Entre culture berbère et culture bling-bling, calme et vacarme, regs et palmeraies, richesse et dénuement... voyage de Marrakech à Agadir à la rencontre d'un peuple si accueillant !
Février 2020
3 semaines
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Arrivée nocturne et énigmatique dans le nouvel aéroport de Marrakech, vaste et noble espace de transition entre Europe et Maghreb, vitrine de l’architecte contemporaine marocaine. Chasse au taxi « bienveillant » en marchant quelques mètres vers l’arrêt de bus, une autre option accessible pour rejoindre la Médina pour 3 €… Après quelques palabres, nous partons bille en tête vers notre riad enfoui dans les ruelles. A la faveur de la nuit, notre taxi un peu filou enfreint la règle et pénètre dans le lieu, nous livrant quasiment à l’entrée. On se faufile dans les ruelles poussiéreuses où la vie s’agite encore, entre parkings à mobylette, échoppes variées et familles en goguette… ambiance ! Il nous délivre non sans avoir tenté de nous faire payer plus que le prix convenu, Philippe ne cédant pas, il lâche l’affaire. Le riad Errabii, coquet et dans « son jus », nous offre le cadre parfait pour ces quelques jours, avec un souper de roi, servis dans un des bhou, genre d’alcôve intime : thé à la menthe et gâteaux sablés, pastilla aux fruits de mer, tajine d’agneau aux pruneaux, nos ventres repus, proche de l’explosion, nous nous écroulons dans notre chambre, Marrakech, nous voici !

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Un copieux - à l’image de l’ensemble des repas à venir – petit déjeuner de crêpes marocaines au miel, jus d’orange frais et thé ver maison (mon dieu comment résister…), et nous voilà parés pour partir en voyage avec Yves Saint Laurent, tombé en amour pour cette cité à part. Poussière, mobylettes en folie, klaxons, ânes, triporteurs, vélos, piétons, taxis, marchés et des gens, des gens, des gens, ça surgit, ça gueule, ça vit.

Passé la fureur des ruelles qui longent les remparts et de la grande avenue qui mène vers la ville nouvelle de Ghéliz, une rue calme ouvre au paradis du grand créateur. Son Musée d’abord, où l’on acquiert le pass pour les 3 univers amoureusement protégés par la Fondation éponyme, l’œuvre de Pierre Bergé. L’architecture est stylée, la visite épatante.

Chance, l’exposition temporaire met le projecteur sur Jacques Azéma, peintre français fondu du Maroc où il vivait. Il livre ici sa vision poétique et subtilement colorée d’un peuple et des ses hommes jeunes, longs, fins, d’une grand beauté.

La partie permanente révèle le travail du maître, ses silhouettes sur une timeline qui défile, ses moodboards, ses créations emblématiques, dans une ambiance feutrée où chaque robe enivre d’émotion, un coup de chapeau remarquable au virtuose de la haute couture française. Photos interdites, à voir IRL* (*in real life)

A deux pas, nos tickets coupe-file nous ouvrent les portes de la célèbre Villa Majorelle, dont jardin et musée ont été restaurés par le duo Saint Laurent/Berger. La magie du lieu opère malgré l’affluence, sous un ciel azur. Ce havre de paix et d’élégance conçu par le peintre recèle une profusion luxuriante de plantes, savamment organisée pour le plaisir des yeux et de l’être tout entier. Végétaux extraordinaires, perspectives éblouissantes… autant de tableaux choisis pour les poses toujours comiques de nos amis asiatiques. Niché dans la villa, le musée Berbère propose une collection choisie de tenues, objets, bijoux et autres merveilles artisanale, dans une scénographie plutôt réussie. Un bain de soleil sur un banc clôture cette balade graphique et colorée avant le retour à la frénésie urbaine.

Ça passe ? Oui ça passe. Chaque traversée piétonne défie les lois de la sécurité routière : les engins roulants surfent entre les piétons qui conservent cependant une forme de « priorité », on vous évite dès lors que vous marchez calmement dans ce méli-mélo.

Nous atteignons sans encombre le cœur de la Médina pour une incursion dans le souk aux milliers d’échoppes, sans être trop sollicités : la nouvelle « brigade touristique » veille. On se laisse perdre dans les méandres des chemins couverts, découvrant ici un cordonnier d’un autre temps, là un marchand de tête d’agneau grillée, par là-bas des babouches, des sacs, des miroirs, des tapis… un inventaire infini de ce que l’artisan peut produire… et copier ;)

Une déambulation où l’on atterrit Place Jemma El Fna, encore alanguie à cette heure de l’après-midi, le spectacle est pour ce soir. Ascension sur le toit-terrasse du Café de France, fort bien placé pour un panorama à 360° : Monts Atlas enneigés, terrasses des riads, antennes paraboliques à gogo, le soleil donne, c’est bon ! L’appel à la prière des 3 mosquées voisines ambiance notre pause thé.

Fin de balade à la Koutoubia, au minaret légendaire. C’est la sortie de la prière, on ne traîne pas devant l’entrée. Retour au riad pour profiter des derniers rayons du soleil sur la terrasse et d’un bon dîner, on en salive d’avance !

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Le gérant de notre riad, Abdou Nibou, nous accueille ce matin. C'est un marocain « français » qui a vécu en Vendée… son sourire s’élargit, nous sommes adoptés ! Hier soir, son équipe nous a régalé d’un tajine poulet/citron de haute volée.

Ce matin, les petits oiseaux qui logent au patio et le muezzin réunis nous réveillent à 9h00… il est plus que temps de mettre le cap sur la Koutoubia, direction les tombeaux des rois Saadiens, dans le quartier de la Kasbah. Devant la mosquée El Mansour au minaret de zellige vert, rencontre impromptue avec une bande d’amis sablais et visite d’un riad récemment acquis par l’une d’elles !

L’occasion d’un détour par le marché de la Kasbah, particulièrement animé en cette chaude fin de matinée : de beaux produits, fruits et légumes de choix et de l’air dans les ruelles abritées, chouette quartier ! On y trouve aussi un « centre artisanal », magasin « officiel » (enfin peut être) et démesuré, au prix fixes. On se fait ainsi une idée sur le « bon prix » des tapis, intéressés que nous sommes par les tapis berbères, boucherouites et autres tissages venus de l’Atlas. Deux vendeurs à nos trousses entendent bien conclure la vente. Las, ils ne connaissent pas les oiseaux, fermement décidé à comparer. On manque deux fois la sortie de ce labyrinthe kitch où des clients tournent probablement encore…

A deux pas, les tombeaux des rois Saadiens, soigneusement planqués par leurs successeurs et re-découverts début 20e. Merveille aux accents andalous et pour cause, tout l’art mudéjar vient d’ici. Le roi El Mansour et son fils reposent dans des salles divinement ornées, marbre, stuc et cèdre délicatement sculptés… de la dentelle dorée comme dernier ciel étoilé ! Le calme règne, les chats se dorent au soleil, les touristes selfisent. Ces tombeaux ont fait l’objet d’une restauration récente et remarquable, après des centaines d’années d’oubli.

Pour rejoindre le palais Bahia juste voisin, je demande à faire le détour par l’actuel palais du roi. A la sortie des remparts de la médina, nous voici sur la route royale où, petit à petit, nous nous retrouvons… seuls ! Et oui, car rien à voir du côté du palais officiel, véritable bunker impénétrable, et c’est toujours seuls que nous longerons l’interminable mur d’enceinte, nous détournant ainsi de plus de 3 km de notre destination finale 😉 Nous apprendrons que le palais est une zone où seul le « passage » est toléré et toute photo interdite, oups !

Revenus dans la médina, un coquin marocain veut nous capter au vol pour nous mener à la synagogue, arguant avec moult yeux ronds que le palais Bahia est fermé... mais bien sûr ! Toujours raison garder avec ces tentatives de rabbatage musclé, garder son sourire et maintenir son cap. Enfin les grilles du célèbre palais, délire de Vizir sont en approche. Tout de plain pied et richement décoré, cette succession de salles sublimes est envahi de touristes en tout genre. Mention spéciale pour un groupe de japonaises « Kawaï » en mode shooting dans des poses recherchées et effets spéciaux lumineux, au grand dam du guide qui tente d’attirer leur attention sur l'histoire 😀 Nous apprendrons plus tard par un chauffeur marocain qu’il est fréquent que ces dames changent 3 à 4 fois de tenue dans la journée, dans une compet' effrénée de la prise de vue la plus wouaw ;)

L’endroit est étonnant, mélange de styles, salles de réception extraordinaires de sculptures et de zelliges, Lyautey ne s’y était pas trompé, il y avait installé son QG.

Pause place Jemma El Fna pour un thé au gingembre face à l’une des nombreuses boutiques sur rue, devant le spectacle des ventes cadencées de faux Vuitton.

Nous rentrons par le souk où, comparaison oblige, un marchand de tapis taciturne, lui, nous présente quelques belles pièces d’artisans du Moyen Atlas. On réfléchit toujours. Quelques images des échoppes typiques de notre quartier, où l'on trouve vraiment... de tout, y compris un "écolo spot" qui propose un étonnant véhicule cyclable pour groupe de touristes "verts" 😀

Notre dîner du soir : soupe de pois parfumée, tajine d’agneau aux légumes confits et gâteau au chocolat mousseux, des délices partagés en compagnie de Slimane qui nous chouchoute depuis notre arrivée. Ce jeune berbère aux manières douces se livre un peu plus chaque soir et nous rions beaucoup, malgré la différence de langage, les berbères parlent peu le français. Il est de Skoura et nous vante un paradis hôtelier de son coin pour les beautiful people de la planète, ça le fait rêver, manifestement.

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Lever à l’aube après une nuit sonore – quelques arrivés nocturnes intempestives dans notre riad - et un réveil prématuré par le chant toussoteux du muezzin qui a dû choper un rhume. A 8h00 pile, Redouane notre chauffeur nous cueille pour un road-trip dans l’Atlas. Nous prenons au passage un couple de jeunes brésiliens avec lesquels nous partageons cette journée. Le Renault Trafic flambant neuf se faufile avec doigté dans la circulation déjà dense de Marrakech, direction le Haut Atlas vers Ouarzazate.

A quatre passagers, Redouane nous offre une découverte personnalisée de cette montagne désertique, enneigée d’un côté, brûlante de l’autre. Les points de vue se succèdent le long de la route en chantier, montagne éventrée pour une route plus spacieuse, le trafic en a besoin.

Pays de Berbères, le Haut Atlas révèle déjà sa rudesse, une vie à flanc de reg, où les Hommes naissent et meurent en vivant de peu. Surprenant cimetières où les défunts reposent sous de simples pierres, tous égaux.

Humilité donc quand on les croise à dos d’âne, chemin faisant.

Le périple continue entre canyons et oasis le long de l’Oued Oulani, où des familles cultivent avec acharnement cette terre hostile.

Nous sommes sur les terres du fameux El Glaoui, pacha marocain riche et respecté. Ici, le sel affleure la roche rouge. Redouane nous fait la surprise d’un détour par l’une des mines encore exploitée. Aujourd’hui c’est fermé mais quel paysage de western ! Le sel y côtoie des restes de neige qui font le grand bonheur de nos brésiliens…

Notre troupe s’entend à merveille : photos, rires, traductions approximatives, la bonne humeur l’emporte. Nous apprenons qu’Auguinardo est un chercheur reconnu en matière de technologies médicales de l’Université de Natal et qu’Adriana s’occupe de soutien scolaire pour les enfants. Témoin de Jéhova, elle ne manquera pas d’évoquer tous les atouts de ses croyances sur la route du retour ;) Auguinardo se rend fréquemment en Europe dans le cadre des échanges avec l’Université portugaise de Coimbra, l’occasion de poursuivre le voyage dans d’autres contrées.

Climax de notre balade, l’arrivée au skar d’Aït Ben Haddou, classé au patrimoine de l’Unesco, se fait par un petit chemin au bout duquel surgit la merveille. Construit des mains des habitants, ce village d’un autre âge est habité par 3 familles qui animent la visite. Au sommet, panorama à 360°, époustouflant ! On resterait des heures à méditer ici, étourdi de tant de Nature, d’ocres, de beauté.

Une vieille femme nous ouvre sa porte, l’espoir d’une vente ouvre un large sourire sur son visage ridé. Retour au moyen-âge dans cette demeure de torchis, avec les bêtes au fond de la cour. Rude on vous dit !

Descente par l’oued pour une vue imprenable sur l’ensemble du Ksar, espace hors normes, hors du temps. On en repart avec difficulté tant il vous happe l’âme. Ce décor de cinéma (Lawrence d’Arabie, Gladiator, Game of thrones – L’imbrûlée y règne sur Yunkai) mérite le voyage dans la vraie vie 😀

En arrivant à Ouarzazate, c’est justement les célèbres studios de cinéma qui ouvrent la cité, toujours en pleine activité. Redouane nous indique que Jamel Debbouze, star vénérée ici, aurait aussi investi dans cet Holywook marocain ?

Halte déjeuner dans la gargotte attrape-touriste, notre pire repas marocain. C’est le jeu… backchich, échanges de produits (c’est nous les touristes), Redouane doit faire comme le patron dit...

Virée rapide dans l’ancienne médina un peu désertée et dans un sale état, au profit de la ville nouvelle qui grossit à côté. Retour d’une traite, 3 heures d'une route ardue, rythmée par des enfants qui agitent les bouquets du savoureux thym de la montagne. Les virages sont enfilés de main de maître par notre pro du volant… et de la conduite marocaine, résolument libérée.

Coucher de soleil sur Marrakech et nous retrouvons Slimane qui nous attend avec un trio pastilla au bœuf, tajine de poissons et tarte aux fraises qui nous laisse pantois 😉

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Comme chaque matin, nous petit-déjeunons au son de Phil Collins Live, le gérant doit être fan 😉 Au programme du jour : réservation de nos billets de bus pour Agadir mercredi. Etape « Gare routière principale » incontournable, l’achat se fait sur place. Ce qui nous conduit une nouvelle fois à Ghéliz, la ville « nouvelle » qui s’occidentalise à vue d’œil. L’architecture marrakchi cède la place à des immeubles de standing, le moucharabieh de bois aux panneaux de métal, le kitsch en clin d’œil.

Le bon plan pour les produits locaux, c’est le Carrefour Market, dans le centre commercial Mohamed V, paradis des marques européennes moyennes gamme… on n’est pas à Dubaï ! J’y fais un stock d’eau de rose au « bon prix », dommage pour le souk si typique mais où la mauvaise affaire vous guette. Il parait qu’environ 40% des produits sont fabriqués en Asie. Retour vers la médina via le "Cyberparc" - jardin de sultan restauré par Maroc Télécom - bienvenu par la chaleur montante, 29° au compteur ! Traversée rapide du quartier central Jemma El Fna et Koutoubia dans la fournaise du trafic pour piquer sur le quartier juif : le mellah. Il offre un visage rénové, aux ruelles préservées des touristes qui pullulent à deux pas.

On s’enfonce jusqu’au cimetière juif, restauré lui aussi, en évitant à nouveau le piège du rabatteur qui nous affirme que nous sommes dans une impasse… au secours ! Une ambiance éternelle dans ce lieu de mémoire où reposent hommes, femmes, enfants, sous des tombeaux de briques recouverts de chaux blanche, dans l’anonymat et l’humilité… des juifs berbères, c’est le même peuple, les mêmes valeurs dans la mort.

Le souk du mellah, aéré et convivial, réunit bijoutiers berbères et marchands d’herbes et d’épices, merciers, bouchers, primeurs… jolie balade jusqu’à la place des Ferblantiers pour un thé à la menthe qui arrive à point.

Notre chemin du retour passera par un… passage, le passage du roi, où les marrakchis rendent honneur à leur souverain par un affichage d’objets et de photos, mémorial kitchissime à l’entrée du souk.

On s’y engouffre, étourdis par la profusion de marchandises, chaque échoppe est multipliée par 10, 100… comment est-il possible d’écouler tout ce stock ? Combien sont-ils ? Mystère…

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Aujourd’hui, grand bol d’air marin ! Essaouira, la belle Mogador, son port, ses sardines et ses remparts aux accents malouins. Le départ en bus s’avère laborieux, réduits que nous sommes à l’état de marchandise échangée entre transporteurs, remplissage du bus oblige ! Après plusieurs conciliabules entre chauffeurs, nous sommes transférés dans un minibus de bonne allure avec le sosie de Jamel Debbouze (encore lui), version obélix 😉 Et c’est parti pour la traversée du reg, en cours d’urbanisation galopante. Les champs d’oliviers prennent le pas sur le désert de pierre, puis les eucalyptus et les arganiers près d’Essaouira.

Pendant les 190 km qui nous séparent de l’Océan, nous traversons de nombreuses mini-villes où ça construit à tour de bras. L’anarchie règne dans ces villes-rues aux centres encore moyenâgeux, contraste violent parfois, effervescence toujours !

Arrêt pause-pipi et « coopérative de femmes » de production d’Argan, au label Ecocert … sans commentaires, ou plutôt si : nous sommes menés manu militari par une jeune femme apprêtée pour découvrir la soi-disant fabrication de l’huile tendance. Des femmes d’âge « respectable » sont alignées en rang d’oignons, concassant la noix à la chaîne, une vitrine peu « équitable » d’un commerce florissant où seuls certains tirent leur épingle du jeu... d'autres acteurs plus éthiques œuvrent également, heureusement.

Ça devient comique quant le bus s’arrête devant un arbre à chèvres, savamment orchestré pour un « garde à vous » pile poil à notre arrivée. Les ruminants cornus grimpent aux branches d’arganiers pour croquer la bogue, premiers concasseurs « maison » pour libérer la noix intérieure. Dans ces coopératives « industrielles », ce sont les machines qui prennent le relais mais on reproduit le tableau pour le gogo… effet notable du tourisme de masse.

Nous arrivons à pic sur le port d'Essaouira, c’est lundi et c’est épique ! Bateaux surchargés de la divine sardine, goélands surexcités, équipages hurlants… certains débarqués en viennent aux mains pour régler un désaccord flagrant, la circulation, si on peut la nommer ainsi, est dantesque ! Au milieu de ce tohu-bohu, quelques étals surgissent, du poisson frais (ou pas ?), sorti des énormes bacs en plastique, pas de glace en vue 😉 Le spectacle est total, les chats et les goélands bien gavés.

On entre dans la cité par les remparts et la porte rendue célèbre par Orson Welles, Game of Trones ensuite. C’est un peu le choc pour Philippe tant la médina a changé, en pleine rénovation elle aussi. Adieu échoppes d’artistes, les échoppes du souk gagnent du terrain, infiltrant chaque ruelle.

Un « pas de côté » et des rues apaisées donnent encore l’idée de ce que fut Essaouira dont le développement actuel offre le visage d’une station balnéaire moderne. Le quartier juif fait l’objet d’une restauration « à l’identique », comme l’ont été les remparts et certains riads.

Une galerie nous fait de l’œil. Nous y pénétrons à l’invitation de son propriétaire, François Real, un globe-trotter posé à Essaouira. Très belle expo au cœur d’un riad immense et aménagé avec goût. Pause artistique en compagnie de deux peintres : Britta Reinhard et le marocain Said Ouarzaz, deux univers très différents, très forts. Si vous arpentez la médina, poussez la porte du Real pour une échappée picturale et le plaisir d’une belle rencontre.

Hors des murs et des travaux, nous cheminons enfin sur le grand remblai où, peu à peu, les villas individuelles sont supplantées par des immeubles « grand standing », aux spots de surfeurs et autres fondus de vagues, un nouveau visage pour Swira la berbère.

Retour dans la lumière rouge du soleil couchant qui enflamme le paysage. Notre bus slalome dans le noir entre vélos, cyclos, mulets et leur équipage… toujours étonnant de ne pas voir plus d’accrochages ou d’accidents. Slimane nous attend ce soir avec, fait notable, un plat unique de brochettes de poulet aux légumes, du calme pour nos estomacs !

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Dernier jour marrakchi ! Et l’on se perd encore dans le labyrinthe médinesque, virevoltant entre piétons, vélos, cyclos, gagnant en souplesse et anticipation ;)

On passe devant l’énooorme mosquée Ben Youssef et l’école coranique renommée… la Medersa Ben Youssef, en restauration elle aussi !

Nous devenons expert dans l’art d’esquiver rabbateurs et menteurs – ne jamais accepter de se faire accompagner pour se rendre quelque part, demandez à un artisan, une femme dans la rue… évitez les enfants aussi, c’est triste mais même les locaux vous le dirons – et pointons vers le quartier des tanneurs, via des ruelles populaires, sans touristes. Le cœur marrakchi bat ici, entre sortie d’école et marché de rue. Happés par un jeune rabatteur « de la famille », nous saisissons l’occasion de visiter sa tannerie vraiment dans son jus, et ce n’est pas qu’une image ! Où l’on apprend les différentes étapes de ce métier ancestral par la voix des hommes épuisés qui le pratiquent avec fierté. Pas de chlore ici, les cuirs sont traités au bain d’excréments de pigeon, à la chaux vive, avant la terrible phase de grattage de la graisse… Puis moult lavages dont l’ultime à l’eau de mimosa pour parfumer un peu. Séchage et grattage par un forçat du cuir, musclé comme un gladiateur. Pas de coloration à cette saison : elle ne s’opère qu’en août pour s’assurer qu’aucune humidité ne viendra contrarier le bon séchage des 3 couches successives de couleur, « toute la différence avec les cuirs de Fès » nous livre notre guide, un brin chauvin.

Naturellement, en fin de visite, nous voici livrés en pâture à la boutique familiale « sans obligation » 😉Nous prenons l’information à la lettre et devisons sur les tendances en matière de sac à dos. Le fabricant réalise des commandes spéciales pour l’Allemagne, de belle facture, pour les bobos à vélo. Quelques dirhams donnés à notre jeune guide qui nous sollicite à nouveau : pas d’achat, il faut gonfler un peu le backchich. OK, notre découverte les vaut bien !

Retraversée du souk par la belle mosquée Ben Selah au zellige bleu.

Intéressés par les tapis Boucherouite, tendances dans les magazines déco français, nous avons mis sur notre liste de visite le Musée Boucharouite. Nous voulons en savoir plus sur ces réalisations des vieilles femmes berbère, à partir de tissus recyclés. Avec Patrick de Maillard, le propriétaire des lieux et créateur/conteur du musée, nous passons plus de 2 heures captivantes, à la rencontre de ces merveilles tissées dont il fut l’un des « découvreurs » avec son ami Soufiane Zarib, l’un des commerçants les plus « en vue » de Marrakech. Désœuvrées à un âge avancé où les travaux sont trop pénibles, les vieilles berbères se lancent dans ses tissages personnels en « upcyclant » vieux vêtements, robes de fêtes, toutes de coton ou polyester, la laine est trop noble pour ces tapis « perso ». Dans cette production hétéroclite se révèlent de grandes artistes qui vont, à travers ces ouvrages, raconter leur vie, la Nature, la famille, les fantasmes… le résultat est stupéfiant de beauté, de poésie et d’émotion. Il faut savoir décrypter les codes berbères, choix des couleurs, formes, tout ici veut dire l’histoire et invite à en inventer de nouvelles. Les « sindekhs », tissés sur la trame fournie par les sacs de riz et autres denrées venues de Chine dans les souks des montagnes, servent de tapis d’éveil pour les bébés berbères : matières, couleurs, odeurs, pour attiser les sens.

Quant au riad qui sert d’écrin au musée, quelle élégance, quelle sobriété, une restauration assurée par les architectes Karl Fournier et Olivier Marty (le musée YSL, ce sont eux !), amis de Patrick. Prendre le temps d’un délicieux thé sur la terrasse, accompagné de sablés fondants… la vie marocaine à l’état pur !

Nous quittons ce paradis par une incursion dans la partie privée où Patrick nous dévoile quelques acquisitions du mobilier art déco de La Mamounia, vendu aux enchères pour le remplacer par le sacro-saint « desiiiiign » !

Sortie de la ruelle pour retrouver la touffeur de la médina et le vacarme du souk, poussiéreux à souhait à cette heure chaude. Un léger détour pour une visite éclair du complexe artisanal, officiel celui-là, dépeuplé aussi, qui offre un sas de fraîcheur au milieu des artisans aux ordres pour satisfaire le touriste, à l’affût quand même de quelques dirhams pour une démo. Intéressant cependant pour connaître les justes prix et les conseils techniques.

Chou blanc à La Mamounia citée précédemment, où la visite des incontournables jardins n’est ouverte aux tenues « décontractées » (en gros le bermuda) que dans la journée. Après 17 heures, tenue correcte exigée ! Nous retrouvons des amis à l’hôtel voisin, proche des travaux de la grande bibliothèque. Le programme de rénovation de Marrakech promet un nouveau visage de la cité, à redécouvrir lors d’un autre voyage. Sur la route du retour au riad, la Koutoubia illuminée se fait admirer, jeux d’eau et fontaines savamment orientées pour des perspectives flatteuses.

Dernière soirée avec une salade de légumes croquants, un tajine au bœuf et pruneaux et des oranges à la canelle. Au revoir plein d’émotions avec Slimane Falah, notre hôte toujours souriant, un brin rêveur, une chouette rencontre avec ce jeune berbère tiraillé entre le poids des traditions et la friction continue avec la jeunesse européenne, qui ouvre pour lui de nouvelles perspectives… on salue le riad Errabii, une étape confortable, authentique, gourmande, une adresse fortement recommandée 😀

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Bonne négo avec le taxi qui nous prend 10 dirhams pour nous livrer à la gare Supratours, les bus qui prennent le relais là où il n’y a pas de trains. Tout un petit monde s’active autour de nous : l’homme qui charge les valises, celui qui « checke » les passagers et enfin notre chauffeur… 3 métiers différents à l’opposé des chauffeurs multi-casquettes des cars Macron 😉

Le bus est flambant neuf, on grimpe tout à l’avant, pour un road trip avec vue. L’autoroute vers Agadir traverse d’abord le reg aux pierres jaunes, désertique. Pause dans une halte routière dernier cri où chacun vaque en fonction des besoins...

Puis le grand plateau des Ida ou Bouzia, monts de terres rouges virant au vert de gris, un paysage fantastique qui marque les contreforts du Moyen Atlas. Habité aussi, près des multiples oasis où se cultivent les arbres fruitiers.

Nous arrivons à Agadir par l’Est. Curiosité : l’autoroute est désherbée et balayée avec soin, contrastant avec les champs jonchés de plastique et autres déchets. Pourquoi ce ménage routier ? La ville côtière honore son roi, présent pour quelques inaugurations dans la cité de près de 500 000 habitants, en plein essor. Des milliers de drapeaux flottent le long des routes, les gardes royaux et autres militaires sont au taquet. Côté est donc, le campus étudiant ultra moderne affiche les ambitions royales : commerce, tourisme, droit, il s’agit de préparer la jeunesse marocaine à réinvestir dans le pays, construire l’avenir... Le complexe hospitalier universitaire sort de terre et partout, les grues érigent les quartiers du futur (avant pandémie mondiale). Peu d’eau dans les oueds mais des golfs partout… on connaît la musique déjà vécue en Espagne. On longe le souk aux remparts rénovés, le Maroc est en grande maintenance !

Dans la zone touristique qui longe la majestueuse baie, les hôtels accueillent une clientèle cosmopolite, étrangers et locaux se mêlent en toute simplicité. Voilées ou non, les femmes affichent leur caractère et leur indépendance. Nous croiserons d’ailleurs beaucoup de jeunes femmes de tous continents voyageant seules, sac au dos et sourire aux lèvres.

L’hôtel Argana a belle allure avec son plafond sculpté, ses vitraux et ses petits jardins soignés.


Panique à l’accueil : problèmes de chambres – l'arrivée du roi semble avoir chamboulé les réservations pour loger son staff - des dames du cru enguirlandent copieusement le réceptionniste hindou dans un arabo-français plutôt comique et nous attendrons patiemment qu’une chambre nous soit… peut être… accordée, patience et calme récompensé par une jolie vue sur mer dans une chambre refaite à neuf !

Balade sur le remblai baigné de soleil et de chaleur… réchauffement climatique en marche. Les familles agadiroises en profitent, les enfants s’amusent, belle fin de journée dans l’air iodé à l’arrière parfum de sardines, des pêcheurs arrivent au loin. La table du dîner fait se côtoyer familles et retraités, collaborateurs royaux et commerçants, quelques surfeurs égarés dans ce 4* glissent entres les tablées, tongs et dreads en goguette.

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Reconstruite après le tremblement de terre de 1960, la nouvelle Agadir propose un florilège passionnant d'architecture moderniste. Le Corbusier fut consulté et c'est le grand architecte marocain Mourad Ben Embarek qui dirigea le haut commissariat à la reconstruction. Le style brutaliste, où s'emploie le béton brut, est particulièrement présent, à l'image du fonctionnalisme, qui reflète la fonction de l'ouvrage. Ce patrimoine offre un panorama en tous points remarquable d'édifices à redécouvrir à l'occasion des balades.

La cité administrative, judicieusement nommée puisqu'elle regroupe absolument TOUS les services publics possibles, témoigne elle aussi de ce mouvement d'urbanisme fort, à préserver à tout prix. A son entrée, les écrivains publics attendent l'usager... un métier ici bien vivant pour accompagner le citoyen dans la rédaction des formulaires.

Après l'urgence de la reconstruction, la ville en mouvement offre aujourd'hui un visage architectural contemporain... cliniques haut de gamme, villas chics, et boutiques de luxe dans les nouveaux quartiers.

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Ville balnéaire en pleine expansion, Agadir oscille entre son passé de station touristique prisée des Français en quête de soleil – le Club Med y implante l’un de ses premiers spots en 1965, quasi sur la plage – et son avenir marocain, un programme dantesque d’urbanisation : Agadir City Center, l’immense complexe commercial et hôtelier, Agadir Bay, centre d’affaires, technopole et pépinière de start-up du numérique, les panneaux affichent les projets et, tout près, les premiers occupants des lieux se préparent à accueillir le roi venu inaugurer ces bâtiments aux architectures graphiques, signe d’une nouvelle ère.

D’autant plus impressionnant qu’avec Mohamed VI dans la place, armée, police et autres vigiles veillent au grain sur la « royale » avenue qui ouvre ce champ des possibles. Grosses berlines et cross-over rivalisent de chevaux sur les parkings des immeubles de standing déjà occupés, où une nouvelle « upper-class » entend croquer de la mondialisation, et pas en mode « slow » !

L’écologie est pourtant bien présente dans les esprits, depuis la COP 22, accueillie en 2016 à Marrakech. A l’entrée de la grande plage, la signalétique interpelle l’usager sur la durée de vie des déchets, des journées thématiques de sensibilisation complétant le dispositif… inspirant pour nos stations vendéennes.

Depuis notre hôtel l’Argana, les différents quartiers de la cité s’ouvrent à nous, pratique pour arpenter les rues, rougies des drapeaux pavoisant en l’honneur du roi. On démarre par la baie de 5 km, prisée des surfeurs, embrumée au petit matin. C’est la balade rituelle, les pieds dans l’Océan Atlantique. En ville, le nouveau quartier d’Agadir Bay va bientôt sortir de terre, le long de l’avenue qui mène au Marjane, le E.Leclerc marocain. L’avantage d’une visite de supermarché est de frayer avec les habitants et de bénéficier des conseils des clientes du lieu (pas beaucoup d’hommes à l’horizon), sourire et bienveillance de femmes heureuses d’échanger sur les variétés de thés, la meilleure eau de rose ou le bon choix des boulettes de sardines. Plus surprenant, on y croise une classe d’écoliers en goguette avec leurs maîtresses, les mains débordant de bonbecs, prêts pour le passage en caisse en rang bien serré ! Retour vers le centre ville « historique » - celui post 60’ – en passant devant Webhelp, call center dernier cri qui recrute à tour de bras les fameux téléconseillers des opérateurs européens et maghrébins. L’Uniprix s’apparente à une caverne alibabesque : crèmes et huiles marocains à prix malins, paniers, bracelets, vaisselle, tongs, chapeaux, alcools, textile, tout, absolument tout ce qui peut être acheté est ici. Et hop, provision de jus d’anis pour apéro en cachette à l’hôtel 😉

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Virée dans la Marina et shopping haut de gamme au programme ! C’est les soldes de fin d’hiver. Le Zara local regorge de fringues couleur locale : on cache les fesses, et ça brille 😉 Dans une autre boutique chic, quelques pièces lamées jouent du côté de Balmain… les marocaines sortent toute de lumière vêtues, talons vertigineux et robe de soirée forment un combo très prisé. MAC, le maquilleur des pros, est là aussi ! Côté chaussures, tout pour l'été, ça envoie la couleur 😀 Belle marina que voilà, aux appartements pris d’assaut par un petit monde huppé… La ville se transforme, réinvestie par familles et touristes de sa royale majesté qui, voilées ou pas, viennent maintenant goûter le week-end aux plaisirs balnéaires.

Au cœur de la cité, la Vallée des Oiseaux est le rendez-vous des familles venues en nombre titiller la volaille engrillagée. Une fausse cascade s’avère être LE spot à selfies du coin, très kitch. Partout le monde s’auto-sublime, munis de smartphones géants, redoutables miroirs de l’ego international.

Le soir, les enfants sont les rois du remblai, illuminé comme à Rio, la montagne messagère éclairée elle aussi en toile de fond : Dieu (Allah), La Patrie, Le Roi. Dans les bars, l’ambiance monte, monte… bières et cocktails coulent à flot… la nuit, tout est permis ! Les belles marocaines tombent le masque, tout appât dehors. Etudiants, touristes, seniors, le monde se mêle et s’emmêle, dans la fumée des cigarettes.

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Le grand souk d’Agadir se fait beau lui aussi : rénovation des remparts et modernisation des espaces intérieurs – le Maroc est résolument un vaste chantier de rénovation. Plus de 3 000 échoppes alignées au cordeau, une profusion de denrées, primeurs magnifiques, copies de marques hallucinantes, dont un seau de ménage Louis Vuitton absolument incroyable, couturiers, cordonniers… un festival de couleurs, de sons, de visages souriants, prêt à vous vendre la terre entière, dans une ambiance agréable, ici pas de deux-roues motorisées, pas de poussière, et des allées aérées.

En refusant gentiment les sollicitations diverses, le cheminement est plaisant, le bon plan à portée de dirham : épices, herbes, macérats, pierre d’argile et d’alun et… nos fameux tapis boucherouites que nous retrouvons à des prix bien plus attractifs qu’à Marrakech.

Côté boucherie, les étals rivalisent de morceaux choisis, des plus nobles au plus extrêmes : tête et pied d’agneaux, testicules de taureaux pendants au milieu des abats, rien ne se perd… tout se transforme.

Courant d’air « bobo » au café du souk, tenu par un jeune couple en pleine ébullition. Les compteurs électriques sont recouverts de mantras inspirés, la théière design emplie de thé fumant. A la faveur des travaux, une nouvelle génération fait bouger les lignes.

Tranquillement installé à une table, nous remarquons Aziz et sa chemise branchée. Où l’a-t-il achetée ? Philippe engage la conversation avec ce chanteur de variétés qui officie le soir dans un resto du remblai. Prêt à échanger sa chemise, il nous donne rendez-vous le soir même pour profiter de sa performance. Nous « anguillons », donnant l’espoir d’un « peut être plus tard », un peu apeurés par l’idée d’une soirée et du tour de chant de notre artiste. On a repéré un « Caf conc ‘ » plus dans notre style à deux pas du remblai...

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A une vingtaine de kilomètres d’Agadir, le village de Taghazout fait la « Une » de tous les bons plans « tendances » : le surf est roi ! C’est en bus – Ligne 32 qui nous prend face à l’hôtel sur l’avenue Mohamed V – que nous avons décidé de faire la route côtière. Hélas, point de 32 en vue pendant 30 longues minutes, l’arrêt de bus commence à déborder de voyageurs malheureux. Nous cédons aux appels des taxis et embarquons pour une folle équipée avec quatre autres passagers. On nous explique que le roi, encore lui, aurait réquisitionné la dite-ligne. Haha, quoi qu’il en soit, nous voilà partis pour une découverte routière : port de commerce et de pêche, vide de ses sardiniers sortis en mer, Aouri, le village de la banane devenu ville, et le bétonnage en règle de toute la côté, entre résidences de luxe, hôtels et complexes touristiques énormes.

L’arrivée à Taghazout reste un enchantement tant le village escarpé résiste encore et toujours à l’envahisseur… quoi que, surf oblige, la boboïsation y soit aussi en marche. Moult restos et cafés animent aujourd’hui le sentier-rue que frôle dangereusement la mer aux ample vagues bien enroulées.

Typiques aussi ces maisons colorées, habillées par les street-artistes du cru, et qui montent, montent jusqu’au roof top chamarrés. Un joyeux bazar architectural, le charme opère.

Les locaux sont installés plus haut (pas fous !), immeubles en construction perpétuelle où l’art du re/up cyclage prévaut à chaque entrée. Le must : la porte encadrée d’un carrelage de choix !

Les surfeurs du monde entier s’emparent de la baie lumineuse, beaucoup sur l’eau, moins sur la vague 😉 L’engouement pour ce sport est une chose, la pratique en est une autre... Se balader le surf sous le bras donne déjà l’allure recherchée, certains y passent probablement la journée. La marée montante met en évidence la terrible montée des eaux : des maisons sont déjà tombées sous l’assaut des flots.

Le bus 32 est au rendez-vous du retour pour une traversée des grands projets urbanistiques à venir dans cette région. Nous apprendrons dans quelques jours que le roi a fait une « descente » en personne sur un chantier dont le promoteur prenait des largesses avec les autorisations… 48h pour démolir toutes les constructions interdites sous la surveillance du ministre de l’intérieur, fini de rigoler !

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Un dimanche d’été ! 30° au thermomètre et un monde fou sur la plage, transformée de bon matin en playground géant : foot, frisbee, agrès… des équipes multiculturelles partagent le plaisir du jeu sportif avec fair play et grandes rigolades. Ici, pas de jugements, que du bonheur sous le soleil brumeux. Tout l’après-midi, des milliers d’Agadirois et habitants des environs vont se mêler aux touristes, les plus jeunes goutant la joie du saut dans les vagues et quelques téméraires se risquant au wave board… attention à la lessiveuse. Venues du bled, les mamies tentent le doigt de pied dans le ressac, vite trompées par le flot montant, énorme ! ça rit, ça joue, ça déguste aussi la bonne cuisine familiale, la plage est immense, c’est idéal ! Les baigneurs traîneront tard dans la soirée avec le vent grandissant, chaud, enveloppant.

Balade ultime au cœur de la Cité Suisse, berceau de la ville reconstruite après le tremblement de terre de février 1960, où Agadir fut détruite en 15’. 15 000 personnes ont perdu la vie dans la nuit. Pour participer à l’effort collectif, la Croix Rouge Suisse et ses bienfaiteurs s’engagent dans un projet de construction d’urgence : 80 unités d’habitation, une maison des jeunes, des magasins, la vie reprend depuis ce premier quartier qui inaugurera toutes les constructions bétons purs 70’ du centre ville. La Cité Suisse aujourd’hui, c’est le quartier chic. Berlines climatisées et villas haut de gamme avec trottoirs privés, chacun gère devant sa porte 😉

Nous croiserons peu de migrants d’Afrique Subsaharienne durant notre séjour. Les familles sont reléguées dans des camps au Nord de la ville, dans le quartier d’Anza, s’aventurant vers le supermarché Marjane pour demander aide et argent. D’autres se convertissent en vendeurs de plage, nombreux, malgré une vente de rue en berne, le pouvoir d’achat des touristes baisse lui aussi, ici, tout le monde le dit. Les derniers petits souks de quartier se meurent, leurs vendeurs témoins de ces contrastes grandissants entre deux mondes qui se côtoient mais dont les chemins s’écartent, inexorablement… Reste que cette région magnifique nous invite à revenir, encore tant à découvrir, Tafraoute, Tiznit, Tan-Tan, Taroudant, promesses de belles échappées dans l'après pandémie, le confinement nous cueille à notre retour.