Départ de l'Europe en février, période de difficultés, avec des doutes, le froid, un vent constamment défavorable et les douleurs physiques. Un cap qu'il fallait passer.
Février 2018
240 jours
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1
fév

Et voilà, nous y sommes. Sauf imprévu, le grand départ sera lancé demain avec une première étape à Château Thierry. Le moment est venu de faire les derniers achats, le bilan matériel, l'argent etc.

La tension monte, mais pas le temps d'être stressé. Le fait d'être constamment dans l'action a cet avantage intéressant de nous recentrer sur le présent. Le futur est le futur. Pas le temps de se projeter... d'autant plus que j'ai déjà fait ça pendant 3 mois !

Le vélo est fin prêt, il a eu droit à une magnifique customisation camouflage pour passer inaperçu en forêt, je vous laisse juge:

 Il ne manque plus que les bagages !

Au niveau matériel, il a fallu faire des sacrifices, le poids du vélo avec les sacoches approche les 40 kg. Il a été difficile de supprimer le superflu sachant qu'il me fallait du matériel de réparation, de santé, de la réserve de nourriture, de quoi tenir des températures extrêmes dans les deux sens, du matériel pour bivouaquer de manière respectable et de quoi faire bonne figure lors des sorties en ville (c'est peut être cette partie que j'ai sacrifié)

Tout n'est pas sur la photo floue ci-dessus. Manque les aliments, des vêtements, un sac de couchage, etc.

Le départ est prévu demain en fin de matinée. Rendez-vous demain soir pour le récit de ma première journée!

2
fév

Étape 1

Nombre de km: 50 (c'est une approximation car mon compteur était mal installé pour le premier jour, problème réparé)

Aujourd'hui fût ma toute première étape qui n'est pas partie de Paris comme le laissait présager mon programme. En effet, mon père a eu la gentillesse de me proposer de me sortir de Paris en voiture. Résultat, départ des alentours de Meaux pour un trajet divisé par deux. C'est léger mais ça permet de se mettre dans le grand bain en douceur, et de se roder un peu avec son vélo, prendre ses marques, repérer les premiers problèmes. Une journée qui a bien rempli sa mission.

Moi au moment du largage aux alentours de Meaux 

Le trajet s'est plutôt bien passé excepté beaucoup de pluie, ce qui m'a permis de bien tester l'étanchéité de mon matériel ! Autre problème, les déviations partout à cause de la crue de la Marne, j'ai du rouler 15km de plus pour éviter de tester le côté amphibi de mon destrier. Voir si dessous l'état de la Marne...

La Marne en crue 

Sur la route j'ai réalisé que porter plus de 40 kg n'allait pas être facile tous les jours, et le dos commence à se faire sentir, mais le corps s'adapte, on verra demain comment ça se passe.

Je suis arrivé tout de même vivant à château Thierry, jolie petite bourgade le long de la Marne, et je passe la nuit chez une habitante locale, Marine, professeur d'anglais dans la région (mais originaire de Bordeaux).

Mon arrivée à Château Thierry 
3
fév

Nombre de km : 100,5

Ouff... Pas fâché d'arriver à bon port! La route était longue, vallonnée (au début) et vraiment éprouvante. Les 100 km d'aujourd'hui étaient un premier test... et bien demain je vais y aller plus en douceur, le temps que mes articulations commencent à comprendre qu'il se passe quelque chose et qu'il va falloir être au rendez-vous !

Comme la veille j'ai longtemps longé la Marne en crue, j'étais même pendant 30 km sur un petit bras de terre entre le canal de la Marne et la Marne elle même.

Champagne oblige, j'ai eu la chance de longer des kilomètres de vignes à perte de vue sur le versant orienté sud des collines longeant la Marne.

Par la suite, au rayon des faits divers, un monsieur fort sympathique m'a offert un café chez lui sur la route (il se reconnaîtra, je lui ai donné l'adresse de mon blog). Premier gros problème technique du voyage, ma sacoche avant droite s'est tout bonnement détachée, cassée net! Par chance la personne qui m'héberge ce soir, Florent, est bricoleur et m'a réparé ça. Espérons que ça tienne !

Anecdote intéressante aussi, Florent habite au bord du canal latéral à la Marne. Et bien sa cave est grâce aux crues une superbe piscine d'appartement !

L'entrée de la piscine 
4
fév

Nombre de kilomètres : 55 km

J'ai commencé ma journée en étant plus prudent que la veille. 100km par jours semble difficile à réaliser pour l'instant avec 40 kg à porter. Je vais donc attendre de prendre le rythme, attendre aussi que mes genoux soient moins douloureux. Je suis donc parti vers 13h de chez mon hôte.

C'était une très mauvais idée... Vous allez comprendre pourquoi.

Le début de la route s'est déroulé sans encombres en longeant le canal, malgré des chemins boueux bien moisis pour la première moitié de la route.

Pour la deuxième moitié, j'ai eu la fausse bonne idée de prendre la N4 qui allait direct à saint Dizier. Échec cuisant. J'ai été mis en confiance par une bande d'arrêt d'urgence qui avait l'air de ne pas s'arrêter, jusqu'au moment où il n'y avait quasiment plus de place pour moi, avec des véhicules qui passaient à 110km/h à côté de moi. Et à ce moment là, au moment où j'allais m'engager dans la zone sensible, ma roue arrière à tapé violemment une grosse pierre pointue. Et j'ai crevé. Ça m'a pris 1h de réparer tout ça. Cette crevaison, je me demande même si ce n'est pas mon ange gardien qui l'a provoquée, car pas la suite je suis descendu prendre une petite route parallèle en sable. Une route sûre, mais épuisante.

L'épisode de la crevaison 

Au bout de compte j'arrive à la nuit tombée à Saint Dizier sans hébergement, un froid polaire, et surtout plus moyen de dormir en forêt quand il fait déjà nuit. J'ai l'idée de demander au commissariat de police si ils ont il un local, une salle à me prêter pour que je puisse avoir un toit et un peu de chaleur, ils m'ont dirigé vers le foyer d'accueil de la ville. Un lieu qui ressemble un peu à l'ambiance dans une prison, on se regarde de loin, les gens se rassemblent par communauté, et on surveille ses affaires. Tout le temps ! J'ai dîné là bas avec des camarades improvisés et maintenant je partage ma chambre avec une personne qui comme moi n'est ici que de passage. C'est amusant car ce matin je me voyais partout mais pas là!

La douche et ma chambre, youpi 

Demain, je pars de bonne heure pour dormir à mi-chemin entre ici et Nancy. Ce sera sans doute dans la forêt donc ne vous étonnez pas si il n'y a pas de publication.

6
fév

Nombre de km : 72

J'aurais du écrire cet article hier soir mais j'étais dans un tel état de fatigue physique et psychologique que je préfèrerais faire ma première vraie bonne nuit depuis mon départ. Aujourd'hui est une journée de pause pour économiser mes genoux et repartir demain pour Nancy et y faire un vrai stop de quelques jours pour diagnostiquer mes problèmes aux genoux et prendre le temps de les remettre en état.

Mais revenons à la journée d'hier. Je crois pouvoir dire que c'était la journée la plus éprouvante physiquement, douloureusement, et psychologiquement de ma courte existence. J'ai quitté Saint Dizier sur un petit tapis de neige, ensuite tout n'était que côtes, descentes, côtes, descentes, accompagnées d'un vent glacial d'est, donc très défavorable ! En haut des plateaux, sans une habitation à vue, avec le vent et le froid, plus des douleurs aux genoux qui deviennent insupportables, il faut avoir les reins et la tête solides !

Ici c'était roule ou crève 

J'ai eu tout de même une belle surprise dans ma journée car il y en a toujours, j'ai trouvé refuge pour déjeuner dans une sorte de squatt dans un village avec toute une communauté de hors la loi qui luttaient contre un projet d'enfouissement de déchets nucléaires dans la région. Une joyeuse bande de baba cools qui à un moment donné on cru que j'étais un gendarme infiltré (ma manière de parler peut être trop structurée à leur goût). Ça aurait pu mal tourner mais ils ont été finalement très accueillants, m'ont expliqué leur combat, l'enjeu politique international de leur engagement. Etc.

"la maison de la résistance à la poubelle nucléaire" 

Anecdote intéressante. La plus jeune du groupe (environ 14 ans), avec sa fraîcheur et sa naïveté commence à m'expliquer qu'elle a jeté des cailloux aux gendarmes, quand un homme plus mur du groupe la corrige autoritairement en disant : "non... Quelqu'un a jeté des pierres ! Ne dis jamais que c'est toi !" Bref un groupe assez organisé, sympathique et marginal que je n'aurais jamais imaginé rencontrer quand j'ai quitté St Dizier hier matin !

Autre satisfaction, j'ai été accueilli hier soir, et ce soir aussi par une maman qui s'occupe avec courage de 3 adorables bambins dans un petit village. (Trouvée par le site Warmshower). Résultat, je profite de ce foyer accueillant pour récupérer un peu aujourd'hui et repartir demain pour Nancy (comme expliqué plus haut).

J'ai donné ce matin un petit cours de géographie aux enfants qui n'avaient pas école à cause de l'alerte neige. 

PS: je m'excuse d'avance pour les éventuelles fautes d'orthographe, mais le clavier de mon smartphone à tendance à corriger les mots sans mon consentement, d'où parfois des mots qui n'ont plus trop de sens! Et je n'ai pas toujours de temps de me relire. Merci de votre indulgence.

8
fév

Nombre de km : 54

La route d'hier a été heureusement beaucoup plus facile que la précédente, même si des côtes interminables ternissaient la fin de mon parcours pour bien me faire comprendre que mes genoux devaient se faire soignés ici, au plus vite !

Ça va être le cas. Au moment où j'écris ces lignes, je suis dans la salle d'attente d'un médecin de Nancy.

Pour revenir plus en détails sur ma journée d'hier, j'ai fait des adieux déchirants à cette adorable famille qui a eu la générosité de m'accueillir pour 2 nuits, et je me suis mis en route, sous quelques flocons de neige, prêt à avaler sans broncher les derniers km avant le repos Nancéien.

La route m'a fait passer par la jolie ville de Toul (Ville natale de mon grand-père).

La cathédrale de Toul  

J'en ai profité pour me reposer dans un Buffalo Grill de centre commercial... Rien de très engageant me direz-vous, mais c'était pour moi un lieu d'un confort et d'une délectation sans précédent après la route que je venais de faire. On apprend très vite à relativiser dans les difficultés. Un bon burger a su me combler de bonheur. Un bonheur qui aurait pu être parfait si le bruit de fond n'était pas constamment ponctué par les "pas de soucis" des serveuses en guise de "je vous en prie". Comme si le patron leur avait toutes dit au moment de leur formation de prononcer cette phrase pour bien mettre le client mal à l'aise. "Pas de soucis"... Mais encore heureux qu'il n'y ait pas de soucis, c'est le minimum que l'on puisse espérer ! Je suis confus de m'énerver sur ce genre de détails périphériques mais on a beau être en situation de survie, certains atavisme ne peuvent pas s'effacer si facilement !

Ma récompense du déjeuner 

Après cette pause culinaire de haute volée, je suis reparti pour Nancy. Une fois arrivé sur place, fourbu mais heureux, je me suis posé quelques temps dans un bar PMU de quartier véritablement, magnifiquement ringard. Rien à voir avec les milliers de bar faussement vintage qui essaiment la capitale pour séduire une clientèle parisienne toujours plus en quête de sens et d'authenticité. Ici tout sentait bon les années 70, dans son jus. Le bar à même pris le temps de bien macérer dans son propre jus, pour arriver là en 2018, superbement anachronique, tout de bois plus sali qu'usé, un baby foot qui propose toujours une partie à 2 francs, des tables qui font plus grandes tables de cantine que les tables individuelle à la Starbucks. Si les patrons n'étaient pas si concentrés à insulter le canasson qui ne trottait pas avec la grâce que ces subtiles personnages étaient en droit d'exiger, je leur aurais volontier posé quelques questions sur l'histoire des lieux.

Mon bar PMU refuge 

Au final, j'ai atterri pour la nuit dans une sympathique colocation avec qui j'ai pris un apéro chaleureux, invité par Manon par le biais de Warmshower (qui à mes yeux est en train de suppléer Couchsurfing!)

Petit aperçu de Nancy la nuit. Pas mal. 
12
fév
12
fév

Mon séjour à Nancy touche à sa fin, j'attends le train qui va me porter à Strasbourg (et oui, l'objectif zéro budget transport est déjà à l'eau mais il faut encore que je repose mes genoux et que je rattrape le temps perdu).

Il est donc l'heure pour moi d'un bilan de cette petite semaine à Nancy. Pour commencer sur le plan médical, j'ai fait des radios et échographies hier qui n'ont pas appris grand chose à part des bonnes nouvelles: rien de cassé et rien d'alarmant. Mais au centre de radiologie, le radiologue a été tellement intéressé par mon histoire qu'il est revenu me voir juste avant que je parte pour me donner le contact d'un de ses confrères, médecin du sport et spécialiste du genou. Il a insisté pour que je fasse le forcing, que j'appelle de sa part, pour pouvoir le voir le jour même ! J'ai fait ce qu'il m'a dit, j'ai été reçu 40 min plus tard par le Docteur Grosse que je remercie chaleureusement (il se reconnaîtra, il a insisté pour avoir l'adresse du blog). Très sympathique, il a pris le temps d'écouter avec intérêt mon histoire malgré la consultation entre deux rendez-vous. Le bilan, si j'ai bien compris, c'est un syndrome de l'essuie glace au genou droit et un genou gauche avec tendinite pour compenser la douleur au droit. Bref une inflammation du tendon latéral du genou, (docteur, si vous lisez ces lignes, n'hésitez pas à rectifier dans les commentaires si il y a des erreurs d'interprétation). Cela est du à une mauvaise posture sur le vélo, mauvais réglage de selle (hauteur, profondeur). Parfois ça se joue au millimètre près quand il s'agit de rouler sur des centaines de km. Je peux repartir sur les routes dès que je me sens mieux avec mon genou, ce n'est pas encore tout à fait le cas, même si ça va déjà mieux.

Mais trêves de bavardages, il faut que je vous montre quelques photos de Nancy, car celle ville ne se résume pas juste à la place Stanislas !

Un vieux Nancy bourré de charme  

Pour les amateurs d'architecture, une petite balade dans le centre mais aussi les faubourgs de Nancy vaut le coup d'œil. Notre regard croise très régulièrement de belles maison style art nouveau et même de vielles bizarreries inclassables au hasard d'une ruelle.

Je ne peux pas parler de Nancy sans remercier ceux et celles qui m'ont accueilli généreusement sur place. Je suis resté 3 nuits chez Sébastien, un sympathique étudiant alsacien, et 3 nuits chez Manon et ses colocataires. Manon a été ma petite maman de Nancy, m'a préparé à manger, fait visiter la ville et m'a même servi de psy pendant de longues discussions d'une rare profondeur.

La vue de ma chambre et Manon  
Une petite surprise au réveil de la part de ma petite "maman de Nancy" 

En bref un séjour reposant à Nancy et des belles rencontres humaines ! Mes 2 prochaines nuits seront à Strasbourg, et ensuite c'est le 2ème grand départ à vélo !

14
fév

Comme précisé lors de mon précédent article, j'ai triché pour arriver à Strasbourg... Et oui, j'ai pris le train pour m'économiser encore et rattraper un peu le temps perdu. Pas de romans interminables aujourd'hui, ni de problèmes existentiels, juste de belles photos de Strasbourg sous un magnifique soleil, car il ne faut pas oublier que ce voyage est avant tout un plaisir !

Strasbourg  

J'avais oublié à quel point cette ville est magnifique. Et la cathédrale, clou du spectacle, est aussi belle qu'impressionnante, en se dévoilant au hasard des ruelles.

La cathédrale  

J'ai dormi ces deux nuits Strasbourgeoises chez un couple de cyclistes (Nicolas et Lydie) originaires de Bourgogne, en partageant la joyeuse ambiance de leurs colocataires. L'appartement est sous les toits, avec une vue sur ma cathédrale préférée, y'a pire.

La vue de ma chambre 

Demain, départ de bonne heure à vélo pour l'Allemagne. Après un faux départ, le voyage peut enfin commencer sur de bonnes bases !

15
fév

Nombre de Km : 80

Une journée très importante car c'était le nouveau grand départ. Autrement dit : le nouveau grand test. Et bien les genoux ont tenu le choc mais ils restent assez douloureux. J'ai décidé de continuer mais de faire moins de kilomètres demain.

Ce matin, j'ai eu un sentiment partagé entre joie et frayeur de voir un modeste tapis de neige sur les toits de Strasbourg. Ca n'a finalement posé aucun problème sur la route.

La route était une partie de plaisir ! J'ai rapidement franchi le Rhin, et en tant que cycliste j'ai très vite ressenti que j'étais arrivé dans un pays ami des gens comme moi. J'ai longé la route nationale sur la quasi totalité de mon chemin, et elle était constamment bordée, non pas de pistes cyclables, mais de véritables routes pour vélos ! J'en étais le souverain incontesté !

Un route cyclable pour moi, et moi seul
Et en plus la route n'est pas désagréable ! 
Des pauses bien méritées 

Alors que c'était tout plat sur l'ensemble de la route, il m'a fallu rassembler mes dernières forces pour la côte finale qui m'a amené chez mon hôte Tobias, qui vit ici avec son amie et leur enfant. Une rencontre très agréable, toute en simplicité et en partage. En plus il maitrise avec talent la langue de Molière !

Tobias et moi... oui, j'ai l'air gros sur cette photo mais c'est l'angle qui fait ca, et la barbe aussi peut être...
16
fév
16
fév

Nombre de km : 80

Nouveau record de vitesse : 55 km/h

Au moment où j'écris ces lignes, je suis dans une petite ville au sud de Stuttgart chez des hôtes qui ont sauvé ma nuit hier soir, je fais donc une pause aujourd'hui après une journée d'hier ensoleillée mais très difficile pour les jambes et pour les nerfs ! En voici le récit.

Une matinée entre collines, forêts et villages de charme  

Je suis parti vers 9h du matin dans l'idée de rouler modestement. 40 km maximum. J'ai bien roulé jusqu'à Pforzeim, où j'ai fait une belle pause déjeuner. Puis le ciel a commencé à se dégager, le soleil a décidé de m'accompagner, il a su éclairer ma route et réchauffer mon cœur. Ça fait un bien fou. Et j'en avais besoin car ce jour était le contraire absolu de la veille. De toute la journée je n'ai jamais eu une route plate... Jamais. C'était en continu des côtes interminables et des descentes vertigineuse, le tout sur une route secondaire extrêmement empruntée ! Hélas peu de pistes cyclables cette fois, donc il fallait constamment serrer au maximum de bord de la route, tout en gardant le guidon droit malgré la côte qui n'en finit pas. Un véritable numéro d'équilibriste usant pour les nerfs et pour les jambes.

Oui, il y avait tout de même quelques routes pour vélo, c'est l'Allemagne quand même !  

Ce magnifique soleil me donnait envie de continuer à avancer, le problème était que plus je m'approchais de Stuttgart, plus le challenge me semblait accessible. À 20 km de Stuttgart au début de l'après midi, on se dit que ça n'a pas de sens de s'arrêter dans la forêt, d'autant plus que la ville est grande, que l'on n'aura pas de problème pour trouver un hébergement pour la nuit... Erreur d'appréciation.

La maison mère de Porsche sous mes yeux. Le village du coin est impressionnant de richesse. 1 voiture sur 2 est une Porche !  

J'ai avancé jusqu'à Stuttgart, traversé les premières banlieues, envoyé ça et là des demandes d'hébergement. Pas de réponses. Le soleil baisse dangereusement, le ciel s'assombrit. A ce moment là on a deux choix possibles : choix 1, il faut persévérer, croire en sa bonne étoile et en la générosité des gens. Choix 2, il faut s'éloigner le plus vite possible de l'agglomération et trouver une forêt avant que la nuit tombe. Dans cette situation, c'est intéressant de ressentir la peur et l'insécurité grandir en fonction de la baisse de luminosité naturelle. Comme un réflexe oublié de l'homme des cavernes que l'on a été, mais qui réapparaît très vite en situation de survie.

La nuit tombe dangereusement sur Stuttgart  

Bref, je choisis la première solution, le temps étant trop limité pour quitter la ville et trouver une forêt. Je n'ai aucune réponse à mes demandes sur Warmshower (le fameux site d'hébergement pour cyclistes), et finalement je tente d'appeler directement Veronica, qui avait mis son numéro sur son profil. C'est oui ! À ce moment là on se sent tellement soulagé, c'est agréable de retrouver le plaisir d'avoir un toit pour dormir, ces choses tellement basiques mais qui peuvent dans ces situations être une grâce immense, un cadeau du ciel. La peur s'envole, le cœur est plus léger, le corps moins tendu. Tout n'est que relâchement et bien-être absolu !

Mais ce n'est pas pas fin des difficultés, car l'adresse où je devais me rendre était à 20 km de mon emplacement. Pour faire simple j'étais à l'extrême nord ouest de l'agglomération, et je devais aller à l'extrême sud est. Donc tout Stuttgart à traverser, et surtout une colline à franchir. Une colline qui n'en finissait jamais. Je tapais dans mes réserves depuis déjà quelques km. J'étais tellement épuisé psychologiquement et physiquement, je crois que c'était les 20 km les plus longs de ma vie. J'ai monté cette colline pendant peut être 1h. Mais je suis finalement arrivé à bon port chez Veronica et Georg un couple de voyageurs à vélo et leur bébé qui m'ont tout de suite bien accueilli et mis à l'aise. J'ai même décidé de passer mon samedi ici pour me reposer.

Buddys for life . 
Veronica, qui m'a sauvé la vie hier soir !  

Le plan de demain est de m'arrêter à mi-chemin entre ici et Ulm, puis arriver à Ulm lundi soir et remonter le Danube au moins jusqu'à Belgrade. J'aime ce plan, moins de montagnes en perspective

18
fév

Nombre de km : 45

Oui, 45 km ça a l'air modeste hors contexte mais aujourd'hui ce fut encore un combat sans merci. Un combat contre la neige, contre mon vélo et contre moi même.

Pour commencer, après la journée d'avant hier aux accents printaniers, hier fut le théâtre d'une tempête de neige incessante sur Stuttgart, mais aussi sur toute la région (qui est relativement montagneuse). J'ai eu l'impression de passer du printemps à l'hiver en 24h. Perturbant.

Hier aux alentours de Stuttgart  

Je suis donc parti ce matin avec un beau tapis de 20 cm de neige en guise d'encouragement.

Joli mais pas les conditions optimales à vélo  
De la neige, de la neige et...  Ah oui...  de la neige 

Mon objectif était d'arriver pour 13h dans ce petit village de montagne dans lequel m'attendais Gudrun et Karl avec un bon déjeuner chaud à la clé. Je l'aurai vraiment mérité ! Je savais qu'une côte sans précédent m'attendais mais je ne savais pas dans quelles conditions. Ce furent les pires conditions possibles, toutes réunies ensemble, se tenant la main dans une magnifique farandole de souffrance et de peur.

Pour commencer, un joli panneau bien encourageant avec marqué dessus "Côte à 17, 5% sur 2,5 km" m'a vite fait comprendre que j'allais encore avoir des choses à vous raconter ce soir ! Je mange un Snickers pour me donner des forces (non, je n'ai pas de sponsors), et je m'engage dans cette route sans échappatoire car entourée de glissière de sécurité pour éviter que les voitures tombent dans le vide. Il n'y avait que cette côte de la mort, mes jambes qui commençaient à fléchir, la neige, les glissières, les voitures sans arrêt et aucun moyen de se poser pour souffler. Ça fait du monde me direz vous, mais dans cette situation on se sent bien seul ! Dans ce cas, on crie à s'en briser les cordes vocales pour retrouver des forces (c'est psychologique mais ça aide), on essaye de coller au maximum à droite sans rouler sur la neige sous peine d'être stoppé net et de risquer la chute. Un numéro d'équilibriste bien encouragé par le bruit des moteurs qui devient petit à petit une agression psychologique. Bref, j'avance tant bien que mal quand soudain ma roue arrière se bloque. Difficile à expliquer mais mon dérailleur arrière a décidé de se coincer entre les rayons de ma roue, je ne sais vraiment pas par quel miracle démoniaque ! Et impossible de le débloquer, il était complètement pris entre deux rayons, et tout tordu pour ne rien arranger. Je me voyais déjà porter mon vélo de 40 kg jusqu'en haut de la côte sur cette route de l'enfer car la galère d'avant n'avait pas encore atteint son pic ultime, ça aurait été dommage de s'en priver ! Mais j'ai fini par réparer temporairement le problème en perdant une main au passage, et je suis arrivé chez Gudrun (à 780 m d'altitude) avec le dérailleurs qui fait un peu la tête. On a pu le remettre droit mais il faut changer le câble du dérailleurs et sa gaine, qui sont très endommagés. J'espère ne pas avoir trop de côtes demain car les vitesses qu'il me faut ne répondent plus. Je ferai réparer cela demain à Ulm.

Moi en train de réparer et laver mon vélo. J'aime bien ces photos car on a l'impression que je sais ce que je fais. 

J'ai été extrêmement bien accueilli aujourd'hui par Gudrun et Karl, c'est agréable de sentir que ces gens sont absolument heureux d'accueillir des étrangers chez eux. Il y a encore de l'espoir dans l'humanité.

Gudrun est une grande voyageuse à vélo. Elle a fait un tour du monde seule entre 1986 et 1988. 
19
fév

Nombre de km : 59

L'article est écrit le lendemain, hier j'étais trop fatigué pour me concentrer dessus. Je vais donc l'écrire comme si nous étions hier soir... Enfin je me comprends.

Avant de commencer, j'ai oublié lors de mon dernier article de vous raconter une anecdote. J'ai été interviewé par une journaliste de la presse locale qui s'est intéressée à mon projet, mes raisons et mes impressions de l'Allemagne, de l'accueil sur place... J'ai revu la journaliste ce matin pour un shooting photo in situ, et je suis parti direction Ulm.

Frouaaaaa 

Le début de la route à été très sinueux. Un problème pour les genoux car je n'avais pas encore réparé mon problème de vitesses, j'ai du donc beaucoup forcer dans les côtes, raison pour laquelle les genoux me font vraiment la tête en ce moment. Mais une fois les côtes passées, ce n'était plus que des descentes interminables. Oui c'est sensé être plus agréable en théorie, mais en pratique quand on a transpiré juste avant et que la température est de -5°, le vent glacial de la descente additionné à l'humidité sous notre veste se transforme en un froid glacial dont on n'est pas préparé.

Arrivé à Ulm je passe par un grand magasin de cycles qui trouve le temps de réparer mon câble de dérailleur, 1h30 pour déjeuner. Je reviens voir le travail. C'était parfait, tout est réparé, ils on même laissé un petit mot avec la facture. Un autre journaliste, cette fois du quotidien Sud West Presse aurait appelé à la boutique pour me parler. Je le rappelle, il veut lui aussi m'interviewer. Qu'à cela ne tienne, je lui donne rendez-vous devant la cathédrale d'Ulm. Il s'agissait en fait d'un jeune journaliste très sympathique envoyé par ses supérieurs pour me rencontrer. Son journal avait été mis au courant de ma présence dans la région par cette journaliste qui m'avait rencontré la veille. Et elle savait que j'allais passer dans cette boutique pour réparer mon vélo car je le lui avait dit. D'où le coup de fil bizarre chez le réparateur de vélos ! Les deux articles devraient être publiés dans la semaine.

La cathédrale sous toutes ses coutures  

Par la suite j'ai pris le temps de me balader dans Ulm, voir sa gigantesque cathédrale qui est apparemment la plus haute du monde (160 m). J'ai aussi salué comme il se devait le Danube, car il va être mon compagnon de voyage des 2 prochaines semaine.

Arrivée à Ulm, première rencontre avec le Danube  

J'arrive finalement à la nuit tombée chez Sabine et Erich, un très gentil couples marié qui m'ont offert un excellent dîner, un bon lit douillet, une douche chaude et une très agréable conversation (en français en plus !). Que demander de plus !

Sabine et Erich 
20
fév

Nombre de km: 68

Le Danube ! Ce Danube tant fantasmé, tant attendu tel le messie ! Le voilà ! DANUBE = ROUTE TOUTE PLATE

Mon ex-copain le Danube 

Alors oui, le voilà. Seulement, il y a un problème auquel je n'avais pas pensé. Les fameuses pistes cyclables longeant le Danube ne sont plus des pistes cyclables... Des pistes de ski de font au mieux. Oui, mais moi y'en a pas avoir de skis sous mes roues ! Et voilà, je me faisais une joie immense de rouler sur ces routes du paradis, et j'ai passé la matinée à chercher des pistes praticables, à rouler sur la neige, à faire demi tour, à pester contre dame nature et mettre pied à terre car des mottes de neige verglacées ont eu la chouette idée de se mettre sous mes roues ! Bref, pas tout à fait l'eden que j'avais imaginé. J'ai donc fait le deuil de la piste longeant le Danube et suis retourné à mon traditionnel GPS pour arriver à bon port. Rien de mieux que les bonnes vieilles méthodes de grands mères !

Je commence à faire une overdose de la couleur blanche moi.  

Évidemment la route était plus animée que prévu, toujours beaucoup de neige à éviter, des pièges un peu partout, des petites côtes tout de même, et des jolis villages bavarois qui fleurent bon la tradition, la richesse et le bon ordre des choses (ça n'est pas une critique).

J'ai oublié le nom des villages mais c'était mignon. On me regardait comme une bête de foire, marrant.  

Je suis finalement arrivé sous une forte neige, qui n'augure rien de bon pour demain. J'ai eu la joie d'être accueilli par une famille de Schwenningen, petite bourgade du coin. Le père, Thorsten, est un grand sportif en amateur et fabrique lui même ses vélos. C'est dur tout les jours de quitter des lieux et des personnes avec qui l'on se sent bien, avec qui on partage tant de choses. Ce sont des rencontres éphémères, mais pas assez pour que les au revoirs ne soient pas à chaque fois des pincements au cœur.

Thorsten et sa femme  
21
fév

Nombre de km : 68

Pour commencer, voici une petite photo de la presse locale.

J'en ai déjà marre de signer des autographes à tour de bras...  

Si vous voulez le lien vers l'article sur internet, il existe aussi.

Pour revenir à des choses plus terre à terre. Ce matin a été l'occasion pour la première fois de rouler en binôme pendant 10 km. C'était avec Thorsten, mon hôte d'hier soir qui m'a fait le plaisir de m'accompagner sur la route de son travail à vélo.

Thorsten, un prénom prédestiné à la neige !  

J' ai entamé ma route en solo par la suite, découvert de très jolies petites villes bavaroises, un peu comme hier. J'ai eu surtout la chance d'avoir un vrai soleil, et surtout l'espoir naïf de voir cette neige fondre. Après la série de jolies photos du coin je vais vous expliquer pourquoi je dis cela à propos de la neige... Je vous préviens ça va être palpitant, ne zappez pas !

Ma période blanche  
Sans exagérer, un train est passé à peu près 10 secondes après cette photo 

Tout se passait très bien, le soleil brillait de tout son saoul, la route devenait très belle et peu empruntée, les arbres me faisaient une haie d'honneur, tous le éléments étaient réunis pour que la route soit agréable. C'était trop parfait, bizarre, il devait y avoir un vice caché quelque part. Et bien oui, le GPS a fait des siennes. Il a décidé de me faire prendre des routes enneigées. Au début j'ai accepté le défi, ça restait accessible et la neige était plutôt praticable, ça ressemblait surtout à un raccourci. Non. La route s'enfonçait dans un grand nulle part, la neige se transformait en boue, puis en glace. Quand j'ai compris la supercherie j'avais déjà trop avancé pour tour refaire en marche arrière. J'ai donc été jusqu'au bout de 10 km de neige à moitié poudreuse à moitié glace. Un vrai bourbier. Et pendant cet enfer de 10 km j'ai pu élaborer une petite théorie que je me dois de vous conter. Sur les 100% de puissance dégagée par les jambes sur cette route, 80% sont perdus.

- 30% dans les zigzags destinés à retrouver un équilibre en constante instabilité.

- 25% dans le patinage constant de la roue arrière.

- 25% dans le freinage naturel d'un vélo de 40 kg dans cette purée qui aimante toute forme de corps en mouvement.

Et je ne vous parle pas du dos, qui encaisse sans jamais se plaindre. Oui, les vibrations de la route ont tendance à venir mourir au bas du dos, si on aime la douleur ça passe bien, sinon tant pis.

L'enfer blanc, même les chevaux sont dans le thème. 

Je suis finalement arrivé à Ingolstadt, très jolie petite ville.

Ingolstadt  

J'ai été accueilli ce soir par un jeune couple, Geneviève et Alex. Elle est canadienne et lui allemand. Anecdote amusante, il a appris le français au Québec. Il a donc un fort accent québécois... Pour un bavarois, c'est pas banal ! Ils sont très sympathiques tous les deux, elle m'a même fait des straps pour mes genoux qui continuent à me faire très mal.

Bérengère et Alex 
22
fév

Nombre de km : 82

Petite introduction tout d'abord, je me suis arrêté deux jours à Ratisbonne pour laisser reposer mes genoux qui sont plus douloureux que jamais. Ce récit sera donc celui de mon trajet de jeudi et ma journée de visite d'hier à Ratisbonne.

Chaque jour est un nouveau combat. Je suis parti d'Ingolstadt avec les genoux déjà douloureux, mais dans l'espoir candide que la route sera clémente avec moi. La difficulté du jour sera d'éviter les reliefs quitte à faire des détours... Finalement les reliefs auraient été un moindre mal.

Ca commence à fondre, espoir ! 

Je commence à apprendre dans cette aventure que quand les choses semblent trop faciles, il y a forcément un événement, un hasard, la nature, qui sera bien là pour me rappeler que ce voyage ne sera pas un plaisir. Il est vrai que ce n'étais pas le but principal, sinon je serais parti dans les Seychelles pour siroter des cocktails devant une mer turquoise. Mais le plaisir n'est pas forcément enrichissant ni source d'expérience. En bref, je connais les règles du jeu et je les accepte: aujourd'hui, le dieu Eole a décidé de me prendre par la main et de m'emmener tout droit en enfer, et je l'ai suivi sans broncher, car le vent ne se dompte pas, c'est lui qui prend le contrôle de notre monture et surtout de notre tête. Si le vent a décidé de nous rendre fou, on se surprend à l'insulter dans toutes les langues à en perdre la voix ! Un vent d'est / nord est. Exactement ma direction. "JE RELÈVE LE CHALLENGE !" lui disais-je en m'égosillant.

Première rencontre avec la vraie véloroute le long du Danube.
Ne jamais se reposer le long de la route en Allemagne, les voitures s'arrêtent immediatement pour vérifier qu'on se porte bien 

Challenge relevé, mais à quel prix ? Les genoux me faisaient tellement mal à la fin de la journée que je pouvais à peine marcher. La fin du parcours aura été magnifique mais extrêmement douloureuse, ce vent ne voulais vraiment pas me voir entrer dans Ratisbonne, et moi j'espérais que derrière chaque colline contournée se trouvera la libération, la terre Sainte. Je suis arrivé après la tombée de la nuit.

Quand cette boule de feu jaune se cache derrière l'horizon, ça veut dire qu'il faut hâter le pas. 

J'ai donc décidé de prendre encore plus de retard et de me reposer 2 jours dans cette charmante ville de Ratisbonne, classée au patrimoine mondial de l'UNESCO et épargnée par les bombardements de la fin de la 2e guerre mondiale. (ce n'est hélas pas le cas de beaucoup de villes allemandes). Je ne vais pas entrer dans de longues explications sur cette ville, bien qu'elle le mérite, mais mon blog n'a pas pour vocation d'être un guide touristique.

Ratisbonne

Je reste donc 3 nuits chez Lui (c'est son prénom) et ses colocataires, tous très sympatiques et accueillants.

25
fév

Nombre de km : 54

Aujourd'hui est une étape très spéciale : beaucoup de chance, peu de fatigue, un grand soleil, et une journée de repos. Oui mais il y a tout de même 54 km qui ont été avalés. Mais par quel prodige, me direz vous !

Et bien voilà, j'ai eu une invitation d'un hôte très sympathique à Bogen. Nous allons l'appeler Dominik, ça tombe bien, c'est son vrai prénom. Il m'explique donc que je suis le bienvenu chez lui, seulement il y a un hic, il va passer la journée à Ratisbonne et ne sera rentré qu'à 18h. Mon sang n'a fait qu'un tour... L'occasion était trop belle pour ne pas la saisir ! J'avais cette chance offerte sur un plateau d'économiser mes genoux encore 1 jour de plus sans perdre de temps sur mon programme. Je lui ai demandé poliment si il y avait la place dans sa voiture, la réponse était oui. Lieu de rendez vous fixé. Plus qu'à profiter à fond de ma dernière journée à Ratisbonne !

Au passage j'ai assisté à une magnifique messe à la cathédrale sublimée par une superbe chorale d'enfants.

Visite du Valhalla avec mes amis bavarois.  C'est un Temple néo-classique, sorte de Panthéon des anciennes figures de l'Allemagne.
Rien de mieux que les berges du Danube pour profiter d'un bon dimanche ensoleillé  

Après avoir bien profité de Ratisbonne je me lance en voiture pour les 50km que j'aurais du faire à vélo. Dominik a bien profité de la portion non limitée de l'autoroute pour s'autoriser un petit 190 km/h de moyenne. Et moi de faire mon blasé, j'ai tout de même été entraîné à bonne école à l'époque bénie où c'était encore possible en France.

Dans la BMW de Dominik 

Et un grand merci à mon hôte de ce soir, qui m'a très généreusement épargné 50 km sous -7° et un vent d'est.

Autant vous dire que demain va être spartiate. Départ sur la route à 7h30 sous une température de -11° et un vent défavorable (selon la météo) sur plus de 80 km jusqu'à Passau à la frontière autrichienne. Je préfère prévenir car j'aurai demain sûrement des choses à raconter plus palpitantes qu'aujourd'hui !

26
fév

Nombre de km : 82

Quelle déception ! Je croyais que cette journée serait un véritable calvaire, la route de la mort, l'enfer sibérien... Ça s'est finalement relativement bien passé ! Je suis même arrivé vers 14h à Passau, j'avais toute l'après midi pour faire un peu de tourisme et quelques courses. Mais ne nous méprenons pas, ça n'a pas été non plus un long fleuve tranquille comme mon camarade de route qui me suit déjà depuis quelques jours !

La vue de ma chambre ce matin, ce satané fleuve ne me lâche pas d'une basket !  
-13,5° au compteur. Le décor est planté.  

Petite surprise en partant ce matin à 7h30, le thermomètre de mon compteur marque -13,5°, je m'attendais plutôt à -11° mais aléa jacta est ! On y va !

Alors effectivement le froid s'est vite fait sentir, les bouts des doigts font mal (pieds et mains), la condensation de la respiration se transforme vite en glace sur l'écharpe, qui devient toute rigide (c'est rigolo mais assez désagréable quand on est dehors pendant presque 7h d'affilée), le frond et les oreilles commencent à être douloureux à cause du vent... Ceux qui ont déjà fait du ski et qui sont restés bloqués 15 min sur un télésiège à la merci du vent et de la neige comprendront. Bref, on a beau être préparé physiquement et psychologiquement, ça pique quand même un peu.

Peut être que ça se voit, j'avais de la glace dans la barbe en arrivant à Passau. 
Certaines zones du Danube étaient même gelées  

Une route aujourd'hui frappée donc du sceau du vent et du froid glacial, mais au final assez tranquille car je crois avoir trouvé la solution à mon problème de genoux ! On m'avait déjà dit sur mon parcours que ce qui est mauvais pour les articulations c'est le froid, et bien franchement je ne pensais pas que c'était vrai à ce point. Mon hôte et ami de Ratisbonne, Lui (Ludwig de son vrai prénom) m'a gentiment donné de vieux protèges genoux de base-ball en pensant que ça tiendrait un peu mieux mes genoux au chaud. Je les ai mis un peu sans trop y croire, mais le résultat m'a laissé sans voix ! En plusieurs dizaines de minutes, presque plus de douleurs au genoux droit ! Et ce soir je les ai enlevés pour me promener dans la ville, la douleur est revenue. C'était si simple que ça, juste tenir les genoux au chaud et basta ! Je prie pour que demain cette épiphanie ne reste pas un épi-phénomène (jeu de mots). Bilan des courses demain soir à Linz (Autriche).

Petite pause déjeuner avec mon "à nouveau copain" le Danube. Il n'est pas bien bavard mais c'est très bien comme ça. 

Arrivé assez tôt à Passau j'en ai bien sûr profité pour faire le touriste et prendre quelques photos. C'est véritablement une superbe ville. J'aimerais beaucoup y retourner l'été, ça doit être un petit coin de paradis. Idée voyage pour les amateurs, c'est magnifique, romantique, tranquille, aéré et moins bourré de touristes qu'à Venise !

Passau 

J'ai également eu la chance d'être gracieusement invité chez Mirjam, qui n'était même pas la mais m'a bien expliqué où prendre les clés. C'est magnifique de voir que des gens peuvent nous faire confiance sans même nous avoir rencontré, dans ces situations, la dernière chose au monde que l'on souhaiterait serait de trahir cette confiance. Ça ne sera évidemment pas le cas.

A demain, en Autriche !

27
fév

Nombre de km : 86

Bien. Je croyais avoir déjà largement usé et abusé des superlatifs, mais il m'en restait encore dans ma besace en cas de conditions extrême. Ce fut le cas.

Adieu Passau 
Arrivée en Autriche  

Mon compagnon le froid ne m'a pas fait d'infidélité aujourd'hui, il était plus que jamais présent à mes côtés. Toujours avenant, prêt à se faire remarquer à tout moment, le sacripant ! Il aime l'humour aussi, adore me chatouiller les pieds des heures durant jusqu'à ce que je ne les sente même plus. Il éprouve souvent ce besoin de me serrer la main fraternellement, un peu trop fort parfois, malgré les gants on sent bien la douleur. Mais l'un de ses jeux préférés c'est de geler l'eau de mes gourdes à ne même plus pouvoir les ouvrir, quel farceur celui là ! Sa dernière trouvaille a été de cristalliser la condensation de ma respiration sur ma barbe, le résultat donne des morceaux de glace tout autour de la bouche. Il ne manque pas d' imagination ce coquin !

Le froid 

Je profite de ce ton légèrement satirique pour ajouter une réflexion qui m'es venue alors que j'étais en pleine lutte contre mon frère ennemi de ces derniers jours, le froid. Voilà, je me suis rendu compte que lorsque l'on voyage en solitaire, que l'on passe la majorité de son temps seul sur son vélo, notre instinct d'animal social est soumis à rude épreuve. On en vient donc à s'inventer des amis, ou plutôt des compagnons de route, et on leur parle. On se prend à personnifier un élément, un phénomène météorologiques ou un objet. En quelques jours, ils leur apparaît une personnalité, une manière de communiquer, un sens de l'humour. Voici une liste non-exhaustive de mes camarades de route : le soleil, le vent, le froid, la neige, le Danube, le GPS, mes jambes, mon dos, le vélo... Certains sont plus mes copains que d'autres. Par exemple le soleil c'est mon grand pote, il m'a sorti de bien des galères, en accélérant la fonte de cette satanée neige par exemple ! Le froid, lui je ne l'ai jamais trop apprécié. Il est arrivé discrètement au tout début, et a trop rapidement pris ses aises. Il ne me lâche plus. Je lui ai pourtant dit poliment de prendre un peu l'air mais il se sent bien avec moi. Allez comprendre ! Il y a aussi certains qui sont plus complexe, ils peuvent être votre ami un jour et votre pire ennemi le lendemain. J'ai nommé : le vent ! Et ces jours-ci, non seulement il m'amène le froid mais en plus il me ralenti terriblement, il ne m'aime pas trop mais je saurai lui faire changer d'avis. Bref, après cette parenthèse trahissant un début de dérèglement psychique, il faut que je vous conte ma journée.

Avec une température sous les -10° toute la journée il fallait pédaler pour se réchauffer ! Ce que j'ai fait, j'ai traversé de nombreux villages, et première surprise, les autrichiens sembles plus ouverts et agréables que les allemands, les gens me parlaient spontanément dans la rue pour le dire que j'étais courageux, qu'il fait trop froid etc. Ça n'arrivait jamais en Allemagne.

J'ai longé le Danube sur de longs km sur une route superbe bordée de collines, chacune ayant son petit château à elle !

Je parlais en introduction des superlatifs, il va être temps de les révéler. La route m'a fait éviter une sinueuse partie le long du Danube en coupant directement par la montagne. C'est un choix, mais le mauvais. Le GPS qui n'a pas été mon ami aujourd'hui, m'a fait prendre un chemin très escarpé à travers forêt pour monter plus vite en haut la colline. La pire côte de ma vie ! Le chemin était très raide par moments, bourré de grosses pierres, et surtout de la neige, et même des parties totalement glacées ! Certaines zones étaient même difficiles à traverser sans vélo, je vous laisse imaginer avec un vélo de 40 kg qu'il faut pousser de toutes ses forces pour ne pas qu'il tombe en arrière en essayant de limiter la casse sur la glace, le tout sur une vitesse moyenne de 1,5 km/Heures. En arrivant en haut, j'ai pris le premier restaurant venu et je me suis arrêté pour une pause déjeuner plus que méritée. En retirant mes différentes couches je le suis aperçu que j'étais littéralement trempé de sueur sur tous les vêtements, jusqu'au manteau.

On ne voit pas que ça monte sur les photos, mais vraiment ça monte !  

La suite a été longue mais plus accessible dans l'ensemble.

Petit aperçu de Linz tout de même  

Ce soir je suis chez Andreas et sa femme, qui ont une très grande maison à Linz. Le bain chaud que j'ai pris chez eux ce soir à sûrement été le plus délicieux de ma vie !

Doris et Andreas 
28
fév

Bon, cette étape va un peu moins transpirer de panache, mais elle aura le mérite de me faire rattraper légèrement le temps perdu sur mon itinéraire, de me reposer les genoux qui commencent à tenir le bon bout, et surtout de m'épargner une nouvelle journée de souffrances sous ce froid sibérien.

Et oui, j'ai décidé de faire le voyage de Linz à Vienne en train ! Voilà, je suis un peu honteux mais ça aura sûrement un impact positif sur le plus long terme (en terme de temps et de santé, comme expliqué plus haut). Et ça m'aura permis de profiter un peu de cette merveilleuse cité qu'on appelle communément Vienne, mais que je prends plaisir à appeler parfois du doux et éloquent nom de "Jolie ville".

Vienne 

J'ai eu également la chance, en cette journée de repos bien méritée, d'être accueilli par un vieil ami de Justyna, Robert, qui est polonais mais qui vit à Vienne depuis bien longtemps.

Je ne crois pas qu'il ait validé cette photo en fait... 

Demain grosse journée de vélo pour Bratislava. Bonne nuit !

1
mars

Nombre de km : 71

Il y a un élément aujourd'hui qui a pris un malin plaisir à se faire remarquer du début à la fin de ma route, c'est le vent. Ce p... de c... de m..., nous allons l'appeler Jean-Guy. Il paraît que c'est la mode de donner des petits noms aux vents. Et bien voilà, Jean-Guy a aujourd'hui décidé de souffler plus que jamais, et bien sûr c'est un vent contraire de Sud-est... Pile ma direction, quelle chance ! J'ai donc eu droit à 40km/h de vent au visage toute la journée, autant dire qu'additionner cela aux -10° d'usage, ça fouette bien les joues et ça donne bonne mine !

Dure journée  

Il y a une technique pour supporter plus facilement la souffrance psychologique que Jean-Guy m'a infligée. Il faut d'abord pleurer pendant 15 minutes en l'insultant, en lui demandant quel est son problème, si c'est personnel, essayer de trouver du sens à tout cela. Le problème c'est qu'il n'y en a pas. On peut pleurer toute la journée, le vent ne changera pas de direction par pitié pour nos petits mollets. Il faut donc faire le deuil d'une route paisible, et une fois qu'on l'a accepté on n'a plus qu'à se mettre en mode automatique et se plonger dans sa tête. Ça fonctionne très bien, on prends tout ça avec philosophie, et la réalité, le vent et le froid ne sont plus que des sensations extérieures, des informations relayées par notre cerveau pour nous dire comment ça se passe dehors, notre météo. C'est simple finalement, il suffit de faire l'autruche.

Dommage, Jean-Guy ne se voit pas sur les photos 

J'ai une petite théorie arbitrairement élaborée aujourd'hui en pleine souffrance au sujet de la proportion de la perte de puissance et de vitesse à cause d'un Jean-Guy de 40 km/h. Et bien voilà, j'ai pu constater que sans lui la vitesse moyenne sur du plat est d'environ 17 km/h, avec lui face à nous cette vitesse moyenne passe à 9 km/h. Ce qui nous fait déjà une perte de presque 50% en vitesse. Mais ce n'est pas tout ! Pour assurer cette vitesse moyenne de 9 km/h il faut aussi envoyer dans les pédales 2 fois plus de puissance. Ce qui au final fait prendre 2 fois plus de temps au parcours et fatigue 2 fois plus par la même occasion. Il y a donc environ 75% de puissance dégagée en plus. Si certains matheux ont des doutes sur mon raisonnement, qu'ils n'hésitent pas à rectifier.

La frontière Austro-Slovaque, on se sent vraiment le bienvenu...  

Une chose étonnante en arrivant en Slovaquie était la différence en tout par rapport à l'Autriche. On passe la frontière, et voilà : tout est différent et a l'air plus pauvre dans l'ensemble. C'est amusant car le comportement des gens change quand on change de pays. En Allemagne les gens me regardaient comme une bête bizarre sans me parler, en Autriche les gens me regardaient et me parlaient, en Slovaquie les gens ne me regardent même pas ! 3 cultures différentes.

Bratislava 

Je suis finalement arrivé à bon port chez mon hôte Ivan, qui a accueilli aussi un couples d'auto-stoppeurs allemands. Des gens bien sympathiques !

Ivan est à droite 
2
mars

Nombre de km : 75

Il y a une règle intéressante qui est en train de se vérifier trop régulièrement lors de cette aventure : c'est quand on croit naïvement que le plus dur est derrière nous que le sort nous montre cruellement notre erreur de jugement.

Un demi sourire forcé pour la photo  

Et voilà, je m'imaginais une journée plutôt difficile, mais moins froide et moins venteuse que la précédente. En réalité, c'était effectivement légèrement moins froid sur le thermomètre (-7° en moyenne), aussi un peu moins de vent... Mais il manquait un élément perturbateur. Aujourd'hui, ce fut la neige. Et oui, il a neigé à faible flocons toute la nuit et toute la journée, une petite bruine de neige sans prétention, mais qui a tout de même tapissé ma belle piste cyclable rien qu'à moi d'un éternel tapis blanc. Résultat, ralentissements permanent et des vibrations qui font regretter l'époque bénie ou les maux de dos n'étaient pour nous que des mots (ou maux) pour adultes, des concepts abstraits à l'aune de notre jeune âge. Hélas, aujourd'hui c'était bien concret. Il faut croire que je fais désormais partie de cette triste catégorie des "grandes personnes".

Première impression avec les paysages hongrois  

Première impression avec la campagne Hongroise, c'est très plat (pas pour me déplaire) , certaines personnes vous regardent comme s'ils avaient vu un extraterrestre, les routes sont de mauvaise qualité, leur langue de ressemble à rien de connu, c'est une langue ouralienne agglutinante, même pas une langue indo-européennes comme tout le monde... Ils sont fous ces Hongrois ! Autre trait particulier, les chiens de ce pays passent leur temps dehors dans le jardin à attendre leurs maîtres. Ils sont donc à l'affut du moindre événement inhabituel... Je suis l'événement inhabituel. Cela donne un festival d'aboiements, une chorale destructurée et gauche dont le seul but n'est pas de plaire ou de faire peur à l'étranger, mais plutôt à combler un vide et se sentir appartenir à un groupe. Haïr ensemble, quoi de mieux pour créer un lien social. La psychologie canine n'est peut être pas si éloignée de celle des humains.

J'ai eu la chance pour le déjeuner de trouver une sorte de pizza snack dont le serveur a été tellement fasciné par mon parcours qu'il m'a offert un délicieux thé et a tenu à me prendre en photo avec mon vélo, ça réchauffe le cœur, et par ce froid on en a besoin.

Ce soir je me suis arrêté à Gyor, petite ville thermale, accueilli par Andras. On a partagé ensemble deux excellentes pizzas plus qu'appréciées après une telle journée.

Andras et moi 
3
mars

Après cette nouvelle journée en enfer hier, j'ai décidé de prendre le train pour Budapest et m'économiser 120 km de souffrances. C'était aussi largement motivé par le fait que je n'ai pas trouvé d'hôtes pour la ville intermédiaire (Tata), en revanche j'en avais un assuré pour ce samedi soir à Budapest. Ça me permet aussi de profiter un peu de la ville et de me préserver pour demain, qui sera une grosse journée (95 longs kilomètres prévus).

J'ai ainsi pu faire une nouvelle fois la visite de Budapest et apprécier ses charmes sous un soleil hésitant.

Budapest  

Ce soir mon hôte s'appelle Norbert, on a pu passer ensemble une bien agréable soirée, je lui ai préparé des spaghetti à la bolognaise pour 8 personnes en oubliant que je n'avais que peu pédalé aujourd'hui.

Norbert et moi... En pleine digestion  
4
mars

Nombre de km : 94

Très grosse journée aujourd'hui en terme de distance, mais peu de choses à raconter. Tout était très monotone dans l'ensemble avec de grands no man's lands et des routes droites interminables et vides.

Et oui, la neige n'a pas encore décidé de fondre 
Les routes vides de Hongrie  

Il y a une chose importante à noter en Hongrie, c'est la mauvaise qualité des routes. Ça cogne, ça secoue, ça vibre en permanence, et ça donne des douleurs dorsales pour toute la journée. Le bas du dos est vraiment soumis à rude épreuve. Et je ne suis pas certain que ça s'améliore en Serbie !

Un nom de village banal. Dommage que les mots Hongrois ne soient pas autorisés au Scrabble.  

A l'heure du déjeuner je n'ai pas eu la chance de passer devant le moindre restaurant ou un quelconque endroit dans lequel on peut déjeuner au chaud. Donc après avoir pesté pendant quelques minutes contre les pays du Tiers-Monde, j'ai décidé de m'asseoir sur un banc et manger des réserves de nourriture que j'avais sur moi. J'ai rarement eu autant froid aux mains pendant un repas. Pour rappel, je ne parle plus trop du froid car les choses s'améliorent, mais tout est relatif. J'ai tout de même eu une journée entre -4 et -5°, ce qui est quasi caniculaire en comparaison avec la semaine dernière !

Ma table de pique-nique 

Ce soir à Kecskemet, je n'ai pas eu la chance de trouver des personnes assez généreuses et curieuses pour m'accueillir, j'ai donc dû me résigner à réserver une sorte d'auberge. Donc pas de photos de gens sympathiques ce soir !

J'ai trouvé ce pittoresque arrêt de bus pour ma petite pause "carré de chocolat"  

Demain une nouvelle grosse journée m'attend.

5
mars

Nombre de km : 90

Aujourd'hui est sensé être le dernier jour de froid. À interpréter : dernier jour sous les 0° après 3 semaines de températures négatives non-stop.

Le plan d'aujourd'hui était de faire une nouvelle longue distance pour s'arrêter à Szeged. Impossible de faire une halte plus tôt car tout ce qu'il y a c'est de la neige, des petits villages agonisants et probablement des loups morts de faim. (la dernière information n'a pas été vérifiée). Donc les deux seules solutions qui s'offraient à moi étaient les suivantes :

1- Prendre la route la plus directe en passant par la route nationale 5 sachant que c'est interdit aux vélos et extrêmement dangereux selon mon hôte de ce soir. Mais ça me fait à peu près 88 km de sueurs froides.

2- Prendre les chemins qui contournent la route 5, donc des tonnes de détours sur des routes vides comme hier, croisant rarement un village, donc peu de possibilités de se réchauffer ou de se ravitailler au milieu de la journée. Ça fait à peu près 105 km de solitude et de froid.

Ces deux possibilités, je les ai tranchées dans le vif ! J'ai pris le train !

Un wagon rien que pour mon vélo à moi 

Me voilà donc arrivé assez tôt à Szeged, et toute la journée pour me balader l'esprit tranquille dans cette charmante ville située à 10 km de la Serbie et 20 km de la Roumanie. C'est une ville très étudiante et la deuxième plus grande de Hongrie, si mes sources sont exactes. Voici quelques photos :

Szeged  
Je me devais de faire quelques photos susceptibles de plaire aussi au public féminin. C'est chose faite.  

Ce soir je suis accueilli par Mohammad, un étudiant très gentil d'origine iranienne qui m'a donné de précieux conseils pour l'Iran, et m'a préparé un excellent dîner. Preuves à l'appui.

Mohammad, moi et les poissons 
6
mars

Nombre de km : 60

Franchir à vélo la frontière d'un nouveau pays c'est à chaque fois une nouvelle excitation, on y entre les yeux grands ouverts, les sens en éveil, la mémoire comme une éponge, et on en ressort avec une toute nouvelle image de ce pays et de ces habitants, même si on l'avait déjà visité auparavant. Ce qui est intéressant c'est surtout que les zones par lesquelles mon vélo m'emmène sont bien loin des capitales cosmopolites standardisées, aux identités floues et aux populations indistinctes. Je traverse les hameaux, les villages, les petites et grandes villes, je vois la vraie vie, parfois la richesse surabondante et inutile, parfois la pauvreté extrême. Même au sein de l'Europe, les contrastes sont perturbants. Un fossé indécent sépare l'Allemagne de la Serbie, mais je pourrais parler longtemps de tout cela. Ce n'est pas mon propos du jour. Tout ça pour dire que j'ai franchi ce matin la frontière entre la Hongrie et la Serbie. Et bien ça à beau être toujours Schengen, j'ai eu la véritable impression de traverser une frontière pour la première fois depuis mon départ. Contrôle des passeports des deux côtés de la douane et grillages à barbelé tout au long de la frontière. (je crois que l'on n'aime pas trop les migrants en Hongrie... Ceci explique cela)

Bienvenue en République de Serbie. (A dire avec l'accent serbe, c'est plus rigolo... Un accent russe fera l'affaire)  

La route du début a été très pénible. Car même si, victoire, on a enfin franchi le cap des 1°, j'ai eu droit à une bonne pluie bien virile en guise de bienvenue sur le territoire serbe. Une pluie tellement revigorante que j'ai eu plus froid que quand je roulais à -13° sur les bords du Danube. Mais la pluie c'est calmée après 2h de route pour laisser place à un vent de face de 25 km/h... Je rêve d'un jour où toutes les conditions seront réunies pour que la route soit agréable ! Je ne demande pas grand chose, 10° c'est très bien, pas de vent de face et pas de pluie. Un jour peut être, inch' allah.

Ici c'était encore la Hongrie  
Petite pause tablette de chocolat  

Petite chose à noter, ici les gens parlent vraiment très très peu l'anglais, ce n'est donc pas toujours simple de se faire comprendre mais je perfectionne mon langage des signes. Parfois ça marche, le plus souvent ça ne marche pas.

Ma période blanche touche à sa fin, j'espère prochainement aborder ma période bleue... On la voit apparaître au loin.  
Le portail de ma chambre d'hôtes. Tout en sobriété et en authenticité.  

Ce soir je n'ai pas eu la chance de trouver des hôtes dans cette ville. J'ai donc trouvé refuge dans une chambre d'hôte dans laquelle j'ai été surclassé pour annulation de dernière minute. Résultat, pour 10€ la nuit j'ai droit à tout un appartement pour moi avec entrée, salon, cuisine, salle de bain... La suite royale, oserais-je dire. Ça n'est pas la Mamounia mais on y est bien.

7
mars

Nombre de km : 90

Très grosse journée de souffrances. Un vent qui a encore trouvé amusant de me suivre (vent de sud ouest aujourd'hui, pile ma direction encore une fois !), des routes de très mauvaises qualités et saturées de voitures et autres poids lourds, des lignes droites interminables (ça attaque bien la force psychologique), et des pluies ça et là. Mais je ne peux pas complètement me plaindre, le soleil a eu l'élégance de se montrer par moments et la température continue à remonter peu à peu. Presque toute la neige a déjà fondu.

Finalement nos ancêtres avaient peut être raison : on dirait bien que la terre est belle et bien plate.  

J'ai été confronté à un choix stratégique au moment de l'heure de déjeuner. Soit je m'arrêtais tôt mais il me restait presque 40 km à faire en pleine digestion, soit je fournissais un dernier effort pour faire 20 km de plus pour déjeuner à la prochaine petite ville. Rien entre les deux. J'étais déjà épuisé, mal au dos, mal aux fesses, mal aux jambes... Mais j'étais lancé, je préférais souffrir tout de suite que plus tard, et j'apprécierais d'autant plus la pause déjeuner. Je n'ai pas regretté mon choix, même si ces 20 derniers km étaient vraiment pénibles et douloureux, le vent n'aidant pas. Je me suis arrêté au premier petit restaurant snack venu et suis tombé sur ce snack proposant des sandwichs et plats typiques du coin. Et par chance le patron parlait le français, ayant travaillé 16 ans en Suisse. Autant vous dire qu'il était content de me parler dans cette langue qui semblait lui manquer et que je suis assez vite devenu l'attraction du lieu, "l'aventurier sans peur et sans reproche qui leur fait l'honneur de s'arrêter dans leur petite bourgade !". Il faut dire que c'est assez touchant bien que disproportionné, quand un serbe d'un certain âge qui à connu les horreurs de la guerre vous dit que vous êtes très courageux. Le patron m'a même fait cadeau de mon deuxième plat, j'ai eu donc deux plats et une bière pour 3€... Quel merveilleux pays !

Mes copains de la pause déjeuner. Oui mon visage trahit les 5h de vélo à peine digérées.  

C'est toujours triste de rester très furtivement dans ces endroits quand on ressent qu'après 1h on est déjà adopté par les locaux. Mais il faut avouer que les habitants de cette province qu'est la Voïvodine sont particulièrement accueillants et gentils. C'est une région déjà très multi-ethnique, un vrai melting pot de tout ce qui existe de nationalités à 400 km à la ronde !

Je suis donc arrivé tant bien que mal à Novi Sad, capitale de la Voïvodine. C'est une ville très agréable, vivante et le centre ne manque pas de charme. Oui, les photos :


Novi Sad 

Ce soir je suis accueilli par Oliver, originaire du territoire serbe de Bosnie (né à Banja Luka) avec qui je n'ai malheureusement pas pu passer beaucoup de temps car je ne l'ai retrouvé qu'à 21h, mais on a eu le temps d'avoir des discussions intéressantes sur la Serbie et les environs.

Oliver et moi, déjà en pyjama 
8
mars

Au moment où j'écris les premières lignes de ce récit de la journée, je suis dans le bus, à la frontière entre la Serbie et la Bulgarie. 1h d'attente, j'en profite. En effet, j'ai décidé de prendre le bus dès ce matin pour Sofia, c'était totalement improvisé car je devais passer la nuit à Belgrade, mais j'ai fini par prendre cette décision pour 3 bonnes raisons. La première: je n'ai pas trouvé d'hôte à Belgrade, pourtant une grande ville, mais c'est ainsi. La deuxième: comme le prévoyait la météo il a plu toute la journée. Et la troisième : je dois gagner du temps pour être à Istanbul avant la date limite pour y récupérer mon visa pour l'Iran, et ça devrait passer.

 Quelques photos des paysages de la Serbie du sud. Les montagnes c'est mieux en bus et de loin ! 

Je suis donc monté dans ce bus, ai réussi à négocier une place en soute pour mon vélo contre 120 dinars (1€) et suis monté dans le bus direction Nis (au sud de la Serbie) , pour un changement de bus là bas. Dès mon entrée dans le bus je me suis fait un ami serbe qui va aussi à Sofia, ce qui m'a beaucoup aidé pour le changement de bus et le fait de charger à nouveau mon vélo dans la soute, ce qui n'est pas toujours gagné ! Un monsieur d'une cinquantaine d'années très sympathique qui m'a même offert un sandwich pendant notre escale à Nis, nous avons eu des discussions passionnées sur L'OTAN, les bombardements, les américains, les massacres commis par les turcs pendant l'invasion ottomane. Etc. On sent que les rancunes sont encore très présentes. Les cendres des bombardements de L'OTAN cachent encore des braises bien chaudes.

A la gare routière de Nis il n'y a qu'une seule compagnie de bus : NisEkspres. 

Je quitte en ce moment même la Serbie et retourne très temporairement dans l'union européenne, je viens de franchir la douane. Je peux faire un bilan triste de ce que j'ai pu voir en Serbie hors des grandes villes. Aujourd'hui au sud de la Serbie c'était édifiant. Il y avait le ciel gris, la pluie, le béton usé, la boue, les chiens errants, les maisons en ruines en pleine ville, les voitures désossées qui jalonnent le paysage, les décharges à ciel ouvert disposées ça et là, souvent bordées d'un rassurant campement de roms. Bref il y a un côté plus que déprimant dans ce pays (même si la pluie aujourd'hui n'a pas joué en sa faveur) mais les gens gardent la force et la bonne humeur, ils sont généreux, ouverts et accueillants. Je dois dire que je n'ai eu aucune mauvaise expérience avec un serbe depuis mon arrivée. Soit des gens gentils et curieux soit des gens indifférents. Si on fait la moyenne ça n'est pas si mal !

Mon ami du jour, Stevan 

Je suis maintenant arrivé à Sofia où je vais rester pour la nuit. Je suis accueilli par Galina, qui m'avait déjà hébergé 6 ans plus tôt avec Bertrand (mon cousin). Elle habite maintenant dans une bien sympathique coloration au centre ville ! Petite anecdote amusante qui ne fera rire que la famille proche, Galina se souvenait d'un détail marrant à propos de Bertrand. Elle avait été marquée par le fait qu'il utilise un chausse pied, même en voyage. Elle en était vraiment amusée. Celui là, d'une manière ou d'une autre ne laisse jamais personne indifférent !

Galina à gauche et ses colocataires (Sofia- Bulgarie)  

Demain matin je prends un bus pour Istanbul, je vais enfin fouler le sol de l'Asie pour la première fois de mon voyage !

10
mars
Le matin à Sofia, depuis ma chambre 

J'ai ou prendre le bus sans encombres hier matin direction Istanbul. Toute une journée de bus avec en prime un passage de frontière assez mouvementé.

De beaux paysages bulgares, au sud de Sofia 
Premier arrêt du bus en Bulgarie 

Le passage de la frontière entre la Bulgarie et la Turquie fut plus compliqué que je ne l'aurais imaginé. Pour commencer, le vélo était un vrai boulet. Il a fallu le sortir du bus, le mettre de l'autre côté de la frontière sous le regard vigilant des douaniers et revenir sans tarder pour le contrôle des passeports. Déjà, va comprendre pourquoi, les douaniers ont décidé de me mettre de côté pour un interrogatoire. Tout le bus est passé sans encombres sauf moi. Peut être que le passeport français commence à faire peur jusqu'en Turquie, peut être ma barbe, peut être le vélo. Le résultat reste le même, j'ai été pris à part entouré par 3 douaniers, j'ai du ouvrir mes sacs et répondre à diverses questions de ce type : "où allez vous après la Turquie ?", "où et chez qui allez vous dormir ? ", " combien d'argent avez vous avec vous ? ", " quel est votre métier ? ", " êtes vous français, mais vraiment d'origine française ? ". Il faut dire qu'ils sont officiellement en guerre en Syrie contre différents groupes terroristes alors ils sont assez soupe au lait au niveau des frontières ! Pas de photos de cette scène évidemment, j'ai choisi de prendre des risques débiles un autre jour. Enfin je suis passé finalement et le bus a pu grâce à moi prendre une bonne demi heure de retard en plus.

L'arrivée à Istanbul  

Istanbul est une ville plus qu'impressionnante, c'est un pays à lui tout seul, d'un gigantisme inimaginable ! 20 millions d'habitants y vivent sur 2 continents différents. Ça fait une impression assez unique de passer le pont au dessus du bosphore et de voir ce panneau avec écrit "welcome in Asia". Arrivé hier soir, j'ai été tout de suite accueilli comme un ministre par mon ami Hasan qui est venu spécialement me chercher à la gare routière. Il m'a présenté sa famille puis nous avons bu avec 3 de ses amis du quartier une bouteille de Raki à 45° qui a permis d'élever le débat vers des sommets de légèreté et de croustillance dont je vous épargnerai les détails.

Mon ami Hasan est le 2e en partant de là gauche 

Après un sommeil bien mérité, j'ai pu apprécier un premier aperçu de ce que signifie le sens de l'accueil dans le pays. J'ai été invité à prendre le petit déjeuner avec la maman d'Hasan et des amis. J'avais l'impression d'être reçu comme un roi, à en devenir presque gênant par moments.

Le brunch du samedi 

J'ai ensuite assisté à une tradition assez intéressante. Après avoir bu un café turc traditionnel, j'ai du retourner ma tasse sur la soucoupe, attendre que le dessous de la tasse ne soit plus chaud, c'est le moment pour la donner à la maman qui va lire l'avenir dans le marc de café. Beaucoup de ses interprétations étaient, je dois le reconnaître, assez concordantes avec ma réalité.

Ce moment où les femmes analysent ma tasse de café  

J'ai ensuite passé l'après midi à visiter le quartier de Bahariye et Moda sur là rive asiatique, quartier extrêmement vivant et surtout très peu touristique. Nous y avons également passé la soirée à goûter des plats traditionnels aussi variés que délicieux et à boire des bières locales sous les brouhahas, les klaxons et les odeurs omniprésentes.

La prochaine fois il y aura plus de photos d'Istanbul 
12
mars

Maintenant que je suis à Istanbul depuis 3 jours, je commence à avoir le recul nécessaire pour distinguer ces 40 jours et 40 nuits en Europe et cette arrivée en terre ottomane. Si cette traversée de l'Europe était loin d'être une sine cure, voire même un chemin de croix, ce séjour à Istanbul en est son extrême opposé. Je vis ce moment comme on croquerait dans un gâteau oriental dégoulinant de miel et d'amandes, mon corps plongé dans un bain de lait chaud parsemé de pétales de roses. Tout n'est que sécurité, repos, délectation et abondance. C'est Bybance, ça ne s'invente pas ! Un jardin d'Eden aux mille et un délices dans lequel mon corps et ma tête s'abandonnent en n'oubliant pas qu'il va falloir bientôt repartir... Et du bon pied.

Pèle mêle d'Istanbul, mes amis, mon manger, ma trogne.  

Plus prosaïquement, aujourd'hui j'ai été au consulat d'Iran pour mon visa, ça a été un peu compliqué, tout est assez chaotique dans ce pays mais les règles sont toujours dépassées par l'humain, et les problèmes se règlent toujours. En bref, mon visa ne sera prêt que vendredi après-midi ce qui m'oblige (quelle tristesse alors !) à ne repartir que samedi matin.

Il va donc me falloir visiter encore 4 jours cette ville riche, sucrée, chaotique, généreuse, joyeuse et assourdissante. 4 jours encore pour découvrir des nouvelles richesses insoupçonnées, des nouvelles villes dans la ville, pour marcher au hasard des ruelles et des senteurs épicées en ne sachant même plus si l'on est en Europe ou en Asie. Cette ville a une particularité : plus on la visite plus on comprend qu'on a encore une infinité d'endroits à voir.

J'ai une anecdote culturelle assez intéressante. Il est assez commun de croiser dans la rue deux hommes bras dessus bras dessous. Non, la Turquie n'est pas devenue particulièrement gay-friendly... Si ce geste serait interprété en France sans aucune équivoque possible, ici c'est absolument naturel, c'est simplement un geste d'amitié que l'on réserve aux amis auxquels on tient, aux amis proches. Ni plus ni moins. Et quand on explique aux turcs que ce geste serait vu d'un autre regard en Europe, ça les fait rire aux éclats et leur semble d'une aberration sans nom.

Autre détail intéressant, le vocabulaire de la langue turque est rempli de mots du quotidien issus de la langue française, mais bien souvent aussi des mots oubliés ou désuets qu'ils utilisent toujours. Ces mots sont bien sûr orthographiés à la turque mais la phonétique reste à peu près préservée. Exemples: pardon (tout le monde l'utilise constamment), merci (plus utilisé par les femmes, ça fait plus distingué que de le dire en turc, plus délicat et élégant), chauffeur, ascenseur, coiffure, béret (utilisé dans le sens de chapeau ou bonnet), béton, pardessus, réclame (mot un peu désuet pour désigner la publicité), passage,... Je ne vais pas tous les faire, il y en a vraiment énormément, et c'est toujours amusant de découvrir au milieu d'une discussion ces mots que l'on a en commun, ça rapproche.

Un dernier petit détail qui n'est pas grand chose mais que j'ai découvert une magnifique invention (qui n'est certainement pas récente). Dans toutes les toilettes turques il y a un petit robinet qui projette un mini jet d'eau très stratégiquement orienté, qui habilement permet non seulement de n'utiliser que très peu de papier toilette, mais surtout de traiter avec plus d'hygiène et de douceur cette zone sensible de notre anatomie. Je tenais à changer cette image spartiate que les toilettes à la turque véhiculent depuis des décennies !