Carnet de voyage

De Saïgon à Angkor

19 étapes
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Du delta du Mékong aux temples khmers d'Angkor, les deux sommets de ce périple. Soleil, sourires, saveurs et patrimoine exceptionnel.
Du 22 janvier au 10 février 2015
20 jours
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22
janv


Dès la sortie l’aéroport, en tout début de cette belle matinée ensoleillée, Lætitia nous accueille avec un large sourire. Malgré ce prénom, elle est vietnamienne. Nous avions longuement échangé ensemble pour préparer ce voyage avec son agence Mékong Villages. Son chauffeur nous conduit rapidement au centre-ville où elle nous offre un Pho, la traditionnelle soupe à base de nouilles de riz, de fines lamelles de bœuf, d’oignon émincé, d’herbes aromatiques, le tout arrosé d’un bouillon subtilement parfumé à la badiane. Avec ce petit-déjeuner vietnamien nous sommes heureux de retrouver les saveurs de ce pays que nous avions adoré au cours d’un premier voyage. Donc, soleil, sourires, saveurs : voilà qui augure un voyage prometteur !

Après échange de petits cadeaux, nous sommes conduits à notre hôtel situé dans une rue calme du centre. La chambre accueillante et confortable va nous garantir un bon repos, après les treize heures de vol pour franchir six fuseaux horaires.

La vibrante métropole du sud affiche sans retenue son rang de capitale économique du pays par le luxe qu’exhibent ses boutiques chics du centre-ville et par les tours audacieuses du quartier des affaires. L’ancienne présence française est encore très marquée par de longues avenues ombragées jalonnées de maisons coloniales, de monuments et de jardins. Il ne s'écoule pas une heure du jour ou de la nuit sans que les rues ne résonnent des incessants coups de klaxons et du vrombissement de centaines de milliers de cyclomoteurs qui sillonnent la ville. C’est une véritable plaie et l’aspect le plus déplaisant de cette immense métropole de treize millions d’habitants, la plus grande agglomération du pays. Le boulevard périphérique le long de la Song River est quasi infranchissable, comme le flot impétueux d’un fleuve en crue !

Après un sommeil réparateur, nous partons pour une première balade à la découverte de la ville, notre hôtel étant idéalement situé à deux pas du marché Ben Thành. A première vue la ville n’est pas aussi séduisante que sa rivale Hanoï. Toutefois nous apprécions notre petite promenade le long de la rivière Saïgon jusqu’à la rue Dong Khoi (ex rue Catinat) qui s'illumine en début de soirée, en vue de la fête du Têt qui se prépare.

24
janv

Rebaptisée Ho Chi Minh-Ville le 30 avril 1975, mais encore appelée Saïgon par ses habitants, la ville va célébrer cette année le quarantième anniversaire de sa « libération ».

Chu, notre très sympathique guide francophone vient à notre rencontre pour nous nous accompagner durant les jours qui suivent dans le delta du Mékong. Mais aujourd’hui nous partons avec lui à la découverte de Saïgon/Ho Chi Minh-Ville. Grâce à lui, nous aurons probablement davantage apprécié la ville que si nous avions été livrés à nous-même. En effet, Chu, très cultivé, a su nous faire entrer dans l’histoire de son pays, depuis les périodes les plus anciennes au cours de la visite du Musée d’histoire du Vietnam, aux heures les plus tragiques des années 1970 quand nous sommes passés devant les grilles du Palais de l’Unification. Sans oublier l’héritage de la période coloniale quand la ville s'appelait Saïgon: l’hôtel de ville, le théâtre municipal, la cathédrale Notre-Dame, l’hôtel historique « Le Continental » de style Art déco et la poste centrale repeinte en jaune, dont la splendide charpente métallique voûtée conçue par Gustave Eiffel retient notre attention.

Saïgon colonial : la cathédrale Notre Dame, le théâtre municipal, l'hôtel continental et la poste centrale


Sculpture khmère au Musée d'histoire du Vietnam: un avant-goût d'Angkor.

A proximité du musée, la visite de la pagode de l’Empereur de Jade, l’une des plus intéressantes de la ville, fut aussi l’occasion de redécouvrir les fondements chinois de la culture vietnamienne. L’Empereur de Jade, divinité taoïste, trône dans la salle principale du sanctuaire, enveloppée d’encens. On y remarque notamment de belles figurines de porcelaine dédiées à la maternité.

Pagode de l’Empereur de Jade

L’après-midi nous partons à la découverte de Cholon, le « quartier chinois », très commerçant, à l’instar du grand marché Binh Tay regorgeant de marchandises diverses et variées, de part et d’autre d’allées où la circulation semble improbable. Ici, « authenticité » garantie ! A proximité, le quartier des herboristes, offre au chaland toutes sortes de plantes de la pharmacopée traditionnelle.

Cholon héberge aussi un grand nombre de temples et de pagodes. Nous ferons le choix de ne voir que la pagode Thien Hau, une des plus remarquables, construite par les Cantonnais il y a deux-cents ans et dédiée à la déesse de la Mer (les boat people, de retour au pays viennent y brûler de l’encens et faire des offrandes). Une étonnante foule de figurines en céramique émaillée orne le fronton.

La pagode Thien Hau. Une foule de figurines anime le fronton, tandis qu'à l'intérieur on brûle des spirales d'encens en offrande 

Le soir, dîner dans un restaurant traditionnel végétarien, le « Sen restaurant » (le Lotus), situé rue Pham Ngu Lao, près du marché Ben Tranh. Une expérience culinaire exquise. Cependant il est bon de se faire accompagner par un locuteur vietnamien, car la carte n’est pas facile à comprendre. On a vu nombre de voyageurs occidentaux désemparés au moment de la commande !

Marché Ben Tranh illuminé pour le quarantième anniversaire de la Libération de la ville (30 avril 1975) 
25
sept

Ce matin, notre chauffeur nous attend pour partir en compagnie de Chu vers le delta du Mékong que nous allons traverser d’est en ouest durant cinq jours jusqu'à la frontière cambodgienne. Ces journées furent un enchantement, un des sommets de notre voyage, avec les temples d'Angkor. Mais avant de partir, faisons un peu de géographie.

Un des plus grands deltas d'Asie du Sud-Est.

Terminant sa longue course quand il pénètre au Vietnam, le Mékong vient former un gigantesque delta, le troisième au monde par sa superficie, soit 39 000 kilomètres-carrés, l’équivalent de la superficie de la région Centre-Val de Loire. Un delta maritime est une construction alluviale résultant d’une rupture de la charge sédimentaire d’un fleuve au contact de la mer. Il en résulte pour le delta du Mékong une avancée vers la mer de l’ordre d’une centaine de mètres par an, ce qui est considérable ! Il faut donc une puissante décharge sédimentaire et il n’est donc pas étonnant que trois des plus grands deltas du monde aient été édifiés par les puissants fleuves himalayens : Gange, Brahmapoutre, Irrawaddy et Mékong. Toutefois la construction deltaïque est soumise à un équilibre entre l’accumulation sédimentaire et les forces destructrices, résultant des crues de mousson, des marées, (le flux de marée remonte quasiment jusqu’à la frontière cambodgienne) ou d’actions anthropiques. Or il se pourrait qu’à terme, un déséquilibre se produise du fait d’un plus faible apport sédimentaire, à cause de la construction de grands barrages en amont et de l’extraction de sédiments comme matériau de construction et non pas à cause du changement climatique.

Un sampan habité

Par ailleurs le delta est le véritable grenier rizicole du pays, avec trois récoltes annuelles. En effet la plaine deltaïque du Mékong a été aménagée dès la fin du XVIIIe siècle par un réseau de canaux d'irrigation perpendiculaires aux neuf bras du fleuve, appelés ici Song Cuu Long ou « Rivière aux neuf dragons ». Le delta est donc un enchevêtrement d’une multitude de canaux, de chemins d'eau et de terre, de rizières et de marais, et c’est ce qui en fait son charme. A la rizière, se juxtaposent le verger, le potager et le bassin piscicole, faisant du delta à la fois un immense jardin et un marché regorgeant de fruits, de légumes, de poissons et autres victuailles, ce qui ajoute encore à son attrait. Les multiples marchés flottants sont une de ses attractions majeures. Et les habitants semblent vivre assez harmonieusement dans cet univers amphibie, comme en témoignent les larges sourires distribués ici et là.

Récolte des jacinthes d’eau dont les tiges servent à fabriquer des objets en vannerie

Ce sont près de vingt millions d’habitants qui s’agglutinent dans le delta, soit 20% de la population vietnamienne sur moins de 12% du territoire. Ce qui représente une densité moyenne de près de 500 habitants par kilomètre-carré, une densité qui dépasse 800 à Can Tho. C’est certes deux fois moins que dans le delta du Fleuve rouge au nord, mais beaucoup plus que dans le delta de l’Irrawaddy. Dans ces conditions on ne peut s’étonner que cette région très humanisée, soit très urbanisée, mais aussi et malheureusement très polluée, comme le montrent les détritus qui s’accumulent sur les berges du fleuve ou dans les canaux.

Débarquement d'un bac à Cái Bè 

Toutefois la nature n'est pas absente du paysage. Contrairement à son homologue du nord, subsistent encore bel et bien des mangroves et des forêts d’arrière-mangrove qui constituent aujourd'hui autant de réserves naturelles préservées, telle la forêt inondée de Trà Su.

La forêt inondée de Trà Su près de Châu Dôc

Le delta du Mékong ne manque donc pas d'attraits : vergers, pépinières, élevages de crocodiles, marchés flottants ou terrestres, réserves naturelles, temples, pagodes khmères, églises, et évidemment balades en barque sur un arroyo.


La pagode de Vinh Trang

Après deux heures sur une route très fréquentée traversant des zones de rizières et de cocotiers, nous parvenons à My Tho, une ville prospère située au bord du bras le plus septentrional du Mékong. Nous visitons l’une des plus grandes pagodes du sud du pays, la pagode Vinh Trang, consacrée au bouddhisme mahāyāna. L’architecture marie curieusement les styles khmer, chinois et français. Peu de visiteurs viennent troubler l’atmosphère de sérénité de ce lieu, entouré d’un jardin remarquablement entretenu et agrémenté de bonsaïs. En fait nous sommes à proximité de la région de production de fleurs et de bonsaïs.


Après un temps de flânerie dans ce jardin, nous reprenons la route, franchissons un premier bras du Mékong, puis un second et pénétrons dans la province Bên Tre, réputée pour ses vergers de fruits tropicaux, sa floriculture et ses pépinières de bonsaïs. Nous en visitons une en bord de route.

25
janv

En fin d’après-midi, nous arrivons à Cho Lach, une localité, située au cœur du delta sur une île qui s'allonge entre deux bras du Mékong. Nous sommes accueillis dans le gîte rural de Monsieur Nam Hien. Une famille de trois générations vit sous le toit de cette grande maison rurale; ce sera l’occasion de nous immerger dans la vie locale, au sein de cette famille très chaleureuse et toujours souriante. Le qualificatif de maison d'hôtes de charme ne serait pas usurpé, tellement ce gîte nous plonge dans une atmosphère d'authenticité, comme on dit parfois abusivement. Ce qui en fait le charme est cette ancienne demeure en bois du XVIIIe siècle, de style cantonnais, entièrement restaurée, dont il faut traverser le grand salon avant d’atteindre les chambres. Celles-ci sont disposées autour d'un petit jardin parfaitement entretenu. Elles ne sont certes pas très grandes, mais très propres et disposent de tout le confort souhaitable. La nôtre disposait même de la climatisation et d’une connexion wifi !


Mais c'est surtout Madame Hien qui, grâce à sa délicieuse cuisine, a contribué à la qualité de notre trop bref séjour. En effet cette dame est une cuisinière de talent. Elle a arpenté le Vietnam du nord au sud pour en tirer ce qu'il y a de meilleur sur le plan culinaire dans chaque région. Bien sûr elle ajoute sa propre créativité. Elle a découvert la confiture grâce à des hôtes français, et s'est mise à en faire elle-même. Et c'est un régal au petit-déjeuner. Elle utilise les produits locaux : canard, poisson, fruits et légumes du jardin. Qualité bio assurée ! Les activités sont variées : balades en bateau et à vélo, pêche, découverte de l'artisanat local, des vergers (la famille Hien possède de très nombreux papayers) et bien sûr, cours de cuisine…

Ce fut probablement un de nos meilleurs moments au Vietnam. Un seul regret: n'y être restés que deux nuits!

26
janv
Le marché flottant de Cái Bè 

Non loin du gîte Nam Hien nous attend un bateau amarré sur un embarcadère du fleuve Tiên (le bras nord du Mékong) pour une balade au cœur du delta. C’est l’occasion d’observer les scènes de vie quotidienne qui défilent sur les rives du fleuve : ici une femme occupée à sa lessive, là un marchand de légumes. Des jarres trônent devant de très modestes demeures de bois et de tôle. Il n’est pas rare de croiser un sampan qui sert d’habitation permanente. Une multitude d’embarcations de toutes sortes et de toutes tailles, péniches, barges, sampans, sillonne cet axe fluvial très animé. Les chargements sont si énormes que les barges sont souvent au ras des flots.


Après une heure et demie de navigation, notre bateau accoste sur l’une des nombreuses îles du delta, l’île de Tân Phong. Là, nous sommes attendus par une jeune batelière pour une balade en barque au fil d’un arroyo noyé sous la végétation tropicale. Un cadre enchanteur et reposant !

Retour à l’effervescence quand apparaît sur une confluence la ville de Cai Bè, derrière laquelle se dresse le clocher élancé de l’église. Au cœur de la région de production de fruits, cette ville est réputée pour son marché flottant, l’un des plus importants du delta. Pamplemousses, jaques, mangues, noix de coco, bananes, etc sont vendus à même l’eau à bord des embarcations. Cependant nous arrivons un peu tard et l’activité à fortement diminué. Qu’à cela ne tienne, nous aurons l’occasion d’en voir d’autres plus tard et puis il y aussi à Cái Bè un marché « terrestre » très animé qui ne manque pas d’intérêt, surtout quand ici et là, les sourire sont généreusement distribués ! Quant aux confiseries artisanales visitées dans un village voisin, (bonbon au lait de coco, galette de riz) ce n'est pas inoubliable...

Sa Dec: son marché flottant et son église


Le marché "terrestres" de Sa Dec 

Une pagode entourée d'un magnifique jardin très fleuri nous servira de cadre pour un déjeuner végétarien en compagnie du bonze avec qui nous avons pu lier conversation grâce à l’entremise de Chu qui assurait la traduction.

Le retour en bateau vers notre gîte achèvera cette magnifique journée ! Achevée la journée ? En fait non, pas tout à fait, puisque nous allons encore savourer le dîner que Madame Hien nous a concocté !

27
janv

Nous prenons congé de la famille Hien. Les adieux sont aussi chaleureux que le fut l’accueil. Pour rejoindre Sa Dec, la première étape de cette journée, il faut traverser le Mékong en ferry. Sur la route c’est un continuel flot de bus, de camions et surtout de motos. Bien que rural, le paysage est fortement marqué par l’urbanisation. Nous sommes au cœur de la région des fleurs qui était surnommée le « jardin de la Cochinchine » pendant l’époque coloniale.

Sa Dec, c’est la ville de Marguerite Duras qui y vécu durant son enfance. On y visite donc les lieux rattachés à la mémoire de la romancière. En premier lieu, l'école primaire aux murs jaune délavé que dirigeait sa mère et où elle fut élève. On peut constater que cette école accueille encore des enfants de nos jours. À quelques pas de là, se trouve le très beau temple taoïste Kien An Cung édifié par les Chinois du Fujian dans les années 1920. Il y avait dans ce quartier une importante communauté chinoise. À l’intérieur, le décor est luxuriant sans pour autant manquer de délicatesse: bois dorés, broderies, laques.

Rien de tel dans la villa du mandarin Huynh Thuy Lê, dite « maison bleue » (il reste quelques traces de cette couleur sur l’un des murs). C’est là que vécut « l'Amant ». À l’intérieur sont présentées des photographies de jeunesse de Marguerite Duras. Il y a des tables d’hôtes pour y déjeuner. C’est ce que nous ferons, mais ce n’est pas ce que nous avons fait de mieux. Je ne me souviens plus de ce qu’il y avait dans l’assiette, ce n’était donc pas inoubliable, c’est le cas de le dire… Tiens ! Il y a aussi des chambres d’hôtes. Hum ! Le « charme » vanté risque d'être rompu par le manque d'entretien et le très mauvais état des lieux.

Aujourd'hui cette maison-musée décrépie est fermée en attendant sa rénovation.

La  "maison bleue 
L'autel des ancêtres  

Nous flânons ensuite long des canaux puis autour des étals du marché local haut en couleurs et animé, avant de reprendre la route en direction de Can Tho, l’étape du jour.

Un très audacieux pont suspendu de 2,75 kilomètres de long enjambe le Hậu Giang (ou Bassac), le principal défluent du Mékong, qui s’en sépare au niveau de Phnom Penh. Ce pont, construit par un consortium japonais, fut inauguré en 2010. On arrive alors à Cantho, la principale ville du delta (et la quatrième du pays) qui compte plus d’un million deux-cent-mille habitants. Elle n’a pas de charme particulier ni grand intérêt, sauf si l’on apprécie vraiment la pagode khmère qui ressemble à une pâtisserie kitschissime, plantée comme par erreur au milieu du tissu urbain. Une agréable promenade dans un beau parc paysager le long du Bassac conclura la jpurnée. Au moment du coucher du soleil, le va et vient incessant des longues barges lourdement chargées est un spectacle à lui seul.


28
janv


Le marché flottant de Cai Rang  

Le marché flottant de Cai Rang

Si l’étape de Can Tho paraît incontournable, c’est parce que la ville est proche de l’un des plus beaux marchés flottants du Vietnam, une attraction majeure dans le delta. Nous partirons donc très tôt le matin vers le marché flottant de Cai Rang, en bateau évidemment. C’est le plus grand de la région et probablement le plus intéressant. L’assurance de réaliser facilement quantité de photos ! Quel spectacle que cette myriade de barques qui se pressent à touche-touche autour de coques ventrues débordant d’ananas, de pastèques, de pommes de terre, d’oignons et autres primeurs ! En haut d'une longue perche est accroché le produit pour le signaler aux chalands. Et si l’on n’a pas eu le temps de prendre le petit-déjeuner avant de faire son marché, pas de problème : des femmes y remédient à bord de leur rudimentaire cuisine sur l’eau !



La Maison des Orchidées

A cinq kilomètres de Can Tho, sur la route Long Xuyên un arrêt s’impose à l’ancienne maison Binh Thuy, dite des Orchidées. C’est une très belle demeure du XIXe siècle de style sino-français, ceinturée d’un jardin fleuri, richement meublée et décorée d’anciens objets chinois. Des scènes de L'Amant de Jean-Jacques Annaud y ont été tournées.

La Maison Binh Thuy

La réserve de Bang Lang.

Entre Can Tho et Long Xuyen, nous décidons de faire un petit détour « nature » vers cette réserve qui protège quantité d’échassiers. On peut observer les volatiles depuis une plateforme aménagée au-dessus de la canopée. En fait, c’est un détour que l'on aurait pu éviter, car l'intérêt est limité puisqu’on ne voit que des aigrettes et quelques cormorans, les cigognes n'étant présentes qu'en novembre. Par ailleurs l'accès en barque sur un arroyo assez glauque n'est pas vraiment des plus plaisants.

Non loin de là, quelques kilomètres avant Long Xuyên, une ferme aux crocodiles sera l’occasion d’une pause-déjeuner. Ces monstres antédiluviens qui pataugent dans des piscines sont à moitié endormis mais très impressionnants ! Se doutent-ils qu’ils sont destinés à être transformés en sacs à main ou en steak ? Bon, c’est un « attrape-touriste », mais le cadre est agréable. Plutôt que la disgrâce des sauriens, je préfère contempler l'élégance carpes koï qui évoluent dans un bassin.

Reprenant notre route, nous apercevons la haute silhouette en béton de l’église Sainte-Thérèse à Long Xuyên. Nous avons remarqué la présence de nombreuses églises dans le delta. Les catholiques représentent en effet environ sept pour cent de la population au Vietnam. L’évangélisation est très antérieure à la colonisation française, les dominicains portugais et les jésuites français ayant entrepris l’évangélisation du pays dès le XVIIe siècle.

Chau Doc.

En fin d’après-midi, nous arrivons à Chau Doc. Cette ville adossée à la frontière cambodgienne et aux rives du Sông Hau - le bras principal du Mékong - est une sorte de melting-pot vietnamien où cohabitent plusieurs communautés : Chams, Khmers, Chinois et bien sûr Vietnamiens. Nous avons loué un bateau pour voir un village flottant spécialisé dans la pisciculture, ainsi qu'un village cham musulman, avec sa mosquée et ses maisons précaires sur pilotis faites de matériaux hétéroclites. Sur un placette de terre battue, des enfants sont en train de jouer. Parmi eux, quelques-uns, plus espiègles, ont tenté de me faire les poches et Chu s'est fait chaparder son en-cas !

On ne peut trouver meilleure situation que l’hôtel qui nous accueille à Chau Doc, puisqu’il se trouve en haut du Mont Sam, en pleine nature. On bénéficie ainsi d’une vue étendue sur les rizières et les villages du delta du Mékong jusqu'au Cambodge voisin où nous poursuivrons notre voyage le surlendemain. La grande piscine à débordement ajoute un atout supplémentaire. Toutefois quand nous y avons séjourné, il n'était pas à la hauteur du nombre d’étoiles qu'il affiche : personnel peu professionnel, constitué de stagiaires pour la plupart, des dégradations dans la chambre (moustiquaire trouée par exemple) alors que l’hôtel était récent. En fait cet établissement ne vaut que pour la vue et sa piscine qu'il fait payer très cher !

Nous passons toutefois une agréable soirée au restaurant de l’hôtel au cours du dîner. Cette expérience "culinaire" sera mémorable...

La vue sur les rizières depuis le Mont Sam 
29
janv
29
janv

Chantal a passé une très mauvaise nuit: des allers-et-retours incessants aux toilettes. Et ce matin elle est très affaiblie. Diagnostic: une sévère intoxication alimentaire suite au dîner de la veille au restaurant de l'hôtel. Nourriture avariée ? Manque de propreté en cuisine ? Des mains pas lavées ? Quoi qu'il en soit ce restaurant n'est pas à la hauteur. J'en informe le personnel. Branlebas dans l'hôtel, visites du directeur (un Français), excuses, etc. En tout cas mon épouse a dû garder la chambre toute la journée pour se reposer et a manqué les excursions alentour. Donc une journée gâchée, voire deux, car elle n'était pas en grande forme le surlendemain lors du transfert en bateau vers Phnom Penh. Cela dit, elle a été aux petits soins toute la journée de la part du personnel, ce qui m'a permis de partir rassuré avec Chu.

La réserve naturelle de Tra Sur

Une route bucolique à travers les rizières nous mène vers cette vaste forêt inondée de cajeput, protégée par une réserve naturelle. Nous embarquons à bord d'une barque pour une balade dans le labyrinthe des canaux recouverts de lentilles d'eau dans cette sorte de Marais poitevin. On peut observer une grande variété d'oiseaux, notamment des échassiers : cigognes, bihoreaux, aigrettes. C'est magnifique et beaucoup plus intéressant que la réserve privée de Bang Lang, ridiculement petite.

Retour à Chau Doc et visite de trois édifices religieux plus ou moins kitsch situés à Phu Chau, au pied du Nui Sam : la pagode Tay An, de style indo-musulman, célèbre pour la délicatesse de ses statuettes ; le mausolée de Thoai Ngoc Hau datant du début du XXe siècle ; le temple de la déesse Chua Xu, important lieu de pèlerinage et de dévotion.

30
janv

Aux premières heures de la matinée nous donnons congé à Chu, notre sympathique guide et le remercions chaleureusement. Chu qui venait de faire un séjour d’un mois en France est parfaitement francophone; il est aussi très cultivée. Une chance que l’agence ait mis à notre disposition un guide d'une telle qualité !

Nous quittons Chau Doc et le Vietnam à bord d’un bateau rapide pour remonter le Mékong jusqu'à Phnom Penh. Le trajet durera 5h30, dont 1h30 de formalités frontalières. Disons-le d’emblée, cette « croisière » ne nous a pas laissé pas un souvenir impérissable, car si au cours de la première heure on navigue dans un canal suffisamment étroit pour pouvoir observer la vie locale sur les berges, dès que le bateau atteint le Mékong, le paysage est des plus monotones, le fleuve étant très large. Malgré tout le voyage fut assez agréable, et sans doute plus confortable qu’un trajet par la route.

Les formalités frontalières sont simples mais longues ; une personne à bord est chargée de collecter les passeports et la somme requise (en dollars US) pour l’obtention du visa, ce qui nous facilite la vie. Nous avons eu droit aussi à un panier-repas de bonne qualité.

En tout début d’après-midi, nous débarquons au centre de la capitale cambodgienne, puis nous sommes transférés à notre hébergement où nous nous installons pour deux jours. Cet hôtel de charme a été aménagé dans une belle maison coloniale autour d’une piscine. Une oasis de fraîcheur et de tranquillité, bienvenue au cœur de cette ville tumultueuse. Les grandes chambres personnalisées avec mobilier ancien et parquet ciré sont ravissantes. Finalement c’est peut-être l’endroit que nous aurions le plus apprécié à Phnom Penh !

Le Mékong à Phnom Penh 

La première préoccupation en arrivant au Cambodge est de changer de l'argent et surprise ! On nous donne des dollars US et non de riels ! Même chose, plus tard, dans un distributeur à Siem Reap.

30
janv



Après l’harmonie, le charme et une relative sérénité des canaux et des rizières du delta, le contraste est brutal. Phnom Penh, ce fut le choc. La capitale du royaume du Cambodge ne nous a pas charmés.

Phnom Penh, capitale en crise

Phnom Penh est une ville de deux millions d'habitants, la plupart d'origine rurale, très dégradée et qui s'est mal remise du traumatisme de 1975. Une ville où se pratique une urbanisation sauvage, où des promoteurs immobiliers sans scrupule profitent de la corruption généralisée. Par exemple le lac Boeung Kak, le plus grand de Phnom Penh qui a disparu sous un immense projet immobilier, New City of East, lequel a chassé la population locale. Ce projet avait fait grand bruit.

Phnom Penh est une ville bruyante, et sale. La circulation est chaotique voire dangereuse pour les piétons, tant il est extrêmement difficile de circuler à pied, tant les trottoirs sont dégradés, occupés par des motos ou des voitures en stationnement anarchique. Voitures et motos et tuk-tuk circulent sans vergogne à contresens. Une ville polluée où les détritus s'entassent un peu partout, où les voies d'eau servent d’égouts à ciel ouvert.

Phnom Penh est une ville aux contrastes sociaux scandaleux : d'un côté la grande pauvreté, voire la misère et le dénuement pour une grande partie de la population; de l'autre les 4X4 Lexus Toyota rutilants, dont les propriétaires (militaires gradés, membres du KPK, personnels des ONG) paradent derrière leurs vitres fumées. Du fait de la grande pauvreté, on est sollicité tous les 25 mètres par la mendicité, comme cette femme à l'entrée d'un marché, avec ses enfants chétifs entièrement nus. Et ce qui est encore plus choquant, c’est le tourisme sexuel qui se pratique au grand jour. Même les enfants ne sont pas à l'abri. Un vieux cochon d'occidental en compagnie d'une jeunette au visage triste, fut une de mes premières visions dans cette ville !

Phnom Penh ne semble donc pas avoir terminé sa convalescence, même si l’on peut voir ici et là les signes d’une renaissance avec de belles boutiques, des cafés accueillants, des artisans et artistes talentueux, mais on ne peut plus parler de « perle de l’Asie ». Peut-être suis-je trop sévère avec cette ville et que je brosse un tableau trop négatif. Mais comment peut-on vraiment apprécier une ville exténuante quand celle-ci nous met dans un état d’épuisement tel que nous avons malheureusement dû écourter notre balade, préférant nous détendre au bord de la piscine de notre hôtel ? Peut-être aurions-nous dû faire le choix d’être accompagnés d’un bon guide qui aurait su nous faire mieux estimer Phnom Penh.

Comme ailleurs en Asie, les scènes de rue sont un spectacle permanent 

Qu’a donc Phnom Penh à offrir au visiteur ?

Des pagodes colorées ? Nous avons visité le Vat Ounalom siège du bouddhisme cambodgien, excessivement kitsch et qui n’a vraiment rien à envier aux temples et pagodes que l’on a pu voir ailleurs en Asie, à Luang Prabang notamment.

Dans le sanctuaire du   Vat Ounalom. Plus kitsch, on ne peut pas !

Des marchés pleins de vie ? Il y a le fameux « marché russe », où soit dit en passant on étouffe littéralement, beaucoup moins intéressant que ceux que l’on a pu voir au Vietnam et qui regorge de babioles pour touristes.


Une balade sur les rives du Tonlé Sap ? Pas un seul arbre pour ombrager cette promenade sous une chaleur accablante, mais une enfilade de drapeaux de toutes les nations permettant à cette capitale d’afficher son « rayonnement international ». On y observera les pêcheurs s’activant sur leurs barques ou quelques enfants dénudés jouant au ballon. Mais, tiens !... Que voit-on au milieu de ce qui pourrait être un beau parc paysager ? Des détritus ! Et puis cet occidental quasiment nu qui traîne ses savates sans complexe. Et puis un autre… En pleine ville ! Se comporteraient-ils de la sorte au jardin du Luxembourg ? Une balade qui aurait pu être plus agréable…

Mais il y a aussi le Palais royal.

Avec le Musée national, c’est sans doute ce qu’il y aurait de plus intéressant à voir à Phnom Penh, à condition d’aimer la restauration ripolinée qui a été faite, à grand renfort de dorures, après les dégradations dues aux Khmers rouges.

Alors que nous nous dirigeons vers l’entrée du Palais royal en traversant la vaste esplanade qui fait face au fleuve, un quidam s’approche de nous, une documentation illustrée sur la ville à la main. « Le palais est fermé aujourd’hui ! » nous affirme-t-il. Ben voyons ! La ficelle est trop grosse, mon gars. Ton tuk-tuk n’est pas loin et des chauffeurs de tuk-tuk qui nous sollicitent à tous les coins de rue, on a fini par s’y habituer. Nous attendons donc l’heure d’ouverture à 14 heures et nous ne sommes pas seuls. Il y a foule, c’est le week-end !

Petit avertissement. Pour la visite du palais royal, il faut absolument avoir les épaules couvertes et éviter le short. En effet même les châles ne sont pas acceptés pour entrer au Palais royal. Les contrôleurs font systématiquement ôter le châle aux femmes, pour vérifier qu'elles ont bien la tenue ad hoc, à savoir un T-shirt ou un chemisier, sinon il y en a vendre à l'entrée... Un commerce bien rodé !

Bien sûr, on peut admettre que par respect pour un lieu à caractère religieux tel que la Pagode d’Argent il ait un code vestimentaire et que les photos soient interdites. Mais à condition que l’on respecte réellement ce lieu. Objectivement il n’en est rien, car que constate-t-on dès que l’on entre dans le sanctuaire, après s’être déchaussé ? Des hordes de touristes braillards et indisciplinés, dont on suppose qu’ils sont pour la plupart d’entre eux de culture bouddhiste… Le respect ne tient donc qu’à la longueur d’un bout de tissu !

La Pagode d’Argent, avec son Bouddha d’émeraude, son Bouddha grandeur nature en or massif, orné de milliers de diamants et ses centaines de petits bouddhas d’or et d’argent est loin d’être un lieu de prière et de méditation. On reste interdit devant tant de débauche de richesses et l’on se demande où est l’enseignement du Bouddha dans tout cela (mais c’est une dérive commune à bien d’autres religions). Et que voit-on à la sortie ? Des mendiants dépenaillés…

Certes ce palais ne manque pas d’harmonie ni d’élégance par l’ordonnancement de ses toitures khmères, les espaces verts sont remarquables et bien entretenus, malgré tout on a un sentiment partagé en sortant de ce lieu.

Et surtout il y a les belles collections d'art khmer du Musée national !

Ce musée était notre principale motivation pour passer par Phnom Penh au cours de ce périple. Conçu en 1923 par l’historien d’art Georges Groslier, ce magnifique musée occupe un ravissant ensemble de bâtiments traditionnels en terre autour d’un patio fleuri. Le musée n’est pas très grand, mais il conserve l’une de plus belles collections au monde de sculptures khmères, avec bien sûr le Musée Guimet à Paris. Plus d’un millénaire de chefs d’œuvre exceptionnels y est présenté. Une véritable fresque de l’histoire de l’art du Cambodge, depuis les royaumes anciens aux différentes périodes angkoriennes.

Une des pièces maîtresses est la célèbre statue de Jayavarmann VII en méditation, qui fit partie d’une exposition à Guimet il y a plusieurs années. Cette sculpture est tout un symbole pour le peuple cambodgien. D’ailleurs quelques gardiennes du musée proposent des offrandes à la vente, puisque pour les nombreux visiteurs asiatiques, ces représentations anciennes du Bouddha ou du panthéon indien sont encore vénérées.

Linteau de grès dans les style de Banteay Srei (10e s). Vishnou chevauchant sa monture Garuda brandit vigoureusement ses attributs


Bouddha protégé par le naga 


 Fronton d'un gopura du temple de Banteay Srei . Scène de combat dont le thème s'inspire d'un épisode du "Mahabharata"


Les photographies sont interdites, en théorie toutefois, puisque les très nombreux scolaires en uniforme qui fréquentent les salles en compagnie de leurs professeurs ne se gênent pas pour photographier avec leurs téléphones portables à tour de bras. Ceci dit il vaut mieux faire l’acquisition de l’excellent catalogue vendu à la librairie du musée qui présente des reproductions de qualité. Ce musée a en quelque sorte « sauvé » notre bref séjour à Phnom Penh. Il est un complément indispensable à toute visite des temples d’Angkor. On peut aussi, au retour, mettre un pied au musée Guimet à Paris si l’on ne l’a jamais vu.


Le Tuol Sleng, ou « Musée du génocide ».


À tort ou à raison nous n’avons pas voulu voir ce lieu de souffrance qui est devenu un lieu de mémoire pour les Cambodgiens.

1
fév

Ce dimanche matin, nous faisons connaissance avec notre guide et notre chauffeur cambodgiens qui viennent à notre rencontre à notre hôtel, puis nous prenons la route pour Battambang, notre prochaine étape (près de 300 km). Notre nouveau guide est francophone, du moins il fait ce qu’il peut, car nous avons du mal à le comprendre. Tout le contraire de Chu qui maîtrisait si bien notre langue.

Nous sommes heureux de quitter la frénésie de la ville, pour découvrir la campagne cambodgienne. Sortir de Phnom Penh par ses tristes banlieues déshéritées à n’en plus finir, n’a rien d’une partie de plaisir. C’est le week-end, malgré tout il y a énormément de circulation. Toutes sortes de véhicules : des camions, des charrettes, des motos, des tuk-tuk et autres moyens de locomotion improbables et même des piétons qui prennent des risques. Au niveau d’un pont en travaux, c’est le bouchon inextricable, chacun essayant de se faufiler comme il le peut.

Nous longeons le Tonlé Sap et en cours de route, nous nous arrêtons dans un village d’artisans spécialisé dans le travail de l’argent. Nous visitons un atelier. Des enfants sont au travail. Je ne porterai pas de jugement à ce sujet : le village est pauvre, c’est dimanche, ils n'ont donc pas classe, et puis il s’agit d’une petite entreprise familiale qui fait ce qu’elle peut pour vivre. Cette activité est essentiellement destinée à alimenter les marchés et boutiques touristiques de Phnom Penh et de Siem Reap.

À une quarantaine de kilomètres de Phnom Penh, nous atteignons Udong, l’ancienne capitale du pays, de 1618 à 1866. Nous allons y admirer, au sommet de deux collines, une série de très beaux stupas destinés à recevoir les cendres des rois du Cambodge. Les plus remarquables sont les deux derniers : Ang Doung pour ses motifs floraux de céramique et Mak Proum, surmonté de quatre visages à la manière du Bayon d’Angkor et orné de motifs floraux, d’éléphants et de garuda (l’homme-oiseau de la mythologie hindouiste). Ces sculptures sont un avant goût moderne de ce que l’on pourra admirer à Angkor. Du haut des collines, on a une belle vue sur la campagne environnante.


La balade se termine par le Vihear Preah Ath Roes, un imposant temple en partie détruit et protégé par une toiture métallique moderne. Sollicité par une dame pour me vendre un bouquet de fleurs de lotus, je lui en achète un que je donne aussitôt à un pèlerin pour en faire offrande au colossal bouddha assis qui a été reconstruit après les affres que le régime khmer rouge a fait subir à cet édifice.

En passant au pied de la colline, nous apercevons le mémorial aux victimes du génocide : des crânes empilés dans un édicule vitré. Udong est un site très intéressant qui peut faire l’objet d’une balade agréable d’une journée au départ de Phnom Penh.

A Kampong Tralach nous faisons un détour en direction du Tonle Sap à travers une belle campagne arborée pour visiter le très joli Vihara (monastère bouddhiste) de la pagode Wat Po-Rukharam. Il date du début du siècle dernier, et conserve de magnifiques peintures murales qui malheureusement commencent à souffrir des assauts du temps. Totalement isolée au milieu des rizières, c'est une modeste pagode peu visitée, sinon peut-être par des groupes de croisiéristes sur le Tonle Sap. Ce détour vaut aussi pour les villages traversés et leurs belles demeures en bois sur pilotis, dont certaines semblent assez cossues, mais tout est relatif.

Nous déjeunons dans un restaurant de Kampong Chhnang, probablement destiné aux touristes, puisque nous y rencontrons un groupe de séniors français déjà attablés. La région de Kampong Chhnang s’est spécialisée dans la poterie et exporte ses produits dans tout le Cambodge et même au-delà. La manière de travailler reste assez ancestrale, mais nous ne nous y attarderons pas pour reprendre la route. Celle-ci est rectiligne et en excellent état. Peut-être en trop bon état ? En effet, cela incite notre chauffeur à faire des excès de vitesse, y compris en agglomération. Par bonheur la circulation est modérée !

Nous arrivons à Battambang en fin après-midi. Avant de rejoindre notre hébergement situé à l’écart de la ville nous faisons rapidement le tour de la pagode Wat Kor aux tons soutenus ocre jaune, renforcés par la chaude lumière de fin de journée. Elle est voisine de notre maison d’hôtes à laquelle elle a donné son nom : Maisons Vat Kor. Nous y recevons un très bon accueil. L'endroit, organisé autour d’un petit étang, d’une piscine et d’un jardin tropical, a un charme fou.

2
fév
Les maisons de marchands de l'époque coloniale à Battambang 

Bien que Battambang soit la troisième agglomération du pays, elle fait figure de ville provinciale et n'a pas grand chose à offrir au visiteur. Elle a toutefois conservé un certain charme colonial, grâce notamment à la restauration des principaux bâtiments historiques. Le tour en ville sera donc rapide, pour voir dans centre, l’ancienne résidence du gouverneur et quelques maisons de riches négociants de l’époque française. Nous verrons aussi deux monastères plus ou moins intéressants : le Wat Damrei Sor et le Wat Kandal. Le petit musée mérite une brève visite pour sa collection de beaux linteaux admirablement sculptés, en provenance des temples angkoriens des alentours.

L'ancienne résidence du gouverneur 

En périphérie de la ville et à proximité de notre maison d’hôtes, le village de Wat Kor ne manque pas de charme grâce à ses jardins et ses belles maisons khmères traditionnelles en bois, bien conservées, dont certaines datent de plus d’un siècle. Parmi ces dernières, une dame assez âgée qui pratique encore le français, nous accueille pour nous faire visiter sa demeure. Globalement cette ville n’a rien d’éblouissant et elle est plutôt très sale. Cependant c’est une ville à l’ambiance provinciale assez paisible, loin de l’agitation de la capitale.

Les environs de Battambang

Initialement Laetitia avait prévu d’organiser les balades dans la campagne environnante en tuk-tuk. Une idée que je trouve assez saugrenue, car nous disposons d’une voiture. Alors pourquoi payer pour une voiture et son chauffeur et les laisser au repos ce jour-là ? Probablement est-ce un concept de l’agence qui présuppose que les touristes auront plaisir à découvrir ce moyen de transport « typique ». Donc nous prendrons notre voiture, ce qui nous fera gagner en confort et en temps, car il y a plusieurs kilomètres à parcourir !

La campagne autour de Battambang, n’a rien d’époustouflant. Peut-être cette impression est-elle due à la saison sèche. Ce doit être certainement plus beau en période de mousson. Qu’en est-il des deux sites que nous allons découvrir dans l’après-midi ?

En moins d’une demi-heure de voiture, nous arrivons Phnom Banan. C’est un temple-montagne angkorien du XIe siècle qui, par ses cinq tours, rappelle Angkor Vat. Il est construit au sommet d’une colline d’environ 400 mètres, accessible par un escalier de latérite de 358 marches. Du sommet, les vues promises sur les rizières, les villages, les plantations de palmiers à sucre et les montagnes sont assez décevantes, notamment à cause du rideau d’arbre qui cache le panorama. A part quelques bas reliefs, les ruines de ce temple sont d’un intérêt moyen et inutile de préciser qu’il vaut mieux le visiter AVANT Angkor, sinon l’on risque d’être TRÈS déçu ! Aujourd’hui, ce temple est très prisé des familles khmères qui aiment y aller pique-niquer le dimanche. Est-ce la raison pour laquelle on voit cet écriteau, cloué à un arbre et en français dans le texte : « Gardez notre pays propre » ?

Phnom Sampeou, qui signifie la « Montagne de navire » (?), est un éperon calcaire situé à dix-huit kilomètres de Battambang qui offre un panorama sur les rizières. On l’atteint au terme d’une rude montée de sept cents marches et cent mètres de dénivelé. Au sommet se trouvent des pagodes plus kitsch les unes que les autres et trois grottes où se nichent des sanctuaires. Une de ces grottes a été le sinistre théâtre de massacres pendant le régime des Khmers Rouges.

De retour à Battambang, nous assistons en soirée à un spectacle d’un peu plus d’une heure au cirque de l’association Phare Ponleu Selpak(« La Lumière des Arts » en khmer). Nous avons adoré ce spectacle de très grande qualité. Nous n'avons pas vu la version professionnelle à Siem Reap, mais je me demande comment elle pourrait surpasser cette version "étudiante", tellement ces jeunes avaient de talent. Je me souviens notamment du jeune batteur qui se donnait à fond, de même qu'une jeune fille au xylophone qui était en accord total avec le jeu des acteurs. Il faut absolument aller voir le cirque Phare, ne serait-ce que pour soutenir cette ONG française.

3
fév

Nous partons tôt ce matin de Battambang car une longue route nous attend jusqu'à Siem Reap. Nous empruntons d’abord la route de Sisophon, puis à partir de cette localité, une bonne route toute neuve qui traverse des paysages de savane et de forêts (65 km, environ une heure) jusqu’au site angkorien de Banteay Chhmar. Dans le village se trouve l'atelier artisanal « Soieries du Mékong ». L'atelier est associé à l'Organisation non gouvernementale française « Enfants du Mékong ». On peut y acheter des écharpes de très bonne qualité et cela fait travailler des femmes de la région. Malheureusement c’était jour férié ce jour-là (on ne connaît jamais assez le calendrier des fêtes, très chargé en Asie) et les ateliers étaient inactifs. Des jeunes bénévoles françaises nous l’ont cependant fait visiter et nous ont fait part de leur vie dans ce village assez isolé. Une expérience apparemment très positive selon ces jeunes étudiantes.

Le temple angkorien pour lequel nous sommes venus ici est en grande partie écroulé et fut pillé à différentes reprises, notamment par des soldats à la fin des années 1990, en raison de son isolement et de sa proximité avec la frontière thaïlandaise. Il reste cependant magnifique et imposant. Édifié sous le règne de Jayavarman VII aux XIIe - XIIIe siècles, c’est l’un des plus étendus du patrimoine khmer : son mur d’enceinte de neuf kilomètres de périmètre est entièrement recouvert de bas-reliefs sur une superficie de 2 000 m2. Une partie a été complètement restaurée. D’ailleurs l’archéologue anglais qui a supervisé la restauration accompagnait ce jour-là un groupe de passionnés et j’ai donc un peu tendu l’oreille pour en savoir un peu plus, car il ne fallait pas trop compter sur les explications de notre guide, beaucoup moins compétent que notre guide vietnamien.


Outre des scènes de la vie rurale, les bas-reliefs décrivent essentiellement des scènes de combat naval entre les Khmers et le Chams ; les morts tombés à l’eau sont dévorés par des crocodiles. Un peu plus loin, des scènes de combat terrestre impliquent des fantassins et des éléphants.

A travers un dédale de ruines, nous arrivons devant deux beaux bas-reliefs représentant le bodhisattva Avalokiteshvara aux bras multiples. Ce sont des rescapés qui ont échappé aux pillages de 1998, car l’origine il y en avait huit.

Le bodhisattva Avalokiteshvara à bras multiples. 

Ces bas-reliefs superbement restaurés valent largement le long détour que nous avons effectué pour venir jusqu'à Banteay Chhmar. Mais il commence à faire très chaud, malgré la présence des grands arbres qui ont envahi le site. Aussi, après la visite, allons-nous déjeuner au restaurant communautaire du village : un repas simple, mais copieux et très convenable.

Il nous reste encore trois heures de route jusqu’à Siem Reap, en repassant par Sisophon. Nous y arrivons en milieu d’après-midi. Cette ville de 250 000 habitants a grandi trop vite et s'est désormais hissée au deuxième rang des villes cambodgiennes. La raison en est simple : c’est la porte d’entrée de la Cité d’Angkor. Tout est dédié à la mono-industrie touristique. Les hôtels y sont légion. Ce n’est donc pas dans cette ville qu’il faut rechercher une quelconque authenticité cambodgienne, quoique nous y trouverons quelque intérêt, comme la visite des ateliers des « Artisans d’Angkor ».

Nous rejoignons notre hôtel où nous séjournerons une semaine entière, puis nous prenons congé de notre guide qui, conscient de ses faiblesses, se fait de plus en plus pressant pour nous être utile en attendant son pourboire... Nous avons aimé notre séjour dans ce havre de paix et de fraîcheur où il est appréciable, au retour des visites dans les temples, de se détendre dans la piscine. Le gros avantage est sa situation idéale à la sortie nord de la ville en direction du site d’Angkor et à quelques minutes de celui-ci en tuk tuk. Nous avons été aux petits soins tout au long de notre séjour, notamment au restaurant situé sur la terrasse sommitale de l’hôtel où l’on vous sert des plats délicieux.

4
fév

Dès six heures du matin, Monsieur Sum, guide ornithologue de l'Association Osmose vient à notre rencontre à notre hôtel de Siem Reap. C’est lui qui nous fera découvrir le lac Tonlé Sap au cours de cette journée.

L’écosystème singulier du Tonlé Sap.

Le lac Tonlé Sap est le plus grand lac d'eau douce d'Asie du Sud-Est. Son exutoire est le Mékong par l’intermédiaire d’un chenal de 100 km, appelé également Tonlé Sap. C’est un lac à géométrie variable, puisque sa superficie de 2 500 km2 en saison sèche, s’étend jusqu’à 12 000 km2 à la fin de la mousson. L’originalité du système hydrologique du Tonlé Sap, unique au monde, tient à l’inversion du flux vers l’amont, lors de la crue du Mékong pendant la mousson, provoquant l’inondation saisonnière d’une vaste zone forestière (la « forêt inondée »).

Ce brassage des eaux et des sédiments est à la base d’une formidable productivité biologique, créant un écosystème original. En effet le Tonlé Sap est un des plus riches réservoirs de poissons au monde, permettant de faire vivre quelque cent mille personnes dans les nombreux villages flottants tout autour du lac (300 000 tonnes pêchées par an). C’est aussi le biotope de la plus importante population de serpents au monde, dont la collecte est essentiellement destinée aux élevages de crocodiles qui prospèrent autour du lac. Enfin le lac héberge d’importantes colonies d’oiseaux aquatiques, protégées dans les réserves de Prek Toal et de Boeng Tonlé Chhmar

La civilisation angkorienne n'aurait pas eu la puissance et le rayonnement qu'on lui connait sans la profusion des ressources du lac Tonlé Sap. Les bas reliefs des temples ne manquent pas de représentations de poissons, oiseaux et reptiles. Aujourd’hui ce sont quelque trois millions de Cambodgiens qui dépendent des ressources de ce lac. Pour sa valeur écologique, économique, sociale et culturelle, cet écosystème unique a été désigné comme Réserve de Biosphère par l’UNESCO en 1997.

Embarquement pour la réserve ornithologique de Prek Toal

Nous prenons la route qui nous mène en quarante minutes environ jusqu'aux rives du lac. Du fait des basses eaux en cette saison, l’embarcadère est très éloigné. Sur la rive, on peut observer des pêcheurs en train vendre le produit de leur pêche. De nombreux bateaux attendent les touristes, mais ces derniers ne sont probablement pas encore réveillés car nous sommes les seuls à embarquer pour une navigation d’une heure et demie à travers les chenaux périphériques du lac. Notre guide nous sert un petit déjeuner à bord et nous prête ses jumelles pour l’observation des oiseaux.

Nous passons par quelques villages flottants de pêcheurs avec conserverie de poissons, élevage de crocodiles ou piscicole, jardins, commerces, restaurants, écoles et même des églises, tout cela aménagé sur des flotteurs. Il y a également des marchés flottants de fruits et légumes, comme ceux que nous avons vus dans le delta du Mékong. Arrivés au village flottant de Prek Toal, nous débarquons à la station environnementale de la réserve ornithologique du même nom, pour embarquer sur un autre bateau, manœuvré par une jeune ranger locale.

Nous remontons une rivière pour accéder au cœur de ce sanctuaire peuplé d’innombrables oiseaux : cormorans, ibis, aigrettes, cigognes, marabouts, pélicans, etc. Il y en a partout : en vol, au sol sur les rives, perchés sur la cime des arbres de la forêt qui n’est plus inondée en cette saison. Monsieur Sum est un passionné qui sait observer ce milieu particulier et aime partager ses connaissances ornithologiques. Il est aussi un pédagogue qui nous explique, documents et cartes à l’appui et dans un français impeccable, le fonctionnement saisonnier de l'hydrologie lacustre, l’écosystème, la flore et la faune du lac, en particulier l’avifaune.


Puis nous retournons au village pour déjeuner au restaurant communautaire flottant. Après le repas, à base de poisson, bien évidemment, nous visitons les classes d’éducation à l’environnement de l’Association Osmose, situées sur le ponton voisin, ainsi que l’atelier d’artisanat de jacinthe d’eau, une façon originale d’exploiter cette peste végétale. Vers 15h30 nous reprenons le bateau de retour et la route de Siem Reap à travers de beaux paysages de rizières baignés de la douce et chaude lumière de fin de journée. Ce fut une des plus belles journées de notre voyage. Je recommande vivement cette excursion.


Osmose propose divers circuits d’une ou deux journées (avec nuitée sur place) appelés « Éco-tours ».

Quel avenir pour le lac Tonlé Sap ?

Faisant un petit détour par les toilettes (flottantes !), je me suis demandé où partaient les eaux usées. Questionnant notre guide à ce sujet il m'a répondu que cela allait... dans le lac. Il y a bien eu une expérience de toilettes sèches, mais ce fut un échec. D’ailleurs ce n’est pas le seul problème écologique : la circulation intense (et bruyante) des bateaux dont certains avec de puissants moteurs est une menace pour la stabilité des édifices flottants du village. À une autre échelle la pression humaine de plus en plus forte met sérieusement en péril l’équilibre écologique du lac. Où vont les eaux usées des centaines d’hôtels et chambres d’hôtes de Siem Reap ? Et le cycle hydrologique du lac ne risque-t-il pas d’être perturbé par la construction des barrages dans la partie chinoise du Mékong, en amont. L’équilibre écologique du Tonlé Sap est donc fragile.

À propos de l'ONG française Osmose.



« Le projet Osmose est une action pilote initiée en 1999 alliant environnement et développement dans la zone de Prek Toal, sur le lac Tonlé Sap au Cambodge. Le site héberge les dernières colonies de grands oiseaux d'eau de l'Asie du Sud-Est, alors menacées d'extinction par la collecte massive d’œufs et d'oisillons. L'approche du projet est originale en ce sens qu'elle intègre la conservation des colonies, l'éducation à l'environnement et l'écotourisme, avec pour objectif le développement équitable des communautés lacustres environnantes. Après six années de persévérance, les colonies d'oiseaux sont sauvées, 600 enfants suivent le programme d'éducation à l'environnement, et Osmose est le premier acteur du tourisme sur la zone. »


5
fév
Lever de soleil sur Angkor Vat

Le rêve s’est enfin réalisé ! Avec le Machu Picchu découvert l’année précédente, Angkor faisait partie des sites majeurs de cette planète que nous désirions voir depuis longtemps ! Et nous avons été comblés par tant de merveilles, c’est le moins que l’on puisse dire !

Angkor, inscrit sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO est un site archéologique majeur de l’Asie du Sud-Est qui s’étend sur environ quatre cents kilomètres carrés. Il est composé d’une multitude de temples, de systèmes hydrauliques et de routes de communication. Entre le IXe et le XVe siècle siècles, Angkor a été le centre du royaume khmer, les souverains successifs ayant édifié des monuments impressionnants, et aménagé des réservoirs gigantesques et de nombreux canaux. Des temples comme Angkor Vat, le Bayon, Preah Khan et Ta Prohm sont étroitement liés à leur contexte géographique et aussi empreints de signification symbolique. L’architecture et le plan des capitales successives témoignent d’un haut niveau d’ordre et de hiérarchie sociale au sein de l’empire khmer.


Durant cinq jours, nous avons pu largement profiter des innombrables ruines de cet immense complexe archéologique, ainsi que dans les environs, à Koh Ker et Beng Mealea. Sur ces cinq journées de visite, il y en eut quatre en compagnie d’un guide, Monsieur Oum Samnang. Ce jeune homme, d’une grande culture et parfaitement francophone, si ce n’est quelques petits défauts de prononciation ici et là mais au vocabulaire très riche, nous a donné entièrement satisfaction.

De l’intérêt d’être accompagné d'un guide à Angkor.

Initialement je voulais organiser nos journées librement en utilisant les tuk-tuk proposés par l’hôtel. Mais je me suis laisser convaincre par Laetitia, notre conseillère de l’agence ; il est vrai que c’est aussi son rôle! Parmi les arguments il y a certainement la gestion du temps qui a joué et nous n’aurions pas vu autant de lieux intéressants si nous avions été seuls et, me connaissant, j’aurais probablement traîné ici ou là, à faire des photos, à me plonger dans mon Lonely Planet ou à chercher un détail, ce qui a la suprême faculté d’agacer mon épouse, laquelle a été ravie de se faire accompagner par une tierce personne !

Avec talent, Samnang a su captiver notre attention sur l'histoire, les styles architecturaux, les systèmes religieux, la fonction des monuments, ce qui nous a permis de comprendre un peu mieux les temples. Surtout il nous a permis de visiter les sites dans les meilleures conditions, puisqu'il connaît les heures idéales pour chaque lieu ainsi que les habitudes des groupes en voyage organisé, pour pouvoir les éviter. Donc un guide, s'il n'est pas indispensable, est un plus. Et puis c’est aussi un emploi, ce qui n’est pas rien dans ce pays. Au terme de son service, Samnang nous a d'ailleurs chaudement remerciés de notre visite dans son pays, en nous précisant que cela génère des dizaines d'emplois directs ou induits pour les Cambodgiens.

Cependant j’avais réservé la dernière journée à Angkor, entièrement libre, car j’aime bien aussi ma liberté ! Nous avons pu revisiter tranquillement des temples que nous avions particulièrement admirés: ainsi nous avons pu examiner plus en détail les bas-reliefs du Bayon ; ou encore, sur les conseils avisés de notre guide, découvrir quelques pépites plus ou moins confidentielles comme Krol Ko ou Ta Som

Quelques désagréments.

Soyons clair, nous sommes en haute saison et la foule fait indéniablement partie du paysage ! Et l’on a beau choisir les heures ad hoc aux endroits stratégiques, il n’y a pas moyen d’y échapper à un moment ou un autre, surtout dans les parties confinées des temples. C’est particulièrement le cas à Banteay Srei où il faut arriver de très bon matin, à Ta Prom, au Bayon et pour l’accès à la tour centrale d’Angkor Vat où une file d’attente se forme devant l’escalier raide qu’il faut grimper pieds nus et tête découverte (mais les épaules couvertes), sous un soleil de plomb, car c’est un lieu sacré.

Évidemment il faut supporter les habituels groupes indisciplinés et bruyants, provenant de l’Empire du Milieu pour la plupart, qui se font auto-portraiturer avec leur phone, de préférence au moyen d’une perche, devant un garuda, une apsara ou un bouddha, afin d'abreuver les « zéro sociaux ». Le nec plus ultra étant de se trouver sur les pas d’Angelina Jolie sur une estrade placée juste devant les racines d’un fromager enserrant un mur du Ta Prohm. Jayavarman VII versus Angelina Jolie. Ceci est le « prix » à payer (en plus du forfait) pour pouvoir admirer les temples. Il faut l’accepter, bon gré, mal gré. Cela fait partie du folklore angkorien ! Sinon, il faut venir pendant la mousson...

Est-il possible d’éviter la foule ?

Si l’on veut profiter des levers et couchers de soleil, on ne pourra pas éviter la présence simultanée de centaines de nos semblables, mais est-ce vraiment un problème ? Après tout, c’est comme assister à un spectacle et c’en un. Tout le monde y a droit ! Les lieux les plus prisés sont Angkor Vat aux lever et coucher de soleil, Pre Rup et Phnom Bakeng au coucher. Concernant ce dernier, d’où l’on bénéficie d’une belle vue, sur Angkor Vat, nous étions absolument tranquilles le matin.

Le mieux consiste à entreprendre les visites dès l'ouverture (à partir de 5 heures) avant l'arrivée des groupes en voyage organisé. C’est ce que nous avons fait pour assister au lever de soleil sur Angkor Vat : partis avant l’aube vers 5h30, nous avions emporté un panier-repas préparé par l’hôtel pour notre petit déjeuner, puis immédiatement après le départ massif des visiteurs vers leur hôtel pour leur petit-déjeuner, nous avons profité de cette relative accalmie pour enchaîner sur le Bayon où nous avions les bas-reliefs de l’enceinte pour nous seuls ou quasiment. Mais ce ne fut qu’un bref répit malgré tout.

Ensuite on a une fenêtre de relative tranquillité entre 12 et 15 heures quand les groupes repartent en ville pour déjeuner . Le revers de la médaille, c'est qu'il fait très chaud et que la lumière est la plus mauvaise pour les photos. En revanche c'est idéal pour admirer les bas reliefs des galeries d'Angkor Vat et du Bayon, à l’ombre. Dans ces conditions, nous rentrions généralement à l’hôtel vers 14h pour déjeuner et nous reposer (il y a des restaurants sur place, mais nous ne les avons pas testés), avant de reprendre les visites en fin d’après-midi.

Autour des temples

Il n’y a pas que les temples à voir à Angkor. En premier lieu, une magnifique forêt qui ici a été exceptionnellement préservée et qui fait partie du décor. Une forêt qui a aussi envahi les temples. C’est la vision qu’ont eue des explorateurs comme Louis Delaporte ou Henri Mouhot au XIXe siècle. Un des charmes d’Angkor, n’est-il pas le tableau ultra classique formé par ces racines de fromager ou de ficus au milieu des ruines, enserrant un linteau ou déchaussant des pierres ?

À gauche: fronton du gopura oriental du Ta Prom enserré dans un ficus. À droite: démesure à Banteay  Kdei

Angkor est aussi intégré à une vie locale. De part et d’autre de la route de Banteay Srei, c’est une succession ininterrompue de maisons traditionnelles cachées parmi les cocotiers. Cette vie rurale traditionnelle procure un certain charme au parcours. De même, à l’est du site d’Angkor, on aperçoit le village de Sras Srang aux maisons de bois sur pilotis, qui a développé une activité d’artisanat. Et l’on peut voir les enfants vendre la production dans les temples. On est souvent sollicité à l’intérieur du site et il est difficile de devoir refuser cent fois. On a beau penser que ces petits vendeurs ou leurs parents sont privilégiés par rapport à d’autres, d’habiter à proximité d’une manne financière étrangère, il faut bien se résoudre à acheter quelque chose, mais pourquoi à l’un et pas à l’autre ? Ayant acheté un lot de cartes postales à un des ces enfants, lequel les comptait méticuleusement une à une et en anglais, puis annonçait la somme : « one dollar ! », nous avons immédiatement remarqué la triste mine de la fillette qui l’accompagnait ! Alors il a bien fallu lui acheter quelque chose aussi. Mais on ne peut faire cela cent fois de suite !

Le drame des années noires plane encore autour du site d’Angkor. Si la forêt a pu provoquer des dégâts, il en est de même des hommes. On voit de nombreuses sculptures mutilées, soit par des tirs imbéciles de la part des militaires, soit plus généralement par des pillages systématiques. Il n’est pas rare de voir des statues dont la tête a été découpée puis volée.

Angkor Tom, porte de la Victoire: un des dieux livrant bataille au cours du "Barratage de la Mer de lait" à perdu la tête !
Sculptures mutilées de la Terrasse du Roi lépreux 

Mais les alentours recèlent aussi un sinistre héritage, les mines. Des panneaux rappellent que le déminage n’est pas achevé, loin s’en faut et que la campagne alentour n’est pas sans danger, surtout dans le secteur isolé de Koh Ker. A cet égard il est recommandé de consacrer une heure à la visite du Musée des mines terrestres du Cambodge de M. Akira, situé à proximité de Banteay Srei. On y apprend beaucoup sur ce fléau qui ne touche pas que les Cambodgiens, hélas! C'est aussi l'occasion d'aider cette ONG ainsi que les enfants qu'elle prend en charge.


Lectures

* Angkor. Cité khmère, par Claude Jacques et Michael Freeman, Editions Olizane, 2006, 239 p. Un excellent guide assez exhaustif, précis et richement illustré. Il présente les aspects de chacun des temples : histoire, style, plan, visite détaillée.

* Angkor. Naissance d’un mythe. Louis Delaporte et le Cambodge, Pierre Baptiste et Thierry Zéphir, Gallimard, 2013. C’est le catalogue de l’exposition de 2013 au musée Guimet. Cette exposition présentait notamment des dessins de Delaporte et des moulages de bas-reliefs angkoriens, qui avaient réalisés par la Mission Louis Delaporte dans les années 1880. Ces moulages récemment restaurés sont des témoignages précieux, car ces linteaux, tympans ou autres sculptures très finement sculptées, ont pour la plupart aujourd’hui disparu à cause des outrages du temps ou des hommes.

Fouler ces vieilles pierres fut assez épuisant, surtout par la chaleur, mais quelle récompense ! Ces garuda farouches, ces délicates apsara dansant, ces naga inquiétants, ces poissons et crocodiles du lac Tonlé Sap, ces portes monumentales aux quatre têtes énigmatiques, ces Shiva dansant et autres bouddhas, tout ce petit monde fut pour nous un émerveillement ! Angkor a tenu ses promesses, ce fut le sommet de ce voyage !

Il serait vain et fastidieux pour le lecteur d’énumérer ici, comme dans un catalogue exhaustif, tous les temples que nous avons visités. Aussi je me contenterai de n’en partager qu’une sélection par ces quelques photographies, une sélection qui fut difficile et cruelle !

Un des plus réputés comme Angkor Vat n’est pas nécessairement celui que nous avons préféré, en dehors des superbes bas-reliefs bien conservés, je ne sais trop pourquoi. Trop monumental ? Trop préservé (ce qui serait un comble !) ? A contrario, nous en avons apprécié d'autres qui ne sont pas les plus visités, comme Kro Kol ; peut-être est-ce à cause de l’heure à laquelle nous avons parcouru ses ruines, en fin d’après-midi, sous une belle lumière chaude et dans un calme absolu qui invitait à la méditation.

Angkor Vat 
Délicieuses apsaras à Angkor Vat.  
Angkor Thom, porte de la Victoire 
Angkor Tom, porte sud 
Scènes bucoliques sur un bas-relief du Bayon 
Sourire énigmatique d'Avalokiteshvara sur une des 54 tours du Bayon 
Sanctuaire central du Preah Khan. 
Ta Som  par la chaude lumière d'une fin d'après-midi
Prasat Krol Kô 
Une "shivaïte" au temple de Thommanon
Angkor Vat vu de Phnom Bakheng 
Angkor Thom, Le Baphûon 
Angkor Thom, le Phimeanakas 
Banteay Samré 
7
fév

A une vingtaine de kilomètres au nord d’Angkor, se trouve l'un des joyaux angkoriens par la délicatesse et la richesse de sa décoration sculptée : il s'agit du temple hindou dédié à Shiva de Banteay Srei, la « citadelle des femmes », sans doute ainsi nommé à cause de sa beauté. La couleur mordorée de la pierre, latérite et grès rose, ajoute au charme. Nous avons résolument eu un coup de cœur pour ce monument. C’est ici que nous avons vu les plus beaux linteaux. Mais nous y sommes allés un week-end, et il y avait déjà sur place un important groupe de Thaïlandais. Nous ne sommes pas partis assez tôt ce matin-là ! Quand nous sommes repartis, moins d’une heure plus tard, il y avait déjà une file d’attente à l’entrée du gopura oriental. Il faut arriver très tôt, car le circuit est court et le lieu exigu.

Les paysages ruraux des alentours et les maisons traditionnelles sur pilotis ont aussi un certain charme. Moins de pittoresque, mais confrontation à une tragique réalité ce monde au Musée des mines terrestres du Cambodge de M. Aki Ra, dont j’ai souligné l’intérêt précédemment. Pour la visite, nous avons été accompagnés par l’un des responsables de cette ONG, un vétéran d’origine californienne de la guerre du Vietnam (la « guerre américaine », selon l’expression locale), une personne traumatisée psychologiquement et qui a décidé avec son épouse de s’investir corps et âme dans cette action entreprise par Aki Ra. Les dons sont les bienvenus.


8
fév
Kok Ker 

Nous consacrerons la journée entière à la découverte des trois sites angkoriens plus ou moins éloignés que nous atteindrons en voiture. À trente minutes de route : les temples de Roluos ; à une heure de route : Beng Mealea et le site très reculé en pleine forêt de Koh Ker, situé plus au nord dans la province de Preah Vihear, à plus de deux heures de route (127 km de Siem Reap). Nous ne verrons pas Kbal Spean, la rivière aux mille lingas, non pas par manque de temps, mais parce que d’une part la saison ne s’y prêtait pas trop (rivière à sec) et d’autre part l’accès n’est pas facile.

Koh Ker

La voiture vient nous prendre à l’hôtel aux premières heures de la matinée car la route sera longue pour atteindre l’ancienne capitale khmère de Koh Ker (au Xe siècle). Le paysage est assez monotone et la forêt a fait place à quelques cultures. La cité fut construite par le roi Jayavarman IV, faisant du style de Koh Ker, un style angkorien spécifique. Le Prasat Krahom, le temple rouge, entouré de son bassin est très ruiné et envahi par la végétation. En revanche le Prasat Thom, le temple principal de 30 mètres de haut est une pyramide de sept étages bien conservée qui fait du lieu le monument principal. On peut désormais accéder à son sommet au moyen d’une solide volée d’escaliers métallique récemment aménagée. De là on bénéficie d’une vue étendue sur la campagne et les forêts avoisinantes. Il y a d’autres temples dans les environs. Le secteur a été miné et si les temples ont été sécurisés, la prudence s’impose et il ne faut pas s’écarter des sentiers.

Beng Mealea

Sur la route du retour, nous nous arrêtons au temple de Beng Mealea, un temple mystérieux, un chaos de pierres envahi par les gommiers et autres arbres. Les sculptures des linteaux enserrés dans la végétation exubérante témoignent d’une splendeur passée. Ces ruines dégagent une atmosphère dramatique et l’on comprend que Deux Frères, le film de Jean-JHacque Annaud, ait été tourné ici.

Le groupe de Rolûos

Au sud de Ben Mealea, nous terminerons la journée par la visite des trois temples préangkoriens de Roluos, datant du IXème siècle : le Bakong, le Prah Ko et Lolei. Ici la brique domine, d’où les tons chauds de ces monuments sous la lumière de cette fin d’après-midi. L’édifice le mieux conservé est le Bakong, le premier temple montagne préangkorien.

Prah Ko 
Prah Ko  
Rolûos, la tour centrale du Bakong 

L’excursion à Koh Ker, si on en a le temps, est à recommander, mais il sera nécessaire de louer une voiture avec chauffeur, car il n’y a pas de transport public

10
fév
10
fév

C’est le dernier jour, celui du retour. Avant de reprendre l’avion, nous décidons de consacrer notre dernière matinée à revoir Siem Reap, que nous avions entrevue lors d’une fin de journée quelque temps auparavant. La veille au soir nous avions participé à un dîner-spectacle de danse khmère sur les conseils de notre guide. Les spectacles de ce genre ne manquent pas à Siem Reap. Celui-ci était de qualité honorable et nous étions ravis de notre soirée.

La ville de Siem Reap nous a paru moins frénétique que la capitale et surtout plus propre. C’est une ville entièrement dédiée à l’industrie touristique, qui compte des centaines d’hôtels de toutes catégories, de chambres d’hôtes, de restaurants, bars branchés et boîtes de nuit. Elle n’a pas grand-chose à offrir au visiteur hormis le musée « national » d’Angkor (en réalité un musée privé), que nous ne sommes pas allés voir. Nous avons visité la pagode très kitsch Preah Peom Reath ainsi la pagode Vat Bo, un peu à l’écart, mais plus intéressante, car elle est dotée de belles peintures murales de la fin du XIXe siècle, bien préservées.

La pagode Preah Peom Reath 
La pagode Vat Bo 

Après un rapide tour du vieux marché (Psar Chaa) sans grand intérêt, nous décidons d’aller visiter les ateliers des « Artisans d’Angkor ». C’est une entreprise cambodgienne à vocation sociale qui offre à des jeunes en difficulté l’opportunité de se former à un métier artisanal (sculpture sur bois ou sur pierre, peinture sur soie, travail de la laque, dinanderie). Il y a aussi une autre dimension à cette activité, celle de participer à la renaissance des savoir-faire traditionnels de l’artisanat khmer. Les objets fabriqués sont de très grande qualité car il y a un contrôle drastique, et évidemment les prix sont plus élevés qu’ailleurs, mais il ne faut pas oublier que le but premier est de garantir à quelque 800 artisans emplois et avantages sociaux (couverture médicale par exemple) et que les profits sont réinvestis à cette fin. La visite est guidée et une vaste boutique propose à la vente de nombreux articles. Avec la pagode Vat Bo, ces ateliers sont ce que nous avons le plus apprécié à Siem Reap.

En début de soirée, un taxi nous prend en charge à l'hôtel pour nous emmener à l’aéroport. Le retour vers Paris s’effectuera via Ho Chi Minh Ville sur des vols de Vietnam Airlines. Un voyage de dix-huit heures au total, dont trois heures d’escale très agréable à HCMV. Ponctualité et service à bord impeccable, un voyage de retour parfait.


Nous sommes revenus enthousiasmés par ce voyage qui fut d'une grande richesse par sa diversité. Nous avons pu découvrir une nouvelle culture, la culture khmère, très différente de la civilisation vietnamienne, même s'il y a des interdépendances, ne serait-ce que par la présence de minorités dans chaque pays de part et d'autre de la frontière. Redécouverte également de deux écoles du bouddhisme : le bouddhisme mahāyāna (au Vietnam) et le bouddhisme theravāda. Au Cambodge, nous avons vu un pays très pauvre et quelque peu sous perfusion, ainsi que le montre la présence d'innombrables ONG et de fonctionnaires des institutions internationales. En revanche le Vietnam nous est apparu comme un pays très industrieux et dynamique.

Bas-relief du Bayon à Angkor 

Certes, nous n'avons pas tout apprécié, en particulier les deux métropoles, le flot incessant des motos à Saïgon (c'est ce que je supporte le moins au Vietnam), les détritus qui s'accumulent un peu partout, dans les rues de Phnom Penh, dans les canaux du delta, etc. Nous n'avons pas non plus été éblouis par les paysages ruraux cambodgiens, peut-être est-ce à cause de la saison sèche. Quoiqu'il en soit, ils sont loin, très loin de rivaliser avec les paysages vietnamiens (surtout au nord) et laotiens. Enfin la sévère intoxication subie par Chantal fut le gros point noir de notre séjour.


Le lotus, symbole bouddhiste 

Mais ces désagréments sont très largement compensés par moult bonheurs. En effet, ce voyage n’aurait pas été aussi fabuleux sans avoir vécu l'ambiance familiale du gîte rural Nam Hien ou assisté au spectacle de cirque donné par de jeunes artistes à Battambang. Nous aurions vraiment manqué quelque chose sans les balades en bateau vers les marchés flottants du delta ou dans la réserve ornithologique du Tonlé Sap. A Siem Reap, la visite des ateliers et de la boutique des « Artisans d'Angkor » nous a permis de rapporter des articles de qualité. Et bien sûr, le point d’orgue de ce périple, nonobstant les hordes indisciplinées, ce fut la visite guidée des temples d'Angkor qui à eux seuls valent le voyage.

Ce beau voyage, nous le devons à nos guides, ainsi qu'à Laetitia de l’agence Mékong Villages (*), basée à Hô Chi Minnh-Ville. Mais nous le devons aussi et surtout aux sourires des Vietnamiens et des Cambodgiens. Des sourires beaucoup plus chaleureux que le sourire distant d'Avalokiteshvara sur les tours du Bayon. Des sourires qui furent une vraie parenthèse dans la morosité ambiante de notre hiver.

L'un des 216 visages au sourire distant du Bayon à Angkor