Rocca Sparvièra rocher des éperviers, village en ruine à 1100 mètres d'altitude il surplombe la vallée du Paillon à l’Est, les gorges de la Vésubie à l’Ouest, lieu rempli d'histoires et de légendes.
Du 17 au 18 janvier 2022
2 jours
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Rocca Sparvièra ou "Rocher des Eperviers", village en ruine juché à 1100 mètres d'altitude il surplombe la vallée du Paillon à l’Est (torrent fougueux mais souvent paisible, il baigne rarement Nice car la plupart du temps il est asséché) et les gorges de la Vésubie à l’Ouest, lieu de désolation depuis la tempête historique. Je foulerai ce lieu rempli d'histoires et de légendes pendant trois jours depuis Lucéram (400 mètres d'altitude), castrum romain ce petit bourg coincé au coeur du haut pays niçois est devenu une incontournable cité touristique. Il me faudra atteindre depuis le village les crêtes oscillantes entre 1000 mètres et 1500 mètres d'altitude en franchissant le Col de l'Autaret (1240 mètres), grimper Roccasièrra (1501 mètres), belvédère rocheux offrant un panorama grandiose sur les alpes maritimes françaises et italiennes pour rejoindre Rocca Sparvièra village fantôme perché juste au-dessus du col Saint Michel, il est le passage obligé du circuit des trois chapelles. Vous en saurez plus lorsque je planterai ma tente dans ce lieu mythique et quelque peu sinistre.


Mon périple se poursuivra sur les crêtes du Férion en passant par le col du Dragon et la chapelle Saint-Michel entourée de cèdres plusieurs fois centenaires plantés dans un décor digne de la Belle au Bois Dormant ou du film Le Hobbit (c'est selon votre perception lorsque je publierai les photos), voyage caressant à la fois le fantastique et l'inquiétant. C'est un lieu hors du commun où votre imagination peut vous jouer des tours magiques ou effrayants.

Le décor de la deuxième nuit sera celui des ruines de Chateauneuf Villevieille (un autre castrum novum de l'ancien comté de Nice ) perchées entre mer et montagne non loin du Mont Macaron (806 mètres) crête aérienne et lieu panoramique où certains jours par temps exceptionnellement clair on peut apercevoir la Corse et presque la toucher en étirant votre main vers elle.

De là, je rejoindrai in fine Saint André de la Roche mon village presque natal où Lamartine y écrit quelques vers.

En effet, le grand poète LAMARTINE serait venu, accompagné d’une belle amie de passage. On dit qu’il y planta le figuier dont les branches crochues s’accrochent encore au rocher et on lui attribue ces vers :


"Ici dans les flancs creux d’un rocher qui surplombe

S’ouvre une grotte obscure, un nid où la colombe aime à gémir d’amour

La vigne, le figuier, les ronces la tapissent

Et les rayons du ciel qui lentement s’y glissent y mesurent le jour

La nuit et la fraîcheur de ces ombres discrètes conservent plus longtemps aux pâles violettes leurs timides couleurs

Une source plaintive en habite la voûte et semble sur vos fronts distiller goutte à goutte des accords et des pleurs."

En effet au nord de Saint André de la Roche se situe une grotte naturelle qui servait au XIXième siècle de villégiature aux bourgeois de la ville en mal de campagne grâce à ses voûtes féériques et son coin de rafraichissement. Appelée aussi la Fuon Cauda, elle a une très grande teneur en calcaire.

Si le coeur vous en dit, suivez-moi ! Départ lundi prochain.

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Il ne reste plus que moi dans le bus à destination de Lucéram. Le dernier passager a fait un dernier signe au conducteur et un "au revoir" bien provençal à l'Escarène petit bourg dans le haut pays niçois où jadis je traversais avec ma 4L bleu ciel pour me rendre en Italie via le col de Braus.


Lucéram de bon matin

Le vieux village de Lucéram est bâti sur un éperon rocheux, qui domine le Paillon. En fond de vallée, autrefois il a été un carrefour de la route du sel qui mène du port de Nice à la Savoie, en passant par la vallée de la Vésubie. Le village se situe à 650 m d'altitude, à 27 km de Nice par la D 2566.

Je descends du bus pile au début du GR510 que je dois emprunter jusqu'au col de Porte. J'ajuste mon sac, mes bâtons, je jette un coup d'oeil à la crèche partiellement démontée par les municipaux et me voilà parti pour environ cinq heures trente de marche. Mon sac me pèse malgré un tri minutieux avec le respect du minimum pour assurer un confort acceptable. Le problème de cette petite randonnée c'est l'autonomie totale en nourriture et en eau. Dans ce coin magnifique il n'y a aucun ravitaillement mais pire encore aucun point d'eau. Je trimbale donc quatre litres d'eau pour les nouilles chinoises du soir et pour étancher ma soif dans la journée. J'ai apporté aussi un petit extra : deux bières Moretti (bière du Piémont italien) pour les déjeuners ou les moments de méditation pendant mes pauses.


La montée à Roccassièra

La montée démarre avec une pente peu raide mais sans aucun plat, que du dénivelé. La végétation souffre cruellement du manque d'eau, l'herbe est sèche, les petits cours d'eau ne sont que des traces à peine visibles avec des cailloux pointus couchés sur un lit de sable jaune. Les montagnes des Alpes-Maritimes à peine poudrées de neige affichent une belle robe printanière : très peu de neige et beaucoup de bleu au -dessus. Le réchauffement climatique sans doute.


Au sommet de Roccassièra

Le GR 510 suit de près la route qui mène à Turini célèbre pour le rallye de Monte Carlo, station de ski réputée malgré un enneigement aléatoire depuis quelques années. Le sentier, parallèle à la route départementale, s'en approche sans jamais se croiser ou presque. Je peux entendre malgré tout les quelques rares véhicules circulant aujourd'hui avec leur bruit de moteur vrombissant et résonnant dans la vallée. Le col de Porte approche, premier passage vers un décor plus sauvage et plus escarpé. Je vais quitter le sentier balisé pour un sentier plus rude, balisé de jaune, presque raide avec quelques passages en zigzag permettant aux mollets déjà un peu douloureux quelques répits bienvenus. La Roccassièra apparaît devant moi, petit sommet de 1500 mètres très rocailleux, un chemin y conduit sans encombre, il suffit juste d'avoir les jambes et le souffle. Pas de vent aujourd'hui, que du bleu à perte de vue avec un panorama qui s'étale devant moi comme un spectacle grandiose où je suis le seul spectateur et le seul témoin du jour.

La montée a été raide car de temps à autre il fallait s'aider des mains, mettre les bâtons de côté et se hisser en dosant son effort malgré le poids du sac à dos bien ajusté et la fatigue déjà naissante.

Je veux être pour le déjeuner au sommet aussi je me focalise sur mes pas et la respiration. Le plateau de Roccassièra n'est plus qu'à quelques enjambées, un dernier effort malgré les yeux qui piquent de sueur et me voilà au sommet.

Spectacle incroyable de calme et de beauté. L'effort a été récompensé. Je prends mon temps pour déjeuner, boire ma bière et faire quelques photos. Je pourrais y rester des heures à contempler le paysage, à deviner les sommets découpés à l'horizon, à repérer les villages aux alentours du haut pays niçois. Tout est beau ici. D'un côté les montagnes, mes amies de toujours, de l'autre la mer et la Côte d'Azur pour magnifier leur présence éternelle.


Magnifiques montagnes

Un petit vent frais se lève et me dit qu'il va falloir y aller. En restant trop longtemps mon corps va se refroidir et mes jambes aussi. Je serai bien resté quelques heures de plus à ne rien faire, à ne rien penser, juste être là, en silence à parcourir le tableau dans ses moindres détails comme un peintre voulant sublimer son oeuvre. Pas top pour la descente vers Rocca Sparvièra, d'autant plus que la pente semble raide, pleine d'éboulis formant des lits successifs de cailloux pointus et de racines entremêlées. Gare à la chute.


La chapelle Saint Michel

Il est 15h00, j'arrive dans le village en ruine de Rocca Sparvièra. J'ai pris mon temps pour descendre du sommet, il faut assurer sa sécurité à chaque instant car le premier endroit civilisé est à plusieurs heures de marche. Pas même un berger ou des moutons en vue. Il n'y a que moi et la nature. Et cela me suffit.

Je monte ma tente sur une des terrasses du village maudit de Rocca Sparviera près de la chapelle Saint-Michel. Une des rares zones plates et herbeuses me servira de chambre à ciel ouvert, derrière moi le village qui s'étend vers le haut de la colline, devant moi un panorama ouvert sur la vallée encore ensoleillée et la mer qui sert de clôture. Je suis ébloui par ce paysage simple, sauvage et rude mais apaisant, éclatant de beauté, s'offrant à moi sans rien me demander en retour.

La légende de ce village est liée à l'histoire de la reine Jeanne de Naples (1326 - 1382), ayant réellement existé. Mariée à 9 ans à André de Hongrie, elle hérita du royaume de Naples et du comté de Provence à 17 ans. La bataille entre les différentes familles pour obtenir le pouvoir conduisit à l'assassinat d'André de Hongrie en 1345... Il se dit que Jeanne en aurait été commanditaire, mais selon certains historiens rien ne le prouve.

En 1347, Louis de Hongrie, afin de venger son frère, marcha sur Naples avec son armée et envahit la région. Jeanne se réfugia alors en Provence en 1348 et s'installa quelques temps dans son château isolé de Rocca Sparvièra. C'est là que l'histoire devient légende... Il se raconte que les hommes à la solde de la cour de Hongrie retrouvèrent leurs traces. Le soir de Noël, la reine Jeanne tint à assister à la messe dans le village tout proche de Coaraze. A son retour au château, elle trouva ses deux enfants morts, sur la table du festin, couchés sur un plat, un couteau planté dans la poitrine. Certaines versions sont encore plus glauques que celle-ci. Certaines disent qu'ils étaient découpés en morceau et d'autres encore qu'ils auraient été cuisinés et servis au repas...

La reine, folle de douleur, quitta le village sur le champ après avoir fait incendier le château. En chemin vers Coaraze, se retournant sur le rocher du village de Rocca Sparvièra, elle proféra cette malédiction : "Roche sanglante, roche maligne, un jour viendra où sur tes ruines ne chantera plus ni coq ni poule".

Que penser de tout cela, j'aurai mon appareil photo à portée de main seule arme de défense si les fantômes viennent me taquiner cette nuit.

Depuis, la prophétie s'est réalisée : Une invasion de sauterelles au XIVème Siècle, une succession d'épidémies de peste au XVIème Siècle et enfin de puissants tremblements de terre fissurant les maisons : le sort semble s'être acharné sur le village au fil des ans... Ainsi, au cours du XVIIème Siècle, le village est progressivement abandonné. Les derniers habitants partiront en 1723.


Rocca Sparvièra

Je passe mon temps à observer autour de moi, d'abord tout près puis de plus en plus loin jusqu'à l'horizon dont les couleurs changent à la vitesse de la descente du soleil.

Il n'y a pas de vent mais l'altitude de 1100 mètres se ressent bien qu'on soit dans le sud.

La journée a été facile malgré une ascension raide. Il fallait simplement réguler son pas et son souffle.

Il est 19h00 dans la tente je rédige les dernières lignes du blog, la fraicheur de la nuit naissante m'engourdit les doigts. Allongé sur mon lit de fortune même si j'ai un très bon matelas, je me retourne sans cesse pour trouver la position la plus confortable. Mon duvet d'oie réchauffe mon corps et sa couleur jaune fluo éclaire mon espace clos grâce à une pleine lune puissante. La nuit va être longue.

Aujourd'hui durant cette randonnée je n'ai rencontré que trois personnes, un marcheur au sommet de Roccassièra et un couple âgé à Rocca Sparvièra qui m'a souhaité un bon bivouac, aucun animal à poils ou à plumes hormis quelques oiseaux curieux lorsque je montais la tente.

Pendant que je dinais quelques cloches de moutons venaient troubler le calme du lieu. Ils sont certainement sur le Férion que je traverserai demain matin à l'heure où le soleil me réchauffera.

Avant de m'endormir des aboiements remontent et résonnent depuis la vallée, leur son vient se perdre dans les ruines du village hanté. Je range mes affaires, envoie mon blog chez MyAtlas et tente désespérément de me concocter un coussin confortable avec mes vêtements. Ce n'est pas gagné, il va falloir que j'étudie cela sérieusement pour ma prochaine randonnée, je vais y réfléchir et peut-être que cela m'endormira. Pas certain.

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Je ne peux pas vraiment dire que la nuit a été apaisante, j'ai dormi par intermittence, une heure ou deux de rêves puis un réveil en douceur sans un bruit autour de moi comme si le temps s'était arrêté cette nuit.

Les fantômes ne m'ont pas tiré par les pieds cette nuit et la reine Jeanne doit certainement errer sur les pentes du col Saint-Michel ou de la chapelle du même nom à la recherche d'un nouveau destin.

Lever à sept heures trente, le soleil se cache encore derrière le mont Agel à l'est de Nice. Bientôt il viendra rechauffer le village légendaire à cet instant je sortirai de la tente pour savourer un bon petit déjeuner.

Avant de m'affairer, après m'être extirper du sac de couchage je m'incline presque religieusement devant l'astre bienfaiteur. Une petite salutation au soleil me remet les articulations endormies en éveil et met le contact de ma batterie d'énergie interne rechargée cette nuit malgré les agitations cadencées par mes réveils incessants.

Un réveil lumineux

Je prends mon temps car l'étape est courte, quinze kilomètres seulement et puis je suis ici pour profiter de ces panoramas enchanteurs berceau de mon adolescence passée à crapahuter sur les cimes de ma région.

Le panorama au nord

Huit heures quarante, après un café bien chaud, du riz au lait bouillant, un rangement de mon bardas un peu négligé, je démarre la matinée par la descente au col Saint-Michel, le temps de réchauffer les muscles avant l'ascension du mont Férion. Et dire qu'à une époque des gens vivaient dans cette rocaille, pas d'eau à proximité, quelques terrains en terrasse plus haut, le premier village digne de ce nom à une heure de marche au minimum. Les mules devaient être terriblement costaudes pour supporter cette géographie rude et sauvage. Que dire des gens, il n'est pas étonnant qu'il fût abandonné.

Le sommet du Férion

Après le col Saint-Michel, une piste mène à un petit plateau DFCI (défense des forêts contre l'incendie), la végétation composée de pins et de broussailles se penche légèrement à cause d'un vent bienvenu mais qui assèche encore plus le terrain déjà bien raviné par les maigres pluies de cet automne.

Petite pause au plateau.

Baisse de la minière

La pente rude file tout droit vers le sommet du Férion, il reste environ cent cinquante mètres de dénivelé à avaler. La vue magnifique s'étale au sud par une mer de nuages coiffant la mer Méditerranée, par contre au nord pas un nuage, un ciel bleu électrique. Un beau spectacle. Je reprends mon souffle pour gravir les derniers mètres avant le sommet dominant le village médiéval de Levens.

Il est dix heures trente, je cherche un endroit pour écrire mon blog et admirer ce spectacle gratuit de la vie. Je mangerai au sommet vers onze heures trente puis je filerai tout droit vers les ruines de Châteauneuf de Contes, autre endroit magique et plein de belles légendes et de faits historiques.

La mer de nuages vers Nice

Ce deuxième jour m'amènera à d'autres ruines. C'est le paradoxe de l'appellation Chateauneuf-Villevieille, la partie Chateauneuf est la plus ancienne, il s'agit du village en ruine fortifié sur la partie finale de la crête du Férion. A son époque le château était neuf, "castel nova" ! Tandis que Villevieille est le village actuel rebâti plus bas. Le village médiéval a été abandonné fin 1700. Un de plus.

Après un déjeuner copieux mais pas trop lourd au sommet du Férion, je reprends la descente. Le chemin suit la crête sur un axe nord-sud. La végétation alterne entre broussailles, pins maritimes et petits bosquets. Comme une bête sauvage, je trace mon chemin au milieu de cette végétation provençale en me retournant quelques fois afin de me rendre compte de mon avancée et aussi pour remplir mes yeux de ce paysage irrégulier empreint de beauté primitive.

Un peu en contrebas du sommet du Férion, la piste traverse une allée de cèdres gigantesques où est campé une chapelle simple et austère. L'endroit est à la fois beau et mystérieux, la lumière a du mal à pénétrer l'allée rendant une impression de paysage maléfique.

La chapelleSaint-Mihel au Férion

Un petit arrêt pour le plaisir des yeux puis je poursuis ma route, les panneaux indiquent deux heures pour atteindre les ruines de Châteauneuf Villevieille.

La descente se poursuit à un rythme lent et assuré car beaucoup de cailloux jonchent la piste et sont toujours prêts pour m'attierer vers une glissade toujours possible.

Un compagnon inattendu

Trois chevaux me surprennent sur ma lancée prudente, ils ne sont pas sauvages et veulent même venir vers moi pour quelques câlins. Le selfy n'est pas concluant, ils ne connaissent pas les règles malgré ma patience et mes explications chevalines.

Je les laisse avec regret j'aurais bien fait un bout de chemin sur un des canassons.

Après le col Rosa, le sentier de crête passe sur le versant est passé subitement à l'ombre. C'est la première fois que je randonne sur ce bout de sentier inconnu. D'habitude je prends la voie en ouest ensoleillée à cette heure de la journée. Comme l'habitude est le boulet du randonneur libre alors j'innove.

Le sentier est bien meilleur du côté est même s'il est un peu plus long que de l'autre côté. C'est une sente légèrement descendante où alternent petits bosquets de pins et petites plaines tapissées d'herbes séchées et d'épineux rougeoyants. On y voit clairement les traces laissées par des familles de sangliers cherchant leurs nourritures au pied des arbres résineux en dévastant par la même occasion quelques parties du sentier. Je ne vais leur reprocher, ils sont chez eux après tout.

Col de Rosa

Je dois en principe traverser une bergerie où habituellement personne n'y vit. La bergerie se présente à quelques dizaines de mètres devant moi mais un beau toutou m'observe fixement tout en faisant mine d'être tranquille.

Les chevaux m'ont apporté une belle surprise mais là, la surprise n'est pas enviable.

Pas de risque, je fais un détour dans les broussailles épineuses tout en me retournant de temps à autre, pas de chien en vue et si jamais il lui prend l'envie d'un bon mollet bien musclé il devra lui aussi se piquer dans les épineux très denses à cet endroit.

Il a préféré m'ignorer. Ouf !

Les ruines de Chateauneuf de Contes

Les ruines m'apparaissent au détour du chemin et dans moins de trente minutes j'y serai.

J'attaque l'ultime montée pour atteindre les ruines. Nouvelle surprise mais cette fois-ci moins dangereuse mais plutôt bruyante.

En effet, deux compères portent sur leurs épaules d'énormes enceintes acoustiques destinées probablement à une rave party dans les ruines. Pas de bol, je voulais passer ma nuit ici.

Qu'à cela ne tienne, petite pause pour souffler un peu puis je poursuis mon raid pour le sommet du Macaron déjà en vue depuis les ruines et à moins de trente minutes de cet endroit devenu indésirable et inhospitalier.

Mes jambes sont un peu lourdes mais je veux absolument passer une bonne nuit au calme.

Le mont Macaron n'est qu'à quarante minutes de marche depuis les ruines avec un dénivelé de deux cents mètres. Le chemin très praticable sert de piste aux amateurs de trail. J'en croise un ou deux pendant mon ascension, nous échangeons un salut rapide en croisant nos regards bienveillants.

Les ruines de Châteauneuf de Contes

Comme prévu j'arrive au sommet, nouvelle surprise. Le terrain très accidenté n'est pas praticable pour mettre une tente. De plus l'endroit a visiblement été la proie d'un feu dévastateur. Ça sent le cramé et je n'ai pas de place pour poser ma tente.

Bon, je n'ai pas le choix, je ferai cet après-midi l'étape prévue demain. Je pourrai chercher un emplacement pour la tente plus bas, impossible la pente est trop raide et en plus les premières villas apparaissent. Effectivement je me rapproche de la civilisation et de son lot de propriétés aux allures provençales gardées par des chiens certes provençaux mais certainement pas commodes.

Il va falloir rajouter dix kilomètres aux quinze déjà effectués. Pas grave, je rentre.


En descendant du mont Macaron

Du mont Macaron je dois rejoindre le col de Bordinas, croisée des chemins où je retrouve une des voies de Compostelle, celle de Menton à Arles.

Au col de Bordinas plus de sentier rocailleux ou de pistes glissantes, du goudron rien que du goudron.

Le bitume, pas terrible, mais il a l'avantage de permettre une allure rapide pour un marcheur certes fatigué mais qui n'a plus envie de surprises pour aujourd'hui.

Un dernier coup d'œil sur le panorama de Nice où l'on aperçoit dans le fond du décor les pistes de l'aéroport. Les nombreux lacets de la route mènent à Saint-André de la Roche mon terminus.


Nice sous la brume du soir

Ce fut court mais intense avec quelques surprises heureuses et malheureuses. Il me reste un litre d'eau dans mon sac. J'aurais pu tenir jusqu'à demain. Toutes ces heures passées dans cette nature sauvage et fragile à la fois m'ont redonné l'envie de traverser d'autres contrées de la région toutes aussi sauvages et fragiles que celle-ci. Marcher en autonomie demeure une expérience toujours exceptionnelle en matière de gestion de la nourriture et de l'eau. Les nombreuses expériences montrent souvent que l'on a surestimé notre capacité à manger mais d'un autre coté il faut assurer sa sécurité d'une possible mésaventure ou d'un incident de parcours et avoir avec soi de quoi se substenter le temps de se sortir d'affaire.

Je vous encourage à venir randonner dans Alpes-Maritimes, la région est superbe et les chiens ne sont pas si méchants que cela à condition de faire un grand détour si vous les croisez.