Du dimanche 5 au mardi 14 août :
Si vous avez lu notre dernier article au sujet d'Ulan-Bator, vous aurez compris que le principal intérêt de la Mongolie ne se situe pas dans sa capitale.
Car si le tourisme se développe à vitesse grand V en Mongolie c'est en effet grâce à la diversité des paysages que l'on y rencontre et surtout parce qu'il est encore possible de vivre des moments « authentiques ».
Sur ces deux points nous n'avons pas été déçus lors de notre grande excursion de dix jours à travers le sud et le centre de la Mongolie. Sous la forme d'un mini carnet de route, nous vous embarquons dans notre van 4x4 à travers les immenses étendues de l’Asie centrale. Attention, c'est long =)
Jour 1 :
Avec une petite heure de retard sur l'horaire prévu nous quittons Ulan-Bator à bord d'un van à l'âge incertain et à la carrosserie douteuse. A l'intérieur nous sommes bien installés même si les parois molletonnées font plutôt penser aux estafettes qui stationnent la nuit aux bois de Boulogne...
Notre guide – Selengé – fait encore quelques courses à la sortie de la capitale et nous voilà partis à l'aventure. Ce sont plus de 3000 kilomètres qui nous attendent lors des dix prochains jours.
Quelques temps après avoir quitté Ulan-Bator nous quittons alors l'asphalte calme de la grande route nationale pour suivre une piste de terre en plus ou moins bon état. Cela secoue parfois sévère à l'arrière, nous sommes bringuebalés sans ménagement et l'on comprend tout l'intérêt des parois molletonnées !
La vie à l'intérieur du van se met peu à peu en place. Chacun apprend à anticiper les trous et les chocs qu'encaisse le véhicule – sans broncher.
Avant de rejoindre notre première yourte nous faisons un stop autour d'un monastère en ruine. Le temps pour notre guide de nous expliquer toute l'importance de la méditation et de l'énergie dans la religion bouddhiste. Nous nous imprégnons en silence de la puissance de ce lieu avant de rejoindre la famille qui nous accueille pour la nuit.
Pour cette première nuit, nous dormons à même le sol, la yourte (ou ger pour être exact) étant un poil trop petite pour nous héberger tous.
Avant le dîner, alors que nous admirons le coucher de soleil, un jeune mongol vient à notre rencontre. Par différents gestes et onomatopées nous comprenons qu'il nous invite à jouer au basket avec ses amis. A dix minutes de notre yourte se situe en effet un terrain de basket et une petite bande de jeunes mongols en vacances. Nous passons une heure extraordinaire avec ces enfants, premier vrai contact positif avec la population locale, qui nous avait paru jusqu'à présent très froide (timide?) et distante.
Jour 2 :
Hormis la difficulté que nous avons eu à nous endormir à cause des insectes grouillant autour de nous la veille, nous nous réveillons de bonne humeur. La nuit passée par terre à traquer les petites bêtes n'est pas sans nous rappeler nos dernières vacances avec Ghislain et Émilie sur le GR20 où nous avions subi la loi des punaises de lit d'un refuge de montagne... Nuit au sol et insectes, nous tenons là un thème de vacances bien particulier !
Une longue journée sur les pistes nous attend. Pendant plusieurs heures nous sommes secoués au gré des reliefs creusés par les fortes pluies des derniers jours (pluies anormalement fortes selon notre guide à cette saison). Nous prenons le parti d'en rire – cela fait parti de l'aventure – mais sommes quand même satisfaits lorsque nous nous arrêtons pour le déjeuner en plein désert, et encore plus lorsque nous arrivons à Tsagaan Suvarga, lieu-dit surplombant d'immenses falaises rouges.
A l'entrée du désert de Gobi, nous sommes loin de l'image de grande plaine rocailleuses balayée par le vent où rien ne pousse. Les environs sont verdoyants, même si l'absence d'arbre et de forêt à l'horizon laisse imaginer toute l'hostilité du lieu. Sur notre route nous croisons un chamelier qui nous fera goûter du yaourt fait à base de lait de chamelle qui se rapproche un peu du goût de la faisselle, un régal pour certains.
Le soir nous jouons avec les enfants de la propriétaire du camp de yourtes. Les filles notamment leur apprennent à jouer à « 1,2,3...soleil ! ». Puis nous attendons sagement la nuit face à l'orage qui nous arrive dessus, les éclairs qui lézardent le ciel chaque minute sont impressionnants.
Nous comprenons alors que la nature est impitoyable, ici plus qu'ailleurs et le désert de Gobi justifie sa réputation de lieu hostile. Nous dormons enfin sur des « vrais lits » (comprenez des planches de bois avec des couettes posées dessus) mais les grosses pluies de la nuit auront raison de l’étanchéité de la yourte. En pleine nuit nous prenons l'eau, les courtes nuits se suivent et se ressemblent en Mongolie !
Jour 3 :
Heureusement une petite journée de route nous attend le lendemain. Nous passons dans un village pour faire quelques courses et nous rejoignons le canyon de Yolyn Am. Un temps fermé aux véhicules à cause des pluies de la veille, l'accès au canyon est finalement ouvert en fin d'après-midi.
Nous nous enfonçons alors dans un canyon splendide, aux pentes abruptes impressionnantes au sommet desquelles nous apercevons de nombreux rapaces et quelques ibecs grâce aux jumelles de Ghislain.
La fin de la randonnée est épique, là où la majorité des randonneurs fait demi-tour notre guide nous demande d'enlever nos chaussures pour finir pieds nus dans le lit de la rivière. Entre la douleur sous nos pieds, le froid de la rivière et les immenses parois autour de nous, ce passage est mémorable !
La journée se conclut par un apéro face au soleil couchant – l'orage qui menaçait un peu plus tôt dans la journée s'est finalement éloigné. Nous aurons une nuit étoilée comme nous n'en avions plus vu depuis notre stage de « stargazing » dans le désert d'atacama.
Jour 4 :
Au petit matin, Ghislain et Emilie, courageux devant l'éternel se sont levés pour admirer le lever de soleil quand nous avons préféré prolonger notre nuit de deux petites heures.
Nous passons de longues heures dans le van sur une route très cabossée, en plein milieu du désert. La chaleur est étouffante à l'extérieur, le van souffre à chaque bosse jusqu'à nous lâcher...une odeur de brûlé envahi l'habitacle, une petite fumée s'échappe et nous voilà arrêtés en plein désert. Le temps pour notre super chauffeur de réparer tout ça – une petite heure mine de rien – et nous voilà repartis direction notre camp du soir.
Là-bas nous monterons à dos de chameau pendant une heure au pied des dunes de Khongoryn. Les ombres s'allongent face aux dernières heures du jour, ce tour en chameau est une première pour nous tous, nous en sommes ravis !
D'autant que le décor est idéal, on se rêve tantôt en Alchimiste de Coelho, tantôt en Napoléon face aux pyramides Egyptienne mais c'est bien en Mongolie dans le désert de Gobi que nous sommes. Nous nous le répétons plusieurs fois entre nous pour réaliser pleinement le moment que nous avons la chance de vivre.
Comme sorties de nulle part, les dunes de Khongoryn s'étendent sur près de 1000 kilomètres carrés. C'est au sommet de l'une d'elle que nous avons prévu de grimper pour admirer le coucher de soleil. Le van nous refait une mauvaise surprise en tombant en panne à 600 mètres du pied de la dune, nous devons donc boucler le reste à pied au pas de course pour ne pas manquer le coucher de soleil. Une demi-heure plus tard nous arrivons les jambes en feu, les poumons asphyxiés et le visage fouettés par le sable à cause du vent violent qui souffle.
La vue au sommet est inoubliable. La dune sur laquelle nous sommes est perchée à près de 200 mètres, là où notre dune du pilat culmine à 106 mètres !
A l'est, l'orage une fois encore se fait menaçant, nous avons l'impression que les éclairs qui déchirent le ciel sont à portée de nos mains.
A l'ouest le soleil se couche entre deux nuages et nous offre des couleurs magnifiques. Les dunes immenses autour de nous sont immaculées, nous avons l'impression d'avoir quittés la terre pour atterrir sur une autre planète.
Sans doute l'un des plus beaux coucher de soleil depuis le début du voyage. Nous redescendons la dune en sprint, le sourire au lèvre et atteignons le van (réparé!) juste avant que l'orage ne nous frappe et évitons le grain de justesse !
Une nuit en yourte n'étant pas une nuit en yourte sans péripéties, celle-ci ne déroge pas à la règle lorsqu'au beau milieu de la nuit le vent parvient à s'engouffrer par le toit pour ouvrir constamment la porte. Scène surréaliste lorsque nous sommes sous la pluie et le vent à 3h du matin pour mieux attacher la fermeture du toit et caler la porte pour prolonger notre nuit jusqu'au lendemain.
Jour 5 :
La route est agréable aujourd'hui, très peu de trous et de reliefs. Cela fait du bien, nous pouvons presque nous endormir après la petite nuit de la veille !
Nous arrivons en milieu d'après-midi au bord d'un oasis, le deuxième de notre voyage après celui de Huacachina au Pérou (c'était au mois de Janvier, il y a une éternité!).
A deux pas de notre camps de yourte se trouve un mini-musée où l'on peut admirer le squelette d'un dinosaure, en train d'être mis à jour par une équipe d'archéologues. Il est difficile d'imaginer qu'on puisse approcher de si près un squelette datant de plusieurs millions d'années, sans aucune protection ni opération de préservation (il était possible de toucher les os!).
Un temps nous pensons qu'il s'agit d'un squelette d'un chameau ou autre créature plus récente. Cependant la Mongolie est réputée comme étant le territoire ayant accueilli en son temps le plus grand nombre d'espèces de dinosaures différentes...alors pourquoi ne pas en trouver un juste à nos pieds ?!
Après avoir voyagé dans le temps nous prenons la direction des flamming cliffs (comprenez falaises flamboyantes), à un quart d'heure de van de notre camp pour profiter du soleil couchant.
Ces falaises sont époustouflantes. L'immensité du lieu envoûte le visiteur et nous donne parfois le sentiment de voler. En fin de journée, quand le soleil tire sa révérence, la terre et la roche deviennent alors d'un rouge flamboyant. Une couleur féerique, non sans rappeler celle de l'Alhambra de Grenade au coucher de soleil.
Nous saluons le soleil face à ces falaises, une bière à la main avec notre guide et notre chauffeur, juste avant de rentrer rapidement au camp et d'admirer – encore – le gros orage qui nous guette à quelques kilomètres et qui s'abattra sur notre yourte dans la nuit.
Jour 6 :
Départ groupé ce matin ! L' Entente des Gentils Conducteurs de Van Mongols a été informée que la route serait en piteux état sur la première partie du trajet, pour sortir un véhicule d'un éventuel enlisement dans la boue, nous partons donc par groupes de 3 vans. Précaution utile puisque nous devrons tracter le van nous précédant après deux heures de route seulement.
Nous ne sommes pas au bout de nos peines car quelques heures plus tard ce sont Emilie et Olivier qui feront les frais du terrain défoncé en se retrouvant projetés au sol après une bosse plus insistante que les autres ! Plus de peur que de mal, surtout pour Emilie qui a accueilli avec le sourire Olivier sur sa cuisse. Un gros bleu plus tard, ça repart ! Direction le monastère d'Ongi.
Le monastère, construit au 17e siècle, fut l'un des plus grands de la Mongolie, jusqu'à sa destruction totale par les communistes en 1939. Il n'en reste aujourd'hui que des ruines qui laissent deviner l'immensité du lieu. Ici encore, nous sommes surpris par la « non-conservation » du lieu, des ustensiles vieux de plusieurs siècles sont entassés ça et là sans la moindre protection du temps et du touriste. On sent que la conservation du patrimoine n'est pas la priorité du gouvernement mongol. Avec un taux de mortalité infantile dépassant les 20%, comment leur en vouloir ?
Jour 7 :
La nuit fut courte. Entre insectes omniprésents et averses à l'intérieur de la yourte (Ghislain s'en souvient encore), nous n'avons que peu dormis. Nous retrouvons notre guide quelque peu remontés lors du petit déjeuner et en profitons pour lui expliquer que nous trouvons que sa prestation n'est pas au niveau sur plusieurs points. Depuis le début du voyage c'est peut-être la première fois que nous nous plaignons à ce point tant l'écart entre le prix et la prestation est énorme.
Message entendu et compris par la guide qui quelques heures plus tard nous offre une pause d'une heure dans une famille nomade.
L'accueil nomade n'est pas une légende, loin de là ! Nous nous présentons à l'improviste et en moins de temps qu'il n'en faut pour l'écrire nous sommes entourés de toute la famille, biscuits sur la table et verres d'airag dans les mains.
L'airag est une boisson symbolique des steppes mongoles faite à base de lait fermenté de jument, légèrement alcoolisée. Nous nous attendions au pire, et finalement ce n'est pas si mauvais. Un peu écœurant à la longue, mais loin de l'atrocité que l'on nous avait promis.
L'apéro mongol achevé nous passons ensuite de très belles minutes autour d'un troupeau de moutons en cours de vaccination, pendant que les Émilie s'éclatent avec les enfants présents sur le camp. Nous prenons alors la direction de la vallée d'Orkhon en empruntant une route complétement défoncée, au cours de laquelle nous ne comptons plus les passages dans l'eau et les manœuvres acrobatiques réalisées par notre chauffeur pour nous amener à destination.
Heureusement les décors sont splendides, la vallée d'Orkhon dont nous avions tant entendu parler est à la hauteur de sa réputation !
Jour 8 :
Notre camp est à cinq minutes à pied d'une grande chute d'eau, ballade idéale pour débuter la journée et se mettre en jambe avant de chevaucher deux heures dans la vallée.
De nous quatre, seule Emilie B. comptait comme une cavalière relativement expérimentée. Alors lorsqu'il a fallu faire avancer les chevaux mongols, « semi-sauvages » selon la guide, cela n'a pas été une partie de plaisir ! Loin de la docilité des chevaux argentins ou de la vivacité des chevaux pascuans, les chevaux mongols sont têtus et difficiles à manœuvrer surtout lorsqu'ils ont décidé qu'ils ne voulaient pas se promener ce matin... Après quelques difficultés nous avons cependant réussit à trotter un peu et même à s'offrir quelques galops ! Nous revenons au camp avec la banane d'avoir enfin pu faire du cheval dans ces décors de rêve.
Le soir après quelques heures de route nous profitons de bains de sources d'eau chaude à la tombée du jour, des dizaines de buses et autres rapaces juste au dessus de nos têtes.
Jour 9 :
Après une nuit très froide (nous sommes en montagne), nous retrouvons l'asphalte pour la majorité de la journée, le temps de rejoindre la ville de Karakorum.
L'ancienne capitale de l'empire Mongol est totalement détruite, les vestiges se trouvent à quelques kilomètres de l'actuelle Kharkhorin, ville de petite taille et qui serait anecdotique sans la présence d'Erdene Zuu, lieu le plus visité de Mongolie.
Erdene Zuu est un monastère construit à la fin du 16e siècle et sans cesse en développement, regroupant jusqu'à 700 temples au début du 20e siècle. Les trois temples à l'origine de la construction du monastère sont certainement les plus emblématiques et les plus impressionnants.
En 1939, comme pour Ongi, les communistes détruisent le gros de ce monastère, si bien qu'il n'en reste aujourd'hui que quelques ruines et temples restaurés.
Nous terminons la journée au sommet d'une dune de sable face au soleil couchant. Moins haute que la précédente, cette dune est également moins courue.
Nous sommes seuls à son sommet pour l'heure de l'apéritif et les lumières du soleil sont une fois encore complètement enivrantes !
Jour 10 :
Sur notre route du retour vers Ulan-Bator nous nous arrêtons dans un parc national pour observer à distance des chevaux de Przewalski, espèce endémique de cette région de Mongolie, à mi-chemin entre le cheval et le zèbre. Cela sera également l'occasion d'observer à la jumelle des cerfs, hauts perchés sur les montagnes environnantes.
Nous rentrons à UB en fin d'après-midi.
Après ces dix jours passés dans les steppes et le désert nous sommes ravis de retrouver un peu de civilisation et un semblant de confort.
Nous avons traversé des paysages splendides et variés, la Mongolie est certainement l'un des plus beaux pays que nous ayons visité, mais aussi l'un des plus hostiles. Des heures durant nous avons roulé sans croiser âme qui vive, il est très difficile pour l'homme de s'installer durablement dans le désert de Gobi même si quelques nomades persistent à y exercer leur métier de bergers ou chameliers.
D'animaux il en fut en revanche question tout au long de cette aventure. Vaches, moutons, chèvres, chameaux, yacks, ibecs, aigles, vautours, buses, « ground squirrel », cerfs ou chevaux sauvages....un vrai zoo à ciel ouvert !
Un mot enfin sur le caractère des nomades qui tranche littéralement avec la population d'Ulan-Bator. Si la barrière de la langue reste présente et ne facilite pas l'échange, nous avons senti chez les nomades un plaisir d’accueillir le visiteur que l'on ne soupçonne pas chez les habitants de la capitale.
Merci et bravo aux courageux qui seront arrivés au bout de cet article (le plus long depuis le début du voyage) résumant nos dix jours passés sur les pistes qui ne furent pas les plus simples à résumer !
Anecdotes :
- La vie sur la route et sur les camps de yourte cache quelques moments de vie dont la grande proximité pour aller aux toilettes et l'hygiène toute relative. Difficile à décrire mais inoubliable, croyez-nous !
- Sur notre chemin de retour du Yolin Am nous avons embarqué quelques touristes français sans bus dont la guide mongole avait étudiée en France...à Chambery ! Ville de naissance de Ghislain.
- Nous avions gagné une peluche à un jeu de fléchettes que nous souhaitions offrir à un enfant. Notre guide a longuement interrogé les enfants présents sur le camp pour comprendre lequel n'avait jamais l'occasion de se rendre à la ville et donc n'avait jamais accès à ce type de jouet.
- Ce que nous appelons communément Yourtes sont en fait des Gers. Le français a retenu le mot yourte qui désigne en fait une tente russe à la forme triangulaire et non les grandes tentes blanches que nous avons à l'image lorsque nous parlons de yourtes.
- Si nous avons malheureusement constaté que la pollution était parfois présente – notamment autour d'UB – cela est incomparable avec les aberrations vues en Indonésie ou en Amérique du Sud. A noter que l'environnement immédiat des camps de gers est très propre, ce qui tranche avec les déchetteries à ciel ouvert des camps de bases de randonnées autour du Rinjani ou des « jardins » des fermes en Équateur et Pérou.