20 étapes
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Depuis Buenos-Aires nous passerons par Puerto Madryn, Bahia Bustamante et la péninsule Valdès. Ensuite, Ushuaia et le parc naturel Torres del Paine. Enfin, El Calafate, le plus bel endroit du monde.
Du 16 décembre 2017 au 6 janvier 2018
22 jours
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Il était une fois...

Pffff non, mauvais départ !

Il y a 22 ou 23 ans, je me trouvais sur un bateau à voile avec un fieffé marin. Après avoir éclusé la malheureuse bouteille de porto qui ne nous avait rien fait, si ce n'est se trouver au mauvais endroit au mauvais moment, nous évoquions les croisières mythiques auxquelles les marins rêvent quand la mer s'est calmée et que la relâche au port leur en laisse le temps. Les canaux de Patagonie, le détroit de Magellan, le passage entre l'Atlantique et le Pacifique, le Cap Horn...

Quelques années passèrent. En 2010, alors que nous étions à la recherche d'un grand voyage à réaliser, l'idée est revenue sur le tapis sous la forme d'une croisière à la voile entre les îles Malouines et Ushuaia. 'Trop aventureux' me dit Anne. 😶 Nous allâmes donc en Lettonie rendre visite à Sophie et nous ne l'avons pas regretté !😊

Mais l'idée est restée dans mon esprit😐, jusqu'à ce jour de la fin 2016 où le projet a pris forme, tel un bon génie sortant enfin de sa bouteille. Il a suffi d'en parler à Gene pour que ce qui n'était qu'un vague projet devienne une réalité tangible. Son enthousiasme a certes été d'un grand secours, tel un bon coup de pied au c... du génie en question.😀 Ce ne serait pas un voyage à la voile, j'ai cessé provisoirement de me prendre pour un marin, mais ce serait en Patagonie quand même.

Nous allons partir à 4 : Gene, son mari Alain, Sophie et moi. Conseil de guerre, plan d'action, demandes d'offres à divers voyagistes débouchent sur plusieurs propositions. Après quelques réunions à Lesterny, à Chavanne ou à Thuillies et force échange de mails et tableaux comparatifs, le projet prend forme, se concrétise en nombre de jours, en étapes, en hôtels, en nombre de repas...

Bon, le budget est plus conséquent que prévu...😨 Tant pis, on y va!😤

Lesterny et Chavanne (Nassogne)

Début 2017.

On y va ? Mince, Sophie que me dis-tu? Tu as choisi un autre projet ? Ô rage, ô désespoir, n'ai-je donc tant rêvé que pour cette nouvelle ?😭 Hmm, ma réaction n'est guère sympathique.

Tu voudras bien me la pardonner, Sophie. Mais tu as raison, tu as ton projet et il est magnifique !😉

https://sophiechielens.wordpress.com/

Ouf, Anne se dévoue. Elle qui ne voulait pas s'engager finit devant ma déception par accepter de se sacrifier.😗 Elle viendra à la place de Sophie.😍

Une surprise ne venant jamais seule, Alain décide à son tour de ne pas nous accompagner, au grand dam de Gene.😣 Tant pis, nous partirons à 3!

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Quelques mois s'écoulent, nous nous faisons à l'idée que ce voyage est enfin décidé. Au fur et à mesure que les mois passent, notre imaginaire fonctionne. Anne s'inquiète, le stress du grand voyage va-t-il la gagner avant le départ ? Se sent-elle capable de résister aux kilomètres que nous allons probablement parcourir à pied ? Va-t-elle faire cette promenade à cheval? 😮

Quant à moi, je me sens joyeux de ces préparatifs et plutôt détaché pendant les mois d'été. Je ne me rend pas encore compte que ce n'est pas qu'une vue de l'esprit. Je rêve à ce qui nous attend, pressé d'y être, désireux de profiter pleinement de chaque instant de ce voyage et en même temps inquiet que ces instants s'enfuient trop vite ... 😲

Mais la date du départ approche à grands pas. Nous profitons de nos déplacement à Bourdon (Hotton) dans le cadre de notre formation en coaching équin pour nous réunir chez Gene.

Que mettre dans nos valises? Quel temps fera-t-il? Chaud à Buenos-Aires, froid et venteux à Ushuaïa! Il faut de tout comme vêtement, depuis le maillot de bain jusqu'au bonnet fourré en passant par les chaussures de marche! Il faut aussi un permis de conduire international! Et combien d'argent prendre sur soi ? Et les photos? Et les valises seront-elles assez grandes ? Et pas trop lourdes ?😫

Nous voilà à la veille du départ. Avant-hier, la neige a empêché les avions de décoller de Bruxelles. L'angoisse me gagne. Et si c'était comme ça samedi ? Mon excitation est à son comble! 😨

Ce soir, Les valises sont bouclées. Nous irons en train depuis la gare de Charleroi jusqu'à l'aéroport de Zaventem. Le train, déjà un goût de voyage ... Ça s'applique bien, pour une fois. C'est Laureline qui ira nous y conduire tôt demain matin...

Je crois que le sommeil sera difficile à trouver cette nuit...

😊

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Le réveil a sonné tôt ce matin mais un peu pour rien...

Petit déjeuner rapide mais pas assez à mon goût : 'Dejà 6h25! On va rater le train!' Un dernier coucou de Anne sur Facebook et nous voilà partis sur les chapeaux de roues. Bon, finalement on est à l'avance chez Laureline qui va nous déposer à la gare, bien à temps pour le train.😗

Bizarre ce train qui part de Charleroi mais dans lequel il est affiché qu'il part de Bruxelles midi et s'arrête à plusieurs gares entre Bruxelles et Anvers. Et entre Charleroi et Bruxelles, il ne s'arrête pas ? L'inquiétude nous gagné: Sommes-nous dans le bon train ? Bon le voilà qui démarre. Alea jacta est.

Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à nous inquiéter. Une jeune dame nous demande si le train s'arrête bien à Nivelles. Nous lui affirmons que oui et cela se vérifie, heureusement pour nous.😀

Nous changeons de train à la gare du midi et nous voilà rendus à l'aéroport. Voilà un premier pas de fait.

Nous retrouvons Gene et Alain et il n'y a plus qu'à faire la file pour enregistrer nos bagages.

C'est un peu angoissé pour ma part que nous nous mettons dans la file pour notre enregistrement et celui de nos bagages. 😨 En effet, j’étais habitué à présenter un billet au préposé. Il y a longtemps, c’était un vrai billet puis plus récemment un billet que j’avais imprimé moi-même. Mais aujourd’hui, nous arrivons les mains vides, juste avec nos passeports. Mais apparemment Boris (c’est l'organisateur de notre voyage) s'est occupé de tout et il semble que notre seul passeport suffise pour retrouver nos réservations. Ça c’est de la technologie moderne !😁Pendant que nous attendons patiemment, Alain fait remarquer à un couple d'apparents resquilleurs qu'ils nous dépassent abusivement 😬 mais le monsieur, très sur de lui (je déteste ce genre de personne) affirme que non. En effet, nous constaterons ultérieurement que ce couple est en classe prioritaire et qu'il a donc le privilège de dépasser tout le monde … Chose qui m’agace profondément.😣Heureusement, le préposé à l’enregistrement est très sympathique et il nous fait oublier ce moment de tension. Il nous explique tout et met nos bagages en prioritaire. Ça ne sert sans doute à rien, mais nous apprécions le geste. 😊Nous arrivons à Rome. Quatre heures trente d'attente. C'est trop peu pour aller visiter la ville, malheureusement. Après avoir calmé d’un morceau de pizza nos estomacs qui crient famine nous flânons dans les couloirs interminables de cet aéroport immense, à lécher les vitrines des magasins de luxe qui se succèdent : Armani, Gucci, Hermès, Montblanc et j’en passe. Sans compter les taxfree qui proposent tous les produits de luxe.

Selfie à Rome. Notez mon bras trop court! 

Bon, heureusement nous ne sommes pas tentés par les appâts que propose ce temple de la consommation et attendons patiemment en titillant le wifi défaillant de l’aéroport.Enfin, l'heure de l’embarquement arrive et après avoir laissé monter à bord les riches, les pauvres handicapés, les vieilles dames et les passagers du fond, nous pouvons enfin embarquer à notre tour.

Nous voilà embarqués pour 14h de vol…

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Le trajet disponible en continu pendant tout le trajet sur notre écran perso.

Film, souper frugal (raviolis et salade de riz), re-film, tentative de sommeil, retournement avec ou sans coussin, escapade aux toilettes, re-tentative de sommeil avec réveil brutal quand ma tête s'affaisse d'un coup, re-re-film, etc jusqu’à ce qu'enfin le petit déjeuner nous soit servi une heure avant l’atterrissage. C'est long 14h00 de vol ! Il faut la mériter, la Patagonie ! Bon je m'y attendais, ce n'est pas la première fois que je voyage en long courrier.

Quand nous arrivons, il pleut 😣 ! Nous suivons la file et arrivons au poste 'Migracion' Une foule infinie nous précède.

La file qui nous précède à l'arrivée, devant le passage de la frontière.

Pff, encore devoir attendre! Heureusement la file est bien canalisée dans un immense labyrinthe. En fait c’est même très bien organisé et nous n'attendons pas très longtemps avant que nos passeports soient contrôlés. Gustavo nous prévient via WhatsApp qu'il nous attend déjà. Décidément, merci à Gene (celle du cours de coaching équin, pas celle avec qui nous voyageons) de nous avoir initiés à cette application. Comme dirait l’autre, l'essayer c’est l’adopter ! Je n’arrête pas de m’en servir depuis.😀

Enfin, c’est le carrousel des bagages. Les valises d'Anne et de Gene arrivent presque immédiatement. Et la mienne ? J'attends patiemment quelques minutes avant de me rendre compte qu'elle est tombée du tapis roulant quelques mètres avant l’endroit où nous attendons. Ouf 😗

Nous retrouvons Gustavo qui nous accompagne jusqu’à l’hôtel, nous explique ce qu'il y a à voir et à faire à Buenos Aires, comment on s'y déplace. Nous sommes un peu surpris qu'il joue les agents de change et nous propose ses pesos contre nos euros. Mais comme Gene s’est renseignée sur le cours de change et que c’est ce qu’il nous propose à peu de chose près, nous acceptons sa proposition. C’est toujours ça en moins dont il faudra s'occuper.😗

La ville est en fait construite comme un damier et divisée en pâtés tous égaux de 100 m de côté. Il est donc très facile d'estimer les distances d'un point à l'autre sur le plan que Gustavo nous fournit.

Après une petite heure de repos, nous partons pour un premier tour dans la ville. Notre hôtel s'appelle Imagine et est situé dans le centre rue Mexico, 1330. Nous le quittons donc à pied, afin de nous rendre au café Tortoni, le plus célèbre et le plus ancien café de Buenos-Aires.

Avenida 9 de Julio 
Avenida 9 de Julio

Nous y commandons un petit déjeuner Tortoni, en fait pas petit du tout !

Devant le café Tortoni 
Petit déjeuner au café Tortoni 

La ville semble tentaculaire. Lors du trajet vers l’hôtel, Gustavo nous a expliqué que la ville compte 3 millions d’habitants et l’agglomération 12 millions ! C’est plus que toute la population de la Belgique. En nous promenant, j’ai l'impression que cette ville a été riche mais qu’actuellement ce n’est plus le cas. L’histoire et ses crises sont sans doute passées par là depuis la 'belle époque’. Certains bâtiments qui ont été beaux il y a longtemps sont maintenant décrépits voire complètement abandonnés. Mais bon, c'est comme ça et je suppose que c'est ce qui donne son caractère à cette ville.

En fait on est pas très dépaysés. Gene nous dit que la ville semble bien plus riche que celles qu’elle a eu l’occasion de visiter dans d’autres pays d’Amérique latine comme en Colombie ou au Pérou. Si on ne le savait pas, on pourrait se croire dans une grande ville d'Europe, comme Madrid ou Rome. D'ailleurs les habitants ne sont pas très typés. Ils ont un look européen, ce qui est surprenant pour nous.😶

La place de Mai. 

Nous arrivons sur la célèbre place de mai où se trouve la Casa Rosada qui est le siège du gouvernement. De beaux grands arbres ombragent son extrémité. C’est agréable de s'y promener d’autant que certains arbres en fleurs dégagent une agréable odeur.

Nous visitons le musée historique qui se trouve juste derrière la Casa Rosada. Gene espère y trouver des informations sur les mère de la place de mai. https://fr.m.wikipedia.org/wiki/M%C3%A8res_de_la_place_de_Mai En fait l’histoire de l'Argentine semble être une longue succession de coups d’état, de dictature et de révolutions populaires.

Le musée historique. 

Après le petit déjeuner pantagruélique de ce matin, pas besoin de dîner. Après un délicieux jus de fruit pris dans le marché couvert, nous décidons d'aller voir le marché artisanal que Gustavo nous a recommandé. Il s'agit d'une longue rue (comme toutes celles de Buenos-Aires) où se succèdent des centaines d’échoppes. Certaines proposent effectivement des produits artisanaux mais beaucoup vendent des produits dont on devine qu'ils ne sont que des produits industriels bon marchés. Nous prolongeons la promenade vers le quartier de la Boca. Sans doute ne sommes nous pas passés dans la bonne rue de ce quartier réputé comme populaire et coloré car nous n’y voyons rien d’extraordinaire. C'est épuisés que nous prenons un taxi pour regagner l'hôtel.

Le marché couvert où nous avons dîné, un couple qui danse le tango dans la rue. 
Promenade dans le square Lezama. 
L'entrée de l'hôtel Imagine et la troisième cour. 

Après un repos bien mérité et une bonne douche, on vient nous chercher pour le spectacle de tango.

Spectacle? Ha ouiche ! Il va falloir payer de notre personne! On nous introduit dans une salle de cours de danse. C'est nous qui allons danser! 😮 Mi-figue mi-raisin, nous apprenons le pas de base du tango (en 6 temps s'il vous plaît !). Bon, je ne suis pas trop doué mais apparemment plus que certains ... Heureusement, la prof est très sympathique et à défaut de bien danser, au moins on s'amuse.😊

Le cour de Tango. 

Suivent le repas et le spectacle auquel notre professeure de tango participe en vedette. Quelle grâce et quelle souplesse. Je ne peux m'empêcher de l'admirer.

Spectacle de Tango avec notre professeur d'un soir. 

C'est épuisés par cette première journée que nous sommes reconduits à l'hôtel. Pas besoin de préciser que je m'endors dès que ma tête touche l'oreiller.

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Ce matin, nous décidons de nous rendre dans le quartier de la Ricoletta pour y visiter le cimetière. Après un petit déjeuner plutôt sucré (aïe aïe, le régime !), Nous tentons de héler un taxi. Comme c’est frustrant ! Hier, il suffisait de lever la main pour qu’une petite voiture noire et jaune s’arrête comme par magie.

Aujourd’hui, ce n’est pas la même chanson : on dirait que tout le monde s’est donne le mot pour qu’il y ait une personne dans chaque Taxi qui roule à Buenos-Aires ! En fait, on finit par s'apercevoir qu'il faut se placer aux endroits spécifiquement prévus pour qu'un taxi puisse s'arrêter en sécurité.

Bref, nous finissons par arriver à bon port. Il fait magnifique, le soleil brille et nous commençons à nous rendre compte que c'est vraiment l’été malgré le petit vent un peu frais.

La recoleta et son gommier.

Pendant le trajet, la sensation d'une ville immense et tentaculaire s'est confirmée. La plupart des rues sont bordées d'immeubles d'une dizaine d’étages mais on distingue aussi des immeubles bien plus hauts.

Le cimetière est très particulier. Il Dégage une impression de richesse incroyable et en même temps d'abandon. Je me dis que sans doute deux ou au mieux trois générations vont se préoccuper de la tombe du défunt. Mais au-delà ? Qui va payer pour entretenir la tombe de quelqu’un d'inconnu à ses yeux ? La preuve est devant nous. Des tombes d'une richesse et d'une ampleur sans nom ont été construites et puis sont tombées dans l'oubli. La particularité est que dans beaucoup de tombes, les cercueils sont visibles à travers la porte vitrée. Et dans celle-ci, la porte s’est brisée et les cercueils tombent en poussière. C’est assez macabre... 'Tu es poussière et tu retourneras en poussière' Voilà parole d’évangile qui se matérialise sous nos yeux.

Le cimetière de la Recoleta 
La tombe d'Eva Peron. 
Une tombe qui atteint le sommet du macabre. On voit les cercueils qui tombent en poussière à travers la porte cassée.

La promenade se poursuit, l’église adjacente est richement décorée et contient un reliquaire particulièrement impressionnant.

Eglise Senora d'El  Pilar  et son reliquaire.
Floralis generica 

Nous poursuivons avec l’objectif de visiter le jardin botanique. Il y a plusieurs kilomètres jusque là. Le soleil tape mais le vent nous rafraîchit. Au passage nous visitons le jardin japonais symbole de la paix entre le Japon et l’Argentine et qui fête ses 50 ans cette année. Anne et moi nous apprécions sa tranquillité mais Gene ne semble pas conquise.

Le jardin japonais

Après avoir longé le jardin zoologique qui est fermé pour travaux, nous arrivons au jardin botanique, objectif de notre longue marche.

Lunes cerrado. Fermé le lundi. 😬

Tant pis, de toute façon, il est l’heure de manger. Nous entrons dans un restaurant qui semble fréquenté par des Argentins. Chouette, nous allons goûter la nourriture typiquement argentine.

C’est à ce moment là que tout à commencé…

Pendant que nous mangeons, la télévision nous montre de violentes scènes d’affrontements entre des manifestants et la police. Que se passe-t-il ? Où ces scènes se déroulent elles ? Les manifestants sont des blancs et la police porte sur le dos la mention 'policia de la ciudad', de l’espagnol donc.

Est-ce que c’est en Argentine ?

Pour en avoir le cœur net nous demandons à la serveuse qui nous explique que la manifestation se déroule sur … la place de Mai, celle-là même où nous étions hier !!! 😮


Nous décidons de prendre un taxi pour rentrer à l'hôtel. Mais à notre grande surprise, le taximan refuse de nous y conduire. Tout est bloqué à cause de la manifestation, nous explique-t-il.

Pffff. Il nous conseille de visiter l’un ou l’autre musée avant tenter de rentrer à l’hôtel et nous dépose devant le musée des arts décoratifs.

Lunes cerrado !!!

Nous maudissons ce stupide chauffeur 😬 et décidons de tenter le coup par le métro. Avec succès !

Quelle journée riche en rebondissements ! Ça mérite bien un petit apéro dans le jardin de l’hôtel avant d'aller au resto.

Nous choisissons le restaurant espagnol que Gustavo nous avait recommandé.

- Bonjour, nous sommes trois

- Oui, mettez-vous à cette table

- On ne peut pas se mettre plutôt dans l’autre coin, le décor est si joli (et les tables sont vides)

- Non

- ….

- Voici la carte, je vous recommande la paella pour vous 3

- Mais il n'y a pas de prix sur la carte !

- Voici la carte avec les prix (elle est en forme d’éventail). Prenez donc la paella pour 3 personnes !

- C’est combien les gambas grillés ?

- Ce sont les gambas à la plancha. Mais prenez plutôt la paella !

- Anne n’aime pas la paella !

- Ha ! (l'air déçu)

- Bon on va prendre les gambas à la plancha et la paella pour 2

Je ne parle pas du fou rire qui nous a pris à propos de cette paella !

Retour à l’hôtel. Et coup de fil de Boris qui nous apprend qu’il y a grève nationale et que nous devons aller le plus tôt possible demain à pour tenter d’avoir un vol pour Trelew.

Pffff 😣

J’espère qu’on ne va pas rester bloqués à Buenos-Aires ….

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Mardi 19 décembre

06h45 Le réveil sonne. Nous nous levons après une nuit plutôt agitée, agrémentée par une sirène qui a retenti dans la rue vers 3h du matin. Une douche et il n'y paraît plus.

Mais pourquoi mon front et mes oreilles sont-elles brûlantes ? Hmmm, c’est le soleil d’hier qui nous a traîtreusement brulés, masqué par le petit vent frais qui a soufflé une bonne partie de la journée...

07h15 Le petit déjeuner n’est qu’à moitié prêt mais tant pis, nous prenons de l’avance pour ne pas faire attendre le taxi qui doit nous amener à l’aéroport. Je suis un peu stressé, Dieu sait ce qui nous y attend. On parle de vols annulés, de report de vols de plusieurs jours. On a pas trop envie. Buenos-Aires c’est bien mais à petite dose.

07h45 Nous sommes prêts, valises bouclées et au taquet pour sauter dans le taxi que nous attendons à l’abri de la pluie qui s’est mise à tomber. Il arrive après quelques minutes d'attente et nous conduit à l’aéroport.

Au passage, notez le style particulier de conduite des Argentins : louvoyant entre toutes les bandes de leurs larges avenues, collant un peu celui qui les précède et filant à toute vitesse la plupart du temps à cheval sur deux bandes. Bon, ils respectent les feux, c’est déjà ça ! En même temps, je suis content qu'il se glisse dans la circulation plutôt dense, je suis presse d'arriver à l'aéroport pour savoir à quelle sauce on va être mangés...

08h20 Le taxi nous dépose devant la porte des départs et nous entrons dans l’aéroport. Quel spectacle ! Une marée humaine s'offre à nos yeux angoissés. Le guichet d'Aerolinas Argentinas est fermé et le planton qui le surveille nous dit qu’on devrait en savoir plus vers midi. Le découragement commence par me gagner, comment une telle situation peut-elle se résoudre ? Mais bon, pas le choix...

Il ne nous reste plus qu'à nous mettre dans la file pour accéder à ce guichet. Heuuu, sauf que la file est longue, vraiment longue ! Vous voyez la dimension d'un hall d’aéroport ? Hé bien, cette file en fait la quasi-totalité de la longueur. Nous la longeons jusqu’à ce que nous croyons en être le bout et nous demandons si nous sommes bien dans la file pour Aerolineas Argentinas. ‘Ha non ! Ici c’est la file pour trucmuche (une autre compagnie dont j’ai oublié le nom).' Le jeune homme nous conduit à un autre endroit perdu au milieu de la marée humaine et nous indique que c’est à cet endroit que nous devons attendre. Je suis assez épaté : par quel sixième sens sait-il que c’est là ?

En tout cas, le tuyau est bon. Et nous voilà en train d’attendre on ne sait pas quoi, ni où ni quand cela va nous mener. Plusieurs files parallèles coexistent, bien organisées. À plusieurs reprise, des gens nous demanderont quelle est cette file et dans quel sens elle va.

La marée humaine dans l'aéroport.

Nous y prenons nos marques, derrière nous un brésilien qui veut retourner au Brésil, accompagné de sa mère, devant nous un couple qui veut se rendre aux chutes d’Iguazu. Encore plus devant nous un couple avec leurs trois filles blondes dont nous apprendrons plus tard que ce sont des hollandais et qui vont à Ushuaia. Eux aussi se sont mis dans la file, sans savoir ce qu’il faut faire, ni si elle va les mener quelque part. Nous avançons mètre par mètre, sans savoir si c'est parce que les choses progressent ou bien parce que certains se découragent et partent vers d'autres horizons... Le couple devant nous, lui en tout cas, abandonne la partie, ils remettent leur expédition à une autre fois.

La longue attente ...

12h00 Je pars aux nouvelles qui sont bonnes : le guichet d’Aerolinas Argentinas a ouvert et le tableau des départs cesse d’annoncer obstinément que tous les vols sont annulés. Il annonce même un départ pour Trelew (notre destination du jour) à 16h10.

15h00 Tout à coup, comme sorti de nulle part, un homme se glisse subrepticement aux côtés de Gene. Un resquilleur ! Alain, où es-tu? Nous rions de bon cœur en repensant à l’épisode de Zaventem. Il faut savoir que les Argentins sont assez chatouilleux quand il s’agit de faire la file et qu'ils respectent scrupuleusement cette institution. Nous sommes moins regardants mais quand même, nous ne le laissons pas prendre le dessus sur nous, malgré ses tentatives. Jusqu’au moment où, sans doute un peu distrait, il se laisse surprendre et où nous arrivons à le refouler derrière nous. C’est alors avec une joie un peu lâche que nous le voyons pris à partie par notre ami le brésilien qui commence tout doucement à s’échauffer. Le vil profiteur se voit alors refoulé plusieurs places en arrière et même soumis à l’opprobre d'un policier appelé pour châtier l'indélicat personnage!

Il faut dire qu’entre temps, la file s'est considérablement allongée, se repliant sur elle-même et revenant en sens inverse jusqu’à notre hauteur. Quel désespoir doit gagner ceux qui sont tout au bout ?

Une angoisse existentielle me saisit : où va nous mener cette file ? Et si tout ce temps pendant lequel nous avons attendu n’avait servi à rien ? Comme le disent Gene et Anne, il s’agit d’une bonne leçon de lâcher prise. Nous ne sommes pas maîtres de ce qui nous arrive et nous devons nous confier aux événements, comme des naufragés sur un radeau ballotté par les vagues. Ce n’est pas facile pour moi. J’ai du mal à ne pas imaginer d’autres options grâce auxquelles je pourrais redevenir maître des évènements : prendre un bus, louer une voiture… Mais rien à faire, il faut d’abord passer par ce maudit guichet d’Aerolinas Argentinas.

15h30 C’est le miracle ! Un homme remonte la file, appelant des passagers potentiels pour Trelew. Nous le hélons bruyamment et il nous emmène directement au guichet d’enregistrement. La technologie fait le reste, nous présentons nos passeports et on nous presse pour que nous allions directement à la porte d’embarquement. Quelques minutes plus tard, nous voilà assis dans l’avion. Quel soulagement, nous allons pouvoir reprendre la suite du programme prévu avec un minimum de perturbations.

18h00 Nous arrivons à Trelew. Boris, prévenu entre-temps nous fait conduire à l’hôtel par Victor Hugo (ça ne s’invente pas !). Pendant le trajet, nous avons un avant-goût des paysages de Patagonie. Une étendue infinie de petits buissons et d’herbes sèches, légèrement vallonnée, sous un ciel infini lui aussi, ponctué de flocons nuageux Après une petite heure de route pendant laquelle Victor nous explique plein de choses dans son français hésitant, nous arrivons à Puerto Madryn. L’hôtel est propre et moderne et de plus, il donne une belle vue sur la plage.

La plage de Puerto Madryn avec le port en arrière plan.

21h00 Nous terminons la soirée par un délicieux repas dans un petit restaurant de poissons tenu par une famille de pêcheurs, accompagné d'un délicieux vin blanc argentin de cépage Torrontes.

Nous avons eu de la chance, nous aurions pu perdre plusieurs jours à cause de cette grève !

Encore une journée inoubliable…

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La plage de Puerto Madryn

Après une promenade matinale sur a plage, nous prenons le petit déjeuner. Comme à l’hôtel de Buenos-Aires, il est composé en plus de jambon cuit et de fromage, de deux sortes de croissants, des très sucrés et des moins sucrés, de tranches de pain à toaster soi-même, de différentes confiture et de gâteau, ici un délicieux cake aux noix. Comme à Buenos-Aires, le café vient à manquer et la maîtresse de maison va nous en refaire.

Nous finissons de boucler nos valises et attendons Victor qui doit nous véhiculer aujourd’hui. À cause du temps perdu hier, nous devons faire en ce même jour la visite de Punta Nynfas et nous rendre à Bahia Bustamante. Ce qui représente une durée considérable, vu que Punta Nynfas n’est accessible que par 80 km de pistes non goudronnées. Victor nous propose d'aller voir les éléphants de mer à un autre endroit, de façon à réduire la distance. Nous acceptons de bon cœur, en effet nous pensons aussi à lui qui devra refaire le chemin en sens inverse pour rentrer chez lui après nous avoir déposés à Bahia Bustamante.

Après une petite mise au clair avec la tenancière de l’hôtel qui croyait que nous restions deux jours (sans doute n'avait-elle pas été complètement informée des modifications de programme que nous avions négociés avec Boris plusieurs mois avant notre départ), nous prenons la route, direction Isola Escondida. Les derniers kilomètres s’effectuent sur une piste plutôt en bon état, qui ressemblent à celles que nous avions parcourues en Lettonie, la végétation en moins. Pendant le trajet, Victor nous désigne plusieurs animaux le long de la route : Martinetta, Toro, Guanacos, Nandous.

Martinetta et flamants roses.
Toro et un des buissons qui forment la steppe. 

Le paysage est à couper le souffle, s’étendant à perte de vue, toujours pareil et pourtant différent avec le ciel changeant. Si vous avez déjà pris un bateau et regardé la mer qui s’étire à l'infini, sans vous lasser de la regarder, vous pouvez imaginer la sensation que j’éprouve tout au long du trajet. C’est pour ça que je suis venu ici, c’est pour éprouver cette sensation d'immensité de la nature sauvage.

La steppe patagone entre Puerto Madryn et Bahia Bustamante. 

Nous arrivons sur la côte en face de Isola Escondida. Cette île n’apparaît qu’à marée basse et est propice à la présence d’animaux marins, dont les éléphants de mer.

La côte devant Isola Escondida. 

Nous admirons ces paisibles bestioles qui se chauffent au soleil, mais aussi la beauté de l’endroit et nous faisons connaissance avec le vent de Patagonie qui souffle avec obstination. Ces animaux sont capables de plonger à de grandes profondeurs pour y chasser leur nourriture et leur morphologie est adaptée pour résister à la pression. Je suis toujours émerveillé devant la richesse et l'inventivité de la nature pour arriver à ce que finalement de tels animaux, si bien adaptés à leur milieu naturel puissent exister.

Jeune éléphant de mer mâle. La mue n'est pas complètement terminée.
Une bonne bouille. 

L'endroit est merveilleux. La mer, le vent, les rochers colorés sollicitent nos sens. Je pourrais moi aussi me coucher sur la plage et y rester vautré comme ces éléphants de mer. Néanmoins, nous finissons par remonter en voiture pour reprendre la piste vers Bahia Bustamante où nous arrivons dans le milieu de l’après-midi.

Duel. 
Vaste ciel et nuages au-dessus de la steppe de Patagonie. 
Famille de Nandous.
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Le cadre.

Perdues à l’écart du monde, sur la rive d'une baie aux couleurs changeantes, les baraques blanches et bleues nous accueillent. Autrefois habité par une communauté de cinq à six cent personnes qui vivaient de la récolte des algues nécessaires à la fabrication de l’agar-agar ou de produits cosmétiques, le lieu est maintenant géré par Matias, le petit fils du fondateur.

Camilla qui nous accueille de son charmant sourire nous explique que ce qui servait auparavant de marché couvert pour le village est actuellement utilisé comme restaurant, petit musée et salon avec bar, bien sympathique. On peut aussi voir en se promenant dans le village l'ancien commissariat, l’église, l’école et bien sûr les maisonnettes qui abritaient le personnel.

Les gîtes. 


Le restaurant.

L’exploitation à 3 sources de revenus : l’activité d’origine qui est le ramassage et la vente des algues marines. On voit passer dans la journée un vieux tracteur avec deux remorques dans lesquelles ont pris place les ramasseurs. Ces algues sont ensuite séchées et rassemblées en balles.

La deuxième source de revenu est la laine des quelques 11 000 moutons qui parcourent les 40 000 hectares du domaine (soit un carré de 20 km de coté). Au mois de septembre, ces moutons sont rassemblés par des gauchos à cheval pendant une semaine, puis cela prend 3 semaines pour les tondre.

Enfin, la troisième activité est le tourisme. Les baraquements en front de mer ont été aménagés en 6 petits gîtes qui peuvent accueillir chacun 4 personnes. C’est là que nous logeons.

Un compagnon inattendu! 

Etant éloignée de toute civilisation, l'estancia est aussi dépourvue d'un certain nombre de ses facilités modernes. Pendant que Camilla nous montre notre chambre, elle nous explique que l’électricité fournie par le générateur n'est disponible que de 19h00 à minuit et que le reste du temps, il y a uniquement un minimum d’éclairage disponible grâce à des batteries. De même le Wi-Fi n'est disponible que dans la même tranche horaire et avec une accessibilité réduite. Un peu frustré au début, je dois bien me rendre à l’évidence, il est aléatoire de vouloir communiquer avec l’extérieur. Adieu donc pendant les 3 jours de notre séjour ici à Facebook, WhatsApp, au transfert de photos et autres journaux de voyage.

Le village et vue depuis la peninsula Gravina.

Le gîte que nous occupons est confortable, avec 2 chambres, une kitchenette et un petit salon que nous n’aurons pas le temps d’utiliser. Nous sommes pris en charge selon un programme minuté et visiblement bien rôdé. Les excursions alternent avec les repas, tout est indiqué sur le tableau placé à côté de la porte du restaurant.

Les excursions.

Nous aurons l'occasion lors de notre séjour de faire 5 excursions et une promenade à cheval.

1. La peninsula Gravina.

Dès nos bagages posés, il est l’heure du départ pour la première expédition. Nous embarquons dans un Land rover au kilométrage respectable de plus de 300 000 km. Il y en a 3 comme ça, tous d'un âge similaire. Ils nous véhiculeront pendant tous nos déplacements de notre séjour. Après quelques kilomètres dans un chemin praticable uniquement grâce à ce type de véhicule, le guide nous amène dans un endroit dont le sol sablonneux est couvert de coquillages blanchis par le soleil, alors même nous explique-t-il que cet endroit n’est jamais recouvert par la marée. Il s’agit des coquillages laissés par les Gallois qui ont habité l'endroit peu après leur immigration dans le pays. Ils habitaient le lieu et se nourrissaient des coquillages récoltés dans la baie.

Les land rovers qui nous emmèneront en excursion.

Nous sommes ensuite débarqués non loin de la plage et invités à parcourir quelques kilomètres à pied pour ensuite rejoindre le guide à l’extrémité de la péninsule. Je suis émerveillé devant le paysage qui s’offre à nos yeux, le bleu changeant de la mer les nuances de rouge et d’orange des rochers, le bleu du ciel, le blanc des nuages. Et le vent qui nous pousse dans le dos et que nous découvrons aujourd’hui. On croirait à une tempête mais non, c’est toujours comme ça !

Huitriers (Oyster catchers) 

La promenade se termine par une pause sur la plage des toboggans. Je trempe mes pieds dans l’eau, elle n’est vraiment pas très chaude, je crois que j’ai pris mon maillot de bain pour rien ! Le guide nous propose diverses boissons. Gene et moi nous enhardissons à goûter le maté, la boisson nationale de la Patagonie. Il s'agit d'une herbe séchée et réduite en poudre qui est versée jusqu’à le remplir dans une sorte de gobelet en bois, entouré d'une peau de potiron et munie d'un bord métallique. Ensuite, un peu d'eau chaude est ajoutée et le premier buveur l’aspire à travers une sorte de pipe qui filtre le liquide et retient l'herbe. Lorsque tout le liquide a été aspiré, on ajoute un peu d’eau et on passe au buveur suivant et ainsi de suite. Ça a le goût d'un thé très fort et très amer. On peut l’agrémenter d’un peu de sucre, pour les débutants, comme ils disent. N’étant pas fan de thé, je laisse cela à qui veut, mais il fallait bien que je fasse cette expérience, n’est-ce pas ?

Notre premier vrai contact avec la Patagonie…

Promenade sur la plage et la plage du toboggan avec ses rochers colorés. 

Jeudi21 décembre

2. L’île aux pingouins.

Ce matin, nous sommes invités à aller visiter l’île aux pingouins. Je suis impatient d'aller voir de près ces petits animaux, en réalité des manchots de Magellan. Nous embarquons donc dans deux Defenders, l'une conduite par le même guide qu'hier, l'autre conduite par Mariana. Pauvre Mariana dont le véhicule se met rapidement à hoqueter de plus en plus fort à son grand désespoir. Ses gestes d’impuissance montrent que ce qui se passe est indépendant de sa volonté. Après environ 2 km, la jeep s’arrête définitivement. Nous voilà perdus au milieu de la steppe patagone !!!

En panne au milieu de la steppe patagone!

Après quelques discussions, nous décidons de rebrousser chemin vers le village où nous emprunterons un autre véhicule pour reprendre l’expédition. Je suis assez heureux de pouvoir marcher librement au milieu de ce paysage sauvage et désertique. Il fait beau, pas trop chaud, c’est fantastique !

Finalement, la voiture a redémarré et notre promenade ne dure que quelques minutes. Nous rembarquons dans l'autre voiture et nous voilà repartis. Le terrain est vallonné et chaque passage de crête révèle un autre paysage. Nous nous arrêtons pour l’admirer. Je reste en émoi devant cet étalage de couleurs, cette palette de différents verts, le turquoise de la mer, le vert foncé des buissons, le vert tendre de la salicorne… Le vert à toujours été ma couleur préférée ! L’émotion me fige sur place, je ne me lasse pas de regarder ce paysage.

Le paysage qui ma fait rêver. 

Me voilà rappelé à l’ordre et nous repartons vers l’île des pingouins qui n’est accessible qu’à marée basse.

La traversée à marée basse. 

Qu'ils ont mignons ces petits animaux, semblant si maladroits et patauds quand ils doivent se déplacer sur le soleil caillouteux, si attentifs à notre présence quand nous passons à proximité de leur nid caché sous les broussailles, si attentionnés pour les petites boules de plumes qu'ils couvent en dessous d'eux… On a presque honte de les effrayer par notre présence. Il nous est bien recommandé de ne pas les toucher et aussi de nous écarter du chemin par lequel ils transitent pour aller de leur nid à la mer. En effet, ils font constamment des aller retour pour rapporter de la nourriture à leur progéniture. Comme c’est drôle de les voir se dandiner depuis la mer jusqu’à leur nid sous les broussailles.

C’est rempli du plaisir de voir ces petits animaux d’aussi près que nous repartons vers les véhicules.

3. Le cap Aristizabal

L’après midi est consacré à un safari dans la steppe qui nous conduit à la recherche des maras ou lièvres de Patagonie. Après de longues minutes de vaine recherche, nous finissons par en apercevoir quelques-uns qui s’enfuient vivement à notre approche.

Le guide nous divertit en nous expliquant qu'un journaliste qui était venu faire un reportage sur ledit animal n'avait pu en photographier que deux sur les trois mois qu'avait duré sa mission. Il semble que nous avons de la chance car nous parvenons quand même à en prendre quelques photos.

Les maras. 

Le challenge suivant est de trouver un renard. Le renard de cette partie de la Patagonie est petit et gris et son pelage se confond avec la végétation. Nous en apercevrons quand même à deux reprises pendant notre safari.

Guanaco  et huitriers.

Je m’amuse beaucoup à cette chasse et à l’excitation qu’elle provoque chez chacun d’entre nous chaque fois que le moindre animal est aperçu s’enfuyant entre les broussailles.

Ensuite vient la cérémonie du break boisson qui ponctue chaque excursion et au cours de laquelle on nous propose café, thé ou bien entendu maté. Aujourd’hui, les guides nous conduisent au cap Aristizabal auquel nous pouvons admirer les formes bizarroïdes de la roche formées lorsque la lave en fusion s’est précipitée dans la mer à cet endroit. En particulier nous voyons les curieuses bulles arrondies.

Cela nous ramène à un temps bien reculé où l’homme n’était pas encore présent sur cette terre et où la nature construisait cet environnement magnifique qui souffre beaucoup depuis que l’être humain occupe cette planète.

Huitriers et autres mouettes. 

Enfin, nos guides nous déposent sur la plage avec pour mission de rejoindre les œuvres contemporaines d'un artiste français, sorte de diabolos qui s’orientent avec le vent.

Mais le plus intéressant, c’est ce squelette de baleine quasi intact qui trône par terre. Cela me semble être une œuvre d’art bien plus impressionnante, cet ensemble d'os compliqués qui s’emboîtent précisément de manière à former la structure de cet animal fantastique. Malheureusement, nous n’aurons sans doute pas l’occasion d'en voir de vivante pendant ce voyage, la saison de leur présence sur ces côtes étant passée de quelques semaines. Tant pis, ce sera pour une autre fois…

Le squelette de baleine. 
Les couleurs du paradis.
Petit renard gris de Patagonie

Vendredi 22 décembre

4. La forêt pétrifiée

Après le petit déjeuner pour lequel nous avons dû nous lever tôt, nous embarquons dans les Defenders. Le but de l’excursion de ce matin est la forêt pétrifiée. En chemin, nous apercevons plusieurs groupes de guanacos. Mara nous explique que chaque groupe comprend un mâle alpha, le mâle dominant, qui reste à l’écart pour surveiller les abords.

Guanacos 


Et encore des guanacos.
La piste qui mène à la foret pétrifiéee.
Nos deux guides, Mara et Nico

Après un trajet mouvementé sur des pistes de plus en plus difficiles, nous arrivons aux abords du site. Nico, notre guide nous fait part de deux règles : ne pas emporter de souvenir et ne pas marcher sur les troncs pétrifiés. Ensuite, nous nous marchons vers le site, en luttant contre le vent très violent qui nous fait tituber sur le sol irrégulier. Le paysage est grandiose.

Nous marchons dans une vallée asséchée creusée il y a quelques millions d'années par la fonte des glaciers qui recouvraient le site à l’époque. C’est lorsque cette vallée à été creusée que les troncs pétrifiés lors d'un précédent bouleversement géologique ont été exhumés. Cela explique aussi le relief, inhabituel pour cette région.

Le sol est jonché de fragments de bois pétrifié. 
Un morceau de tronc dont le carbone a été remplacé par des éléments minéraux sous l'effet de la pression et des sédiments.

Nous sommes accompagnés par trois familles américaines, mais d'origine indienne qui sont assez bruyants et peu respectueux des règles susmentionnées, vu que les jeunes piétinent allègrement les troncs fossilisés, ce qui a le don de nous agacer. Ce manque de respect pour des choses aussi respectables et rares témoigne d'un esprit extrêmement peu ouvert à notre environnement si fragile.

A côté des fragments éparts, il reste des troncs quasi entiers qui émergent petit à petit du sol grâce à l'érosion. 

5. Les îles de l'archipel Vernaci

Après notre retour, un lunch et une bonne sieste, nous voilà repartis pour une nouvelle aventure. Cette fois, il s’agit d'une excursion en bateau pour aller explorer les îles de l'archipel Vernaci qui parsèment l’entrée de la Caleta Malaspina. Nous y verrons des pingouins, des lions de mer et des otaries. Il y a un vent violent et une fois embarqués, nous devons naviguer contre le vent, ce qui ne manque pas de nous envoyer d’abondants embruns glacés. Je m’amuse beaucoup à voir tout le monde se faire copieusement arroser, moi y compris.

Maman Nandou et ses petits. 
Pingouins et  jolie mouette.

Les lions de mer sont magnifiques dans leur attitude caractéristique. Nous avons également la chance d’observer un bébé qui est né il y a à peine quelques heures. Nous nous émerveillons de voir ces magnifiques animaux. Nous avons de la chance, je crois de pouvoir les observer d’aussi près. Combien de temps pourront-ils résister à la pollution croissante de leur milieu de vie et à l’expansion galopante de l’espèce humaine ? En même temps que mon émerveillement, je suis un peu inquiet pour eux …

Lion de mer mâle.
Un mâle solitaire et un autre avec son harem. 
Papa, maman et le nouveau né.
Les otaries jouettes et curieuses. Retour sur la terre ferme.

Samedi 23 décembre

Pour notre dernier jour passé ici, nous demandons pour faire une promenade à cheval. Nous serons accompagnés par une famille suisse arrivée la veille et avec qui nous avons partagé notre table pour le souper. Nous nous rendons donc au corral où nous retrouvons Matias et Mara en train de préparer les chevaux pour notre expédition. Les Suisses nous y rejoignent un peu plus tard, habillés comme si ils allaient participer à un concours de dressage. Je crois que Matias a failli en perdre son chapeau de gaucho en les voyant habillés de la sorte.

Le ranch et le départ.

L'angoisse me gagne, comme chaque fois que je dois monter un cheval que je ne connais pas. Une fois en route, je suis vite rassuré, Louveto est très calme et obéit parfaitement, pourvu que j’utilise bien mes rênes d’appui comme il est de règle pour la monte western. Nous parcourons la plage, le ciel est bleu et le vent s’est calmé. C’est un vrai rêve éveillé que nous vivons…

Sur la plage avec Matias.

Les repas

Les hôtes sont accueillis lors des repas dans l’ancien marché du village, transformé en restaurant et en living room. Les repas sont très recherchés et élaborés autant que faire se peut avec des produits de l'exploitation. En effet, il faut parcourir environ 40 km de piste pour rejoindre la route nationale et je ne sais pas combien en plus pour atteindre le magasin le plus proche.

Je ne sais pas comment ils font, mais le chef semble assez doué et imaginatif pour utiliser des produits tels que la betterave, le potiron, la viande de Guacano, les baies rouges qui poussent là, etc… Le tout accompagné des charmants sourires de Mariana et Camilla. Chaque repas qui comprend trois services constitue une surprise, toujours agréable, en tout cas en ce qui me concerne.

Quelques exemples de plats inattendus (je ne suis plus certain de toutes les combinaisons)

- Risotto de betterave rouge – ricotta parfumée à l’orange et au sésame

- Polenta gratinée – agneau de lait – croûte aux champignon

- Patate douce croustillante – ragoût de guanaco

- Fruits grillés au sirop de menthe

- Autres plats à base de potiron ou de butternut

- Et le sommet : tentacules de poulpes grillés au petits légumes

9

Retour à Puerto Madryn Nous sommes le 23 décembre et après notre promenade à cheval, nous quittons ce paradis sur terre à regret, en compagnie de Victor, non sans avoir salué Matias, Camilla et Mariana. Direction Puerto Madryn. Nous retrouvons l’hôtel Solar de la Costa et la gentille jeune femme de la réception qui nous aide non sans peine à trouver un restaurant ouvert pour le lendemain soir, 24 décembre. Un moment nous craignons de passer la veillée de Noël au pain sec et à l'eau, mais elle finit par nous trouver le restaurant d'un hôtel proche. Seul bémol, il faut s'y rendre sur le champ et payer le repas d'avance. Un peu surpris, nous nous exécutons avant de nous rendre dans le centre de Puerto Madryn afin d'y chercher un souper économique. Nous nous régalons d'empanadas brûlantes et Gene d'un sandwich-frites ! Au retour, ma gourmandise me pousse à proposer une glace comme dessert. Nous nous attendons à un cornet avec deux boules, comme chez nous. C’est le cas, mais les boules d'ici sont deux fois plus grosses que ce à quoi nous sommes habitués et nous nous retrouvons avec des cornets délicieux mais ééénooormes !

Paysage de la péninsule Valdès et notre guide Victor Hugo

Le lendemain, Victor vient nous chercher pour visiter la péninsule Valdès. Nous passons donc une grande partie de la journée en voiture, nous déplaçant d'un site à l'autre. Nous visitons d'abord le site d'un lac salé. Sa particularité est que le sel en est rose, à cause des petits crustacés qui s'y trouvent, les mêmes que ceux qui donnent leur couleur aux flamants.

La salina chica.

Plus tard, nous observons des lions de mer, là des éléphants de mer et plus loin des pingouins. Malheureusement, les orques ne sont pas au rendez-vous. Nous pensons que cette visite est relativement peu intéressante par rapport à ce que nous avons vu à Isla Escondida et à Bahia Bustamante. En effet, ici on ne peut pas s'approcher suffisamment des animaux pour les voir de près. C’est évidemment nécessaire, vu l'afflux important de touristes.

Lions de mer à Punta Piramides. 
Il y a du monde sur la plage à Punta Norte ! 
Jeune lion de mer jouant dans les vagues.

Soit nous aurions dû la faire avant d'aller à Bahia Bustamante, soit elle était superflue. La bonne surprise du jour est le tatou qui fait son apparition sur le parking de Punta Norde, juste avant notre départ.

Le tatou surprise.

Victor est manifestement pressé de retrouver sa petite famille pour la veillée de Noël et nous voilà près nous aussi à aller veiller. Après nous être habillés pour la circonstance, nous nous dirigeons vers l’hôtel dans lequel nous avons réservé notre repas de Noël. Nous sommes accueillis par une très gentille serveuse souriante et dévouée. C’est d’ailleurs une caractéristique commune que nous avons rencontrée jusqu’ici. Le repas est assez quelconque mais nous nous amusons bien à regarder les hôtes des tables voisines.

Veillée de Noël. 

À minuit, quelle n'est pas notre surprise de voir apparaître le père Noël sur scène. Il y a extinction des lumières, accolades et autres embrassades. Bizarre pour nous, on verrait plutôt ça au nouvel-an ! L’ensemble ressemble à une grande fête de famille, mais le caractère religieux semble largement absent. Épuisés par ces émotions, nous allons nous coucher peu après minuit, une longue journée nous attend demain …

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Lundi 25 décembre

Ce cher Victor vient nous chercher pour nous emmener à l’aéroport de Trelew, destination Ushuaia. Enfin, nous allons découvrir El fin d’el Mundo, comme ils disent ici, ce qui signifie le bout du monde et pas la fin du monde ! Comme chaque jour, Victor a dû laver sa voiture qui se couvre de poussière chaque fois qu’il nous emmène sur les pistes que nous empruntons le plus souvent. Apres une attente raisonnable à l’aéroport, le vol se déroule sans problèmes. J'aperçois par le hublot isola Escondida où nous avions vu les premiers éléphants de mer, mais l'avion est déjà dans !es nuages avant que je puisse voir Bahia Bustamante.

Arrivée à Ushuaia.

C’est Hadrien qui nous accueille dans un excellent français à l’aéroport d'Ushuaia. Il tient absolument à nous prendre en photo devant le décor de montagnes enneigées qui nous accueille, ce qui agace déjà certains d'entre nous. Ensuite nous embarquons dans un minibus à destination de l’hôtel. En parcourant les rues d'Ushuaia, nous avons l'occasion de découvrir son style urbanistique assez particulier. Beaucoup de maisons sont construites avec une structure en bois ou en béton armé et ensuite fermées par des panneaux de tôle ondulée multicolores. Le résultat est quelquefois assez moche, mais certaines maisons sont t bien jolies avec une certaine recherche architecturale manifeste. Lorsque la structure est en bois, elle apparaît sur les arêtes et est alors sculptée, de même que le contour des fenêtres.Prise dans son ensemble, la ville apparaît comme s’étant étendue de manière anarchique, mais l’accumulation de ces petites maisonnettes donne un caractère très particulier auquel personnellement je trouve un certain charme.

Quelques maisons d'Ushuaia.

Une fois arrivés à l’hôtel, Hadrien nous informé sur le déroulement des jours suivants et nous apprenons avec un certain agacement que le trajet d'Ushuaia à Puerto Natales va durer plus longtemps qu'annoncé. Mais malgré notre insistance, Hadrien ne peut pas nous en dire davantage et nous lui en voulons un peu de sa méconnaissance de notre programme.

Comme nous sommes le jour de Noël et que la plupart des commerces et des restaurants sont fermés, il nous conseille de nous rendre à l’office de tourisme pour avoir davantage d’informations. Je crois que lui aussi est pressé d’aller retrouver sa famille, ce qui est bien compréhensible.

Nous prenons donc un taxi qui nous emmène au centre d'Ushuaia. Nous y sommes, dans la ville la plus australe du monde ! La ville s’étend le long du canal de Beagle, un des passages entre l’océan Atlantique et l’océan Pacifique. Plus au nord, il y a le détroit de Magellan et plus au sud, le passage de Drake, celui-ci est entre le cap Horn et le continent antarctique. En réalité, le soi-disant cap Horn est l’île située le plus au sud d'un groupe de petites îles.

L’Office du tourisme nous indique deux restaurants ouverts, mais finalement, nous trouvons un snack qui sert des sandwiches, version locale des hamburgers. Ensuite, nous parcourons la rue commerçante dans laquelle seuls quelques magasins sont ouverts. J'ai très envie de rapporter un souvenir du lieu à nos filles et donc nous procédons à cette emplette. Comme tous les musées sont malheureusement fermés, nous décidons de monter vers le glacier Martial qui surplombe la ville. C’est une expédition qui me faisait envie et donc je suis bien content que nous puissions la faire.

Le glacier Martial. 

Après quelques kilomètres en taxi, nous commençons à grimper la large piste qui mène au glacier. En fait c’est la première fois que nous faisons une vraie marche depuis que nous avons quitté Buenos-Aires. Le paysage s’élargit au fur et à mesure que nous nous élevons. Malgré la neige qui tombe, les nuages au dessus de la ville se dégagent et nous avons bientôt une vue superbe sur Ushuaia et le canal de Beagle.

Vue sur Ushuaia et le canal de Beagle depuis le glacier Martial.

Après environ une demi-heure, Anne décide de s’arrêter et de nous attendre. Gene et moi continuons sur le sentier qui se rétrécit au fur et à mesure que nous montons. Nous nous fixons comme objectif d’atteindre la première plaque de neige.

Le paysage est grandiose. Il provoque chez moi une émotion bien plus forte que celle que j’ai éprouvée à la vue des différents animaux que nous avons observés jusque maintenant. Ces montagnes se sont formées il y a des millions d’années, bien avant que toute la vie que nous connaissons actuellement sur cette planète ne soit apparue. Elles seront sans doute encore là bien après que notre espèce se sera éteinte.

Les derniers reliefs de la cordillère des Andes qui viennent se jeter dans la mer.

Au moment où nous amorçons la descente, Anne m’envoie un message : elle redescend se mettre au chaud. Gene et moi la rejoignons dans un salon de thé tout à fait cosy. Il y fait bien chaud et cette fois les décorations de Noël sont assorties à la neige qui tombe à l’extérieur. On ne se rend pas bien compte ici que c’est l’été !

Le taxi qui nous ramène à l’hôtel essaie de nous persuader de visiter le parc naturel de la Terra del Fuego. Nous n’osons pas lui dire que notre emploi du temps est déjà complet pour la courte durée de notre séjour à Ushuaia. Nous décidons de prendre le souper à l’hôtel. Le plat principal est constitué d'un morceau de viande grillée à la façon argentine. Le restaurant de l’hôtel comporte d’ailleurs une pièce spéciale réservée à la grillade. Mais nous recevons des morceaux si gros qu'aucun de nous ne parvient à terminer ce repas gargantuesque, d’autant qu'il est précédé d'une entrée à base de viande également et suivi d'un dessert.

Le patron est un grand voyageur et nous passons une partie de la soirée à papoter avec lui mi-espagnol, mi-français. Il est également un grand collectionneur de billets de toutes origines et de pochettes d'allumettes mais aussi de toutes sortes de bouteilles d’alcool, tout cela exposé dans son restaurant. La soirée se passe d'autant plus longtemps que le soleil ne se couchera que vers 22h – 22h30 et avec le pousse café que nous recevons nous n'irons finalement au lit que vers 1h du matin. Nous avons passé une très bonne soirée, c’est toujours très gai de lier connaissance avec les personnes du cru, surtout quand elles sont larges d’esprit et aussi accueillantes que ce monsieur.

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Mardi 26 décembre

La navette vient nous chercher à l’hôtel, direction le port. Nous allons naviguer sur le canal de Beagle et visiter l'estancia Harberton, la plus ancienne de la terre de feu. Nous avons des vouchers que nous devons échanger contre des billets et ensuite nous acquitter de la taxe portuaire. Le processus à suivre n’est pas très clair. Nous avons reçu également un voucher pour un lunch box mais personne ne semble au courant que cela existe, jusqu’à ce que nous soyons à bord du bateau où une dame qui a l’air plus au courant que les autres nous affirme que nous recevrons notre lunch sur le bateau. C’est le genre de situation toujours un peu stressante bien que bénigne et qui fait le charme de l’aventure. Sur le moment, on est inquiet mais on s'y fait rapidement.

À peine installés, on nous explique que le bateau est trop petit et que nous devons débarquer et rembarquer sur un autre. Enfin, nous appareillons ! La navigation est entrecoupée d’arrêts dans le but de voir des lions de mer qui se disputent leur bout de rocher, des albatros, le phare des éclaireurs perché sur son petit îlot rocheux en plein milieu du canal. Nous recevons des explications sur l'origine de ce canal naturel qui relie l'océan Pacifique et l'océan Atlantique et qui est l'ancien lit d'un glacier.


Le phare des éclaireurs.
Puerto Williams. De l'autre côté du canal de Beagle, c'est le Chili.
L'île des cormorans. 

L'endroit est mythique pour moi. Bien sûr je ne le parcours pas à la barre d’un bateau à voile, ce temps là est sans doute révolu, mais il n’empêche que je suis heureux d’être là, sur un bateau, à contempler le bout du monde qui m'offre ses fabuleux paysages.

Lions de mer.

Nous arrivons ensuite sur une grande île remplie de manchots de Magellan dont certains semblent très intrigués par notre embarcation qui est venue s’échouer sur la plage. Ils sont super drôles avec leur air de vouloir tâter la coque de leur bec. Nous nous rendons compte qu’il s’agit de jeunes qui n'ont pas encore mué vers leur robe adulte. Ce sont aussi eux qui jouent et sautent dans l'eau, pour notre plus grand amusement !

Jeunes manchots de Magellan, très curieux de découvrir notre embarcation. 

Finalement, nous débarquons à l'estancia Harberton. La visite qu'on nous propose est moyennement intéressante, la guide se perdant dans les détails avec son anglais hésitant. Néanmoins, nous apprécions la sérénité et la beauté de l’endroit. En effet, l’estancia est idéalement située le long d’une petite baie abritée. L’élevage des moutons y a été abandonné au profit de l'activité touristique et les quelques 20 000 hectares de la propriété sont loués pour l’élevage de bétail.

Estancia Harberton. 

Il y a également un petit musée accolé à un centre de recherche sur les animaux marins. On peut y voir les squelettes de toutes sortes de mammifères marins. Il faut avouer que ces squelettes dégagent une odeur qui ne nous a pas poussés à rester très longtemps sur place. Nous attendons donc patiemment le bus qui doit nous ramener à Ushuaia en admirant le paysage, des chevaux qui paissent non loin et une famille de jolies oies.

Enfin le bus arrive et nous fait traverser des paysages absolument superbes faits d'eau, de montagnes, de vallées verdoyantes avec des vues qui se révèlent à chaque virage que fait la piste. Bon, on est un peu inquiets quand même, ce bus fait toutes sortes de bruits et de grincements. J’espère que nous arriverons à destination…

Retour vers Ushuaia.

La journée se termine en parcourant la rue commerçante d'Ushuaia. Anne cherche une labradorite et Gene des souvenirs pour sa famille. Quant à moi, je m’offre une casquette afin de l'arborer à la marche nordique.

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Ce matin, nous nous levons très tôt. Nous partons pour Puerto Natales via Punta Arenas

Comme Hadrien nous l'avait expliqué, nous allons parcourir un long trajet en bus jusque Punta Arenas où nous devrons changer de gare de bus afin d'en prendre un autre pour Puerto Natales.

Le premier bus démarre avec seulement quelques minutes de retard et commence le long voyage. Au début, nous refaisons en sens inverse le trajet fait la veille. Les paysages se succèdent au fil des kilomètres qui défilent. Nous traversons Tohluin puis direction Rio Grande. La steppe succède à la montagne. Difficile de quitter des yeux toute cette beauté qui se révèle à nous.

Nous avions demandé à l'hôtel à Ushuaia de nous préparer un pique-nique. Comme le Chili refuse toute entrée d'aliments sur son territoire, nous devons l'avaler entièrement avant de passer la frontière. Et en effet, ils ne laissent rien au hasard. Nous passons d'abord la frontière Argentine puis à la frontière Chilienne, nous devons tout sortir du bus, les valises et les sacs sont scannés et le bus est fouillé de fond en comble. Un passager d'origine japonaise qui avait laissé son lunch-packet dans le bus avec une banane, se voit dépossédé de celle-ci. Un guide qui accompagne un groupe nous explique qu'il a eu de la chance, car il aurait pu écoper d'une amende.

La frontière Chilienne 

Dans ce genre de situation, je me demande toujours si l'arbitraire n'a pas son rôle à jouer dans le sérieux du respect du règlement. Le temps de la dictature n'est pas si loin au Chili. Nous ne manquerons d'ailleurs pas de remarquer lorsque nous sortirons du pays la bouteille glissée sous la table du planton par le chauffeur de notre bus...

Après ces péripéties, le bus reprend son bonhomme de chemin. Nous arrivons au détroit de Magellan que nous devons traverser puis longer sur sa rive nord pour arriver jusqu'à Punta Arenas. Le détroit de Magellan, lieu mythique également pour tous les amateurs de navigation ! Il s'étire lui aussi à l'infini entre les deux océans.

Pourtant, nous le franchissons à l'endroit où il est le plus étroit.

Le ferry sur lequel nous allons traverser le détroit de Magellan.

Nous arrivons à Punta Arenas vers 19h30, ce qui nous laisse largement le temps de rejoindre l'autre terminal de bus qui d'après Hadrien devrait se trouver à environ 400m. Sauf que l'ami Hadrien s'est trompé sur l'endroit où le premier bus nous a débarqué ! Nous trainons donc nos valises à roulette sur une distance bien plus considérable, tout en pestant sur la qualité des trottoirs de Punta Arenas.

Tout est en ordre et après avoir ingurgité un vague sandwich, nous embarquons dans un autre bus à destination de Puerto Natales où nous arrivons vers 0h45. 16h de bus. Nous sommes contents d'être accueillis par Carlos qui nous conduit à l'hôtel dont nous n'aurons guère le temps de profiter.

13

Jeudi 28 décembre

Ce matin, nous revoyons Carlos, notre chauffeur. Il est accompagné de Michael, notre guide pour aujourd'hui et demain. Michael est d'origine bretonne et est venu s'installer au Chili il y a 19 ans. Il est guide de montagne, cuisinier et a un avis sur toute chose. Il se révèle un guide agréable et érudit et nous apprendra de nombreuses choses sur la région pendant ces deux jours.

Notamment qu'il y a 18000 ans, lors de la dernière glaciation, toute la région était recouverte de glaciers allant jusqu'à 2000 mètres d'épaisseur, recouvrant donc toutes les hautes montagnes que nous voyons qui culminent aux environs de 1800m. Et aussi que toutes ces vallées que nous voyons sont des vallées glaciaires creusées par le lent glissement de ces énormes glaciers. Notre première visite est pour la grotte du Mylodon dans laquelle un morceau de peau de l'animal éteint depuis plus de 10000 ans, ainsi que les restes d'humains et de tigres à dent de sabre ont été retrouvés.

Michael nous explique comment cette grotte s'est formée, suite à l'érosion de la couche tendre inférieure par les lacs provenant de la fonte des glaciers dont question plus haut.

La  grotte  du  Mylodon. 

Il est dommage que les premiers découvreurs de cette grotte n'utilisaient pas encore les méthodes actuelles de la recherche archéologique et qu'ils aient mélangé les différentes strates du site, ce qui a fait perdre pas mal d'information à son sujet.

Reconstitution du Mylodon. 

L'étape suivante nous révèle une vue superbe sur la plus ancienne estancia de la région. Ces estancias s'installaient toujours au bord de l'eau car à l'époque, il n'y avait pas de routes ou de piste et seul l'accès par la mer était possible. L'endroit est magnifique et dégage une grande sensation de sérénité. Il devait faire bon vivre à cet endroit, en communion complète avec la nature sauvage.

La  plus  ancienne  estancia de la région. 

Nous nous dirigeons ensuite vers le lac Grey, formé par la fonte du glacier du même nom en passant par des paysages sublimes de beauté, de sauvagerie et de sérénité. Ne nous y trompons pas, si ces lieux sont si beaux, ils n'en sont pas moins hostiles. Par exemple, ces lacs d'une couleur bleu turquoise laiteuse, tous issus des glaciers de la région, sont glacés. Y tomber représente une mort par hypothermie en quelques minutes.

Lago Pehoe.

Arrivés aux abords du lac Grey, une promenade décoiffante, au propre comme au figuré, nous attend. Après avoir passé un pont suspendu assez mouvant sur lequel seules 6 personnes maximum peuvent s'engager en même temps, il s'agit de traverser une sorte de plage qui sépare le lac Grey de la rivière Grey. Mais l'endroit est particulièrement venteux et nous devons nous protéger de ce vent de tempête qui souffle quasi en permanence à cet endroit.

Le pont de la rivière Grey.
La plage à traverser. 

Ensuite, nous grimpons sur le promontoire pour atteindre le point de vue sur le glacier. Un magnifique iceberg se présente également à nos yeux éblouis. Michael nous explique que l'air pur de la région et le manque de repères visuels - il n'y a aucune maison, aucune voiture ni personne dans le paysage qui puisse nous donner de point de comparaison - sont très trompeurs et rendent les dimensions et les distances difficiles à évaluer.

Ainsi, cet iceberg qui nous semble relativement proche et donc petit se révèle d'une taille impressionnante quand un bateau de tourisme se présente à ses côtés.

L'iceberg du lac Grey.

Quand au front du glacier, il est difficile d'imaginer qu'il se trouve en réalité à 17 km de nous!

Après un délicieux dîner pris à l'hôtel Grey - oui tout est Grey ici - nous repartons vers une nouveau point d'intérêt, une jolie cascade. Au moment où nous sortons de la voiture pour parcourir les 200 m qui nous séparent de la cascade, la pluie se met à tomber. Combinée au vent de tempête qui souffle à cet endroit, elle nous détrempe proprement en moins de temps qu'il faut pour le dire. Cette cascade n'a rien de spectaculaire, mais elle nous aura quand même bien surpris.

La cascade où nous nous sommes faits tremper en une minute. 


L'expédition s'achève par une route qui me semble interminable jusqu'à l'hôtel du Lago d'El Toro, heureusement bien accueillant et un souper fait de poulet rôti au barbecue accompagné d'une bonne bouteille de cépage carmenere, typique du Chili.

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Vendredi 29 décembre

Faucon à tête plate.

Au programme de la journée, une promenade à cheval pour Anne et une randonnée pédestre pour Gene et moi. Michael nous avait promis d'arriver plus tôt pour qu’on puisse s’expliquer avec le gaucho qui doit emmener Anne pour la promenade. Mais l'heure tourne et pas de Michael.

Heureusement, il nous avait dit où se rendre et Anne et moi allons en exploration au ranch. La pluie se met à tomber, ce qui décourage Anne. Néanmoins, je la persuade de persévérer.

Le gaucho attendu se révèle être une charmante et dynamique gauchotte, nommée Sophia. Les chevaux sont déjà prêts et nous convenons que si Anne souhaite revenir plus tôt que prévu, elle lui fera signe qu'elle veut retourner au ranch. Les voilà donc qui partent toutes les deux vers le fond de la vallée. Sophia a l'air ravie de véhiculer pour une fois une touriste qui sait bien monter.

Départ d'Anne et Sophia. 
Promenade à cheval. 

Finalement, il est presque 10h00 quand Michael arrive, le véhicule qui l'emmenait à crevé et la roue de secours ne s’était pas encore remise de la crevaison précédente. Il avait donc dû trouver un autre véhicule, ce qui explique son retard.

Il nous explique que vu la météo qui s'annonce pour la journée, il ne serait ni prudent, ni agréable de réaliser la promenade qui était prévue. Il nous propose donc de nous diriger vers la vallée du Rio Pingo, qui démarre au restaurant du lac Grey où nous avons été la veille. Personnellement, je suis un peu déçu car la randonnée qui était prévue devait nous emmener assez haut dans la montagne mais bon, je suppose que Michael a raison d’être prudent, de la même manière qu'une sortie en bateau à voile doit parfois être remise à plus tard en cas de météo défavorable.

Nous arrivons au point de départ quand une pluie diluvienne se met à tomber. Si nous devons nous promener dans de telles conditions et réitérer l’expérience d'hier à la cascade, ce ne sera pas une partie de plaisir. Après quelques minutes, la pluie se calme néanmoins et nous nous mettons en route. Michael passe au bureau d'enregistrement car pour cette promenade, il faut être accompagné d'un guide de montagne, comme Michael. Celui-ci nous explique que c’est devenu obligatoire suite aux incendies de forêt qui ont ravagé de nombreux hectares du parc précédemment, détruisant des forêts millénaires.Finalement, ce n’est pas plus mal mais il est dommage de devoir en arriver là à cause de l’inconscience de quelques-uns. Peut-être cela est-il aussi la preuve que le tourisme de masse commence à menacer l’équilibre écologique de la région. C’est en tous cas l'avis de Michael qui estime que la masse de touristes est déjà devenue trop importante. En même temps, il en vit…

Plissements de la roche. Gene croyait que la montagne dansait ... 

Nous cheminons parmi la courte végétation typique de la steppe argentine : Calafate qui donnent des espèces de baies ressemblant à des myrtilles avec lesquelles ont fait de la confiture, de l'alcool et toutes sortes de choses. Il y a aussi le Canella dont la sève est un puissant poison que les indigènes aujourd’hui disparus utilisaient pour empoisonner leurs flèches. Mais le fruit de l'arbre peut par contre être utilisé en cuisine, bien que cela semble avoir été oublié par la plupart, d'après ce que nous en dit Michael.


Végétation du parc Torres del Paine. 
La cabane et notre guide Michael.

Nous rencontrons également deux sortes d'arbres qui ont tous deux de toutes petites feuilles. Ce sont des faux hêtres dont l'un a une écorce semblable à celle du bouleau et dont le bois est très utile pour faire des bateaux. Après avoir visité une vieille cabane de berger, la promenade nous amène à une jolie cascade située dans un endroit à l'abri du vent, raison pour laquelle de grands arbres y ont poussés. Michael nous explique que cette forêt primaire à commencé à s'implanter à cet endroit vraisemblablement dès la fin de la glaciation précédente, soit environ 10000 ans auparavant.

Un décor digne du seigneur des anneaux!
Pique nique dans la forêt.

Le retour s'effectue sous une alternance de moments pluvieux et d’autres ensoleillés, nous obligeant à nous couvrir et découvrir très souvent. Pour une fois, nous rentrons tôt à l’hôtel où nous retrouvons Anne qui est fort contente de sa promenade avec Sophia, bien que sur la fin elle se soit fait mal au dos en galopant. Cela nous permet de nous reposer et de souper tranquillement à l’hôtel. Celui-ci s’avère finalement bien sympathique, le personnel attentif et la vue magnifique. Tout se fait dans une seule et même pièce : réception, salle à manger, salon et même le grill sur lequel le patron a cuit notre poulet du souper de la veille. Une journée plutôt agréable et reposante. Seul regret, c’est que les tours montagneuses du site n'ont pas daigné se dévoiler entièrement à notre regard, constamment cachées en tout ou en partie par les nuages qui s'y accrochent. Nous ne les verrons que quelques minutes, le jour de notre départ et encore, pas en entier.

Les tours du parc naturel de Torres del Paine. 
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Samedi 30 décembre

Ce matin, nous partons en zodiac sur la rivière Serrano qui va nous emmener après un changement de bateau jusqu’à Puerto Natales. Michael nous a bien expliqué où nous devons nous rendre, c’est à quelques minutes de marche de l'hôtel. Nous trainons nos valises à travers la steppe, c'est plus court et plus confortable que de passer par la piste caillouteuse, les chevaux ayant tracé des sentiers bien damés sur lesquels nos valises roulent bien mieux que sur les trottoirs défoncés de Punta Arenas.

Je suis un peu excité par la perspective de descendre cette magnifique rivière couleur turquoise en zodiac. En même temps, je ne sais pas à quoi m'attendre: est-ce que ce sera calme ou au contraire agité ?

Comme de bien entendu, nous arrivons trop tôt au point de départ. Il pleuvine légèrement mais un passant qui a l'air averti nous confirme que nous sommes au bon endroit et que nous devons attendre là. De fait, quelques minutes plus tard, un pick-up arrive et une sorte d'ours mal léché nous dit d'attendre à l'intérieur de l'hôtel qui se trouve à proximité. On a aucun signe que cet homme a quelque chose à voir avec le bateau qui doit nous emmener mais apparemment il a notre réservation enregistrée sur son téléphone, ce qui me rassure quelque peu. Nos bagages ne vont bien sûr pas nous suivre sur le zodiac, ils doivent être conduits à notre hôtel par voie de terre. Enfin, on espère ...

Après une nouvelle attente, on nous appelle vers le quai d'embarquement (un vague ponton placé contre la rive herbeuse) et après nous avoir fait enfiler des manteaux polaires dans lesquels nous ressemblons à des pingouins géants, on nous fait monter à bord. L'ours mal léché en question s’avère être le pilote du zodiac, pompeusement baptisé Capitan. Lui-même s'est complètement couvert des pieds à la tête avec pantalon et veste imperméables, capuche, bandeau sur le visage et lunettes. On ne voit plus un seul centimètre carré de sa peau. À mon avis, on va être mouillés….

Equipement anti-mouille ... Ouais ... 

De fait, il lance le zodiac à plein régime (2 moteurs Yamaha de 100cv chacun, quand même !), s’amuse à nous donner des sensations fortes en faisant virer le canot bord sur bord. La tenue un peu ridicule que nous avons reçue s’avère indispensable, à cette vitesse, les gouttes d'eau sur le visage sont douloureuses ! Le vent de la course se mêle au vent de Patagonie pour essayer de nous arracher le capuchon de notre veste polaire et les fermetures velcro de la mienne ne résistent pas longtemps à leurs assauts. Mes mains sans gants sont gelées et raidies à tenter de tenir fermée cette veste. Mais les sensations sont vraiment fortes et le moment est inoubliable.

Après quelques minutes de ces sensations un peu artificielles, nous accostons car il y a une petite chute que le bateau ne peut pas franchir et il faut marcher 5 minutes pour rejoindre un autre bateau un peu plus costaud.

La petite cascade.

Le paysage est grandiose, avec les montagnes couvertes de neige, l'eau de la rivière couleur turquoise, les glaciers suspendus qu'on reconnaît à leurs nuances bleutées là où la glace se fracture et filtre la lumière du soleil …

Les Torres. Nous ne les verrons jamais mieux ... 

Après encore une demi-heure et quelques ennuis de moteur qui semblent énerver beaucoup notre 'Capitan', nous arrivons à notre première escale. Nous marchons quelques minutes le long d’un petit lac pour découvrir le glacier Serrano. C'est un émerveillement de voir ce phénomène de la nature. La coulée de glace vient se jeter dans le lac où il se fragmente en une multitude de petits icebergs.

Le glacier Serrano. 

Nous rembarquons cette fois sur un plus gros bateau. Tout semble bien organisé. Je suis un peu surpris car tout le monde semble bien au courant de notre présence, alors que nous ne sommes que 3 personnes parmi une bonne centaine, voire davantage, sur ce bateau à faire ce trajet. En effet, les autres occupants du zodiac retournent au point de départ. Bravo à Boris pour son organisation !

Un glacier suspendu. Les glaciers se jettent dans la mer en formant une multitude de jolies cascades.

Après encore une petite heure de navigation, nous arrivons à l’estancia Perales, située au bord de l'eau. Celle-ci s'est muée en restaurant pouvant accueillir plusieurs centaines de personnes. Nous sommes placés Manu militari à l'annonce du nombre de personnes qui veulent être ensemble. J'aime assez, pas besoin de chercher où se placer. Notre table est finalement complète avec 10 personnes.

Après une entrée, nous recevons des petites plancha avec une quantité de viande invraisemblable : agneau, bœuf, saucisses, poulet, pommes de terre et un petit plat de salade…, un verre de vin.

Nos voisins de table, un groupe de 4 personnes estime qu'il n'est pas possible de manger une telle quantité de viande sans avoir du vin en quantité proportionnée et commande donc une bouteille en plus, sauf qu'on lui apporte un magnum. En convive fraternel, il nous propose de remplir nos verres arguant qu'ils ne pourront pas finir la bouteille à eux seuls. Nous acceptons donc malgré que notre proposition de partager le coût de la bouteille soit refusée avec énergie.

Cela nous donne l'occasion de faire plus ample connaissance avec ce couple dont l'homme est originaire d'Ushuaia et la dame de Buenos-Aires auquel nous offrirons un café une fois revenus à bord. Le bateau repart, direction Puerto Natales où on nous attend pour nous conduire à l'hôtel Muelles. Il ne paie pas de mine de l'extérieur, ressemblant à un hangar en tôle ondulée. Cependant l’intérieur est moderne et confortable et la connexion wifi efficace.

Nos bagages ne sont pas encore arrivés mais nous sont promis dans l'heure. Nous décidons donc d'aller nous promener dans la ville, chose que nous n'avons pas encore eu le temps de faire lors de notre premier passage dans cette ville. Nous entrons dans un magasin de souvenir et hésitons à acheter un plat décoré de pingouins. Finalement, nous achetons un petit plat en cuivre représentant la faune locale.

Retour à l’hôtel où, soulagés, nous retrouvons nos bagages avant de repartir pour nous diriger vers une pizzeria repérée précédemment. Tout est complet, mais un jeune couple francophone nous explique que l'attente n'est pas longue, il suffit de s'inscrire sur la liste d'attente à côté de la porte. De fait, nous n'attendons que quelques minutes et nous retrouvons à côté de ce couple de jeunes suisses avec lequel nous pouvons comparer les qualités de nos chocolats respectifs. Une soirée bien amusante !

C'est d'ailleurs étonnant de rencontrer autant de francophones durant ce voyage.

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Dimanche 31 décembre

Après un petit déjeuner assez quelconque, notre chauffeur vient nous chercher de bonne heure pour nous conduire à la gare des bus. Direction El Calafate en Argentine. Gene n'est guère contente de l'hôtel: apparemment, ses voisins du dessus ont décidé de faire une marche autour de leur chambre pendant une partie de la nuit et le thermos duquel elle a pris son café n'avait visiblement pas été nettoyé depuis longtemps.

Nous embarquons dans le bus où nous sommes un peu à l'étroit pour les jambes, d'autant que les passagères devant Anne et moi ont décidé de pencher leur siège pour dormir. Je trouve que cela est extrêmement désagréable, surtout qu'il est rare que les gens préviennent avant d'effectuer la manœuvre. Nous essayons bien de les bloquer avec nos genoux, mais c'est peine perdue et Anne se fait même mal au genou.

Le paysage défile monotone. Nous quittons rapidement la montagne pour retourner dans la steppe aride de la Patagonie. Le passage des frontières chilienne et argentine se fait comme à l'aller, fouille des bagages en moins.

Un peu avant l'arrivée à El Calafate, nous passons du plateau à une vaste vallée glaciaire qui s'étend à perte de vue. La vue est vraiment époustouflante. Nous arrivons par l'aval et avant d'arriver à El Calafate, nous longeons le lac Argentino, alimenté par les grands glaciers de la calotte glaciaire qui recouvre la cordillère des Andes, à cheval sur l'Argentine et le Chili.

La vallée glaciaire. 


L'hôtel est moderne et les chambres sont vraiment très spacieuses, avec une vue panoramique sur le lac et une baignoire à jets. Plein d'espèces d'oiseaux vivent le long du lac et certains viennent jouer jusque sous nos fenêtres.

Pendant qu'Anne se repose, Gene et moi gagnons le centre à pied en longeant le lac pour admirer la vue. On y voit également plusieurs sortes d'oiseaux dont de nombreux flamants roses. Nous avons besoin de retirer de l'argent liquide pour payer les entrées du parc naturel des glaciers. Nous en profitons pour manger un morceau dans un restaurant style italien. J'arrive de justesse à acheter une pâtisserie pour Anne. Tous les magasins sont en train de fermer : nous sommes le 31 décembre et il est déjà 16h!

Heureusement, suite à l'expérience du souper de Noël, nous avions demandé à Boris quelques jours auparavant de nous réserver une table pour le souper du nouvel-an. La réservation a été faite à l'hôtel où nous logeons, comme ça pas de problèmes de transport.

Nous nous habillons donc pour la circonstance avec ce qui nous reste de vêtements propres ou presque et nous nous rendons dans la salle à manger. Deux tables sont garnies à profusion, l'une de divers amuse-bouche et de bruschetta variées, l'autre d'une multitude de desserts, tartes, cakes et petits gâteaux. Au vu de la quantité de nourriture disponible, sans compter le plat principal, nous nous attendons à voir au moins cinquante convives venir s'installer avec nous. Mais non, au total, nous serons 3 ou 4 tables, soit dizaine de personnes. Malgré tous nos efforts, c'est à peine si on voit la place dans les plats.

Nous accompagnons tout cela d'une bouteille de mousseux et d'une bouteille de vin rouge argentin, que je trouve délicieux, comme chaque fois, même si aujourd'hui ce n'est pas du cépage malbec. Mais je dois aussi parler de la musique plutôt étrange, répétitive et lancinante qui nous a beaucoup fait rire. À certains moments, on se serait cru dans un monastère tibétain...

Les autres convives filent comme des lapins bien tôt dans la soirée et nous mêmes nous retrouvons au lit minuit à peine sonné. Il est étrange de se dire qu'à ce moment, Sophie était déjà entrée dans la nouvelle année depuis une douzaine d'heures et Laureline depuis 4...

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Lundi 01 janvier 2018

Nous avons quartier libre jusque midi et nous en profitons pour trainer dans notre chambre. À midi, le chauffeur qui doit nous emmener au départ de la navigation sur le lac Argentino se présente. La réceptionniste de l'hôtel nous confie notre lunch packet, composé d'un sandwich comme ils savent les faire en Argentine (voir ci-dessous) et nous embarquons dans sa voiture. Je vois dans le rétroviseur ses yeux injectés. Est-il juste fatigué de sa St Sylvestre ou bien est-il encore sous l’influence de l'alcool ? Toujours est-il qu'il nous emmène à toute allure vers Puerto Bandera, lieu de départ des bateaux pour la visite des glaciers.

Après une file pour acheter les entrées au parc naturel et une autre pour embarquer, nous trouvons 3 bonnes places près d'une fenêtre. Le bateau fait 300 places et est presque rempli. Il y a à bord des photographes professionnels chargés de nous vendre des photos prises devant le glacier. Nous devons donc écouter leur boniment pour touristes pendant que le bateau largue les amarres. Par ailleurs, il y a sur l'avant du bateau une zone VIP dans laquelle se gobergent toute la journée une série de gens que je me mets à haïr aussitôt. Rien ne m'agace plus que cette distinction entre personnes.

Le lac Argentino et son eau de couleur turquoise due aux sédiments provenant des glaciers.

Après une heure de navigation, nous commençons à apercevoir des icebergs de plus en plus gros.

Un premier iceberg.

Nous voyons le premier glacier Upsala de très loin. En effet, il n'est pas possible de l'approcher car il y a trop d'icebergs qui forment barrage. Il est néanmoins très impressionnant car immense. En lieu et place, nous nous approchons d'un magnifique iceberg en forme d'arche auprès duquel nous restons une bonne demi-heure, afin que chacun puisse en prendre toutes les photos voulues.

Le glacier Upsala et le barrage d'icebergs.
Les rives du lac Argentino.
Un impressionnant  iceberg.

Nous repartons ensuite vers le deuxième glacier Spegazzini, très impressionnant celui-là. Nous pouvons l’approcher de très près avec le bateau. Il présente d'impressionnants pics mais aussi des fissures dans laquelle la lumière filtrée leur donne un aspect bleu très joli.

Le glacier Spegazzini. 
Les magnifiques couleurs de la glace. 

Nous revenons au port. Pendant le trajet, je regarde le paysage qui porte la marque de ces glaciers lorsqu’ils recouvraient tout le pays d'une épaisse couche de glace. Ce paysage nous raconte l'histoire de notre planète. Il est démesuré. Lorsqu’on voit la vallée par laquelle nous sommes arrivés qui fait sans doute plusieurs dizaines de kilomètres de large et qu'on s'imagine la taille des glaciers qui l'ont creusée, on se rend compte de la force de cette nature devant laquelle l'humanité serait impuissante s'il lui reprenait la fantaisie de refaire la même chose. En fait, d'après les explications que Michael nous avoir données, il est probable qu'une autre période glaciaire va se produire tôt ou tard, précipitée par le réchauffement climatique que nous accélérons par notre activité industrielle.

Paysage autour du lac Argentino.

Une fois revenu au port, nous attendons quelques minutes notre chauffeur. Il arrive un peu après les autres véhicules et nous partons après que tous les autres occupants du bateau aient embarqués qui dans un autobus, qui dans une voiture ou autre minibus. Ses yeux sont toujours aussi injectés que le matin ...

Nous partons les derniers, mais notre chauffeur ne semble pas vouloir se laisser battre si facilement et au fil de la route qui nous ramène à El Calafate, nous dépassons tous ces traînards. Il pousse le champignon jusqu’à atteindre la vitesse respectable de 150 km/h. Nous sommes un peu inquiets et nous prions pour qu'il ne nous envoie pas ad patres sur cette route à deux bandes.

Nous finissons entiers devant le restaurant que Boris recommande à El Calafate, La Cocina. Pas de place, mais Gene joue de son charme et de son espagnol pour nous obtenir une table une demi-heure plus tard, le temps de prendre l’apéro au bar d'en face.

J'en profite pour tester le Fernet Branca qui semble largement consommé dans le pays. Une réminiscence de ma jeunesse, me semble-t-il. Pur, c'est infect ! Mais dans le pays, on le boit mélangé avec du Coca-Cola. Si on met une proportion suffisante de ce dernier, ça devient buvable, mais c’est une expérience que je ne recommencerai pas de sitôt. De toute façon, je ne crois pas qu'on en trouve encore chez nous.

Pendant que nous mangeons, nous voyons débarquer toute une série de personnes qui étaient sur le même bateau que nous et qui ressortent bredouille ou bien qui doivent attendre qu'une place se libère. Nous rions sous cape en pensant à notre chauffeur fou qui nous a permis d'arriver les premiers ! Surtout quand nous reconnaissons des personnes qui étaient dans la partie VIP du bateau!

Après cette journée où la nature nous a gâté par sa beauté et étonné par sa puissance, nous retournons à l’hôtel en taxi pour nous glisser dans les bras de Morphée.

NB : Les sandwiches argentins : Nous avons reçu ou acheté à plusieurs reprises des sandwiches pour le repas de midi. Ils sont constitués d'une sorte de pain plat assez épais et à peine cuit, d'un fromage jaune sans aucun goût et de jambon cuit rose, ces deux derniers éléments ressemblant davantage à du plastique qu'à de la nourriture. En principe, ces sandwiches doivent être passé dans un grill avant d'être consommés, de manière à ce que le pain soit cuit et le fromage fondu, mais quand nous le recevions dans un lunch packet, cette opération n'était pas réalisée. On obtenait donc un truc pâteux et sans gout et difficile à digérer.

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Mardi 02 janvier

Ce matin, on vient nous chercher pour nous emmener dans l'Estancia d'Esteban, située à environ 50 km d'El Calafate. Le chauffeur est un peu surpris car il croyait que nous n'étions que 2 d'autant qu'il emmène également à l'Estancia la dame qui s'occupe du ménage. Nous nous serrons donc à 3 sur la banquette arrière après avoir eu beaucoup de difficulté à caser tous les bagages dans le coffre de la Duster.

Ce chauffeur-ci est beaucoup plus raisonnable que celui de la veille et nous avons le temps d'admirer le paysage le long de la route. D'autant qu'il a beaucoup neigé sur les hauteurs, ce qui fait ressortir encore davantage la beauté du paysage qui entoure le lac Argentino.

Le long du lac Argentino.

Le long d'une piste caillouteuse et au bord d'un bras du lac Argentino se dresse l'estancia Rio Mitre. Des bâtiments qui ne paient pas de mine, certains en cours de construction, nous accueillent au centre d'un paysage absolument indescriptible à 360°. Steppe, montagnes enneigées, lac bleu turquoise se relaient pour nous éblouir de leur incroyable beauté.

Nous sommes accueillis par les jeunes qui y travaillent comme gauchos, dont Quentin, jeune français de Corse qui y est volontaire pour quelques semaines de son voyage d'un an dont une grande partie au Chili. Il nous sera bien utile pour nous présenter l'Estancia et ses activités. Il y a aussi Martin, 17 ans. Lui il s'amuse à s'habiller en vrai gaucho. Il est étudiant à Buenos Aires mais vient passer ses vacances d'été à l'estancia pour y travailler.

Une petite partie de la vue depuis l'Estancia Rio Mitre.

Là aussi, Esteban, le propriétaire est obligé de multiplier les activités fin d'assurer la survie de son exploitation: élevage de vaches et de moutons, accueil des touristes, promenades à cheval. D'autant que son Estancia ne fait que 300 ha dont la plus grande partie est régulièrement submergée par les eaux d'un bras du lac Argentino. En effet, le glacier Perito Moreno que nous visiterons le lendemain forme une barrière entre ce bras et le reste du lac. Cette barrière se rompt à un intervalle qui peut durer plusieurs années, faisant descendre le niveau du lac et libérant ainsi les terres d'Esteban. Entre les ruptures, le lac est alimenté par le Rio Mitre ce qui fait lentement remonter le niveau parfois très haut. Son grand-père qui avait acheté l'Estancia l'a appris à ses dépends car la première maison qu'il avait construite a été inondée à la suite de ce phénomène, ce qui l'a obligé à la déplacer à son endroit actuel.

L'estancia Rio Mitre avec à droite le bâtiment où nous logions.

Nous sommes également accueillis par Lyca, une jeune renarde apprivoisée seule rescapée de sa famille. En effet, les renards attaquent et tuent, outre les poules, les jeunes agneaux, constituant une perte importante. Ils sont donc éliminés sans pitié, ainsi que les pumas.

La jeune Lyca. 

Par ailleurs, l'estancia comporte une vrai ménagerie: chevaux, vaches, moutons mais aussi des chèvres, des poules et des cochons dont un impressionnant verrat. Le tout complété par toutes sortes d'oiseaux dont certains magnifiques.

Le paddock avec à gauche la porcherie et le poulailler.

Comme c'est l'heure de dîner, Quentin nous explique que nous allons rejoindre un groupe parti à cheval pour manger de la viande grillée. Nous embarquons donc dans la voiture d'Esteban et une fois arrivés dans un magnifique bosquet de vieux saules totalement inattendu, nous rassemblons du bois sec pour le feu.

Chardon et Calafate. 

Esteban se met au travail et quelques minutes plus tard la viande grésille sur la plancha.

Esteban préparant le pique-nique.

Une fois grillée, Esteban prend une tranche de viande entre deux petits morceaux de pain et nous la présente. Un peu surpris, je prends cet espèce de sandwich et je mords dans la viande. Celle-ci est tendre, juteuse et goûteuse. En fait, le pain ne sert qu'à tenir le morceau de viande. Esteban m'en représente un autre morceau, j'accepte avec empressement, il y a de la viande à volonté... Je crois que je m'en suis enfilé 5, d'un peu près 100g chacun ... Si ma nutritionniste me voyait ...mais c'était trop bon! La saveur provient sans doute des herbes et des plantes dont ces bêtes se nourrissent.

Esteban nous explique que cet insolite bouquet de saules a été planté par le propriétaire d'un hôtel qui avait été construit à cet endroit et qui avait ensuite dû être détruit à cause des variations de niveau du lac.

Gene et Martin.

Après ce repas simple mais succulent, nous revenons à l'estancia où on nous propose une promenade à cheval. Comme Anne a toujours mal au dos de sa promenade à Torres del Paine, seuls Gene et moi montons sur les petits chevaux de l'estancia. La promenade se fait au pas et consiste à faire le tour de la propriété. Nous pouvons nous rendre compte qu'en effet le lac est déjà bien souvent monté à des niveaux bien plus élevés que celui qu'il a aujourd'hui. Quand cela arrive, Esteban doit mettre son bétail sur les terres de l'estancia voisine et emprunter une autre piste que celle par laquelle nous sommes arrivés, l'obligeant à un détour considérable. Nous nous faisons la réflexion que son grand-père s'est fait avoir en achetant cette propriété ...

Quelques chevaux de l'estancia Rio Mitre. 

A cet endroit, on a l'impression que l'ère glaciaire s'est terminée hier et que la nature y garde tous ses droits.

Mais l'heure du souper approche. Nous allons manger ... de la viande!

Comment  on cuit le mouton.

C'est un mouton tout entier qu'Esteban a mis à griller devant le feu. En effet, il attend plusieurs convives qui nous tiendront compagnie ce soir. La pauvre bête y passera en grande partie.

Quentin et Esteban

Nous finissons la soirée par une partie de rami déposé. Je ne suis plus trop sur des règles, mais ce n'est pas grave, personne ne s'en formalise, de toute façon, nous sommes trop fatigués pour compter les points.

Nous nous rendons donc dans la cabane qui nous est réservée à une centaine de mètres du bâtiment principal. Le confort y est rudimentaire, ça nous change bien de l'hôtel d'El Calafate. Bien sur pas de connexion internet. D'ailleurs il n'y a qu'une seule prise permettant de recharger nos précieux téléphones, elle est située derrière le bar de la salle à manger. La chasse est cassée, donc on utilise un seau et la douche délivre un fin filet d'eau, heureusement bien chauffée par un boiler au gaz. Pendant la nuit, nous entendons les chevaux qui viennent se promener autour de la maisonnette. Il est vrai qu'Esteban nous a recommandé de bien fermer la porte pour éviter que les chevaux ou les chèvres n'y entrent ...

Martin rassemblant les chevaux 
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Mercredi 03 janvier

Ce matin, changement par rapport au programme de Boris. Il était prévu que nous allions voir le glacier Perito Moreno demain matin, avant de prendre l'avion pour retourner sur Buenos Aires, mais Esteban nous explique que ce n'est pas possible, nous n'aurions pas le temps. Il ne faut pas non plus y aller l'après midi car la route étroite et sinueuse qui y conduit devient dangereuse à cause de tous les bus qui reviennent de la visite. Il est vrai que les argentins ne sont pas tellement enclins à tenir leur droite ...

Il faut donc partir sur le champ. Nous nous équipons donc et embarquons une nouvelle fois dans le pick-up Ford d'Esteban. Celui-ci s'avère un conducteur assez pressé et les panneaux limitant la vitesse à 20, 30 ou 40 km à l'heure ne le poussent pas à réduire sa vitesse. Quelques dépassements au son des crissements de pneus plus tard, nous arrivons à destination. Pour voir le glacier, il faut le mériter et parcourir quelques centaines de mètres sur de magnifiques passerelles qui suivent le relief du terrain de près. Nous gravissons ou descendons donc quelques centaines de marches avant de pouvoir découvrir sa majesté dans toute sa splendeur. 5 km de large, 40 à 70 m de hauteur suivant les endroits ... On ne se rend compte de sa taille qu'en voyant les bateaux qui naviguent sur le lac à son pied.

Les passerelles. 

Plusieurs balcons aménagés permettent de le découvrir sous différents angles. Esteban nous explique qu'il voit des infiltrations d'eau au pied du glacier et que la fameuse rupture qui va libérer ses terres des eaux du lac devrait se produire d'ici une semaine. Dommage, nous ne serons plus là, ça doit être un spectacle unique car en passant à travers la glace, une voute de glace se forme, qui finit par s'effondrer, libérant les eaux vers le lac Argentino. En quelques jours, les terres d'Esteban se retrouvent ainsi à nouveau disponibles pour son bétail.

Un côté du glacier Perito Moreno

Nous entendons le glacier craquer, on dirait des coups de fusil. De temps en temps, un grand plouf. Un morceau du glacier s'est détaché mais le temps que le son nous parvienne et que l'on se retourne, il n'y plus que quelques remous dans l'eau bleue.

Entre les deux collines noires, il y a 5 km. La hauteur à cet endroit est de 70 m.
Le glacier Perito Moreno est le dernier glacier qui progresse encore. 

Après l'avoir contemplé un certain temps, nous nous séparons : Anne décide de retourner à son aise à la voiture, Esteban déclare vouloir se rendre aux baños, Gene et moi continuons la promenade. Esteban nous fixe un endroit de rendez-vous mais nous ne comprenons pas. Une fois notre tour terminé, Gene et moi retournons vers la voiture. Nous retrouvons Anne à l'entrée d'un établissement où nous décidons de prendre un verre. Mais pas d'Esteban. Nous nous disons qu'il va surement se dire qu'on est près de la voiture et nous attendons patiemment. Une heure se passe et toujours pas d'Esteban.

Je finis par décider de retourner le chercher, sans doute nous attend-il en haut et si il redescend, je le croiserai sur la passerelle. Je me retape donc les dizaines de marches des passerelles, j'ai ainsi la chance de revoir le magnifique spectacle une fois de plus. Évidemment, une fois en haut, je reçois un message sur mon téléphone : "Esteban est là". Le fripon est descendu par un autre chemin!

Cette visite est la dernière que nous faisons, demain nous repartons vers Buenos Aires et ensuite vers la Belgique ...

Nous passons Anne et moi l'après-midi à nous reposer pendant que Gene participe à une promenade à cheval à travers la steppe.

Je passe une nuit agitée, il fait froid dans la cabane et il pleut ...

20

Jeudi 4 janvier

Esteban nous conduit à l'aéroport d'El Calafate. En chemin, nous nous arrêtons pour qu'Anne puisse s'acheter un pampero, un pantalon de gaucho. Tout le monde en porte ici et ils lui semblent bien confortables. Esteban nous conduit donc chez son marchand ambulant que nous tirons du lit et qui nous ouvre sa sellerie dans laquelle se trouve entre autre tout le matériel pour le harnachement des chevaux à la façon patagone.

Nous rejoignons Buenos Aires où il fait 34°, fameux contraste avec là d'où nous venons où le port de vêtements chauds était indispensable. Nous buvons un verre sur la place du Congrès endommagée par les manifestations du début de notre séjour puis cherchons un restaurant recommandé par Boris. Après une longue marche qui nous conduit dans la bonne rue, nous décidons de prendre un taxi pour rejoindre la restaurant, car les rues sont très, très longues à Buenos Aires!

Une fois de plus nous mangeons une viande succulente grillée à point et gouteuse. Nous nous contentons de demi-portions, 350g quand même!

Mon steak (Rib-eye) 

Vendredi 05 janvier

Notre chauffeur nous conduit à l'aéroport international sous une pluie battante. L'orage a éclaté et a fait tomber notablement la température.

Ce chauffeur est très agressif, il fait des appels de phare et agresse verbalement un chauffeur de taxi qui ne se bouge pas assez vite à son goût. De plus, il ne nous dépose pas au bon terminal. Heureusement que nous ne lui avons pas donné de pourboire!

Commencent les files et les attentes pour enregistrer nos bagages d'abord, puis 12h de vol, 7h d'attente à Madrid. Bruxelles enfin, où nous arrivons le samedi à 15h. Nous sommes partis de l'hôtel à 10, heure de Buenos-Aires, ça nous fait 25h de voyage. C'est long ...

Alain et Laureline sont fidèles au poste et nous attendent, nous repartons chacun vers notre chez soi.

Le voyage a été magnifique, nous avons des souvenirs plein la tête. Paysages, animaux, personnes de toutes sortes, modes de vie différents, anecdotes ...

Et surtout : Nous avons été au bout du monde !