L’arrivée au village
Les trois heures de bus depuis Oulan Bator jusqu’au village de Tsenkhermandal (à l’est) passent vite lorsque l’on admire les steppes mongoles pour la première fois. On ne se lasse pas d’observer les collines sans fin, les troupeaux de moutons, les yourtes et les nomades à cheval. Heureusement, bien qu’il y ai une télé dans le bus elle reste éteinte, ce qui ne fut pas le cas pour nos collègues volontaires (un couple d’hollandais, Arno et Aster avec leur petite fille Annik de neuf ans, qui viennent aider la même famille mongole que nous) qui ont subi trois heures de karaoké mongol, avec bien sûr tout les passagers qui chantent !
Notre correspondante Workaway, Ganaa, travaille comme guide touristique dans le désert de Gobi. Elle ne sera pas là à notre arrivée et nous rejoindra seulement à la fin, au moment de ses vacances. C’est donc avec sa mère Ayuna, son père Gamba et sa fille Anu que nous allons séjourner. Ayuna tient une boulangerie dans le village et a besoin d’aide pour faire le pain et également s’occuper du jardin et du potager.
Quelques images du village
La maison de nos hôtes
C’est une maison de briques avec quelques détails qui feront tout l’exotisme de notre séjour :
- L’eau : Il n’y a pas d’eau courante dans la maison. L’approvisionnement se fait grâce à celui que nous nous amusons à surnommer « waterman » (surnom qui se transformera rapidement en « vodkaman »...). Il distribue l’eau à travers le village dans sa petite camionnette. L’eau est amenée depuis la réserve du camion par un long tuyau (troué, mais ça n’a pas l’air d’avoir trop d’importance) vers les deux cuves bleu qui constituent la réserve de la maison: une dans le local boulangerie et une dans la cuisine. Pour faire la vaisselle, il faut prendre de l’eau dans la cuve avec une casserole en plastique, pour la mettre dans un grand récipient. Une fois la vaisselle fini, jeter l’eau sale dans le seau qui est dehors. Quand celui ci sera plein, le jeter dans la fosse au fond du jardin. Dans’ l’espace commun, il y a quand même un évier pour se laver les mains et se brosser les dents: l’eau descend d’un réservoir en plastique (à remplir soit même avec la casserole), tombe dans l’évier puis coule ensuite dans le seau placé en dessous qu’il faut aussi vider régulièrement. Nous nous ferons rapidement à toutes ces nouvelles habitudes quotidiennes, et c’est souvent qu’on se croise dans la maison une casserole remplie d’eau à la main !
Pour la petite histoire, nous avons rencontré « the waterman » pour la première fois lorsque nous étions en voiture avec Gamba (le mari d’Ayuna) à approvisionner les petits market en pains pour leurs clients. Nous le croisons sur la route, Gamba lui fait signe et il monte avec nous en voiture. Quitte à faire la tournée des magasins, autant en profiter pour faire quelques courses: Gamba ressort avec deux bouteilles de Vodka (la bouteille est à 5000 tugriks, soit environ 2 euros). Il en glisse une sous le siège, donne l’autre au nouveau passager qui lui la glisse sous son pull. Pas pour longtemps puisqu'il s’amusera à la ressortir plusieurs fois pour boire une « petite » gorgée, en prenant bien soin de nous mimer de ne pas l'ébruiter (il était clair qu’il n’en était pas à sa première gorgée de la journée, malgré l’heure matinale!). Comme il était de bonne humeur (évidemment), il tenait absolument à communiquer avec nous. Ne parlant pas anglais, il s’est tout simplement mis à nous parler en mongol ! Au bout d’un moment, voyant que nous ne comprenions pas, il nous cita des noms français comme Jacques Chirac, Mitterand, Macron ou même Nabila, ce qui a entraîné de bonnes rigolades dans la voiture ! Nous le recroiserons deux jours plus tard à la maison, dans un état pire encore où il nous prendra chacun dans ses bras plusieurs fois avant de repartir en titubant. Bref, c’est donc ce monsieur qui nous livre l’eau de la maison (amusant paradoxe ;)
- La salle de bain : Et bien il n’y en a tout simplement pas ! Seulement des douches communes au village. Première mission: les trouver la première fois (s'adresser au mini market nous dit-on... mais lequel ?! Et mimer car personne ne parle anglais). Puis prier pour que ce soit ouvert (une fois on nous a annoncé pas avant une semaine !). Si c’est ouvert, prier pour que les ballons d’eau chaude fassent bien leur travail (la première fois nos collègues hollandais ont attendu 20min pour que l’eau monte seulement d’un degré…). Voilà pourquoi quand on part prendre une douche, on nous souhaite systématiquement « Good luck » !
- Les toilettes : et bien, ce serait mentir que de dire qu’il n’y en ai pas, mais bon, ça reste quand même assez rustique…
Aucune des membres de la famille ne parle anglais. Pour communiquer, nous utilisons bien sûr énormément le langage du corps, mais nous nous aidons aussi d’outils précieux comme le calendrier, la calculatrice et un petit dictionnaire d’appoint mongol-anglais. C’est ainsi qu’ils nous ont expliqué (entre autre) que chez eux il fait entre 0 et -25° au printemps et jusqu’a -40° en hiver !
Malgré tout, il règne une très bonne ambiance à la maison. Les enfants jouent entre eux, Aster donne des cours d'anglais tout les jours aux petites. Les grands s'amusent aussi à jouer aux cartes tout les soirs (le trouduc' est un jeu international !). Nous faisons quelques balades ensemble, et cuisinons régulièrement (j'avoue, c'est aussi pour éviter la viande de moutons que nous mangeons tout les jours même parfois au petit déjeuner... vive les crêpes, les frites et les pizzas !)
Workaway: du travail bénévole
Plusieurs travaux réalisés chez Ayuna par notre fine équipe !
- Deux jours passés à la « Green house » (jardin et potager) où nous devons enlever toutes les mauvaises herbes à la main sur un grand terrain
- Une journée entière pour les filles à couper des oignons (on a du couper toutes les tiges du potager afin qu’ils ne gèlent pas. Au total nous avions 6 cartons pleins à craquer ! On en voyait pas la fin…)
- Deux jours entiers pour les garçons à construire et installer une barrière en bois dans le jardin
- De nombreuses heures à faire du pain: faire la pâte (je me suis fait les bras!), huiler les moules, les mettre au four, les sortir, les mettre en sachets, les distribuer dans les market
- Et bien sûr les heures de ménage, vaisselle, cuisine… et lavage de vêtements ! Car même si Ayuna dispose d’une petite machine à laver le linge, le rinçage se fait à la main, toujours dans les grandes cuves à remplir à la casserole
Nous profitons bien sûr de nos heures de repos pour se promener dans les collines environnantes, et découvrons des paysages magnifiques, avec sans cesse des faucons volant au dessus de nos têtes.
Rencontre avec les nomades
Ayuna et Gamba nous réservent les deux plus beaux jours de la semaine pour une expédition dans la steppe. Nous partons tous en mini-van à travers les collines, un chemin de terre dessine vaguement la route à suivre pendant une centaine de kilomètres. Le terrain n’étant pas stable du tout (tout les cinq mètres nous traversons fossés, rochers ou rivières), nous ne roulons pas à plus de 40km/h et décollons plusieurs dizaines de fois du siège ! Nous croiserons deux cavaliers, quatre ou cinq voitures, une quinzaine de yourtes, des dizaines de vaches (indiennes pour certaines) et de chevaux et des centaines de moutons.
Pour vous donner un ordre d'idée, en Mongolie il y a 3 millions d'habitants pour 45 millions d'animaux (moutons, chèvres, chevaux, bovins, chameaux et yaks).
Plusieurs fois Gamba et Ayuna s’arrêtent pour rendre visite à leurs amis nomades (qui par définition changent de place régulièrement, le jeu est donc de les retrouver, ce qui n’est pas si facile !). Au fur et à mesure du périple nous sommes donc amenés à découvrir plusieurs yourtes authentiques mongoles.
En général le camp est composé de deux à trois yourtes, parfois une est dédiée spécialement à la cuisine et l’entrepôt des affaires. Les yourtes sont toutes plus belles les unes que les autres, habillées de quelques meubles, un ou deux lits, une chaudière qui permet de cuisiner et chauffer. Quasiment toutes possèdent un panneau solaire, et certaines sont équipées de la télé et même du téléphone !
Chaque famille nomade nous reçoit avec accueil chaleureux, sans jugement et avec simplicité. Même rituel systématique : Nous entrons dans la yourte et nous asseyons tous en cercle. On nous offre à manger et à boire. Nous découvrons les mets à base de lait de vache : le yaourt séché (qui ressemble à du fromage, très salé, je donnerai discrètement ma moitié à la chèvre qui en raffole) et le fromage frais (qui pour le coup ressemble plus à du yaourt, salé aussi), ainsi que le lait fermenté de jument (salé aussi mais moins pire qu’on pensait !), et les petites pâtisseries ressemblant à des bottereaux (ou bugnes pour les hauts savoyards) très appréciables pour faire passer le reste !
Ils n’hésitent pas non plus à nous faire découvrir leur environnement. Ils nous font monter sur leur chevaux, nous montrent la traite des juments, nous font essayer la fabrication de « cookies » (petits gâteaux plats) de fromage frais et la coupe du bois, et bien sûr nous font goûter leur vodka artisanale.
Malgré la différence de la langue, nous arrivons à échanger des prénoms, des idées, des rires et des sourires. Nous leur mimons que nous travaillons sur ordinateur, ils nous montrent qu’ils n’élèvent pas leurs moutons pour les vendre mais pour les manger. Pendant l’hiver certains restent dans leur yourte et d’autres migrent vers des maisons en dur.
Installation au parc et feu de camp
Pour finir, nous nous installons au camp touristique près d'un beau lac bleu, découvrons l'histoire de Chinggis Khan et de ses soldats (au 13eme siècle l'empire Mongole s'étendait jusqu'aux portes de Rome !) et passerons une excellente soirée autour du feu, sous les étoiles. Pendant la nuit, nous serons bercés par de fabuleux chants traditionnels mongols chantés par les locaux (un peu deshinibés par la vodka), mêlant plusieurs voix et plusieurs harmonies. Magique.
C’est environ dix jours plus tard que nous devrons quitter notre petite famille « éphémère », tristes et excités à la fois, car nous prenons la route en minivan direction... le désert !