Carnet de voyage

2022, Yan, le Piémont et moi

4 étapes
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Boucle dans le Piémont, sommets et panoramas
Du 23 au 27 juillet 2022
5 jours
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Le 23 février 2022, j'offrais en cadeau d'anniversaire ce périple à faire lors de l'été de cette même année. Entre-temps j'aurais fait Compostelle ce qui me mettra au niveau sportif de Yan, enfin je l'espère. Entre ces deux moments et après quelques ajustements de planning nous trouvons une date possible du départ et la durée de la sortie. De mon côté, je dois proposer une sortie réalisable, aventureuse avec un risque minimum même si en montagne et surtout en haute altitude il faut toujours être très modeste. La nature est plus forte que nous.

Nous ajustons notre inventaire quelques jours avant afin d'être sûr de n'emporter que l'indispensable quels que soit les changements de météo. Dans mon sac j'ajoute une corde pour les ascensions finales si le besoin se fait sentir et nous rassurer mutuellement. La veille du départ nous invitons Alexia, Hervé et Yan à venir manger le soir pour fignoler les détails du sac et décrire un peu mieux le périple. S'il nous manque quelque chose nous nous arrêterons en route pour faire des emplettes. C'est une première expérience et ce sera l'occasion de nous ouvrir l'un l'autre et pour nous-mêmes aussi. Finalement nous nous connaissons pas tant que cela. Et puis faire des cadeaux de babioles certes souvent cela fait plaisir mais que reste-t-il après ? Pour marquer le coup je lui ai quand même offert un casque de montagne mais le principal message n'est pas là mais dans cette expérience unique de quelques jours en montagne avec son parrain.

Les sentiers, les traces ou les routes d'approche paraissent toujours longus et fastidieux. Ce fut le cas aujourd'hui, entre chaleurs humides, circulation dense et ralentie et une grande distance tous les ingrédients pour arriver plus fatigué qu'une étape de montagne. Nous y sommes enfin arrivés vers seize heures. Le Terme de Valdieri coincés entre des montagnes abruptes niche dans un bout du monde. Après le village des sentiers autour du massif de l'Argentera le massif le plus haut du secteur et le moins accessible pour le randonneur moyen.

Le Terme de Valdieri c'est aussi des termes où les ventres bedonnant rougissent à vue d'œil bien exposés au soleil prometteur, le propriétaire du bidon volumineux allongé telle une fritte pas encore dorée.

Nous montons la tente dans un pseudo camping près d'une chapelle dans un endroit calme sous les sapins et entourés de montagnes aux faces sombres et aux pointes sans neige.


Camping à Valdieri 

Le seul restaurant du bled montagnard affiche complet pour ce soir. Sans nous démonter nous reprenons la Fiât pour faire une nouvelle expédition à la recherche de la pizza du jour. Valdieri, pas de pizza, nous poursuivons jusqu'à Borgo San Dalmazzo où nous devrions enfin mériter notre persévérance mais en patientent jusqu'à dix-neuf heures puis retour aux termes, vingt-sept kilomètres perchés en montagne.

Finalement pour demain nous chargeons légèrement le programme, nous passerons au refuge Regina Elena mais sans bivouaquer, nous irons directement au lac du Mercantour. Ainsi nous pourrons profiter toute la journée du lundi des sommets autour de ce magnifique lac.

L'étape est courte mais un sacré dénivelé.

Il est presque vingt heures, nous dégustons nos pizzas sous l'œil bienveillant d'un saint peint sur le mur de la chapelle. Il semble nous dire c'est par là. Mais cela est une autre histoire.

Pizzas près de la chapelle 

Demain lever vers six heures trente, petit-déjeuner au bar puis ascension.

Un guide local 
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La nuit fut moyenne pour moi et plutôt très bonne pour Yan qui m'a dit avoir très bien dormi

Lever à six heures quarante-cinq, en moins de quarante minutes tout était rangé, les sandwichs répartis, les gourdes pleines, il ne nous manquait que le petit-déjeuner. Le bar Savoia ouvre à huit heures, sans tarder nous nous pointons sur la terrasse en attendant que le sésame libère la tratoria pour que nous puissions déguster la picola colazione italienne.

Bain de pieds hier soir

Nous voilà fin prêt pour démarrer, quelques nuages au-dessus de nous mais le soleil est bien au rendez-vous.

Le départ nous oblige à repasser par le village et emprunter une petite route goudronnée assez fréquentée par les randonneurs motorisés ce matin dominical. L'avantage ça grimpe doucement mais on avalé des kilomètres sans trop se fatiguer.

La montée vers le refuge Regina Elena 

Nous avançons à une allure moyenne, personnellement je ne veux pas prendre de risque d'une fatigue inopinée, Covid plus Compostelle cela doit avoir certainement un effet sur le corps.

Au bout de presque cinq kilomètres le goudron laisse la place à une piste en pierres. Déjà des randonneurs émergent de toute part. Il faut dire qu'il y a de quoi faire dans secteur : les sommets de l'Argentera, le monte Matto, les refuges nombreux du CAI (Club Alpin Italien) et de nombreux sommets à plus de 3000 mètres.

Le Refuge Regina Elena  

Une dernière traversée des alpages où les "mucche" paissent une herbe raréfiée d'une couleur jaunâtre, incidence d'une chaleur anormale compte tenu de l'altitude et de la saison.

Encore quelques pas, nous arrivons au refuge Regina Elena tenu par un monsieur d'un âge avancé, peu bavard. J'entame une petite conversation banale question de connaître le son de sa voix.

Malgré son air discret, il me précise que l'on peut cuisiner à condition d'avoir sa popote. Un bon quart d'heure de pause et nous repartons pour le col Cerise puis le lac du Mercantour.

Au col Cerise 2542 mètres

La traversée de l'éboulis rend la progression difficile, il est un peu plus de dix heures et le soleil, lorsqu'il veut sortir de son lit de nuages, cogne sur nos têtes protégées. Yan progresse d'une bonne allure, moi je traîne probablement le sac un peu lourd. De plus cela fait un mois que je suis rentré de Santiago mais à cause du Covid mes muscles se sont relâchés. Je m'aperçois que je sollicite pas les mêmes ressources musculaires. La différence c'est la lourdeur du sac et le dénivelé positif, mille trois cents mètres aujourd'hui. Plus l'habitude !

Douze heures dix, enfin au col, Yan m'attend juste vers les forts déchiquetés, témoins d'un passé guerrier. Juste sur le toit du fort militaire, une famille chamois se repose tranquillement, les bébés jouent sur le dos de leur mère et les mères nous observent comme si de rien n'était.

Il n'y a pas si longtemps ils auraient filé illico, aujourd'hui ils nous narguent en mâchouillant leur restant d'herbes fraîches.

Au col Cerise 2542 mètres 

Nous prenons notre déjeuner au col en compagnie d'autres randonneurs venus pique-niquer pour la journée. Belle vue sur notre ascension matutinale et une vue partielle côté français où les nuages et la brume de chaleur brouillent le paysage. Normalement nous devrions voir la mer mais aujourd'hui nous verrons qu'un ciel laiteux et des montagnes cachées par un film blanchâtre signe de grosse chaleur.


La famille chamois et le lac du Mercantour

Il est presque treize heures nous repartons rassasiés et reposés du moins pour ce qui me concerne. Yan n'a pas l'air exténué et même plutôt frais comme un gardon.

Après le col une courte descente, je loupe la bifurcation nous voilà obligés de rebrousser chemin sur deux cents mètres. Ça paraît pas grand-chose mais pour moi aujourd'hui c'est beaucoup. Yan est devant, m'attendre ne ferait que l'épuiser. Quatorze heures, le lac repose avec une belle eau calme. La montée jusqu'à lui m'a épuisé, j'ai dû faire quinze pauses sur à peine cent mètres de dénivelé. Covid ou Compostelle, ou les deux ?

Notre bivouac au lac du Mercantour 

Je préfère monter la tente tôt tant pis pour la réglementation mais le temps tourne et je ne veux pas me trouver à monter la tente en catastrophe. Autre règle, premier arrivé, premier servi. J'ai eu du flair, un couple de hollandais probablement en retraite, se pointe vers dix-sept heures pour poser une tente et me demander des renseignements. En effet, leur carte n'est pas assez précise, il manque pleins de sentiers mais ils parlent un français impeccable, ça facilite les choses.

Ce soir nous aurons des voisins qui veulent aussi faire la Cime du Mercantour et le Ghuilé demain.

Dîner pris vers dix-neuf heures au menu : nouilles chinoises, saucisson, camembert, banane et quelques amandes séchées, sur fond de brouillard et de rafales vent intermittentes.

J'espère pour demain d'être plus à l'aise dans les montées, nous laisserons nos affaires dans la tente.

Brouillard au lac et voisin hollandais 
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Malgré les gros nuages d'hier, la nuit fut calme et sèche. Lever à six heures dix, petit-déjeuner prit à la fraîche en compagnie des deux Néerlandais.

Nous préparons notre sac de la sortie du jour : sandwich, fruit, fruits secs, eau. Le minimum pour ne pas nous alourdir outre mesure. Départ vers sept heures.

D'abord le court du lac par le sud, puis un chemin et un pierrier nous mène au premier col. La tente et les deux Néerlandais semblent déjà bien petits.

Je tâtonne un peu pour trouver le chemin qui nous mène sur la vallée derrière le col. Finalement c'est un sentier raide et mal balisé. Nous le prenons avec assurance, la pente est abrupte mais sans danger particulier.

En moins de une heure quinze nous sommes dans le fond de cette vallée formant un cirque dans le fond.

Le chemin reprend de l'altitude, quelques cairns nous aident à suivre cette sente formée de pierriers et de pistes approximatives.

Nous remontons une moraine glaciaire nous conduisant tout droit à deux lacs dont un semble presque asséché.

Départ et ascension vers le Ghuilié 3000 mètres 

Sur la descente, des chamois et des bouquetins nous toisent gentiment. Nous sommes vraiment très près d'eux. Ils ne semblent pas farouches ni apeurés.

Bouquetins et lac Ghuilié 

Une dernière pente rocheuse nous conduit au sommet du Ghuilié. De loin on pouvait l'apercevoir grâce à sa croix en aluminium plantée au sommet.

Il nous aura fallu presque trois heures pour y parvenir. Déjà le soleil plombe nos têtes et assèche nos gosiers. Petit en-cas au sommet, transfert du blog et quelques prises de photos pour immortaliser le moment.

Les pieds à 2999 m, les têtes à 3000 mètres 

Dix heures dix, nous reprenons la descente en repassant approximativement sur le même sentier ou rocaille. C'est presque impossible de repasser exactement aux mêmes endroits, les nombreux cairns nous obligent à faire des zigzags malgré l'envie de suivre la piste officielle.

Nous voilà de retour dans la vallée avec le cirque, il reste à affronter la montée très raide sur cinq cents mètres de distance. Ce n'est pas long mais suffisamment pour m'essouffler alors que Yan grimpe comme un chamois. J'ai vraiment l'impression que le Covid a entamé ma capacité respiratoire. Je n'avais jamais été essoufflé ainsi.

Au col au-dessus du lac où notre tente nous attend, nous déjeunons à l'ombre d'un rocher. Une vue splendide nous permet d'apprécier encore plus notre sandwich et notre fruit.

Je propose à Yan d'aller seul faire la cime du Mercantour qui est juste face à nous. Yan en moins de dix minutes, huit exactement se retrouve au sommet en suivant la piste sommitale et en moins de six minutes il me rejoint.


Panorama côté italien 

Nous reprenons la descente et en moins de vingt minutes nous voilà à nouveau à notre campement. Belle sortie aérienne sous un soleil de plomb.

La cime du Mercantour 

Rituels d'usage après le retour, baignade, pas pour moi mais pour Yan, rangement, petite lessive. Pendant que Yan tente de couper un morceau de bois trouver au sommet du Mercantour, je m'essaye à la sieste.

Vers seize heures quinze, le temps tourne, des gouttes de pluie viennent perturber nos petits loisirs. Nous rentrons dans la tente en espérant que ce n'est que passager.

Vue de l'ascension du Ghuilié 3000 mètres 

La pluie n'a cessé de tomber pendant presque trois heures avec des éclairs sonores mais lointains.

Pour l'instant la tente résiste mais il ne faudrait pas qu'il grêle.

Nous mangeons plus tôt que prévu, nous profitons d'une accalmie pour manger nos nouilles chinoises trop épicées.

Vu la tournure, je décide de modifier totalement notre planning. En effet, les rochers sont très humides et demain le parcours est pour moitié sur des dalles rocheuses sans danger par temps sec mais elles peuvent s'avérer glissantes par temps humide. D'autant plus, il recommence à pleuvoir. Le refuge Remondino se situe à 2500 mètres dans la zone du massif de l'Argentera, zone essentiellement rocailleuse. Pour une première sortie je ne veux pas prendre de risque. Le temps est trop incertain.

Aussi, demain nous nous lèverons à cinq heures pour un départ à six heures direction Valdieri.

La descente du Ghuilié 
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Nous avons finalement de la chance, il n'a pas plu cette nuit mais les rochers sont humides et ce matin j'ai une alerte tempête envoyée par ma montre Garmin. Alors qu'il n'y a aucun nuage, il est difficile d'imaginer que le temps peut tourner si rapidement, ce qui fut le cas hier. En quelques minutes la pluie ruisselait sur la tente. Une fois fois les affaires enlevées et posées dehors sur l'herbe encore humide, je scrute les dégâts des eaux. Sur un côté petit lac, rien de grave mais il n'aurait pas fallu plus de temps de pluie pour nous inonder. L'emplacement de la tente était idéal, très plat mais formait une cuvette. Je ne pensais pas qu'il allait pleuvoir pendant ces quelques jours, erreur de ma part, il faut toujours s'attendre à un retournement de situation en montagne.

Yan a plutôt bien dormi même s'il a eu quelques difficultés pour s'endormir. De mon coté, je me suis retourné cent cinquante mille fois mais je ne me sens pas fatigué et Yan non plus.

Je trouve un petit abri pour poser le réchaud et faire bouillir de l'eau malgré un petit vent pas trop frais. La ration de musli n'est pas trop importante, j'ai mal calculé mon coup et un garçon comme Yan, sportif et motivé ça mange bien. Je lui laisse une bonne part pour qu'il ait sa ration. De toute façon je n'ai pas très faim et puis on va redescendre.

Retour au col Cerise 

Musli, compote, on plie bagage. Le sentier redescend doucement vers l’embranchement où il y a deux jours j'avais raté le chemin et qui nous avait obligés de remonter un peu. Le chemin n'est pas trop glissant mais il faut se méfier et être sur ses gardes. Après la pluie, le terrain devient moins praticable.

Nous arrivons à l'embranchement du sentier qui mène au lac Cerise, on peut l'apercevoir plus bas et on constate très bien que son niveau d'eau n'est pas au plus haut.

Dans la descente, nous entamons une discussion sur la suite après le collège. Yan postulera au lycée en sport études en section raid à Oyonnax , trail et autres disciplines où le souffle et l'envie ne doivent jamais faillir. Beau programme. Mais Yan est prévoyant, il a prévu des plans B. En effet, l'année dernière quatre élèves en France ont été reçu en seconde. Sacré défi, d'autant que pour la rentrée en troisième quelques copains de sa classe postuleront aussi. Double compétition et double challenge. On ne peut que lui souhaiter le meilleur, il en a sous le pied. Évidemment, je ne compare pas à Yan, car moi j'avance lentement dans la montée jusqu'au col Cerise. Petite victoire, je n'ai pas fait de pause. Le Covid m'a pris une partie de moi-même, il va falloir récupérer et ne pas relâcher les activités physiques. Yan me donne ce conseil, je ne peux qu'être d'accord avec lui.

Comme Yan, je suis un peu déçu de n'avoir pu faire totalement le programme mais plusieurs signes m'indiquaient qu'il fallait écourter. Au-delà de l’aspect météorologique, je rame totalement même si ce matin j'ai pu avancer sans trop de difficulté. Aller jusqu'au refuge Remondino, impliquait de remonter le col direction Ghuilié, celui que nous avons pris hier matin, puis redescendre au fond de la vallée par ce couloir très pentu pour remonter à nouveau sur le col Ouest de Mercantour à 2611 mètres à la frontière France-Italie. Autant que je me souvienne car j'ai déjà randonné jusqu'à la Nasta 3108 mètres près du Refuge Remondino, le sentier est une suite de dalles rocheuses et de pierriers instables sans doute un peu risqué avec un temps incertain. Deux cols dans la journée, pour Yan c'est du pipi de chaton, pour moi pas sûr d'y arriver. Je pense qu'il est raisonnable de se tenir à ce programme d'autant qu'hier nous avons gravi tout de même un 3000 mètres et Yan s'est farci la Cime du Mercantour en un temps-record. A ajouter à ses nombreux records à son palmarès.

Alpi Martime le matin et refuge Regina Elena à l'ombre 

Arrivés au Col Cerise, petites photos et selfy pour se donner du courage pour la descente. Le sentier bien large et très bien aménagé nous facilité la progression. Nous avançons d'un bon pas tout en observant la beauté du paysage maltraité par la sècheresse mais donnant encore toute sa splendeur. C'est vrai que c'est très minéral et certains peuvent le regretter comme le couple de hollandais que nous avons croisé hier lorsqu'on redescendait du Ghuilié. Ils étaient assis sur un promontoire, ils nous ont fait un appel vocal qui a résonné dans cette splendide vallée. Quelques échanges d'usage et nous avons poursuivi notre chemin.

Nous voilà à nouveau sur le versant italien. En contrebas sur notre droite le refuge Regina Elena 1834 mètres, Un refuge facile d'accès géré par les bénévoles de l'Associazione Nazionale Alpini de Gênes. Le refuge Remondino (2430 mètres) quant à lui, c'est une assez grande bâtisse construite sur un promontoire au pied des parois rocheuses. Il dispose de dortoirs, douches et sanitaires situés près des fameuses roches de l'Argentera, de la Nasta et autres sommets vertigineux du secteur.

Refuge Remondino 2430 mètres

Nous passons au loin du refuge Regina Elena pour aller directement à la route mi-goudronnée mi-gravillons qui part des Termi di Valdieri.

Petit passage de pont pour retrouver la route 

Ce matin peu de voitures comparées à dimanche matin. Les Italiens sont plutôt en vacances en août, un peu comme les Français. Nous traversons un pont où des vaches broutent une herbe fraiche de rosée. Le soleil est sur le versant de la montagne sur notre gauche. Pour l'instant nous allons plus vite que lui afin d'éviter les rayons brulants de cet astre souvent le bienvenu mais ces jours-ci un peu de pluie ne ferait pas de mal même si cela à gâcher un peu notre sortie.

Nous nous tenons à l'écart du troupeau car des petits veaux suivent leurs mères. Il faut garder une distance raisonnable car les mamans vaches pourraient bien nous ruer dessus pour garder en sécurité leur progéniture. Une seule vache se désaltère dans le torrent d'une bonne eau fraiche et pure.

Nous reprenons la route sur quatre kilomètres pour arriver à Termi di Valdieri, les eaux des Terme Reali di Valdieri appartiennent au groupe des eaux sulfureuses sulfate-chlorure-sodiques hyperthermales (50-75 °C) et présentent un pH alcalin (9.4). Les Terme Reali di Valdieri se trouvent au cœur du Parco naturale Alpi Marittime dans la Vallée Gesso. Entourées de hêtres monumentaux et d’arbres séculaires, elles se situent à 1.370 mètres d’altitude et elles sont ainsi l’établissement thermal le plus haut d’Italie. On serait bien allé faire une petite cure thermale dans ce lieu de rêve.

Terme di Valdieri 

Il est moins de dix heures du matin, nous voilà arrivés à la voiture. Finalement, nous avons fait le chemin quasiment à l'ombre. Petit passage aux toilettes de ce camping fort sympathique où des jeunes adolescents jouent au ballon prisonnier. Ils ont l'air de bien s'amuser, ils sont loin d'imaginer la randonnée que nous avons faite. Dix heures, nous reprenons la route direction Valdieri, petit village situé à une quinzaine de kilomètres plus bas dans la vallée où un chocolat chaud, épais et un capuccino nous attend au bar de la place principale du village. À côté de nous des Piémontais discutent de la fête de la veille où apparemment l'un d'eux à danser tout son saoul. De mon côté, j'ai un peu mal aux jambes mais pas pour les mêmes raisons.

Je propose à Yan de rouler jusque vers douze heures douze heures trente puis de se faire un restaurant car le repas de veille, nouilles chinoises beaucoup trop épicées et tranche de rôti de porc sans pain furent les bienvenus mais peut-être pas du côté caloriques. C'est toujours compliqué d'être en autonomie totale pendant plusieurs jours. Ou bien on en charrie trop ou bien pas assez.

Vers douze heures quinze nous arrivons à Barcelonnette, petit village est une commune de montagne, entièrement située à plus de 1 100 m d'altitude. Elle est la plus grande commune de la vallée de l'Ubaye.

Mon idée au départ était de s'arrêter au restaurant refuge du col de l'Arche, côté italien mais c'était un peu tôt. Finalement un petit restaurant situé sur la place principale fera notre affaire. Au menu : salade de tomates, salade verte copieuse pour nous deux, linguine sauce bolognaise pour Yan, truite et riz pour moi, dessert fromage blanc avec coulis pour Yan et salade de fruits pour moi. Nous descendons trois carafes d'eau certainement moins pure que celle de Valdieri.

Barcelonnette 

Nous ne rencontrerons aucun bouchon jusqu'à destination de Pizay, ni à Gap, ni à Grenoble.

Le périple s'achève, Yan renouvelle ses remerciements pour cette petite épopée montagnarde et piémontaise. J'ai aimé lui faire découvrir ces contrées rudes, splendides où la nature mène le jeu et non pas l'humain qui doit s'adapter sans cesse aux caprices de mère Nature. Heureux aussi d'avoir échangé avec Yan sur ses projets, ses envies même s'il est toujours d'accord avec beaucoup de choses. Cela lui a aussi permis de me connaitre sous d'autres aspects que ceux d'un repas en famille pour un anniversaire ou simplement pour se rencontrer autour d'un repas dominical. J'ai souhaité aussi lui montrer qu'on peut foncer vers un objectif raisonnable ou ambitieux mais en mesurant les risques au départ et en ayant en tête un plan de secours au cas où les choses ne se passeraient pas comme prévu. Cette sortie a été aussi l'occasion de voir de près les ravages évidents du changement climatique, de l'adaptation de la nature à ces nouveaux modèles climatiques. Yan est un garçon audacieux, motivé, toujours prêt à rendre service, il sait anticiper, rapide comme un chamois, réservé mais ouvert à son entourage. C'était ma première expérience et pour Yan aussi d'être dans un lieu aussi désert seul avec son parrain. C'était un cadeau immatériel, certainement insolite mais qui restera gravé, j'en suis sûr, dans notre ADN et notre cœur. Nous étions au départ un peu comme deux inconnus largués dans un monde minéral et en altitude, nous avons sans doute progressé dans la connaissance l'un de l'autre, je t'en suis infiniment reconnaissant. Bravo et merci pour tout cela et merci aux parents de m'avoir fait confiance malgré notre isolement.

D'une rencontre pourrait naître une autre vie. Les plus belles rencontres sont toujours inattendues. Fais de tous ceux que tu rencontres dans ta vie, tes amis ; c'est une attitude qui facilitera ton altitude. Une rencontre est un rendez-vous prévu par le destin. (Un condensé des penseurs très humains.)

Bises à vous tous.

Pizay, le 26 juillet 2022.

Emblème du Piémont