas plus!"

Une autre fois, alors que nous trouvons refuge dans un de ces petits supermarchés et que la pluie s'abat dehors, nous sommes un peu surpris lorsque la caissière nous demande de partir. Pas bien motivés à affronter le déluge, nous faisons mine de ne pas comprendre.

Qu'elle ne fut pas notre surprise lorsque quelques instants plus tard, la police débarqua et nous montra un petit écriteau en japonais  accroché au- dessus des tables et chaises à disposition des clients. La traduction donne à peu près ceci :

"Interdiction de rester plus de 20 minutes dans l'espace détente du supermarché"

Nous voici donc successivement en train de mimer la pluie qui tombe, un cycliste qui pédale en se prenant de l'eau sur la figure et une tente trempée. Et de tirer la conclusion nous-même : "Vous voyez bien, ce n'est pas possible, on va être tout mouillés, il vaut mieux rester à l'abri."

Mais les flics semblent catégoriques. Leur mission est de faire sortir de ce supermarché deux délinquants qui ont dépassés le délai autorisé et ce n'est pas négociable. Autant dire que nous sommes mal barrés ! Nous devons même donner nos passeports pour un relevé d'identité, un joker grillé...

Bien installés dans le supermarché en question...

C'est toujours dans ce genre de situation improbable que des choses incroyables se produisent, voilà qu'un homme surgit de derrière un des policiers avec deux boissons chaudes à nous offrir.


C'est ainsi que l'histoire du jour prend un nouveau virage et que nous nous retrouvons invités à passer la nuit au sec chez l'homme en question !

Bingo ! Les policiers ne cachent pas leur soulagement parce qu'ils commençaient à se demander ce qu'ils allaient bien pouvoir faire de ces deux clochards là. Quant à nous, on se retrouve chez Chiata avec au programme douche chaude, lessive, repas délicieux et bien arrosé accompagné des discussions à n'en plus finir jusque tard dans la nuit !

Chiata ne parle pas anglais ou presque mais déroule un flux continu de mots en japonais auxquels on ne comprend strictement rien mais comme notre hôte pourrait être champion olympique de "Time’s up" et qu'il est un génie du mime, avec ses gestes et les expressions de son visage, on comprend absolument tout !

À peine arrivés, Chiata nous sort tout une pile de magazines d'escalade puis de topos de montagne et d'escalade. Mais qui est l'auteur de tous ces livres ? Kentaro, notre hôte précédent, le propriétaire de la maison à la plage perchée en pleine montagne !

Chiata est un grimpeur mais il y a encore plus fou ! Il adore aussi la poterie et possède une véritable bibliothèque sur le sujet.

Bref, on ne remerciera jamais assez cette pluie diluvienne qui nous a poussé dans ce supermarché, cette caissière un peu trop à cheval sur le règlement, ces policiers embarrassés et surtout Chiata pour son accueil incroyable !

Comme quoi, règles stupides ou pas, l'humanité a encore de beaux jours devant elle !

29
mai
29
mai
Publié le 30 mai 2023

Je plonge dans l'eau presque bouillante. Une douce chaleur parcourt mon corps tout entier et ma peau encore toute irritée par le froid n'en revient pas. Le fond de l'air est frais et cela contraste grandement avec ce bain presque brûlant. La fatigue accumulée dans mes muscles semble se volatiliser à la manière d'un nuage de vapeur d'eau qui s'évapore dans l'atmosphère.

Je suis en train de barboter dans mon tout premier "onsen". Ce bain public japonais où l'on vient se détendre, se laver et passer du bon temps entre amis.

L'eau chaude y est parfois d'origine naturelle, c'est alors un vrai "onsen", parfois chauffée artificiellement comme c'est le cas dans les maisons japonaises, on parle alors "d'ofuro".

Celui-ci a un bassin extérieur avec vue sur la nature. Assise dans ce grand bain, de l'eau jusqu'aux épaules, adossée à en rocher arrondi, je ferme les yeux. Le bruit du glouglouti de l'eau est relaxant. En fond sonore, j'entends un doux brouhaha, des bribes de conversations, des discussions auxquelles je ne comprends pas un seul mot connu. Des phrases que je suis complètement incapable de segmenter en mots et des mots formés par des combinaisons de syllabes complètement inconnues. Ce flot de sons me berce. Je somnole presque. Le matin même, c'est la sonnerie du réveil qui nous a sortis du duvet, il faisait encore nuit. Il était 4h.

Lorsque je réouvre les yeux, je redécouvre ces visages féminins inconnus. J'observe leurs yeux bridés, leur peau claire et leurs cheveux noirs noués sur la tête. Certaines ont posé une petite serviette en éponge pliée en quatre au sommet de leur crâne.

Je vois tous ces corps complètement nus qui vont et viennent d'un bassin à un autre, sans gêne, tout ce qu'il y a de plus naturel. Des corps sculptés par la vie, modifiés par les années et modelés par des hasards heureux ou malheureux. Quel plaisir de voir ces bouts de peau, ces poils et de découvrir ce rapport au corps simplement normal après avoir traversé tant de pays où les femmes étaient toujours dissimulées sous des couches et des couches de tissu.

Quel plaisir d'avoir accès à ces bains publics, de découvrir ce véritable lieu social, d'être le témoin privilégié de cette coutume surprenante de se savonner à outrance, de s'astiquer le corps dans les moindres recoins mais aussi ce plaisir simple de prendre du temps pour soi et de prendre soin de soi.

À la surface de ce bain fumant, un grand nuage de vapeur d'eau flotte. Au dessus de celui-ci, mes yeux restent accrochés à un énorme cône blanc semblant émerger de nulle part, une forme presque parfaite se découpant sur un ciel bleu azur. Une montagne aux pentes régulières, aux flancs symétriques, à l'inclinaison parfaite. C'est l'image du volcan idéal que j'ai là sous les yeux, pentes d'éboulis de roche noire contrastant avec le blanc de la neige couvrant le sommet. En bas tous les arbres sont en fleurs mais là haut, au sommet du Mont Fuji, c'est encore l'hiver.

Du cratère, pas une trace de fumée qui s'envole, FujiSan dort.

Au sommet, pas un flocon de neige qui vole au vent, nul besoin de sublimer quoi que ce soit, le tableau est déjà parfait.

Quelle source d'inspiration ce Monsieur Fuji !

Sur combien d'estampes avons-nous déjà vu son cône enneigé ?

À présent, l'eau chaude a fait son effet, mon corps a retrouvé une température confortable. Je ne me sens même plus fatiguée. Comment imaginer, qu'il y a à peine quatre heures maintenant, nous nous dressions là haut, au sommet de ce gigantesque volcan, luttant contre les bourrasques d'un vent violent et dans un froid parfois mordant.

Sur ces pentes couvertes de neige dure, parfois en glace, plantant avec précaution mon piolet et prêtant attention à chaque pied posé, faisant mordre chaque dent de mes crampons.

Il ne s'agirait pas de trébucher ici. Non pas que la pente soit excessivement raide mais juste assez pour offrir un toboggan parfait, une glissade infernale sans obstacle sur plus de 1500 mètres de dénivelé.

En regardant vers le bas, les lignes de fuite sont impecables, parfaites, elles donnent même un peu le tournis.

Qu'en sera-t-il lorsque dans quelques heures, attaquant la descente, nous nous retrouverons face à cette pente, sortant notre plus belle technique de cramponnage dix pointes ? Saurons-nous encore marcher de la sorte ? Nous tordre les chevilles pour que les dents de nos crampons mordent la glace ? Plier juste assez nos genoux et être juste assez souple sur nos jambes ?

À coup sûr, la descente sera plus éprouvante que la montée...

Le sentier n'est pas visible, enfouis sous la neige, nous montons droit dans la pente. Seuls quelques buissons dans les premières centaines de mètres puis des bâtiments faisant office de refuges en été nous donnent quelques repères.

Des "toris", ces portiques de bois marquant habituellement l'entrée des temples ponctuent également le parcours. Ils sont parfois couverts de givre et ajoutent encore davantage de symbolique au parcours.

Nous sommes en train de grimper sur un sommet mythique. Le sommet que tous les Japonais adorent, vénèrent, grimpent une fois dans leur vie, celui qui émerge de nulle part, qui a poussé comme par magie au milieu de la plaine. Le Mont Fuji et ses 3776 mètres, point culminant du pays, sommet sans voisin, pic sans chaîne de montagnes. Le Mont Fuji, une montagne isolée qui regarde la mer, un sommet qui sert peut-être de repère aux marins, qui sait ?

La montagne, des magnifiques estampes d'Hokusaï et de sa célèbre série judicieusement nommée, "Voyage au pied du Mont Fuji". Comment un artiste ne voudrait pas en faire le tour pour trouver sa face préférée ou le peintre sous tous ses profils ?

 Voyage au pied du Mont Fuji,  Hokusaï 

Le Mont Fuji du peintre voyageur, Hiroshi Yoshida qui aura su teinter de rose cette neige immaculée et de violet cette terre noire inhospitalière. Quel talent ! J'ai déjà hâte de redescendre et de retrouver ma palette !

 Hiroshi Yoshida, le peintre voyageur...

Pas un chat ou presque sur cet itinéraire sur lequel, l'été, une foule de japonais doit sans aucun doute se bousculer. Il faut dire que la route goudronnée permettant d'accéder à un point déjà relativement élevé de la montagne est fermée 2800 m de dénivelé plus bas que le sommet. En période hivernale, le Mont Fuji se mérite.

Le notre ressemble à un biathlon des cimes !

Il y a quelques jours à peine, nous quittions la mer sur nos vélos. L'idée de passer de 0 mètre d'altitude à 3776 mètres à la force de nos jambes, était plutôt séduisante mais était-elle bien réaliste ? Il allait falloir trouver de grosses chaussures à notre taille, des crampons, piolets, bâtons, des gants chauds. Il faudrait aussi qu'une météo clémente se joigne à nous et que nos jambes de cyclistes se transforment en celles de randonneurs et détrompez-vous, c'est peut-être bien là, le crux de l'expé ! C'est assez fou comme le corps s'adapte formidablement bien à un effort et en oublie aussi vite tous les autres !

Après une bonne centaine de kilomètres, parfois en mode pédalo sous une pluie battante, c'est à Fujiyoshida que l'on se déleste de quelques affaires inutiles que l'on troque contre du matériel d'alpinisme. A-t-on gagné au change sur la balance ? Cest pas certain. Crampons et piolets ficelés sur le porte-bagage, les sacoches pleines de nourriture, nous voici partis !

La route grimpe régulièrement dans la forêt, les bas côtés sont bordés de panneaux disant à peu près ceci : "Faites gaffe à votre pique-nique, il y a des ours ici !"

Évidemment, il n'en fallait pas moins pour me faire pédaler vite et avec des yeux de chouette en alerte à 360°. A chaque virage, je crois au miracle de croiser un ursidé qui se réveille de sa longue sieste. En vain... On aura quand même la chance d'observer un Kamoshika, une sorte de chèvre des montagnes.

Assez vite, nous butons sur une barrière interdisant l'accès à la route pour l’hiver. Ni une, ni deux, on se faufile et on passe de cyclistes qui en bavent et de pauvres petits malheureux sans voiture, à petits chanceux qui roulent sur une route goudronnée plutôt que de marcher sur un sentier quand tous les autres se sont garés plus bas. Dans la vie, tout est question de point de vue !

Quelques heures plus tard, on rencontre une nouvelle barrière : scénario similaire même si celle-ci est plus acrobatique à contourner. Puis quelques flaques de neige font leur apparition et plus on prend de la hauteur et plus celles-ci se font plus nombreuses. Finalement, c'est un énorme dépôt d'avalanche qui stoppe net notre épopée cycliste et ça tombe plutot pas mal puisque l'endroit est idéal pour poser le bivouac.

1300 m de dénivelé à la force des mollets, ça use moins les souliers (et comme ce ne sont pas nos chaussures...) et c'est toujours ça de gagné !

1500 m nous séparent encore du sommet. Pour la suite, il suffit de jouer aux alpinistes. Dormir un peu, se lever tôt, plier sa tente, enfiler ses grosses chaussures, mettre sa grosse doudoune et marcher, marcher, marcher encore !

Une fois en haut, il ne reste plus qu'à redescendre mais non pas sans avoir pris le temps de contempler le paysage. Au loin, on voit la mer, au pied de la montagne, des lacs scintillent. Et là, à nos pieds, un immense amphithéâtre bordé de falaise : le cratère du volcan endormi. Le vent forcit, le froid durcit, ici l'hiver n'est pas finit. On peine à se tenir debout, tant chaque rafale nous bouscule.

Il ne reste plus qu'à redescendre prudemment ces grandes pentes verglacées puis à enfourcher nos vélos et à nous laisser filer en roue libre jusqu'à la plaine.

Et le voilà le vrai bonheur du cyclo-alpiniste !

Comment imaginer une fois au sommet, à demi congelés, que dans quelques heures à peine et grâce à ce formidable engin à deux roues, nous serons plus de 3000 m plus bas en train de barboter dans ce bain chaud délicieux. Quel contraste !

Les fesses dans l'eau avec vue sur le Fuji, un lieu idéal et un temps privilégié pour repenser à cette folle journée qui m'aura inspiré ces quelques lignes et ces quelques traits...

29
mai
29
mai
3
juin
3
juin
Publié le 4 juin 2023

Mizugaki, des fissures, une épaule en compote et de chouettes rencontres...

Mizugaki est un spot de grimpe qui se mérite. Non seulement il est perché au sommet d'une montagne et la route qui y mène monte sacrément raide. Mais il faut aussi ajouter que le dernier supermarché étant à une trentaine de kilomètres plus bas, le poids des sacoches augmente considérablement. Enfin, le rocher est très vertical et les cotations bien tassées.

Cet éloignement est peut-être le prix à payer pour profiter de la tranquillité et ici nous ne croiserons pas un chat !

Un camping fermé dans lequel on installe notre tente, une approche qui chauffe les jambes et des fissures de toutes tailles. Un granit parfait et des lignes de faiblesse qui semblent avoir été taillées au couteau.

La grimpe est belle, exigeante et parfois effrayante lorsque les fissures laissent place à des dalles lisses et sans protection.

On serait certainement resté quelques jours supplémentaires à Mizugaki si la pluie ne s'était pas invitée et si mon dos n'avait pas déposé un préavis de grève.

Certainement la faute à ce mini tapis de sol sur lequel je m'endors chaque soir, à mon duvet de plage et à ces nuits très fraîches où il faut dormir toute recroquevillée pour ne pas geler sur place !

Ainsi après deux journées à coincer doigts, mains, bras, pieds et orteils dans des fissures et avoir passé plus de 24h non- stop à regarder tomber la pluie en mangeant des pancakes, il fallut bien se rendre à l'évidence : le caillou dégoulinait et mon épaule était définitivement hors d'usage.

À regret nous poursuivons alors notre route. Il fallait encore passer un col et puis dégringoler sur l'autre versant de la montagne, perdant tous ces mètres de dénivelé si durement gagnés, trois jours plus tôt...

Allions-nous trouver quelqu'un qui me remette d'aplomb dans cette campagne perdue ? Allions-nous pouvoir profiter des falaises d'Ogawayama, spot majeur japonais que nous venions de rejoindre ?

Il y a des fois où le hasard fait bien les choses et où l'on se retrouve au bon endroit, au bon moment et où l'on rencontre les bonnes personnes ! Ce dimanche après-midi en fait partie.

Il est 17h, le week-end touche à sa fin. Des grimpeurs aux mains blanchies, aux doigts râpés, aux bras fatigués mais aux visages heureux débarquent un à un dans ce petit magasin de montagne.

"Magasin" est un bien grand mot pour désigner ces deux petits containers posés sur le parking d'un grand supermarché. Deux grandes boîtes en métal remplies de chaussons, de vêtements et de quincaillerie multicolore. Yuya, le patron a le smile jusqu'aux oreilles dès que l'on parle de fissures, il a même une addiction certaine pour les plus larges qui soient. Keisuke, le vendeur, fraîchement rentré de Patagonie, a les yeux qui pétillent rien qu'à y penser et ne pense qu'à y retourner. Pour Akane, la caissière, la grimpe c'est en fissure et c'est tout !

Cet endroit semble être le lieu idéal où se retrouver après sa journée de grimpe. Les discussions en japonais vont bon train et on s'amuse à imaginer le contenu des conversations. Peu importe la langue, les sujets des grimpeurs sont universels ! La taille du friend pour telle fissure, la prise de pied pour aller chercher telle prise de main, la méthode pour venir à bout de tel bloc...

Rapidement des regards curieux se posent sur nous et nos biclous. Quelques échanges en anglais, des présentations rapides et une discussion qui prend vite la direction de cette terre lointaine où l'on trouve de magnifiques montagnes battues par des vents tempétueux. On parle des ascensions passées, des attentes interminables de créneaux météo, des noms de sommets et de voies qui font rêver s'envolent dans les airs. On évoque des connaissances communes et on découvre, ici de l'autre côté de la planète, le tout nouvel ouvrage tout fraîchement rééditer. Le nouveau topo, véritable encyclopédie de l'activité alpinistique dans ce coin isolé du monde, situé à l'extrême sud du continent américain.

La Patagonie, il n'en fallait pas plus pour que le capital sympathie, solidarité et hospitalité fasse un grand bond vers le haut.

C'est ainsi que nous nous glissons dans la communauté grimpante d'Ogawayama.

Devrais-je ajouter que le magasin, dans lequel tout ce petit monde se retrouve, se nomme "Calafate" ? ... ça ne s'invente pas !

En quelques secondes, nous passons de deux grimpeurs sales, un peu paumés et cabossés à des invités de choix de la famille Yokoyama !

Dans cette famille, il y a tout d'abord le papa et la maman, deux grimpeurs dont la vie est consacrée à... la grimpe. Lorsqu'on questionne Jumbo au sujet de son métier, celui-ci nous répond, un peu gêné, qu'il est grimpeur professionnel. C'est sûr que lorsqu'on a un piolet d'or en décoration sur une étagère et qu'on a compris qu'il valait mieux ne pas perdre sa vie à la gagner, le plan semble parfait !

Chihiro, elle, a bien conscience que vivre avec peu mais avoir du temps libre et de loin la plus grande richesse.

Jumbo est une star de l'alpinisme. C'est un "giri-giri boy", un membre de cette bande d'alpinistes japonais qui ont réalisé de belles choses dans les montagnes aux quatre coins du monde. Mais Jumbo, c'est surtout un large sourire, des yeux brillants, une motivation à toute épreuve, une simplicité exemplaire et une gentillesse infinie.

Voici qui réconcilie un peu avec la jet set de l'alpinisme qui parfois, chez nous, m'exaspère un peu.

Dans cette belle école de la vie, il y a trois enfants, Kan, 8 ans, et Yoh, 11 ans, probablement de futurs bons grimpeurs et grands voyageurs mais pour le moment c'est au basket qu'ils sont champions. Et puis, il y a Hana, 4 ans, la petite fleur de la famille. Une robe trop grande, des bottes en caoutchouc, les cheveux en bataille et un paquet de bonbons à la main. C’est ainsi qu'on accompagne Hana chaque jour à l'école avant de partir grimper.

École qui ne semble en avoir que le nom puisqu'il s'agit d'un bâtiment en bois dans la forêt avec un grand préau et un grand foyer au centre pour faire du feu. Partout des riquiquis de 1 à 5 ans gambadent en bottes en caoutchouc sous l'œil peu attentif de quelques maîtresses déguisées en garde forestier ! Ici, c'est balade en forêt chaque jour, nous dit-on. Un concept plutôt intéressant qui pourrait bien me réconcilier avec l'éducation nationale. Mais ne rêvons pas trop, il s'agit là d'une école avec un fonctionnement alternatif, tout comme la famille dans laquelle nous sommes tombés d'ailleurs !

Ici on vit pour profiter. On passe du temps ensemble, on part en voyage, on grimpe et on va à l'école les jours de pluie ou quand il n'y a rien de mieux à faire. C'est fou comme certains ont tout compris !

Dans le rôle de la grand-mère qui assure à merveille le soutien logistique, il y a Kyoko. Elle habite une jolie maison à deux pas de celle de Jumbo et Chihiro et elle est aux petits soins avec toute la famille, les amis et les grimpeurs de passage. Discrétion et efficacité, Kyoko est si attentionnée qu'il faut vraiment le vivre pour le croire !

Durant deux semaines, nous avons fait une pause sur ce petit nuage de bienveillance, de générosité et de gentillesse.

Deux semaines composées de deux passages chez un osteo spécialisé dans les bobos de grimpeurs, de nuits au sec, au chaud et sur de bons matelas, de bons petits plats, de bains chauds, de lessives, de journées de grimpe, d'une voiture prêtée, cassée puis réparée, de dessins, de fêtes entre amis, d'une viso en direct en pleine nuit pour Patagonia France, d'une coupe du monde d'escalade, d'une projection de film du voyage, de séances de couture, d'élagage, de cuisine et même d'un match de basket !

Il serait compliqué de tout vous raconter mais, une chose est sûre : nous avons posé nos valises chez Kyoko et si l'appel de l'inconnu n'avait pas été plus fort, nous serions très certainement encore dans ce nid douillet à l'heure qu'il est !

La maison de Kyoko, c'est un bel endroit en bois avec au choix une échelle scabreuse ou un arbre à grimper pour accéder à une mezzanine. Une balançoire au milieu du salon, des dessins d'enfants sur les vitres, des casseroles toujours pleines et un trophée du piolet d'or Asia dans les toilettes ! Pas franchement la maison d'une grand-mère telle qu’on l'imagine !

C'est le lieu où des grimpeurs et leur famille se retrouvent pour partager de bons moments et de délicieux repas sous les yeux bienveillants de cette drôle de dame.

Combien d'amis d'amis avons-nous alors rencontrés ces jours-ci et ô combien ces rencontres influeront sur la suite du voyage et sur le souvenir que nous garderons du Japon !

Si les termes de vacances, temps libre et loisirs ne semblent pas apparaître dans le lexique de nombres de japonais, ceux-là ont semble-t-il bien saisi le sens de ces notions et ça fait plaisir à voir !

Eiji nous invitera à présenter une vidéo de notre voyage dans sa salle de bloc spécialisée dans la grimpe en fissure (eh oui !!) à Tokyo. Nous choisissons le week-end où a lieu la première étape de coupe du monde de bloc afin de rentabiliser le déplacement et de profiter du spectacle à Hachioji.

Yoshimi qui est artiste, nous recevra chez elle, quelques jours plus tard, afin que je profite d'une petite expo privée pour découvrir ces œuvres et nous indiquera de chouettes endroits où faire halte en chemin.

Grâce à Asako, je rencontrerai des potiers avec qui partager un après-midi dans un atelier quelques semaines plus tard à Kyoto.

Yuya sera notre fournisseur de friends grandes tailles pour les fissures larges, Keisuke cherchera des topos et infos pour nos prochains spots de grimpe.

Mami et Haruta embelliront mon vélo de deux jolis koinoboris. Jumbo nous offrira un nouveau matelas gonflable pour des nuits plus confortables et une doudoune pour les nuits les plus fraîches. Chihiro jouera le rôle de taxi, d'assistante et de traductrice médicale. Grâce à elle, un ostéo me recevra gratuitement et un dentiste recollera la dent de Bruno qui a choisi de se faire la malle !

Nous repartons avec des dessins d'enfants dans nos sacoches et les cœurs remplis de nouvelles amitiés.

Il y a des rencontres que l'on n'oubliera jamais et qui rendent les voyages plus beaux !

Merci Kyoko, Chihiro, Jumbo, Yoh, Kan et Hana !

Merci d'être comme vous êtes, de nous avoir laissé entrevoir la vie telle que vous la vivez. Merci pour cette inspiration. Si un jour, j'ai moi aussi une famille, j'aimerais tellement qu'elle ressemble à la vôtre !

On vient à peine de se quitter que déjà j'imagine dans quel coin du monde on pourrait, un jour, se revoir !

10
juin
10
juin
Publié le 10 juin 2023

Une montagne de granit posée sur des champs de laitues,voilà qui pourrait présenter Ogawayama de manière plus originale que ce que le font les topos d'escalade.

Car Ogawayama ce n'est pas simplement LE spot de grimpe japonais le plus populaire c'est aussi LE lieu de naissance de presque toutes les salades du pays. Ici, c'est monoculture intensive, sillons couverts de bâches à perte de vue, serres en plastiques immenses et odeurs d'engrais à plein nez. Il paraîtrait que faire pousser ces laitues pour les vendre ensuite dans les supermarchés de Tokyo rapporte un fric fou et il paraîtrait aussi que ce serait des ouvriers agricoles thaïlandais qui seraient les mains vertes de ces grands entrepreneurs japonais.

Une fois de plus, c'est du sud qu'arrivent les travailleurs immigrés. C'est plus au sud, que l'on puise sa main d'œuvre bon marché, c'est assez fou comme c'est récurrent à tous ces pays traversés. Chaque pays a semble-t-il toujours un endroit privilégié duquel il fait venir ces ouvriers. Autrement dit, on trouve toujours, plus pauvre que soi pour les travaux difficiles et quand le niveau de salaire et inversement proportionnel à la pénibilité de la tâche, on peut difficilement faire croire que l'on fait du social ! Bref, nous sommes toujours la main d'œuvre bon marché de quelqu'un d'autre et c'est assez intéressant de le constater de ses "propres" yeux.

En France, après les espagnols, les portugais, les marocains ou les algériens, maintenant ce sont les turcs qui font souvent les travaux des champs ou qui occupent les emplois du bâtiment dont presque plus personne ne veut . En Turquie, ce sont les réfugiés syriens que les turcs font bosser sous le cagnard dans les champs. Et en Inde, ces esclaves des temps modernes qui bossaient à plus de 4000 mètres d'altitude pour fabriquer du goudron pour que les camions militaires roulent plus vite, d'où venaient-ils d'après vous ? De castes défavorisées et du sud du pays évidemment... Vu le climat et l'altitude, difficile de nous faire croire que cette population d'ouvriers puisse être la mieux adaptée !

Ainsi on pourrait imaginer un circuit touristique et solidaire en allant chaque fois visiter le pays d'origine et découvrir les conditions de vie de la main d'œuvre bon marché du pays précédemment visité. Vous suivez ? À coup sûr, cette route nous conduirait de plus en plus au sud...

A l'heure où nous sommes sur le point de basculer de l'autre côté de la planète, je m'interroge...Qu'en sera-t-il dans l'hémisphère sud ? Les ouvriers occupant ces postes sous-payés seront-ils originaires du nord ce coup-ci ?

En même temps, j'imagine assez mal les Australiens ou les Néozélandais faire appel à des manchots empereurs d'Antarctique pour venir ramasser leurs fruits. Premièrement, quand on est manchot, la cueillette, ce n'est pas simple et deuxièmement, je ne sais pas si cela ferait bon ménage avec les kangourous...

Mais j'arrête de vous raconter des salades...

Ici, j'avais prévu de vous parler de ce spot de grimpe génial qu'est Ogawayama.

Ogawayama, c'est une jolie vallée avec une rivière qui coule en son milieu. C'est de la forêt partout et des blocs de granit de toutes tailles qui la parsèment.

Il y en a de si immenses qu'ils sont semblables à des falaises, d'autres plus riquiquis sont comme de gros œufs posés en équilibre dans la pente. D'autres encore, on ne sait par quel hasard ce sont retrouvés empilés les uns sur les autres comme de véritables cairns géants.

Des chemins de randonnée sillonnent tout le massif et le fond de la vallée fait office de grand terrain de camping. Quelques toilettes et même des douches chaudes, des distributeurs automatiques de glaces et de bières, des emplacements pour faire du feu et s'abriter de la pluie. Ici, le week-end, il y a foule ! Tous ces bouts de cailloux font évidemment le bonheur des grimpeurs et ce qui est chouette ici, c'est que la diversité de bipèdes grimpants est grande.

Il y a les bloqueurs qui errent dans la forêt, avec leurs grands crashpads sur le dos et leurs brosses à dents télescopiques à la main, à la recherche d'un problème sur lequel se casser les dents et laisser la peau des doigts. Ils peuvent alors rester des heures à se triturer le cerveau et à se défourailler les bras pour trouver l'enchaînement idéal leurs permettant de se hisser deux, trois, parfois quatre mètres plus haut sans se scratcher au sol en cours de route. De retour en vallée, on les reconnaît relativement facilement, ils ont les bouts des doigts tout roses, des épaules de nageurs et parfois des béquilles et des chevilles en compote !

Puis, il y a les grimpeurs de voies. Dans cette espèce, il y a deux sous-catégories : Ceux qui sont tout maigrichons et qui ont de petits sacs à dos sur lequel on peut voir une canne à pêche télescopique pour clipper les points récalcitrants. Et puis, il y a ceux qui ont des sacs énormes remplis de ferrailles, les bras tout râpés et les mains couvertes de strap.

Les premiers font de l'escalade dite "sportive" sur des voies équipées de broches ou de goujons, ils grimpent sur des murs raides et lisses, sur des dalles inclinées et encore plus lisses ou dans des dévers renversants. Le jeu consistant, là encore, à trouver l'enchaînement parfait pour partir du bas et rejoindre le relais au sommet de la voie, sans tomber ni se reposer assis dans le baudrier. Pour cela, si c'est trop dur pour leur niveau, ils peuvent passer des heures pendus à la corde à étudier chaque mouvement, chaque prise de pied et à tester chaque séquence puis ils en parlent entre eux durant un bon moment !

Enfin les derniers, ont une véritable quincaillerie multicolore accrochée au baudrier et ont les mains bandées de sparadrap ou gantées de mitaines. Ils suivent les lignes de faiblesse du rocher et grimpent parfois à la vitesse d'un escargot ! On dit qu'ils font de l'escalade "trad", ce qui veut dire qu'ils se protègent d'une éventuelle chute en plaçant eux-mêmes le matériel de sécurité même si parfois ce même mot est assez éloigné de la réalité !

La plupart du temps, il s'agit de remonter des fissures de tailles variées en s'y coinçant si possible et là, tous les coups sont permis ! Orteils, pieds, chevilles, mollets, genoux et cuisses ; doigts, mains, poignets, bras, coudes, épaules mais aussi parfois et exceptionnellement fesses et têtes !

C'est beaucoup moins glorieux que les deux styles de grimpe précédemment évoqués mais tout aussi amusant !

Évidemment nous appartenons à cette ultime catégorie et nous aurons passé une dizaine de jours à crapahuter sur les rochers d'Ogawayama.

Nous avons partagé quelques journées avec des grimpeurs locaux qui nous auront guidés de belles voies en jolies fissures mais souvent nous nous débrouillions seuls. Par chance, un tout nouveau topo composé de trois tomes avec les descriptions d'approches hyper détaillées et des textes traduits en anglais vient tout juste d'être publié. Grâce à ce dernier nous pouvons trouver relativement facilement le caillou convoité au beau milieu de cette grande forêt. Sans celui-ci cette session grimpe se serait très certainement transformée en session trekking & bartas !

Au fil des jours, on se sera régalé des fissures les plus classiques du coin. Splitters, dièdres, écailles, toits, cheminées, il y en a pour tous les goûts !

Nous aurons aussi grimpé quelques itinéraires plus dalleux à l'équipement mixte c'est à dire qu'il y a des points de protection en place quand et seulement quand il n'y a pas possibilité de se protéger par soi- même. Dans ce genre de voies, on ne peut pas franchement dire qu'on se repose l'esprit tant la distance entre les spits est grande !

Il faut à chaque fois que l'on quitte un point, pour s'élancer vers le suivant, emporter avec soi une bonne dose de courage !

Nous grimperons aussi quelques couennes spitées afin de laisser un peu de repos à nos cerveaux mais aussi à nos os ! On oublie vite que la grimpe en fissure est si douloureuse et que tous ces coincements font parfois si mal.

Confiture de doigts, marmelade de mains et compote de pieds, voici le menu !

Mais quand même, quelle joie toutes ces fissures et quelle chance que des spits n'aient pas fleuris inutilement autour de ces lignes parfaites !

Il est dur de se décider à reprendre les vélos et à se remettre en route tant on a l'impression qu'il nous reste encore une tonne de chose à grimper.

C'est finalement le mauvais temps qui sonne l'heure du départ. La pluie finit par nous chasser et le vent nous pousse plus à l'ouest vers les Alpes du Nord et de nouvelles aventures !

7
juin
7
juin

Quelques tours de pédales et nous voici au pied des Alpes du Nord !

Alors que nous faisons une halte à Omachi dans la préfecture de Nagano, la star locale, Kentaro San, nous accueille dans son magasin d'équipement de montagne pour deux séances de cinéma. Pour lui, l'idée est de présenter son tout dernier topo et pour nous, il s'agit de projeter un petit film et de raconter un peu notre périple à deux et à deux roues. Pour l'occasion, nous sommes même passés dans le journal local parait-il !

Ce coup-ci, nous avons droit à un public international puisque nous comptons parmi nos spectateurs des japonais, un chinois, une australienne et un canadien ! Un chouette moment d'échanges et de partage.

Le tout suivi d'un dîner chez Mr Kentaro. Après la découverte de sa maison à la plage perchée au sommet d'une colline et remplie d'objets montagnards, nous découvrons un peu hallucinés sa maison au pied des montagnes : Parasol, seaux en plastique, mouette empaillée, bouée flamant rose et serviette de plage avec des cocotiers... Non, je rigole !

La maison de Kentaro est immense mais on peut à peine circuler à l'intérieur tant elle est encombrée de bazar. Dans l'entrée, il faut contourner des skis. Dans le couloir, il faut zigzaguer entre les caisses de matos et les piles de topos. Dans la salle à manger, un mini poêle ronronne et il y a tout un tas d'affaires qui sèchent et s'imprègnent de l'odeur du feu de bois. Pour aller s'asseoir sur le tapis où le repas est servi, il faut enjamber trois sacs de couchage en plumes, -25°C confort, qui reprennent leur gonflant. Enfin dans la salle de bain, il n'y a pas d'eau, dans les toilettes, la chasse est capricieuse et dans la cuisine, il n'y pas d'eau chaude ! Bref, la maison de Kentaro est un véritable refuge au pied des montagnes !

C'est aussi dans celle-ci que nous ferons l'expérience de nos deux premiers tremblements de terre. Tout qui craque, les lustres qui bougent, le plancher qui vibre, des sirènes dans la ville, des annonces au haut -parleur dans les rues et nos cerveaux qui peinent à comprendre de quoi il s'agit exactement !

La maison de Kentaro est semblable à une cabane de montagne mais une cabane antisismique s'il vous plaît !

Suite à la projection, il est fort probable que notre guide japonais ait trouvé que nos images manquaient de neige, de sommets et d'aventures.

Quelle surprise allait-il nous concocter ?

En quelques minutes, nous nous retrouvons déguisés en alpinistes : grosses chaussures aux pieds, crampons, corde et deux piolets tractions dans le sac à dos. Il nous explique que le refuge est déjà réservé et nous donne des tickets pour les remontées mécaniques.

On nous présente une dame nommée Sasaki, qui jouera à la fois le rôle de cliente et de guide.

Nous n'avons tous les trois aucune idée de là où nous allons, de ce que nous allons faire, ni de ce que nous allons vivre là- haut mais qui ira verra !

Comment dit-on "inchallah" en japonais ?!

Il est minuit passé lorsque la soirée post-projection se termine et que l'on nous explique que le réveil du lendemain matin est fixé à 4h30 et ce n'est pas une blague ! Mlle Sasaki suit et applique les consignes de Kentaro à la lettre.

Elle nous conduit tout d’abord au fin fond d'une vallée où un grand parking payant est déjà bien rempli à cette heure très matinale.

Nous nous retrouvons ensuite à faire la queue dans une file interminable de randonneurs insomniaques et équipés comme des cosmonautes. Les guichets finissent par ouvrir mais nous, comme nous sommes des alpinistes très organisés, nous avons déjà nos tickets !! C'est bien la première fois de notre vie que nous avons une réservation pour la première benne !

La suite est une succession de transports en commun ayant l'avantage de présenter à peu près tous les moyens motorisés existants pour grimper sur les sommets sans s'essouffler ni transpirer !

Le parcours du combattant pour un alpiniste pyrénéen, la hantise d'un guide nouvelle vague version "immersion alpine" !

Bus, téléphérique, bus électrique, funiculaire, bus...

Et je ne vous parle pas de toutes ces tonnes de béton car tout ce parcours est totalement underground. Un vrai réseau souterrain parsemé de rails, de câbles, de goudrons et de gares où les voyageurs des cîmes attendent la correspondance suivante comme sur le quai du métro lorsqu'ils partent chaque matin bosser.

La seule portion à l'air libre dans ce voyage vers les sommets, consiste à avancer en utilisant ses propres pieds (!!) quelques centaines de mètres, pour rejoindre la remontée mécanique suivante, en marchant sur un énorme barrage !!

C'est bien la peine de s'embêter toute une année à faire du vélo pour se retrouver à prendre tous ces trucs à moteur en quelques heures !

Pour nous, c'est Disneyland et comme on va de surprise en surprise, on se demande bien ce que l'on va rencontrer à l'arrivée, au terme de cette épopée mécanique.

Voilà à peu près dans quelques circonstances, nous nous retrouvons les pieds dans la neige sur le plateau de Tateyama au beau milieu des Alpes du Nord japonaises, le temps d'un week-end. Une balade en mode mixte-climbing, un joli sommet et surtout une chouette opportunité pour découvrir cet attrait incroyable qu'ont les japonais pour la montagne !

Au Japon, la coutume veut que le dimanche, on aille se balader en campagne ou en montagne. Ce jour-là, tous les transports en commun sont donc pris d'assaut par des randonneurs, et des alpinistes. Gobelets en fer, grelots, bob et piolet accrochés au sac à dos.

Forcément, là -haut, il y a foule ! Des badeaux, des marcheurs, des grimpeurs et même des skieurs. Des très jeunes enfants dans des porte-bébés, aux petits garçons et petites filles, piolet à la main, en passant par les grands parents. C'est randonnée avec ou sans crampons pour toute la famille. Et le soir venu, c'est refuge ou camping dans la neige pour tout le monde !

Dans toutes les pentes de neige, sur toutes les arêtes, sur chaque sommet, de petits points noirs sont en mouvement. Ça grouille de partout !

Et au beau milieu de cette foule, au cœur de ces montagnes ou dans un refuge à l'autre bout du monde, il y a toujours quelqu'une ou quelqu'un sorti de je ne sais où qui s'approche de vous et dit : "Hello Bruno ! Comment ça va ? Ils sont où les vélos..."

Le Bruno en question, tout comme ces japonais m'étonneront décidément toujours !

Nous sommes donc trois petits points noirs supplémentaires à débarquer au milieu d'un vaste plateau enneigé entouré de sommets et traversé par une route bordée de hauts murs de neige.

Et maintenant, on fait quoi ? C'est à cet instant que Miss Sasaki sort de sa poche, un petit bout de carte avec un tracé en rouge. Elle seule connaît le nom du sommet que nous devons gravir aujourd'hui et elle seule sait reconnaître le nom sur la carte.

Comme elle tient sa carte à l'envers et ne semble pas vraiment savoir l'orienter, nous échangeons momentanément les rôles de guides et de clients.

Une jolie arête descend du sommet en question. Ce sera parfait pour nous occuper quelques heures et nous permettre d'aller admirer le paysage et peut-être même apercevoir la mer du Japon au loin !

Après avoir chaussé les crampons, vint le moment de sortir la corde et d'accrocher 2 ou 3 friends à notre baudrier. Nous formons une cordée 100% féminine pendant que Bruno se balade devant en mode éclaireur et photo-reporter.

Le terrain est une alternance de pentes de neige, de rochers et de flaques d'herbe où nous alternons progressions simultanées et mini longueurs.

En chemin, l'observation d'un couple de lagopèdes est l'occasion d'apprendre un nouveau mot japonais : "Raicho" (prononcé "Laicho").

Ça tombe bien puisque notre maison du jour s'appelle également comme ça. Une fois le sommet atteint, le prochain jeu de piste consiste à trouver le refuge dans lequel nos places ont été réservées, au milieu de cette multitude de bâtiments, de refuges, de cabanes et de tentes.

Un indice nous est donné : il y a des bains d'eau chaude naturelle là où il est prévu que l'on dorme ce soir. C'est ainsi que notre nez et une forte odeur de soufre nous mènent à destination. Autour du refuge, la neige est toute jaune et des fumerolles s'échappent du vallon en contrebas.

La suite est encore une surprise et c'est peut-être même celle que j'ai préférée !

Le refuge !

Un vrai toit sur la tête, du chauffage, des dortoirs (non mixte que tu ne peux pas gruger !), des couchettes super grandes (où tu pourrais pourtant dormir à deux !), avec des petits rideaux à ton lit, des prises électriques (pour chacun), des couettes et des oreillers (trop chouettes !), une étagère pour ton sac, tes crampons et ton piolet (oui, oui, dans le dortoir !), des bains thermaux avec vue sur les montagnes (trop classes !), des douches, un repas de « malade » et un petit déjeuner de fou avec tout à volonté !

Seule la vue à la fenêtre du réfectoire était un peu encombrée par le léger reliquat de neige de l'hiver mais on leur pardonnera !

Bon... j'imagine que la demi-pension dans ce palace devait coûter un bras et qu'on aurait sûrement beaucoup moins kiffé si on avait dû payer mais là on a juste adoré !

Le lendemain, il restait une tâche à accomplir pour clôturer en beauté ce week-end à la montagne et avant de rejoindre la vallée : trouver une utilité à ces paires de piolets traction que l'on nous avait ordonné d'emporter.

Les énormes congères formant de hauts murs de neige sur le bord de la route nous sont alors apparues comme étant le terrain de jeu idéal.

Faire les acrobates au- dessus de la tête des touristes, je ne sais pas si c'était vraiment ce que Kentaro San avait imaginé en nous donnant ces piolets mais pour nous qui n'en avions pas touché un de l'hiver cela aura déjà suffi à nous amuser !

Quant à Mme Sasaki, elle ne sut plus vraiment s'il fallait, à ce moment -là, nous surveiller et nous dissuader de faire les zouaves ou bien s'il fallait nous suivre dans nos délires !

Pas toujours simple la double casquette guide/client, client/guide, on en sait quelque chose !

Merci Kentaro pour nous avoir permis d'en vivre l'expérience !

13
juin
13
juin
Publié le 13 juin 2023

Ça passe trop viiiiiite !

Un treizième mois sur la route c'est :

◇ 17 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷

◇ 9920 km 🚲

◇ Un retour sur le continent asiatique 🌏

◇ Des rencontres et des retrouvailles 🧔🏽‍♂️🧑🏻‍🦱🧑🏽‍🦱👶👨🏻🧔👧🏽🧑‍🦳🧑👩🏻🧒🏽👴🏻👩🏻‍🦱

◇ Un accueil de malade 🏠

◇ Des soirées partagées 🍻

◇ Des repas délicieux 🍣

◇ 7 jours de grimpe 💪

◇ 13 jours de vélos 🚲

◇ 7 jours de voilier ⛵️

◇ De la grimpe trad et des fissures 👍

◇ 1 grande voie 🤗

◇ 3 spots de grimpe différents 🧗‍♀️

◇ 4 musées 🏬

◇ des grands ponts et des îles 🏝

◇ 22 nuits dehors ⭐️

◇ Des bivouacs improbables 🏕

◇ Des réveils ultra matinaux et des nuits blanches 🌛

◇ Un nouveau roulement de pédalier et une béquille neuve ⚙️

◇ 6 jours de pluie ☔️

◇ Des temples 🕍

◇ Une après midi de poterie ⚱️

◇ Un passage chez le cordonnier 👡

◇ Une projection de film 📽

◇ Des poissons et des coquillages de toutes sortes 🐟🐚

◇ Des petits dessins ✏️

13
juin
13
juin
Publié le 19 juin 2023

Vous connaissez l'histoire de la vache qui rit et du dessin dans la boucle d'oreille qui se perpétue à l'infini ?

Ben là, c'est un peu pareil !

Le Japon, une grande île qui forme un pays. Shikoku est l'île de cette île qui forme une région. Shimanami est un archipel d'îles menant à l'île de l'île. Vous suivez ?

Cinq ou six ponts de plusieurs kilomètres qui relient tout ça et nous voici partis pour une infernale série de "saute île" dans un véritable paradis pour cyclistes !

Shimanami Kaido, ce sont 75 kilomètres d'itinéraires aménagés pour les cyclos afin de se balader d'îlot en îlot.

 Les très fameuses grues du Japon

Le jeu consiste à pédaler le long de côtes, à grimper sur des ponts immenses et à en redescendre via des systèmes de rampes en spirale à l'inclinaison parfaite, digne des meilleurs parkings sous-terrain dans lesquels l'on ne met jamais nos roues.

Durant deux jours nos yeux sont rivés sur les vagues, nos bivouacs sont marins et notre maison a presque les pieds dans l'eau. Nous pédalons cheveux au vent et quelque- fois vent dans le nez. L'odeur des orangers en fleurs embaume nos narines.

Parfois quelques gouttes de pluie rincent notre visage salé et le soleil rougit nos épaules. Sur ce chemin parfait, sur cet asphalte lisse, une seule main suffit à tenir le guidon, l'autre étant sans cesse en l'air pour saluer tous les cyclistes rencontrés.

Moi j'ai super kiffé sa casquette !!

Ici, nous croiserons un paquet de touristes improvisés cyclistes, des sportifs à deux roues mais aussi nos tout premiers et quasi seuls cyclo-voyageurs depuis presque deux mois.

Un couple de français qui ont trouvé une belle occupation pour embellir leur retraite !

Notre itinéraire n'avait pas vraiment de raison de nous conduire ici mais la curiosité nous y a poussés. Aussi, nous avons dû rebrousser chemin une fois arrivés à destination. La plupart des cyclistes louent des vélos, font le trajet en mode aller simple et effectuent le retour en bateau ou en bus. Mais quand on aime, on ne compte pas (sauf les sous !).

Le bateau étant trop cher, nous avons eu l'obligation de parcourir cet itinéraire dans un sens puis dans l'autre. Double chance d’emprunter cette jolie route tantôt sur terre, tantôt suspendue au-dessus de l'eau !

Une parenthèse relaxante de 150 km avant de repartir à la rencontre des collines et des falaises !

19
juin
19
juin
Publié le 23 juin 2023

"HIROSHIMA, PLUS JAMAIS ÇA !"

Aussi loin que je me souvienne, je crois avoir toujours vu à l'arrière des voitures de mes parents cet autocollant jaune, ce soleil orangé souriant et ce slogan : "Nucléaire, non merci !"

Enfant, Hiroshima était pour moi, synonyme de ces enveloppes imprimées par le "réseau sortir du nucléaire" dans lequel on glissait le courrier familial. En 1995, à peine arrivé au pouvoir, Chirac faisait le choix de reprendre les essais nucléaires. Quel beau cadeau au monde pour fêter le cinquantième et triste anniversaire des bombardements américains sur le Japon. Plus tard, j'en apprenais davantage au sujet des causes, des conséquences et du niveau d'atrocité dans ce que les livres d'histoire voulaient bien nous montrer.

Aujourd'hui, me voilà à Hiroshima.

Aujourd'hui, me voici au mémorial de la paix situé à l'emplacement exact de l'hypocentre de l'explosion de la bombe atomique. Maintenant, je sais que ce qui s'est passé le 6 août 1945 à 8h15 et les minutes, les heures, les jours, les mois et les années suivantes dépasse tout ce que l'on pourrait imaginer.

Une violence inouie suivie d'une très longue agonie.

Maintenant, je sais aussi qu'Hiroshima et la bombe A, ce fut : 12km² de ville anéantis, des incendies monstrueux, une onde de choc et des vents entre 300 et 800 km/h, des températures au sol frôlant les 4000 °C, des pluies noires chargées de particules radioactives. Des dizaines de milliers d'enfants, de femmes et d'hommes morts sur le coup, des gens complètement carbonisés et des personnes hautement irradiées qui ont agonisé durant des mois ou de nombreuses années. On estime qu'environ 140 000 habitants d'Hiroshima auraient perdu la vie entre le moment de l'explosion, le 6 août 1945 et la fin du mois de décembre 1945. À cela s'ajoute tous les cancers et maladies causés par les radiations et des années de souffrances.

Je sais aussi qu'il y a eu des tentatives de signatures de pactes pour officialiser

la non-utilisation de la bombe nucléaire.

Je sais aussi que bon nombre de pays n'en ont pas été signataires et que les essais nucléaires se poursuivent, tuant des gens de maladie, obligeant d'autres à quitter leur lieu de vie et sont responsables de désastres écologiques et environnementaux.

Maintenant, je sais.

Maintenant, vous savez.

Aujourd'hui, nous le savons tous !

"HIROSHIMA, PLUS JAMAIS ÇA !"

24
juin

Aurait-on imaginé que l'on grimperait autant au Japon ?

On ne peut pas dire que les falaises nippones fassent souvent la une des magazines internationaux de grimpe et pourtant le pays compte bon nombre de jolis secteurs, une quantité infinie de très très forts grimpeurs et même certains des alpinistes les plus fameux. Ici, il y a une réelle culture montagne et l'escalade à une place de choix dans le cœur de nombreux japonais.

En deux mois et demi passés au pays du soleil levant nous aurons eu l'occasion de grimper sur 7 spots différents et de rencontrer des grimpeurs ultra sympas.

Chaque secteur fréquenté aura été une belle découverte. Chacun nous aura marqué par son caractère, qu'il s'agisse du style de grimpe, de l'équipement parcimonieux ou de son rocher caractéristique.

Du basalte noir, du granit doré, des fissures taillées au couteau, des dalles lisses comme des tableaux d'école, quelques spits par ci par là et parfois toute une ribambelle de cams accrochés à la ceinture. Il y en aura eu pour tous les goûts !

Nous aurons même fait une pause sur deux petits spots calcaires du style "vieille école" comme pour nous rappeler que l'on est définitivement mieux là qu'à s'acharner pour essayer de grimper sur les rebords de fossés Haut Savoyards !

On ne pourra pas dire que ce sont ces journées- là de grimpe qui nous auront les plus séduits mais c'est durant l'une d'elle que l'on aura eu la chance de rencontrer Kenji.

Une fois encore le hasard fait bien les choses et il se trouve que ce sympathique grimpeur habite dans la région d'Hiroshima, une de nos futures étapes. Quelques secondes avant qu'il ne quitte la falaise, nous convenons donc de lui laisser tout notre matériel de grimpe afin de nous alléger pour les quelques centaines de kilomètres que nous avons à parcourir les prochains jours. 17 kg en moins sur nos porte-bagages et l'on se sent pousser des ailes durant quelques jours !

Lorsque nous retrouvons Kenji chez lui, nous découvrons avec surprise que plusieurs de ses amis et quelques voisins ont été invités pour un barbeuc improvisé afin de partager un chouette moment et de rencontrer deux illuminés qui se baladent depuis un an à vélo.

Une fois encore nous sommes ébahis devant tant de gentillesse et de bienveillance. Nous plongeons tout d'abord dans un bain chaud puis nous mangeons comme quatre, nous recevons même des cadeaux et la soirée se conclut en visionnant, tous ensemble, sur une grande télé, une vidéo made in "Escal'À 2roues". On s'écroule ensuite sur les confortables matelas du pan d'escalade de Kenji !

Après une journée de grimpe partagée , nous reprenons la route en direction de notre dernière escale minérale : Mikuradake

Mi : trois

Kura : montagne

Date : monsieur

Voilà à quoi ressemble Mikura : Trois sommets rocheux entourés d'une dense forêt. Des petits secteurs dispersés un peu partout, des sentiers par ci par là, des indications illisibles sur des panneaux et un topo exclusivement en japonais !

Sans l'aide précieuse de Kenji, notre séjour à Mikura aurait certainement ressemblé à celui de deux randonneurs perdus dans la forêt !

Mais une fois encore, l'organisation des vacances au Japon est au top du top !

Nous posons notre tente dans l'aire de camping gratuite, au pied de la montagne et chaque jour, à 9h, un ou plusieurs grimpeurs contacté par Kenji débarquent et nous guident de rocher en rocher.

Ainsi durant 5 journées, accompagnés de Matchan et parfois de Jin nous grimperont les plus belles fissures et les plus jolies dalles.

 Notez la tenue atypique de Jin... 

Pour être plus exacte, je devrais plutôt dire : nous grimperons les plus larges fissures et les dalles les plus lisses !

Allez savoir pourquoi, ici la nature en a décidé ainsi...

Au menu, c'est :

Moments de doute au-dessus du dernier point d'assurance au milieu d'une dalle sans aucune trace de prise et où au moindre faux pas, tous ces cristaux de granit attendent de vous labourer le menton !

OU

Bataille acharnée où tous les coups sont permis et tous les noms d'oiseaux aussi dans des fissures version XXXL ! Bleus et égratignures en guise de cadeaux souvenirs.

C'est fou comme un paradis de la grimpe peut ainsi se transformer en enfer !!

Ajoutez à cela certaines journées où, sans explication rationnelle, des milliards de millions de minuscules mouches s'invitent à la fête, c'est le pompon !

Donc en résumé : tu forces, tu grognes, tu râpes, tu coinces, tu glisses, tu bourrines, tu souffres, tu couines, tu transpires et tu rampes, tout ça pour gagner un demi centimètre de hauteur ! L'important étant de garder la bouche fermée pour ne pas en plus ajouter un énième désagrément :: celui d'avaler une mouche de travers !

Le rocher est sublime, l'équipement minimaliste et le paysage est magnifique ! Les falaises ne sont parfois pas bien hautes mais tous ceux qui ont déjà bataillé dans des fissures extra-larges comprendront que quelques mètres suffisent déjà à se mettre la mission !

Le week-end venu, c'est toute une foule de grimpeurs et de randonneurs qui débarque. Les tentes poussent alors dans le camping comme des champignons. Le soir venu de grands feus crépitent un peu partout dans la forêt et on entend les capsules de bouteilles de bières sauter autant que les rires fuser !

Nous nous sommes donc adaptés à cette culture locale et avons partagé une chouette soirée, un bon repas, quelques verres ainsi que deux journées de grimpe avec une sympathique petite bande.

Ces jours-là, les chemins sont encombrés et le trafic est dense sur le rocher. Nous sommes venus ajouter deux grimpeurs supplémentaires à ce flux de varappeurs !

Une arête composée d'une succession de blocs posés en équilibre plus ou moins précaire nous conduira sur l'un des trois sommets de Mikura. Chaque longueur est comme un problème de bloc à résoudre. C'est court, pas facile et le risque en cas de chute est de s'aplatir sur une vire !

Au sommet, on découvre des dômes granitiques tout arrondis et des pins tout torturés ayant des airs de bonsaïs géants. C'est aussi sympa de sortir un peu la tête de la forêt et d'apercevoir la mer au loin...

 Le sandwich sushi, la récompense au sommet !

Cette multipitch en sympathique compagnie clôturera à merveille ici cette session grimpe et surtout cette escale au Japon.

À présent, il ne reste plus qu'à dégringoler de la colline, longer la côte Sud et rouler vers l'Ouest du Japon pour rejoindre un port, sauter dans un ferry et voguer vers la prochaine destination !

Une idée ?

30
juin
30
juin
Publié le 1er juillet 2023

Après deux mois et demi de vie insulaire, nous voilà de retour sur la terre ferme ! Quelques heures de navigation de nuit sur un ferry nous permettant de faire le grand saut entre l'Ouest du Japon et le sud de la Corée du sud. C'est donc au petit matin que nous débarquons sur le continent asiatique que nous avions quitté, il y a quelques temps déjà...

Nous entrons en Corée par la grande porte maritime de Busan.C'est une très grande ville tournée vers la mer et parsemée de grandes collines vertes qui mettront nos mollets à rude épreuve. À peine sortis du port et à demi réveillés, parcourir Busan à vélo, nous jette immédiatement dans le grand bain Coréen !En quelques coups de pédales, nous prenons la température de notre nouvel environnement.

Tout d'abord, ici, c'est à droite qu'il faut rouler ! Depuis combien de temps maintenant, prêtions-nous bien attention à tenir notre gauche ? C'était presque devenu instinctif à présent. Accrocher le rétro du côté opposé de notre guidon sera notre pense bête durant les premiers kilomètres matinaux.

Dans cette grande ville, peu ou pas de vélo, des trottoirs beaucoup moins adaptés aux deux roues et des piétons qui n'ont semble-t-il pas autant l'habitude d'être contournés par des cyclistes que les piétons japonais. C'est ainsi que nous reprenons le chemin de l'asphalte urbain et que nous nous retrouvons à rouler tantôt sur des rocades, tantôt dans des rues étroites en étant, de temps à autre, frôlés par des conducteurs aux manières de piloter bien plus banzaï !C'est le grand retour des coups de klaxons, des routes moins lisses et des sols moins propres. Ici, on n'est plus les seuls à griller les feux rouges, aussi cela nous incite à nous calmer un peu ou à ouvrir un peu plus grands nos yeux.

Les voitures semblables à de petits cubes multicolores sont remplacées par des grosses berlines noires aux vitres teintées et par d'énormes 4x4. Ça roule vite, ça se faufile et ça s'impatiente. Le contraste est frappant !Les épices font leur retour dans nos assiettes et nos papilles en sont toutes surprises. Les toilettes sont encore nombreuses mais moins sophistiquées. Ciao la lunette chauffante et le jet d'eau bien orienté !

Les ‘’7 eleven’’ ont toujours pignon sur rue avec eau chaude à volonté, les rayons des supermarchés sont moins fournis mais l'on trouve toujours des articles presque périmés soldés juste avant la fermeture. Au marché aux poissons, nous découvrons tout un tas de spécimens inconnus au bataillon et c'est presque surprenant de se faire alpaguer par les vendeurs.

Nous venons de débarquer dans une ville plus animée, un environnement moins aseptisé . Nous rencontrons des gens plus bruyants et des couleurs plus excentriques. Voilà qui donne le "la" de cette nouvelle partition.

Ça fait presque plaisir de retrouver une vie plus spontanée : des gens moins respectueux qui ne s'excusent pas pour tout et n'importe quoi, qui parlent plus fort, qui s'interpellent, se chamaillent, qui éclatent de rire, qui se faufilent pour gruger les deux touristes que nous sommes, qui essaient de les escroquer de quelques woms si c'est possible ! Bienvenue sur terre ! ... la transition est parfaite et dans ce nouveau lieu que l'on imagine être géographiquement comme culturellement à mi- chemin entre le Japon et la Chine, nous reprenons pied, peu à peu, dans la vraie vie !

Quel plaisir de retrouver des petits marchés sur les trottoirs et des stands de nourriture de rue. Quelle chance de pouvoir encore une fois laisser nos vélos et toute nos affaires qui y sont accrochées sereinement le temps d'une balade. Quel bonheur de faire encore et toujours des rencontres et d'être, une fois encore, surpris par tant de gentillesse !... La suite des aventures Coréennes, au prochain épisode !

1
juil
1
juil
Publié le 5 juillet 2023

Il y a des histoires improbables qui n'arrivent qu'en voyage !

Alors que nous posons nos pneus dans ce tout nouveau pays, nous contactons le seul et unique Coréen que compte notre répertoire pour lui poser deux ou trois questions de logistique.

Nous avions rencontré Kim, l'été dernier lorsqu'il pédalait dans les montagnes du Pamir au Tadjikistan. Nous avions tout de suite sympathisé avec ce cyclo-trotteur et nous nous étions dit que ce serait chouette de se revoir un jour ! Cet hiver au Vietnam, au Laos puis en Thaïlande, nos chemins ont été très proches sans qu'ils ne parviennent à se croiser.

L'une des questions à poser à Kim était, entre-autre : "Peut-on monter dans un train Coréen avec des vélos ?"Ici la saison des pluies est sur le point de débarquer et un petit coup d'accélérateur serait le bienvenu si on veut profiter du caillou sec avant l'arrivée du déluge.

Aussi fou que cela puisse paraître ce n'est finalement pas dans un train que nous embarquerons les jours suivants mais sur un voilier !

Il se trouve que par le plus grand des hasards Kim était justement à quelques miles nautiques de là où nous nous trouvions, en train de convoyer un bateau !

Évidemment nous n'allions pas laisser passer cette occasion en or de retrouver Kim et de tirer quelques bords sur la mer du Japon !

Bingo ! C'est parti pour un tour sur les flots !

Et comme une bonne nouvelle n'arrive jamais seule, il se trouve que ce convoyage est un peu spécial. En fait, ce coup-ci, cela ressemble plutôt à une croisière entre amis. Kim aide simplement son pote Jéjé, le propriétaire du voilier, à mener l'embarcation.

De ce fait, le programme est souple, l'ambiance à bord détendue et on embarque librement qui souhaite monter à bord.C'est ainsi que l'équipage s'étoffe au fil des escales. De port en port, le méga fortuné, Jéjé accueille dans son palace flottant tout un tas de vagabonds aux poches vides : Kim, le cyclo-voyageur, Navi et Cho, les globe-trotteurs, Lara et Bruno, les cyclo-grimpeurs reconvertis en marins pour l'occasion.

Le comble dans cette histoire et sur ce bateau qui vaut des millions, c'est qu'il s'avère que les vagabonds en question ont travaillé une bonne partie de leur vie et ont, à présent, fait le choix de voyager à moindre frais. Alors que le capitaine qui n'a aucun soucis d'argent, lui, n'a jamais vraiment eu besoin de travailler et navigue quelques jours par an seulement sur son fabuleux vaisseau à voile. Toujours est-il que la générosité est une bien belle qualité et que nous aurons passé d'excellents moments à bord.

Il est certain qu'il soit peu probable que l'on remonte un jour sur un si beau, si grand et un si neuf bateau . Aussi nous mesurons la chance et le luxe qui s'offrent à nous.Immense carré, cabines confortables, douche chaude, petits plats typiques, four à gaz et tartes aux pommes, winchs électriques, voiles flambant neuves, pilote automatique, coussins sur le pont, quarts souples et dodos à volonté, le tout copieusement arrosé de bières, de soju et de vin dès 10h du matin, agrémenté des blagues de Kim H24 et enfumés par les innombrables cigarettes de Jéjé, Cho et Navi !Voilà à quoi ressemblait à peu près notre croisière...

À chaque fois que je remonte sur un voilier, j'ai besoin d'un petit temps d'adaptation pour me remettre dans le bain !

Au début, je ne comprends rien et j'ai un peu la nausée puis j'ouvre grand mes yeux et mes oreilles, j'essaie de suivre ce qui se passe sur le pont même si la tentation de m'endormir est parfois forte. Ensuite tout revient peu à peu, tout reprend sa place dans ma tête, les manœuvres et les réglages à faire s'éclaircissent peu à peu dans mon esprit d'apprenti petit mousse.Identifier chaque partie du bateau et chaque bout qui traîne, remplacer les mots classiques par le jargon du marin, pointer son nez pour savoir toujours d'où vient le vent, découvrir la sensibilité de la barre...

Mais quand les consignes sont en Coréen, là je dois avouer que je patauge littéralement ! Résultat : Pour que je comprenne vite, il faut m'expliquer encore plus longtemps !

Et puis un jour, j'ai enfilé ma marinière et j'ai grimpé tout en haut du mât pour voir à quoi pouvait bien ressembler l'horizon...

J'y ai vu un bateau encore plus beau, des marins microscopiques et une île au loin. Avec ce beau voilier et ces mini marins, nous avons navigué nuit et jour dans sa direction. Des beaux rochers et un vent violent nous y attendaient... Une courte escale, une balade et il a fallu reprendre la mer en direction du continent avant que ‘’ la pétole’’ ne nous scotche au port pour quelques jours.

Nous rejoindrons la terre ferme quelques miles avant de franchir la frontière avec la Corée du Nord.

Maintenant notre nouveau cap est 270°, il n'est plus question de border, choquer ou d'empanner mais simplement d'appuyer sur les pédales et s'accommoder du vent dans le nez ! Il paraît qu'il y a de quoi grimper dans cette direction mais il paraît aussi que la saison des pluies est sur le point de débarquer...

Bye bye Viola et merci à nos compagnons de bordée !

... Sûr qu'on se recroisera un jour, quelque part !

Surprise !

6
juil
6
juil
Publié le 10 juillet 2023
5
juil
5
juil
Publié le 8 juillet 2023

L'usure du temps, l'usure des dents...

On ajoute un chiffre supplémentaire au compteur (réparé aujourd'hui d'ailleurs !) et on continue à pédaler de plus belle !

8
juil
8
juil
Publié le 14 juillet 2023

Un quatorzième mois sur la route c'est :


◇ 17 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷

◇ Une capitale 🏙

◇ 11500 km 🚲

◇ Des pistes cyclables 😉

◇ Du bus 🚌, du météo 🚇, un bateau 🚢

◇ 2 spots de grimpe

◇ Des rencontres 🧔🏽‍♂️🧑🏻‍🦱🧑🏽‍🦱👶👨🏻🧔👧🏽🧑‍🦳🧑👩🏻🧒🏽👴🏻👩🏻‍🦱

◇ Un accueil de malade 🏠 et des invitations au restaurant 🍻

◇ Des surprises 🎉

◇ 10 jours de grimpe 💪

◇ Une visite au club alpin 💥

◇ Des vieux alpinistes coréens 🦸‍♂️

◇ 1 musée 🏫

◇ De la grimpe trad et des fissures 👍

◇ 8 grandes voies 🤗

◇ 2 séances en salle 💪

◇ 108 longueurs et 37 rappels 🥳

◇ une visite à Petzl Corée ⛏️

◇ Un passage chez un cordonnier 👡, chez un soudeur 👨‍🏭, dans un lavomatic 🧼 et dans un truc pour laver les voitures 🫧

◇ Des cartons et un démontage de vélo 🔧

◇ 30 nuits dehors ⭐️ et des bivouacs improbables 🏕

◇ Deux visas obtenus ✅️

◇ 7 jours de pluie ☔️

◇ Des petites bêtes 🐍🐝🐜🐸🐞🦗🦋🕷🐣

◇ 2 projections de films 📽

◇ Un peu d'argent gagné 💰

◇ Des petits dessins ✏️

10
juil
10
juil
Publié le 17 juillet 2023

Aussitôt débarqués de notre bateau, nous renfourchons nos vélos et nous nous hatons vers les montagnes du nord du pays.

La saison des pluies est à nos trousses et si l'on veut profiter du caillou tant qu'il est encore sec, il vaut mieux ne pas trop traîner.

Bye-bye les vacances de bourgeois au sec sur un voilier, bonjour les vacances de cyclo-grimpeurs roots dans une tente humide !

Seoraksan est un grand parc national qui voit passer, chaque jour, sous son portail d'entrée, un nombre faramineux de promeneurs. Nous nous glissons dans cette foule durant quelques jours.

Seoraksan, c'est un grand massif montagneux situé au Nord Est de la Corée du Sud : différentes vallées, des ruisseaux, un énorme Bouddha, des pics rocheux partout, des temples colorés, des crêtes granitiques qui se découpent sur le ciel, des dalles gravées d'écritures, des forêts sombres, des centaines de marches d'escaliers, des grottes, des espèces de bouquetins, des milliers d'écureuils et même parait-il des ours !

C'est aussi des voies d'escalade, des parcours d'arêtes, un topo inexistant et des infos bien difficiles à dénicher.

Imaginez deux coréens errant dans les bartas du Caroux à la recherche de l'attaque de la Déplasse avec un topo en occitan : À deux ou trois détails près, c'est à cela que l'on ressemble !

Aussi pour trouver de quoi grimper à Seoraksan, il nous aura fallu commencer par nous balader. Marcher quelques kilomètres, ouvrir grand les yeux et utiliser notre dictionnaire coréen-français...

Non pas que les parois soient difficiles à apercevoir puisqu'il y en a un peu partout mais plutôt que les infos soient un vrai petit chantier à trouver. Dans un deuxième temps, il s'agirait ensuite de les déchiffrer.

Nous aurons donc commencé par de longues randonnées le nez en l'air en comptant sur notre sens de l'observation d'ouvreurs et de grimpeurs pour imaginer où se cachent les lignes les plus logiques à grimper !

Finalement, c'est un peu comme retrouver l'ordre logique des choses !

Après avoir essuyé un gros orage le premier jour en montant notre tente qui s'est illico transformée en baignoire, nous avons décidé d'aller à l'hôtel. Fou non ?

En effet, par chance, la vallée compte bon nombre d'hôtels et cerise sur le gâteau, ils sont presque tous à l'abandon. Étrange quand on voit la surfréquentation du lieu. Toujours est-il que pour les SDF que nous sommes c'est une véritable aubaine.

Camp de base parfait !

Nous posons donc notre tente pour une bonne semaine devant la porte cadenassée de l'un d'eux.

Un toit au dessus de nos têtes transforme ainsi les glauques journées de pluie en jours de repos presque grand luxe ! Oui, tout est relatif...

Dois-je ajouter que pour la énième fois en une année de voyage l'un de nos tapis de sol est à nouveau percé et que lassés de le rafistoler tous les trois jours, nous tirons, à présent, chaque soir à la courte paille pour savoir qui se cassera le dos en dormant sur le béton !

Après avoir trouvé ce palace pour des nuits au sec, l'étape suivante consiste à chercher un lieu où nous pourrions garer nos vélos et surtout laisser nos sacoches le temps de nos crapahutages quotidiens. On misera finalement sur la chance et la confiance en laissant vélos et bagages chaque jour à l'entrée du parc sans surveillance particulière.

Yusun-Dae et sa paroi à l'abri des regards sera notre premier objectif.

Une jolie arête de plus d'une dizaine de longueurs bordant la face en guise de mise en bouche et avant d'attaquer des choses plus sérieuses.

En ce dimanche, quelques relais sont un peu encombrés mais cette affluence a l'avantage de nous permettre de découvrir la technique de la collective coréenne quand on se retrouve à 12 compagnons de cordée dans le même itinéraire. Tout le monde encordé ensemble pour une fabuleuse et gigantesque cordée mille pattes !

Même si l'ambiance est plutôt conviviale, on préfère passer notre tour au jeu de la chenille pour ce coup-ci et on s'échappe rapidement vers le haut, ce qui s'avère être plutôt une bonne idée si nous ne voulons pas bivouaquer là !

Un rappel nous dépose sur un chemin de rando qui lui même nous ramène plus ou moins au pied de la voie. Il est encore tôt et il faut rentabiliser ce temps passé à faire la marche d'approche ! Nous choisissons ce coup-ci une voie dans la face de la même paroi : Yusun AB.

Cette voie remonte un grand mur raide, rayé dans sa partie médiane par deux belles fissures parallèles. Cette section nous apparaît comme le crux et après y avoir coincé tout ce qui peut être coincé, on peut dire que le crux était bien là !

Le soleil cogne fort en ce début d'après-midi, le caillou est bouillant, nos gourdes presque vides et nos pieds commencent à se sentir à l'étroit dans nos petits chaussons. Tout cela n'incite pas à trop traîner...

Une à une nous gravissons les sept longueurs et nous nous rapprochons du sommet pour la deuxième fois de la journée.

Nous retrouvons là, nos compagnons de relais rencontrés le matin même. Leur vitesse de progression nous conforte dans l'idée lumineuse d'avoir choisi de les doubler un peu sauvagement mais avec le sourire quelques heures plus tôt.Nous profitons de la fin d'après-midi au frais au bord du ruisseau avant de cacher notre sac sous un bloc afin d'alléger la marche d'approche du lendemain. C'est ensuite reparti pour un tour dans la célèbre paroi rouge.

Ce mur est si déversant dans sa partie haute qu'il a donné du fil à retordre aux courageux grimpeurs coréens qui en tentèrent la première ascension, il y a quelques dizaines d'années. Nous aurons la chance de partager une bière avec l'un d'eux quelques jours plus tard près de Séoul. Nos échanges auront été limités par la langue mais j'imagine que ces aventures ont donné lieu à de succulentes anecdotes !

En tout cas, le topo en dit long aussi... A2, A3+ et même A4, le libre on oublie, on sort étriers, crochet fifi, pitons et marteau ! Nous n'avons pas tout cet attirail d'artificier en magasin ni franchement l'envie de passer des plombes pendus dans un baudrier alors nous optons pour l'une des rares voies d'escalade libre existante sur la paroi rouge. C'est une ligne qui borde la face par son côté droit et qui nous donne l'avantage de profiter d'une arrivée au sommet à moindre frais.

Il est 14h lorsque nous attaquons et la paroi est déjà à l'ombre ! On peut dire que cela fait maintenant quelques temps que nous navions pas eu si chaud !

Non seulement la saison des pluies arrive mais il semblerait que l'été aussi !

On serait bien resté encore quelques jours ici, à Seoraksan, mais un déluge est annoncé.

On profite donc du tout dernier créneau pour se lancer dans une interminable entreprise, une très longue arête sur le sommet principal du massif.

Et comme c'est presque aussi long à décrire qu'à grimper, je vous raconte tout ça une autre fois !

A plus !

14
juil
14
juil
Publié le 21 juillet 2023

Retour à Seoraksan où une grande fête s'organise avant que le déluge ne s'abatte sur nous !

"Rock party route", c'est une très loooongue traversée d'arêtes qui franchit un à un tous les pics de la grande montagne du parc de Seoraksan, Ulsanbawi.

Bon, ce nest pas un scoop... les arêtes c'est toujours long, ça prend un temps fou et on a toujours l'impression de ramer, mais ce coup-ci :

Il s'agit quand même d'escalader 30 pointes, de gravir 51 longueurs et de réaliser 25 rappels... Qui dit mieux ?!

Des longueurs bien raides, des pas de blocs au dessus de vires, des enjambées au dessus du vide, des désescalades, des traversées effrayantes, des passages secrets, des passages d'artif, des dalles lisses et expo, des fissures larges voire très larges.

Un itinéraire très astucieux pour gravir chacun de ces blocs immenses et sauter ces brèches géantes parsemant cette crête qui mesure des kilomètres.

Les arêtes sans fin ont parfois ce côté déprimant, celui qui fait que lorsque l'on se retourne pour observer le chemin parcouru, on le trouve bien riquiqui et que quand on regarde celui qui reste à faire, on se dit que dans une semaine, on y sera encore !

On aura donc choisi la seule journée du voyage où un épais brouillard nous masquera la vue au delà du gendarme suivant, réglant ainsi le problème cité précédemment.

On aura également opté pour une journée où il est prévu que la pluie s'invite à la fête vers 15h pour nous obliger à nous presser un peu. Ça fonctionne plutôt pas mal, on met en marche le mode "pas de course" et l'histoire est ainsi réglée en une seule journée (il paraîtrait que certains profitent de l'aventure en s'offrant un ou deux bivouacs !).

Une belle journée à serpenter au dessus du vide, au milieu de blocs tous plus beaux et surprenants les uns que les autres dans une ambiance cotonneuse.

Je me demande encore si c'est le nuage qui nous aura suivi ou si c'est nous qui poursuivions le nuage ?

Deux grimpeurs, un nuage, du gaz et des dizaines de gendarmes... Quelle drôle de fête, non ?

Plus nous avançons, plus l'équipement devient précaire. C'est à dire que nous installons notre dernier rappel sur une plaquette dont le métal a été très très allégé...

La foudre ?

Peut-être mais peut-être pas... mais quoi alors ?

Dans tous les cas, on se dit qu'il ne doit pas falloir faire du tourisme ici en cas d'orage.

Le nuage se noircit encore davantage et il lâchera finalement ses premières gouttes alors que nous avons déjà rejoint la forêt et sommes sur le chemin du retour vers 14h...

Fin de chantier dans le temps imparti et retour tout pile à l'heure pour la vrai fête : le goûter !!

Alors oui, grimper tous ces pics c'était long mais croyez-le ou non, en dessiner le topo m'est apparu tout aussi interminable !

16
juil
16
juil
Publié le 26 juillet 2023

À trop tirer sur la corde... elle finit par s'user !

À trop utiliser son baudrier... il finit par se déchirer !

Et maintenant qu'est-ce qu'on fait ?!

Heureusement, une fois de plus, on peut compter sur la fidélité et l'efficacité de Petzl et cela même à l'autre bout de la planète ! Merci pour le coup de pouce, si loin cela revêt une saveur encore plus particulière. Merci à Petzl Korea et Annapurna pour l'accueil, on s'est presque senti à la maison !

16
juil
16
juil
Publié le 4 août 2023
30
juil
30
juil
Publié le 7 août 2023

C'est par un formidable réseau de pistes cyclables que nous traversons notre 14ème capitale. Séoul a beau être une ville immense et pleine de grattes ciels, les berges de ses fleuves offrent un peu de verdure avec des pistes cyclables 4 étoiles pour de belles échappés urbaines. Cela permet aussi aux voyageurs aux poches vides de bivouaquer à deux pas du centre ville de la capitale !

Séoul by bike : Tout aurait pu rouler comme sur des roulettes mais une fois encore, on s'est malheureusement cru plus malins que le GPS et on n'aura pas choisi le chemin le plus simple. C'est ainsi qu'on se sera retrouvé de nuit sur une autoroute avec des voitures qui filent à toute allure. Notre seule issue : porter les vélos par dessus la glissière de sécurité et descendre un talus pour retrouver la soit disant piste cyclable en contrebas. Quelques kilomètres plus tard, celle-ci étant fermée par un grand portail nous refaisons le même manège : un saut sur l'autoroute puis une descente de talus ! Épique soirée !

Nous passerons environ une semaine à Séoul et chaque jour nous aurons des surprises improbables et ça commence tout de suite !

Alors que nous petit déjeunons dans une boulangerie, un gars nous acoste et nous invite pour le repas de midi dans... son restaurant ! Bingo !

On fait une lessive bien méritée en attendant de digérer le p'tit dej' et que l'heure du repas de midi approche. C'est un restau Thaï et on se régale de délicieux plats qui nous ramènent quelques mois en arrière, lorsque que nous roulions en Asie du Sud-Est ! De fil en aiguille, on se retrouve à aller prendre le café dans une... bijouterie ouverte par sa femme le jour même ! C'est peut-être bien la seule fois de notre vie où l'on mettra les pieds dans ce genre de boutique surtout pour boire un café !

Nous nous remettons ensuite en selle pour rejoindre le Parc National de Bukhansan. Ce grand parc plein de forêts et de sommets rocheux commence exactement là où la ville s'arrête. Ce qui veut dire que le métro vous conduit aux départs même des sentiers et que grimpeurs et randonneurs débarquent ici en transports en commun. C'est une fois de plus assez fou de découvrir tant de nature sauvage à deux pas d'une des plus grandes villes du monde !

Je profite de ce passage en ville pour une énième réparation de mes chaussures et deuxième cadeau du jour, ce gentil cordonnier m'offre la réparation !

Pour rejoindre Bukhansan, nous optons pour le chemin le plus court mais c'était sans penser que la mégalopole est entourée de montagnes... Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Parfois le plus court est aussi le plus raide et le plus costaud, ce sera le cas ce coup-ci ! Il aura fallu s'y mettre à deux pour pousser un seul vélo et il aura fallu aussi deux demi-cerveaux pour se rendre compte au sommet de la colline qu'il ne restait plus qu'à redescendre de l'autre côté et qu'on était encore bien loin d'arriver ! Bref, on n'est pas prêt d'oublier les collines de Séoul !

Après cette épopée cycliste digne d'une étape de montagne du tour de France mais avec des coureurs qui mettent pied à terre et avec les spectateurs et le maillot jaune en moins nous arrivons enfin à destination !

Avant d'aller rendre visite aux parois nous faisons une pause au CAC (Corean Alpine Club) où l'on espère glaner quelques infos. Et les surprises continuent !

Dans ce local au sous sol, décoré de magnifiques photos en noir et blanc, agrémenté d'une bibliothèque bien fournie, des gens nous attendent avec impatience. Prévenus de notre arrivée par on ne sait exactement qui, notre séjour à Bukhansan prend des airs de vacances au club med !

Pas de topo mais des personnes adorables prêtes à nous guider chaque jour.

On nous trouve tout d'abord un coin de jardin où nous pouvons poser notre tente gratuitement et l'on nous présente toute une foule de personnes, toutes plus gentilles les unes que les autres. Le soleil n'aura fait que de rares apparitions cette semaine là mais tous ces sourires et cette bienveillance auront illuminé nos journées !

Nous découvrons la mythique paroi d'Insubong dès le lendemain matin. Kim, notre guide du jour fixe un rendez-vous très matinal. Aujourd'hui, nous sommes samedi et ce jour-là à Insubong c'est jour de très très grosse affluence, nous le découvrirons plus tard.

Une côte très très très raide à vélo nous mène au bout de la route. La journée aurait pu se terminer là, nous sommes déjà fatigués !! Mais le triathlon continue de plus belle et une marche d'approche parcourue à la vitesse des éclairs s'en suit. C'est à la fin de celle-ci que nous apprenons que Kim est, dans la vie normale, pilote d'avion : voilà ceci qui explique cela !

Ce jet privé nous dépose en quelques minutes au pied de la belle paroi d'Insubong, une des belles et grandes parois du massif.

À votre avis quel point commun y a-t-il entre South Howser Spire aux Bugaboos, Sentinel Rock au Yosémite, l'Arête Sud-Ouest du Fitz Roy et la paroi d'Insubong ?

Yvon Chouinard est venu y balader ses chaussons et c'est dans ses pas que nous allons grimper aujourd'hui.

Notre avion à réaction nous dépose au pied de la voie Chouinard A : c'est clé en main, il ne reste plus qu'à grimper !

... Ou plus exactement, il ne reste plus qu'à pousser sur les pieds, tirer sur les bras et coincer une fois de plus toutes parties du corps qui peuvent l'être !!

La ligne est évidente, le dièdre parfait et la grimpe magnifique !

On ne peut s'empêcher de penser à ce grimpeur fameux et à la joie avec laquelle il a du découvrir cet itinéraire encore vierge après avoir fait ses armes sur les parois américaines !

La dalle bordant le dièdre est parfaitement sculptée dans les premières longueurs, c'est un échauffement parfait. Puis peu à peu, l'ensemble se redresse et bientôt il n'y a plus pour prise que cette large fissure. Coincements, dulfer, tous les moyens sont bons pour gagner quelques centimètres !

Nous sommes seuls dans la voie, une chance en ce samedi ! Sortis des difficultés, il ne nous reste plus qu'à contourner le grand toit, formant un bec caractéristique qui domine la paroi d'Insubong. Le belvédère est parfait !

Sous nos pieds, à la base de la paroi, des dizaines de grimpeurs affluent. Ils sortent de la forêt, le nez en l'air, marquent tous une courte pause, puis petit à petit, prennent de la hauteur. Tels de petites fourmis sur un gros bloc de granit, il y en a, en quelques minutes, partout ! Véritable marée humaine qui envahit le rocher quand l'heure du week-end a sonné ! Quel spectacle !

Un samedi, un massif montagneux à deux pas d'une capitale, des parois magnifiques accessibles en transports en commun, voilà qui explique en partie cela mais aurait-on imaginé un tel engouement pour la randonnée et l'escalade ?

Grimpeurs de tous âges, de tous gabarits, de tous niveaux et de tous styles, quelle diversité sur ce bout de rocher !

Nous atteignons les dalles sommitales d'Insubong et découvrons qu'un sommet se cache juste derrière. Là encore une colonie de fourmis équipée de sac à dos, de chapeau de soleil et de bâtons est à l'assaut !

Quelques rappels nous déposent à un petit col et un sentier nous ramène à nos vélos, il ne reste plus qu'à s'agripper aux freins pour rejoindre notre camp de base, quelle descente !!!

Le lendemain, nous avons rendez-vous avec Sangho, Sue et Mister Park pour grimper une longue voie de 12 longueurs, "Rescue route".

Deux cordées nous précédent, il fait chaud et l'on n'a jamais vu des 5.9 aussi difficiles ! La journée va être longue : Dalles lisses, fissures fines, fissures larges, dièdres et petit toit à franchir, tout y est !

Nous formons deux cordées. Mister Park ouvre la voie avec Sue et Sangho et nous suivons derrière. Une à une nous avalons les longueurs et chaque relais est un bon moment d'échanges et de rigolades.

Il fait très chaud et nous sommes ravis quand à la moitié de la voie, une pause pique-nique s'improvise à l'ombre des arbres sur une large vire. Nous sommes surpris de voir nos compagnons de cordée, retirer leurs baudriers et sortir une nappe et une quantité phénoménale de nourriture !! Le mystère du volume et du poids des sacs est éclairci !

Lorsque nous nous remettons en action, la paroi est passée à l'ombre, il fait bien meilleur !

Quelques belles et difficiles longueurs nous conduisent au sommet puis quelques instants plus tard, nous fêtons la fin de cette belle journée autour d'une délicieuse glace. Spécialité coréenne, le "patbingu" est un gros bol de glace au lait pilée et agrémentée de fruits, de haricots rouge ou encore de gâteau de riz. Un délice surtout après une si chaude journée et lorsque c'est partagé en si bonne compagnie !

Chaque jour, à Bukhansan, nous faisons connaissance avec des grimpeurs, des himalayistes, des glaciairistes et des voyageurs, tous membres du CAC. Les mots qui reviennent le plus souvent dans les conversations sont "Chamonix" et "Dolomites". À part nous, toute la Corée y sera dans les prochaines semaines !!

Nous ne comptons plus combien de soirs, nous avons été invités au restaurant, combien de bières nous avons partagées, ni combien de récits d'expédition nous avons écoutés !

C'est ainsi que dans un même bar et durant une même soirée, nous rencontrons :

- Le frère de Cho (Cho était avec nous sur le voilier quelques semaines plus tôt)

- le premier Coréen à avoir gravi les trois grandes faces nord des Alpes

- un fabriquant de piolets de dry tooling

- 5 personnes ayant fait le Cervin dont 3 par la face nord

- 3 qui partent en vacances à Chamonix la semaine suivante

- 2 en partance pour les Dolomites

- Le rédacteur en chef de la revue Alpinist Korea

- un glaciairiste fameux

- les ouvreurs de la paroi rouge à Seoraksan

- des summiters de 8000

- la maman de Kim Jain, grimpeuse qui gagnera la semaine suivante la coupe du monde de Chamonix !

Ici les infos circulent à la vitesse grand V et nous sommes à chaque fois très étonnés quand des inconnus, rencontrés en plein Séoul ou au pied des parois nous saluent, sortent de leur smartphone des photos que nous n'avons jamais vu mais sur lesquelles nous apparaissons ! Le monde de la montagne Coréen semble encore plus petit ici qu'ailleurs !

Les jours suivants s'annoncent sombres et humides, il pleut presque tous les jours. Notre spot de bivouac atteint un taux d'humidité record et nos duvets resteront humides des jours et des jours !

Nous en profitons pour aller nous mettre à l'abri et visiter un très grand musée à Séoul, pour dessiner un peu et pour faire un peu d'exercice dans une belle salle d'escalade : voies, blocs et même dry tooling sont au programme !

La pluie abondante a rendu humide les fissures mais avec un peu d'imagination et de motivation, nous arrivons à partager avec Mister Park, une dernière voie sur Insubong et profiter du soleil revenu. Quand il n'y a plus que dalle à grimper, il reste toujours les dalles !

Le soir même, alors que notre départ pour l'hémisphère sud est imminent, nous avons rendez-vous au CAC pour une soirée un peu spéciale.

Comme un beau bouquet final à ce fantastique feu d'artifice asiatique, la veille de quitter le continent, une chouette soirée est organisée. Durant celle-ci nous aurons pu partager avec tous nos invités quelques images de notre longue balade vers l'Est...

Une belle affiche, une organisation au top, un grand écran, des grimpeurs, des cyclistes, des voyageurs, une traductrice, un photographe officiel, plein de questions auxquelles répondre et une cagnotte pour nous aider à continuer ! What else ?

Des yeux qui brillent, des sourires, des tonnes de bonheur à partager et surtout des souvenirs que nous ne sommes pas prêts d'oublier ! Quels incroyables moments de partage !

Merci la Corée pour ce fabuleux accueil !

사단법인 한국산악회 Corean Alpine Club !

8
août
8
août
Publié le 8 août 2023

Aurai-je pu imaginer qu'à 35 ans, on pouvait perdre son amoureux comme on perd son doudou quand on est enfant ?

Quelques secondes d'inattention, une main molle, une peluche qui tombe, les roues d'une poussette qui continuent et c'est le drame.

Je me suis toujours demandée quel mystère faisait qu'on pouvait attacher autant d'importance à un bout de tissu.

Une dispute et quelques fracas, des pédales et des roues qui tournent trop vite pour que je puisse suivre... un amoureux qui se volatilise, hors de ma vue, le drame.

Je suis tel un doudou resté sur le pavé.

Perdue, oubliée, abandonnée...

Voir défiler les heures, un doudou n'a pas de montre.

Sentir la pluie tomber, un bout de tissu ne craint pas l'eau.

Avoir faim, froid, peur. Être triste, désespérée. Se sentir démunie, sans force, sans idée. Réfléchir, faire des plans, les défaire, en refaire.

Parfois j'aimerais être un objet sans cœur et sans cerveau.

Perdre pied, craquer.

Relativiser, sourire, trouver la situation absurde...

À mon âge, lorsque tu colles une affiche sur un mur en laissant un prénom et ton numéro de téléphone et que tu as les yeux tout plein de larmes, on te demande si tu as perdu ton chien.

Cela paraît hors sujet, cela ne l'est pas tant. Habituellement, j'exploserais de rire, là, j'esquisse simplement un sourire.

Plus tard j'en rirai, nous en rirons ensemble certainement. Toi et moi, chien sans collier, doudou oublié.

Je me demande quel mystère fait que l'on puisse attacher autant d'amour en un seul et même être vivant ?

Je me demande comment on peut vivre tant bien que mal avec un même humain toutes les minutes de toutes les heures des jours et des nuits de toutes les semaines et de tous les mois d'une année et même encore davantage sans jamais n'être séparés une seule petite seconde. C'est ça le voyage.

Je me demande avec qui d'autre une telle aventure serait envisageable.

Je me demande comment on peut supporter d'être soi même, perpétuellement en mouvement, dans l'effort, l'inconfort, la saleté, avec une quantité de sommeil pas toujours parfaite et en se contentant de trois pièces de monnaie pour remplir son estomac.

Aussi paradoxal que cela puisse paraître, de ces vacances de privilégiés, j'aurai sans doute découvert une chose cruciale : certains aspects de la vie des plus défavorisés.

Enfin, un temps pour soi, aller respirer l'air de son côté, une balade solitaire dans son jardin secret est toujours bénéfique, pousser cette porte était d'ailleurs sans doute la meilleure des choses à faire avant l'explosion atomique.

Mais voilà...

Je me demande de nos jours comment deux personnes peuvent se retrouver et se rejoindre sans moyen de communication entre eux. Comment en pouvant se trouver à deux rues près, à quelques kilomètres d'écart à peine ou dans un même pays à l'échelle du monde, il est possible qu'ils ne se croisent jamais. Plus jamais.

Dorénavant, je saurai qu'un bout de papier avec un numéro de téléphone plié en boule au fond d'une poche ou dans un creux de sa mémoire est une précieuse idée.

Que feriez vous si vous étiez seul, perdu, sans moyen de communication et sans point de repère géographique pouvant faire office de rendez-vous ?

Rester sur place ? Ne plus bouger ? Se laisser mouiller par la pluie et se laisser gagner par le désespoir ? C'est un comble quand le sujet de la discorde était justement de devoir accélérer un peu les déplacements car les projets pullulaint.

On dit que le hasard fait souvent bien les choses, on me dit qu'il suffit d'attendre au même point sans bouger et espérer fort.

Je n'ai pas ce courage.

Les minutes ressemblent à des heures, les heures s'étirent comme des jours sans fin.

"Dis quand reviendras-tu ? Au moins le sais-tu ?"

Certains "perdent" leur être aimé au sens figuré, à jamais, pour toujours. Je t'ai "perdu" au sens propre, c'est bien moins grave mais j'aimerais beaucoup te retrouver.

Tu ne liras probablement pas ces lignes parce que les réseaux, c'est pour les ploucs, parce qu'un smartphone dans ta poche c'est trop lourd, que tu n'as pas accès à ta boite mail et parce que l'époque des cybercafés, c'est terminé. Le courrier sans adresse, c'est peine perdue et les pigeons voyageurs ça n'existent plus.

Alors compte simplement le nombre de fois où tu vois le soleil se coucher, observe la lune croître puis rétrécir et rappelle toi que :

"Le tout le temps qui passe,

Ne se rattrape guère,

Que tout le temps perdu,

Ne se rattrape plus,

J'ai beau t'aimer encore, j'ai beau t'aimer toujours,

J'ai beau n'aimer que toi, j'ai beau t'aimer d'amour,

Si tu ne comprends pas qu'il te faut revenir,

Je ferai de nous deux mes plus beaux souvenirs,

Je reprendrai la route, le monde m'émerveille,

J'irai me réchauffer à un autre soleil."


Pourquoi inventer des mots lorsqu'ils existent déjà...

11
août
11
août
Publié le 11 août 2023

💥Good news les amis !💥

Que peut bien faire un Sourzac quand il ne donne pas de nouvelles pendant 4 jours et trois nuits et que moi... j'attends ?

Vous vous le demandez ?! Moi aussi...

Dans un court mais relativement réconfortant email reçu cette après-midi, il raconte avoir roulé vers l'Ouest et pris un grand bol d'air à priori plus que nécessaire.

Comprenez par là qu'il a pédalé comme un bourrin qui boude. Rouler beaucoup et sûrement rouler vite, du matin au soir et peut-être du soir au matin, s'hydratant probablement de quelques bières en chemin... On ne se refait pas !

Il a évidemment pas mal avancé et la distance entre nous s'est par logique creusée à tous points de vue.

Lors de la prochaine vacation radio, on essaiera de se fixer un rendez-vous avec la rigueur qu'avait nos grands parents à l'époque du télégramme. Tel jour, telle heure, tel endroit. On ne papillonne pas et on ne change pas d'idée en chemin. D'ici là je réfléchis à demander le divorce avant le mariage, ce sera toujours ça d'assurer.

On a évité de justesse de voir apparaître sa jolie bouille sur de belles affiches dans tous les lieux publics Australiens, à la télé et dans les journaux car ici quatre jours sans nouvelle est synonyme de personne portée disparue... C'est bien la première fois que j'aurai rendu visite de mon propre grès à des flics ! Rien que pour ça... champagne !

Quoiqu'il arrive, il y aura un "avant" et un "après" cet épisode, je ne sais pas de quoi sera fait "l'après" et peu importe pour l'instant (même si je l'espère heureux !) mais "l'avant" était juste génial et c'est ce que je retiens le moment.

Et entre "avant" et "après", il y a le "pendant", et là, c'est vous les champions ! Vous avez tous été incroyablement extraordinaires et attentionnés.

Ces dernières 24 heures, vous avez avec amour, amitié, empathie et même humour inondé mon écran de plus d'une centaine de messages.

Tant de réconfort et de soutien de votre part, vous qui êtes si loin et avez été si proche à la fois.

Chaque mot était réconfortant et me réchauffait le cœur. Grâce à vous, il est maintenant brûlant !

Et bien sûr, je ne remercierai jamais assez ma jolie Belle. Ce coup-ci, les mots me manquent tellement elle est épatante !


Merci ! Merci ! Merci !


--> La suite au prochain épisode mais "Amour, gloire et beauté", on arrête, c'est promis. Dès demain j'investis dans un collier à puce gps (et avec télécommande !) pour mon koala préféré !

11
août
11
août
Publié le 15 août 2023

Un jour, dans ma maison,

Une maison avec des murs,

Des murs de bois, de pierres, de terre, de paille, que sais-je...

Pas de ceux en toile qui tremblent quand dehors le vent souffle fort,

Pas de ceux qui s'écroulent quand la neige pèse trop lourd,

Pas de ceux qui changent chaque jour de jardin,

Des murs sur lesquels on peut épingler nos souvenirs, des projets, des choses aussi inutiles que belles,

Sur l'un d'eux, dans un beau cadre, il y aura cette femme aux oiseaux,

Ce vent tempétueux dans ses cheveux, Ces montagnes du bout du monde,

Elle sera le souvenir ineffaçable de cette rencontre magique,

De ces moments partagés, de ces lignes de vie entremêlées,

De cette gravure à quatre mains, de nos sensibilités mélangées,

Et puis, il y aura cette couleur à l'image de ces instants,

En or.

Merci Belle !

17
août
17
août
Publié le 17 août 2023

Voici venue l'heure de changer d'hémisphère, de migrer de l'autre côté de la planète et de retrouver l'hiver alors que l'été pointait son nez. Désormais nous profiterons du soleil quand tous les gens qu'on connaît, observeront la lune briller...

Bonjour, bonsoir, au revoir...

Au revoir Asie. "Au re-voir" car c'est avec un énorme pincement au cœur que je te quitte et que j'espère tellement te retrouver un jour...

Toi, l'immense continent,

Camaïeu de pays si différents,

Milliers de kilomètres à ta découverte,

À t'observer vivre, yeux écarquillés, bouche et oreilles ouvertes,

Toi, qui nous a tant offert,

Entre les lignes, on a lu tes peines, tes joies,

Combien chaque jour de surprises à la fois ?

Tes mille et une saveurs,

Tes indescriptibles odeurs,

Toi et tes visages par milliards,

Tous ces sourires et ces regards,

Diversités des traits, des silhouettes et éventails des couleurs de peau,

Sonorités des mots,

Qui s'entremêlent dans mes oreilles comme un flot,

Vie à cent à l'heure, peuples grouillants,

Vie au ralenti, voyage lent,

De ma mémoire, je voudrais que rien ne s'efface,

Comme d'une nouvelle vie après l'Asie, une préface,

Arc en ciel de paysages et patchwork d'émotions,

Ciels aux milles teintes, étoiles à profusion,

Tant de jours à naviguer à vue sur tes routes cabossées,

Tant de nuits à même ton sol passées,

Tes montagnes, tes rizières, tes volcans,

Tes fleuves, tes déserts, tes champs,

Tes forêts, tes fleurs et tes couleurs,

Tes incroyables animaux,

Tes multicolores oiseaux,

Resteront dans un coin de mon cœur,

Dans mes valises cette étrange petite douleur,

Après toutes ces journées, tous ces mois, cette année,

Nous étions comme apprivoisés, devenus familiers,

Quand te reverrai-je Asie ?

Une chose à te dire : Merci !

Bonjour l'Océanie,

Le tout nouveau premier jour du reste de la vie...

Une nouvelle page à écrire,

Un bout du monde à découvrir.

20
août
20
août
Publié le 22 août 2023

L' Australie était sans doute la destination préférée de ma grand-mère globe-trotter.

À 80 ans passés, elle voyageait encore, partout, toujours seule, sans connaître un mot d'anglais et sans savoir vraiment compter !

À cette époque, j'étais vraiment riquiqui et j'aimais observer, curieuse, toutes ces punaises colorées épinglées sur cette immense planisphère accrochée au mur de sa chambre.

Je la regardais souvent monter dans un train avec son petit sac à dos, puis je l'imaginais s'envoler dans les airs pour traverser la planète, là où c'est l'hiver en été, là où les gens marchent la tête en bas et dorment accrochés au plafond sans jamais tomber.

Pas de téléphone, pas de mail : pas de nouvelle, bonne nouvelle ! Je reviendrai tel jour disait-elle, c'était vrai. On attendait sur le quai, elle arrivait.

Elle revenait avec son sac à dos toujours aussi petit et pourtant rempli de t-shirts décorés de kangourous et de koalas pour nous, les petits enfants.

C'était ça pour moi l'Australie : une mamie qui partait, des cartes postales et des "muchos besos" qu'on recevait heureux et des dessins de kangourous sur mes t-shirts durant des années. Forcément quand tu es la petite dernière de la famille et que tu récupéres les vêtements de tous les cousins, tu vois passer des générations et des générations de kangourous !

Pour elle l'Australie, c'était aussi ce bel opéra de Sydney qu'elle aimait bien. Alors évidemment devant ce beau bâtiment éclairé de ces belles lumières d'hiver, j'ai eu une chouette pensée pour elle !

Mamie Katia ! Moi aussi, je suis en Australie !

23
août
23
août
Publié le 28 août 2023

L'avion en vélo, le vélo en avion.

Frontières fermées, visas compliqués, mers ou océans à traverser et parfois une envie trop forte d'aller voir un peu plus loin ce qui s'y passe... "Vélo va vélo voleLa voie va où vélo vaVélo vire vélo volteOù va la vie vélo va..." ... Vous connaissez cette chanson ?Pour nous, c'est à chaque fois ou presque le même refrain :

Rechercher des billets d'avion incluant des bagages en soute (chose de plus en plus rare), pister les vols avec escales, opérés par une seule et même compagnie et sans transfert dit "autonome" (chose de plus en plus fréquente), acheter les billets les moins chers mais avec des horaires à la noix ou des durées interminables.

Rechercher ensuite un "bikeshop" (parfois en faire 5 ou 6) pour trouver deux grands cartons. Acheter des rouleaux de scotch puis sortir la caisse à outils et démonter guidons, pédales, selles, roues, porte-bagages et gardes boue avant... et parfois même roues, porte-bagages et gardes boue arrière.

Puis par une formidable partie de Tetris, faire ensuite rentrer tout ça dans ces grands cartons qui paraissent alors subitement beaucoup plus petits. La suite consiste à combler chaque espace libre par les duvets, la tente, le réchaud, la gamelle, les sacoches vides, des vêtements, la trousse de réparation...etc... quand il y en a plus, il y en a encore !

L'idée étant de ne pas excéder 23 kg alors que les vélos en pèsent déjà 18 !

La mission suivante consiste à trouver un moyen de se rendre à l'aéroport encombrés de ces très volumineux bagages. Grands taxis, bus, trains, métros, tram et même parfois bateaux... Pour le dernier vol en date, en Corée du Sud, tous ces moyens de transports étant trop onéreux, c'est à vélo que nous avons rejoint l'aéroport. Évidement, je vous laisse imaginer la scène : deux cyclistes roulant sur une autoroute avec des grands cartons pliés en 6 sur leur porte-bagage.

C'était pas "easy easy" mais pas si compliqué que ça tout compte fait...

Atelier démontage dans le terminal, lavage à grandes eaux et à la brosse à dent de tout ce qui pourrait présenter des traces de terre afin d'éviter d'affoler les douaniers à l'arrivée et de payer une décontamination lors de notre entrée en Océanie.C'est ainsi que nous quittons l'Asie : on peut, je crois, le dire sur ce plan là, certainement bien plus dégourdis qu'il y a 14 mois en y entrant.

Bref, tous les moyens sont bons pour tenter d'arriver en temps et en heure au guichet d'enregistrement. Là, nous découvrons, à chaque fois ou presque, amusés mais aussi un peu inquiets, la tête surprise de l'hôtesse de l'air clouée au sol afin d'assumer cette lourde tâche qu'est d'annoncer aux gentils voyageurs que leur valise est vraiment trop lourde, trop grosse et trop en carton.La tâche suivante est encore plus cruelle puisqu'il faut parfois leur annoncer que ce coup-ci, il s'agit de payer 15€ par kg pour l'excédent de poids.35 kg x 15 €... je vous laisse calculer et imaginer nos têtes !

C'est souvent plus que le prix du billet !Heureusement les surprises sont chaque fois différentes même si elles sont plus souvent mauvaises que bonnes. Mais globalement, on peut dire que même si c'est, à chaque fois, un peu crispant de ressortir sa carte bancaire et qu'il faut parfois négocier sévère, on finit à peu près toujours par tomber sur un commun accord dès lors qu'on déballe tout notre bazar en mode vide-grenier au beau milieu de la file d'attente de voyageurs qui sentent bons et ont de jolies petites valises à roulettes.

Une fois cette épreuve majeure surmontée, il ne reste plus qu'à se présenter au contrôle de sécurité où l'on se retrouve à devoir expliquer que ligoter le pilote avec tous ces rouleaux de scotch n'est pas vraiment dans nos plans et que la bouteille rouge qui sent l'essence est en fait notre gourde dans laquelle on boit chaque jour. Vous trouvez ça louche ? Nous pas... Enfin après avoir fait le tour de toutes les boutiques du terminal pour écouler nos derniers pesos locaux et se rendre compte à chaque fois qu'avec 20 centimes, on ne peut rien s'offrir du tout, il ne reste plus qu'à patienter gentiment en croisant les doigts pour ne pas qu'on nous appelle au haut parleur pour on ne sait quoi d'illégal aperçu au scanner dans nos cartons à vélo.

Enfin installés à bord, il ne reste plus qu'à s'asseoir tranquillement sur autre chose qu'une selle de vélo et attendre impatients l'heure du repas ; sans oublier évidemment de pirater tout ce qui peut l'être au passage : lingettes pour les mains, oreillers, couvertures, couverts, stylos ou écouteurs...

Regarder par le hublot, les nuages défiler en écoutant de la jolie musique... "Vélo va vélo voleLa voie va où vélo vaVélo vire vélo volteOù va la vie vélo va..."

28
août
28
août
Publié le 6 septembre 2023

Sydney... ici, Sydney, température extérieure 5 °C, 72% de taux d'humidité de l'air, 18h heure locale.

En quelques instants, nous faisons simultanément un bon dans l'hémisphère Sud, en Océanie et en hiver.

À peine débarqués, nous enfilons nos doudounes, nos chaussettes et même nos gore tex ! Remontage des vélos à la hâte dans le hall de l'aéroport, il fait déjà très sombre lorsque nous mettons le nez dehors.

Désormais, nous avons 8h d'avance sur vous, les Européens : nos nuits sont vos journées et notre hiver est votre été.

Sydney représente notre 15ème capitale visitée à deux roues. Contrairement au reste du pays que nous découvrirons ensuite, la circulation à vélo est assez agréable. On change une nouvelle fois notre rétroviseur de côté du guidon et on s'obstine à bien tenir notre gauche. Les cyclistes sont relativement nombreux, on roule sur les trottoirs ou sur de petites bandes aménagées en bord de rue. Pour accéder ou quitter la ville, il y a même de vraies pistes cyclables en bordure des grosses voies rapides. C'est grandement appréciable, cela permet même de se déplacer de nuit. Ici il fait nuit noire (et froid) à 17h. Dur dur pour la vie de campeurs !

Nous voici au pays des kangourous, des gens gigantesques, des oiseaux multicolores et du ballon ovale.

Grâce aux stades de rugby présents en plein centre- ville, la vie de bivouaqueurs urbains en pleine capitale est facilitée ! À un détail près : si l'herbe est si verte, c'est en partie parce qu'elle est arrosée chaque nuit par des asperseurs automatiques. Comprenez par -là que les clochards dormant sur cette herbe bien grasse prennent par la même occasion une douche froide et nocturne !

Le contraste est grand pour les voyageurs en provenance de l'extrémité orientale de l'Asie. Sydney est un vrai melting pot de visages. Quel plaisir d'observer tant de traits différents, de couleurs de peau variées et de styles vestimentaires multiculturels. Ici tout est plus grand et plus gros.

Les gens mesurent parfois pas loin de 2m et ils sont quelquefois très très gros, les paquets de chips et de m&ms sont énormes et les voitures ont presque toutes quatre grosses roues motrices et des plaques de désensablage sur le toit.

1 mètre de réglisse 
 2kg de yaourt !

Autant dire que pour nous le changement est grand, puisque depuis plus de 3 mois, nous ne croisions que de petites personnes très sveltes, à la peau claire et aux yeux bridés et ne mangeant que des demi portions !

Désormais, nous nous fondons dans la masse et sommes noyés dans cette grande foule. Si bien qu'on a beau être deux touristes à vélo avec tout un tas de bagages colorés, les gens ne semblent pas prêter attention à nous et nous ne discutons avec personne. C'est presque une première.

Nous profitons de ces quelques jours citadins pour nous abreuver d'un peu de culture.

Malheureusement, ici, les prix aussi sont plus gros qu'ailleurs et nous buttons souvent devant le guichet d'entrée des musées à la vue des tarifs. Nous parvenons toutefois à entrer gratuitement dans quelques- uns et à profiter de très belles expositions en parvenant tant bien que mal (et plutôt mal que bien) à faire garder nos bagages. La vie était si simple dans ces pays où l'on pouvait laisser sans crainte nos vélos chargés garés, sans surveillance...

Ainsi nous découvrons tour à tour, l'art Aborigène, les animaux endémiques morts et empaillés (vu que le zoo pour les voir vivants est trop cher !) et de magnifiques photos à couper le souffle de parures corporelles Papoues.

Ces quelques jours en ville, nous permettent de comprendre qu'il va falloir aussi placer le curseur du mode "clochard", (pourtant déjà activé depuis des mois !) un peu plus haut si on veut pouvoir poursuivre encore l'aventure. Ça tombe bien, ici il est relativement facile et assez répandu d'aller glaner de la nourriture presque périmée dans les poubelles des supermarchés.

Ainsi, nous sauverons à de multiples reprises quelques kilos de pains délicieux des ordures !

Il est temps, à présent, de reprendre le chemin des montagnes et celles qu'on vise sont paraît-il bleues. Depuis Sydney, atteindre les Blues Mountains demande quelques tours de pédales bien appuyés : on passe en une grosse centaine de kilomètres de l'altitude 0 à 1000.

Quand l'inclinaison de la pente s'accentue, que la route devient étroite, que la nuit tombe et que les pilotes Australiens ne coopèrent pas vraiment, cela donne l'opportunité de s'offrir notre tout premier bivouac dans le "bush".

Au réveil, on découvre émerveillés notre première grande forêt d'eucalyptus, des oiseaux de toutes les couleurs et des vétettistes qui jumpent d'énormes bosses juste au- dessus de notre toile de tente !Une halte pour demander de l'eau nous conduit à la première maison où quelqu'un bricole dans le garage.

...Voyons si les Australiens sont sympas avec les voyageurs à deux roues ?

C'est ainsi que nous faisons enfin notre toute première rencontre. En deux secondes, nous trois et nos accents sont démasqués : Alain est français !

Discussions matinales, bouteilles d'eau remplies, batteries rechargées, cafés et petits gâteaux... Quel bel accueil !

Le hasard fait qu'Alain et sa famille s'envolent pour des vacances en France dans quelques semaines à peine. Nous en profitons donc pour alourdir leurs bagages en nous délestant des rares choses encore superflues qui restent dans nos sacoches ! Merci Alain !

Nos vélos légèrement allégés et nos coeurs enrichis de cette nouvelle rencontre, nous reprenons la route qui grimpe vers les Blueys avec l'intime conviction qu'une fois encore les bonnes ondes sont avec nous.

Et c'est peu de le dire quand on connaîtra toutes les bonnes surprises que nous offrira notre séjour dans les Blue Mountains !

... la suite au prochain épisode !

8
sept
8
sept
Publié le 8 septembre 2023

Les Blues Mountains nous auront offert un véritable arc en ciel de couleurs.

Grandes parois de grès aux nuances de gris et d'orangés, pistes de terre ocres, immenses forêts aux camaïeux de verts, larges choix de fleurs multicolores, oiseaux aux plumages blanc, jaune, rouge ou vert, couchers de soleil aux teintes roses et violettes, friends de toutes les couleurs accrochés aux baudriers pour se retrouver parfois un peu vert de peur au- dessus du dernier point et finir chaque jour avec les bouts de doigts de plus en plus roses, complètement usés, poncés par ce caillou si abrasif.

Et le bleu alors, me direz-vous ? Le ciel ! Un immense ciel bleu au- dessus de nos têtes et un grand soleil qui nous auront accompagnés durant plus de trois semaines, illuminant et réchauffant notre séjour dans les Blueys.

Une chance inouïe en plein hiver !

Une highway un peu trop fréquentée, une bande d'arrêt d'urgence parfois étroite, des pilotes Australiens qui ne coopèrent pas vraiment, un pourcentage de pente positif constant, un froid mordant et un furieux vent de face. Voilà à quoi ressemble notre ascension des Blueys : le paradis ça se mérite !

Nous découvrons ensuite un très vaste plateau boisé de forêts d'eucalyptus, entaillé par de profonds et larges canyons bordés par des parois magnifiques à perte de vue.

Les incendies passés ont bien laissé quelques cicatrices çà et là mais au milieu des troncs calcinés, la végétation a, au fil du temps, largement repris ses droits. Ici c'est le printemps en plein hiver, il y a des fleurs partout !

Quelques kangourous traversent la route dans la pénombre, tels des fantômes montés sur ressort. Debout sur leurs deux pattes arrières, ils sont plus hauts que nous lorsque nous sommes assis sur nos vélos, autant dire que les retours de nuits à bicyclette sont épiques.

Autour de notre tente, des possums font des folies nocturnes, faisant disparaître ou grignotant nos chaussures !

Chaque matin des cris d'oiseaux inconnus nous réveillent et juste avant que la nuit ne tombe, ce sont eux aussi qui sonnent la fin de la journée de grimpe. Il est l'heure de rentrer au nid pour les animaux volant et grimpant. Ainsi sont rythmées nos courtes et fraîches journées d'hiver...

Après plus de trois mois à ramper tant bien que mal dans des fissures granitiques ou à se faire quelques frayeurs dans des dalles lisses au Japon puis en Corée du Sud, j'avoue qu'en arrivant en Australie, je rêvais à un peu de "vacances" en matière d'escalade !

Mais c'était sans savoir que, ici aussi, la grimpe "trad" est encore une fois souvent au rendez-vous, ce qui veut dire que le baudrier est toujours bien lesté de coinceurs de toutes tailles,et qu'on observe minutieusement une ligne avant de s'y lancer, bien prudemment, ensuite.

Pour se reposer parfois l'esprit, il y a bien quelques voies "équipées", mais là encore, ce n'est pas complètement les vacances, puisque seulement une tige est à demeure sur le rocher et qu'il faut, avant de mousquetonner, enfiler avec précaution au risque de les voir disparaître dans le vide, ces ingénieuses petites plaquettes amovibles qui portent le joli nom de "carrots bolts"... Autant dire qu'il ne faut pas être complètement au taquet au moment de clipper et que le sac à pof est parfois bien encombré de toutes ces "carrots".

Et puis pour les jours de vraies vacances, il y a les véritables voies sportives, clé en main. Celles où l'on doit forcer et où l’on peut chuter en toute sécurité. Des scellements ou des goujons, quelques dégaines au baudrier, des lignes parfaites et juste le plaisir de se mouvoir sur le rocher.

Nous nous régalons de tout cet éventail de voies qu'offrent les Blueys.

Quelle que soit la manière d'assurer sa sécurité, les lignes sont toujours magnifiques et le rocher complètement incroyable : Parfois sculpté, quelquefois parsemé de trous, occasionnellement rayé de fissures rectilignes, souvent compact mais toujours très très adhérent.

Mais les Blueys ce sont aussi de longues strates horizontales et de très grands mouvements bien obligatoires. Une escalade très morpho mais pas si désagréable. Je n'ai pas souvenir de m'être déjà autant étirée en grimpant. Je pourrai presque espérer avoir gagné quelques centimètres en grimpant ici et en ayant réussi à attraper des prises paraissant totalement inaccessibles.

Ici, on oublie le 4c ou le 8a, on jongle plutôt avec des 14, 19, 24 ou des 32 !Nouveau système de cotations, nouvelles références. Rien ne sert de vouloir vraiment comparer à quelque chose qu'on connaît.

Le topo est si gros, les secteurs à découvrir sont si nombreux et les jours passent si vite. On aurait envie de visiter chaque falaise, d'essayer chaque voie et de rester encore et encore dans les Blueys. Dans le topo, des petites étoiles signalent les plus belles voies, autant dire que cela ressemble à un véritable ciel d'été !Parmi celles- ci, on trouve des itinéraires parfaits, des chemins verticaux comme ayant été créés pour qu'un grimpeur s'y délecte : la fissure à la bonne taille, la prise juste là où elle aurait manqué si elle n'y avait pas été, le petit pied qui solutionne le problème.

Certaines de ces lignes resteront gravées à jamais, des voies qu'on n'oubliera certainement pas.

Eternity, Janiceps, Guillotine, Gentleman, Blast off, Kaladan.... Ce sont les petits bijoux des Blueys.

Les perles bleues...

Et puis dans la série des voies étoilées, il y a aussi les constellations : les "multipitches", les grandes voies de plusieurs longueurs.Il y a Yak Banquet et ses 22, les plus durs de la terre ou Weldparty et ses belles longueurs faciles mais vraiment verticales.

De belles approches sur les plateaux, des accès par des ravins, des vires suspendues ou de vertigineux rappels...

Il y a Smegadeath, ses longueurs variées, cette alternance de rochers orangés et noirs, son toit renversant.

Et puis au milieu de ces étoiles, il y en a une qui vaut bien un bout entier de voie lactée : Hôtel California. Un itinéraire astucieux, un rocher infiniment sculpté, une immense traversée et des longueurs sur le fil d'une grande arête. 350 mètres de pur bonheur, c'est bien la première fois qu'on se sera payé le luxe d'un hôtel avec autant d'étoiles !

Et puis cette escale dans les "montagnes bleues" n'aurait pas été si belle sans les pépites qui y habitent.

Toutes ces personnes retrouvées ici par le plus grand fruit du hasard et toutes celles dont on a fait la connaissance pour notre plus grand bonheur ! Les voyages ne seraient pas aussi beaux sans les rencontres... et les Blues Mountains non plus !

8
sept
8
sept
Publié le 16 septembre 2023

Avais-je déjà rencontré une personne qui portait aussi bien son prénom ?

Le sien lui va comme un gant : Belle

Son sourire vous illumine, sa bienveillance vous enveloppe, sa gentillesse vous réchauffe le cœur et dans sa jolie maison, on se sent comme chez soi !

C'est par le plus grand des hasards que nous poussons sa porte, quelle rencontre magique et quels chouettes moments nous attendaient dans cette chaleureuse petite maison !

À peine arrivés, une jolie photo accrochée au mur retient notre attention... c'est troublant, nous avions exactement le même cliché dans notre chambre en France. Un ami qui lui a offert. Étrange, nous aussi...

Une fois de plus la petitesse de ce vaste monde nous surprend, les connexions que créent ces lointaines montagnes coiffées de givre et battues par les vents aussi. Avoir un ami en commun à l'autre bout de la planète c'est déjà fou mais quand il s'agit de celui-ci... Rolo nous surprendras toujours !

Chez Belle, nous n'avons pas seulement passé de merveilleuses soirées au chaud, goûté de délicieux plats, bu du maté, fait des crêpes et une tarte aux pommes, nous avons aussi partagé de rares mais precieuses journées d'escalade et j'ai adoré son grand sourire quand la première "carrot" fut à portée de main !

Durant des jours, Bruno s'est adonné à son activité favorite : couper du bois, le fendre et le regarder brûler pendant des heures.

Quant à moi, j'ai partagé du temps avec Belle, l'Artiste. Grâce à elle et sous ses conseils bienveillants, j'ai découvert la linogravure et la magie de l'impression.

J'ai découvert qu'on pouvait donner vie à un bout de plastique, y sculpter une histoire, y ajouter ses émotions et sa sensibilité. Ma curiosité et mon impatience furent à leurs combles lorsqu'une fois le travail terminé, je me suis saisi d'un rouleau et d'un énorme pot de peinture rouge : la surprise ne faisait alors que commencer.

Mes yeux se sont écarquillés, mon cœur a battu plus fort quand est arrivé le moment de soulever la feuille de joli papier japonais.

J'ai ensuite eu la chance de découvrir le bonheur de partager nos idées farfelues, nos avis illuminés et de mêler et entremêler, tel le vent dans nos cheveux, nos inspirations jusqu'à ce qu'une œuvre à quatre mains voit le jour sous nos yeux émus !

Maintenant, je sais que j'ai aussi une amie en Australie.

***

Un jour, dans ma maison,

Une maison avec des murs,

Des murs de bois, de pierres, de terre, de paille, que sais-je...

Pas de ceux en toile qui tremblent quand dehors le vent souffle fort,

Pas de ceux qui s'écroulent quand la neige pèse trop lourd,

Pas de ceux qui changent chaque jour de jardin,

Des murs sur lesquels on peut épingler nos souvenirs, des projets, des choses aussi inutiles que belles,

Sur l'un d'eux, dans un beau cadre, il y aura cette femme aux oiseaux,

Ce vent tempétueux dans ses cheveux, Ces montagnes du bout du monde,

Elle sera le souvenir ineffaçable de cette rencontre magique,

De ces moments partagés, de ces lignes de vie entremêlées,

De cette gravure à quatre mains, de nos sensibilités mélangées,

Et puis, il y aura cette couleur à l'image de ces instants,

En or.

16
sept
16
sept
Publié le 20 septembre 2023

Un quinzième et seizième mois en vadrouille, ça donne ça :

◇ Un nouveau pays 🇦🇺

◇ Une 15 ème capitale 🏤

◇ 11980 km

◇ Du vélo, du train et de la voiture 🚗🚂🚲

◇ Des nouveaux amis👩🏻👦👱‍♀️🧑👩👱‍♂️🧑‍🦳

◇ 38 Journées de grimpe 🧗‍♀️

◇ 6 spots 🤎

◇ 23 secteurs visités 💯

◇ 8 grandes voies 👌

◇ Du rocher de malade 🤩

◇ Des dents en plus ⚙️

◇ Des nuits très fraîches 🥶

◇ Des nuits dans un lit 🌙

◇ Des animaux nouveaux 🦜🦙🐀🦘🦚🦎🐦🐍🕷

◇ Des centaines animaux vivants 🙂 et morts 😥

◇Un bout de chaussure en moins 🙊

◇ De la linogravure 🖼

◇ Du bucheronnage 🪓

◇ Un matelas avec 22 fuites réparées 🥵 et enfin un matelas neuf 🥳

◇ Des plantes et des fleurs folles 🌿🌺🌼🌳🌸🌴🌾🍃🪷🏵

◇ Des grands feux🔥

◇ 2 musées 🏰

◇ 1 dispute et des "vacances" solo

◇ 1 projection de film

◇ De la nourriture sauvée de la poubelle 🤩

◇ Plein de dessins 🖌

◇ 2 paquets à destination de la France 📦

16
sept
16
sept
Publié le 28 septembre 2023

J'ai quelquefois songé à écrire quelques lignes au sujet de la malédiction des tapis de sol qui nous poursuit depuis des mois.

L'intérêt me paraissait aussi limité que la qualité des produits sur le marché. Puis soudainement, j'eus l'impression que le temps fut venu !

Combien de bivouacs durant ces quatorze mois sur la route ?

Combien de matins nous sommes nous réveillés sur des matelas en partie ou complètement dégonflés ?

Combien de nuits avons nous passées l'un ou l'autre à souffler de toutes nos forces, toutes les deux heures dans une valve pour tenter de redonner un peu de gonflant à un matelas en perdition ?

Combien de parties de courte paille et de chifoumi pour savoir qui de nous deux dormira directement sur le sol ou s'offrira le luxe d'un "vrai" sommier ?

Combien de badigeonnages d'eau savonneuse, de bulles, de tubes de colle et de réparations ?

On ne les compte plus...

Je ne vais pas vous raconter toutes ces fuites, ce nombre faramineux de rustines ni même les mauvaises nuits ou encore les marques et les modèles à éviter à tout prix.. quoique cela pourrait être assez intéressant pour les futurs voyageurs au dos fragile...

Après à peine deux mois de voyage, nos matelas ont commencé à fuir, doucement mais sûrement.

La quantité d'air s'échappant étant proportionnelle à la profondeur des cernes se creusant sous nos yeux, témoignant de nuits pas toujours aussi réparatrices qu'on l'aurait pourtant mérité !

Si la crevaison est la bête noire du cycliste, elle s'avérera aussi être celle du campeur ! Et si jusque là, on peut se sentir incroyablement chanceux de n'avoir percé que très rarement les chambres à air de nos pneus, on ne peut pas en dire autant des tapis de sol de notre chambre !

Pour être tout à fait honnêtes, il faudrait préciser que jamais nous n'avons du réparer un de nos matelas pour une réelle crevaison mais plutôt pour palier à des fuites liées à des problèmes de fabrication. Des thermosoudures créant un point de faiblesse et lâchant les unes après les autres...

Ainsi en quinze mois, nous avons mis à l'épreuve sept tapis de sol différents. Tantôt amenés de France, tantôt achetés ou récupérés en chemin... Ainsi on aura dormi des mois sur une fine mousse d'isolant de maison trouvé dans un entrepôt de bricolage au fin fond du Kirghizistan.

Dans les endroits plus chics, on s'est entendu dire par un vendeur que ce type de produit n'était absolument pas conçu pour dormir de nombreuses nuit dessus : quelques week-ends par an, une nuit par semaine tout au plus !

Utilisation trop intensive, dira-t-il.

Ah... intéressant...

Il faudrait donc acheter deux matelas à plus de 200 balles chacun tous les deux mois...

Évidemment, avant, on dormait tous sur de simples bout de mousse et tout allait bien mais on n'y passait pas non plus toutes les nuits de nos vies !

Par le plus grand des hasards, il se trouve que le dernier spécimen en date fut un modèle des plus onéreux offert par un ami japonais et commença à fuir encore plus rapidement que ses congénères. Nous nous en accomoderons plus de 3 mois.

Mais là où cela devient plus intéressant, c'est qu'il sagit d'une marque Australienne, pays dans lequel nous venons justement de poser nos pneus.

Après quelques passages dans des "shops" ne pouvant nous apporter aucune aide significative, nous nous résignons à contacter le SAV de STS, comprenez par là : le Service Après Vente de Sea To Summit.

Durant plusieurs jours, un échange endiablé de mails s'ensuit...

Et après quelques jours, pour tout dire la mauvaise foi de STS commence à nous taper un peu sur le système : "Oui, c'est un défaut de fabrication mais non, nous ne ferons rien sans preuve d'achat."

Les blagues vont bon train et nous parlons à peu près dix fois par jour de matelas et de Sea to Summit avec les Australiens avec qui nous partageons un bout du camping gratuit de Mount York.

Notre réseau japonais fonctionne à merveille et nous parvenons finalement à enfumer le SAV australien et nous nous repointons avec une magnifique facture tout en japonais.

La bataille est terminée, les belles nuits peuvent commencer !

Katoomba, Blue Mountains :

Un matelas tout neuf dans une main et une preuve "d'achat" (pour la prochaine fois !) dans l'autre, un sourire jusqu'aux oreilles et deux cyclistes heureux : l'histoire aurait pu se terminer ainsi.

Pourtant je ne saurais expliquer pourquoi, j'eus à cet instant l'intime conviction que cette histoire à dormir dehors et sur le sol bien dur n'était pas réellement terminée.

Quelques jours plus tard, nous grimpons dans un secteur peu fréquenté des Blueys, ce genre d'endroit où de belles fissures rayent le rocher et où l'on rencontre de belles personnes.

Notre inconnu du jour est inrratable, il est immensément grand, ressemble à Edmund Hillary et je pourrais mettre facilement mes deux pieds dans chacun de ses chaussons. Il est aussi hyper sympa et en quelques secondes, il nous livre de précieux conseils, nous donne un moyen de le contacter et nous invite chez lui à quelques centaines de kilomètres d'ici.

C'est quelques heures plus tard que nous apprendrons que cet immense et très sympathique bonhomme n'est autre que Tim McCartney, le co-fondateur de Sea to Summit (mais qui n'a aujourd'hui plus de part dans l'entreprise).

Quel petit monde et quel incroyable hasard des rencontres !

Nos chemins se recroiseront puisque Tim reviendra grimper avec nous quelques jours plus tard et qu'il nous ramènera même chez lui en voiture puisqu'il a un super porte vélo.

Il nous fera visiter les spots de grimpe autour de chez lui (dont un presque dans son jardin !), nous offrant le thé au lait entre deux voies, nous hébergera quelques jours, nous invitera pour de délicieux repas mais ce n'est que lorsque l'on se retrouvera à boire nos bières dans ce surprenants verres et que l'on comprendra toute la subtilité et le dénouement de l'histoire.

Tim fut le premier Australien au sommet de l'Everest en 1984.

Mais surtout, nous apprendrons qu'il est parti à pied du Golfe du Bengale, ce qui fait de lui le premier homme à s'être attaqué au plus haut sommet de la planète en partant du niveau de la mer, de 0 à 8848 mètres, de la mer au sommet : "Sea to summit".

What a story !

C'est ainsi que tout s'éclaire. Ce qui est inscrit en lettres orangées sur notre matelas prend désormais tout son sens.

Ce surprenant personnage, son généreux accueil et ces bons moments partagés ensembles conclurent donc à merveille cette drôle d'histoire à coucher dehors !

8
oct
8
oct
Publié le 8 octobre 2023

Yepaaaaa ! Escal'À 2 roue fera escale à Béziers le 16 octobre ! Rendez-vous à la Maison de la Vie Associative (MVA) à 20h pour grimper sur nos porte-bagages et faire un tour de vélo à travers l'Asie et l'Océanie version accélérée et sans trop se fatiguer !On fera également quelques pauses sur les plus belles falaises rencontrées sur le chemin...

N'oubliez donc pas vos rustines et votre baudrier ! Un petit film de 45 minutes version "road movie" sponsorisé par "zéro budget production" réalisé en chemin avec les moyens du bord. C'est à dire avec un appareil photo, une petite caméra, un simple smartphone, un accès à l'électricité la plupart du temps limité, un carnet à dessin et beaucoup d'energie, d'amour et d'envie de partager ! Les Japonais, Coréens et Australiens ont déjà profité de quelques projections mais ce sera une grande première en France !

Un temps d'échange où nous serons en direct live (comme à la télé !!) est prévu à la suite du film ! À très vite ! Ps: Toi aussi, tu aimerais embarquer quelques minutes sur nos vélos, découvrir ces images et nous aider à trouver un moyen de projeter ce film proche de chez toi ?! Tu as une idée lumineuse ? Tu connais un lieu sympa ? Une association intéressée ? Des grimpeurs ou des cyclistes que ca intéresserait ? Tu veux nous aider à continuer ?! Envoie nous un message !

[email protected]

Ou laisse nous un p'tit commentaire ici !

11
oct
11
oct
Publié le 20 octobre 2023

Tadaaaa !

Mon premier article dans un magazine Coréen !

Si l'un de vous comprend ce qu'on raconte là dedans, on lui offre une balade d'une journée sans effort, tout confort, assis sur notre porte bagage en mangeant des glaces au chocolat !

Merci encore au CAC (le Corean Alpine Club) pour l'accueil et ces chouettes moments de partage, c'était en juin dernier à Séoul !

21
oct
21
oct
Publié le 23 octobre 2023

Il y aurait beaucoup à dire sur la grimpe en Australie : ce cadre magnifique, ce grès incroyable, ces parois mythiques, cette éthique stricte, ces lignes surprenantes, toutes aussi effrayantes qu'attirantes.

J'essaie justement en ce moment même d'aligner quelques mots au sujet de ce caractère si particulier qui fait que la grimpe à la sauce Australienne est si savoureuse.

Mais je dois avouer que ça patine un peu... J'écris, j'efface, je reformule, je reviens en arrière, je choisis d'autres mots sans vraiment les trouver assez justes, je cherche d'autres formulations sans qu'elles ne me paraissent assez transparentes.

Pas simple d'expliquer précisément une telle aberration : "j'y vais mais j'ai peur !"

Et quand il faut rationaliser une énormité comme "j'ai eu trop peur mais j'ai trop aimé : là ça se complique encore davantage.

Peut être qu'une fois les mots justes trouvés, tout s'éclairera et une certaine logique viendra justifier ce drôle d'exercice tout aussi physique que cérébral (et je dirai même intellectuel une fois devant une feuille blanche !).

Trouver un juste milieu entre relater les sensations d'une poule mouillée qui essaierait de grimper sur le toit de son poulailler, de celles d'un koala qui avancerait d'un demi centimètre en 10 minutes ou encore celles d'un singe téméraire qui parfois tenterait de prendre de vitesse la difficulté suivante. Sait-on jamais que le mur se redresse encore davantage ou que la peur vient se loger dans sa petite tête poilue.

Bref, je fais un peu du sur place, j'avance autant que je recule. C'est pas simple !

Ceux qui se sont déjà retrouvés à stagner sur les mêmes petites prises inconfortables avant d'oser s'élancer un câblé entre les dents, dans un mur sans ligne de faiblesse évidente comprendront probablement cette sensation.

En même temps, ce coup-ci, je ne risque ni la chute ni la tombe mais juste un texte moyen qui ne serait pas l'exact reflet de ce que je peux ressentir dans ces drôles de moments sur le rocher !

En attendant de trouver le bon angle d'attaque et de tenter d'exprimer au mieux, à défaut de trouver une explication logique, de pourquoi on aime tant s'élancer, le baudrier plombé de ferraille dans ces murs lisses et compacts, voici une petite sélection de photos de ces pérégrinations verticales allant de la balade de santé au veritable chemin de croix !

Ne vous fiez pas toujours aux sourires (crispés !) ni aux nombres de points présents sur le rocher !

Comme dirait mon grimpeur et écrivain préféré : "Mieux vaut un micro câblé de plus qu'une fille en moins... surtout si cette fille, c'est moi !"

Le Grec aurait pu être Australien !

23
oct
30
oct
30
oct
Publié le 5 novembre 2023

Un dix-septième et un dix-huitième mois sur la route, ça donne à peu près ça :◇ 19 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷🇦🇺🇳🇿

◇ 12776 km 🚲◇ Une 16ème capitale ◇ Du vélo 🚲, 1 avion ✈️, 1 bateau⛴️, de la voiture 🚙

◇ Pas mal de pluie ☔️◇ Une tente cassée 😭

◇ 7 koalas 🐨, des milliers chauve-souris 🦇, des pingouins 🐧, des otaries 🦭, des kangourous🦘 des milliards de vaches 🐂, de moutons 🐑 et un escargot géant 🐌

◇ Des montagnes 🏔

◇ Des volcans 🌋

◇ Des arcs en ciel 🌈

◇ Une projection de film 📽◇ Une projection et visio en France 🇨🇵

◇ Une séance d'escalade en salle 🥳◇ 24 journées en falaises 🧗‍♀️

◇ 1 journée de bloc 🙈

◇ 9 spots différents 🤗

◇ De la spéléo 🔦

◇ De l'alpinisme ⛏️

◇ 7 musées 🏤

◇ Une cousine et un petit cousin retrouvés 👩‍👦

◇ Des japonais retrouvés 6 mois plus tard et des voyageurs retrouvés un an après 😍

◇ Des rencontres 🤗

◇ 3 anniversaires 🎂◇ Un début de printemps ☀️👡

◇ Des fleurs et des plantes multicolores 🪷🌱🪻🌿🌻🍀🏵🌺🌳🌾🌸

◇ Des grandes forêts 🌲🌳

◇ Du bricolage 🪚🔧

◇ Une livraison de vêtements et de matériel 👚🧦👙👕👖🩲🥾◇ Une nouvelle coupe de cheveux 🪮

◇ Des petits dessins et un troisième carnet terminé 🖌📂

◇ Une bonne nouvelle 💰

7
nov
7
nov
Publié le 9 novembre 2023

Quels points communs voyez-vous entre la grimpe à Arapiles et un pot de "Vegemite" ?

À priori, aucun.

L'une est une activité de loisir qui consiste à escalader un bout de rocher à partir duquel il faut ensuite trouver un moyen de redescendre dans un joli coin Australien quand à l'autre c' est un aliment qui se tartine sur un simple bout de pain.

Vous ne connaissez ni l'un ni l'autre ? Et vous vous dites que cette devinette est un peu tirée par les cheveux ?!

Je vous l'accorde et je vous dois bien quelques petites précisions...

La "Vegemite" est une espèce de pâte à tartiner étrange. Un petit bocal en verre marron, une étiquette rouge et un couvercle jaune. Une couleur sombre, une consistance lisse et brillante, une odeur peu attrayante, un goût très très salé... Visuellement, c'est un peu comme tartiner du cirage à chaussures sur du pain. Gustativement, c'est une expérience qui, de mon point de vue, n'est pas complètement inintéressante.

La population Australienne semble clivée en deux : les amateurs de Vegemite et puis ceux que cet aliment, aux allures de pétrole en bocal, dégoûte radicalement.

Quant à la grimpe au pays des kangourous et plus particulièrement sur cette mythique paroi d'Arapiles, on peut dire qu'elle a également son petit caractère bien trempé. Le petit jeu de la varappe australienne consiste à trouver un itinéraire "logique" pour prendre de la hauteur dans du rocher toujours raide, parfois lisse et souvent compact.

La première règle du jeu est de trouver l'enchaînement de mouvements parfaitement adaptés pour rejoindre le sommet de la voie sans chuter ni se reposer sur un point d'assurance, la seconde étant d'assurer sa propre (et toute relative) sécurité en plaçant soi même ses protections.

Le plateau de jeu étant, lui, du grès plus ou moins cuit (et donc plus ou moins glissant), vierge de tout point fixe pouvant servir à s'assurer : équipement minimaliste de rigueur !

Évidemment ces deux règles fondamentales se retrouvent grandement liées : on n'a forcément moins envie de chuter sur des protections amovibles. Ainsi une partie peut parfois prendre des allures de véritable petit combat. Pas tant au sens physique, encore que les bras et les mollets sont quelquefois mis à rude épreuve mais davantage au sens cérébral du terme.

Il s'agit quelquefois d'une véritable bataille philosophique entre le "ça", la "réalité", le "moi" et le "surmoi". Chacun tirant la couverture à lui et essayant d'imposer son point de vu,e en usant d'arguments tous plus farfelus les uns que les autres. L'envie, la folie, la curiosité, la sagesse et la raison réunis sur un même ring de boxe !

À ce petit jeu "en marge d'une société qui prône le risque zéro", il y a de nombreuses cartes à disposition dans la pioche :

"coinceurs câblés bien coincés !" ; "good friend !" ; "trop peur passe ton tour !" ; "bon bac pour se reposer et souffler !" ; "bonus : Relais en place !" ; "micro câblé qui fait flipper !" ; "bonus point en place : stopper bloqué !" ; "carrot bolt en vue !" ; "friend moisi, passe ton chemin !" ; "bras en compote, passe ton tour et repose toi !" ; "pieds sur une vire, respire !" ; "Chouette ! Fissure parfaite !" ; "coincement douloureux !" ; "Mauvaise surprise, pas de prise !" ; etc...

Et j'en passe des vertes et des moins mûres !

Évidemment, vous vous en doutez, on compte un plus grand nombre de certaines cartes que d'autres...

Ainsi on se retrouve parfois à réaliser de véritables guirlandes de micro cablés pour une fois, arriver au sommet encore tremblant et transpiran pour se rendre compte qu'il faut encore trouver de quoi bricoler un pseudo relais avec le peu de matériel restant à disposition sur notre baudrier, faire monter son second et trouver un moyen de redescendre sans abandonner aucun élément de son rack de matériel.

De la même sorte que beaucoup de gens n'apprécient pas la "Vegemite", tous les grimpeurs ne sont pas amateurs de ce style d'escalade épuré !

Quand les premiers colons ont débarqué ici à la fin du XVII ème siècle, ce n'était probablement pas dans l'intention ni d'ouvrir une usine de Vegemite, ni dans l'idée de s'accaparer les falaises des Aborigènes.

Tous ces gens attirés par ce nouveau monde espéraient plutôt fuir les crises qui sévissaient alors en Europe, accéder à la propriété et acquérir des terres à cultiver...

Mais d'où venaient tout ces nouveaux arrivants aux visages pâles, sortant de gros bateaux avec leurs valises en carton et que les Aborigènes ont probablement observé un brin étonnés ? Ces autochtones auraient-ils pu imaginer qu'aussitot arrivés, aussitôt servis, ces grands mecs roux et palichons se sentiraient si vite comme chez eux et les massacreraient sans état d'âme ?

Quitter son Royaume Uni natal pour commencer une nouvelle vie au pays des koalas, en voilà une drôle d'idée. Dans leurs bagages, ces britanniques ont inévitablement amené leur vision du monde, un bout de leur société, leur langue, leurs boissons, leurs maladies, leurs goûts culinaires mais aussi leurs sens bien connu de l'aventure.

Et c'est bien en se penchant de plus près sur ces deux derniers points que l'on peut envisager une prétendue solution à la petite devinette capilotractée.

Dans leurs valises, de la "Marmite". Une pâte marron fabriquée à base d'extrait de levure, au goût salé très prononcé et se dégustant étalée sur du pain. Un goût de Viandox ou de Bouillon Kub sur une tartine. La "Marmite" anglaise étant sans aucun doute la grand-mère de la "Vegemite" australienne.

De la même sorte qu'il faut un certain sens de l'aventure pour oser s'élancer dans un mur compact à la recherche de la moindre anfractuosité avec son gros jeu de stoppers accroché au baudrier, il faut être un peu "aventurier des papilles" pour oser planter sa cuillère dans un pot de pâte à tardiner salée qui dégoûte tous les gens autour de vous.

Ceux qui ont déjà grimpé au Royaume-Uni ou fréquenté des grimpeurs ou des alpinistes britanniques devraient sans difficultés entrevoir quelques similitudes en matière d'éthique. La grimpe en Australie est véritablement à l'image du style anglo-saxon à une différence majeure près : la hauteur. Sans exagérer, une falaise comme Arapiles équivaut en hauteur à 5 ou 6, parfois 10 rochers du Peak District empilés les uns sur les autres. On pourrait voir ça comme une chance, un cadeau de la nature mais lorsqu'il s'agit d'une activité au cours de laquelle, en cas de chute et avec des points de protection qui choisiraient de suivre le même mouvement descentionnel, le risque de s'écraser au sol est grand. Aussi je me demande s'il est plus avantageux de s'écraser de 6 ou de 60 mètres de haut ?

Alors oui, l'influence british est incontestablement, un gros point commun entre "Vegemite" et éthique de la grimpe australienne mais ce n'est pas tout...

On a beau aimer l'un et l'autre, apprécier ce drôle de petit jeu ou cet étrange aliment, on peut rencontrer un sentiment assez similaire et contradictoire dans les deux cas . Sur le moment, on ne saurait pas vraiment dire si on apprécie ou non.

Avoir de la "Vegemite" sur le bout de sa langue, c'est un peu comme se retrouver dans une position précaire, loin au dessus de son dernier petit coinceur. D'un côté, c'est fort en bouche, d'un autre côté, c'est un peu flippant. Bref, ce n'est pas le meilleur des moments à passer.En toute honnêteté, on pourrait se demander pourquoi s'imposer de telles épreuves. Je n'en ai pas la moindre idée mais ce que j'ai constaté, c'est qu'une fois la dernière bouchée avalée ou qu'une fois la voie terminée, tout s'adoucit subitement. Une fois le sel et la peur dilués, un goût plus agréable reste en bouche et déjà la mémoire ne sélectionne que les meilleurs souvenirs.

Il semblerait même qu'un petit goût de "reviens- y" ne tarde pas à pointer son nez : Quel paradoxe !

Et voilà qu'au risque de se casser les dents, vous vous rencordez, vous réorganisez votre porte matériel et vous vous apprêtez à repartir illico dans la ligne suivante mais avant ça...

Vous reprendrez bien une petite tartine de Vegemite ?!?!

14
nov
14
nov
Publié le 14 novembre 2023

Les fêtes approchent !

Vous aimeriez à la fois offrir un petit cadeau fait main (et avec amour) et soutenir deux voyageurs dans leurs aventures à deux roues ?

Avec le cadeau cyclo-solidaire, c'est possible !

En achetant et en offrant des boucles d'oreilles en céramique (crées avant mon départ), vous participerez à l'aventure d'Escal'À 2 roues en nous aidant à donner quelques coups de pédales de plus et ainsi boucler cette boucle autour du monde !

Comment ça marche ?

- 2 formes de boucles d'oreilles différentes ("dormeuses" ou "puces") et aussi des bagues.

- plein de modèles différents

- des petits prix (entre 7 et 14 €)

- des envois possibles (+ 1,8€ pour 20g ; 3€ pour 100g)

Comment faire ?

Mon petit lutin de maman est prête pour noël, il suffit de lui envoyer un message par whatsapp, elle vous envoie les photos des modèles disponibles, les tarifs et un rib. Vous choisissez vos préférées, vous faites un virement et hop ! Elle met ça dans une enveloppe et c'est parti pour un aller simple direction le pied du sapin !

Ça vous dit ?

C'est par là -->

0685364930

[email protected]


Merci à vous !

15
nov
15
nov
Publié le 20 novembre 2023

Définitivement les systèmes de visa et de temps impartis dans chaque pays ne sont pas fait pour les voyageurs escargots comme nous.

Encore moins pour les voyageurs lents qui perdent encore du temps dans leurs déplacements en s'arrêtant, en chemin, pour faire des acrobaties sur du rocher .

Une fois encore nous voici poussés dehors par un visa touristique de 3 mois qui expire. S'il est parfois simple de franchir une frontière terrestre et faire un saut de puce dans le pays voisin afin de refaire une nouvelle entrée dans le pays précédent et remettre à zéro son visa, cela s'avère beaucoup moins simple lorsque l'on se retrouve sur une île.

On aurait pu tout simplement décider de quitter le pays et de continuer notre chemin vers le suivant, mais c'était sans compter qu'on avait encore une tonne de choses à découvrir en Australie. Parmi celles-ci, une petite île et de fascinantes formations rocheuses aux airs de bout du monde: la Tasmanie. Traverser la planète et passer à côté de ces merveilles sans s'y arrêter devenait de plus en plus inenvisageable.

Il a donc fallu ruser et mettre aussi quelques- unes de nos convictions de côté pour trouver un moyen de nous retrouver à nouveau en Australie avec un visa tout neuf et à une saison optimale pour aller visiter la Tasmanie.

Les idées les plus farfelues nous sont venues à l'esprit : Traverser l'Australie en train pendant des jours, rejoindre la côte nord et nous rendre en bateau vers l'île de Timor, passer quelques jours à la plage et refaire le trajet en sens inverse. Aller à la nage en Nouvelle-Calédoni,e visiter un ami d'école et revenir en pirogue ou encore s'envoler dans une fusée pour un aller-retour express sur la lune.

Finalement un pays assez proche, deux grandes îles voisines, une visite à ma grande cousine, pas vue depuis des lustres et l'appel des grosses montagnes sont apparus comme une solution relativement raisonnable.

C'est dans ces circonstances que nous nous sommes retrouvés à sauter dans un avion pour la Nouvelle-Zélande après avoir acheté les billets les moins chers du marché.

Ceci était synonyme d'horaires à la noix, de ponctualité de ces derniers toute relative et que chaque gramme de bagage est compté.

Afin d'alléger considérablement la chose, les vélos resteront dans un grand hangar à Melbourne durant cet interlude et par cette même occasion un bout de notre liberté chérie également.

Nous voilà, tels deux voyageurs à deux pattes partant en vacances. Nous voici tels deux backpackers partant à la découverte du monde... à une énorme différence près : nous n'avons pas de sac à dos et le seul grand contenant que l'on ait réussi à se faire prêter est une grande valise en plastique avec une seule roulette sur deux en état de marche. Mobilité réduite, d'autant plus quand on sait que celle-ci est plombée par du matériel d'escalade et de bivouac. Comment ça, les gens voyageant avec des valises ne bivouaquent habituellement pas ?

Ajoutez à cela une tente aux arceaux brisés quelques jours avant notre départ d'Australie et le prêt d'un autre abri de toile vraiment minimaliste : Nous sommes tels deux SDF avec une valise à roulettes pour deux.Ces vacances en valise, furent pour nous une grande première et peut-être sûrement une grande dernière. Comment perdre sa mobilité en acquérant un tel objet ? Comment perdre sa liberté en abandonnant momentanément deux vélos ?

C'est ainsi que nous débarquons à Auckland fin octobre.

 Il n'est jamais trop tard pour prendre un virage à 180° dans sa vie !

De bien drôles de vacances dans les vacances allaient, alors, s'offrir à nous : une autre forme de voyage dans le voyage, un intermède à quatre roues, une pause pour les mollets, une parenthèse motorisée, un changement de rythme, de décor, de climat et de moyen de locomotion... il n'en fallait pas plus pour dévarier deux cyclovoyageurs.

Par chance, après une traversée de l'île du Nord en mode valise&autocar sous une pluie battante, nous débarquons à Whanganui chez ma cousine Lauriel.

Cela fait des années qu'elle habite avec ses enfants chez les kiwis sans que je n'ai jamais eu l'occasion de la visiter. C'est désormais chose faite !

Après quelques journées partagées, nous retrouvons une nouvelle forme de liberté de déplacements en transformant sa voiture en camping car, nous sautons ensuite dans un ferry : À nous l'île du Sud !

À suivre ...

20
nov
20
nov
Publié le 21 novembre 2023

Quand la rumeur court, que non loin se trouve une immense grotte, les taupes tendent l'oreille et pointent le museau !

Harwood Hole, c'est un très grand gouffre, un puits gigantesque, une jolie rivière souterraine et de longues galeries de quelques kilomètres permettant de traverser d' un versant à l'autre la montagne. Il n'en fallait pas plus pour éveiller la curiosité de 3 ex-spéléos reconvertis en voyageurs au long cours.

Descendre un puits de 176 mètres, ce n'est pas tous les jours que l'occasion se présente. Les taupes sont au comble de l'excitation.

Qui pouvait-on bien embarquer dans cette folle aventure ? Personne d'autre que le seul pyrénéen se trouvant en Nouvelle Zélande à cette période !

En quelques minutes, une battue à la corde statique de 200 mètres, pour descendre ce grand puits, est organisée. Chacun tente de faire marcher le réseau. On contacte l'ami d'un ami d'un ami d'un grimpeur croisé par hasard qui a probablement du matos spéléo au fin fond de son garage... mais qui n'est pas chaud pour le prêter à trois inconnus.

Nous rentrons de cette chasse au trésor complètement bredouille, pour autant la motivation reste au beau fixe et les idées les plus lumineuses comme les plus stupides fusent entre nous.

Nous sommes tels 3 prisonniers échafaudant un plan infernal pour tenter de s'évader de leur cellule, à une énorme différence près : certains cherchent à nouer draps ou ceintures pour sortir de leur trou alors que nous, nous cherchons au contraire à entrer dans ce maudit trou !

En toute irrationalité, nous partirons donc, pour cette aventure spéléo-logigue, déguisés en tenue de cyclistes et équipés comme des grimpeurs.

Ce qui veut dire que faute de combinaison spéléo, on se faufilera dans les étroitures en doudoune, que faute de combinaison néoprène, on barbotera dans les vasques en goretex. Un grigri et des reversos, un casque de grimpe et une petite frontale légère et à l'autonomie limitée viendront compléter la panoplie de l'aventurier des cavernes.

Et pour le grand puits alors ?

On a la solution ! Celle-ci consiste à réquisitionner un max de cordes d'escalade qu'on noue les unes aux autres jusqu'à toucher le sol.

70+60+60... 190

La stratégie semble fonctionner mais il persiste encore une inconnue sur les dix derniers mètres...

Les plus optimistes misent sur l'élasticité des cordes pour atteindre le fond, quand le plus prévoyant propose d'embarquer sa slackline et de finir le dernier rappel sur celle-ci !

C'est ainsi et sans davantage d'informations topographiques que nous nous retrouvons à nous laisser glisser le long des cordes dans ce gouffre gigantesque.

M'étais-je déjà retrouvée pendue au beau milieu d'un si grand puits ?

176 mètres dont un frac de 140m d'un seul jet, nous voilà donc plein gaz en train de réviser nos leçons d'école : Deux passages de nœuds obligatoire.

Lorsque nous touchons le fond du puits et que nos yeux se lèvent vers la surface, le trou lumineux nous apparaît si petit, c'est dire tout le chemin vertical déjà parcouru.

Guidés par le bruit de l'eau pour seule topo, nous rejoignons une magnifique rivière souterraine. Petits gours, cascades, étroitures et courants d'air bien marqués sont au programme. Quelques pas d'escalade au dessus des vasques bien pleines nous épargnent de plonger trop vite dans l'eau glacée.

Petits puits, petits ressauts et finalement quelques ploufs inévitables agrémentent la balade underground. Nous suivons le cours d'eau en prenant le temps de jeter un œil ébahis aux concrétions ça et là.

C'est franchement beau !

Après quelques heures de rando aquatique, la lumière du jour réapparaît enfin. Nous avons atteint le point -360m. Une dernière vasque plus profonde que ses voisines nous offre un dernier bain froid en guise de bouquet final et conclut à merveille cette balade qui grimpe instantanément dans notre top 3 des plus belles traversées souterraines !

Une fois à l'extérieur, il ne reste plus qu'à découvrir avec surprise sur quel versant de la montagne, ce cheminement souterrain nous a conduit et de retrouver un moyen de rejoindre l'entrée de la cavité.

Après quelques centaines de mètres de dénivelé et une heure et demi de marche, nous rejoignons un plateau puis retrouvons l'entrée du gouffre. La nuit est sur le point de débarquer mais il reste encore l'immense puits à déséquiper. C'est chose faite en mode express et nous sommes de retour à la case départ juste avant qu'il ne fasse complètement noir.

Le blanc de nos dents flashent dans la pénombre, sans mal, j'imagine que mes compagnons sont comme moi, ils ont le sorire jusqu'aux oreilles.

À la lueur des frontales, je perçois aussi leurs yeux brillants : ils pétillent autant que les boissons au houblon qui se trouvent entre leurs mains. Tout cela en dit long sur l'aventure que l'on a vécue, les bons moments partagés et la belle et grande surprise du jour !

21
nov
21
nov
Publié le 25 novembre 2023

Pour voyager 3 minutes sous terre sans risquer de se cogner la tête ni de rester coincer dans une étroiture, c'est par ici :

24
nov
24
nov
Publié le 29 novembre 2023

Ça vous est déjà arrivé de vous retrouver dans un coin où les sites de grimpe ne courent pas les rues ? Et de devoir chercher mille astuces pour rendre une journée sur un spot de grimpe pas terrible en une journée plus attractive ?

Si oui, je veux bien vos idées, si non, en voici une !

Recette pour une compet' parfaite :

*Prenez tout d'abord un petit secteur du joli nom de Mt Horrible,

*Trouvez 3 grimpeurs motivés,

*Faites en sorte qu'ils soient présentables pour passer à la TV.

*Commencez par purger le site, cette activité faisant également office de cérémonie d'ouverture de la compétition (pensez à filmer pour la rediffusion sur YouTube !)

*Répertoriez et sélectionnez les lignes les plus logiques et les plus belles fissures,

*Nommer une voie en honneur de l'événement et de l'ambiance : RTM = Restauration des Terrains en Montagne

*Fixez ensuite quelques règles du jeu :

Ce sera un challenge par équipe de 3 consistant à enchaîner à vue toutes les voies du secteur. Affinez un peu la stratégie au sein de l'équipe. Pour chaque voie :

1 grimpeur grimpe en tête en posant les protections

1 grimpeur grimpe en tête sur les points en place

1 grimpeur grimpe en second pour déséquiper

Et on change à chaque fois.

*Gérez un peu l'organisation : ravito, supporters, assureur, photographe et 1 corde fixe à installer pour la descente, aucun relais n'étant en place.

Ça donne une compétition 100% coopérative et 100% trad !

Voilà un petit jeu débile pour transformer avec un peu d'imagination une banale journée de grimpe dans un mini secteur sans prétention en véritable défi où tu finis la journée super tard, avec les bras bien lourds et les joues fatiguées à force de rigoler !

Bilan et bonus de la journée : on finit tous les 3 sur le podium !

Merci les gars de m'avoir suivi dans ce délire !

24
nov
24
nov
Publié le 2 décembre 2023

Une fois n'est pas coutume : ici, de la grimpe mais pas de corde, du bloc mais pas de crashpad, des chutes mais pas de bobo et un article mais presque pas de texte !

Quelques photos de cette atypique journée à Castle Hill et de ses jolis blocs :

30
nov
30
nov
Publié le 6 décembre 2023

Connaissez-vous la p'tite histoire de deux cyclistes qui jouent aux alpinistes ou préférez-vous que je vous raconte la vaste blague de deux guides au guidon qui vont faire un tour à la montagne ?

Un jour, un inconnu avait demandé à je ne sais plus qui de célèbre:" Pourquoi vouloir grimper sur les montagnes?" Ce dernier avait alors répondu naïvement, ces quelques mots : "parce qu'elles sont là".

Et bim ! Toujours le même problème, au détour d'un virage, les montagnes apparaissent soudain : sommets enneigés, énormes glaciers et vallées interminables. Les Alpes Néo Zélandaises se dévoilent et nous nous retrouvons plantés devant, le nez en l'air, bouches bées, équipés comme deux touristes ayant subitement des désirs d'alpinistes.

Dans notre placard à matos ambulant, il y a bien une multitude de choses mais pas la moindre trace d'un objet piquant de type crampons ou piolets. Cela ne ferait pas bon ménage avec les chambres à air paraît-il !

Nous voilà donc partis en quête de ces objets là. Celle-ci s'avérera être aussi interminable que désespérée.

Festival de coups de téléphone...

Nos expériences passées, nous ont plutôt mal habitués. On a toujours trouvé un alpiniste, quelquefois un guide, prêt à nous prêter ce qu'il nous manquait.

Ici c'est différent. Nous avons beau contacter des guides, téléphoner aux compagnies de guides et appeler les magasins de montagne de toute l'île du Sud, nous ne trouvons absolument rien à louer ni à nous faire prêter.

Le temps passe, le mauvais temps s'installe et les sommets blanchissent encore davantage. Le projet alpinistique est sur le point de nous passer sous le nez !

À peine 4 jours avant d'embarquer sur un ferry et quitter l'île du Sud, alors que nous étions prêt à abandonner, la situation se débloque subitement.

Voilà que par hasard nous nous sommes retrouvés équipés de la tête aux pieds par Thomas, un guide français vivant ici, à Wanaka. Une fois encore, le hasard ne manque pas de nous étonner... small world : Bruno a été le formateur de Thomas à l'Ensa, il y a quelques années !

Voici donc nos deux cyclistes équipés de toute la panoplie du parfait petit alpiniste : chaussures, crampons, piolets, bâtons, raquettes, Dva, pelles, sondes, sacs à dos, guêtres, gants, moufles, corde, broches à glace, microtrac et pieux à neige...

Un timing serré, une fenêtre météo courte, du vent annoncé et de la neige fraîchement tombée, qui dit mieux ?

Ajoutez à cela une longue approche qui devrait mettre à rude épreuve des jambes davantage habituées à pédaler qu'à marcher et des pieds qui n'ont pas vu de chaussures rigides depuis des siècles !

L'Arête Sud-Ouest du Mount Aspiring paraît alors être le programme parfait pour un stage remise en forme des "guidoguidons".

La remontée d'une vallée interminable d'une vingtaine de kilomètres et désespérément plate fera office de mise en jambe. De nombreux passages à gué permettent de refroidir les petits pieds qui auraient vite tendance à surchauffer, voir à clignoter... Cela humidifie par la même occasion chaussettes et baskets.

Après environ 5h de marche, il est l'heure de passer à la vitesse supérieure en activant le mode" kilomètre vertical":

1000 mètres de dénivelé dans une forêt raide dans laquelle il faut mettre en pratique toutes ses compétences d'accrobranchistes !

Lorsque nos randonneurs sortent enfin de la forêt, quelle n'est pas leur surprise quand ils constatent que le refuge se situe encore à environ 300 mètres de dénivelé plus haut et qu'il va maintenant falloir patauger dans la neige fraîche en short et en basket !

C'est avec les pieds et les genoux glacés qu'ils atteignent enfin la terrasse du refuge, en début de soirée. C'est ce qui arrive lorsqu'on commence une randonnée de 7 à 8 h, en début d'après-midi. De vrais touristes vous dis-je !

Ils profitent du luxe d'avoir un toit sur la tête, ce soir là. Ce n'est pas tous les jours que l'occasion se présente aux vagabonds de dormir à l'intérieur.

Une courte nuit plus tard, il est 3h lorsqu'une frontale vissée sur la tête, les" bidochons" chaussent leurs crampons. Assez vite, ils comprennent qu'il va aussi falloir chausser les raquettes et allumer les DVA ! Il faudra cependant attendre que l'un d'eux passe la jambe jusqu'à la hanche dans une crevasse pour que ces deux inconscients se disent que c'est peut-être le moment judicieux pour sortir la corde ! Malins les types !

Après 4 ou 5 heures de marche à un bon rythme, malgré la neige fraîche qui leur donne du fil à retordre, ils ne sont toujours pas au pied de la face.

Pourtant celle ci semble à portée de main... L'heure tourne, le vent forcit mais l'espoir fait vivre: ils persévérent !

Déjà plus de 1000 mètres de dénivelé et quelques kilomètres avalés lorsque les difficultés techniques et stratégiques apparaissent enfin. Aussi étonnant que cela puisse paraître, les deux touristes ne sont pas vraiment fatigués et plutôt prêts à en découdre avec la suite du programme.

Une pente raide et toute plaquée de neige ventée puis un passage de rimaye à la fente généreuse donnent accès à une arête raide.

Chacun y va de ses pronostics au sujet du risque de faire partir cette plaque de neige instable... où passer ? À droite, à gauche ? Se décorder, se rallonger, mettre un point ? S'assurer ?

Quelle idée lumineuse d'avoir choisi de s'alléger des DVA, pelles et sondes quelques minutes plutôt tôt sur le glacier en contrebas !

Une fois le passage réussi et la crainte du risque d'avalanche évacuée, voici nos cyclistes face à un gouffre oblique : la rimaye.

Ce n'est pas évident mais ça finit par passer. Les choses se compliquent considérablement lorsqu'ils se rendent compte que l'arête neigeuse est plus proche d'une arête glaciaire !

Voici maintenant Pimprenelle et Nicolas dans la peau de véritables alpinistes !

Les voici, pendus à leurs piolets, les pointes avant des crampons qui mordent la glace et l'œil avisé de trouver un peu de glace à peu près correcte où visser une broche de temps en temps.

Il s'avère que les flaques de bonne glace ne courent pas les rues et que l'histoire se transforme vite en progression "à corde tendue" avec un point ou deux vraiment moisis entre eux...

C'est pas gégé à la montée mais qu'en sera-t-il à la descente, quand il faudra désescalader ce millier de mètres de dénivelé, en solo ou pire encore, en solo encordé ?

Voici nos deux alpinistes à nouveau plongés dans le grand bain de la haute montagne. Quelques centaines de mètres de gravis ainsi, chacun à une extrémité de la corde et au milieu, des points qui ne supporteraient ni le point d'un alpiniste, ni d'un cycliste, ni même d'un huluberlu voulant jouer au montagnard.

Voilà que le vent s'invite à la fête et que l'ambiance devient assez inhospitalière.

Étions-nous vraiment venus chercher cela ?

Le sommet est tout proche mais la face se raidit encore davantage et toujours pas l'ombre d'un point qui tienne la route pour s'assurer correctement. L'heure tourne et les voyants du registre "descente en sécurité " se mettent à clignoter en orangé ! Serait-il l'heure d'arrêter de jouer ?

Ça y ressemble...

Demi-tour. Les cyclistes étaient venus voir de beaux paysages, mission accomplie. Les alpinistes étaient venus pour bartasser un peu, sans se mettre trop en danger, c'est gagné.

La laborieuse désescalade à reculons de l'arête, suivie du long chemin du retour sur le glacier nous confortent dans l'idée que le chrono aurait largement explosé si nous avions poussé jusqu'au sommet, que la neige aurait encore davantage chauffée et que nous aurions d'autant plus brassé.

Nous retrouvons le refuge environ 14h après l'avoir quitté selon la formule "rentrés vivants, rentrés contents !"

Pour le sommet, c'est raté, pour un "petit" tour de remise en jambe c'est réussi ! La prochaine fois, on prendra un guide, mais pas de ceux qui se baladent dans la montagne avec des autocollants collés sur leur sac à dos !

Le lendemain un long retour vers la vallée clôturera à merveille ces trois journées hors du temps, un atterissage en douceur et à nouveau un changement de décor.

De retour en ville, les jambes fatiguées, les pieds abîmés, les épaules défouraillées et les joues grillées par le soleil, on change de catégorie de glaciers : On passe des crevasses aux cornets, c'est tellement moins fatiguant !

30
nov
30
nov
Publié le 9 décembre 2023

Avoir un toit sur la tête... voilà quelque chose qui ne nous arrive pas souvent, alors dormir dedans, c'est pour nous synonyme de grand luxe !

Même lorsqu'il s'agit d'un petit refuge non gardé, même quand il aura fallu 6h de marche (au pas de course !) pour l'atteindre, même lorsqu'il aura fallu traverser quelques passages à gué rafraîchissants, cheminer dans une grande forêt pentue en s'accrochant aux racines, même lorsqu'il aura fallu patauger en short et en basket dans de la neige refroidissante avec nos gros sacs sur le dos et même que comme les sacs pesaient déjà beaucoup, il fallut se contenter d'un seul duvet pour deux !

Malgré tout ça, cet abri de tôle est pour nous l'équivalent d'un palace et ça veut dire que ce soir là, il ne faudra pas monter la tente pour la 529ème fois du voyage !

30
nov
30
nov
Publié le 12 décembre 2023

Tongariro alpine crossing, c'est une journée de randonée entre lacs émeraudes, montagnes de feu, cônes parfaits, paysages désertiques et fumerolles.

Tongariro, c'est comme un voyage de quelques heures sur la lune !

Mieux que des mots, des photos !

30
nov
30
nov
Publié le 15 décembre 2023

Lorsque nous avons accosté sur cette petite île du bout du monde, nos vélos chargés pesaient au moins aussi lourd que toutes nos espérances.

La Tasmanie a des merveilles à offrir et nous nous demandions si nous serions à la hauteur pour profiter, ne serait-ce que de quelques unes, de ces perles rares. Nos bagages, alors s'alourdissaient en plus de quelques kilos supplémentaires : incertitudes, doutes et craintes.

Serons-nous assez ambitieux pour aller côtoyer ces parois de légende ?

Serons-nous suffisamment courageux pour nous jeter dans le vide pour un voyage parfois sans retour ? Serons-nous assez fous pour nous retrouver à la base de l'une de ces tours de pierre avec pour seule issue possible: réussir à la gravir ? Serons-nous prêts à être éclaboussés d'eau salée, pendus au relais ou bousculés par une grosse vague dans les tout premiers pas d'escalade ? Serons-nous prêts à être trempés du casque aux chaussons, submergés par une vague rebelle qui défendrait l'accès au donjon ?

Serons-nous assez vaillants pour nous sortir du piège dans lequel nous nous serons volontairement fourrés ?

Tant de questions qui alourdissaient encore nos baudriers déjà plombés par une ribambelle de coinceurs de toutes tailles.

À cela vint s'ajouter une multitude d'autres choses dont seuls Éole et Poséidon détiennent le secret.

Horaires des marées dans la poche, un œil constant sur le dernier bulletin météo, un regard attentif à la prévision de la hauteur des vagues et le nez toujours en l'air, tel une girouette à l'affût du moindre courant d'air pouvant devenir grosse tempête.

Nous voilà tels deux marins ayant des ambitions d'alpinistes.

Ajoutez à cela des murs verticaux, parfois tapissés d'une pellicule de sel et une difficulté technique loin d'être anodine concernant l'escalade en elle-même. Tous les ingrédients d'une aventure avec un grand A semblaient réunis, laissant présager une épopée salée et sûrement pimentée.

Compte tenu de tous ces paramètres, nous comprîmes vite qu'il nous faudrait être à la fois mobiles, réactifs, opportunistes et un peu plus ambitieux qu'à notre habitude pour pouvoir espérer se tenir un jour debout au sommet de l'une de ces mythiques tours rocheuses. Ces mêmes qualités qui ne sont pas forcément celles de prédilection de deux voyageurs à deux roues, ayant un entraînement de grimpe intermittent et des vélos chargés comme des bateaux-cargo pleins de containers.

Nos projets étaient beaux, nos rêves étaient grands, à l'image de ces tours de pierre élancées semblant danser au dessus de l'océan. Des bouts de parois longilignes que l'on imaginerait presque pouvoir facilement effleurer du doigt tant la proximité peut sembler grande.

Mais ne nous y méprenons pas... L'instant suivant, alors que l'on considère plus sérieusement la situation, alors qu'en se penchant, on observe le vide qui entoure de toutes parts ces tours minérales, alors que les flots qui se déchaînent à leurs bases, alors que la colonie de phoques ricanne de nos futures acrobaties, alors qu'on prend conscience de la raideur de la face et qu'on tente d'imaginer un prétendu itinéraire pour rejoindre le sommet, l'histoire prend une toute autre tournure.

Tels des phares de dolorite restant fièrement debout contre vents et marées, ces totems de pierre apparaissent aussi inaccessibles que des forteresses inviolables.

Léchés par les vagues, battus par les vents, réceptacles parfait pour accueillir tout le sel en suspension dans l'atmosphère, ces monolithes de roches, ces orgues solitaires en équilibre me sont apparus ainsi : de précieuses fleurs au cœur desquelles, on aurait la chance de pouvoir aller fourrer son bout de nez, de humer le parfum et goûter au nectar que de rares instants dans une vie.

Et puis un jour, on décide de prendre son petit vélo, d'emporter sa maison avec soi, de traverser un bout de la planète. En chemin, on aura eu le temps et mille occasions de se questionner sur la signification d'un tel périple, sur cette quête de l'inutile. On se sera demandé pourquoi se donner, quelquefois, tant de mal et pourquoi choisir de tant se fatiguer. Cent fois, on aura failli perdre notre précaire équilibre et laisser quelques plumes dans la bataille. Voyager sur le fil. Persévérer,appuyer d'autant plus fort sur les pédales, tout en tâchant de maintenir ses petits bras assez en forme.

Et puis, un jour, on se retrouve presque, sans s'y attendre, à l'opposé même du point de départ sur le globe et on se réveille sur une jolie île en forme de cœur baignant dans la Mer de Tasman.

Un beau matin, sans que l'on en croit ses yeux, on se retrouve nez à nez avec l'une de ces tours de légende. Intimidés mais plein d'espoir.

On se demande si l'on sera assez audacieux pour aller décrocher la lune. Et puis on se rapelle que ce sont nos rêves qui nous ont conduits jusqu'ici et que parfois les planètes s'alignent.

Mer calme, vent faible et peu de houle, tempête de ciel bleu, rocher sec, l'excitation est à son comble..

Au bon endroit, au bon moment.

Maintenant c'est à nous de jouer.

Aujourd'hui, nous avons rendez-vous avec ces tours du bout du monde !

30
nov
30
nov
Publié le 21 décembre 2023

Cap Raoul, c'est une longue arête au dessus des flots composée d'une succession de colonnes volcaniques.

Tout au bout, là bas, juste avant que la roche ne plonge définitivement dans l'océan se trouvent deux totems de pierre. Deux tours en équilibre qui comme deux aimants ont attiré les grimpeurs et leurs ont demandé de dénicher l'itinéraire le plus astucieux pour rejoindre leurs bases.

Parmis ces deux là, il y a Pole Dancer et sa fantastique grimpe sur le fil d'une arête verticale.

Le plus beau 22 du monde diront certains, le plus dur diront d'autres...

Toujours est-il que pour se retrouver au pied de Pôle Dancer c'est déjà une petite épopée :

2 heures de marche, 2 rappels, 30 minutes de bartassage, 2 longueurs, une traversée d'arête, 1 rappel, un peu de marche, 1 longueur, 1 rappel...

La formule selon laquelle ce n'est pas le sommet le plus important mais le chemin qui y mène prend ici tout son sens !

Sans compter qu'après cette splendide longueur de grimpe et s'être réjouit d'être les plus chanceux du monde une fois au sommet de cette belle tour, il reste aussi le chemin du retour :

2 rappels, 1 longueur, 1 traversée d'arête, un peu de marche, 1 longueur, 2 rappels, de la marche dans les bartas, une remontée sur corde et 2 h de marche.

Au total, étonnamment ça donne presque plus de rappels que de longueurs de grimpe et un timing de 13h vélo-vélo : c'est ce qu'on appelle une journée... Cool Raoul !

30
nov
30
nov
Publié le 29 décembre 2023

Ces derniers temps, nous avons beaucoup grimpé et peu roulé... mais il a quand même fallu pédaler pour se rendre d'une tour rocheuse à l'autre et parfois il a vallu rouler vite pour arriver sur place et pouvoir grimper avec le bon créneau météo, attraper le bon horaire de marée basse et profiter d'une période sans vent...

Je crois qu'il y a même un jour, où on avait jamais roulé aussi vite, on se serait cru au sprint final d'une épreuve du tour de France !

Comme quoi il suffit d'avoir un bel objectif sur la ligne d'arrivée, pour nous pas de coupe dorée, de champagne ou de bouquet de fleurs mais des formations rocheuses et des paysages incroyables !

Ps: Et les routes de Tasmanie sont parfois bien pentues pour des cyclo-grimpeurs et des vélos chargés !!!

30
nov
30
nov
Publié le 2 janvier 2024

*Rencontrer le diable*

Quelle probabilité de chance avions-nous de rencontrer un diable de Tasmanie ?

À peu près aussi peu que de rencontrer quelqu'un qui nous invite dans sa coloc où de rencontrer quelqu'un d'autre qui étudie cette petite bête endémique de l'île. Si on pousse la chance un peu plus loin encore, il se trouve que cette personne là, part en mission d'observation le lendemain dans la péninsule de Freycinet, là où nous avons justement prévu de nous rendre pour grimper les jours suivants.

Voilà comment nous sautons , nous et nos vélos , dans le grand pick-up de l'université de Tasmanie et comment nous embarquons avec Cyril et Alix pour nous retrouver dans le rôle d'assistants naturalistes !

40 pièges de capture, des kilos d'agneau frais et de quoi faire des prélèvements en tout genre...

Il n'y a plus qu'à espérer que le diable soit au rendez-vous !

*Pourquoi capturer des diables ?*

Le diable de Tasmanie est une espèce de marsupial carnivore , charognard ne vivant qu'en Tasmanie. Présent aussi , il y a quelques centaines d'années , sur le continent. Le diable a depuis complètement disparu. C'est un animal nocturne et solitaire. Il a un épais pelage noir avec quelques tâches blanches, un profil trapu, une mâchoire très puissante et pousse des cris stridents. Le diable est une espèce menacée, sa population a fortement chutée depuis les années 1990 durant laquelle est apparu un cancer transmissible par morsure qui a depuis tué des dizaines de milliers d'individus. Cette maladie provoque des tumeurs autour de la gueule et empêche l'animal de se nourrir, il finit par mourir de faim.

L'opération consiste à poser une quarantaine de pièges dans un rayon d'une vingtaine de kilomètres, les visiter un à un chaque matin. Glisser dans chaque tube un morceau d'agneau et l'accrocher à une ficelle qui, par un ingénieux système, maintient la trappe ouverte. Celle-ci se referme une fois le bout de viande touché. Une fois l'animal capturé, il est manipulé à l'intérieur d'un sac et différentes mesures sont prises :

Scan de la puce (ou pose de cette dernière si l'animal est encore inconnu), poids de l'animal, taille de la tête, des dents et de la queue, observation du museau, de la gueule et de la langue, de la poche marsupiale et des mamelles actives pour comptabiliser le nombre de petits, prélèvements d'excréments, de poils et de sang et biopsie pour les individus semblant atteints.

*Une invitée surprise*

Nous voici partis pour cette première" cueillette" de diables. Lors de la première tournée, nous avons constaté que toutes les boîtes étaient restées ouvertes, toutes sauf une ! Lorsque nous entrouvrons la trappe et glissons un œil curieux à l'intérieur, surprise, ce n'est pas un diable que nous avons attrapé mais un "quoll".

Le quoll comme le kangourou, le wallaby, le wombat, le diable... fait partie de la famille des marsupiaux, ce qui veut dire que les petits naissent, font un rapide passage à l' extérieur pour rejoindre la poche où se trouvent les mamelles. Ils resteront dans celle-ci jusqu'à être plus autonomes.

Contrairement au diable qui est plutôt un charognard, le quoll est un chasseur. Voilà probablement pourquoi il a davantage été attiré, ce premier jour, par la viande fraîche. Peut-être un peu trop fraîche au goût d'un diable d'ailleurs (mais pour deux cyclistes c'était parfait ! ...Oui, oui, on n'a pas résisté à l'appel de la côtelette !)

L'occasion d'observer de près ce joli animal.

Quelques observations nous apprennent que cette femelle, d'environ 2 ans et de 2kg et qq, est déjà "pucée" et donc connue des services de l'université de Tasmanie sous le nom d'Alix !

Pour la petite histoire, Alix se fera prendre dans ce même piège plusieurs jours de suite. Nous arrivons donc à deux conclusions : soit ce petit animal n'a aucune mémoire, soit il adore trouver et se régaler de viande à moindre effort !

*Attraper le diable par la queue !*

Le 2ème jour, nous comptons sur la chaleur de l'après-midi précédente pour avoir initié la transformation de nos belles côtelettes en steak parfum charogne. Nous nous levons de bonne heure pour ne pas faire davantage attendre les animaux ayant pu avoir été pris, dans les pièges, durant la nuit.

Ce matin, la plupart des boîtes sont toujours ouvertes et certaines fermées nous donnent quelques faux espoirs. Des possums coquins ou des wallabies curieux auraient-ils joué, par là, durant la nuit ?

Et puis, l'un des pièges fermé semble contenir un petit habitant. On entrouve la trappe avec précaution et l'on jette un œil à l'intérieur : ce coup-ci, c'est sûr, nous allons faire connaissance avec le diable !

Ou plus exactement, nous allons rencontrer une diablesse... Good morning Rosie !

Une jeune femelle ayant déjà été capturée lors d'une mission précédente: 2 ans et toutes ses dents ! Un bon petit diable en pleine forme, sans aucune trace de tumeur apparente.

Afin de réaliser tous les relevés scientifiques, l'animal, incroyablement calme, est placé dans un grand sac, la tête plongée dans l'obscurité, chaque partie de son corps à analyser étant sortie tour à tour du sac : tête, museau, queue, poche marsupiale, pattes, oreilles...

C'est fou comme ce petit animal aussi hargneux soit-il, avec ses congénères, est, au contact de l'homme, si tranquille. Il se laisse manipuler sans aucune résistance. On lui ouvre la gueule, on lui mesure les dents, on lui soulève la langue, on lui prélève même du sang en lui piquant l'oreille... et il se laisse faire comme une grosse peluche.

Le comble est atteint quand, au cours d'un massage de l'oreille (pour que le sang s'écoule correctement dans les tubes ), il pousse un gros soupir tranquille !

Quelques minutes plus tard et une fois toutes les informations notées, il est l'heure de rendre à Rosie sa liberté !

Appareil photo en main, le temps d'appuyer sur le déclencheur et on ne voit déjà plus que la queue du diable !

30
nov
30
nov
Publié le 8 janvier 2024

S'il est un lieu où l'on perd ses repères, en matière d'escalade, c'est bien sur la péninsule de Tasmanie. Située au sud d'Hobart, c'est le point le plus méridional de l'Australie, le plus proche de l'Antarctique. Que de similitudes comportementales entre un pingouin et nous-mêmes, à la vue de ses intimidantes formations rocheuses.

L'endroit est sauvage, isolé, et notre première journée de grimpe nous demande 13h vélo/vélo... L'approche même, si elle est longue, est particulièrement roulante. J'entends par là un chemin large, bien tracé, jamais de pentes excessives, avec de très belles marches en pierre de taille, et parfois du textile qui apparaît sous le gravier. Tient, ni les pierres ni le gravier ne semblent provenir des alentours !Nous sommes dans un parc naturel, le camping sauvage est formellement prohibé. Ces caps de bout du monde peuvent "heureusement" être survolés en hélico, ou approchés en bateau surmotorisé...

Ces moyens n'élucideraient-ils pas l'aspect non endémique de ces pierres, de ces tonnes de gravier et de ces kilomètrages de textile pour stabiliser les chemins? Le comble était atteint lorsqu'on s'est retrouvé face à un panneau interdisant le parcours d'un sentier dans un certain sens. Après un rapide coup d'œil sur la belle carte adjacente et quelques explications, on comptend qu'un itinéraire de 4 jours de "refuge en refuge" en sens unique est organisé par une boîte privée, avec une dépose en bateau. Rien d'autre que de la privatisation à l'intérieur d'un parc. Grrr..

Heureusement, nos objectifs sont autres.Ces caps aux origines volcaniques, ont laissé en équilibre quelques "doigts" dominant l'océan. La dolorite, roche qui les constitue, est généralement de très bonne qualité: dure et extrêmement adhérante. Bien nous en a pris, de nous acoutumer au style par quelques centaines de mètres d'escalade les jours précédents. Le caractère " hauturier" des ascensions exacerbe l'ambiance. Les voies, atteintes souvent en rappel, démarrent au ras de l'eau. La houle, formée loin dans l'océan Indien, vient claquer dans des porches avec une rumeur constante. Le courant généré par ces mouvements agite des algues de plusieurs dizaines de mètres et s'ajoute à çà, l'imaginaire de la profondeur de ses abysses qui prolonge la paroi sur laquelle nous nous agrippons ! De profonds cris guturaux d'une colonie de phoques, l'odeur, et les "splash" des baleines qui s'ébattent non loin, vous y êtes !

On met le cap vers Totem Pole, seulement 65 mètres d'escalade mais dans notre niveau max, où il faut, en plus, se protéger par ses propres moyens sur certaines portions.

Après une heure et demie de marche, il est là, en contrebas, coincé dans une étroite gorge. Ça commence par : accrocher une corde en fixe, se laisser glisser dessus et penduler au-dessus des flots tout blancs d'écume pour rejoindre sa base. Après quelques essais infructueux, je parviens grâce à un précis crochetage en monodoigt dans une des plaquettes du relais à établir ce dernier.

Lara me rejoint, en prenant soin de ne pas laisser échapper la corde, qui par une simple mais efficace manœuvre nous permettra de rejoindre la terre ferme. Grimper ensuite jusqu'à la terrasse médiane, un 24 bien salé, entendez par là un peu glissant... Il faut commencer par aller poser, à bout de bras, un friend dans une inversée, sous peine de se retrouver tout arnaché dans le jacuzzi. L'étroitesse du lieu accélère la brise, et un bon effet venturi soulève des embruns. Une superbe terrasse nous accueille à mi-hauteur. Vite, le soleil va se carapater ! La suite est encore plus ardue ; les astuces accumulées ces dernières décennies sortent du chapeau.

On ne pourra pas revendiquer une escalade "by fair means", mais l'intention y était. Nous nous retrouvons bien émus sur la terrasse sommitale. La boule que j'avais au ventre m'a quitté.

Reste six bons mètres à remonter par une belle fissure vierge de tout équipement et quelle n'est pas ma surprise d'arriver sur le sommet, lui aussi exempt de tout armarage.

Moment tant attendu, mettre en place la fameuse tyrolienne. Gaffe à ne pas trop tirer, sous peine de faire basculer le fragile édifice !!! Je pars sur un brin, contre-assuré, on ne sait jamais, par notre bonne vieille corde. 🤪.

Je double la corde pour Lara, façon rappel horizontal.

En pleine mer, c'est le festival, les baleines sont aussi excitées que nous, et le manifestent par des sauts des plus audacieux.

Oserai-je un c'est "la baleine sur le totem" au risque de le faire s'écrouler à jamais... ?!

30
nov
30
nov
Publié le 14 janvier 2024

Dix-neuf mois sur la route, ça donne :

◇ 19 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷🇦🇺🇳🇿 (🇦🇺)

◇ 12998 km 🚲

◇ Une nouvelle île 🏝️

◇ Du vélo 🚲

◇ 2 bateaux ⛴️

◇ Du bus 🚌

◇ 3 avions ✈️

◇ Des rencontres 🧓🧑‍🦰🧒🧑‍🦱🧔🧑🧑‍🦳

◇ Des retrouvailles👩‍❤️‍💋‍👩

◇ Des animaux nouveaux 🦄

◇ Des wallabies rigolos et des bébés wallabies trop mimi🦘

◇ Des possums cocasses🦦

◇ Des gros phoques 🦭

◇ Des baleines hyperactives🐋

◇ Des echidnas super drôles 🦔

◇ Une cueillette de quolls🐹

◇ Une étude scientifique sur les diables de Tasmanie 👹

◇ Des tours de rochers🧗

◇ De la grimpe de malade👍

◇ De l'escalade au dessus de l'eau 💦

◇ Des grandes voies 🪨

◇ Des rappels⛓️

◇ De supers bivouacs 🏕️

◇ Une tente réparée 🥳

◇ Des paysages magnifiques 🏞️

◇ De la randonnée 🥾

◇ Du vélo sur sentier 🚲

◇ Une grande lessive de printemps 🛀

◇ De belles couleurs 🩷💛🩵

◇ De bons repas 🍭🍦🥗🧁🍫🍰🍜🥘🧀🍞

◇ Des petits dessins et un 4ème carnet démarré 🎨

◇ Des cadeaux cyclo-solidaires 🎁

30
déc
30
déc
Publié le 17 janvier 2024

Deux photos de nos dernières nuits en Océanie...

Cela fait maintenant 10 mois que nous voyageons dans des pays où le coût de la vie est élevé.

Comment voyager longtemps dans ces contrées là quand on a un très petit budget ?

Paradoxalement ce n'est pas dans ces endroits là que nous profitons du plus grand confort, même si la nourriture est beaucoup plus variée et que l'on a moins de chance de tomber malade à cause de celle-ci, il est parfois frustrant de faire des courses tant il faut surveiller les prix et calculer ce que l'on peut se permettre d'acheter ou non.

Les poubelles des grandes surfaces et des boulangeries australiennes nous ont parfois nourris pour notre plus grand bonheur et nous avons parfois été invités, pour autant l'alimentation reste notre principale source de dépenses quotidiennes.

Quant au fait de dépenser de l'argent pour dormir, cela fait bien longtemps que nous avons abandonné l'idée !

Comme une impression de jeter de l'argent par les fenêtres (de la tente !).

En terme de budget, manger assez ou dormir dedans, il faut choisir ! Et quand on pédale et que l'on est constamment affamé, le choix est vite fait !

Voilà maintenant presque 11 mois que nous n'avons pas dépensé un seul centime pour un hébergement.

Thaïlande-Malaisie-Japon-Corée du Sud-Australie-Nouvelle Zélande-Tasmanie :

nous avons parfois campé dans des parcs, stades ou sous des ponts en plein centre ville, dans des bâtiments en construction ou sur des aires d'autoroute, dans de jolis coins sauvages ou dans des aires de camping gratuites, nous avons parfois été invités dans des maisons ou dans des jardins, nous avons passé des nuits dans des gares, des aéroports, dans des ports, dans des parkings souterrains, dans des bus, trains ou ferrys...

Quoi de plus simple finalement que de poser sa tente n'importe où et se reposer le temps d'une nuit avant de repartir de plus belle ?

Évidemment on nous regarde parfois d'un drôle d'air mais jamais nous ne nous sommes faits virés et nous n'avons dû déménager en pleine nuit à deux exceptions près : un arrosage nocturne du terrain de rugby et un arceau et double toit explosés par le vent !

2
janv
2
janv
Publié le 31 janvier 2024

On vous souhaite tout le bonheur du monde !

Et surtout, surtout... N'oubliez pas !

Laissez toujours l'opportunité à votre vie de pouvoir prendre un virage à 180°si ça lui chante !

8
janv

Grâce à de belles initiatives, Escal'À 2roues part pour une petite tournée en France et le film sera projeté bientôt peut-être proche de chez vous !

Comment ça marche ?

Des ami(e)s, client(e)s, connaissances éloignées ou parfois de sympathiques inconnus se sont motivés à trouver une date et un lieu qui puisse accueillir un petit public et soit équipé d'un écran et vidéo projecteur pour projeter le film. De notre côté, nous faisons tout pour être reliés à une connexion internet ce jour là afin de pouvoir passer un bon moment en compagnie des spectateurs et répondre à quelques questions !


♡ Dans les Hautes Pyrénées, dans le Tier lieu la Soulane à Jezeaux :

Le 12 janvier à 18h30 :

Projection du film dans ce sympathique lieu à découvrir suivi d'une visio et d'un concert !

Merci Françoise !!

Info par là :

https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=pfbid0GSUqcxx3FTfyNnMy4WtcSmNBy36S5jzHTx6Nz5BtzLRz5f6ALULY29J2PE5zweggl&id=100064898432012&mibextid=Nif5oz


♡ Le 15 janvier à Grenoble !

À 20h30 ici :

Club Alpin Français Grenoble Oisans

16 Rue Marcel Peretto, 38100 Grenoble

Les details par là :

https://www.cafgo.org/index.php?option=com_cafgo&view=event&event=11357

Merci Anaëlle et le Caf GO !

♡ Le 15 février à Chambéry !

À 19h à la salle de grimpe Wattabloc

340, chemin des Carrières - 73230 Saint-Alban-Leysse

Merci Mélanie, Basten, Marion, Élodie et Ilona !


♡ À Pau en fevrier !

En cours de préparation...

Merci Mélanie !!

14
janv
14
janv
Publié le 1er février 2024

HolalaPaz... Ohlalalatête !

Comment faire un très long voyage en remontant le temps et en gagnant des heures de vie ? Comment traverser un grand océan pendant une douzaine d'heures et atterrir une heure plus tôt que l'heure à laquelle on a décollé ?

Comment poursuivre le soleil durant toute une nuit entière ?

36h de voyage, 2 nuits blanches, 2 longues escales, 15h de décalage horaire et un passage de 0 à 4000 mètres d'altitude, qui dit mieux ?!

Il faudra bien quelques jours pour s'en remettre !

Ajoutez à cela un atterrissage aux premières heures du jour, un remontage express des vélos dans le hall de l'aéroport avec le ventre vide et les yeux pas vraiment en face des trous et une grande dégringolade de l'aéroport situé sur le plateau d'El Alto jusqu'au centre ville de la Paz, au fond de la cuvette, via une autoroute et sous une pluie glaciale.

La Paz est une des capitales les plus hautes de la planète. Entre gaz d'échappement et air raréfié en oxygène, il est certain que ce n'est pas ici que l'on respire le mieux du monde. Accrochée sur un flanc de colline, la ville s'étend sur des kilomètres et sur une hauteur démesurée : entre le haut (El Alto) et le bas de la ville (la zona sur), il y a pas moins de 800 mètres de dénivelé.

Bruno rêvait de se payer un jour cette grande descente jusqu'au centre ville à vélo, c'est chose faite ! Gore tex sur le dos, capuche enfoncée jusqu'au bout du nez, mains gelées aggripées aux freins, pantalons qui épongent tout le liquide gris s'écoulant sur la route et chaussettes qui se remplissent d'eau au cambouis.

"À la Paz, il ne pleut jamais !" m'avait prévenu mon compagnon de galère. En effet, ce coup-ci doit être l'exception qui confirme la règle !

On pourrait presque croire que la saison des pluies a même décidé de débuter ce matin si l'on en croit la couleur du sol qui n'a pas du être rincé depuis un bout de temps !

Cette eau grisâtre mêlée à une poussière, à priori sableuse, aura non seulement raison de nos vêtements exceptionnellement propres mais aussi des patins de freins, en une quinzaine de kilomètres à peine... Une usure incroyablement accélérée : Du jamais vu !

Dans les rues d'El Alto, on zigzague tant bien que mal dans le trafic dense de minibus chargés jusqu'au toit qui eux-mêmes tentent de se faufiler entre des bus un peu plus gros qu'eux. Ça klaxonne modérément et ça se joue un peu au contact mais ceci dit, la Paz ce n'est pas New Delhi non plus !

Sur les trottoirs, nos roues se fraient un chemin entre les étals et les nombreux piétons. Cela ressemble à un slalom entre les imposantes jupes des cholitas.

Plus tard, alors que l'autoroute s'évapore dans le centre ville de la Paz, nous buttons sur une de ces fréquentes manifestations que connaît la capitale bolivienne. Aujourd'hui ce sont les femmes qui sont en colère, sous leurs parapluies, elles sont nombreuses et ont fait faire le déplacements aux journalistes venus les interviewer. Protester, manifester, brandir des banderoles, bloquer la circulation, est quelque chose de courant ici. Ça fait du bien de rencontrer à nouveau un peuple qui réagit.

La semaine dernière, c'était les mineurs et la semaine prochaine qui seront les prochains manifestants ?

Nous sommes à présent au cœur de l'immense ville de briques orangées. Les ruelles deviennent étroites et archi- raides, les pavés sont humides et glissants. Notre cardio monte illico à 300 battements par minute nous rappelant instantanément que les vacances, au niveau de la mer sont belles et bien terminées !

Bienvenue à 4000 !

Voilà, à peu près, à quoi ressemble cette petite mise en bouche bolivienne !

Il ne reste plus qu'à rattraper ces quelques heures de sommeil en retard, à boire des litres d'infusion de feuilles de coca, à manger quelques salteñas (les empanadas locaux) et à faire le plein de globules rouges !

Suite au prochain épisode...

15
janv
15
janv
Publié le 5 février 2024

Entre maisons de parpaings orangés accrochées aux flancs de la colline et rues pavées archi raides, entre marchés de rues, cholitas aux chapeaux tout ronds et aux grosses jupes volumineuses et télécabines colorées :

Bienvenue à la Paz !

La Paz en paz...

15
janv
15
janv
Publié le 7 février 2024
17
janv
17
janv
Publié le 11 février 2024

Comme dirait le Renaud de la grande époque : "En décembre, c'est l'apothéoseLa grande bouffe et les p'tits cadeaux".

Mais ici pas de sapin de Noël en vue, ni de bons repas ni même de truffes en chocolat ou de dinde aux marrons avec laquelle s'étouffer en perspective.Ici décembre c'était un peu comme octobre, avril ou juillet, ici décembre c'était ... "vélo" !Mais décembre, c'était quand même la fête aussi, des moments partagés en famille puisque c'était vélo dans le Sur Lipez en famille !

On vous présente Aude, la 2ème cyclo-voyageuse de la famille Sourzac ! Un trio pour une étape d'un mois à 6 roues !Une sœur, un frère, la copine du frère : la logique bolivienne (et un écart d'âge un peu suspect ) veut que ce soit plutôt papa, maman et moi, la petite fille 😋... qu'à cela ne tienne, cela reste un Noël en famille !

Et puis décembre, il a raison Renaud, c'était quand même aussi l'apothéose ! Aurait-on pu imaginer rouler un jour dans des paysages aussi incroyables ?Un désert minéral à perte de vue, des volcans aux cônes parfaits à l'horizon, des lacs multicolores qui parsement le paysage aride, des lamas et des vicuñas qui broutent des cailloux, des flamands roses à plus de 4000 mètres d'altitude, des sources naturelles d'eau chaude et des immentissimes étendues de sel. En avant donc pour de nouvelles aventures "a tres bicis" ce coup-ci !

1
fév
1
fév
Publié le 14 février 2024

Un vingtième mois sur la route en quelques chiffres, cela donne à peu près ça :

◇ 21 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷🇦🇺🇳🇿 (🇦🇺) 🇧🇴🇨🇱

◇ 14978 km de vélo 🚲

◇ Un nouveau continent 🌎

◇ Une 17ème capitale et des télécabines 🚠

◇ Du vélo 🚲

◇ Une équipe agrandie👨🏻🧔👩🏻‍🦱🙎‍♀️

◇ Un long séjour à plus de 4000 m d'altitude 😶‍🌫️

◇ Un sommet à 5920 m 🏔

◇ Des lamas 🦙, vicuñas, viscachas🦦, flamands rose 🦩

◇ Un réveillon de Noël 🎄, un réveillon de jour de l'an 🥂, un anniversaire 🎂

◇ Du sable et de la tôle ondulée 🥴

◇ Du sel 🧂

◇ Du vent et du soleil☀️🌬

◇ Des bivouacs 🏕

◇ Un peu de grimpe 🧗‍♀️

◇ Des cactus 🌵

◇ Des bains d'eaux thermales ♨️

◇ Un concert 🎼🎻

◇ Des rencontres 🧓🧑‍🦰🧒🧑‍🦱🧔🧑🧑‍🦳

◇ Une nouvelle année 🥳

◇ Des retrouvailles 🫂

◇ Un cimetière de trains 🚂 et un cimetière de voitures 🚙

◇ 2 casas ciclista 🏠

◇ Du poulet au riz et aux patates 🥔🍗🍚

◇ 1 projection en Bolivie et 2 en France 📽

◇ Des petits dessins 📔

1
fév
1
fév
Publié le 15 février 2024

Quelques kilomètres supplémentaires à un compteur qui n'a jamais vraiment bien fonctionné depuis le début du voyage...

Ça veut dire qu'on calcule un peu à l'arrache en additionnant grosso modo les grandes distances parcourues les unes aux autres et que toutes les petites passent à la trappe !

Et comme on n'est pas bon en maths et un peu tête en l'air, l'écart entre la distance totale que l'on pense avoir parcourue et celle que l'on a réellement faite se creuse à vue d'œil !

Peu importe, selon mes mauvais calculs, c'est dans le Sud Lipez que nous avons passé le cap des 13 000...

Et puis je me questionne sur quelque chose... On pourrait peut-être imaginer un bonus à tous ces kilomètres dans le sable, les cailloux et sur la tôle ondulée pour lesquels on passe deux fois plus de temps à se taper les fesses sur la selle, ceux pour lesquels on avance deux fois moins vite pour parcourir moitié moins de distance à la fin de la journée ? Ceux pour lesquels on est deux fois plus fatigué et ceux pour lesquels on a deux fois plus transpiré ?

Un truc comme au Scrabble quoi !

"Kilomètre compte double" ✖️2️⃣

1
fév
1
fév
Publié le 15 février 2024


La meilleure invention du monde ?

La bicyclette répondront certains...

Et la seconde alors ?!

Les "casas ciclistas" ajouteront d'autres.

Une "casa ciclista", c'est quoi ?

C'est un lieu mis à dispo des cyclistes par des amoureux du vélo et plus précisément du voyage à vélo. Autrement dit, il s'agit souvent de gens qui ont rouler un peu partout autour du monde, qui aiment le vélo de voyage et/ou qui souhaitent aider et accueillir sous un toit des cyclo voyageurs qui sont loin de chez eux depuis des mois. Ce sont des gens qui savent tout le reconfort que peut représenter un endroit où se poser quand on est en mouvement permanent. Des gens qui savent qu'habituellement dormir dedans a un coût et que les voyageurs s'offrent rarement ce luxe.

Les "casas ciclistas" c'est un style de "warmshower" mais version collectivité et sans que l'eau de la douche ne soit d'ailleurs toujours très chaude. La chaleur est de toutes façons ailleurs !

Une simple pièce, un sommaire appartement, une petite maison, des lits ou bien un simple espace pour dormir à même le sol, une cuisine collective à la propreté douteuse, quelques outils pour réparer son vélo, des bouts de cartes et des murs remplis de photos et de petits mots sympathiques. Le point commun entre toutes ces générations de voyageurs qui ont usés le sol et noirci les murs ?

2 roues pour avancer et le monde entier à découvrir !

1
fév
1
fév
Publié le 17 février 2024

Quel voyage !

Une fois encore, nous avons comme l'impression d'ouvrir une petite parenthèse dans ce très grand périple, la sensation d'inventer un nouveau petit voyage dans le grand, d'écrire un nouveau chapitre dans le grand livre illustré "Escal'À 2 roues" : "Voyage sur l'Altiplano"

De nouvelles lignes à écrire, de nouveaux paragraphes à imaginer, de nouveaux mots aux consonances latinos à aligner.

Ce chapitre n'aura duré qu'une poignée de semaines à peine mais, comme toutes les expériences marquantes, cela aura semblé durer une petite éternité. Une balade sur les hauts plateaux Boliviens hors du temps, loin du bruit et à l'écart des foules. Une sorte de pérégrinations itinérantes dans un univers minéral sec et chaud où chaque goutte d'eau est comptée et où chaque molécule d'O2 respirée fait un bien fou !

Le préambule de ce nouveau chapitre commence, tel un lendemain de fête. Dès les premières lignes, on se sent un peu vaseux et accablés d'un furieux mal de crâne venu d'on ne sait où. Ce n'est pourtant pas un excès de bières locales Huari qui est responsable de ce tapage dans nos tempes mais bel et bien une arrivée un peu trop brutale sur les cimes du globe.

Tout est plus laborieux et tout demande davantage d'énergie à 4000 mètres d'altitude, surtout lorsque l'on vient de passer 3 ou 4 mois au niveau de la mer.

Tout prend aussi une autre saveur et toute expérience s'en trouve d'autant plus enrichie.

Dès les premiers instants, on plonge la tête la première dans une carte topographique où la couleur verte et la couleur bleue sont quasiment absentes, laissant place à des tons jaunes, ocres, marrons, orangés et où d'étranges flaques blanches apparaissent ça et là.

En se penchant davantage sur ce bout de papier et à la lecture des quelques mots qui le parsèment, l'esprit part immédiatement en vadrouille.

La seule évocation du noms des lieux suffit à faire rêver : Sajama, Salar de Coipasa, Uyuni, Laguna colorada, San Pedro de Atacama, Licancabur...

Si l'on ouvre un peu plus grands les yeux, quelques chiffres donnent le vertige : 4300, 4905, 5920 mètres...

Pour cette aventure dans d'immenses paysages sauvages où les minuscules petits villages et les cours d'eau se font rares, il nous faudra être un peu plus prévoyants qu'à l'ordinaire : une autonomie en nourriture pour plusieurs jours est absolument de rigueur !

C'est aussi une première pour les vagabonds à deux roues que nous sommes. Ce coup-ci, il faudra quelquefois également porter plusieurs litres d'eau pour être autonomes durant quelques jours.

Voilà qui allourdit considérablement nos chargements : le poids de nos vélos est au moins aussi grand que la curiosité et la soif de découverte qui nous habitent !

À nos bagages, nous devons également ajouter une quantité non négligeable de globules rouges, histoire de vivre au mieux un séjour d'une vingtaine de jours à des altitudes comprises entre 4000 et presque 6000 mètres.

Nous voici embarqués dans une folle traversée du Sur Lipez, région désertique à califourchon entre deux pays. La porte d'entrée de cette aventure se situant à Sajama en Bolivie, celle de sortie à San Pedro de Atacama au Chili, entre les deux, de vastes étendues de pierres et de sel ainsi que la liberté pour seule guide.

Dans ce chapitre, il y a des grains de sable qui se glissent entre les pages, il y a quelques gouttes d'eau salées qui collent les feuilles de papier entre elles. Dans ces paysages désertiques, en guise d'horloge, un soleil féroce qui brûle tout sur son passage. Des jours durant, il grille nos peaux, dessèche nos lèvres, décolore nos vêtement et lorsqu'enfin, le soir venu, il décline, ce dernier nous indique qu'il est temps de lâcher le guidon pour trouver un emplacement de bivouac et de profiter d'un peu de repos mérité. Un coin plat, sans trop de pierres, sans épines, avec potentiellement un peu d'eau pour boire et surtout, surtout, surtout avec de quoi s'abriter de ce vent furieux qui ,chaque fin de journée, se déchaîne autant qu'il le peut.

À la mi- journée, il est courant qu'Éole redouble de puissance et souvent même change de sens. Ultime épreuve du jour alors que, déjà fatigués de pédaler dans du sable ou sur de la tôle ondulée, il faut désormais continuer d'avancer vent dans le nez jusqu'à atteindre un abri providentiel où passer la nuit.

Avec le flapement de la toile de tente pour seule berceuse, nos corps usés ne se font pas prier pour s'endormir.

Le dieu du vent, quant à lui, attendra que l'on dorme bien paisiblement pour lui aussi se décider, enfin, à aller se coucher.

Au petit matin, requinqués par quelques heures de sommeil réparatrices, nous nous remettons en selle avec souvent le prochain point d'eau en ligne de mire.

Tel un clepsydre, le goutte à goutte du filtrage d'eau quotidien rythme nos journées comme seule mesure du temps qui passe. Un liquide parfois légèrement visqueux et salé comme un symbole d'un voyage où le temps s'écoule au ralenti, où l'on prend le temps de vivre.

Rouler sur l'Altiplano, c'est un véritable cocktail de sable qui se glisse partout, de poussière qui vole, de lamas qui traversent devant nos roues, de petits murs de terre sèche qui offrent un peu d'ombre ou un abri contre le vent, de vicuñas qui prennent la fuite à notre vue, de viscachas qui nous observent passer perchées au sommet de leur rocher, de tôle ondulée de compétition qui secoue tous nos os et fait claquer toutes nos dents, de vent qui de notre meilleur allié devient parfois notre pire ennemi, de vastes étendues salées à perte de vue, de sel qui s'immisce partout et fait grincer les mécaniques, de cactus aux mille épines, de volcans pointus comme seuls points de repère à l'horizon, de geysers bouillants, de boues bouillonantes, de bains d'eaux naturellement chaudes, de voûte céleste brillant de milliards d'étoiles, de lacs aux couleurs improbables, de flamands rose qui barbottent et de soleil qui cogne très fort !

En conclusion de ce nouveau chapitre, de ce voyage dans le voyage, j'écrirai ces lignes...

L'esprit et le coeur sont-ils plus perméables lorsque le corps est mis à rude épreuve ? Ce voyage sur l'Altiplano et cette traversée du Sud Lipez, n'en sont-ils pas la preuve ?

De toutes ces heures à pédaler sur des pistes parfois si peu roulantes, à batailler, à zigzaguer ou à pousser dans du sable, à se faire secouer sur de la tôle ondulée, à appuyer si fort sur les pédales pour ramer à contre vent, à défier ces espaces où l'oxygène se fait rare, de ce soleil brûlant, de ces nuits ventées, froides et inconfortables, de ce climat sec, nous nous sommes enivrés de ces paysages incroyables, de ces déserts de sel surréalistes, nous nous sommes délectés de la plus petite goutte d'eau douce et fraîche, du moindre coin d'ombre où trouver un peu de repos et nous nous sommes enrichis de chaque rencontre.

Bientôt, en guise de souvenir, la rouille envahira nos vélos pendant que les images de cette aventure salée, solaire, sableuse et minérale seront gravées à jamais...

1
fév
1
fév
Publié le 25 février 2024

Tempête sur le Salar #1

Désormais, du blanc à perte de vue.

C'est assez étrange comme notre esprit cherche inconsciemment à recoller un environnement pourtant inconnu à une réalité que l'on connaît...

Un vaste plateau enneigé, un bout de banquise sans sastrugis, un glacier tout bouché, une immense flaque glacée ? Pourtant non...

Nous sommes tels des marins en pédalo évoluant sur la terre ferme !

Nos roues se fraient un chemin dans les profondeurs d'un lac asséché, nos pneus cheminent sur une surface incroyablement lisse après des jours et des jours à s'enliser dans du sable à la profondeur variable et à se faire secouer tous les os sur de la tôle ondulée de compétition.

Quelques éclaboussures d'eau salée viennent crépir nos engins, agressent nos peaux et le sel se glisse doucemement (mais sûrement !) partout. Les mécaniques grincent, la rouille s'invite précocement sur le moindre bout de métal mais nos jambes se décontractent : c'est lisse, ça déroule... Des vacances pour ainsi dire !

Rouler sur ces salars est comme un rêve éveillé !

Et puis soudainement, la réalité nous rattrape, une bande sombre au loin masque l'horizon, un nuage étrange nous barre le passage, une tempête nous fonce droit dessus...

On abandonne alors notre insouciance de cyclos et on reprend en vitesse nos vieilles habitudes de montagnards, de promeneurs polaires ou de voyageurs à voile.

Vélos couchés à terre, emmitouflés comme des esquimaux, nous observons patiemment l'évolution de cette drôle de turbulence. À quelle sauce allons-nous être mangés ? Salée et bien secouée sans aucun doute...

Le vent se déchaîne en même temps que la visibilité se réduit encore.

Après quelques heures d'attente dans ce tourbillon fou, il faut bien se rendre à l'évidence : planter une tente ici, serait de la folie et attendre que le vent passe pourrait prendre peut-être un temps infini.

Avant que la nuit ne tombe, nous reprenons donc notre route, version "peloton" pour se protéger les uns les autres de ce furieux courant d'air et une navigation tout au GPS est de rigueur !

Tempête sur le Salar #2

Attendre que passe le vent... Regarder passer le temps...

Pédaler laisse souvent la possibilité à l'esprit de divaguer : pendant que les jambes moulinent, le cerveau vagabonde à sa guise.

Sur les mauvaises pistes du Sur Lipez, c'est différent : sable, tôle ondulée et parfois rochers demandent au cycliste d'être présent à 100%. Une seconde de déconcentration au guidon suffit à ce que le pneu avant n'en fasse qu'à sa tête et sorte de la mini zone considérée comme à peu près roulante.

C'est alors à chaque fois ou presque le même cirque, poser un pied à terre à l'arrache, relever le vélo lourdement chargé d'eau et de nourriture, le pousser jusqu'à sortir de la zone sableuse en question et tenter de repartir en un minimum d'essais pour économiser ses quelques forces.

Alors évidemment quand après plusieurs jours de dur labeur en mode 4x4 version 2 roues, un boulevard blanc, plat et lisse tel qu'un désert de sel s'offre à nous, c'est juste le paradis !

L'esprit peut à nouveau bouillonner d'idées en tout genre pendant que les gambettes font le job sans forcer ! Au fil des kilomètres, rouler sur cette immense flaque blanche nous rapelle inévitablement quelques similitudes avec une grande traversée d'un des plus grands lacs gelés du monde, réalisée il y a quelques années : le lac Baïkal en Sibérie.

650 km à pied/ski/pulka/kite avec parfois un assistant de choix : Éole soufflant dans nos voiles !

Une longue itinérance où à quelques dizaines de degrés celsus près, les interrogations furent parfois les mêmes : comment planter une tente dans cette étendue ventée et ne proposant pas le moindre abri, comment l'amarer solidement au sol, quelles réserves de nourriture (ou d'eau ce coup-ci) prévoir pour cette grande traversée, comment adapter nos déplacements et nos directions afin d'avoir le vent pour allié ?

La glace trop glissante, la neige trop collante se transforment ici en sel et parfois même en eau salée qui s'immiscent dans les moindres recoins.

Cette fois, la première douche, une fois la terre ferme rejointe sera destinée... aux vélos !

Tempête sur le Salar #3

Et pourquoi ne pas changer de cap pour se laisser filer vent dans le dos ?

Qui cédera le premier, Eole déchaîné ou le cyclo-rêveur qui croit pouvoir ramer à contre courant ?

Nous voici tels des skippers à deux roues changeant de cap afin de concilier caprices du dieu des courants d'air et petits mollets qui partent en fumée ! La route directe est certes la plus courte mais pas toujours la plus rapide et quand le vent se déchaîne à des dizaines de km/h sur des petits cyclistes au milieu de nulle part, ce n'est rien de le dire !

Lutter vent dans le nez, se faire chahuter vent de côté... très peu pour nous ! Pourtant si l'idée est de tirer un bord pas forcément très favorable pour ensuite profiter d'une poussée extraordinaire dans notre dos, la stratégie mérite d'être étudiée de plus près.

Après quelques minutes de lutte acharnée, il est à présent temps d'ôter les pieds des pédales et de se laisser filer tel des optimistes... sans voile !

5
fév
5
fév
Publié le 29 février 2024

L'eau n'est de loin pas mon élément préféré et pour que j'en arrive à enfiler un bikini et à faire un plouf, il faut, soit que je me sente vraiment cracra, soit que la piscine vale le détour !

Après tout ces jours dans la poussière et devant un tel décor, ces éléments semblaient tous réunis.

Une flaque dans le désert est comme un véritable petit trésor, quand l'eau s'avère être douce au milieu de lacs salés c'est comme trouver une perle rare et s'il s'agit de sources d'eau naturellement chaude alors c'est la cerise sur le gâteau !

Et si on barbote dans une piscine débordant sur un lac dans lequel, à quelques mètres à peine, se baladent des flamands rose, là je signe direct pour un bain quotidien !

8
fév
8
fév
Publié le 8 février 2024

Holà todos !

Envie de faire un tour sur un porte-bagage et de découvrir du pays à moindre frais ? (Je veux dire sans vous exploser les mollets !)

C'est par ici !

Au Club Andino de Córdoba en Argentine, à la salle de bloc Wattabloc à Chambéry, à la salle de grimpe Altissimo à Albi, au Club Alpin Français Marseille Provence à Marseille mais aussi à Pau et à Luchon !

Merci à toutes celles et ceux qui prennent ces initiatives et se motivent pour rendre ces moments de partage possible !

12
fév
12
fév
Publié le 6 mars 2024
12
fév
12
fév
Publié le 7 mars 2024

Faire un séjour de plus de deux semaines, entre 4000 et 5000 mètres, ce n'est pas tous les jours que l'occasion se présente. Aussi, profiter de notre accoutumance actuelle à l'altitude pour aller titiller le plafond supérieur suivant est, au fil des jours, devenu assez tentant !

Pour le réveillon du 24 décembre, pas de dinde aux marrons mais un volcan à la sauce aux cailloux. En ces temps de fêtes, dans nos poumons, c'est pénurie de molécules d'oxygène mais dans nos veines, les globules rouges se multiplient et se bousculent encore davantage à l'approche des fêtes.

Une acclimatation quasi optimale acquise selon la désormais bien connue méthode "bicicletaltura" déjà expérimentée et approuvée dans les régions du Pamir et au Ladakh nous permet de rêver à l'ascension du sommet emblématique se présentant ,"a la derecha", sur cette fin de parcours du Sur Lipez : le Licancabur, 5920 mètres.

Cette année, pour Noël, au menu c'est :

*Apéro : "Bicyclette et son étendue sableuse sur fond de Laguna Verde"

*Mise en bouche : "VTT sur son tapis de cailloux"

*Entrée : "300 mètres de dénivelé accompagnés de pierres et graviers"

*Trou Normand : "Courte nuit fraîche & ventée dans son abri de toile"

*Plat de résistance : "+ 1600 mètres assaisonnés à l'éboulis géant et aux pierres qui roulent"

*Dessert : "un carré de chocolat avec vue sur le lac au cœur du cratère sommital"

*Café gourmand : "Grande bajada accompagnée d'un bon sentier"

*Digestif : "balade à vélo saupoudrée de sable fin dans son assiette de tôle ondulée"

Bon appétit et... que les globules s'amusent !

Nous voici donc au petit matin, enfilant nos petits baskets et nos gants à la lueur de nos frontales. J'ai toujours été plutôt matinale le matin de Noël pour ouvrir les cadeaux mais ce coup-ci, on bat tous les records, il fait encore nuit noire quand nous sortons de la tente !

Une bien jolie balade de Noël à quatre pattes puisque c'est ainsi que nous remontons l'immense pierrier instable, qui après quelques 1600 mètres de dénivelé, nous conduit jusqu'au sommet du Licancabur.

Un peu froid aux pieds au lever du jour, pas très bien chaussés pour le terrain et pas vraiment sûr d'avoir choisi la bonne face de la montagne mais peu importe... La vue depuis le sommet est imprenable sur le joli petit lac niché au cœur du cratère du volcan.

Tout autour de nous des paysages désertiques à perte d'horizon. Sous nos pieds, les lagunas verdes et blancas colorent un peu les alentours.

En se tournant vers le nord-est, tout le chemin parcouru à vélo, les jours précédents, se dévoile à nos yeux.

En observant d'un peu plus près les environs du sommet, surprise inespérée : un véritable petit sentier de randonnée nous permettant de rejoindre facilement et rapidement la base de la montagne.

Un chouette cadeau de Noël que de ne pas avoir à redescendre de ce grand volcan à quatre pattes et en marche arrière !

De retour au bivouac, il ne reste plus qu'à refaire nos bagages, réenfourcher nos vélos et à continuer notre route l'air de rien !

12
fév
12
fév
Publié le 9 mars 2024
12
fév
12
fév
Publié le 15 mars 2024

623 ème jour d'une vie nomade...

623 ème jour de voyage. Des vacances qui, peu à peu, se sont transformées en une autre vie. Une vie de tous les jours, différente, où le mouvement est permanent, où sobriété et simplicité sont les maîtres mots, où inconfort rime avec liberté, où effort est synonyme de récompense pour les yeux et pour le cœur, où chaque rencontre prend une valeur folle et où chaque minute vaut de l'or

On a beau être parfois un peu fatigués, rêver d'un petit peu de confort, de bonnes choses de la maison à manger, de retrouver nos amis, clients et famille, pour autant ce monde est tellement vaste qu'on aimerait tant rouler encore et encore !

12
fév
12
fév
Publié le 16 mars 2024

Passer une frontière par voie terrestre et entrer dans un nouveau pays avec son petit vélo, cela fait toujours un petit quelque chose !

Ces 10 derniers mois, n'ayant quasiment fait que sauter d'île en île en Océanie, nous avions presque oublié ce petit bonheur de voyageur à deux roues.

Imaginez qu'en quelques coups de pédales à peine, tout change subitement autour de vous : culture, paysages parfois, religion quelquefois, traits des visages ou manières de se comporter, monnaie ou unités de mesure et la plupart du temps changement de dialecte.

C'est là où on se dit, une fois de plus, que le vélo fait des miracles. Un si simple engin pour de si grands dépaysements !

Ce coup-ci, non seulement il y a la joie "habituelle" de découvrir plein de nouvelles choses mais il y a aussi, plus au sud de cet immense pays, l'excitation des retrouvailles. De belles montagnes et de grands sommets maintes fois explorés et des amis de longues dates à visiter, la convialité d'un asado bien fourni ou la joie de partager un maté.

Bruno aurait-il cru qu'un jour ce serait un vélo qui le conduirait en Argentine ?!

En guise de symbole à la situation, cette entrée en terre argentine est cyclistement parlant complètement folle !

Une perte de près de 3000 mètres de dénivelé en quelques jours à peine et une "muy grande bajada" de plus 400 km ! Imaginez donc !

Des paysages qui défilent sous nos yeux à toute vitesse : des étendues de cailloux à perte de vue, puis des cactus pour enfin découvrir un tout premier arbre ! Une sensation de plonger progressivement dans un grand bol d'air chaud et des températures qui grimpent chaque minute davantage, des moustiques qui font leur entrée dans la danse, des molécules d'oxygène qui se multiplient à vue d'œil, une circulation qui se densifie, des villages qui se font plus nombreux et moins sommaires, des visages croisés qui nous ressemblent de plus en plus. Les chapeaux disparaissent, les jupes sont moins volumineuses, la teinte des peaux s'éclaircit, les traits s'affinent, les cheveux passent de l'ébène au châtain, parfois même au blond.

Les lamas sur les bas côtés se font désormais plus rares, l'asphalte a pris définitivement le dessus sur la terre et le gravier. Des boucheries à tous les coins de rue et les cartes des restaurants affichent désormais quasi exclusivement de la viande. La proportion de "papas" et de "carne" dans l'assiette s'inverse littéralement !

Elle est bien là, la vraie magie du voyage à vélo : avoir le temps et l'opportunité, au fil des kilomètres, d'appréhender, tous sens aux aguets, tous ces changements.

Cette immense descente et le fait de se laisser filer ainsi auraient pu suffire, à eux seuls, à agrémenter toute la magie d'entrer en Argentine mais il fallait bien quelques épices, style "chimichuri" pour relever un peu la sauce et nous empêcher d'avaler tous ces kilomètres trop goulument.

Comme un clin d'œil de ce cher Éole au "patagon d'adoption", chaque matin, un doux vent soufflant dans notre dos, nous permet de filer comme des fusées. À la mi-journée, en quelques secondes et comme si quelqu'un choisisait d'inverser instanément le sens du courant dans un circuit, le vent tourne et malgré la pente favorable, nous sommes stoppés net, cloués au plancher !

Pédaler en descente, ce serait un comble ! Le mieux que nous ayons à faire est alors de se trouver un abri pour protéger la tente du vent et d'attendre que ce grand courant d'air s'inverse à nouveau, au cours de la nuit, pour continuer notre chemin, le lendemain matin de très bonne heure.

L'occasion de profiter encore de quelques nuits relativement fraîches avant de retrouver le véritable été, ses fortes chaleurs et ses orages. La chance de rester encore un peu immergés dans ces paysages sauvages, désertiques, magnifique du grand nord de l'Argentine.

12
fév
12
fév
Publié le 20 mars 2024

Vingt et un mois sur la route... mais pourquoi ça s'accélère toujours plus, le temps qui passe ?!

En tout cas, ça donne ça :

◇ 22 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯 (🇺🇿)🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷🇦🇺🇳🇿 (🇦🇺) 🇧🇴🇨🇱🇦🇷

◇ 15621 km 🚲

◇ 158 km à pied 🥾

◇ Des groooos sacs 👜

◇ Une grande descente à vélo de 400 km 🤗 et - 3000 mètres de dénivelé 🥳

◇ Un nouveau pays 🇦🇷

◇ Des piles de billets 🤑

◇ Des retrouvailles 👩🏻‍🦳

◇ Un anniversaire 🎂

◇ Du vélo 🚲, des bus 🚌, des taxis 🚕, du stop 👍

◇ Un sommet à 6893 m 🏔

◇ 11 jours à plus de 4900m 😶‍🌫️

◇ Des bivouacs 🏕

◇ De la neige 🌨

◇ Des milliers de milliards de pénitents 🤪

◇ Un trek de 12 jours chargés comme des mules 🫏

◇ Des vicuñas 🦙

◇ Deux pumas morts 😥

◇ Trois musées 🏤

◇ Un cirque 🎪

◇ Les portes de la maison cassées puis réparées 🏕

◇ De la bonne viande 🥩 et des asados 😍

◇ Des alfajores et des facturas 🥐

◇ Des litres de maté 🧉

◇ 58 litres d'eau filtrés 💧

◇ Des nouveaux amis 🧔🏽‍♂️👩🏻‍🦱👨‍🦰👴🏻🧑👨🏻

◇ 1 projection en Argentine 🎬

◇ Des petits dessins✏️

12
fév
12
fév

Dans le registre des hôtels farfelus...

Il y eut des maisons en construction, des cabanes abandonnées, des stades, des hôtels désaffectés, des parcs, des gares routières, des cours d'école, des ponts routiers, des chantiers, des gravières, des parkings de supermarché, des habitations restées ouvertes, des préaux, des jardins publics, des stations service, des aéroports, des fossés, des arrêts de bus, des piscines municipales et puis il y eut celui-ci...

Tout au nord de l'Argentine, le vent était si fort chaque soir qu'il nous fallait absolument trouver de quoi abriter la tente des trop fortes rafales. Dans des paysages sans arbres et où plusieurs dizaines de kilomètres séparent chaque petits villages, ce ne fut pas toujours simple. D'autant plus que, qui dit vent trop violent pour planter une tente, dit aussi cyclistes cloués au plancher par un furieux vent de face, pas facile donc quand il s'agit d'avaler 50km supplémentaires à la tombée de la nuit !

Ajoutez à cela quelques coup de tonnerre et deux ou trois éclairs et le simple toit de l'entrée d'un cimetière devient un palace !

De tous nos bivouacs urbains celui-ci fut de loin le plus calme ! Palme d'or de la tranquillité, enfin... presque ! Afin de compenser l'inactivité des habitants des lieux, les moustiques, eux, pas endormis du tout et n'ayant personne d'autre à piquer, se sont déchaînés sur les deux pauvres êtres vivants que nous sommes toute la nuit !

25
fév
25
fév
Publié le 28 mars 2024

S'il y a bien une chose de plus que j'ai découvert pendant ce long voyage, c'est le plaisir de dessiner !

Immortaliser des souvenirs dans un cahier puis voir les pages se remplir puis se colorer une à une. Les carnets s'empilent les uns sur les autres comme de véritables indices du temps qui passe et du voyage qui s'allonge...

J'aurai aussi découvert que l'on peut faire des dessins dans un nombre infini de lieux, de situations et de positions : à la lueur d'un feu ou d'une frontale à la batterie en fin de course, dans un train qui secoue, dans un bus qui n'arrête pas de freiner, dans un bateau qui bouge ou dans un taxi dans lequel on est serré comme des sardines, sous la tente secouée par le vent, à genoux sur les cailloux, pliée en quatre ou allongée dans l'herbe !

Quand j'arriverai cependant à dessiner en pédalant ou en étant accrochée à un relais, je pourrai dire que j'aurai passé un cap dans le domaine du carnet de voyage !!

En attendant, voici le troisième tome !

Le second carnet est à retrouver par ici !

29
fév
29
fév
Publié le 2 avril 2024

On ne change pas une équipe qui gagne !

Enfin... manière de parler parce que ,mis à part de beaux souvenirs, un paquet de globules rouges dans le sang et accessoirement quelques belles ampoules aux pieds, il n'y a pas vraiment grand chose à gagner d'autre dans ce genre de plan ! Mais ce n'est déjà pas mal du tout, me direz-vous !

Il y a quelques années, par un beau matin de début d'été, nous quittions tous les trois le Val Veny pour atteindre le sommet du Mont Blanc le lendemain. Nous avions alors choisi de prendre le chemin des écoliers afin de fuir la foule de la voie normale. Un itinéraire plus sauvage sur un versant à l'ombre des projecteurs, sans remontée mécanique et sur lequel nous avions porté notre nourriture et de quoi bivouaquer afin de nous sentir plus libres.

Ça, c'était pour les 66 ans de ma p'tite maman. Il n'est jamais trop tard pour faire ses premiers pas d'alpiniste !

À l'approche de ses 70 ans, nous avons eu envie de remettre ça et de nous offrir une nouvelle belle aventure.

Plus on avance dans l'âge, plus on met la barre haute ! Une approche beaucoup plus longue, des sacs beaucoup plus lourds, un sommet beaucoup plus haut et un engagement un peu plus grand.

Ben quoi... c'est pas tous les jours qu'on entre dans une nouvelle décennie !

Ce coup-ci pas de chemin des écoliers mais une vraie marche de facteur pour tenter d'approcher le sommet de l'Ojos del Salado, 6893 mètres.

La barre des presques 7000 m pour ses presques 70 ans, ça en jette non ?

Ce qui m'inquiète un peu, c'est ce que l'on va devoir encore inventer pour ses 80, 90 et 100 ans !

Le récit de cette virée à 4807 (... 4810 m ? Je sais même plus !!), est à retrouver par ici :

https://laraamoros.blogspot.com/2020/11/mont-blanc-la-liberte-retrouvee.html?m=1

9
mars
9
mars

Vous connaissez l'histoire de trois touristes équipés comme des cyclistes qui veulent grimper jusqu'à 6893 mètres ?

Vous connaissez la bonne idée de ces trois rêveurs là qui voulaient emprunter le versant Argentin de la montagne, bien plus sauvage que le côté Chilien ?

Vous connaissez les aventures de trois randonneurs qui, ne pouvant pas payer un taxi 4x4, se sont dit qu'ils partiraient à pied en faisant une longue marche de deux semaines ?

Et vous la connaissez la bonne nouvelle ? Les mules et les muletiers... et ben il n'y en a pas !

Vous allez donc découvrir, l'histoire de trois mules à deux pattes qui marchent des kilomètres et des kilomètres durant des jours et des jours sous le cagnard et dans un océan de cailloux pour rejoindre un camp de base à 5500 mètres, où quelques Argentins arrivent parfois en 4x4 !

Normalement c'est là que l'aventure commence véritablement mais, avec cette longue marche d' approche, on aura, comment dire... pris un peu d'avance !!

Un long trek en guise de préambule à l'aventure prétendue principale : l'ascension de l'Ojos del Salado et de ses presque 7000 mètres d'altitude.

J'aime bien comme parfois les choses s'inversent. Dans ces circonstances, l'ascension du sommet (et son hypothètique atteinte) devient en quelques sortes, l'épilogue d'une approche un peu rude et bien sauvage.

Le bouquet final, la cerise sur le gâteau pour ainsi dire ; un détail qui rend l'aventure plus jolie et plus palpitante qu'une simple et longue randonnée.

Toujours est-il qu'après tous ces efforts, on arrive certes plus fatigués au point de départ "officiel" mais aussi mieux préparés à l'altitude et surtout plus déterminés que jamais pour grimper sur la montagne !!

Durant ce préambule, au cœur de ces paysages minéraux, au beau milieu des troupeaux de vicuñas et en zigzaguant entre les flaques de pénitents, incroyables formations glaciares, il faudra jongler avec des sacs très lourds, un soleil de plomb et de l'eau parfois difficile à trouver.

Chercher une goutte d'eau dans un océan de pierres, en grattant du sable humide ce n'est pas gagné mais porter eau et nourriture, c'est aussi toute une histoire !

Qui dit pas de mule et 15 jours d'autonomie en nourriture, dit portages et de nombreux allers-retours.

Ce qui veut dire qu'une fois sa petite étape de 20 km, chargé de son gros sac à dos, terminée, il faut faire la moitié de celle du lendemain en portant quelques affaires supplémentaires et revenir au bivouac en mode léger et au pas de course.

Fidèle à notre habitude, tout comme c'est le cas à vélo, le compteur de marche à pied ne fonctionne pas mais si on additione toutes les distances à vol d'oiseau et tous ces allers et venus, on arrive quand même à un total de 160 km pour seulement atteindre le camp de base !

Nous sommes plutôt bien acclimatés par cette très longue marche où l'on est monté aussi lentement que sûrement en altitude,mais pas franchement équipés techniquement pour du grand froid, de la neige ou du vent fort (2 paires de chaussures d'alpinisme légères et 1 paire de basket + 1 paire de crampons pour trois, des tentes légères "deux saisons "!).

Ici, aucune difficulté technique si ce n'est: mettre un pied devant l'autre, sans trébucher sur l'un des milliers de milliards de cailloux qui recouvrent cette montagne.

La principale incertitude, dans toute cette histoire, réside finalement dans le simple fait de s'adapter plus ou moins bien à cet air grandement appauvri en oxygène, à accepter de ne pas s'agiter trop, à se forcer à manger un peu, à ne pas s'inquiéter de ces apnées du sommeil répétées, à tolérer cette sensation de manquer d'air, à avancer lentement...

Vu la configuration du terrain, si l'un de nous s'était à un moment ou à un autre senti mal en raison de l'altitude, la situation aurait forcément été problématique.

Comment perdre rapidement de l'altitude quand tout est plat ou presque à des kilomètres autour de vous ?

Comment perdre 500 mètres de dénivelé quand cela signifie aussi marcher une quarantaine de kilomètres ?

Voilà une raison toute trouvée pour décider d'un commun accord de ne pas être malades !

En route pour le sommet !

À suivre...

16
mars
16
mars
Publié le 12 avril 2024

De toutes ces (trop) nombreuses années d'école, tantôt face, tantôt dos au tableau noir, je me suis parfois demandée si tous ces savoirs avaient réellement du sens : tous ces textes, toutes ces leçons, ces résumés, ces tables de multiplications, ces verbes irréguliers, ces théorèmes, ces équations mathématiques ou ces formules chimiques ingurgitées jusqu'à l'indigestion en tant qu'élève. Des récitations rabâchées le dimanche sur les sentiers de randonnée, recopiées sur des tout petits bouts de papier pliés en dix dans mes poches, lus au pied des falaises ou sortis au relais avec pour objectif majeur, minimiser le temps passé enfermée !

Non pas que ces connaissances soient fondamentalement inutiles mais plutôt qu'elles manquent parfois de practicité. Transformer ces savoirs en savoir-faire, en savoir-vivre, voilà ce qu'il manquait parfois.

Pourquoi apprendre à dénombrer de si grands chiffres quand on aura à peine quelques pesos en poche toute sa vie ? Pourquoi apprendre à écrire une langue si l'essentiel est de la parler ? Pourquoi retenir par cœur des poèmes et ne pas apprendre à en inventer ? Et quand allait-on apprendre à s'orienter, à recoudre un vêtement, à construire une vraie cabane, à trouver de quoi se nourrir dans la nature, à soigner quelqu'un, à réparer un objet ? Quand allait-on nous expliquer que le vrai but dans la vie était de tout faire pour être heureux ? Allait-on apprendre un jour, à jouer avec le feu sans trop se brûler ?

Et puis un jour, j'ai changé d'école : Ciao le cartable, bonjour le sac à dos !

Les livres sont devenus des topos d'escalade, les cahiers se sont transformés en cartes IGN, les stylos en cordes et on avait même droit à notre smartphone en cours !

La salle de classe se fut dehors, tous les jours ou presque et qu'elles que soient les conditions météorologiques. Pour ainsi dire la cour de récréation devint l'école à elle seule. Là encore, on n'apprit certes pas à s'amuser, à profiter de la vie mais à travailler : guider des clients en montagne et évoluer en sécurité. Il ne s'agissait plus d'apprendre à vivre mais à rester vivant.

Il y eu bien sûr beaucoup de travaux pratiques : des nœuds, des manips de corde, de l'escalade, des descentes à ski, des simulations de secours en avalanche, du secourisme, des courses d'orientation... et il y eu aussi de la théorie : histoire, géographie, médecine... Sur ces derniers sujets nous étions, la plupart du temps, évalués sans que l'on ne nous ait rien enseigné.

Une drôle de formule consistant à nous demander de réaliser nous mêmes un dossier de plusieurs pages sur un évènement alpinistiquement historique ou sur une région montagneuse du monde. D'ici quelques années, en rassemblant le fruit du travail de tous ces aspirants guides, on peut largement imaginer qu'un fascicule d'histoire et de géographie sera prêt à être édité, sans oublier d'y apposer le logo de la grande école en première page évidemment !

Une formule plus "drôle" encore consistait à nous évaluer sur des sujets jamais enseignés via des QCM, des questionnaires à choix multiple en ligne et dont le fonctionnement à toujours été très, très obscur. C'est à dire que selon un bug informatique, le système de notation n'a jamais vraiment fonctionné. Ainsi, on pouvait atteindre un score négatif en ayant tout de même plein de bonnes réponses. Le fait est que l'on pouvait tenter notre chance autant de fois que nécessaire jusqu'à atteindre la fatidique note de 10/20.

Ces interrogations étaient alors devenues une espèce de jeu de loterie sur lequel 50 étudiants testaient ses chances avant de déléguer l'exercice au plus patient de la promo qui lui, finissait par trouver, après parfois une centaine d'essais, la combinaison gagnante : avoir 11/20 et surtout n'avoir absolument rien appris. Nous nous empressions alors tous de recopier ce message codé, de valider les dits QCM et de nous débarrasser de ce stupide exercice.

En effet, l'absurdité de la situation faisait que l'on cochait ou décochait des cases sans avoir une véritable correction ce qui, au delà de nous dispenser aucun savoir, nous insinuait le doute sur à peu près tous les sujets traités !

Ce n'est pas si grave lorsqu'il s'agit de connaissances administratives telle que la comptabilité du travailleur indépendant mais cela devient plus gênant quand il s'agit de secourisme ou plus précisément dans le cas qui nous intéresse, de savoir que faire en cas d'orage en montagne.

Depuis, à chaque coup de tonnerre, alors que je me balade sur des arêtes effilées avec 5 kg de matériel métallique accrochés au baudrier, je repense à ce que j'ai appris à l'école à ce sujet. Autrement dit... rien.

Ce coup-ci n'échappe pas à la règle :

Ce jour-là, alors que nous approchions du sommet de l'Ojos del Salado, 6893 mètres, l'état du ciel s'est peu à peu dégradé. Après un beau lever de soleil dans un ciel dégagé, les nuages sont devenus, au fil des heures, de plus en plus nombreux. À la mi-journée, la météo a même carrément tourné au mauvais temps. La visibilité baisse, le vent se lève et la neige se met à tomber. Rien de vraiment inquiétant si ce n'est pour nos pieds qui, équipés de chaussures légères, pataugent désormais dans la neige à plus de 6000 mètres d'altitude.

Vers 6700 et quelques mètres, nous marchons l'un derrière l'autre à une petite allure, plus que 200 mètres de dénivelé à gravir et nous serons au sommet. Soudainement, Bruno s'arrête et se retourne vers moi. Il m'informe sentir comme un picotement au niveau des épaules. Étrange, me dis-je. Quelques secondes après, je ressens cette même sensation autour de la bouche sans avoir vraiment le temps de l'exprimer. En un éclair, on comprend : la foudre !

Il ne faut pas plus d'un regard échangé entre nous pour savoir que ce n'est pas le moment de s'éterniser là, si on ne veut pas finir grillés...Et en même temps... Que faire ? Où se réfugier ?

Instanément, je repense à ce maudit QCM. Parmi les réponses proposées, il y avait forcément des comportements à adopter et d'autres à vraiment éviter. Lesquels ? S'assoir contre un rocher, s'isoler du sol, courir, éviter que les bâtons ne touchent le sol, éloigner les objets électroniques... Nous sommes à presque 7000 mètres dans un vaste pierrier sans réel "abri" en vue. Pas de corde pour s'asseoir, un sac à dos vide pour deux et des bâtons à la mains dont on ne sait vraiment que faire...

Nos épaules crépitent, nos cheveux sont dressés sur nos têtes et les éclairs s'abattent à quelques mètres de nous sans coup de tonnerre annonciateur. On choisit l'option "perdre autant d'altitude possible, aussi vite que possible". Nous voici donc en train de dégringoler en quelques minutes, ce millier de mètres de dénivelé durement avalé.

Quelle étrange et désagréable sensation que d'avoir l' impression qu'une clôture électrique s'est glissée entre notre dos et les bretelles de notre sac à dos ! Quelle frayeur d'apercevoir la lumière de l'éclair et d'entendre le bruit du tonnerre simultanément ! Quelle horreur de ne savoir que faire !

À 5500 mètres, après plus de 1200 mètres de descente au pas de course, alors que nous sommes sur le point de rejoindre le camp de base, les abeilles nous poursuivent encore ! ... Heureusement, notre tente a de bonnes moustiquaires !

Ainsi se conclut, cette première tentative sous haute tension à l'Ojos del Salado. Nous sommes heureux d'être vivants et je suis bien déterminée à chercher moi-même, les réponses à toutes ces questions au sujet de l'orage et de la foudre !

22
mars
22
mars
Publié le 15 avril 2024

Vingt-deux mois sur la route en mode inventaire à la Prévert ça donne ça :

(Toujours pas de raton-laveur !)

◇ 22 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯🇺🇿🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷🇦🇺🇳🇿 (🇦🇺) 🇧🇴🇨🇱🇦🇷🇨🇱🇦🇷

◇ 16458 km 🚲

◇ Des rencontres 🧔🏽‍♂️👩🏻‍🦱👨‍🦰👴🏻🧑👨🏻

◇ Des retrouvailles 🚴🚴‍♂️🧗‍♂️🧗‍♀️

◇ Du vélo 🚲, des bus 🚌, du camion 🚐

◇ Des bivouacs 🏕

◇ Un arceau de tente cassé 😭 et des fermeture éclair changées 👍

◇ Une tente un peu brûlée 🔥

◇ De la grimpe 🧗‍♀️

◇ Des belles voies 🧡

◇ Des orgues volcaniques 🌋

◇ Des aiguilles fantastiques 😲

◇ Des beaux paysages 🏞

◇ Un tatou 🦖, un hibou 🦉, un serpent 🐍

◇ Une piqûre de bourdon 🦟

◇ De la bonne viande 🥩 et des asados 😍

◇ Des alfajores et des facturas 🥐

◇ Une fondue 😋

◇ 150 litres de maté 🧉

◇ 5 projections en France 🎬

◇ Des petits dessins✏️

28
mars

L'Ojos del Salado est le second sommet le plus haut des Amériques. Quelques dizaines de mètres à peine de moins que l'Aconcagua et quelques centaines de mètres de plus que ses voisins continentaux: le Huascaran au Pérou et le Mc Kinley en Alaska.

L'Ojos del Salado est le point culminant du Chili et c'est aussi le volcan le plus haut du monde.

Un sommet de 6893 mètres d'altitude, ce n'est pas tous les jours qu'un tel morceau se présente devant nos roues !

Alors que la saison d'été bat son plein et qu'à quelques centaines de kilomètres de là à peine, l'Aconcagua s'est transformé en véritable parc d'attractions, nous sommes heureux d'avoir opté pour un sommet "zéro budget et zéro visiteur"... ou presque !

Naïvement, nous avions un temps imaginé fêter les presque 70 ans de ma maman, à presque 7000 mètres, au sommet du toit des Amériques. Inspirée par le film retraçant l'ascension de l'Aconcagua par des Cholitas Boliviennes, c'est elle-même qui en avait émis l'idée.

Il ne nous a, ensuite, pas fallu longtemps pour découvrir, avec déception, l'arnaque. Et puis... à 70 ans, on ne fête plus son anniversaire à Disneyland ! Sans compter que lorsqu'on voyage à vélo, en dépensant le moins possible, on n'a tout simplement pas le budget pour se rendre sur de tels sommets !

En effet, l'Aconcagua aujourd'hui, c'est un permis d'ascension de plus de 900 dollars par personne, ce sont des agences qui privatisent le camp de base en imposant leurs services, ce sont les services de muletiers hors de prix, des porteurs et un médecin qui décide si tu peux tenter ou non l'ascension. C'est aussi une surfréquentation de la montagne et des façons pas très éthiques de la parcourir : déposes en hélico et utilisation d'oxygène.

Le challenge "Seven Summits" n'y est certainement pas pour rien et il ne reste plus qu'à inventer la version "Seven Summits zéro budget" !

C'est ce que nous avons fait en choisissant de nous rendre à L'Ojos del Salado : Pas de permis d'ascension, longue marche d'approche, pas de mules, portages, grande autonomie en nourriture, pas de moyen de communication, peu d'informations...

La majorité des ascensions annuelles que compte l'Ojos des Salado s'effectue par le versant chilien : une piste 4x4 menant jusqu'au camp de base et un petit refuge servant d'abri facilitant la logistique. Nous choisissons l'accès par le côté Argentin de la montagne, plus long et moins fréquenté.

À l'approche jusqu'au camp de base en 4x4, nous préférons un long trek. Deux avantages majeurs à ce choix : une économie d'argent non négligeable pour les voyageurs fauchés (accompagné d'un déploiement d'énergie bien conséquent !) et une acclimatation tout en douceur.

De multiples aller-retour en mode porteurs nous permettent de prendre la mesure de la distance, d'apprécier l'isolement de l'endroit et le côté sauvage des lieux.

Des paysages magnifiques s'offrent à nous au fil des jours : longues vallées, jolis ruisseaux, vastes étendues de pierres, herbe rase et jaune, grands troupeaux de vicuñas... Peu à peu, les sommets finissent par se rapprocher et enfin, les tout premiers pénitents de glace apparaissent: quel spectacle !

Et puis un jour, vient enfin le moment de poser nos valises et de stopper notre itinérance.

Alors que le terrain se raidit et que la côte des 5500 mètres d'altitude est atteinte, nous décidons qu'il est temps,à présent, d'élire domicile ici pour quelques jours. S'il y a bien quelqu'un avec qui nous avons un timing parfaitement synchronisé pour cette arrivée au camp de base, c'est bien la neige !

En effet, en quelques heures, les sommets complètement secs lors de notre arrivée blanchissent à vue d'œil, les températures baissent et le paysage prend une toute autre apparence : Changement d'ambiance et de saison.

Les jours suivants seront un savant jonglage entre patience et repos afin de parfaire notre acclimatation, observation du ciel pour tenter d'y deviner un potentiel créneau météo et tentative d'imagination d'une stratégie dans l'idée de s'attaquer au sommet.

Lors de la première tentative, nous bivouaquons quelques centaines de mètres plus haut afin de démarrer l'ascension pas trop tôt et de profiter, assez vite, des premiers rayons du soleil . Des vacances à la montagne en quelque sorte !

Cela aurait pu fonctionner si l'orage n'avait pas décidé de s'inviter lui aussi à la fête dès la fin de matinée.

Un demi tour à plus de 6100 mètres pour la ptite maman et un but électrique très proche du sommet pour nous : Quelles expériences !

Deux jours plus tard, nous sommes de retour aux affaires. Ce coup-ci, nous optons pour un départ de plus bas et plus tôt. Un réveil nocturne et un départ au pas de course sous l'éclairage d'une belle pleine lune. Ainsi débute cette chouette journée. Le rythme diminuera ensuite progressivement au fil des mètres de dénivelé avalés.

Ce jour là, au lever du jour, le froid est vraiment mordant et avec nos équipements vestimentaires de" petits cyclistes", il nous faut gérer à la fois nos orteils, nos doigts et notre nez !

Malgré tout on ne perd aucun de ces attributs dans la bataille et nous atteignons le sommet ,en fin de matinée, sous un grand ciel bleu ensoleillé sans l'ombre d'un nuage ce coup-ci. Comme quoi, cela valait le coup de récidiver !

Nous voilà à 6893 mètres, seuls et contents !

La vue est imprenable et des dizaines de sommets presque aussi hauts, nous entourent de toutes parts... autant de potentiels Aconcagua pour les pauvres.

Avis aux amateurs !

28
mars
28
mars
Publié le 21 avril 2024

15 000 km, ça use, ça use,

15 000 km, ça use les mollets !

28
mars
28
mars

"Mieux ici qu'en garde à vue"... Voilà ce qu'on déclare parfois pour se donner un peu de courage quand une piste est trop caillouteuse, trop raide, que les vélos sont trop lourds et que les tongs dérapent dans la poussière.

"Mieux là qu'en prison" aussi quand on se retrouve pendu comme des saucisses à un relais inconfortable, étranglés tel des rôtis dans des baudriers aux sangles trop fines, les pieds écrabouillés dans des chaussons mille fois trop serrés, que la nuit est sur le point de tomber et que la frontale est restée bien au chaud à la maison !

Faim, froid, soif, crevés ou même morts de peur, il n'y a pas à dire, on est toujours mieux là qu'en prison !

Mais ce coup-ci, la formule n'est pas totalement hors de propos, puisque le secteur en question s'appelle "la carcel" et que les lignes se nomment "Alcatraz", "Condena perpetua" ou "Silla electrica".

Pas d'inquiétude, ici les condamnés sont des p'tits chanceux occupés à se délecter d'une grimpe juste incroyable. Pour seuls barreaux, des orgues volcaniques parfaitement géométriques alignés du plafond au sol et du sol au plafond, collés, serrés les uns contre les autres laissant parfois apparaître un fin interstice entre eux.

Du rocher hyper compact, rayé par de belles fissures rectilignes, seules options pour qui veut se carapater par le haut de cette drôle de cellule. Pour seule torture, des coincements douloureux, dans ces lignes de faiblesse parfaites, de tous les membres du corps qui peuvent l'être, puisque ici : les verrous, c'est avec les mains, les doigts et les pieds qu'on les fait !

Il faut parfois user d'un peu d'imagination pour se sortir de quelques situations critiques mais l'utilisation certes peu esthétique des genoux, du dos, des hanches ou des fesses peut se révéler être la clé du succès !

À l'aide d'un peu de strap et de pof, vous pourrez montrer patte blanche pour qu'on vous ouvre bien grand le portail de cette incroyable prison. Point besoin de lime, de clé à molette, de pioche ou de pelle, munissez vous simplement d'un gros jeux de friends, accrochez le à votre baudrier et tentez ensuite de vous échapper vers le haut.

Le style de grimpe est au moins aussi étonnant que ces surprenantes formations rocheuses et les images aussi magiques que ce que la nature peut parfois inventer !

Sinon en grimpant dans cette drôle de prison, javais en tête cette chanson :

Piece montée des grands jours

- Thomas Fersen & Marie Trintignant -

https://youtu.be/AzfSbBSGi9Q?si=mMY4O_O2DdzUXT00

30
mars
30
mars
Publié le 29 avril 2024

Voyager, c'est aussi une formidable occasion d'aller rendre visite aux amis des pays lointains.

Ces deux-là se connaissent depuis des lustres et ne s'étaient pas revus depuis des milliards d'années.

Quel plaisir d'assister à ces retrouvailles, de voir ces sourires et ces yeux qui pétillent ! C'est aussi l'occasion de marquer une pause méritée et de profiter d'une vie plus sédentaire durant quelques jours.

Amigos, musica, escalada, costura, facturas, maté y empanadas...

La belle vie à Bari !

Merci la "Calvo family" pour las muy buenas ondas et ce bon temps partagé !

Et puis encore un peu plus loin, en se rapprochant encore davantage de ces montagnes du grand sud, les retrouvailles continuent...

Dans la série "visite aux copains du bout du monde", je vous présente les alpinistes musiciens de la cara oeste : Ramiro, Bicho et Bruno, la cordée Ritmo latino réunie presque 20 ans après l'ascension du Cerro Torre.

Ce coup-ci, pas de grotte de neige ou de piolets à ailettes mais un bon asado, quelques bières et des discussions jusque tard dans la nuit !

Si vous cherchez de quoi occuper une triste journée de pluie ou bien que vous avez une subite envie de gîvre et de sommets patagons en musique live, voici ce qu'il vous faut !

Le film complet du maestro Calvo, à retrouver par ici :

https://youtu.be/LIU13_lASbs?si=t9sYW8s0Fztj2ipL

9
avr

Chercher deux petits grimpeurs dans un paquet d'aiguilles, c'est une tâche presque aussi délicate que l'histoire de l'aiguille dans la botte de foin. Si le défi peut paraître ardu, c'est qu'ici des aiguilles, il y en a beaucoup !

Des petites timides, des dodues, des grandes élancées, des "à demi écroulées", des pyramides parfaites, des biscornues, des équilibristes, des "avec des gros ventres ou de grosses têtes", des "bien plantées sur leur pied", des "à deux doigts de basculer dans le vide", des "pointant vers le ciel", des "penchant vers les voisines", des compactes, des "toutes fissurées", des déversantes, des impressionnantes, des attirantes, des repoussantes des Campaniles, Dibonas ou encore des Républiques...

Si on admet que chaque aiguille comporte quatre faces, parfois davantage et que sur chaque face des grimpeurs éclairés ont tracé plusieurs lignes, cela fait un nombre quasi infini de possibilités grimpesques et un topo à l'épaisseur proche de celle d'une encyclopédie.

Frey, c'est un vaste cirque, couronné d'arêtes déchiquetées, un joli petit lac, un sympathique refuge et quelques tentes. Ajoutez à cela un vent pouvant se révéler furieux, des cotations bien tassées et une escalade parfois engagée : le paradis redevient réalité !

C'est en sirotant quelques matés en terrasse que l'on affûte tout d'abord son œil... Bombilla à la bouche, topo sous les yeux et mains mointes, ainsi commence l'aventure à Frey. Après quelques tournées et quelques thermos vidés, vous serez certainement capable de reconnaître en un battement de cil, la "Principal", la "Pyramidal", la "Tapia", l'aguja Frey, "Cara banana" ou encore le Campanile. Vous saurez discerner "la Vieja" de "l'Abuelo" et "l'Abuelo" du "Tonto" et puis vous comprendrez à peu près comment y accéder.

Pour la grimpe, c'est une toute autre histoire qui commence quand il s'agit de passer à l'action ! Il faut maintenant d'affûter ses doigts et de connecter les neurones, quoique... un court circuit serait peut-être parfois préférable ! Ici les cotations oscillent étrangement entre le 5 et le 6 mais ne croyez pas pour autant que Frey, ce sont les vacances. Bien au contraire !

S'il y a bien quelques rares longueurs dans le 7ème degré qui traînent ça et là, l'essentiel des difficultés se trouve résumé sous un même chiffre et une même lettre : 6bMenu unique.Sur le papier, tout va bien mais qu'en est-il une fois sur le rocher ?

Dalles compactes, murs verticaux à réglettes, fissures évasées, dièdres, écailles, toits, trous, fissures franches à doigts, à mains ou poings, arêtes aériennes : il y en a pour à peu près tous les goûts, à condition d'aimer le granit, le trad et d'être prêt à avoir parfois un peu les chocottes !

Des approches parfois conséquentes, des styles de grimpe variés, du rocher de qualité, un équipement parcimonieux, des itinéraires astucieux et des vrais sommets pointus... ça pique !Bienvenue à Frey !

La suite en image ! À vous de jouer au petit jeu des petits grimpeurs cachés dans un tas d'aiguilles !

4
avr
4
avr

Prenez tout d'abord une belle et grande paroi élancée, une aiguille pointée vers le ciel répondant au joli nom de "cohete lunar". Sautez ensuite dans cette fusée, sélectionnez votre itinéraire et initiez le décollage : "Objectivo luna" sera le nom de la voie.

La suite est un grand voyage dans l'espace minéral : ambiance lunaire garantie.

Un rocher extraordinaire, un cheminement astucieux débusqué par des premiers ascensionistes illuminés et des cotations d'ouvreurs plutôt mal lunés. Les 5+, 6a et 6b à des années lumières de ceux qui se grimpent habituellement sur terre !

Ajoutez à cela un zeste d'engagement quand il s'agit de naviguer à vue dans des dalles verticales moutonnées où chaque emplacement pour se protéger devient alors un précieux petit trésor à trouver. Entre d'autres termes : pas question d'être dans la lune sous peine de violent retour sur terre !

Dans le topo, on lit : "Une voie grandiose. Une escalade variée : fissures à doigts, à mains, dièdres, dülfers, murs verticaux à réglettes, arête technique et toit athlétique."

Tout ça réuni dans une seule et même ligne. Imaginez, c'est un peu comme demander la lune au rocher : vous voilà sur une autre planète !

Juste martien !

Longueur après longueur, vous finirez par décrocher la lune au sommet ! ...De quoi rentrer ensuite au bivouac, les bras fatigués, les pieds douloureux mais des étoiles plein les yeux !

10
avr
10
avr

Recette pour de "vraies" vacances :

-Prenez un très bon copain et son fourgon,

-Embarquez un polonais-français-suisse, pour le contage d'histoires abracadabrandes

-Amarrez les bicyclettes sur le toit (ça c'est les véritables vacances !)

-Remplissez le coffre de matériel d'escalade,

-Prenez la route du sud en direction du plus beau spot de grimpe du coin,

-Faites une pause à la boulangerie du quartier et faites un bon stock de "facturas",

-Arrêtez-vous un peu plus loin à la "carnicería" en vue d'un bon asado,

-Débarquez dans un endroit super magique,

-Plantez votre tente et ne la déplacez plus pendant 4 jours (les vacances de sédentaires parfaites !)

-Faites chaque matin, des p'tits dej' à rallonge enchaînant maté sur maté,

-Enfilez votre tout nouveau tout beau top,

-Prenez ensuite à la mi-journée la direction du grand canyon et des falaises,

-Grimpez chaque jour, quelques magnifiques longueurs en mode détendu en allant de spit en spit (Enfin des vacances reposantes !)

-Recommencez jusqu'à ce que la peau de vos doigts soit toute usée (meilleur indice de vacances réussies !)

-Régalez-vous chaque soir des bons petits plats cuisinés au feu de bois par Rami, sans oublier de basculer quelques bières et verres de vin au passage (ça change de la purée et des crackers en miettes !)

-Quittez ensuite les lieux déjà nostalgiques avec une furieuse envie d'y revenir vite !

11
avr
11
avr
Publié le 17 mai 2024

Pédal'eau... Un anniversaire bien arrosé !

13
avr
13
avr
Publié le 20 mai 2024

Un vingt-troisième mois sur la route, ça ressemble à ça !

◇ 22 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯🇺🇿🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷🇦🇺🇳🇿 (🇦🇺) 🇧🇴🇨🇱🇦🇷 (🇨🇱) (🇦🇷) (🇨🇱) (🇦🇷)

◇ 17700 km 🚲

◇ De la route ☺️, de la piste 😉 et du sentier 😒

◇ Des pentes raides 🚳

◇ Des rencontres 🧔🏽‍♂️👩🏻‍🦱👨‍🦰👴🏻🧑👨🏻

◇ Des retrouvailles 💚

◇ Du vélo 🚲, de l'autostop 👍, de la marche à pied 🥾

◇ 4 bateaux ⚓️

◇ Des paysages magiques ✨️

◇ Des couleurs de fou 🟠🟡🟢🟤

◇ 6 journées de grimpe 😊

◇ 3 spots d'escalade différents 🤩

◇ 1 journée de bloc 🥵

◇ 13 jours de pluie ☔️

◇ Du vent 🌬

◇ Du froid 🥶

◇ Un chien fou 🐕, un renard intrépide 🦊

◇ Des centaines de condors 🦅

◇ Des bivouacs improbables 🧐

◇ Des invitations 😇

◇ 8 douches 🚿◇ 6 tartes aux pommes 🍎

◇ Des nouveaux freins 👌 & un nouveau cable de dérailleur 💯

◇ Des nouveaux vêtements 👚

◇ Des trucs tout cassés 😤

◇ 143 litres de maté 🧉

◇ Un 4ème carnet terminé ✅️

◇ Un 5ème commencé ⚠️

26
avr
26
avr
Publié le 22 mai 2024

Qui a déjà grimpé en Patagonie, sait certainement qu'il faut savoir jongler avec les vents déchaînés et être à l'affût de chaque petit créneau météo.

Qui a déjà navigué dans les canaux et les fjords patagons, sait probablement qu'il faut avoir une bonne gore tex et ne pas avoir peur d'être mouillé.

Et puis, il y a ceux qui ont déjà expérimenté l'une et l'autre activité dans ces coins du monde copieusement balayés par les vents, arrosés par près d'une dizaine de mètres d'eau par an et qui s'y repointent quelques années plus tard, la bouche en cœur, perchés sur leurs petits vélos.

Les rêveurs ont toujours la mémoire courte... "Locos" un jour, "locos" toujours !

Parcourir la Carretera Austral, c'est un peu avoir la sensation de rouler vers le bout du monde. C'est s'immerger kilomètre après kilomètre dans le Grand sud.

Cette Patagonie où le paysage est façonné par le climat, celle des arbres sculptés par le vent dominant, celle des forêts luxuriantes et des arbustes piquants, celle des sommets et des gros glaciers qui dégueulent sur leurs flancs, celle des fjords labyrinthiques qui débouchent sur le Pacifique.

La Carretera Austral est l'itinéraire routier qui traverse la région de la Patagonie Chilienne.

Un itinéraire mythique, long de 1240 km qui se fraye un chemin entre côte, plaines humides et montagnes. Une qui route serpente à travers fjords, glaciers, forêts denses, sommets enneigés et brumeux, lacs bleutés et grosses rivières aux eaux tumultueuses.

Sa construction relativement récente débuta en 76 sous le régime de Pinochet et avait pour but de désenclaver les régions du sud. Bon nombre de petites villes et de villages étaient alors connectés au reste du pays uniquement par voie maritime ou aérienne et ce jusqu'au milieu des années 80.

En pédalant sur cette route, en traversant ces quelques villages, on ne peut s'empêcher d'imaginer ces zones déjà isolées et sauvages aujourd'hui aux temps de la Patagonie d'autrefois...

Entre Puerto Montt au nord et Villa O'Higgins au sud, c'est une route extrêmement vallonnée qui attend les voyageurs et un dénivelé considérable qui guette les cyclistes. Des milliers de bosses, quelques cols à franchir, quelques lacs à traverser, un peu d'asphalte et pas mal de "ripio", accompagnés d'un climat peu clément.

La Carretera Austral, c'est aussi un itinéraire carrossable stoppé net au milieu de nulle part et qui offre ainsi une belle part de surprise, de mystère et d'aventure à qui veut continuer sa route vers le sud. Lacs à traverser, pistes et même sentiers, mais ce sera une autre histoire...

Arriver à El Chalten à bicyclette, ça se mérite !

26
avr
26
avr
Publié le 27 mai 2024

Tente légère et vent patagon ne font pas bon ménage, vélo sous la pluie et séchage sous la tente non plus...

Aussi il aura fallu être imaginatifs et avoir un peu de flair pour chaque soir se trouver un abri. On peut dire que vu l'isolement du lieu et la faible quantité de construction, on s'en est pas trop mal sortis !

Du kiosque de marché à la maison en construction, de la cabane abandonnée aux gradins de stade, de l'étable à l'hôtel restaurant déserté, de l'arrêt de bus à la maison en ruine... et j'en oublie !

Changer de maison chaque soir, ça c'est la classe !

29
avr
29
avr
Publié le 1er juin 2024

De la pampa à perte de vue, vastes étendues planes quasi désertiques, herbe rase, jaune, sèche, vent qui souffle, poussière qui vole...

Soleil rasant, belle lumière, été indien...

Et puis un jour, tout est devenu plus luxuriant, des forêts primaires ont fait leur apparition sur les flancs des collines puis ces collines se sont transformées en montagnes, les rivières étaient puissantes et de l'eau s'est mise à tomber du ciel: une pluie fine mais soutenue. Doucement mais sûrement, nos vêtements s'humidifiaient...

Le vent s'est mis à souffler comme un fou, déséquilibrant les funambules à deux roues que nous sommes. Les immenses lacs se couvrirent alors de crêtes blanches, vagues qui laissaient penser que nous avions rejoint la côte et l'océan.

Dans ces conditions, les distances s'allongèrent considérablement. Les mètres de dénivelé s'accumulaient, les endroits peuplés par l'homme se sont peu à peu radicalement espacés.

Les arbres torturés par le vent se sont tous mis à pencher dans la même direction et ont pris, tous ou presque, des airs de bonzaïs géants. Les prairies se sont transformées en étendues marécageuses et les arcs en ciel ont ponctué notre route rendant le ciel gris moins triste.

Quelques rayons de soleil réussirent même parfois à se faufiler au travers de l'épaisse couche de nuages, ajoutant une lumière nouvelle au tableau.

La Patagonie excelle en la matière quand il s'agit de jouer un rôle dramatique.

Un jour, on entendit le son d'un pic qui martelait de son bec un tronc, on aperçut ensuite son plumage rouge et noir et sa silhouette élégante de "carpintero".

Les feuilles des arbres rétrécirent, les épines des buissons devinrent agressives et quelques baies de "calafate" retardataires ajoutaient quelques touches de violet. Du lychen pendait des branches tel de longues moustaches et une espèce de mousse rendait le sol aussi spongieux que moelleux.

Et puis l'asphalte se laissa envahir ça et là par du lychen. Cette dernière laissa ensuite place au "ripio" agrémenté de quelques beaux nids de poule ou de tôle légèrement ondulée. Le vent leva de la poussière et nous accompagna en nous soufflant dans le dos.

Entre averses et coups de vent, kilomètre après kilomètre, coup de pédale après coup de pédale, la Patagonie s'offrait à nous.

Et puis, au fil des jours, la pluie est devenue plus froide, les nuits nous sont apparues de plus en plus fraîches, la rosée du matin se transforma en gelée nocturne et l'eau dans nos gourdes devint un bloc de glace.

On ajouta encore des couches à nos tenues vestimentaires que l'on garda nuit et jour.

Les sommets alentours blanchirent à vue d'œil, quelques flocons de neige arrivèrent même, quelquesfois jusqu'à nous. Les jours devinrent plus courts, la nuit tomba plus vite, on se mit à dormir davantage. Les fleurs de lupins colorées étaient sur le point de faner, les fruits de cynorhodon étaient à leur apogée.

En un battement de cil et en quelques kilomètres à peine, les arbres virèrent du vert au jaune, de l'orangé au rouge vif.

L'automne patagon était là.

Toutes les conditions furent alors réunies pour que le paysage, l'ambiance et l'aventure s'embellissent encore davantage.

La route s'arrêta, stoppée net sur les rives d'un immense lac, les vélos furent amarrés sur le pont d'un bateau, de longues heures bercés par les flots. Sur l'autre rive, un chemin se transformant ensuite en sentier facilita notre ruée vers le sud.

Et puis un jour, au loin, bouquet final de ce vagabondage patagon, dans un ciel sans nuage, des montagnes rocheuses apparurent. Sommets du bout du monde, tours de roches coiffées de gîvre, aiguilles de granit semblant flotter au dessus d'une forêt en feu.

Nos sourires radieux et nos yeux brillants en disaient long...

Nous étions arrivés à destination.

4
mai

Imaginez qu'après quelques semaines de fuite vers le sud, la route de terre s'arrête soudainement sur les berges d'un grand lac et que des montagnes incroyables et chères à votre coeur se trouvent à quelques dizaines de kilomètres à vol de condors à peine. Qu'auriez-vous envie de faire ? Certainement pas demi-tour si près du bout du monde !

La première mission consiste donc à trouver, en cette toute fin de saison, un petit bateau pour traverser ce grand lac et poursuivre cette échappée vers des terres toujours plus australes...

Imaginez ensuite que de l'autre côté, quelques militaires attendent, en se tournant les pouces, qu'un ou deux voyageurs à pieds ou à vélo débarquent un jour, leurs tamponner leurs passeports et officialiser leur sortie du territoire.

La suite, c'est 15 kilomètres d'une mauvaise piste qui grimpe, suivie d'un sentier de 5 kilomètres. Cette alternance de marécages, bartassage, accrobranche et passages de ruisseaux nous valent d'établir un nouveau record de lenteur, et pas des moindres : 1km/h !!!

Un nouveau poste frontière et des douaniers qui apprennent une fois encore la patience, un tampon supplémentaire, un nouveau lac et un second bateau à dénicher : Buenos dias Argentina ! Nous revoilà !

Il ne reste plus qu'à trouver une embarcation pour traverser cette grande étendue d'eau alors que la saison est définitivement close. Un bateau de l'armée et quelques dizaines de militaires en guise de matelots, comme quoi... il ne faut jamais dire jamais ! On s'évite ainsi une nouvelle nuit frisquette et on fait une croisière à moindre frais avec vue sur le Fitz Roy !

La suite, c'est une entrée triomphale à El Chalten où presque tout est fermé et où les touristes ont déserté mais où, heureusement, quelques amis sont toujours là et les montagnes n'ont pas changé !

Une frontière définitivement pas comme les autres que l'on est pas prêt d'oublier !


6
mai
6
mai
Publié le 8 juin 2024

Quelques pages et dessins supplémentaires... Voici mon quatrième carnet terminé !

10
mai
10
mai

Parmi la variété de perles rares dont recèle la Patagonie, il y a cette drôle de formation rocheuse. Ce sommet aux parois orangées émergeant d'une pampa aux herbes jaune vif et aux contours contrastant dans un ciel bleu azur. Une massive forteresse de pierre visible à des kilomètres à la ronde, un vestige lointain d'un volcan endormi, une énorme cheminée magmatique figée et entourée d'un cône complètement érodé, une montagne d'orgues volcaniques aux airs de flan aux oeufs, gigantesque, fossilisé.

Une merveille de la nature, baptisée par les indiens du joli nom de la riviere voisine, "Cerro Apidame" puis rebaptisée "Cerro Colorado" par les colons à leur arrivée.Tout à la fois battu par les vents patagons et généreusement ensoleillé, cet étrange massif bénéficie, à n'en pas douter, d'un précieux micro-climat. Une chance inouïe quand on connaît les quantités de précipitations déversées quasi quotidiennement à quelques dizaines de kilomètres à peine.À mi chemin entre la pampa désertique argentine et les forêts luxuriantes de la Patagonie chilienne, le "Cerro Apidame" offre un peu de répit aux voyageurs ayant été un peu trop abondamment arrosés les jours précédents.

Une marche d'approche conséquente pour rejoindre la base de la montagne et des fissures raides et rectilignes à escalader proposent, quant à elles, un peu d'exercice aux badauds en manque d'effort.

Une multitude d'orgues alignés convergeant vers le ciel dans une perspective quasi parfaite offre aux grimpeurs une infinité de lignes de fuite qui ne demandent qu'à être gravies.

Si l'on considère que chaque orgue offre, de part et d'autre, deux potentiels dièdres à gravir et que chacun des dièdres est rayé ou non en son centre par une fissure de taille variée, alors, on peut affirmer, sans craindre de trop se tromper, que les possibilités de lignes à ouvrir semblent infinies sur le Cerro Colorado.

Doit-on aussi préciser que pour ajouter un peu de piment à l'histoire, ici, plus on prend de la hauteur, plus la paroi se redresse radicalement. Enfin si l'on choisit de pousuivre la balade jusqu'au véritable sommet en couronnant l'escalade par une course d'arête sur orgues en décomposition et en équilibre précaire, alors, l'aventure commence à devenir totale et inoubliable.

13
mai
13
mai
Publié le 21 juin 2024

Hier était, pour nous, une journée un peu spéciale parce que ce même jour du mois de mai 2022, il y a tout pile deux ans, jour pour jour, nous remplissions nos sacoches et sautions sur nos vélos pour la toute première fois. Deux années dans une vie, c'est si court et si long à la fois.

Des journées où les heures s'étirent du lever au coucher du soleil rythmées par l'imprévu et l'adaptation. Des journées où chaque seconde est vécue intensément de sorte que parfois, il nous semble que cela fait dix ans que notre vie est ainsi faite tant elle nous semble évidente, naturelle et "simple".

Et en même temps, tout est passé si vite. Deux années qui telles un battement de cils, qui comme un rêve éveillé, ont défilé très vite, beaucoup trop vite. Pourquoi faudrait-il déjà songer à rentrer ? Et puis où rentrer quand on a rien à soi ? Est ce aussi chouette d'être nomade dans son propre pays qu'à l'autre bout de la planète ?

On a encore tant à découvrir sur le monde, l'humanité et sur nous mêmes. Dans un mode de vie où l'on se recentre davantage sur l'essentiel, où manger, boire, avancer, se protéger des intempéries, faire en sorte de rester en vie et se reposer le temps d'une nuit deviennent nos principales occupations, où la sobriété est la clé, l'inconfort quasi permanent et le mouvement parfois fatiguant ; nos corps et nos humeurs sont parfois mis à rude épreuve. Tel deux compagnons de galère, on s'est aimé comme jamais, on a su percevoir des éclairs de joie, des étincelles de bonheur dans les yeux l'un de l'autre et parfois, fatigués, lassés et incompris, on s'est laissé agacer, on s'est quelques instants détesté sans pouvoir pour autant prendre véritablement le large.

Puis, en se rappelant ce qui nous a conduit jusqu'ici, en prenant conscience que l'on entreprendrait un tel périple avec personne d'autre que l'un et l'autre, on a grandi. Comme au Scrabble de la vie commune, je me demande parfois si ces années ne compteraient pas double ou triple tant elles furent intenses.

Que de chemin intérieur parcouru, que de kilomètres au compteur, que de rencontres fantastiques vécues et que de surprises improbables. Chaque jour est un voyage, une aventure en soi.

Désormais, nous en connaissons davantage sur le monde et plus on le découvre et plus ce dernier apparaît vaste, riche et infini. Deux années, c'est 731 matins où l'on se réveille sans n'avoir aucune idée de ce qui composera sa journée. C'est découvrir et appréhender chaque jour encore davantage ce qu'on appelle désormais "le pouvoir du vélo".

Cette chose magique et bien connue des cyclo-voyageurs qui fait que deux roues, un guidon, une selle et quelques bagages vous ouvrent les portes de la plus belle part de l'humanité. Ce simple objet métallique qui fait qu'une multitude de gens curieux et bienveillants, partout dans le monde viennent spontanément à votre rencontre et vous apportent leur aide et leur énergie alors même que vous n'aviez même pas vraiment conscience d'en manquer. "Le pouvoir du vélo", c'est quand on vous offre spontanément un bout de pain alors que vous étiez affamés, qu'on vous fait découvrir de délicieuses spécialités locales à côté desquelles vous seriez certainement passés à côté, c'est lorsque deux mains vous tendent de quoi vous désaltérer quand vous mourriez de soif ou une boisson chaude alors que vous étiez presque congelés, ce sont des enfants qu'on envoie vous porter des fruits ou mettre en pratique les quelques mots d'anglais appris à la petite école du village. C'est une porte qu'on vous ouvre en grand, un lit moelleux ou un simple bout de jardin pour planter votre tente alors que vous aviez besoin d'un peu de repos, c'est une douche fraîche, un bain chaud qu'on vous fait couler ou un lave-linge qui tourne quand vous commenciez à sentir le fennec. C'est un véhicule qui s'arrête et vous embarque vous et vos vélos pour éviter que vous ne vous fassiez aplatir, c'est quelqu'un qui baisse la vitre et demande s'il peut vous aider à quelque chose, c'est un signe de la main ou un sourire qui vous encourage quand vous n'en pouviez plus. C'est aussi parfois des cadeaux et quelques pièces de monnaie pour améliorer votre quotidien, agrémenter de bonnes choses vos repas des jours suivants ou payer une réparation de votre vélo.

"Le pouvoir du vélo", c'est des gens aux parcours de vie différents qui font connaissance, ce sont des expériences partagées, du chouchoutage en règle et des leçons de gentillesse dont on voudrait se souvenir toujours.

Hier soir, alors que nous partagions une énième fois des images du voyage sur une grande télé dans une petite salle pleine de sympathiques inconnus aux yeux curieux et aux exclamations enthousiastes, je percevais dans la pénombre, le visage de mon compagnon de vie et d'aventure. Ses yeux brillaient, il semblait ému aux larmes devant ce film vu, revu et rerevu plus d'une centaine de fois et dont il connaît chaque image, chaque paysage, chaque musique et chaque réplique !

Deux ans plus tard, le pouvoir du vélo et la magie du voyage opéraient toujours.

20
mai
20
mai
Publié le 6 juillet 2024

Symphonie du rocher, duo à cordes, concerto d'orgues, ballet de condors, numéros d'accrobates dans les fissures et contorsionnisme en tout genre entre les colonnes volcaniques.

Merci au Cerro Apidame pour tant d'inventivité !

Juste quelques images pour le plaisir des yeux...

26
mai
26
mai
Publié le 9 juillet 2024

Kilomètre après kilomètre, le grand sud se rapprochait... L'hiver arrivant à grands pas, nous nous étions fixés comme terminus de cette virée Patagone, El Chalten.

Évidemment, qu'arriver aux pieds de ces montagnes là, à vélo, avait pour nous une signification toute particulière.

En effet, l'un de nous deux y avait établi sa résidence secondaire dans les années 90 (!!) et le temps passé ici, en durée de vacances cumulée, se chiffre presque en années ! Pour l'autre, écart générationnel oblige, le dernier séjour en date est bien plus récent mais le village s'est encore agrandi depuis !

Plus le but approchait, plus l'impatience grandissait et en même temps, nous étions déjà presque un peu déçus que cette aventure à deux roues en Patagonie touche à sa fin. Comme pour retarder encore de quelques heures, notre arrivée triomphale dans un El Chalten complètement déserté pour cause de fin de saison, nous avons fait une pause d'une nuit, une vingtaine de kilomètres avant la destination finale, honorant ainsi l'invitation d'Alberto.

Un message reçu quelques heures plus tôt disait effectivement ceci :

"J'ai un hôtel à cet endroit, vous pouvez vous y arrêter, vous reposer, prendre une douche, utiliser le WiFi, manger quelque chose, boire un coup ou toute autre chose dont vous auriez besoin !"

Et voilà comment comme par magie, nous passions en quelques instants, de la rusticité de la Carretera Austral au très grand luxe !

Le genre de plan qui en voyage rend tellement heureux, un prélude au bouquet final que l'on n'est pas prêt d'oublier !

... et dire que pour certains, c'est tous les jours comme ça les vacances !!!

Un immense merci à Alberto d'avoir si bien soigné notre retour à la civilisation à l'hôtel de la Laguna Condor ce soir là puis tous les jours suivants chez lui à El Chalten !

22
mai
22
mai
Publié le 14 juillet 2024

Vingt-quatre mois sur la route, ça donne ça :

◇ 2 ans 🎂

◇ 23 pays 🇨🇵🇮🇹🇬🇷🇹🇷🇬🇪🇦🇲🇰🇿🇺🇿🇹🇯🇺🇿🇰🇬🇮🇳🇮🇩🇻🇳🇱🇦🇹🇭🇲🇾🇯🇵🇰🇷🇦🇺🇳🇿 (🇦🇺) 🇧🇴🇨🇱🇦🇷🇧🇷

◇ 18 025 km 🚲

◇ 5200 km en transports motorisés 🚙🛫🚌

◇ 1 nouveau pays 🇧🇷

◇ 1 capitale 🌇

◇ Des rencontres géniales 🩵

◇ 15 jours d'escalade 🧗‍♀️

◇ 11 grandes voies 💥

◇ 2 belles aiguilles 💉

◇ 2 séances de bloc💪

◇ 2 parties de ping pong🏓

◇ Une course à pied 🏃‍♀️‍➡️

◇ 1 tour de voilier ⛵️

◇ 2 vols en parapente 🪂

◇ 53 heures de bus 🚍

◇ Des nouveaux animaux 🦜🕸

◇ Un passage à l'hôpital des vélos 🚲

◇ Un nouveau plateau, pignon et deux nouvelles chaînes 🔧

◇ 2 musées 🖼

◇ Trois concert 🎸🪗🎻🪘

◇ 3 projections 🎬

◇ 1 nouvelle coupe 👦

◇ Des kilos de facturas 🥐

◇ Des fruits exotiques 🍉🍌🥥🫐🍊🍍🥭

◇ Des dessins 🖍

3
juin
3
juin
Publié le 19 juillet 2024

Des petits chemins Patagons aux grandes avenues de la capitale Argentine.. sans sas de décompression. Un fait insignifiant mais pourtant parlant de ce retour à la civilisation restera probablement lorsque j'ai tout bêtement fondu en larmes au tout premier coup de klaxon. Un "pouet" bien appuyé d'un taxi qui m'avait déjà frôlée à quelques reprises ces dernières secondes et dont le pare-choc devait se trouver désormais à environ 20 centimètres de ma roue arrière. Réaction ridicule de ma part mais qui pourtant en dit long sur notre déconnexion du mois passé... Ce soir là, après avoir sorti nos vélos de leurs cartons et les avoir consciencieusement remontés, nous avions quitté la gare routière. Assez vite, j'eus l'étrange sensation de nager dans un flot d'agitation. Je me sentis comme submergée par ce qui m'entourait, m'agrippant au guidon de mon vélo comme à une bouée pour ne pas couler dans cette grande houle. J'ai eu la sensation d'être dépassée et l'étrange impression d'être agressée de toutes parts : lumières artificielles des réverbères et enseignes publicitaires, phares agressifs en pleine figure, bruits de moteurs et de klaxons, proximité de toutes ces formes métalliques mouvantes autour de moi... Il faisait déjà nuit noire et la circulation à cette heure de pointe était plutôt très dense dans cette grande avenue de Buenos Aires. Tous lesvéhicules allaient au contact les uns des autres comme c'est la norme dans la plupart des grandes villes et dans de nombreux pays. L'usage du klaxon à tout va est également plus que répandu dans le monde entier et l'Argentine est pourtant très loin d'être en tête du classement à ce petit jeu là. Ceux sonnés à notre intention que ce soit pour nous saluer ou nous demander gentiment de dégager se comptent depuis le début de ce voyage par milliards ! Alors qu'y avait-il de si particulier ce soir là pour qu'un simple coup de klaxon me fasse perdre un peu les pédales ?À coup sûr, une transition bien trop rapide et un retour à la civilisation un peu trop brutale.Le trafic sur la Carretera Austral en Patagonie les semaines précédentes était effectivement aux antipodes de ces embouteillages dans les rues de Buenos Aires, ce soir là. Depuis combien de semaines roulions-nous exclusivement sur des petites routes à peine asphaltées ou sur de simples pistes de terre ? Durant des jours et des jours, nous croisions tout au plus, dix voitures par jour et à la fin plus du tout ! Les croiser nous apportait presque un peu de baume au cœur : un geste, un sourire, une option si la nourriture venait à nous manquer ou si un ennui mécanique s'immisçait dans l'aventure... Depuis combien de temps n'avions-nous pas roulé de nuit, éclairés par une lueur autre qu'un simple rayon de lune ? À quand remontait notre dernier passage dans une très grande ville ? Combien de temps sans bruit autre que ceux de la nature, sans qu'un klaxon ne retentisse à nos oreilles ? Tant de temps sans que nous n'ayons besoin d'avoir un œil constamment dans le rétro ? Voilà, de ces quelques sanglots, tout est dit ou presque... Je me sentais comme un "indien" d'un pays lointain débarquant dans une ville.Jusque là, il nous fallait composer avec des nids de poule profonds comme des baignoires, des bourrasques de vent bousculantes, une pluie fraîche qui mouille et refroidit, des flocons de neige qui glacent la peau et des nuages de poussière qui volent. Désormais il nous fallut zigzaguer entre les bus, les tramways, les voitures, les camions, les motos, les piétons et aussi d'autres vélos. Il nous fallut déjouer les coups de klaxon, les feux qui passaient au rouge et appréhender correctement dans le rétro, les distances avec les phares qui nous suivaient de très près quand il s'agissait de traverser perpendiculairement et sans se faire aplatir une avenue de 8 voies !Cette fois, c'est sûr, le passage du grand sauvage à la civilisation dense me chamboulait un peu... Il était temps d'arriver à destination ce soir, demain serait un jour nouveau !Une bonne nuit de sommeil sur les énormes matelas de la salle de bloc du Centro Andino de Buenos Aires, notre petite tente en guise de moustiquaire, de l'eau chaude qui s'écoulait des tuyaux pour se laver abondamment et puis un kilo de "facturas" en guise de petit déjeuner, une nouvelle vie pouvait désormais commencer ! Buenos dias Buenos Aires !

3
juin
3
juin
Publié le 24 juillet 2024

En prenant le pouvoir en mars 1976, le Général Videla met en place le "proceso de reorganizacion national". Cela marque le début d'une douloureuse page de l'histoire argentine. Une violente dictature est instaurée.

Tout supposé opposant au régime est alors systématiquement traqué, enlevé, torturé ou tué. Des milliers de personnes furent victimes des "vols de la mort", des convois d'avions ayant pour missions de faire disparaître les gens en les jetant vivants et drogués depuis le ciel en pleine mer ou dans un grand fleuve.

On estime à environ 30 000 le nombre de "desaparecidos".

Près de 500 bébés nés en centre de détention et de torture furent également enlevés et placés dans des familles de militaires ou sympathisantes du gouvernement. Mères et grands-mères prirent alors l'initiative de se mobiliser, d'entreprendre des recherches et de réclamer activement que justice soit faite.

Durant des dizaines d'années, elles se rassemblèrent tous les jeudis après-midis sur la Plaza de Mayo à Buenos Aires.

● Memoria, verdad y justicia ●

De cette triste période, javais envie de partager avec vous ces quelques images capturées au "Museo sitio de memoria" de Buenos Aires situé dans un ancien centre de détention et de torture, sur les murs de la ville et un dessin que cette page de l'histoire m'a inspirée.

À ce sujet, deux très bons affaires sensibles sont à écouter :

"Les bébés volés de la dictature Argentine" qui explique bien le combat de ces grand-mères et leur détermination pour retrouver leurs petits enfants.

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/affaires-sensibles/les-bebes-voles-de-la-dictature-en-argentine-2709260

"Opération Condor" ou la participation de la France qui a généreusement apporté à la dictature argentine ses connaissances et compétences en matière de torture. Ben oui... on s'était déjà entraîné en Algérie quelques années plus tôt ! Une page pas bien glorieuse de notre histoire ce coup-ci.

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/affaires-sensibles/operation-condor-en-amerique-latine-7289161

2
juil
2
juil
Publié le 3 juillet 2024

Partir français, revenir humain..

Poussez la porte de chez vous et vous deviendrez en quelques instants à peine cette mystérieuse personne que l'on nomme "l'Étranger".

L'étranger, c'est le monsieur du quartier d'à côté, c'est la dame du village voisin ou celui qui vit à l'extrémité opposée du même petit pays. Bref, celui qui vient d'ailleurs. Et puis si vous poussez un peu plus loin votre vagabondage vous deviendrez alors l'étrange habitant d'un pays lointain et inconnu.

Vous aurez alors beau avoir une très large base commune avec vos congénères : deux pieds pour parcourir le monde, un nez pour respirer le parfum des fleurs et une bouche pour sourire et pourtant..

Ce n'est pas au fait que vous ayez des mains pour gesticuler quand vous ne parlez pas la même langue que vos interlocuteurs ni au fait que votre cœur batte au même rythme, ni à vos deux grands yeux curieux de découvrir le monde que l'on s'attachera. On cherchera plutôt ce qui, chez vous, est différent. On notera que votre peau est plus claire ou plus foncée, on dira de vos cheveux, qu'ils sont plus lisses, plus clairs, plus crépus et plus sombres, on parlera de vos yeux, de leurs couleurs et de leurs formes, on dira de votre taille et votre corpulence qu'elle est plus ceci ou moins cela. On fera des hypothèses sur le fait que vous croyez en un dieu plutôt qu'en un autre, sans jamais imaginer que vous ne pouvez croire simplement et c'est déjà beaucoup en l'humanité.

De votre bouche et des sons qui en sortiront, on entendra cet enchainement de tonalités bizarres et quand bien même vous parlerez le même dialecte, on captera dans le flots de vos mots, une sonorité ou une expression quelque peu exotique. Vous serez alors démasqué !

Nous sommes tous l'étranger de quelqu'un.

Depuis la nuit des temps, l'homme a toujours chercher à circuler, par nécessité ou par envie : à la recherche de nourriture, d'un climat et d'un environnement plus propice à la vie, pour fuir des oppressions et des violences, des catastrophes naturelles ou simplement pour partir explorer le monde.

Aussi, nous sommes tous issus de migrations en tous genres et en tous sens.

Il y a plus de deux ans, nous avons pousser cette porte. Nous sommes allés voir ce qu'il y avait derrière cette forêt, après cette mer ou de l'autre côté de cette montagne. Nous avons traversé un bout de la planète et en chemin, nous avons rencontrés des milliards d'humains et nous sommes ainsi devenus "leurs" étrangers.

Nous avons été ces gens qui viennent d'ailleurs, ces visages aux traits différents, cet homme et cette femme aux peaux tantôt plus pâles tantôt plus bronzées que la moyenne, parfois trop peu vêtus, qui s'expriment dans un dialecte toujours incompréhensible, aux mœurs différentes et aux goûts culinaires étranges.

Partout dans le monde, des hommes, des femmes et des enfants curieux ont fait un pas vers nous, sont venus à notre rencontre, ont cherché à communiquer, nous ont proposé de l'aide alors même que nous avions l'impression de ne manquer de rien. Partout, on nous a offert un verre d'eau quand nous étions assoiffés, tendu un bout de pain quand nous étions affamés, proposé une boisson chaude quand nous étions gelés. Partout, une porte s'est ouverte quand nous étions perdus, fatigués, cabossés ou vulnérables à la merci des éléments. Partout, nous avons été touchés par la curiosité, l'ouverture d'esprit, la gentillesse, la bienveillance, l'hospitalité et la solidarité.

Pourtant... partout dans le monde, nous avons aussi croisé ces yeux fatigués, ces visages marqués, ces corps usés, ces travailleurs étrangers et cette main d'œuvre immigrée se tuant à la tâche.

De ces maçons turcs travaillant sous un soleil de plombs, à ces remorques surchargées rentrant des champs pleines de réfugiés syriens, en passant par ces ouvriers indiens des castes les plus basses véritables esclaves des temps modernes, ces thaïs ramassant à quatre pattes des salades japonaises ou encore ces mineurs boliviens... Pourquoi est-ce que c'est toujours à la main d'œuvre étrangère qu'on laisse les tâches aussi ingrates que mal rémunérées ?

Partout dans le monde, on nous a questionné sur nos vies, sur nos familles, sur notre pays.

Souvent, les gens évoquaient la France avec des étoiles dans les yeux, on nous a parlé de la révolution et du pays des droits de l'homme.

Si seulement ils savaient...

S'ils savaient qu'aux pays des lumières, les plombs ont sauté.

S'ils savaient que partout en France, un dimanche matin, des hommes et des femmes se sont levés, ont petit-déjeuné et sont allés se perdre dans l'isoloir.

S'ils savaient que partout dans le pays, des français•es se sont déplacé•es pour glisser dans une toute petite enveloppe une très grande mise en péril de nos libertés, de notre démocratie et de quelques uns de nos droits fondamentaux.

S'ils savaient que partout en France, ces bouts de papier dans ces urnes véhiculent un appel à la haine de l'étranger, au rejet de la différence, à l'inégalité, au nationalisme, à l'homophobie et au racisme.

S'ils savaient que des scores records furent même enregistrés dans de petits villages où les habitants n'ont jamais vu un migrant et où il n'y a clairement aucune problématique d'insécurité.

S'ils savaient que partout en France, certains trouvent plus judicieux de rendre la police plus forte que l'école plus juste.

S'ils savaient que le discours des médias et que le cheval de bataille des politiques sont de cultiver et faire grandir la peur de l'autre.

S'ils savaient que partout en France, le paysage politique s'assombrit, ils trouveraient notre pays beaucoup moins radieux.

À l'heure où partout sur la planète, le niveau des océans s'élève, où les montagnes s'écroulent et où les forêts brûlent,

À l'heure des inondations dévastatrices et des catastrophes naturelles inédites,

À l'heure où les températures grimpent et où des zones entières s'assèchent rendant la vie humaine impossible,

À l'heure où l'on estime que dans les dix prochaines années, environ un tiers de la population mondiale, sera contrainte de changer de lieu de vie à cause du changement climatique,

A l'heure où la surface sur le globe des zones propices à la vie humaine rétrécie et où le maître-mot devrait être entraide entre les hommes.

A l'heure où de grandes migrations climatiques sont sur le point de se mettre en marche, la solidarité entre les peuples ne devraient-elle pas être plus forte que jamais ?

À l'heure où dans les zones privilégiées l'on devrait être prêts, à accueillir, à aider et à soigner, à ouvrir nos portes, nos bras, nos cœur, on choisit de les fermer.

À l'heure où nos poubelles de supermarchés débordent chaque jour de nourriture gaspillée, on craint que l'étranger nous vole notre pain quotidien.

À l'heure où la vraie menace de l'extrême droite n'a jamais éte aussi forte, on diabolise ceux et celles qui prônent un partage plus équitable des richesses.

À l'heure où des innocents abandonnent leur maison, leur famille, s'échappent de leur pays, fuient des guerres, des oppressions ou des violences, quand il fuient un régime totalitaire, peut-on continuer à croire qu'ils viennent chez nous pour faire du tourisme, profiter du système, piquer le boulot des français ou brûler nos bagnoles ?

Et puis...si on inversait les rôles ? Si les habitants d'un pays dirigé par l'extrême droite, par un régime totalitaire, c'était nous ?

En regardant, cette sombre carte de France depuis le bout du monde, je n'ai pas le mal du pays mais j'ai mal pour notre pays.

Nous sommes capables du meilleur mais là, nous sommes en train de frôler le pire.

Alors réveillons-nous, indignons-nous et souvenons-nous... Nous sommes TOUS l'étranger de quelqu'un.

9
juil
9
juil
Publié le 29 juillet 2024

23h... il fait nuit noire, nous filons dans les rues de Rio de Janeiro.

Ce soir, nous pédalons à toute vitesse pour tenter d'aller attraper un bus de nuit. Jeter nos montures et nos bagages dans son ventre puis nous y blottir à notre tour. Regarder les lumières de la ville défiler et se sentir aussi chanceux que soulagés de ne pas avoir à pédaler sur cet infernal réseaux de rocades et d'autoroutes : quitter une grande ville, ce n'est pas toujours facile.

Ce coup-ci, cette affirmation est d'autant plus vraie et ce n'est pas simplement une question de voies rapides et de véhicules lancés à toute vitesse dans l'obscurité. En effet, cela fait presque un mois que nous avons débarqué, ici, à Rio, pour la première fois et ce soir, on s'y sent étrangement, un peu comme chez nous.

Aurait-on imaginé séjourner aussi longtemps dans une si grande agglomération ?

Alors que nous appuyons comme des fous sur les pédales et que les minutes s'égrènent à toute vitesse, des panneaux signalétiques parsèment notre parcours et affichent le nom de différents lieux : "Leblon", "Ipanema", "Pão de Açúcar", "Botafogo", "Corcovado", "Flamengo"...

Chacun d'eux résonne en nous.

Chaque nom revêt désormais un sens tout particulier pour nous, ce soir là, alors que nous nous apprêtons à quitter la ville : un lieu où nous sommes allés, une activité particulière, une rencontre marquante, un bon moment partagé...

La gare routière se situe exactement à l'opposé de notre point de départ : 25 km, ce n'est pas rien pour traverser juste un petit bout d'une seule et même ville. Cela donne la mesure de l'immensité de cette mégalopole.

Le timing est serré et une fois de plus, on aurait vraiment dû se mettre en selle plus tôt. Mais ce coup-ci, nous avons une excuse en or massif pour ne pas avoir largué les amarres avant.

Il y a encore quelques minutes à peine, nous nous trouvions dans un appartement cossu du riche quartier de Leblon, une coupe de champagne dans une main, une énième petite assiette remplie d'un met délicieux dans l'autre.

Sur la table, un énorme gâteau coloré trônait. Il incarnait à lui seul la tentation parfaite de laisser filer cette idée de gare routière et de bus de nuit pour prolonger encore un peu notre séjour à Rio, d'une soirée supplémentaire, tout du moins.

Doit-on ajouter que cela faisait déjà pas loin d'un mois que nous essayions de quitter la grande ville brésilienne ? Le hasard des rencontres en a décidé autrement...

Autour de nous quelques visages désormais très familiers et la plupart des autres parfaitement inconnus. En bruit de fond, une mélodie elle aussi particulièrement familière à nos oreilles et pour cause... Telle une contre soirée, certains convives de cette fête d'anniversaire étaient assis devant une énorme télé, dans un coin du salon, et visionnaient le film retraçant nos deux années de voyage, qu'ils avaient trouvé sur YouTube. Pendant ce temps, nous nous empiffrions de tout ce qui tombait régulièrement dans nos assiettes et avalions ce qui venait remplir, à intervalles réguliers, nos verres. La situation était surréaliste.

Lorsque le moment fatidique du grand départ pour la gare routière finit tant bien que mal par enfin arriver, l'absurdité de la situation monta encore d'un cran : La moitié des invités déserta alors l'appartement en fête, la table du copieux buffet et les coupes de champagne pour nous rejoindre dans l'ascenseur et poursuivre encore un peu la soirée dans le parking sous-terrain de l'immeuble autour de deux vélos plein à craquer et deux cyclistes aussi pressés par le temps que gênés d'avoir ainsi planté la soirée de cette fête d'anniversaire de Marcio !(Marcio deviendra plus tard notre parrain Carioca, notre bienfaiteur brésilien, notre mécène de Rio mais à ce moment là, nous ne le savions pas encore vraiment !)

Quelques photos furent même capturées dans ce décor urbain et underground puis des accolades et des bises furent échangées, enfin, de grands au-revoirs et signes de la main nous suivirent jusque dans la rue ! On aurait dit le top départ du Vendée Globe dans les rues de Rio de Janeiro !

Un des avantages du vélo est que l'on a beau mouliner de toutes ses forces avec ses jambes, cela laisse du temps à l'esprit de divaguer.

Dans cette étape cycliste et nocturne du contre la montre reliant cet appartement festif à la gare routière de Rio, l'intégralité de notre séjour dans cette grande ville brésilienne défilait sous nos yeux et s'imageait dans nos esprits.

Le mouvement des pédales agissant comme une formidable machine à remonter le temps et comme un agitateur d'émotions.

[Rendez-vous au prochain épisode pour une visite guidée de Rio de Janeiro by night au rythme des tours de pédales et des vagues de souvenirs qui déferlent.]

9
juil
9
juil
Publié le 1er août 2024

[Une traversée cycliste et nocturne de Rio et une boîte à souvenirs grande ouverte...]

23 h10, nous nous sommes enfin échappés, avec brio, de la grande fête. Ce ne fut pas simple, les invités ne pensant qu'à nous gaver de quelques délicieux toasts supplémentaires en ayant encore mille et une questions à nous poser. Le bus, quant à lui, n'allait certainement pas attendre que les bougies soient soufflées, le gâteau dévoré et tous les verres vidés pour se décider à se mettre en marche !

Nous voici donc en selle : direction la gare routière !

Au bout de la rue, un tout premier panneau indique la direction opposée à celle que nous devons emprunter pour nous rendre à la gare routière, il y est indiqué "Praia de são conrado". Une plage qui, pour moi, sonne comme l'arrivée du semi-marathon de Rio dans lequel je me retrouvais quelques semaines plus tôt, embarquée par le plus grand des hasards, un dimanche matin, après une courte nuit et 3 heures de sommeil au compteur, sans dossard et équipée de baskets pointure 40 pour mes petits pieds chaussant du 37. On court plus vite avec les bottes de 7 lieues !

[Pour la petite anecdote, on parle de "pipoca" quand il s'agit de participer à une course sans y être inscrit. "Pipoca" cela signifie "pop corn" en portugais, mignon non pour une athlète en carton ?!]

Pour Bruno, la plage de São Conrado est, quant-à elle, synonyme de zone d'attero exotique entre palmiers, sable fin, baigneuses en bikinis et marchands de noix de coco. Le hasard des rencontres, le prêt d'une voile de parapente et un envol depuis le classique et mythique sommet de Pedra da Gavea redonnait à ce terrien des désirs célestes ! Une grande voile appartenant à un parapentiste de 90 kg prêtée à un cyclo-grimpeur au poids plume, ça fonctionne à condition de se lester d'un peu de matériel d'escalade et d'avoir un bon chien de traîneau au déco !

Mais revenons à nos moutons... Quelques coups de pédales supplémentaires, nous mènent ensuite jusqu'à Ipanema. Ipanema, c'est comment dire... chez nous ! C'est ici que vivent Lise, Aurélien, Tilly et Eliott et c'est dans leur immense appartement aux grandes baies vitrées, donnant sur la lagoa, que nous avons posé nos sacoches à Rio ! Rencontrés lors d'une projection de notre film au Centro Excursionista Brasileiro, les échanges qui suivirent le film furent si riches et si enthousiastes que nous nous retrouvâmes invités par cette adorable famille française. Logés, nourris, blanchis et même plus encore, nous aurons été complètement chouchoutés et notre séjour à Rio s'en est trouvé considérablement allongé.

C'est bien simple, on a vraiment cru qu'on n'zen repartirait jamais !

Un frigo toujours plein à craquer de délicieuses choses, une chambre et une salle de bain rien que pour nous et par la fenêtre, on aurait presque pu tirer un rappel pour accéder à la paroi faisant vis à vis. Aussi chaque matin, durant le petit déjeuner, le petit jeu consistait à compter le nombre de cordées dans les grandes voies.

La suite de la journée était toujours bien remplie. Quel programme ! Balades, vélo, grandes voies, séances de bloc, parapente, gym, course à pied, musée, marché, ostéo, concert, compétitions d'escalade à la télé, plage, fondue, pizzas, crêpes et tarte tatin ! De quoi largement recharger les batteries à les faire même exploser de tant d'énergie, de bienveillance et d'amour !

Sûr que nos chemins se recroiseront les amis !

Un peu plus loin, nos roues roulent le long de la plage de Copacabana. Une piste cyclable, déjà parcourue à maintes et maintes reprises ces derniers temps, nous permet de remonter cette plage aussi mythique qu'interminable.

On peut dire que nous avons connu et fréquenté Copacabana dans tous ces états : En mode après-midi ensoleillé, le temps d'un week-end où nous étions venus détendre nos orteils en marchant sur le sable humide après une grande voie en dalle dans des chaussons qui martyrisent les pieds. Il fallut alors zigzaguer entre les châteaux de sable et les enfants qui jouent, les grosses personnes échouées sur le sable en plein soleil, les quelques rares baigneurs qui défient les grosses vagues, les marchands ambulants de cocktails, les joueurs de foot qui arrivent à faire des trucs de dingue avec un pied qu'on n'arriverait même pas à faire avec nos deux mains ! Ici la mode semble être au maximum de volume corporel et au minimum de surface de tissu: seins et fesses ultra volumineux et maillots de bain extra minuscules. Copacabana, c'est "the place to be" pour être à la page de tout ce qui se fait de plus tendance en matière de chirurgie esthétique !

On a aussi vu Copacabana sous la pluie et vide un jour de semaine mais c'est aussi ici qu'on a sûrement vécu notre plus grand bain de foule quelques semaines plus tôt. Concert gratuit de Madonna sur la plage de Copacabana, le fameux "Celebration tour"... Imaginez le cirque ! On s'est retrouvé pressés comme des citrons dans la foule, on a attendu des heures parce que madame commença le spectacle avec plus d'une heure de retard, on a entendu des chansons qu'on ne connaissait pas du tout, on a entendu les gens hurler et on en a vu d'autres tellement contents qu'ils pleuraient beaucoup. Nous ça nous a fait ni chaud ni froid, on a rien vu ou presque... mais on y était !! Concert de Madonna à Copacabana, stylé non ?

Un peu plus loin alors que nous roulons aussi vite que possible, un panneau indique que le "Pão de Açúcar" se trouve sur notre droite. Le Pain de sucre !

La paroi la plus fameuse de Rio sur laquelle on trouve la voie d'escalade la plus célèbre du Brésil : "la voie des Italiens" ! Dès le lendemain de notre arrivée, à 6h du matin, nous étions au pied de cet impressionnant "moro", accompagné de Silvio Netto, on ne pouvait pas rêver meilleur guide !

Ami d'ami d'ami, nous avions contacté Silvio quelques jours plus tôt pour finalement se rendre compte, arrivés au point de rendez-vous, que Bruno et Silvio s'étaient déjà rencontrés, il y a des années en Patagonie ! Silvio, c'est la bonne humeur et la bienveillance incarnée. Évidemment, il connaît chaque minuscules prises du Pain de Sucre comme sa poche mais c'est surtout son sourire et ses anecdotes qui nous guident durant ces 300 mètres de grimpe.

Il est à peine 8h et quelque lorsque nous débouchons sur les terrasses sommitales. Simple, rapide, efficace et enthousiaste. Quel autre guide local serait venu avec plaisir parcourir un dimanche matin cette voie déjà escaladée un million de fois ?

Au sommet, à cette heure matinale, la chaleur arrive à peine, les touristes sont déjà là. Après un tour d'horizon, nous sautons dans la télécabine. Voyage descente offert à toutes personnes montées ici par leurs propres moyens !

Mais revenons à nos vélos et à notre trajet vers cette maudite gare routière. L'heure tourne, les kilomètres s'accumulent au compteur.

Ici, une autre pancarte indique une nouvelledirection. "Botafogo", c'est dans ce quartier que se trouve notre toute première maison à Rio. Quelques jours avant notre arrivée dans la capitale Carioca, les mystères des algorithmes des réseaux sociaux ont fait qu'Instagram m'a proposé de découvrir le profil d'Anita. Zéro connaissance commune mais une photo de profil sur laquelle on pouvait voir du rocher de couleur sombre faisant penser au paroi de Rio. Je me décide à lui écrire, elle fait le choix de me répondre. Je lui explique que l'on prévoit de débarquer dans quelques heures à Rio et qu'on nous a déconseillé d'expérimenter le bivouac urbain dans la grande ville brésilienne. Elle confirme et propose spontanément de nous inviter chez elle. Son copain étant absent ces jours-ci, elle est seule avec ses deux chiens. Nous nous serrons donc tous les cinq quelques jours durant dans son minuscule appartement. Pour accéder à ce dernier, il n'y a pas moins de 500 marches à grimper : stage remise en forme assuré !

Botafogo, c'est un quartier bien sympathique un petit marché plein de fruits colorés tous les samedis matins. Ce sont des vendeurs qui rigolent, qui s'interpèlent, qui discutent avec les clients et qui semblent heureux de voir deux touristes ici. Au marché de Botafogo, tout le monde semble être amis !

Mais Botafogo c'est aussi un accès sur la baie de Rio et un petit port de plaisance.C'est justement au centre nautique qu'une après-midi, nous retrouvons Wally, rencontré au Centro Excursionista de Rio qui nous invite à faire une virée sur son voilier.

À notre tour, nous invitons Silvio et l'équipage est au complet ! Un capitaine et trois matelots en route pour aller admirer le coucher de soleil sur le Pain de Sucre.

Mission réussie ! Décidément le club Med à Rio, c'est vraiment chouette, merci Wally !

23 h 23... encore une dizaine de kilomètres à parcourir ce soir mais je ne peux m'empêcher de rêvasser encore un peu.

Je pédale le nez en l'air, le ciel est partiellement couvert mais entre les nuages, des milliers d'étoiles scintillent. Parmi elles, tout là haut, un grand gaillard blanc, bras ouverts, debout face au vide et éclairé de dizaine de projecteurs veille sur la ville presque endormie.

Le Christ rédempteur, perché au sommet du Corcovado est sûrement ce qui symbolise par excellence Rio de Janeiro.

Quelques jours plus tôt, nous étions nous aussi au pied de cet immense bonhomme de 38 metres de haut adulé par les foules. Au milieu de ces centaines de touristes venus du monde entier jusqu'à Rio "pour monter là haut 🎶" , deux extra-terrestres, sortirent des buissons surplombant la falaise, enjambèrent la balustrade de la terrasse panoramique... un baudrier, plein de quincaille et une corde sur l'épaule.

Il ne fallut pas longtemps au service de sécurité du lieu pour repérer les deux huluberlus débarqués des coulisses et se rendre compte que, Ô mon dieu, St Bruno avait le torse completement dévêtu.

Pas de bras, pas de chocolat !

Pas de polo, pas de Corcovado !

C'est écrit dans la bible, paraît-il...

C'est ainsi que l'on nous demanda gentiment de déguerpir au plus vite de ce lieu sacré ! ... C'est marrant parce que d'habitude, sauf erreur de ma part, dans les églises, c'est toujours le même mec qui a oublié de mettre son t-shirt avant d'aller se faire clouer sur une croix ! Allez, j'arrête...

Ce coup-ci, il commence à bruiner.

Dommage, on risque d'arriver à destination non seulement en retard mais aussi mouillés !

Un panneau à gauche indique Flamengo, c'est ici que vit Anne chez qui je me suis retrouvée à assister moi et ma souplesse légendaire à un cours de fitness (si si !), un peu plus loin Santa Tereza et ses fameux "Escaliers Selarón" tout couverts de carreaux de céramiques glanés dans le monde entier.

Un peu plus loin, voilà Pedra do sol et sa place qui chaque lundi soir s'anime au rythme des joueurs de samba.

C'est ainsi que je parcours les derniers kilomètres de ce trajet avec ces airs musicaux en tête.

Il pleut désormais, il fait aussi nuit noire mais dans ma tête, il fait soleil !!

[Suite et fin, à suivre...]

29
juil
29
juil
Publié le 3 août 2024

[Une course contre la montre dans les rues de Rio by night : suite et fin...]

Alors que la gare routière n'est plus qu'à quelques encablures et que tous ces souvenirs se mêlent et s'entremêlent sur des airs de samba dans ma tête, j'ai finalement un sentiment étrange. Il faudrait des années pour découvrir chaque recoin d'une si grande ville.

Pourtant ce soir, alors que l'on s'apprête à quitter Rio, on s'y sentirait presque un peu comme chez nous. Nous avons passé quasiment un mois ici. Un mois dans une vie nomade, c'est presque une parenthèse sédentaire. Les noms des différents quartiers de cette ville résonnent en nous. Nous y avons fait de vraies rencontres et partagé du très bon temps avec certains de ses habitants, nous avons escaladé les principales parois, gravis les sommets les plus célèbres.

Nous avons marché dans les ruelles raides des favelas, nous avons écouté de la samba le lundi soir, nous avons marché sur l'immense plage de Copacabana, nous avons vu le jour décliner depuis le sommet du Corcovado et vu le soleil se coucher sur le Pain de Sucre : Ce soir, on se sentirait presque un peu Cariocas !

Et en même temps, je ne peux m'empêcher de repenser à ce premier soir... C'était un mois plus tôt, il faisait nuit et nous venions de passer plus de cinquante heures dans un bus quand nous débarquâmes dans cette même gare routière. Cinquante quatre heures et un bond de presque 3000 kilomètres : Buenos Aires - Rio de Janeiro.

D'un environnement familier à l'inconnu le plus total.Non seulement nous débarquions dans un nouveau pays, nous allions rencontrer une nouvelle culture et entendre une nouvelle langue mais nous nous trouvions également catapultés, fatigués, en plein centre du pays, dans une très grande ville et en pleine nuit.

Rio.

Trois lettres qui représentaient à elles seules un grand nombre d'inconnus, une consonne et deux voyelles qui actaient notre entrée au Brésil, un nom exotique qui attisait notre curiosité. Aurait-on imaginé voyager ici, une fois dans notre vie ? Aurait-on cru qu'on pédalerait un jour à Rio de Janeiro, dans ces petites rues sombres, sales et animées ou sur ces grandes avenues éclairées et désertes ?

Les diverses prises de contacts et d'infos auprès des amis brésiliens d'amis français ou argentins, auprès de connaissances de connaissances éloignées, les multiples messages échangés durant ce long trajet en bus qui avait précédé notre arrivée au Brésil n'avaient été que mise en garde et sources d'inquiétudes. Certains se voulaient toutefois nuancés: disant que Rio était une ville belle, sympa mais très dangereuse, où que le Brésil était un pays pauvre, dur mais attachant, quand d'autres étaient définitivement alarmistes sans n'apporter d'ailleurs aucune aide et aucune réponse aux questions posées !

La psychose ne me semblait parfois pas loin... À quoi bon vouloir tant nous effrayer puisque de toutes façons, nous étions déjà là, nous et nos vélos et que nous n'étions pas prêts à changer radicalement nos manières de voyager ni d'appréhender le monde et les humains.

Il faudrait néanmoins, et c'est le cas à chaque nouvelle frontière, observer, comprendre et s'adapter à ce nouveau rythme et façon de vivre. Combien de fois depuis notre départ, avions-nous déjà entendu dire que tel endroit était dangereux, qu'il ne fallait pas se déplacer à vélo dans tel autre, qu'il valait mieux éviter de sortir la nuit ici ou ne pas se balader seul là bas ?

Autant de craintes qui se sont le plus souvent révélées relativement infondées ou exagérées. Plus qu'une insécurité avérée, il s'agissait la plupart du temps d'une histoire de chance ou plutôt de malchance, d'une mauvaise rencontre comme cela peut se produire un peu partout dans le monde. Mais ce coup-ci, tout les discours semblaient unanimes et des mots un peu inquiétants parvenait à nos oreilles sans que l'on puisse réellement les filtrer : vol, braquage à main armée, viol, agression, flingue, disparition... Nous n'avions encore rien vu, rien perçu et déjà on était prêt à imaginer le pire !

De ces échanges, on finit par conclure que le bivouac urbain n'était peut-être pas l'idée la plus judicieuse. On se mit alors en quête, pour cette première soirée, de quatre murs où passer la nuit et d'un lieu sûr pour déposer nos affaires le temps où nous irions grimper. Les hasards des algorithmes d'Instagram, la solidarité des grimpeurs et de compatriotes français feront le job à merveille. Durant un mois, nous serons hébergés et accueillis ici et là comme prince et princesse !

Pour la première et unique fois du voyage, nous décidions pour ce premier trajet vers le centre ville, de ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier : c'est à dire appareil photo, passeport, argent, téléphone, go pro, cartes SD et clé USB dans la même sacoche de guidon. Je me rappelle m'être sentie quand même un peu ridicule de répartir nos uniques biens de valeurs dans les différentes sacoches d'un seul et même vélo. Cétait un peu comme ne pas avoir bien compris que si nous devions tomber nez à nez avec un gros voleur armé d'un pistolet, ce ne serait certainement pas un débutant !

Ce soir, un mois plus tard, lors de ce même trajet en sens inverse, tous nos œufs se trouvent à nouveau dans le même panier. Comme un signe, nos plus précieux objets se trouvent à nouveau réunis dans la même sacoche : la plus accessible et la plus simple à ouvrir. Ce soir, on ne parle toujours pas la même langue que les gens autour de nous, pourtant on parvient à communiquer avec eux. Nous ne sommes pas inquiets, nous connaissons ces lieux, nous avons confiance en l'humain et nous sommes prêts à suivre et à écouter encore un peu notre instinct.

Ce soir, nous connaissons un petit peu mieux Rio mais il nous reste tout le Brésil à découvrir ! Et on a hâte !

Comme une ironie du sort et en guise de conclusion...

Minuit, après ce semi-marathon à deux roues, nous voici arrivés en temps et en heure à la "rodoviaria", la gare routière. Sur le quai d'embarquement, le bus est déjà là, pourtant en quelques secondes, on comprend que les vélos ne sont pas les bienvenus à bord de ce bus de nuit à étage et à petites soutes, on comprend assez vite qu'il n'y a pas vraiment de négociation possible et on en déduit enfin qu'on va se retrouver, d'ici peu, comme deux couillons avec nos billets périmés à la main sur le quai en regardant le bus s'éloigner. Notre compréhension s'avéra plutôt exacte et c'est à peu près comme ça que la scène se déroula !

"Coucou, c'est encore nous !"

C'est ainsi qu'à minuit et demi, nous informions nos hôtes que nous reprenions le chemin en sens inverse et que nous serions Cariocas pour une nuit encore !

Le ciel de Rio se mit à pleurer et la pluie ne fit que s'intensifier durant plus de 24 h. Nous n'avions pas vu une goutte d'eau ici, jusque là.

A 2 h du matin passé, nous étions comme deux chats de gouttières mouillés. La porte était encore ouverte, le lit était fait, une douche chaude, des vêtements de rechange nous attendaient et le lendemain matin une nouvelle journée à Rio commençait avec en guise de petit déj, une grosse pile de crêpes !

Merci à Anita, Lise, Aurélien, Tilly, Elliot, Marcio, Sida, Wally, Silvio, Leo, Mel, Guillaume, Judith, Augustin, Anne et David d'avoir fait de nous de petits Cariocas de cœur !

[Fin]

1
août
1
août
Publié le 6 août 2024

À Rio de Janeiro, la visite touristique, ça commence sur le rocher !

Le Pain de Sucre est sûrement LA paroi la plus connue du Brésil mais ne vous y méprenez pas, on trouve ce genre de collines rocheuses (inselbergs) un peu partout dans la ville de Rio et même dans différentes régions du pays.

Au Pão de Açúcar, la voie des Italiens est l'archi-classique du coin. Le lendemain de notre arrivée à Rio, nous étions déjà, de très bon matin, au pied de ce gros monolithe de gneiss et en très bonne compagnie ! Anita, notre bienveillante hôtesse se joint à nous et Silvio l'un des plus fameux alpiniste brésilien nous guide.

Silvio et Bruno s'étaient rencontrés en Patagonie, il y a des années mais ils ne s'en rendront compte qu'une fois au point de rendez-vous. Se lever à 4 h 30 un dimanche matin, pour venir nous accompagner dans une voie déjà parcourue pas loin d'un millier de fois avec des clients dit tout de l'immense gentillesse de Silvio.

En parcourant, la voie des Italiens, le ton est donné pour toutes les autres escalades brésiliennes qui suivront ! Trente degrés à 8h du matin, dalles et points bien éloignés, ce n'est pas dur mais il ne faut pas tomber !

Ici la descente en télécabine est offerte à tous ceux qui sont montés jusque là par leurs propres moyens. Sympa comme concept ! Et comme on kiffe quand c'est gratos, on aura plutôt bien amorti le cadeau en gravissant le Pain de Sucre à trois reprises par trois voies différentes !

On remet donc le couvert, le jour suivant pour une autre grande classique d'un tout autre genre. C'est bien simple, au Brésil, deux styles d'escalade prédominent : la dalle et la cheminée. On a testé le premier, reste à expérimenter le second.

Rendez-vous donc sur le Totem, cet espèce de gros pilier qui borde la face Ouest. De part et d'autre se trouvent deux cheminées, la "Cheminée stop", à gauche et la "Galloti", à droite.Fidèles à nos convictions, nous optons pour le côté gauche et l'intuition fut plutôt en notre faveur.

Même si parcourir la "Cheminée stop" fut loin d'être une balade de santé (malgré des cotations en 3 et 4), la Galotti est réputée plus dure, plus exposée encore et plus mystérieuse. En effet, lors de la seconde ascension, les grimpeurs ont eu la drôle de surprise de rencontrer une momie. Un homme mort depuis des années qui haut dans la paroi gisait seul. Sa tête était bloquée dans une large fissure. L'histoire de ce mystérieux grimpeur solitaire et précurseur a du, on l'imagine, hanté de bons nombres de grimpeurs modernes.

Nous voilà donc partis pour une journée dans les entrailles du Pain de Sucre !

Un étrange mix entre escalade en solo et spéléo encordée.200 mètres de cheminée... Large, obscure, parfois glissante, toujours hyper exposée... mais à l'ombre ! (Avantage non négligeable quand il fait presque 40 degrés à l'extérieur !)

Je crois que ce coup-ci, j'aurai quand même préféré mourir de chaud que d'expérimenter la grande dégringolade dans une profonde faille avec un point tous les 20 mètres qui en plus ne se voit pas dans l'obscurité ! ...Parce que, là aussi, c'est chaleur assurée !

Devrais-je ajouter qu'aux regards des cotations (qui ne veulent d'ailleurs rien dire !) Bruno avait délibérément décidé de ne pas prendre ses chaussons et que je me retrouvais donc dans le rôle du joker/fusible de la journée ! Ramonage et ronchonnage au programme... mais une deuxième au sommet du Pão de Açúcar !

Les cheminées sont vraiment une institution au Brésil et plus d'un grimpeur a du y voir les diables. On en fait très certainement partie !

Le pire, c'est qu'en bons petits inconscients, nous avons récidivé ensuite dans le même style sur d'autres parois ! Il faut honorer les coutumes locales.

Pourtant celle-ci s'appelait la "chaminé STOP". Il aurait simplement suffit d'inverser les deux mots pour passer ensuite de bonnes vacances !!

Pour cette troisième et dernière visite au Pain de Sucre, on change radicalement de styles et de cotations : ︎W︎A︎L︎D︎O︎ 330 mètres, 7a+

* comme le 3 et le 4 en cheminée, c'était pas si facile, on décide d'aller voir ce qu'il en est dans le 6 et 7ème degré... enfin dans le 8ème même, devrai-je dire puisque selon le système de cotations brésilien 7a+=8a (C'est bien la première fois qu'on se lancera, sans erreur d'itinéraire, dans une grande voie avec des cotations en 8 !)

* ce coup-ci, on choisit un style "escalade extérieure". Ici, si tu tombes, pas de débaroulage et cabossage version spéléo. C'est raide et c'est un trou dans l'air que tu feras en chutant ! Murs verticaux et toutes petites prises, rocher pas toujours solide et cotations plutôt justes.

* une voie sportive à la mode brésilienne, c'est à dire bien équipée pour eux, relativement engagée pour nous ! Des relais mono-points qui te coupent tout net l'envie de prendre un facteur 2 ou bien de devoir t'échapper par le bas !

* une face Nord qui prend le soleil très tôt et qui te motive à tracer le plus vite possible vers le haut !

* enfin une sortie triomphale (!!) sur les terrasses des belvédères au sommet dans des dalles considérées faciles avec les points à perpette, couvertes de terre et de feuilles sèches suivie d'un bartassage dans les cactus pour rejoindre la civilisation. En tant que ... parfaite jardinière, je m'y suis collée... et piquée !

Sinon WALDO, c'était dur sur le papier mais sur le rocher plus cool !

À présent, on a eu notre dose de sucre, d'émotions et de descentes mécanisées, on change de paroi pour les prochaines escalades !

2
août
2
août
Publié le 8 août 2024

Acte I : << Pedra da Gavea, version "un peu fast & très light" >>

Parmi les sommets classiques qui parsèment l'étonnante ville de Rio, il y a Pedra da Gavea. Sa forme sommitale carrée caractéristique se repère de loin : une cime plus plate que les autres et une face rocheuse ponctuée de quelques cavités étrangement alignées qui surplombe la mer.

"Passagem dos olhos" est une petite grande voie de 4 longueurs qui parcourt cette paroi. Sa particularité ? Une seule longueur ascendante et trois qui traversent quasiment la face à l'horizontale. Le genre de situation où il vaut mieux opter pour le rôle de premier de cordée que de second !

1er mai, jour férié ! Tout les cariocas ont eu la même idée que nous : aller se balader à Pedra da Gavea !

Sauf que nous, il est déjà 11h lorsque l'on se décide à partir en balade ! Une demie-heure plus tard, on a mis la main sur un topo de "Passagem dos Olhos" et rassemblé le matos nécessaire.

25 km de vélo nous séparent du point de départ de la marche d'approche. Il faut ensuite compter environ 1h et quelques centaines de mètres de dénivelé pour parcourir cette dernière. S'en suivent ensuite 4 longueurs et un bout de via ferrata dans une face ensoleillée toute la journée.

Après ce départ tardif, le temps presse un peu. En ces journées hivernales la nuit tombe vers 17h et le parc national ferme également en fin d'après-midi. On opte donc pour le concept "fast & light" !

50 km de vélo en mode rallye sur des pistes cyclables bondées en ce jour férié, 2h de marche au pas de course en zigzaguant entre un nombre incalculables de promeneurs , 1h30 d'escalade en prenant garde à ne pas trébucher, 1 paire de chaussons pour deux, une casquette en guise de casque et une ficelle à rôti hyperstatique de 5 mm faisant office de corde. Ça écarte définitivement toute envie de se casser la figure !

Un soleil qui brûle et quelques gouttes d'eau dans le fond d'une bouteille incitent aussi à ne pas traîner en chemin !

C'est chose faite. Nous sommes de retour à Rio avant la nuit, grillés comme deux merguez et heureux comme 2 cariocas d'être allé au sommet de Pedra da Gavea !


Acte II : << Pedra da Gavea, version "hike, climb & fly" >>

Quelques jours après notre première ascension, nous voici de retour à Pedra da Gavea avec, ce coup-ci, dans le rôle de la seconde de cordée, Lise !

J'enfile cette fois ma casquette de guidette et m'équipe d'une vraie corde et même de quelques friends.

Bruno, quant à lui, se glisse dans la peau d'un parapentiste. Une grande voile gentiment prêtée par Marcio, un peu de matériel d'escalade pour ajouter quelques kilos et lester un peu l'animal... il paraît que c'est comme le vélo : "voler, ça ne s'oublie pas !" (Ah bon... s'il le dit !)

Nous voici donc partie pour un nouveau parcours de "Passagem dos olhos" en cordée féminine. Lise exécute avec brio et sourire aux lèvres chacun des pas de cette longue traversée horizontale. Ça tombe bien parce qu'une chute serait aussi problématique pour ma seconde de cordée que pour moi-même à l'assurage !

Pendant ce temps, Bruno déplie la voile au sommet et tente de se souvenir à quoi peuvent bien servir toutes ces ficelles. Une fois ce casse-tête complètement résolu ou presque, je passe en mode "chien de traîneau" et m'élance en courant face à la pente en jouant à saute mouton par dessus de grosses touffes de végétation. Derrière moi, un cycliste ayant des ambitions aériennes et derrière encore un grand bout de tissu qui flape ! Lise, quant à elle, immortalise la scène avec son appareil photo !

En quelques secondes, alors que le bord de la falaise se rapproche à vue d'œil, les caissons de la voile se remplissent d'air et les pieds du parapentiste quittent le sol alors que les miens restent sur terre ! Ouf ! Ne reste plus qu'à vérifier si effectivement "voler, c'est comme le vélo, ça ne s'oublie pas !".

Rendez-vous à la plage ! (Oui, ici c'est sur le sable blanc et entre les palmiers qu'on atterit !)

2
août
2
août
Publié le 11 août 2024

La Serra dos Órgãos est un massif montagneux situé à une centaine de kilomètres à l'Ouest de Rio, autant dire que c'est ici que les Cariocas viennent se mettre au frais "en altitude" quand il fait trop chaud en ville. Nous en avons donc fait de même !

Le massif compte un bon nombre de parois, parmi celles ci, une aiguille élancée visible à des kilomètres : le Dedo de Deus.

Le Doigt de dieu c'est la classique des classiques, l'escalade à faire dans le Parc de la Serra dos Órgãos. Ces voies populaires brésiliennes sont toujours bourrées de surprises : un passage en 3 qui dépote, un câble sur lequel tirer en plein milieu de la voie, une échelle métallique accrochée au rocher ou encore une cheminée effrayante où tu risques de mourir si tu zippes alors que tu ne fais que répéter la voie la plus fréquentée du coin !

Nous embarquons Lise dans l'aventure et tout commence par une approche raide en suivant un sentier droit dans la pente comme seuls les randonneurs brésiliens en détiennent le secret... ça continue par une via ferrata version "câble dans une dalle et sans barreau pour s'agripper". Autant dire que les bras chauffent illico et que la gomme des baskets est parfois limite niveau adhérence. On continue ensuite en mode "terrain varié", alternance de marche et de grimpe jusqu'à rejoindre le pied de la voie et le début des difficultés. Cela fait plus de 2 h que nous sommes partis quand on commence vraiment à grimper.

La suite est une succession de passages variés avec, évidement, une prédominance de cheminées. Ce coup-ci, ça déroule plutôt pas mal et cela ressemble à une vraie journée de vacances. Une échelle métallique permet d'accéder au sommet où se trouve un carnet pour un p'tit dessin !

En quelques rappels, nous retrouvons un astucieux cheminement de descente : marche, désescalade et câbles, c'est parti pour 2 h supplémentaires !

Quelques photos de cette chouette journée dans cette méga classique !

2
août
2
août
Publié le 14 août 2024

Agulha do diabo, une autre aiguille à ne pas rater mais encore faut-il aller la chercher !

Une journée d'enfer... 25 km de vélo + 7 h et 18 km de marche à pied + 9 longueurs de grimpe + 4 rappels

Ce n'est pas tant de la combinaison parfaite de ces trois activités dont on se souviendra, ni même de toute cette marche de facteur pour aller grimper sur une belle aiguille nichée au cœur de la Serra do Órgãos, ni même d'avoir fait tout ça pour grimper seulement deux vraies longueurs d'escalade et sans trop de bartas.

Non, on se souviendra plutôt qu'après une longue randonnée, après être montés, descendus, remontés, nous avons débouché à un petit col et que soudain, une incroyable aiguille à fait son apparition comme par enchantement ! Quelle émotion !

On se souviendra aussi du précipice qui nous en séparait encore et qu'à cet instant, on s'est dit que la marche d'approche semblait encore loin d'être terminée et qu'il allait peut-être falloir sortir la corde avant même le pied de la voie !

Et puis surtout, surtout.... On n'oubliera pas le crux de la journée : une grande cheminée !

Verticale, large, peu adhérante, impressionnante et équipée seulement de 2 points pour en atteindre son sommet ! Évidemment pas de crashpad au fond mais des gros blocs qui attendent les bras ouverts la malencontreuse zipette de pied, de dos, de fesses, d'épaules ou de paume de main du pauvre grimpeur désespéré !

Inutile de dire que ce genre d'aventure verticale laisse quelques traces :

1/ Quelques frayeurs et jurons !

2/ Quelques trous dans nos uniques vêtements !

3/ Une décision prise : les cheminées, c'est terminé !

4
août
4
août
Publié le 17 août 2024

I. L'approche

Entre Teresópolis et Tres Picos, il y a une route qui fait peur. Une voie étroite et des camions qui vous frôlent, des hautes herbes qui empiètent sur la route et pas mal de trafic. Bref, rien de bon pour un cycliste.

On a donc opté pour le chemin des écoliers : des pistes de terre qui montent et descendent sans cesse suivies d'un sentier si raide qu'il a fallu décharger les vélos, les pousser à vide et faire quelques portages de sorte que la scène se mit à ressemblait davantage à une randonnée à pied ou plus exactement à un déménagement écolo sans moyen motorisé qu'à une simple balade à vélo. Après pas mal de dénivelés avalés et quelques litres de sueur perdus, les belles parois se multiplièrent au-dessus de nos têtes !

Nous étions arrivés à destination !

Salinas est LE spot brésilien historique, un nom connu des grimpeurs de tout le continent sud américain. Et pour passer les frontières d'un si grand pays, c'est que l'intérêt grimpestre est tout aussi grand.

Le Pico Maior mérite à lui seul le détour : une paroi haute de sept cents et quelques mètres, ce n'est pas tous les jours qu'un tel morceau se présente !

II. Au pied du mur...

Ce qui est "drôle", c'est qu'à chaque fois que l'on a dit aux grimpeurs de Rio que l'on envisageait d'aller grimper à Tres Picos, ils nous disaient, tous sans exception, la même chose : "Tres Picos, c'est magnifique mais ce n'est pas comme ici. Là-bas, les points sont très loin !" Quelle bonne nouvelle !

Et comme à Rio, ce n'était déjà pas toujours les vacances, on avait bien compris que cela ne le deviendrait pas plus à Tres Picos !!

Lorsqu'après quelques jours de vélo en mode VTT version randonnée à pied accompagnés de deux vélos, au détour d'un joli col, le Pico Maior est apparu, nous étions d'autant plus impressionnés.

Nous étions au sens propre comme au figuré, au pied du mur. Il ne restait plus qu'à poser les vélos, cacher les sacoches, sortir le matériel de grimpe et prendre notre courage à quatre mains pour nous lancer dans cette immense face !

III. Une baguette magique nommée "perfo"

En bons petits frenchies, nous optons pour LA voie Française de la paroi. Une voie "très équipée" du point de vue de Sergio Tartari, principal grimpeur et équipeur local, "plutôt engagée" selon Arnaud Petit et "Parois de légende". Il était tentant d'aller voir ça de plus près !

"Décadence avec élégance", c'est 680 mètres de grimpe, des cotations autour du 7a+ max, des dalles et du mur vertical pour accéder au sommet du Pico Maior. Cette ligne ouverte par une bande de français, Manu Ratouis, Bruno Martel et Jean Claude Razel en 1998, a aussi la particularité d'avoir amené à Tres Picos, un élément nouveau : le perfo. Le perfo dans le domaine de l'équipement en escalade, c'est un peu comme le mariage : "pour le meilleur et pour le pire".

Jusque là, ici au Brésil, c'est au tamponnoir qu'on perçait le trou pour placer un "grampo", le gros piton à compression local. Un rocher dur, un effort fatiguant dans des positions probablement souvent inconfortables ! Autant dire qu'il devait souvent être plus judicieux de poursuivre sa fuite vers le haut que de faire du surplace et s'exténuer à donner de grands coups de marteau !

Alors les p'tits français et leur outil magique allaient-ils révolutionner la grimpe brésilienne ?

Le son du marteau sur le tamponnoir allait-il être désormais remplacé par des bruits de perceuse ? L'éthique allait-elle prendre un nouveau visage ? La grimpe allait-elle changer radicalement de caractère ?

Force est de constater, après plus d'un mois de grimpe et de vagabondages verticaux au Brésil, que nous sommes la majeure partie du temps, bien loin des standards européens en terme d'engagement. Alors oui, "Décadence avec élégance" est un poil plus équipée que la moyenne et ce sont des spits et goujons que l'on clippe et pas de simples pitons à compression mais que les puristes se rassurent également : l'espacement des points dissuadent quand même grandement le grimpeur d'une éventuelle chute, et puis les plaquettes sont vraiment, depuis tout ce temps, bien rouillées !!

IV. De l'océan granitique à l'océan végétal...

S'il y a bien UN avantage à ces foutues parois dalleuses, c'est qu'on peut enchaîner les rappels sans craindre de coincer la corde ! En même temps, ça tombe plutôt bien parce que, déjà que quand il y a quelques points, ça fout bien la trouille. Alors s''il fallait regrimper dans ces dalles lisses en suivant la ligne de rappels sans aucune protection à l'horizon, moi, je meurs littéralement sur place !

Bref, on descend en toute tranquillité ou presque !

Seule ombre au décor et pas des moindres.. ici, parfois la coutume est de faire relais sur un seul et unique point, donc sur un pauvre "grampo". Ce piton à compression local à la tige pas bien longue et entrée en force dans le rocher, rien de plus ! Pas de colle, pas de système d'expansion mais des générations et des générations de grimpeurs brésiliens qui ont testé leurs résistances pour nous !

Les approches brésiliennes ou l'art du bartassage illustrés dans une petite vidéo ci-dessous...

(Rien d'exceptionnel dans ces images, nous ne sommes ni perdus, ni en train d'ouvrir un nouvel itinéraire mais juste en train de tenter de suivre un véritable sentier de grimpeur !)

Les brésiliens, ce sont des as en dalles, en cheminées mais ils ne sont pas les rois de la machette !

14
août
14
août

Nous avons l'honneur de vous anoncer dans cet article que la palme d'or du "fech-fech" est attribuée... aux pistes brésiliennes avec une mention spéciale pour celles qui traversent la région du Minas Gerais !

Le "fech-fech", c'est cette poussière extrêmement fine et extrêmement volatile, qui se glisse partout, qui colore végétation et peaux et dans laquelle on patine comme dans de la neige !Nous nous sommes offert une belle mission en évoluant durant 5 jours dans ce décor torride, coloré et poussiéreux ! Autant dire qu'on s'endormait chaque soir dans la tente, salés comme des morues, collants comme des pots de miel et sales comme des petits cochons !

Ces jours-là, nous avons donc élaboré un tout nouveau concept pas du tout approuvé : "Le bain quotidien"

Alors nous en avons plein les pattes de ces pistes défoncées, de ce fameux fech-fech qui nous couvre de la tête aux pieds, de ce soleil qui nous fait dégouliner, de pousser nos vélos et parfois même de devoir s'y mettre à deux dans ces montées beaucoup trop raides...

... Après bons nombres de mauvaises nuits, tout pégueux sur nos tapis de sol toujours plus mous et une tente remplie de milliers de minuscules tiques (si si ), souvent sur un talus ou dans un fossé à un mètre du chemin (car ici absolument tout l'espace est clôturé) ; tout cela agrémenté d'un réveil nocturne des flics ou d'un réveil matinal du proprio...

Nous avons décidé plusieurs jours de suite de nous offrir une petite pause, à la mi-journée, au bord de l'eau.

Je vous passe les détails du pic nique parce que ce n'est pas folichon. Dans cette cambrousse les épiceries sont toutes vides !

Bon... parfois il est déjà 15 h passé quand on trouve le spot idyllique ! Sachant qu'à 17 h 30, il fait nuit noire et qu'à 18 h 30, on dort presque déjà !

Bref... c'est pas commun pour nous mais en se retrouvant tout marron de terre devant des flaques d'eau froide, on a eu une idée : se laver ! Nous nous sommes dit qu'exceptionnellement, ce serait peut-être chouette de se rincer. C'est ce que nous avons fait plusieurs jours de suite, en remettant évidemment nos vêtements dégueulasses une demie seconde après. Puis nous reprenions ensuite nos vélos et notre route.

Et chaque fois, ce fut la même chose, deux minutes plus tard, nous étions à nouveau dans le même état : couverts de poussière des pieds à la tête et de la tête aux pieds ! Il aura fallu attendre une dizaine de jours pour rencontrer la première vraie douche et quitter ces pistes ultra poussiéreuses puis plus d'un mois de plus pour notre prochaine vraie lessive ! Je crois que je me suis rarement sentie aussi sale... pourtant on peut dire que depuis le temps on a souvent poussé le bouchon un peu loin en terme d'hygiène !

Ce qui est drôle, c'est qu'ici au Brésil, allez savoir pourquoi... les français (et pas seulement les cyclistes !!) ont depuis des siècles, la fameuse et tenace réputation d'être des gens sales qui ne se lavent jamais ! On est mal barré pour faire mentir ce préjugé...

 Vu dans un appartement à Rio !
8
août
8
août

"Inselberg" : nom masculin. Butte isolée au milieu d'une plaine d'érosion. Synonyme : pédiment

"Taffoni" : nom masculin. Cavité arrondie creusée par corrosion dans les roches grenues (granites, grès) en milieu sec.

Le décor géologique est posé, bienvenue dans l'état de Bahia !

Imaginez une plaine d'herbes sèches et jaunes, des cactus immenses décorés de quelques fruits roses bonbon, quelques buissons verts pétard par ci, par là. Un soleil qui cogne fort et quelques nuages gris qui, à intervalles réguliers, déversent une poignée de gouttes sur le paysage.

Et puis, il y a ces collines rocheuses incroyables, ces montagnes-îles semblant émerger de nulle part dans ce paysage tout plat.

Et puis, il y a ces parois orangées, jaunes, grises et parfois presque noires, parsemées ça et là de végétation exotique et piquante.

Et puis, il y a ces cavités improbables perchées tout là haut en pleine falaise.

Qui n'a pas rêvé d'aller se pendre par les bras dans l'un de ces immenses porches, de remonter en grimpant l'une de ces grandes arches sur son fil ou simplement de suspendre son hamac pour une nuit insolite au creux des ces grottes suspendues ?

Parmi ces étonnantes formations rocheuses, il y a la star du coin : le Morro da Toca et ses deux incroyables arches.Il y a quelques mois, nous découvrions surpris cette montagne sur l'une des photos d'un post de nos amis cyclo-grimpeurs basques Kattalin et Iñigo. Nous étions à ce moment là à l'autre bout de la planète, au Japon ou peut-être en Australie, autant dire assez loin du Brésil. Nos yeux eurent du mal à y croire et il n'en fallut pas plus pour y allumer une étincelle de curiosité. Je ne sais plus exactement lequel de nous deux s'exclama alors :

"Prends ta bicyclette, accroche tes sacoches, on y va !"

Des mois, voir peut-être même une année plus tard... nous y voilà ! Cet étrange colline de roche et ces deux grottes existaient donc vraiment et nous nous trouvions à son pied. Une esthétique ligne permet même de remonter l'intégralité du bord gauche de la grande arche en escalade : "Arco da Toca", 7a, 180m

Entre rocher orangé sculpté et petites plantes grasses parfois piquantes, "Arco da Toca" est une excellente manière de rejoindre ce sommet atypique. Sans aucun doute, une candidate de plus à la nouvelle édition du grand livre "Parois de légende" !

Dans la famille des "inselbergs", je demande le "Morro do Enxadao" !Voyez-vous deux lignes plus claires au centre de cette paroi ?

Celle de droite est bien plus visible : c'est "Jardineiro". Une belle voie sur un rocher sculpté mais qui aurait pu ne jamais avoir été découverte car envahie de milliards de petites plantes.À la manière de la Fiesta de los biceps à Riglos qui est visible de très loin sur la gauche de la Visera par les traces de magnésie sur le rocher orangé. Ici on doit cette traînée claire à un sacré boulot fait par les ouvreurs qui ont défriché une tranchée de bas en haut de la paroi ,mètre après mètre, découvrant ainsi, prise après prise, une ligne superbe. "Jardineiro" porte ainsi bien son nom !

Sur le Morro do Enxadao, nous avons opté pour la ligne de gauche répondant au petit nom de "Virgulino".

"Virgulino", c'est une des voies les plus longues du secteur avec ses 290 mètres de haut et des cotations qui oscillent entre le 6c et le 7b brésilien, mais "Virgulino", c'est aussi l'histoire d'un célèbre bandit...Pour nous, ce sera hold-up entre les gouttes !

Ici à Itatim, il ne faut pas avoir peur d'apercevoir un grand ciel noir et menaçant au dessus de sa tête, il ne faut pas avoir peur de sentir ce vent fameux qui précède de quelques secondes à peine l'averse alors qu'on est perché à 200 mètres du sol et il ne faut pas avoir peur d'attendre, résignés, que cesse la pluie, accrochés à un relais en prenant, l'air de rien, plein d'eau sur le coin de la figure. Puis enfin, il ne faut pas avoir peur d'attendre patiemment que le caillou sèche avant la saucée suivante...

Ici, une journée est une alternance de grand ciel bleu et de gros nuages noirs... et ça va très très vite !

Alors quand les premières gouttes se pointent en pleine longueur, c'est une vraie course contre la montre qui s'engage pour rejoindre le relais suivant avant le déluge. C'est à peu près ce qui s'est produit alors que je grimpais le tout dernier 7b de cette belle voie. Pas de doute, ces conditions aident à mettre le turbo !

De toutes façons, avec de si longues longueurs et une si courte corde, la sortie, c'est par le haut ! Là- haut même, où après ces quelques efforts et ce petit jeu de cache-cache avec cette coquine de pluie, un sacré comité d'accueil vous attend ailes ouvertes et dard en avant : un milliard de moustiques.

Partout dans le monde, les moustiques ça rend "dingue"... mais ici, c'est à la fois vrai au sens propre comme au figuré !(Il ne s'agirait pas de devoir rester cloués au lit des jours et des jours avec une grosse fièvre sur nos matelas tout dégonflés !)

En ces circonstances, je crois bien que même "Virgulino", le grand bandit brésilien aurait fuit comme une poule mouillée !

6
août
6
août
Publié le 27 août 2024

Combiner grimpe et vélo, ça veut dire s'y mettre, arrêter et reprendre sans cesse l'une et l'autre de ces activités. Ça veut dire avoir les jambes qui pèsent lourd et un tour de bras beaucoup trop petit, c'est passer sans transition des tongs aux minis chaussons. Mais associer vélo et grimpe, c'est aussi faire des rencontres et recevoir un accueil que l'on n'aurait pas eu la chance de rencontrer si on arrivait sur les spots d'escalade avec un moyen motorisé. C'est éveiller la solidarité des grimpeurs pour les cyclistes. Et quand on ajoute quelques feuilles de papier et une palette d'aquarelle, la générosité peut alors s'activer également en sens inverse !

A l'abrigo de montanha de Itatim, avec Marcelo, on a imaginé un échange de bons procédés :

Troc de topos illustrés contre un bout de jardin pour camper, douches chaudes et cuisine équipée d'un frigo et même d'un four ! (Le luxe !!)

Marcelo et le topo de l'une des voies qu'il a ouverte ici à Itatim. 

Un jour, au retour d'une journée de grimpe, Marcelo revient du village avec 5 belles feuilles de papier blanc épais format A4. Depuis combien de temps n'ai-je pas dessiné sur du si beau papier ?

Ce soir là (ça tombe bien, c'est l'hiver et il fait nuit à 17 h 30 !), je la passerai donc à dessiner à la lueur de la frontale et exceptionnellement confortablement installée sur une table.

Une à une les feuilles se remplissent, cinq parois, cinq voies et un point commun : leur ouvreur Marcelo.

Un dessin de la paroi et la ligne qui la parcourt, le topo détaillé des longueurs, une police d'écriture différente sur chaque feuille (ma partie préférée !) et un cactus ou deux, par ci par là.

Deux jours plus tard, c'est mission accomplie, les cinq topos sont terminés, offerts à Marcelo et il est temps pour nous de reprendre la route !

11
août
11
août
Publié le 1er septembre 2024

Ici, le 21 juin, on fête le jour le plus court !

Pour la Saint Jean, explosion de couleurs, guirlandes à fanions fleuris, feux de joie et musique toute la nuit !

Et ça ne dure pas qu'une seule nuit, ni deux, ni trois... Dans l'état de Bahia, ça dure plein de jours la

São João !

De quoi embellir encore davantage et mettre de l'ambiance dans ces jolis petits villages colorés de la Chapada Diamantina.

11
août
11
août

Les (bons) conseils des locaux :

"Passe por aqui, é super lindo! Há alguns rios para atravessar, mas está tudo bem!"

(Passez par là, c'est super joli ! Il y a quelques rivières à traverser mais ça se fait bien !)

La promesse d'un itinéraire sauvage et l'absence de voiture qui nous frôle.... on a toujours envie d'y croire !

Alors évidemment, on a foncé... Et puis dès qu'on a quitté la route asphaltée, on a un petit peu ralenti. Quand le chemin de terre s'est rempli de gros cailloux et d'ornières gigantesques, on a rétrogradé encore et quand il a fallu pousser, à deux, un seul vélo, le chrono s'est affolé !

Plus tard, quand la piste en terre est devenue une étendue de sable, ça a commencé à avancer encore moins vite et finalement quand les nombreux ruisseaux à traverser sont devenus de plus en plus larges et de plus en plus profonds, il a fallu pousser les vélos et porter les sacoches: alors notre progression est devenue carrément lente !

Alors on a choisi un joli spot pour bivouaquer, on a mangé quatre noix de cajou (à nous deux !), on a bu cette eau à la couleur douteuse (et on n'a même pas été malade !) et on a attendu que passe la nuit (elles sont longues en hiver !). Et puis le lendemain, on a continué notre randonnée terrestre et aquatique !

Et c'est vrai que, ma foi, cet itinéraire alternatif pas très roulant était plutôt joli et qu'à part des canoës et quelques gros serpents, il n'y avait pas grand monde pour nous embêter en chemin !Et puis... tout le monde le dit :"Ce qui est important ce n'est pas la destination finale mais l'expérience vécue en chemin"... blablabla...

11
août
11
août
Publié le 8 septembre 2024

Hier était un jour un peu spécial:nous avons franchi l'équateur !

Tels deux marins, les yeux rivés sur leur GPS et prêts à dégainer une bonne bouteille pour la partager avec Neptune ; ici on fête plutôt ça avec une photo les pieds sur la ligne "latitude 000°", une agua da coco gelada et un bol d'açai, cette baie violette typique de l'Amazonie.

Voilà un peu plus d'un an , nous nous trouvions dans l'hémisphère sud. Les saisons inversées, le croissant de lune qui sourit, les faces nord au soleil et les faces sud où on se gèle, fêter le jour le plus court le 21 juin, fêter Noël en short, l'eau qui tourbillonne en sens inverse dans le siphon d'un évier... tout ça, c'est vrai !

Mais passer cette ligne imaginaire prend aussi une symbolique toute particulière pour nous:c'est une "presque ligne d'arrivée".

Repasser dans l'hémisphère nord, c'est se retrouver du même côté du globe que la maison, les amis et la famille. C'est avoir fait un "tour" de planète, c'est être sur le point de boucler la boucle deux ans et trois mois après avoir largué les amarres.

Aujourd'hui, alors que nous nous trouvons en plein cœur de l'Amazonie, un nom qui a lui seul fait rêver et éveille toute la curiosité, on ne pourrait imaginer plus exotique paysage, plus dépaysant environnement, pourtant nous n'avons jamais été si près de la France !

Dans environ 500 km à peine, nous passerons notre ultime frontière, celle entre le Brésil et la Guyane française. Puis après ce sas de décompression de quelques semaines, il sera venu le temps de faire un grand bon au dessus de l'océan et de rejoindre la métropole.

Le 16 août, nous serons de retour en France.

Faut-il que je l'écrive une fois de plus pour y croire vraiment ?

11
août
11
août

Et puis, il y a ces rencontres...

Ces liens invisibles qui naissent en chemin et qui rendent un voyage plus magique encore.

Ces rencontres qui apportent douceur aux jours un peu lourds, qui ensoleillent les journées de pluie. Ces rencontres qui réconfortent et offrent un peu de luxe quand la vie sur la route est un peu rude, qui illuminent et égaient votre quotidien. Ces rencontres qui font que vous découvrez un petit lieu secret, un plat typique délicieux ou un morceau de musique charmant. Ces rencontres qui prennent une saveur si particulière quand on couche dehors chaque soir et qu'on est loin de chez soi depuis des années. Il y a ces gens qui vous couvrent de gentillesse, de bienveillance et de générosité, ces rencontres qui donnent envie de croire en l'humanité. Derrière toutes ces rencontres, il y a des visages, des hommes, des femmes, des personnalités et des sourires attentionnés.

Parmi eux, il y a Marcio.

Marcio, c'est notre parrain brésilien. Le genre de gars qui a le cœur sur la main, qui veut que vous tombiez amoureux de son pays et que tous les voyageurs devraient avoir la chance de rencontrer un jour. C'est l'ami qui vous conseille, vous aide et vous chouchoute.

C'est à Rio que nous avons rencontré Marcio, au mois de mai, et alors que nous avons pris la route du nord, ses bonnes ondes nous ont accompagnés des semaines durant : il est devenu notre ange gardien. Alors que nous pédalions vers notre prochaine destination, Marcio devançait toujours notre arrivée. Un nombre incalculable de fois, il nous a annoncé qu'il avait déjà repéré un camping ou un hôtel, et à chaque fois, c'était réservé et prépayé. Il ne restait plus qu'à se reposer. Il en fut de même pour quelques restaurants, par ci par là, et lorsqu'il s'agissait de trouver une boutique et un atelier pour faire réparer un de nos vélos récalcitrant. Alors que nous sortions notre porte-monnaie, on nous apprenait à chaque fois que notre bienfaiteur avait déjà tout réglé pour nous !

C'est ainsi qu'en juillet, notre chemin nous a conduit jusqu'à Natal, la ville des souvenirs d'enfance de Marcio.

Là bas, nous nous sommes promenés dans ses souvenirs de petit garçon. Nous avons marché sur de grandes plages, nous avons pédalé jusqu'au fort des Rois mages, fait une photo devant la statue de son grand-père Miguel, le pêcheur. Nous avons vu le plus grand arbre à caju du monde et goûté à la délicieuse "carne do sol".

Désormais une partie de nos souvenirs du Brésil seront pour toujours lié à notre parrain Carioca !

Muito obrigado Marcio !

11
août
11
août
Publié le 17 septembre 2024

Et puis, vint le temps des dernières fois...

À l'heure, où nous n'avons jamais été si proches de l'épilogue de ce grand voyage, au moment d'inventer les toutes dernières pages de ce grand livre, de les agrémenter d'une végétation luxuriante, d'y glisser des petites bestioles inconnues et d'y apporter une chaleur lourde et un taux d'humidité remarquable, nous clôturons un chapitre.

Celui dont on tourne les pages, les mains moites et les bras fatigués. Ces pages où la verticalité et son "au delà" nous étourdirent, où le rocher fut tantôt doux, tantôt agressif sous nos doigts usés, où nos pieds furent souvent aussi douloureux que ce que nos yeux furent ébahis. Ces instants où nos humeurs oscillèrent tel un métronome entre peur et émerveillement, entre humilité au pied d'une grande paroi et soulagement et joie à son sommet.

Tant de falaises visitées, de parois gravies, de lignes découvertes, de topos feuilletés, de types de rochers effleurés, de styles de grimpe expérimentés et de compagnons de cordées rencontrés...

C'est incroyable la diversité qui peut se cacher derrière une seule et même activité.

D'aussi loin que l'on se souvienne, ce fut aussi la première fois que notre pratique de la grimpe fut aussi décousue et aussi irrégulière : sept longs mois à ne faire que pédaler et puis souvent un ou deux mois sans toucher le rocher. L'aurait-on imaginé ?

Quelques jours par ci, par là ,entre deux intermèdes à deux roues, être synchro avec la météo, jouer avec les saisons, il fallut vite se résoudre à ne pas avoir de grandes ambitions mais à picorer ce qui se présentait: Épicuriens de l'escalade.

Éternelle reprise, éternel recommencement. D'un tel périple, il est certain qu'on ne ressort pas plus forts mais plus riches d'expériences et peut être plus courageux, encore que... à l'autre bout du monde, on ne joue pas avec le feu et on se méfie de la gravité.

Ces jolies photos pour célébrer ce tout dernier instant sur le rocher. Une image qui se veut un hymne à cette drôle de passion que d'aimer se mouvoir sur la roche, étrange et absurde activité qui nous anime l'un et l'autre et l'un avec l'autre.

C'est aussi ça l'histoire d'une cordée.

Une drôle d'occupation qui semble tour à tour aussi essentielle qu'inutile et qui dans la vie comme en voyage aura été un formidable fil d'Ariane et une fabrique de rêves à poursuivre.

Grimper. Quel beau prétexte à voyager !

28
août
28
août

Rendez-vous en terre inconnue...

Et puis, un jour tout devint plus luxuriant, les feuilles des arbres devinrent grandes comme des parasols, les oiseaux se couvrirent de plumes multicolores, le bateau devint l'unique moyen de déplacement et les fleuves devinrent marrons et larges comme des océans. Nous étions rendus aux grandes portes de cette immentissime région qui répond à ce nom aussi exotique que mystérieux : Amazonie.

Un monde nouveau s'offrait à nous.

Belém, une ville en Amazonie...Nous pénétrons dans ce territoire mythique par une de ces villes du bout du monde nommée Belém.Belém est une ville bruyante, animée, authentique, chaude, sale et attachante. Les visages parlent d'eux même, on y bosse à la fois dur et on y vit en musique et à son rythme.

On y croise des gens du "continent" et puis ceux de la forêt venus, jusque ici, après de longues heures de bateau. Centre névralgique, c'est ici qu'on vient faire ses réserves de nourriture pour plusieurs semaines lorsque l'on vit loin de toute agglomération, que l'on vient faire ses achats lorsque l'on vit dans un endroit isolé sur le fleuve.

C'est ici que l'on vient vendre le poisson fraîchement pêché en rivière ou dans l'océan, qu'on débarque l'une des principales richesses des palmiers amazoniens, l'Açai.

Belém, ce sont des rues étroites et des façades qui arboraient un style coloré et élégant par le passé et qui aujourd'hui présentent un style défraichi quasiment délabrées mais néanmoins charmantes. Quelques herbes folles sortant des fenêtres apportent encore un supplément au tableau.Belém, ce sont des places animées, des halles sombres et de grands marchés bryants. Ici ça vit !

Au marché Ver o peso (littéralement "regarder le poids"), on y trouve des montagnes de fruits colorés, des noix de toutes formes, des crevettes fraîchement pêchées et des poissons desséchés. On y mange des pastels et on y boit du jus de cane à sucre dans un vacarme fou.

Belém, c'est un port rustique où de vieux bateaux en bois se retrouvent échoués tout de travers à marée basse. Ça sent le poisson pourri qui gît au sol et qu'un nombre incalculable de grands vautours noirs se disputent pendant que des pêcheurs se reposent, quelques heures, à l'ombre de bâches dans leurs hamacs sur le pont de leusr embarcations.

Un peu plus loin, sur les quais, on décharge de grands paniers en osier remplis de ces baies violettes typiques. Des milliers de tonnes d'açai arrivant tout droit de la forêt amazonienne qui vont régaler Brésiliens et Brésiliennes dans le pays tout entier.

À proximité, les quartiers populaires sont composés de maisons en bois sur pilotis, faites de bric et de broc, semblant flotter sur une décharge liquide.

Non loin, des adultes qui travaillent encore, les enfants profitent des derniers rayons de soleil et d'un moment de calme pour faire voler un nombre fou de cerf-volants. Un simple losange de film plastique amarré à une bobine de fil suffit à des heures d'amusement. Le coup de main est sûr et précis.

Enfin la nuit tombe et les températures baissent un peu. Demain un long voyage en terre inconnue nous attend...

Croisière sur l'Amazone À l'extrême nord du Brésil, la région de l'Amapa ne possède pas d'accès terrestre.La seule façon de rejoindre Macapa depuis Belém, c'est d'embarquer sur un bateau et de naviguer durant environ 24 h.

Le voyage dure quelques dizaines d'heures supplémentaires si l'on souhaite rejoindre la mythique Manau située en plein cœur de la forêt amazonienne.Chaque passager embarque alors avec son lot de bagages, de cartons de provisions alimentaires et d'achats faits lors de ce passage exceptionnel à la grande ville. Mais chacun a aussi dans ses bagages, un objet essentiel : son hamac.

En effet, ici tout le monde voyage sur le pont ! Quoi de plus simple ? Des centaines de crochets parsèment les poutres métalliques et de jour comme de nuit des dizaines de hamacs multicolores y sont amarrés.

Températures agréables et dodo bercés par les vagues. Pouvait-on rêver croisière plus exotique ?La vie en bord de fleuve...Aurait-on imaginé qu'il y ait autant de vie sur les berges d'un si grand fleuve dans un environnement si sauvage ?Aucun accès routier et de la forêt quasi impénétrable de tous côtés. Ici l'unique moyen de déplacement est le bateau.

Du ferry journalier à la simple barque, on apprend à naviguer sans doute très tôt.Depuis le pont, nous observons, des maisons de bois colorées sur pilotis réparties tout le long de cet immense cours d'eau. Les gens se déplacent de chez l'un à l'autre en petit bateau à moteur. Les enfants, même très jeunes, prennent seuls une petite barque pour aller voir leurs petits voisins.Il y a les bateaux taxis et le ferry qui débarque, à intervalles réguliers et sans même arrêter sa navigation, de temps à autre, un colis

.Achats par correspondance, livraisons à domicile ou presque... Aurait-on percé le mystère "Amazon" ?

Terminus au port de Macapa !Et puis soudain, après des heures de navigation sur l'Amazone, avec de l'eau et de la forêt à perte de vue, une ville apparaît : Macapa. Comme si de rien n'était... la vie normale reprend : des maisons, du béton, des gens qui circulent sur des trottoirs, des routes goudronnées, des véhicules à roues, des supermarchés, des fils électriques, des réverbères qui s'allument...Quoi de plus normal ?

Macapa est une zone civilisée enclavée dans la grande forêt amazonienne sauvage.Alors il ne reste plus qu'à se remettre en selle et à pédaler à nouveau, comme si de rien n'était ou presque... accompagnés néanmoins d'une étrange sensation : nous venons d'acoster sur une île posée au cœur d'un continent !

30
août
30
août
Publié le 29 septembre 2024

Ma France,

Ma France, des visages colorés et des yeux bridés,

Du climat équatorial,

Des plages aux eaux sombres,

De la très grande forêt,

Des fleuves gigantesques,

Des fruits exotiques colorés,

Des petites bêbettes à poils et à pattes,

Ma France, des bagnards et des astronautes,

Des esclaves et des colons,

Ma France, des amérindiens,

Des Brésiliens, Haïtiens, Surinamiens, Guyanais,

Des Hmongs d'Asie,

Des Africains, Créoles et Européens,

Ma France du métissage des peuples et de la diversité,

De la variété des traits et des histoires de vie variées,

Ma France du cassoulet, de la choucroute, des rillettes, des marrons d'Ardèche, du manioc, des pitayas et du lait de coco,

Du bout du monde au delà de l'océan.

Ma France d'outre-mer.

Ma France...

On entend souvent dire qu'on connaît parfois moins bien son propre pays que des régions à l'autre bout de la terre. On se demande aussi pourquoi partir si loin quand il y a tout à découvrir en France...

C'est vrai.

L'Outre-mer était pour moi, une terre complètement inconnue et pourtant...

Quelle étrange impression que de se sentir en voyage lointain dans son propre pays, quelle agréable sensation que de découvrir cette immense diversité éthnographique !

Sas de décompression, aire de réaclimatation, fin de vacances exotiques, appelez ça comme vous voulez. Il n'en fallait pas moins entre Brésil et France métropolitaine pour optimiser une transition délicate !

31
août
31
août

Ici on ne parle pas de rivière mais de "crique" et derrière l'expression "aller en forêt" se cache une véritable petite expédition.

Dans la végétation se cache des lieux impénétrables ou presque et une faune audible mais quasi invisible.

La visite n'est alors possible que par voie aquatique mais pas toujours très navigable. Quelques obstacles nous auront parfois barré la route mais par un astucieux jeu de slalom dans la mangrove, quelques exercices de contorsionnisme, allongés sur nos bateaux pour se faufiler sous des troncs couchés en travers et quelques portages en mode équilibristes, nous auront permis de rejoindre l'embouchure et l'océan !

Ajoutez quelques fourmies et termites voraces, quelques moustiques énervés pour pimenter l'histoire. Pour agrémenter nos fantasmes, on aura imaginé quelques autres animaux, aux petites et grandes dents, qui pourraient bien se cacher sous ces eaux troubles et d'autres à fourrure pouvant vivre dans cette forêt immense et mystérieuse.

1
sept
1
sept
Publié le 8 octobre 2024

Dans la vie, il y a des rêves et nous devrions attacher une attention toute particulière à les cultiver.

Tel le Petit Prince et sa rose, il faut les arroser, les alimenter chaque jour, les aider à grandir encore et toujours. Les mettre sous cloche pour les protéger des intempéries de la vie et à un moment, leur permettre d'éclore au grand jour.

Cette journée là, devient alors l'une des plus belles de votre vie, de celles qui vous remplissent de joie et vous incitent à vous inventer des rêves nouveaux et à les poursuivre toujours.

Certains n'oublieront jamais le jour de leur mariage ou de la naissance de leurs enfants, pour ma part, je me souviendrai toujours de cette montagne incadescente et de cette lave rougeoyante qui illuminait la pénombre de ce ciel d'hiver sicilien.

Pouvoir observer un jour, ces boules de poils, véritables virtuoses de la grimpe arboricole était aussi un de mes rêves.

Avoir la chance d'apercevoir un paresseux, supposait de se retrouver par les hasards du voyage dans son habitat, d'être sous le bon arbre au bon moment et d'avoir l'œil affûté pour défier le mimétisme parfois parfait.

Si la chance choisissait de nous sourire encore davantage, cet étrange spécimen de la forêt amazonienne se mettrait alors en action. Ce fut le cas : mouvements lents mais amples et pattes avant qui s'étirent comme un jour sans fin vers la branche suivante.

Quel spectacle ! Quelle chance !

2
sept
2
sept
Publié le 13 octobre 2024

Le marché de Cayenne, c'est le marché du soleil !

Le genre d'endroit où il fait bon se balader même quand on a rien à y acheter, le genre de lieux où ça vit intensément, le genre d'ambiance qui vous donne la pêche (peut-être le seul fruit qui était d'ailleurs absent des étals !).

Un vrai spectacle humaniste !

Les couleurs y sont vives, les fruits y sont exotiques, les sourires illuminent les visages, des voies s'interpellent et des rires fusent. Les visages rappellent ceux rencontrés dans le monde entier, quel voyage peut on vivre dans un seul et même lieu !

Des pitayas (fruits du dragon) à la chair juteuse et subtile aux piments de Cayenne à la saveur radicale, des soupes Hmongs aux poissons à la fraîcheur douteuse, il y en a pour tous les goûts !

Le marché de Cayenne, c'est comme faire le tour du monde sans bouger de son trottoir !

S'il y a bien un endroit où l'on se sent citoyen du monde, c'est ici. Entre les étals, ça parle toutes les langues, les traits des visages et les couleurs de peaux rappellent ceux d'hommes et de femmes rencontrés aux quatre coins du monde.

On y mange les mêmes fruits colorés qu'en Thaïlande ou au Laos et on y achète les mêmes légumes qu'en Europe. On y croise de grands sourires aux dents blanches contrastant sur des visages noirs ébène. On y aperçoit des tissus bariolés africains, on y déguste des nems et des soupes Hmongs comme au Vietnam et un restaurant propose de la nourriture typiquement maghrébine.

On y entend des bribes de créole et de portugais, parfois même du néerlandais.

Et puis... depuis combien de temps n'avions-nous pas entendu parler français ?

Mais quelle incroyable diversité culturelle ! Quelle hallucinante mixité en un seul et même lieu... C'est bien simple, ici, on pourrait se croire sur n'importe lequel des cinq continents !

Pouvait-on imaginer meilleur bouquet final à ce si grand voyage ?

La sensation d'être au bout du monde tout en étant de retour en France. Sur ce marché, tout renvoie à de petites choses déjà aperçues, rencontrées, dégustées ici ou là, durant ces deux années de vagabondages autour du globe.

Ce matin là, au marché, nous avions comme l'impression de picorer dans un album plein à craquer de nos souvenirs.

À l'heure de tourner la page, le marché de Cayenne clôture à merveille cet important chapitre de notre vie.

Cet hymne à l'humanité signifie aussi que bien qu'un chapitre se termine, le livre n'est pas fini. Nous avons tant à découvrir encore, tant d'humains à rencontrer et toute l'Afrique à visiter !

Merci Cayenne pour ce retour à la maison si dépaysant !

3
sept
3
sept
Publié le 17 octobre 2024

Un jour de mai 2022, nous sommes partis sans grandes ambitions vers l'Est et nous avons même gardé ce cap un certain temps.

En chemin, nous nous sommes empifrés de Baklavas et de thé sucré en regardant un défilé de montgolfières, nos mains ont pincé d'extraordinaires colonettes de calcaire puis nous avons goûté sans grand succès à la vodka et aux itinéraires hors sentier à l'approche des montagnes du Caucase.

Nous avons traversé des déserts, découvert une mer sans eau et manger les pastèques qu'on nous offrait sur le bord des routes. Nous avons fait quelques tours et détours pour pédaler à plus de 4000 mètres d'altitude, un petit chien et quelques tadjiks pour seuls compagnons de route, sur l'autre rive, quelques afghans pour seuls voisins.

Nous avons tournicoté par ci, par là, entre yourtes et immeubles gris "façon ex-URSS" puis nous avons dépassé la côte des 5000 mètres à la frontière indo-tibétaine. Nous avons régalé nos yeux de grands paysages sauvages et arides avant de remplir nos oreilles et nos narines de la tumultueuse et véritable Inde.

Nous avons alors tiré un azimut plein sud et nous avons aperçu des volcans fumants et menaçants avec pour fond sonore un muesin qui s'égosillait. Nous avons changé de direction pour un hiver en été et des fruits multicolores sur les plages Thaï suivi d'une hivernale au Mont Fuji sur fond de cerisiers en fleurs. Nous nous sommes offert un tour de voilier sur la mer du Japon et quelques belles escalades aux portes d'une capitale.

Il fut ensuite venu le temps de poursuivre têtes en bas, pieds en l'air et de vivre quand tous nos amis dorment. L'été s'est transformé en quelques heures en hiver et les kangourous sont devenus nos meilleurs amis. Un crochet par le pays des kiwis puis sur l'île des diables et de ces fameuses tours rocheuses posées les pieds dans l'eau.

Nous furent ensuite ébahis devant ces incroyables déserts de sel. Entre lamas, sable profond et soleil cuisant, kilomètre après kilomètre l'Argentine est apparue accompagnée de son fameux festival d'asado. C'est qu'il y avait bons nombres d'amis à visiter ! Pointe de hauteur détectée à 6893 mètres puis retour dans des contrées plus vivables, quoique...

Nous avions ensuite rendez-vous avec le terrible vent patagon et il fut largement à la hauteur de sa réputation.

Et puis un jour, nous fûmes rendus au presque bout du monde, il ne restait plus qu'à remonter tout un continent jusqu'à l'équateur. Pédaler sur des airs de samba et de foro brésilien, quoi de plus exotique ?!

L'Amazonie nous ouvrit ses portes : végétation extravagante, bêbettes et fleuves immenses.

Le calendrier affichait désormais août 2024 et le compteur environ 20 000 km. Une histoire deux fous de deux ans et quelques à tournicoté autour de la terre !

Et puis un jour, un simple click sur un site d'une compagnie aérienne marqua le début du reste de nos existances.

J'ai pas souvent peur des trucs de la vie mais là, j'avoue que d'un seul coup, j'ai eu un peu la trouille ! Juste le temps de quelques larmes vite essuyées et j'avais déjà trouvé une idée : Et si on faisait un voyage en France ?

Voilà qui laissait les portes sur le monde grandes ouvertes tout en permettant de réalimenter un peu nos porte-monnaies et de visiter famille et amis.

C'est peut être un peu utopique pour une vie de gens normaux mais c'est plutôt rassurant pour le moment !

Alors ça vous dit si on se voit bientôt !?! 🥰

5
sept
5
sept
Publié le 22 octobre 2024

On pensait partir loin, on croyait s'éloigner sans cesse davantage de nos "chez nous", on roulait dans la direction opposée, tournant le dos à tout ce qu'on connaissait, on a changé 100 fois de monde autour d'une seule et même planète, nos amis pariaient bien peu sur notre potentiel retour et on avait ceci dit, nous-même parfois bien du mal à l'imaginer...

Et puis, figurez-vous qu'un beau matin on s'est retrouvé comme par magie à notre point de départ ! Plus fou encore, rien ou presque n'avait changé ! Les mêmes sourires nous y attendaient même si quelques bons amis manquaient malheureusement désormais à l'appel, d'autres étaient un peu cabossés mais par bonheur toujours là. À deux ou trois cailloux près, les montagnes n'avaient pas bougé, quelques rides nouvelles s'étaient dessinées sur les visages, les enfants avaient poussaient comme des fleurs, les bébés qui étaient nés pendant que nous étions occupés à pédaler savaient déjà marcher et parlaient déjà presque. Et puis de nouvelles lignes avaient, entre temps, germées au Caroux pour mon plus grand bonheur !

Il ne restait plus qu'à reprendre le train en marche, ni vu ni connu !

L'une pris illico le chemin des sommets et pas des moindres : le grand chelem des 4000, c’est assez radical comme reprise après une acclimatation balnéaire sur les plages brésiliennes. Passer des tongs aux grosses chaussures et aux crampons, laisse quelques souvenirs lumineux 💡 !

L'autre reconverti en mécanicien tente encore à l'heure qu'il est, de remettre en état un vieux camion n'ayant pas roulé depuis plus de 2 ans. Ce dernier étant destiné à servir à la fois de moyen de locomotion et d'habitation tout en attendant que l'administration française se penche sur son sort de petit fonctionnaire !

Pas de panique si un jour et demi avant sa réintégration dans la fonction publique (!!!), il ne sait toujours pas ce qu'on va lui faire faire ni où son poste se trouvera dans l'hexagone !

Si le voyage nous a appris quelque chose, c'est bien de ne pas se faire de soucis inutilement !

... et ça tombe bien !

3
oct
3
oct
Publié le 28 octobre 2024

S'il y a bien une leçon que l'on aura retenue de ces années passées sur les chemins du monde, c'est bien qu'en voyage tout prend des dimensions exceptionnelles.

Émotions toujours exacerbées, réactions quelquefois exagérées, corps parfois extenués, humeurs malmenées, rencontres souvent intenses et paysages éblouissants. C'est ainsi qu'une personne bienveillante peut ainsi devenir quelqu'un que vous aimeriez vénérer à jamais tandis qu'un arceau de tente brisé peut prendre des allures de fin du monde. On rit, on pleure, on adore, on déteste, on chuchote, on hurle...

En voyage, tout est plus beau, plus fort, plus explosif même ! La relation entre voyageurs n'échappe pas à la règle.

On a beau avoir choisi le meilleur des compagnons de vie, de route, de grimpe et de galères, on a beau l'avoir connu, testé et approuvé dans toutes sortes de situations, on a beau croire qu'on connaît l'animal dans ses moindres détails, il y a pourtant encore tellement à découvrir sur celui qu'on croyait connaître et aimer !

Mouvement permanent, inconfort quotidien, minimalisme matériel, sobriété alimentaire, hygiène sommaire, choix décisionnels importants... il n'y a pas de doute, en voyage, la relation amoureuse est mise à bien rude épreuve.

Durant ce long voyage, j'ai tantôt inventé les preuves d'amour les plus belles et les plus farfelues, tantôt dévoilé les plus mauvais côtés de mon caractère de petit cochon. Ce ne serait pas mentir que d'affirmer que ce fut quelquesfois réciproque.

Dans un tel voyage, on ne forme pas seulement un couple d'amoureux mais aussi une sorte d'équipe de vagabonds. Nous nous étions pourtant jurés, dès notre rencontre, de faire en sorte de ne jamais devenir de simple compagnons de cordée. Non seulement nous le sommes parfois devenus mais nous avons aussi été quelquefois colocataires de tente et équipiers cyclistes.

Dans un tel périple, l'amour est inévitablement malmené. On s'était aussi promis de se dire tout ce qu'on avait sur le cœur et sur les nerfs, on a toujours plus ou moins bien tenu promesse mais voilà que parfois les "maux" sont sortis tout en désordre : sans forme, sans consistance et sans élégance.

Dans un voyage au si long cours, il y a ce manque de repères fixes quand tout semble mouvant : l'épaule de ce bon copain sur laquelle poser sa tête, ce bout de jardin où se réfugier, cette balade qu'on aime bien pour aller s'aérer l'esprit, panser son cœur et vidanger ses yeux. Il y a juste ce visage connu que vous avez quelquefois détesté presque autant, qu'en réalité, vous l'adorez de tout votre être.

Partout autour, il y a cet environnement inconnu, ces gens qui passent, qui parlent une autre langue que la vôtre, qui vous prennent pour des fous ou vous envient d'avoir osé cette drôle de vie.

Chaque jour, il y a cet abri de toile à plier dès que le petit matin pointe son nez et que l'on ne peut réinstaller pour s'y reposer qu'une fois la nuit suivante venue. Il y a le vélo, ce moyen de déplacement qui demande un effort certain et il y a des jours où l'on aimerait simplement se laisser conduire et regarder le paysage défiler à la fenêtre. Et puis, il y a ces journées accrochés au rocher ou dans des pentes de neige dure comme de la glace et puis, il y a cette corde qui nous lie pour le meilleur et pour le pire.

Au sujet de la cordée... J'ai toujours aimé cette relation particulière et véritable qui nous lie à un compagnon et que l'on expérimente dans toutes sortes de situations en montagne. Dans ce lien, il n'y a pas de place pour le mensonge, le superflu, les artifices, la prétention ou la fausse modestie... On est très vite et presque toujours dans le vrai, le concret et l'essentiel. En montagne, on apprend à se connaître soi mais on explore aussi tous les traits de caractère de son compagnon de cordée.

Il y a de grandes similitudes avec un si long voyage... l'intensité physique est moindre (et encore que c'est parfois discutable), l'engagement vital réduit et le milieu moins hostile mais la fatigue nous a largement à l'usure !

Alors, après tous ces instants où cuits par le soleil rageur, glacés par le vent froid, bousculés par les bourasques ou malmenés par des côtes trop raides, nous avons unis nos forces. Après tous ces moments complètement fous où avec tendresse, on a aperçu dans le regard de l'autre des étoiles briller et parfois des larmes d'émotions se former. Après ces tempêtes de mots durs où chacun s'est recroquevillé sur lui-même et a attendu que le calme revienne, après toutes ces nuits où nos corps sales se sont blottis l'un contre l'autre pour s'aimer plus fort encore ou se tenir un peu chaud quand les températures dégringolaient sous zéro...

Je ne sais pas si l’on s'aime plus fort sur la ligne d’arrivée que sur celle du départ, si ces batailles et ces tempêtes traversées en chemin auront cassé quelque chose de profond en nous mais une chose est sûre : on peut dire qu'on s'aime toujours et qu'on se connaît désormais par cœur ou presque !

On sait maintenant que passer chaque seconde de chaque minute de chaque jour durant vingt-huit mois ensemble à l'autre bout du monde, ce n'est pas toujours évident mais on sait aussi à présent, que se retrouver séparé l'un de l'autre et de ne pas pouvoir se voir pendant des semaines est, pour nous, une véritable torture !

Alors que j'enchaîne les journées sur le rocher des sierras ibériques ou que je parcours les cimes pyrénéenes, je pense à mon koala préféré enfermé entre quatre murs dans un bureau à l'autre bout de la France loin de son écosystème.

Je pense aussi à ce 30 septembre 2016 et à ce message un peu osé envoyé à ce prof pas comme les autres. Dire simplement ce que j'avais sur (et déjà dans) le cœur, sans n'attendre véritablement rien en retour.

Aujourd'hui, 8 ans après, jour pour jour, je crois que les histoires d'amour, c'est un peu comme les grands voyages : parfois faut foncer et réfléchir après !