Disons le de suite : Montevideo est une ville assez triste, comme le temps que nous avons connu en ce dimanche ! Heureusement, nous ne nous sommes pas bousculés ce matin pour nous lever et pour prendre le frugal petit-déjeuner proposé par l’auberge. Papa ayant eu, hier, une mauvaise info de la part du responsable de l’hôtel, avait acheté des compléments (jus et pain de mie), qui m’ont bien servis ce matin. Bref, nous sortons donc nous balader aux alentours de 9h30 et, avec l’aide d’un plan de la ville récupéré à l’accueil de l’auberge, nous débutons notre circuit du centre-ville.
En ce dimanche matin, alors que Montevideo compte plus d’1,5 millions d’habitants, ses rues sont vraiment désertes - il n’y avait déjà quasi personne hier après-midi, les magasins étant fermés. La grisaille et l’absence de touristes ajoutent à cet étrange sentiment, pour une grande ville, de désert dominical.
Du coup, nous nous retrouvons seuls sur la place centrale, la place de l’Indépendance, où se trouvent : un bâtiment de la Présidence de la République uruguayenne, une porte d’entrée de l’ancienne citadelle, la statue d’Artiguas, le Héros et Libérateur national, la Maison du Gouvernement, ou, encore, le Palacio Salvo, colossal édifice Art Deco. Juste à côté, nous avons pu apercevoir la façade du théâtre Solis, dont le bâtiment principal a été réalisé au milieu du XIXe siècle.
Montevideo est riche de très nombreux bâtiments de cette époque et nous avons pu en voir plusieurs au cours de cette marche à travers la vieille ville. C’est d’ailleurs moi qui, avec le plan, me suis transformé en guide touristique…
Qui se souvient qu’au tournant des années 1900 les paquebots des Messageries Maritimes faisaient escale dans la capitale uruguayenne ? De cette époque dorée, qui vit débarquer du vieux continent d’innombrables immigrants italiens, espagnols, suisses et même français, est née une ville européenne.
Nous sommes aussi passés à proximité de la cathédrale dans laquelle nous sommes d’ailleurs entrés, avons traversé un certain nombre de places comme celle de la Constitution, la place Zabala, la Plaza Cagancha avec sa statue de la Liberté, où, encore, la Plaza Fabini, pour poursuivre le long de la mer avec les Ramblas Francia et des Nations Unies.
Non loin de là, se dressent les immenses grues du port, indispensables au chargement et déchargement des gros containers. Amarré à l’orée de l’immense Río de la Plata, le port de Montevideo a, en effet, été fondé au début du XVIIIe siècle par les Espagnols pour faire concurrence au bastion, alors portugais, de Colonia del Sacramento.
Au fur et à mesure de l’avancée de la matinée, nous nous sommes tout de même sentis un peu moins seuls, d’autant que nous nous approchions du Mercado del Puerto et de ses rues environnantes animées.
Pour autant, nous ne nous sommes pas arrêtés déjeuner dans ce lieu un peu trop touristique et avons préféré poursuivre notre balade qui nous amènera au restaurant Facal, connu pour être le plus ancien de la ville et, donc, une sorte d’institution. D’ailleurs, nous nous faisons assez facilement convaincre par le serveur venu à notre rencontre.
Celui-ci, habilement et à la vue de mon maillot de foot, nous aborde en nous apprenant la tenue, cet après-midi à 17h, du derby entre le Club national de Football, 1er au classement, et Poñerol, le 2ème. En plus d’opposer deux clubs rivaux de la capitale, si le 1er l’emporte, il sera sacré champion d’Uruguay !
Tous les éléments sont donc réunis pour que ce soit un gros match et, Papa et moi sommes « chaud patate » pour y aller. Du coup, nous entrons, commandons en vitesse pour nous permettre de partir en quête de places - le serveur nous a donné un « tuyau » - et mangeons rapidement.
Maman, de son côté, rentre à l’auberge. Nous la reverrons quelques minutes plus tard car nous n’avions pas pris nos passeports sur nous. Or, cela est vraiment indispensable pour acheter les billets - sur ceux-ci sont imprimés nos noms afin d’éviter la vente « sous le manteau » !
Après moults péripéties car « le plan » du serveur était finalement mauvais, diverses demandes à des supporters, un bar... nous trouvons, enfin, une agence Red Pago (située dans un supermarché !) qui vend les précieux sésames. Nous nous les procurons (environ 18€/la place) et prenons, tout joyeux, la direction du mythique stade du Centenaire, construit pour la 1ère coupe du Monde de 1930 qui s’est déroulée ici, et qui a d’ailleurs été remportée par l’Uruguay (contre l’Argentine 4-2).
Inauguré le 18 juillet 1930, devant compter au départ 100.000 places, il n’en contient finalement 60.000 pour être livré dans les temps, soit avant le début de la compétition. L'architecte a choisi de placer l'aire de jeu sous le niveau du sol naturel, les tribunes de béton sont donc semi-enterrées, ce qui atténue la monumentalité du bâtiment et favorise son intégration dans le site. Arrivés bien 2 heures avant le coup d’envoi, nous avons le temps, avec Papa, d’en faire le tour et de voir les supporters des 2 clubs se diriger tranquillement - et sous les yeux de forces de l’ordre en grand nombre - vers les tribunes.
Nous nous installerons dans la notre 1h30 avant le coup d’envoi, nous permettant de voir monter progressivement l’ambiance et... la pression. Si nous sommes bien fouillés, la sécurité étant prise bien au sérieux avec ce type de match, nous avons été surpris de voir les supporters entrer avec tout leur matériel de mate (Thermos, tasse et bombilla) qui ne manquerait pas de faire des dégâts lancés sur un joueur...
À noter que le placement dans les tribunes est libre. Du coup, celle-ci étant très grande, le fait d’arriver tôt nous a permis de très bien nous positionner et de se retrouver sur un côté latéral du stade.
À 17h, le coup d’envoi est donné dans une ambiance incroyable. Les 2 cops de supporters se répondent, se chambrent et chantent de véritables chansons (avec de longs couplets) dont les airs et les paroles nous sont inconnus mais où on parle beaucoup d’hijos de Puta… Pour notre part, nous nous retrouvons sous un tifo (des banderoles blanches et rouges) étendu sur toute la longueur de la tribune du National Club de Football (dont les couleurs sont le bleu, blanc, rouge!). Une chance d’ailleurs car la pluie s’est invitée à la partie et tombe de plus en plus fort.
Ma voisine, ayant pitié de moi qui suis habillé du simple maillot du Nimes Olympique, me tend son pull que je porterai tout le match. Il me sera bien utile car la 1ère mi temps se déroulera sous un vrai déluge. Aussi, la prestation des joueurs n’est pas des plus belles. La pelouse est vraiment gorgée d’eau et les glissades et tacles dangereux sont légions. En même temps, le football uruguayen n’est pas connu pour être très technique… Les cartons jaunes fusent.
Il faudra attendre finalement la fin du match - la 81e minute exactement - pour voir le Club National de Football marquer le but de la victoire et du titre de Champion ! Nous sommes au milieu des supporters de cette équipe et donc en plein cœur de la fête.
Le coup de sifflet final retenti, nous ne nous attardons tout de même pas - il pleut toujours et Papa est gelé - et n’assistons pas à la remise officielle de la coupe aux Champions. Mais, ce n’est pas pour autant que nous quitterons le stade car nous sommes bloqués à la sortie par la Police qui veut éviter la confrontation, dans les rues, avec les supporters de Poñerol sortis très rapidement du stade.
Après une petite demi-heure d’attente, nous sommes enfin libérés et pouvons regagner, en petites foulées, l’auberge et Maman. Après une bonne douche chaude et le dîner pris à la cuisine commune, nous nous coucherons vers 22h30.