Carnet de voyage

Chile

9 étapes
10 commentaires
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Un proverbe chilien dit: "Vivre paisiblement une journée de loisirs veut dire être immortel une journée durant."
Du 6 décembre 2017 au 5 janvier 2018
31 jours
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¡Buenos días, lecteurs!

Voici mes aventures en pays chilien. Mais d'abord, quelques informations sur le pays: Superficie: 755 276 km² (plus de 24 fois la Belgique) Population: 17 574 003 habitants (plus de 1,5 fois la population belge) Densité: 23,37 habitants/km² Indépendance: 12 février 1818 Monnaie: le Peso chilien Devise nationale: "Par la raison ou par la force"

Drapeau chilien / Le Chili à l'échelle du monde 

Après 35 heures de bus, dont plus de 4 heures bloqués à la frontière chilienne car une dame avait des problèmes avec ses papiers, et une escale d'une journée finalement plutôt agréable dans la ville argentine de Salta, que je connaissais déjà bien (je clôturais ainsi joliment ma boucle argentine!) et où j'ai pu commencer à baliser mon séjour au Chili, j'arrive enfin à San Pedro de Atacama le 6 décembre, en milieu d'après-midi.

Le lendemain matin, j'embarque à l'aube avec un groupe pour une journée dans le bel Altiplano chilien. Le Salar (= désert de sel) de Tara est l'objectif de la journée mais nous avons divers arrêts en chemin: sur la photo 1 le volcan Licancabur (culminant à 5916 m), marquant la frontière avec la Bolivie et que j'avais déjà vu de l'autre côté, dans le Salar d'Uyuni; sur la photo 2, le Cerro Toco et deux ânes sauvages en avant-plan; le Salar de Loyoques (photo 4), ses flamants roses et ses jolies croûtes de sel; la Lagune de Cristal et le volcan Pili (6046 m!) en fond (photo 5) et enfin, la région des impressionnantes roches volcaniques des Monjes de la Pacana (photos 9-12), émergeant des dunes, dont l'Indien ou Gardien du Salar, sur la photo 9. Ces concrétions fantastiques ont été formées par de la lave en fusion figée par l'eau des glaciers présents à l'époque et ciselées ensuite par le vent au cours de millénaires (Le Routard).

Pour la dernière pause avant le dîner, nous nous arrêtons sur une sorte de colline à proximité du Salar de Tara, qui nous offre une belle vue sur les alentours (photos 1-2). Enfin, nous descendons et notre guide nous dépose à une quinzaine de minutes du point de rendez-vous pour le dîner, petite marche apéritive qui nous donne le loisir d'observer les magnifiques Cathédrales de Tara (photo 4) bordant le lac et puis, les groupes de flamants roses, en plein festin, comme toujours. Sur le chemin du retour, nous nous arrêtons près du volcan Licancabur et de son petit frère, le volcan Juriques, (photo 7). L'occasion pour notre guide de nous donner quelques informations supplémentaires. "Licancabur" veut dire "volcan du peuple" en kunza, la langue atacamène, il est considéré comme sacré par la population locale. Le volcan Juriques, qui mesure aujourd'hui 5653 m, dépassait autrefois les 7000 m, mais une éruption l'a privé de son cône. La légende, elle, parle d'un triangle amoureux entre le Prince Licancabur, son fidèle ami Juriques, et la Princesse Quimal. Quimal et Licancabur, éperdument amoureux, voulaient se marier. Mais, comme cela arrive parfois, Juriques se prit d’affection pour la belle Quimal et commença à flirter avec elle. Entichée de ses deux prétendants, Quimal se troubla et décida d’annuler son mariage avec Licancabur. Comme cela faisait une pagaille monstre, Laskar, roi des volcans et père de Quimal, intervint pour le bien des villageois de San Pedro, jurant de mettre fin à ce conflit. Il était si en colère qu’il entra en éruption et dans sa rage, décapita Juriques. Laskar bannit alors sa fille Quimal au cœur brisé, la renvoyant de la communauté jusqu'à un coin éloigné du Désert de Sel de l’Atacama, où elle se trouve toujours aujourd’hui. La beauté de la nature veut que chaque année, au solstice d'hiver, les amoureux se rejoignent brièvement, lorsque l’ombre du Licancabur s’étire à travers le désert de sel et touche le pied du Mont Quimal, aux premières lueurs du soleil.

Le soir de cette belle journée, je soupe avec Morgane, une française qui faisait le même tour que moi au Salar de Tara, avant de partir avec un groupe chez l'astronome français Alain Maury et son épouse chilienne pour une découverte non pas de la région, mais du magnifique plafond d'étoiles, de nébuleuses et de planètes qui la surplombe. Le Chili, avec ses zones désertiques dépourvues de pollution atmosphérique et lumineuse, est un terrain béni pour les astronomes. Pendant deux heures, Alain nous a transmis sa passion pour les étoiles (en français, s'il vous plait!), c'était vraiment passionnant! La première heure, nous pouvons observer le ciel grâce à ses 10 télescopes partiellement "home made". Ici, nous sommes dans l'hémisphère sud et le ciel est donc différent de celui que l'on peut observer chez nous. Nous admirons les planètes Uranus et Mars; une étoile rouge en train de mourir (dont je ne me rappelle plus le nom); la nébuleuse de la Tarentule (qui a vraiment une forme d'araignée!); la nébuleuse d'Orion et les deux nuages de Magellan, qui sont repris dans le Guinness des Records puisque ce sont les deux "objets" les plus lointains visibles à l’œil nu (même moi je les ai vus, oui oui!) ! La Voie Lactée est aussi particulièrement superbe, vue d'ici. Et puis, avec beaucoup d'humour, Alain nous retrace pendant la deuxième heure l'histoire de l'astronomie et des constellations et nous apprend à lire le ciel à l’œil nu. Nous pouvons voir la constellation d'Orion; les étoiles Sirius (8 a/l de la Terre) et Canopus (309 a/l de la Terre), les deux plus brillantes de l'hémisphère sud; quelques signes astrologiques (qui ressemblent à tout sauf à ce que leur nom évoque) et, bien sûr, les deux nuages de Magellan.Je ne l'avais jamais compris en ces termes, mais puisque l'on calcule la distance qui sépare les étoiles et planètes de la Terre en années-lumière, quand nous observons, par exemple, cette étoile qui se situe à 25 années-lumière de nous, la lumière qui nous parvient actuellement est en fait la lumière que l'étoile a émise 25 ans plus tôt, à savoir quand j'avais deux ans! Observer les étoiles et les planètes, c'est comme regarder dans le passé, et l'évolution du ciel est si lente, à échelle d'une vie humaine, que le ciel que nous observons actuellement est en grande partie similaire au ciel observé à l'époque greco-romaine. C'est fascinant! C'était pour moi encore une toute nouvelle expérience que je ne regrette absolument pas et qui a éveillé mon intérêt pour un univers bien différent de tout ce que je connaissais jusqu'à présent.

Le lendemain, je passe la journée à l'auberge à planifier le reste de mon séjour au Chili, puis rejoins un petit groupe et nous partons à la découverte de la Valle de la Muerte et de la fabuleuse Valle de la Luna, dont tout le monde vente toujours la beauté. Au cœur de la Cordillera de la Sal, torturée par l'érosion, un petit canyon débouche sur des roches découpées par le vent, un vrai livre de géologie à ciel ouvert! A voir la terre craquelée au sol, nul doute qu'on est bien en territoire aride. Une grande dune vient mourir contre cette barrière de rochers acérés, c'est très impressionnant! Au bout du canyon, on retrouve des amateurs de sandboard qui s'éclatent en la dévalant. Demi-tour et on ressort de la vallée de la Mort par là où l'on est rentrés, direction la vallée de la Lune. Sur tout le chemin, on peut observer le majestueux Licancabur (photo 9). Le site s'étend sur 12 kilomètres et est jalonné de différentes étapes, avant de se terminer en cul-de-sac. Sur la photo 12, el Anfiteatro, ce morceau de rochers plat et en pente, qui ressemble plus à une rampe de skateboard qu'à un amphithéâtre ^^ La traversée de la vallée est vraiment irréelle! On se croirait sur Mars ou bien que le sol est recouvert de neige, malgré la chaleur écrasante, c'est fascinant et perturbant à la fois :) Nous commençons la visite par le site Las Tres Marias, ces trois petites concrétions rocheuses sensées représenter le Christ (la plus haute), entouré de trois représentations de la Vierge (je cherche toujours les positions), et un Pacman géant, non loin.

Nous nous arrêtons ensuite à la Duna Mayor (photos 1-5), qui sépare deux petites vallées elles aussi blanchies par le sel. En tête du groupe avec une touriste chilienne et le guide, ce dernier nous propose de nous montrer un superbe panorama, à condition que l'on hâte le pas. En effet, il est bout de la dune et nous ne pouvons pas retarder le groupe, au risque de rater le beau coucher de soleil sur la vallée. C'est parti, il s'agit de faire attention où l'on met les pieds, tout en prenant des photos et en gérant le vertige pour les passages les plus périlleux! Quelle aventure, mais quelle perspective à l'arrivée! :D Et en effet, c'est juste magnifique, même déjà rien que sur le chemin. Je suis obnubilée par cette alternance de sable et de roches si acérées et qui semblent en émerger d'une façon tout à fait improbable. Je n'ai jamais rien vu de tel et j'ai vraiment du mal à ne pas m'arrêter tous les trois mètres pour prendre une photo mais je ne veux surtout pas perdre mes deux compagnons. Enfin, nous arrivons au bout, et quelle récompense! On a l'impression d'être seuls au monde et face à ce superbe panorama! Lunaire, vraiment irréel! Striées d'ocre, de blanc, les roches torturées se multiplient à l'infini. Impossible bien sûr de résister à la tentation d'une petite selfie sur la pointe de cette dune, preuve de notre petit exploit :D Et puis, au bout de dix minutes, nous sommes bien obligés de redescendre pour retrouver nos compagnons et continuer la visite. Nous partons alors aux Cavernas (photos 6-8), un étroit goulet formé par les eaux dans lequel on se contorsionne jusqu'à se glisser sous la roche! Décidément, pas de risque de s'ennuyer dans cette vallée. Enfin, nous rejoignons le van pour un dernier trajet vers le clou du spectacle, le magnifique coucher de soleil sur la vallée. Et là, malgré le monde, il règne un espèce de calme, dans la douce lumière du soleil qui décline. Chaque seconde, le paysage évolue, révélant ou cachant des reliefs dans la lumière du soleil ou bien déjà dans l'ombre. Quel beau moment. Une fois que le soleil a disparu, la majorité des groupes s'en va, mais nous avons de la chance d'avoir un guide passionné qui nous laisse encore rester sur le site une bonne demie heure de plus et nous permet ainsi de voir les couleurs du ciel se modifier, au fur et à mesure que la Terre continue à tourner, et les superbes teintes rosées qui colorent le volcan Licancabur, au loin. Magnifique!

La veille de mon départ, je profite de la matinée, vais au marché et me ramène des supers fruits et légumes pour le dîner (photo 1) puis rejoins le point de rendez-vous quotidien pour la visite guidée de la ville. Nous commençons par la Iglesia San Pedro, fondée au XVIe siècle. Murs en adobe (photo 4) (cette sorte d'argile utilisée dans toutes les constructions typiques d'Amérique du Sud, mélange de boue, de graviers et de paille et qui présente le double avantage de garder la fraîcheur en journée et de répandre en soirée la chaleur du soleil emmagasinée la journée), toit en bois de chañar et de caroubier et sangles en cuir de lama pour solidifier la charpente de cardón (cactus). Cette église est incontestablement un produit local. Nous passons ensuite par l'atelier d'un artisan local également, qui reproduit fidèlement l'art atacamène ancestral dans ses poteries. Et enfin, nous terminons la balade dans les rues plus éloignées du centre, moins touristiques et plus résidentielles, où l'on nous explique le système ingénieux de canalisations qui permet d'amener à la population l'eau de la fonte des neiges des montagnes et volcans alentours, et l'organisation des Ayllus, toujours existants malgré le boom touristique et économique dont jouit la région. Un Ayllu est une communauté composée de plusieurs familles dont les membres considèrent qu'ils ont une origine commune (réelle ou fictive) et qui travaille de façon collective dans un territoire de propriété commune.

Je termine la journée en observant avec beaucoup d'amusement et d'attendrissement le cours d'aérobic proposé à la population locale sur la place principale. De quoi me donner du punch pour aller faire mon sac, puisque je pars le lendemain à l'aube en direction de Chañaral, deuxième étape de ma longue redescente du Chili.

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Le dimanche 10, je quitte l'auberge de San Pedro à l'aube et embarque pour 10 heures de bus en direction de Chañaral. J'arrive en fin d'après-midi et découvre une petite ville toute grise et complètement morte. Certes, on est dimanche, mais quand même, la parc national Pan de Azúcar, tout proche de Chañaral, est repris dans les "must" du Routard et la saison haute est sensée avoir commencé... Après avoir posé mes affaires dans ma chambre d'hôtel (oui, il n'y a pas d'auberge ici, donc je me suis octroyée le luxe d'une chambre d'hôtel), je vais quand même un peu me balader. Pfoui! Malgré les quelques décorations de Noël qui commencent à apparaître, quelle tristesse de ville, en bord de grande route, où il n'y a qu'une pauvre pseudo friterie ouverte, où je finis par atterrir par dépit. En plus, le temps est vraiment triste et il y a de nouveau pas mal de chiens errants pas très fun. Le lendemain, en voyant les gros nuages et le vent au petit-déjeuner, je change mes plans et décide de travailler sur le blog toute la journée (pour une fois, le wifi est bon!) et d'aller au parc national le troisième jour, puisque mon bus ne quitte Chañaral qu'à passé minuit.

Ainsi, le deuxième jour, après avoir refait mon sac et libéré ma jolie chambre, je prends un taxi jusqu'au parc national Pan de Azúcar. Le ciel n'est toujours pas très joyeux mais il est hors de question que je sois venue ici pour rester à l'intérieur. En plus, la description du Routard est plutôt vendeuse: "Sur plus de 430 km², un paysage de toute beauté: hautes falaises, immenses plages, oiseaux marins (pélicans, sternes, cormorans, goélands), loutres de mer, otaries, et des collines plantées de cactus. Le parc comprend une partie continentale et quelques îles, dont l'île Pan de Azúcar, qui sert de refuge à plusieurs milliers de manchots de Humboldt, les stars du secteur. Nombreux sentiers balisés qui aboutissent à des points de vue de toute beauté." Ça donne envie quand même, non?! Quand le taximan me dépose, il n'y a vraiment personne à part une poignée de marins et je me demande ce que je vais bien pouvoir faire pendant une journée ^^ Je me balade un peu sur le sable et sur la mini jetée, il y a des énormes goélands et des sortes de gros rapaces tout noirs qui me regardent de loin, un peu creepy l'atmosphère... Et puis, des gens viennent à ma rencontre et m'interpellent dans un anglais coloré d'un accent du "sudeuh deuh la Franceuh". Ils me demandent si je souhaite faire un tour en bateau l'après-midi vers l'île Pan de Azúcar pour aller voir les manchots et les otaries. En effet, ils sont 8 mais le prix est calculé pour minimum 10 personnes et ils trouvent ça un peu cher. J'accepte avec plaisir et nous partons à la recherche d'une dixième personne. Nous ne trouvons personne, mais nous nous rendons compte que nous comptons tous faire la même petite balade à 3 km de là, qui offre un beau point de vue sur la baie. Eux, avec les enfants en bas âge, ils y vont en voiture et me proposent de les accompagner. Comme quoi, j'ai bien fait de travailler sur mon blog la veille, sinon je ne les aurais même pas rencontrés! Il s'agit en fait de deux familles de français qui se sont rencontrées plus tôt au Chili et qui ont décidé de se retrouver à l'approche des fêtes de fin d'année pour les passer ensemble. Il y a d'abord Laetitia, Pascal et Théo, qui ont commencé leur voyage 4 ans (!!!) plus tôt au Canada et qui ont descendu le continent américain avec leur super camion aménagé (photo 5), et puis Julie et Nicolas et leurs trois enfants Nathanaël, Lisandro et Cléophée, qui sont partis pour un voyage de six mois. Ce sont des destinées que je n'avais pas encore rencontrées et je trouve ça tellement incroyable et chouette qu'ils se soient lancés là-dedans! J'ai le privilège d'embarquer dans le camion de Laetitia et Pascal et découvre encore une autre façon de voyager, c'est trop gai! Pascal avait sa propre entreprise en France et l'a revendue pour le voyage. Ils ont acheté la cabine du camion, puis ont fait faire la remorque sur mesure! Dingue! Pendant la balade, j'ai aussi l'occasion de parler un peu plus avec Julie et Nicolas, ainsi que les deux aînés, Théo et Nathanaël, qui m'amusent beaucoup avec leurs réflexions. Sur le temps de l'ascension, le ciel commence enfin à se dégager et, quand nous arrivons en haut, nous profitons d'une belle vue sur la baie et d'un peu de chaleur du soleil! Ça fait du bien :) Nous cassons la croûte là, puis redescendons et rentrons au parking. Pendant leur sieste, je vais un peu me balader sur les falaises alentours, puis profite du beau temps et du calme de l'endroit, sur la plage.

Vers 16h, je retrouve mes compagnons et nous embarquons sur un petit bateau qui nous mène à la Isla Pan de Azúcar. Nous faisons d'abord un stop à côté d'un gros rocher avec plusieurs nids de cormorans et recouvert de Guano (photo 2) (ces fientes d'oiseaux marins), utilisé en tant qu’engrais très efficace, en vertu de sa grande concentration en composés azotés et qui fut l'un des principaux revenus du Chili (et du Pérou) sur le marché international jusqu'à la deuxième guerre mondiale. Nous nous approchons ensuite de l'île (photo 3), qui est censée abriter une colonie de 5000 à 6000 manchots de Humboldt; mais il s'agissait d'avoir une fameuse vue pour les retrouver sur les rochers, comme sur la photo 4. On a dû en voir une quinzaine! Nous faisons alors le tour de l'île et rencontrons divers groupes d'otaries et lions de mer en train de se dorer la pilule au soleil :D Sur le chemin du retour, nous voyons encore une flopée de ces grands pélicans au beau bec bleu. De nouveau sur la terre ferme, je vais au petit village de pêcheurs pour utiliser le GSM de quelqu'un pour appeler mon taximan puis passe la dernière heure avec mes compagnons de la journée, à jouer avec les enfants.

Photo 13: Photo prise du site de Pascal, malheureusement à basse résolution / Photo 15: Vue sur Chañaral, au retour du parc 

De retour en ville, je profite des sanitaires de l'hôtel pour me rafraîchir un peu, mange un petit bout en ville puis pars vers 22h à la station de bus pour attendre mon bus de 00h15. A mon arrivée, la dame du guichet m'informe que le bus a eu un problème en route et qu'il aura donc du retard, sans savoir me donner plus de précisions. Et en effet, c'est seulement à 02h20 que le bus se ramène enfin (je ne donnerai aucun détail sur mon humeur :D) et j'embarque en direction de Vicuña, un village dans la région viticole du Pisco, pour ma prochaine étape chilienne.

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Après cette fin de nuit en bus et une brève escale à la grande ville de La Serena, j'arrive à Vicuña en milieu de matinée. Fatiguée par le trajet et ayant prévu suffisamment de temps sur place, je profite gentiment de l'après-midi pour planifier les prochains jours et travailler sur le blog. Noël approche de plus en plus mais il fait un temps superbe, dans cette région au climat privilégié! En plus de son microclimat, on prête aussi à la région d'étranges pouvoirs, relayés par diverses communautés spirituelles qui s'y sont installées. Non seulement est-elle très populaire parce que les gens y vivent plus vieux que dans toute autre région du Chili, mais en plus, la vallée serait le centre énergétique de la planète... et même le point d'atterrissage d'ovnis! Elle pullule d'histoires de campeurs réveillés en pleine nuit par des petits hommes verts :D

Le matin de mon deuxième jour, je loue un vélo à mes hôtes si sympathiques et pars explorer la région. Je commence par me rendre au cimetière qui est à la sortie de la ville et qui, pour moi, donne toujours un aperçu un peu différent d'une culture. Paisible dans la lumière du soleil qui s'élève doucement et tout fleuri, c'est un début prometteur pour le reste de ma journée. Je pars ensuite en direction du village d'El Arenal où j'ai prévu de visiter la Pisquera Aba, une petite exploitation familiale ouvert en 1921, produisant 50.000 bouteilles de pisco par an, l'équivalent de la production quotidienne d'un distillerie industrielle. En se baladant sur le domaine, le guide nous explique toutes les étapes du processus, des vendanges (de mars à mai) à la distillation et à la mise en barriques, dans lesquelles le pisco prend ses aises 3 ou 4 ans. Après une petite dégustation d'un pisco pur, et de deux fruités (mangue et cerise), je reprends ma route parmi les vignes.

Vers midi, je prends mon casse-croûte à Diaguitas, surprenant petit village fait d'une rue mesurant 5 km (photos 2 et 4)! Il s'est en fait développé le long de la ligne de chemin de fer, construite en 1888 et aujourd'hui abandonnée. Egalement indiquée sur mon plan, je m'arrête à la Cerveceria Guayacán, une brasserie artisanale que j'ai même l'occasion de visiter (certes en trois minutes, mais quand même)! Cela me permet au moins d'apercevoir un petit bout de Belgique dans l'entrepôt (photo 7) :) Enfin, je reprends la route du retour, qui me donne encore un bel aperçu des paysages majestueux de vignes tapissant le fond de l'étroite vallée, encadrée par les montagnes desséchées.

Le troisième jour, je décide de remonter la vallée jusqu'au petit village de Pisco Elqui. Le village se perche à 1280 m sur un coteau pelé, au pied duquel serpente une rivière qui irrigue les vignes étagées, protégées par de grands filets qui captent l'humidité. Le village a été rebaptisé ainsi en 1936 pour ancrer ici les racines du pisco, dont les Péruviens revendiquent aussi la paternité. Et même si ceux-ci semblent avoir gagné la bataille juridique, on continue à produire ici la fameuse eau-de-vie.On case mon vélo dans la soute du bus et en avant! Vu comme la route grimpe, ça prévoit déjà beaucoup de plaisir pour la redescente en deux roues :D Une fois arrivée à Pisco, j'enfourche le vélo et continue la route seule en direction de la distillerie Doña Josefa, que mon hôte Manolo m'a conseillé de visiter. Sont-ils victimes de leur éventuel succès ou bien aurais-je dû dire que je venais de la part de Manolo, bref il se trouve que la visite s'est avérée bien insipide et faite du bout des lèvres par le gars qui m'a "accueillie". Une fois qu'il a compris que je ne comptais pas acheter, il a assez vite disparu. Enfin, ça m'a au moins laissé le loisir de prendre quelques photos du cadre plutôt sympathique, lui (photos 1-6). Je redescends ensuite à la place principale de Pisco et dîne gentiment à l'ombre, en observant les familles, la classe et les touristes qui passent. Je ne me manque pas de remarquer les guirlandes de Noël saupoudrées de fausse neige qui sont enroulées autour des lampadaires de la place, parmi les palmiers. C'est vraiment marrant et bizarre :D

Après une petite pause digestion, je remonte sur mon destrier et commence enfin la partie la plus fun de la journée: la descente de la vallée! :D Si je l'avais déjà observé lors de ma première journée de visite la veille, il est encore plus évident, en prenant un peu de hauteur, que cette vallée, encaissée entre des montagnes rugueuses, semble tracer une longue oasis en terres arides. Avec son climat privilégié et ses terres fertiles, on y cultive non seulement la vigne mais aussi toutes sortes d'arbres fruitiers, papayers en tête! Il fait vraiment chaud au soleil, mais grâce à la descente, je suis rafraîchie par le vent et, il faut le dire, les paysages sont vraiment superbes! Le bonheur total :) Je passe par des petits villages sympas puis prends une pause à la Villa Cavas del Valle, où j'ai droit à une visite des bâtiments et à une dégustation de quelques'uns de leurs vins. Ici, pas de pression pour acheter au moins et le moment à l'intérieur des murs épais est bien rafraîchissant, alléluia!

De retour à Vicuña, je fais un petit tour par la place principale, du nom indétrônable de Plaza de Armas, dominée par la Torre Bauer, une tour simili-médiévale construite en 1905 en Allemagne à l'initiative d'un ancien maire de Vicuña nommé Bauer, lui-même né à Ulm (photo 1). En face, l'église de l'Immaculée Conception datant de 1909, néoclassique. Et le soir, je profite de la région propice pour retourner voir les étoiles, cette fois à l'Observatorio del Pangue: en effet, en complément de son climat agréable, la région jouit d'une atmosphère sèche et transparente, de l'absence de pollution lumineuse et du record mondial de nuits totalement dégagées (plus de 300 par an!). Il serait bête de se priver d'une si belle occasion, et j'avais eu tellement de plaisir à Atacama que je repars à la rencontre des étoiles! L'observatoire est perché sur un mont isolé, à 17 km au sud de Vicuña et c'est Manolo (de mon auberge) qui nous conduit. Il y a sa compagne, un couple d'américains et moi. Cet observatoire a été monté par l'astrophysicien français Eric Escalera, qui propose des visites avec l'utilisation d'un télescope de 40 cm. Il y a donc moins de télescopes qu'à Atacama mais c'est de la super technologie et nous avons la chance d'admirer des choses assez similaires: la nébuleuse de la Tarentule, les deux nuages de Magellan, Uranus, la constellation d'Orion, Sirius, Canopus... Et en bonus, trois galaxies planes (comme la nôtre), cinq étoiles filantes et la supernova de 1604 et une future supernova, à propos de laquelle Eric est super excité!! En effet, selon Wikipedia, on appelle supernova "l'ensemble des phénomènes qui résultent de l'implosion d'une étoile en fin de vie, notamment une gigantesque explosion qui s'accompagne d'une augmentation brève mais fantastiquement grande de sa luminosité. Vue depuis la Terre, une supernova apparaît donc souvent comme une étoile nouvelle, alors qu'elle correspond en réalité à la disparition d'une étoile." La première supernova recensée est la SN 1604 (observée à l'époque sans télescope, du coup) et l'on peut encore observer quelques'uns de ses restes. il faut savoir que c'est un phénomène assez rare, d'où l'excitation des astrophysiciens actuellement! Moins bavard qu'Alain à Atacama, Eric fait plus scientifique passionné qu'animateur mais nous passons quand même un super moment sous cette voûte magnifique!

Enfin, le jour de mon départ, je laisse mes bagages entreposés à l'auberge et remonte à Pisco Elqui pour retrouver Jeanine et Guillaume, deux anciens élèves qui étaient au cours d'espagnol avec moi en début d'année. Eux sont aussi en voyage en Amérique du Sud et le hasard a voulu que nos routes se croisent par chance! Je passe une super journée avec eux, à partager nos expériences et anecdotes respectives, comme si nous étions à une terrasse à Liège. Qu'est-ce que c'est bon :D Fin d'après-midi, je redescends sur Vicuña pour aller prendre mon bus de nuit en direction de la capitale, Santiago!

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Après une mauvaise nuit dans le bus, j'arrive le lendemain matin à Santiago et, ayant la chance d'avoir directement mon lit à l'auberge malgré l'heure matinale, je peux terminer ma nuit avant d'aller manger un petit bout et de skyper avec les parents. Enfin, je profite du reste de la journée pour travailler sur le blog.

Pour mon deuxième jour, je me suis concoctée un fameux itinéraire: visite du centre historique et autres petits bonus! Mon point de départ est la Plaza de Armas, au cœur de la ville, toujours animée avec ses marchands ambulants, ses cireurs de chaussures, ses caricaturistes, ses diseuses de bonne aventure et ses joueurs d’échec. C’est ici que Pedro Valdivia fonda la ville de Santiago en 1541, et lui donna dès le début son plan quadrillé et rectiligne. Il fait un temps magnifique, l'air du matin est encore frais et je marche parmi tous les gens qui vont travailler et qui commencent leur routine quotidienne; j'ai l'impression d'être une petite souris au milieu d'une ville qui grouille et j'observe avec délectation ce tourbillon depuis ma bulle paisible et exempte de tout tracas. Mais quel bonheur! En bordure de la place trône l'Iglesia Catedral (1584) (photos 1 et 4), qui est en fait le cinquième édifice religieux à avoir été construit à cet emplacement (tremblements de terre et incendies ont eu raison des autres). Je poursuis ma balade dans les jolies rues adjacentes à la place et passe ainsi devant l'Ex-Congreso nacional (photo 3), avant d'arriver à la Plaza Constitución et la Moneda (photos 8-9). Le palais de la Moneda (1784-1799) fut construit à l’origine pour abriter la frappe de la monnaie, puis servit de résidence aux présidents de la République à partir de 1846. Il reste intimement lié au coup d’Etat de 1973 fomenté par le général Pinochet puisqu'à l’aube du 11 septembre, il est mitraillé et bombardé par l’aviation chilienne lorsque l’armée, avec le soutien de la CIA, prend le pouvoir sans passer par les urnes. L’image du bâtiment bombardé et criblé de balles fait le tour du monde. Le président Salvador Allende tente d'abord de se défendre mais finit par convaincre ses collaborateurs et ses proches de s'enfuir ou de se rendre avant de se suicider dans son bureau. Pinochet usurpe le pouvoir. Ce drame a laissé des images pathétiques encore présentes dans toutes les mémoires. Je continue ma route vers la Universidad de Chile (photo 10), sur une des grosses avenues de la ville qui m'amène au joli petit quartier Paris-Londres. C’est au cœur de ce quartier, dans une ancienne demeure bourgeoise au numéro 38 de la rue Londres, que la DINA (organisme de répression du temps de Pinochet) enfermait ses détenus pour les interroger et les torturer. La DINA possédait dans la capitale trois autres centres de détention et d’interrogatoire qui ont été détruits depuis. Londres 38 (photos 12-14) est le seul immeuble qui ait été conservé et repris en 2005 par le gouvernement démocratique qui l’a racheté à l’armée pour en faire un espace consacré à la mémoire des victimes de la terreur d’Etat. Près de 2.000 détenus passèrent par ce sinistre centre entre septembre 1973 et la fin de 1975. Au total 98 personnes y furent exécutées (militants du MIR, du Parti communiste et du Parti socialiste).

 Sur la photo 13: Un tag disant "Ici fut torturé mon fils" et une plaque commémorative au sol

Je continue mon tour à l'Iglesia San Francisco avant de revenir me balader dans le quartier Paris-Londres. L’église et son couvent, abritant aujourd'hui le Museo de Arte Colonial, forment l’édifice le plus ancien de Santiago (photos 1-7). Construite entre 1586 et 1628, l’église a miraculeusement résisté à 15 tremblements de terre ! L'endroit est vraiment apaisant alors qu'il est en plein milieu du centre-ville! Je suis toujours fascinée par ces édifices dont les murs protègent si bien de l'agitation de la ville et qui offrent un vrai havre de paix à tout qui s'y aventure. Et visiblement, je ne suis pas la seule à trouver cet endroit à ma convenance puisque j'y croise un magnifique paon qui se balade relax dans le cloître. Quoi de plus normal? :) Le Barrio Paris-Londres, lui, est né de l'urbanisation des anciens jardins du monastère San Francisco en 1923. Au fil des rues pavées et tranquilles, on peut admirer plusieurs demeures bourgeoises et hôtels particuliers naguère habités par les classes riches de la ville avant qu’elles ne déménagent vers les nouveaux quartiers bourgeois. Chaque demeure présente un style différent, souvent avec l'influence Art déco. Cette fois, ce n'est pas spécialement les murs d'un bâtiment, mais plutôt l'étroitesse des rues qui contribuent au calme et au charme de l'endroit. De nouveau, j'ai peine à croire qu'on est en plein milieu de la capitale chilienne! J'adore ces petites surprises de quartiers typiques auxquels on ne pense jamais quand on s'imagine les capitales de grands pays comme celui-ci. Je quitte enfin cette petite bulle spatio-temporelle et retourne sur la grande avenue O'Higgins qui m'amène à la Biblioteca nacional (photos 12-15). Dans un imposant édifice de style « français Beaux-Arts » datant de 1925, c’est l’une des plus anciennes d’Amérique latine et, avec plus de 6 millions d’ouvrages, la plus importante du Chili! Après avoir pris mon pied avec l'appareil photo dans les couloirs déserts de la bibliothèque, je fais un crochet par la magnifique salle Medina sur conseil du Routard, et en effet, cette petite salle de lecture abritant livres de géographie et d’histoire a un cachet incroyable avec son superbe plafond, ses murs couverts de bois et d'étagères et ses lustres imposants.

Je m'enfonce ensuite dans un espace un peu plus vert: le Cerro Santa Lucia, une petite colline à l’est du centre historique qui culmine à 630 m. Ancienne cheminée de volcan (eh oui!), c’est aujourd'hui un agréable parc ombragé avec de nombreux escaliers, statues, fontaines et parterres de fleurs colorés. De l'autre côté de la colline, le charmant quartier Lastarria qui consiste en quelques rues urbanisées au début du XXe siècle, aujourd'hui essentiellement habité par des artistes et jeunes plutôt aisés. Je m'octroie une petite pause au délicieux glacier Emporio La Rosa et me régale d'une bonne glace dulce de leche et amande. Mmmh :) Ensuite, cap sur le nord du centre-ville pour un crochet par le Mercado central, avec sa fameuse structure métallique initialement conçue pour abriter des expositions, qui date de 1868 et fut fabriquée en Angleterre. C'est un marché réputé parmi les chilenos pour ses poissons et fruits de mer, d’une très grande fraîcheur. Et pour terminer ma boucle à la Plaza de Armas, je passe par la superbe Basilica de la Merced (photos 12-14) qui succéda au XVIIIe siècle à deux ouvrages détruits par des séismes. Troisième bulle apaisante de la journée, je savoure ce moment au calme et à la fraîcheur une fois que les portes de l'église sont refermées. Je constate, une fois de plus, à quel point les lieux de culte ont été des refuges tout au long de mon voyage, peu importe l'endroit ou la confession. Des refuges contre la pluie, la chaleur, le froid ou simplement le bruit et l'agitation, qui m'offrent toujours quelques minutes intenses, comme suspendues hors du temps, où je me laisse envahir par l'atmosphère spirituelle qui y règne. Enfin, sur le chemin du retour vers l'auberge je m'arrête chez un petit marchand de fruits et légumes qui, en voyant mon appareil, me demande de les prendre en photo lui et sa cousine :)

Je commence le jour suivant par la visite du Museo de la Memoria y los Derechos Humanos (musée de la mémoire et des droits humains), un musée qui s'annonce vraiment intéressant. Je cite ici la présentation qu'en fait le Routard: "« Faire la lumière sur les ténèbres », telle est l’ambition de ce musée. Il permet de regarder, sans détour et avec lucidité, l’obscurantisme du passé et les années sombres de la dictature de Pinochet. Un espace muséographique qui revient sur les événements du 11 septembre 1973, et résonne comme un vibrant hommage aux milliers de morts et disparus. Films, articles de journaux, dessins réalisés en détention, nombreux objets donnés par les familles. L’atmosphère de recueillement face au mur entièrement recouvert de phots noir et blanc des victimes est particulièrement saisissante." N'étant pas autorisée à prendre des photos à l'intérieur du musée, j'ai tiré d'internet la photo du mur avec les photos des victimes (photo 4). Malheureusement, leurs bureaux étant en plein déménagement, aucun audioguide n'était disponible et les panneaux étant seulement en espagnol, je n'en ai pas retiré autant que ce que j'aurais pu avec un audioguide. Néanmoins, je retiens quand même les différents témoignages vidéos d'une dizaine de victimes passées par les différents centres d'interrogatoire et de torture de la DINA (et rescapées, donc) ainsi que la bande audio de l'émouvant dernier discours d'Allende empreint d'espoir et d'amour pour son peuple qu'il a pu faire diffuser en live sur une des dernières radios pas encore contrôlée par l'armée, juste avant de se suicider à la Moneda. Une fameuse pause d'humanité que je termine en beauté en dînant dans l'un des anciens QG de la résistance contre Pinochet, le Café Brazil (photos 6-7).

L'après-midi, je pars avec un groupe en périphérie de Santiago pour une expédition "nature" à la découverte des vignobles et de l'exploitation Concha y Toro. Il s'agit de la maison (et la marque) la plus connue du Chili et la plus importante d’Amérique latine! Elle exploite une dizaine de vignobles autour de Santiago, dans la vallée du Maipo, dans les régions de Rancagua et de San Fernando. Ici, à Pirque, se trouve une partie seulement du vignoble, fondé en 1883 par don Melchor Concha y Toro. Commercialisé dans 147 pays du monde (dont la Belgique :)), Concha y Toro est le premier exportateur de vin du Chili. Nous commençons la visite par un petit tour dans le parc où se situe la maison mère, on longe les champs de vignes et puis on visite les caves. A chaque étape, des explications sur l'historique de la maison et tout le processus de fabrication, bien sûr, mais aussi la dégustation d'un vin différent, gâtés :D Le dernier que nous avons pu goûter, le Casillero del Diablo (photo 9), est, je confirme, l’un des meilleurs crus de la maison. L'anecdote dit qu'il fut baptisé ainsi pour faire peur aux paysans du coin, qui ne se privaient pas d’aller se servir dans la réserve. Sur la photo 10, la cave d'origine utilisée pour stocker et laisser maturer le vin, dès 1883, construite à plusieurs mètres de profondeur pour garder la fraîcheur. Et sur la photo 11, la projection d'un dessin du diable, en clin d’œil. Nous avons d'ailleurs eu droit à une petite mise en scène avec son et lumière sur l'histoire du nom Casillero del Diablo, après avoir été "enfermés" dans la cave par notre guide. Vraiment amusant et bon enfant :) Deuxième anecdote dont je ne suis pas peu fière: j'ai décidé, comme défi, de garder le verre de dégustation offert en souvenir malgré les conditions parfois sportives dans lesquelles je voyageais, et je témoigne qu'il est arrivé (entre autres grâce à la collaboration de mes visiteurs au Pérou) en parfait état en Belgique! :D

Enfin, pour les deux jours qu'il me reste à Santiago, je redeviens un peu studieuse et me consacre exclusivement au blog, avant mon départ le dernier soir pour un retour dans la nature à Pucón, dans la belle région des lacs! :D

5

Le lendemain matin, j'arrive par une grise matinée à Pucón. Il y fait bien plus frais qu'à Santiago, peut-être que ça va m'aider à mettre mon esprit en mode "Noël"! Arrivée à mon auberge, il est encore si tôt qu'il n'y a personne pour ouvrir la porte et je patiente donc sur la petite terrasse à l'avant. Quelques minutes plus tard, un couple arrive également et nous sympathisons. Ema, lituanienne, et son copain Adam, anglais, sont aussi en voyage pour plusieurs mois en Amérique du Sud et c'est leur deuxième séjour à Pucón. Ils ont tellement adoré la première fois qu'ils sont venus plusieurs mois auparavant, qu'en remontant le Chili après leur séjour en Patagonie, ils ont décidé de refaire un stop par cette petite bourgade. Enfin, quelqu'un vient nous ouvrir et nous pouvons rentrer nous abriter du crachin qui s'est mis à tomber. A l'intérieur de la maison, c'est tellement cosy qu'on se croirait chez soi! Fauteuils confortables, jolie décoration et... une cuisinière à bois où brûle un bon feu qui vient bien à point pour chasser le froid!! :D Le temps n'est vraiment pas terrible donc je profite de la bonne connexion internet pour travailler sur le blog avant d'aller faire un petit tour en ville au moment du dîner. Les deux rues principales sont une succession de magasins de matériel de sport ou de souvenirs, de restaurants et d'agences en tous genres pour organiser des activités sportives dans la région, et j'y retrouve vraiment le style des villes de Patagonie. Heureusement, en s'éloignant de ces rues, on retrouve le calme et, il faut dire que la nature qu'on aperçoit aux alentours a l'air superbe!

Le deuxième jour, je pars en randonnée au magnifique Parc National Huerquehue qui s'étend sur une (fameuse) surface de 12.500 ha. Au programme annoncé par le Routard: des forêts d'aucarias et de bambous, des canyons, des cascades et de nombreux lacs. Une chance, le ciel s'est dégagé et, sur le chemin de la station de bus, j'ai la surprise de pouvoir admirer le volcan Villarica, sorti des nuages, qui étale au grand jour ses superbes neiges éternelles (photo 1)! A l'arrivée au parc, je choisis le sendero Los Lagos (le sentier des lacs, sentier jaune sur la photo 2) qui fait 19 km, certes le plus populaire mais aussi celui qui donne le meilleur aperçu de la beauté de la région. Le bus que j'ai pris pour venir était plein mais heureusement, sur le premier quart d'heure de marche, les groupes commencent à s'espacer et je finis vite par me retrouver seule, à pouvoir profiter à mon aise et de tous mes sens de la belle nature qui m'entoure. Et je ne suis pas déçue. Il fait encore frais mais ce n'est pas plus mal pour une journée de rando et puis, le soleil prévoit de bien réchauffer l'atmosphère plus il montera dans le ciel. Comme annoncé par le Routard, la nature est très diversifiée! Je croise toutes sortes d'espèces qui se côtoient comme le chusquea (bambou du chili) (photo 4), juste à côté de hêtres ou de conifères, ce qui m'amuse encore malgré le fait que ce ne soit pas le premier endroit où je vois ça. Les fleurs sont aussi toutes plus belles que les autres; leurs couleurs et la finesse de leurs pétales et de leur forme me font une fois de plus prendre conscience de la beauté de la Nature. Après un fameux effort en montée, j'arrive sans doute à l'une des plus belles vues de la balade, avec le volcan Villarica en toile de fond et à ses pieds, un lac et les collines recouvertes d'arbres (photo 11). C'est vraiment magnifique!!!

Je suis rejointe sur mon perchoir par un couple de pensionnés namurois avec qui je papote avec plaisir. Une fois la pause terminée, nous reprenons la fin de notre ascension, avant de redescendre doucement de l'autre côté. Chacun marche à son rythme et nous finissons par emprunter sans le faire exprès deux chemins différents. Je les retrouverai plus loin sur le chemin du retour. A l'avant plan de la photo 4, des araucarias, ces sortes de sapins typiques de la région. Il faut savoir que l'araucaria peuplait déjà les forêts voici 225 millions d'années! A cette époque, l'Amérique du Sud était encore collée à l'Afrique, formant le Gondwana, continent qui, en se séparant de la Laurasia, allait former l'hémisphère sud. A l'époque, aucun oiseau à la cime des aucarias, pas d'herbe non plus à leur pied, rien de tout ça n'existait! Juste le bruissement du vent... et les cris des dinosaures :) En version légèrement plus petite, je rencontre pas mal de beaux lézards en train de se dorer la pilule au soleil, sur les chemins :) Et puis la boucle me ramène tout doucement vers le chemin par lequel je suis venue, que je dois parcourir en sens inverse pour retourner prendre le bus. Mais rien d'ennuyant, à contre sens et avec la lumière toute différente de l'après-midi, le paysage est encore tout autre! Je retrouve finalement les deux namurois ainsi que deux français avec qui j'avais aussi un peu parlé à l'arrêt de bus et nous repartons tous ensemble vers Pucón.

Le lendemain, je travaille gentiment à l'auberge sur mon blog puis skype avec la famille pour leur réveillon de Noël. Eh oui, avec le décalage horaire et les saisons inversées, il est déjà tard et il fait déjà noir en Belgique alors que je profite encore d'une belle fin d'après-midi ensoleillée :) Dans les minutes qui suivent et je ne sais toujours pas à cause de quoi, l'écran de mon cher GSM, compagnon de toujours et lien infaillible entre la Belgique et moi, se colore progressivement de noir jusqu'à ce qu'il soit complètement hors d'usage! Panique à bord! Je me rends compte que je vais devoir acheter un nouveau GSM mais les prix sont exorbitants au Chili et si j'achète un bas de gamme, il est possible qu'il n'ait pas les fonctionnalités dont j'ai besoin pour voyager... Voilà Ema qui passe par là et vient s'asseoir près de moi, je lui raconte, dépitée. Et là, elle me dit tout simplement: "Oh ne te tracasse pas, Adam et moi on a chacun pris un vieux GSM en plus au cas où on aurait un problème, on peut te donner un des nôtres!" Dingue! On était bien le soir de Noël, c'était pour moi un petit miracle qui se produisait :) Et en effet, Adam m'a passé son deuxième téléphone comme si c'était la chose la plus normale qui soit, j'ai eu une chance incroyable et leur en suis éternellement reconnaissante! En début de soirée, nous avons retrouvé Julia, une allemande avec qui Ema et Adam avaient sympathisé, et nous sommes partis en quête d'un endroit sympa pour fêter Noël à nous quatre. Et nous avons trouvé un très bon resto de grillades où nous nous sommes fait plaisir avec un délicieux assado, ces BBQ typiquement sud-américains. On a passé une très bonne soirée et on s'est bidonnés comme des malades! Sans vraiment se sentir le soir de Noël et donc sans trop ressentir de tristesse de ne pas être avec nos familles, je pense que nous avions quand même tous les quatre conscience de la chance d'être ensemble autour de cette table ce soir-là :)

Photo 2: Ema, à gauche, puis Adam, et Julia en face de moi 

Quand nous sommes rentrés à l'auberge, nous y avons trouvé les différents jeunes, issus de différents pays d'Amérique du Sud, qui y travaillent et avaient fait un super repas de Noël entre eux. Encore une très chouette ambiance, avec un feu de camp en plus! Le temps d'un petit verre de vin et puis hop au dodo car le lendemain, je pars tôt pour ma dernière destination plus au sud avant de remonter vers Valparaíso: Puerto Varas, toujours dans la région des lacs.

6

J'arrive à Puerto Varas en début d'après-midi après 5 heures de bus. Ici, le temps est aussi maussade que le matin à Pucón. Objectifs de la journée: m'installer à l'auberge et trouver de quoi manger en ce jour férié de Noël. Une fois installée dans mon dortoir et après avoir trouvé portes closes à différents restos, j'en trouve enfin un qui a encore une petite table de deux de libre. Ouf! Ici, jour de fête oblige, que des familles ou des couples bien sapés, et une fois de plus je dénote un peu avec mes habits de baroudeurs et mes cinq heures de bus dans le visage ^^ Bref, je plonge le nez dans mon guide et commence à organiser mon séjour ici. Puerto Varas est est une petite station balnéaire sans beaucoup de charme sur les bords du lac Llanquihue, née de l'arrivée des colons allemands au milieu du XIXe siècle. C'est surtout le point de départ pour le célèbre parc Vicente Pérez Rosales, le plus ancien du Chili (créé en 1926), où je prévois d'aller faire un petit tour. Après avoir décidé de mon expédition du lendemain, je rentre à l'auberge pour travailler sur le blog et me retrouve, dans la salle commune, dans une ambiance sympa créée par le petit groupe qui y a fêté Noël ensemble la veille. Très familial, malgré les origines de chacun: Allemagne, USA, Singapour (eh oui!) et les deux vénézuéliennes qui tiennent l'auberge. J'en profite d'ailleurs pour m'entretenir avec l'une d'entre elles, Paola, sur la situation toujours tristement désastreuse du Venezuela, qu'elles ont toutes les deux fui. Ce ne sont pas les premières jeunes qui ont fui le pays que je rencontre en Amérique du Sud et qui travaillent dans des auberges de jeunesses pour commencer une vie un peu meilleure et surtout, moins dangereuse.

Le lendemain, je prends le bus pour me rendre au parc Vicente Pérez Rosales et m'arrête d'abord aux Saltos del río Pétrohué, un site qui propose trois petits chemins pour découvrir la flore locale et admirer le fameux torrent du río Pétrohué. Je commence par le sentier le plus éloigné du torrent, pour garde le plus spectaculaire pour la fin. Sur la photo 2, les baies d'un olivillo, un arbre endémique de la région pouvant atteindre 20 m de haut; sur les photos 3 et 4, un des bras du río, ici plus calme.

Je passe ensuite aux deux autres sentiers et je ne suis pas déçue! Le torrent, couleur émeraude (ça change de la couleur de la Meuse...), taille son lit dans une terre volcanique noire, encaissé dans une végétation d'un vert profond. La force du courant est vraiment très impressionnante et ça ne donne vraiment pas envie de tomber dedans! C'est absolument magnifique et hypnotisant. La remontée du parcours, par le chemin bien nommé des amoureux (los enamorados), se fait "par l'intérieur", également le long d'un petit bras paisible du fleuve (photos 9-11). C'est vraiment dingue de se dire qu'à quelques dizaines de mètres seulement se trouvent deux bras du même fleuve d'une puissance et d'un débit si différents! Ici, pas un bruit et pas une vague, on dirait presque que le temps s'est arrêté, si ce n'est les oiseaux qu'on entend chanter au loin. Sur le chemin de la sortie, un pont donne encore une perspective plus plongeante sur un autre bras du fleuve (photo 14). Décidément, il est plein de surprise, ce río!

Je fais les 6 km qui me séparent de Pétrohué, la mini bourgade au bord du lac Todos Los Santos, à pied cette fois, pour mieux profiter de la nature qui borde la route. Et de nouveau, ça en vaut vraiment la peine: le chemin s'enfonce de plus en plus dans une nature d'une beauté puissante, à travers les volcans tapissés de rocailles noires et de forêts denses. Le torrent se laisse apercevoir par endroits, détourné dans sa course par des coulées de boue gris anthracite qui dévalent les versants chaque fin d'hiver. Et même si le ciel commence de nouveau à se couvrir, ça n'enlève rien à la beauté et à la force du paysage. Je suis de nouveau seule au monde. La fin de la route est un peu moins agréable avec quelques tournants sans visibilité mais j'ai la chance qu'un automobiliste qui rentre chez lui s'arrête et me propose de me déposer à Pétrohué. Lui, il habite de l'autre côté du fleuve qui sort du lac et, après avoir garé sa voiture au village, il doit prendre un bateau pour atteindre sa maison! Charmant :) Cinq minutes plus tard, nous y sommes déjà. Je remercie mon chauffeur puis me rends au bord du lac Todos los Santos. Ce lac, découvert par les jésuites un 1er novembre (d'où le nom) est entouré de collines recouvertes d'épaisses forêts de conifères et dominé par le cône du volcan Osorno, normalement resplendissant de blancheur. Malheureusement, le temps est de plus en plus couvert et je n'en aperçois que la base, comme la photo 8 en témoigne. Dommage! Je dois bien avouer que le temps gris ne met pas vraiment le lac en valeur, c'est un peu tristounet, mais la balade était quand même agréable. Pétrohué se résumant à deux hôtels et une poignée de maisonnettes, je ne m'attarde pas plus devant le ciel menaçant et reprends le bus vers Puerto Varas.

Sur le chemin du retour, je descends à quelques arrêts du terminus pour finir le trajet à pied le long du lac Llanquihue. Ainsi j'ai une vue, certes coupée par les nuages mais quand même, sur les deux volcans Osorno (photo 13: à gauche) et Calbuco (à droite), qui s'élèvent respectivement à 2652 m et 2015 m. Enfin, une prise de vue de la partie de Puerto Varas longeant le lac.

Le lendemain et le surlendemain, je me concentre sur le blog. Pendant mes longues journées à l'auberge, je fais la connaissance d'un couple de français très sympathiques, Pascaline et Oscar, avec qui je parle toute une soirée. Leur voyage a une teinte un peu particulière car Oscar, chilien adopté tout petit par des français, est sur une piste pour retrouver ses parents biologiques! Malheureusement, je ne saurai jamais s'il a réussi à les rencontrer... Et le soir du dernier jour, je prends de nouveau un bus, cette fois en direction de la colorée Valparaíso, plus au nord, où je vais fêter le nouvel an!

7

Après 14 heures de bus, j'arrive en milieu de matinée à Valparaíso. Ayant repéré que mon auberge était assez loin de la station de bus, je prends un taxi pour m'y rendre. Sur le trajet, le chauffeur me demande si j'ai déjà payé mes nuits à l'auberge. Je lui mens et confirme pour le décourager d'essayer de m'envoyer vers une auberge où il connait des gens, comme c'est monnaie courante, puis lui demande pourquoi il veut savoir ça. En fait plein de bonnes intentions, il m'explique que le quartier de mon auberge n'est pas très sûr et qu'il faut que je sois prudente, surtout si je sors quand il fait noir. Mmh pas top, l'entrée en matière! Apparemment arrivés à la bonne adresse, je ne suis pas très rassurée en voyant cette bâtisse un peu délabrée et finis par me demander si ce n'est pas un gros bobard, ce qui arrive pourtant assez rarement sur booking.com. Le chauffeur a plutôt l'air de mon avis et, en voyant un gars rentrer dans le bâtiment, il lui demande s'il s'agit bien de l'auberge et si je peux l'accompagner. Le gars dit oui. Après avoir encore reçu d'autres recommandations de sécurité de mon gentil chauffeur, je prends mes affaires et rejoins l'autre gars. Mon chauffeur, lui, surveille que je rentre bien dans le bâtiment avant de redémarrer. A l'intérieur, je me demande où j'ai atterri: je suis dans un espèce de grand espace genre sous-sol délabré couvert de graffitis et dont les fenêtres sont barricadées. Je ne suis vraiment pas rassurée. Nous montons à l'étage et là, nous arrivons à la vraie auberge. Ouf!! Certes c'est vraiment défraîchi mais déjà un peu moins glauque et je suis chaleureusement accueillie par Pablo, un jeune argentin qui tient la réception, qui m'amène à mon dortoir. Il s'avère qu'en fait, le rez-de-chaussée est un espace d'exposition pour les jeunes du quartier. Je comprends un peu mieux! Dans la chambre, je rencontre Mariela et Laura, deux cousines chiliennes venues fêter le nouvel an à Valpo, ainsi que Laïa, espagnole, et Sixtine, française, deux voyageuses solo qui viennent d'arriver aussi. Je partage avec les filles les mises en garde de mon chauffeur et elles me confirment qu'elles ont reçu des propos identiques! Nous décidons alors de rester ensemble, non seulement pour le nouvel an mais, pourquoi pas, en journée aussi. Me voilà ragaillardie et rassurée! :D Néanmoins, la connexion wifi n'a pas l'air top à l'auberge et, en apprenant que mes nouvelles copines quittent Valpo peu après le réveillon, je décide d'écourter mon séjour et de retourner à Santiago le 1er janvier pour travailler dans de meilleures conditions sur le blog et puisque c'est de toute façon de la capitale que quitte mon avion pour Lima, le 5. Et nous partons ainsi Sixtine, Laïa et moi faire un petit tour pour découvrir la ville.

La baie de Valparaíso forme un vaste amphithéâtre en forme de demi-lune, adossé à 45 collines (cerros), naguère sauvages, aujourd'hui toutes urbanisées. Où que l'on soit, c'est l'océan Pacifique qui attire le regard! Aujourd'hui, après une longue période de déclin et de paupérisation, la ville semble entrée dans une phase de renaissance. Depuis les années 2000, le vieux Valparaíso des hauteurs est progressivement réhabilité par des architectes; les immeubles sont restaurés et magnifiés par des designers et des artistes inspirés. Ville étonnante, artistique, inventive et bohème, elle a retrouvé une bonne santé et des couleurs vives, tout en conservant son caractère d'antan. On peut dire que la description du Routard est vendeuse! :) Nous commençons par les cerros Concepción et Alegre (classés par l'UNESCO) qui ont été métamorphosés en quartiers branchés et alternatifs grâce à une politique municipale et ambitieuse et à l'imagination de leurs habitants. On y accède par des funiculaires très rétro, ou par des escaliers pentus, on flâne à pied dans des passages et des ruelles pavées qui forment un labyrinthe insolite où l'on découvre au hasard d'innombrables peintures murales qui couvrent les murs et les façades. C'est vraiment, vraiment chouette! Malheureusement, comme si je ne voyageais pas depuis assez longtemps, je commets l'erreur de débutant d'oublier la batterie de l'appareil photo à l'auberge et dois me contenter de la résolution du vieux mais quand même brave GSM d'Adam ^^ Après une belle après-midi à faire connaissance avec la ville mais également les unes avec les autres, nous finissons par faire un crochet par le supermarché pour les courses du souper puis par rentrer, épuisées, à l'auberge.

Le lendemain, je décide de repasser par les différents coins que nous avons vus la veille, avec la batterie dans l'appareil photo, cette fois! Je dois d'abord aller chercher mon ticket de bus pour le retour à Santiago donc je traverse la ville pour aller à la station de bus puis reviens sur mes pas. Dans ces quartiers moins touristiques, j'ai l'occasion de mieux me plonger dans l'ambiance de la ville et, plus précisément, dans l'excitation du passage en 2018! Partout on vend chapeaux, lunettes, cotillons, et... sous-vêtements jaunes (photo 4)! Eh oui, selon une tradition locale, porter des sous-vêtements jaunes le jour du réveillon apporte prospérité, amour, chance et argent pour l’année à venir. Il paraît même que les porter à l’envers doublerait les chances de réussite :D héhé Plus sérieusement, le jaune ferait traditionnellement référence au soleil, comme symbole d'éternité et de prospérité. Mais le Chili n'est pas le seul à sacrifier à cette tradition des sous-vêtements jaunes, également observée au Mexique, au Pérou et en Equateur, avec parfois quelques nuances: la lingerie doit être rouge si c'est l'amour et non la richesse que l'on recherche. En Uruguay, en Argentine et au Brésil, ce sont des dessous roses qu'il faut porter pour célébrer l'arrivée de l'année nouvelle. C'est vraiment marrant! En retournant vers le centre touristique, je tombe par hasard sur la superbe église du Collège de la Congregación de los Sagrados Corazones, fondé en 1837. Je décide de pousser la porte et je ne le regrette pas: passée par le superbe porche ouvragé, je découvre ensuite l'intérieur, tout aussi beau et travaillé! Mais le clou du spectacle, c'est pour moi le plafond bleu foncé parsemé d'étoiles dorées. C'est tellement apaisant! Je finis par décoller mes yeux de la voûte et ressors pour continuer ma visite. Je reviens à la Plaza Victoria (photos 10-11), puis essaie de retrouver l'ascencor Florida (photo 12) qui peut m'amener au cerro Bellavista afin d'accéder au Museo a Cielo Abierto (= musée à ciel ouvert) créé en 1992 sur l'initiative d'un peintre local. Il s'agit en fait d'un parcours que l'on fait à pied en sillonnant le cerro Bellavista et où l'on peut admirer une vingtaine de grandes fresques murales. Mais, en m'éloignant de la place, les rues se font plus désertes et je me fais aborder par un monsieur qui me conseille de ranger mon appareil photo dans mon sac et de faire attention où je vais. Malgré l'envie de visiter, le doute s'installe dans mon esprit. Je range l'appareil photo et poursuis quand même ma route. Mais malheureusement, le funiculaire est hors d'usage et les rues, qui sont en fait des escaliers étroits et plus ou moins déserts et qui mènent en haut du cerro, ne semblent pas très rassurantes. Pas très contente et un peu déçue, je finis quand même par redescendre, et décide de monter sur les cerros par le côté plus touristique que nous avons emprunté la veille.

Heureusement, je suis quand même réconfortée par les superbes fresques que je trouve sur mon chemin, et finis par oublier ce petit revers et repars pleine d'entrain. Je monte par le cerro Concepción et me retrouve avec plaisir dans le même dédale de ruelles que la veille.

Sur les deux dernières heures, le temps s'est couvert et quand j'arrive au paseo Gervasoni, la vue sur la baie est complètement bouchée! Ayant vu le résultat sans nuages la veille, je décide de me poser sur un banc et d'attendre que le ciel se dégage. En effet, le paseo Gervasoni est une promenade élégante, bordée de maisons du XIXe siècle, avec vue époustouflante sur la ville. Je ne veux pas me priver et garde espoir! Et ça marche, au bout d'une heure, le soleil commence à se pointer et les nuages s'en vont gentiment. Je passe ensuite au Paseo Atkinson (photo 6), avec ses petites maisons mitoyennes et colorées du début du XXe s (la majorité de style anglais). Au loin, j'aperçois les Cementerios n°1 et 2 (photo 12), situés sur le cerro Panteón et séparés de seulement quelques mètres. Dans le premier (celui des catholiques), les mausolées enrichis de sculptures et de vitraux rivalisent de faste. Le second, appelé Cementerio de Dissidentes n°2, était réservé aux protestants. En effet, à la suite de l'épidémie de peste bubonique du début du XIXe s, le gouvernement décide de construire un cimetière en dehors de l'agglomération. Les catholiques ne pouvant pas envisager de "cohabiter" avec des voisins d'une autre confession religieuse, les immigrants européens et américains, souvent protestants, durent aller se faire enterrer ailleurs, dans le cimetière n°2! Alléchée par la description du Routard et par le petit aperçu que j'en ai de loin, j'ai vraiment envie d'aller m'y balader. Je décide d'y aller après avoir fini d'arpenter le cerro Alegre.

En regardant l'étalage de bijoux d'une vendeuse dans la rue, je fais connaissance avec un couple de pensionnés français bien sympathiques qui sont aussi en train de faire un tour du monde. Coïncidence de plus, ils viennent d'arriver en Amérique du Sud après un séjour en Asie! Nous échangeons sur nos expériences respectives et ils me font part de leur surprise, d'autant plus grande qu'ils arrivent d'Asie, quant à l'insécurité qui règne à Valparaíso. Ils me parlent d'un gars qu'ils ont rencontré la veille qui s'est fait agressé et à qui on a volé l'appareil photo, tout près du centre touristique. Eux aussi me recommandent d'être prudente. Je poursuis ma route parmi les jolies rues colorées et redescends du cerro Alegre pour rejoindre le cerro Panteón et visiter les deux cimetières. Une fois descendue, les rues se font plus désertes et de nouveau, le doute s'installe. J'ai vraiment très envie d'aller voir les cimetières mais... et si je me fais agresser? Et si, en plus du traumatisme de l'agression, on me vole mon appareil photo?... Cette fois-ci vraiment en colère et me sentant tout à fait impuissante face à cette injustice de ne même pas me sentir suffisamment en sécurité pour visiter cette si belle ville, je choisis une nouvelle fois la voie de la raison et rebrousse chemin. Pour me consoler, je décide de remonter sur le cerro par l'ascensor Reina Victoria, qui date de 1902 (photos 9-10). Les funiculaires de la ville datent tous de la fin du XIXe et du début du XXe siècle et partent à l'assaut des collines ceinturant Valparaíso. Si tous sont aujourd'hui classés Monumentos históricos, chacun possède son petit caractère propre :) Je me balade encore un petit peu sur le cerro avant de redescendre vers la place principale, la Plaza Sotomayor.

La Plaza Sotomayor, au cœur de Valparaíso, est la place où débuta l'expansion de la ville. Ouverte sur le port, elle est entourée de bâtiments officiels: académie navale, palais de justice (photo 1), etc. Et parmi eux, au centre de la place, le pompeux monument aux héros de Iquique (photo 2), tombés au combat le 21 mai 1879 lors de la guerre du Pacifique (entre le Chili et le Pérou). Au bout de la place, le petit port de plaisance, Muelle Prat (photos 3-4), très animé. Je me dirige ensuite vers l'ascensor Artillería, datant de 1893, qui suit l'un des plus longs parcours (175 m) et qui amène au joli Paseo 21 Mayo. C'est de là qu'on a le plus beau point de vue sur les collines, la ville basse et le port, avec ses quais, ses cargos, ses conteneurs, ses grues, les dockers à terre et les mouettes qui piaillent dans le ciel. On est bien dans un port vivant et actif, même s'il n'est apparemment plus que l'ombre de ce qu'il était à son âge d'or, fin du XIXe siècle. Enfin, je redescends et rentre gentiment à l'auberge où je retrouve mes amis.

Le lendemain, journée peinarde pour moi. Au programme: skype avec la sista et puis début des festivités du Nouvel An vers 15-16h! En effet, Pablo a mobilisé les troupes: on constitue une cagnotte pour les courses et puis on cuisine tous ensemble pour préparer le BBQ/buffet! La majorité des gens qui dort à l'auberge (entre 20 et 25 personnes) est là pour le repas :D Et nous nous sommes délectés! En plus, c'était l'occasion de se retrouver tous ensemble et de mieux faire connaissance. En plus de Laura, Mariela, Laïa, Sixtine et Henk et Tom (deux hollandais que nous nous amusions à appeler "Tom Hanks"^^) que je connaissais déjà, il y avait aussi Eva et Frederik, un couple de hollandais, Timours, un bruxellois (!), et un couple de suisses, Valerie et Moritz, avec qui j'ai sympathisé. A 20 heures, ce sont les 12 coups de minuit en Europe, mais pour nous, c'est comme s'il était déjà minuit au Chili. Nous nous souhaitons bonne année et suivons la tradition espagnole (et sud-américaine, depuis la Conquête espagnole) en avalant les 12 grains de raisin (un par mois de la nouvelle année) que Laura et Mariela nous avaient réservés. Vers 23 heures, nous quittons l'auberge en différents groupes et essayons de trouver un point de vue pas trop mauvais sur un cerro pour assister aux fameux feux d'artifice sur la baie, puisqu'ils sont réputés partout dans le monde! Et en effet, ça valait la peine!! Pas d'effets spéciaux, mais rien que le décor, ça faisait déjà tout. Et après ça, nous rentrons gentiment à l'auberge. Quelle chance d'avoir eu ce si chouette groupe pour partager cette soirée et quelle incroyable façon de terminer 2017!! :D Sur la photo 7, le groupe: de gauche à droite moi, Valerie et Moritz derrière, puis Sixtine, Mariela en-dessous et enfin, Laura et Laïa. Sur la photo 8: une photo d'internet du spectacle de cette année, pour donner une idée.

Le lendemain, il ne s'agit pas de laisser passer l'heure puisque je quitte Valpo avec le bus de 10h40! Quand je me réveille, pas âme qui vive, bien sûr! :D Je fais vite mon sac et déjeune, en me demandant comment je vais trouver un taxi aujourd'hui. Mais chance! Quand je rentre chercher mes affaires dans la chambre, Mariela et Laura sont aussi en train de plier bagages et m'annoncent qu'elles partent à la station de bus et qu'elles savent quel bus on doit prendre! Trop chouette :) J'ai quand même l'occasion de dire au revoir à Laïa et Sixtine avant de partir, mais je sais qu'on va se retrouver à Santiago dans les jours suivants, avant mon départ pour le Pérou. Et au terminal de bus, après avoir fait mes adieux à Laura et Mariela, je monte dans mon bus et vais bien vite rejoindre Morphée pour les deux heures de trajet qui m'attendent.

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Une fois installée dans l'auberge où j'avais séjourné la première fois, je me concentre exclusivement sur le blog. Le 4 janvier, j'ai la bonne surprise de voir Sixtine arriver dans la salle commune de l'auberge, où je suis en train de travailler! On se retrouve avec plaisir :) Elle s'installe gentiment dans son dortoir puis nous partons au centre retrouver Laïa, qui est revenue à Santiago depuis quelques jours et a commencé un bénévolat dans un des hôpitaux de jour de la ville. C'est vraiment chouette se revoir après le nouvel an! On avait déjà super bien connecté à Valparaíso, mais le fait de ne pas s'être vues quelques jours, on est encore plus contentes de se voir! :D Nous passons une partie de l'après-midi ensemble, au bon glacier que j'avais découvert dans le quartier Lastarria, puis Laïa doit déjà retourner à son logement qui est situé dans un quartier pas très sûr, avant qu'il ne fasse nuit, et moi, je vais tout doucement me mettre en route pour l'aéroport. En effet, je décolle le lendemain à 6 heures du mat', mais "préfère" passer la nuit à l'aéroport pour éviter de devoir me balader dans la ville entre 2 et 3 heures du matin.

Nous nous faisons donc des adieux avec Laïa, en se promettant de se revoir en Europe, et nous rentrons avec Six. Je m'enfourne un pseudo repas à l'auberge puis nouveau temps d'adieux avec Six et je pars au terminal chercher mon bus pour l'aéroport. Et c'est sur une nuit plus qu'inconfortable sur le sol de l'aéroport de Santiago que je termine mon étape chilienne! A moi le Pérou, ses montagnes, sa cuisine, sa culture et puis surtout en avant pour deux semaines de bénévolat avant de retrouver les parents pour trois semaines de vacances! :D

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Au bout de ces quatre semaines au Chili, voici venu le moment de dresser le bilan de ce séjour. Comme en Argentine, je n'y ai pas rencontré de traditions ancestrales ni de culture indigène (dans le sens "autochtone") très prégnante, ce qui pour moi est un aspect important quand je visite un endroit. Néanmoins, je dois avouer que la diversité des paysages que j'ai traversés est assez impressionnante. Mon arrivée au Chili par le désert d'Atacama a été une fameuse entrée en matière et a placé directement la barre très haut! Ce n'était pas le premier désert que je visitais, et pourtant j'ai été vraiment bluffée par sa beauté et son côté irréel. La Vallée de la Lune est sans doute un des plus beaux endroits que j'ai jamais vus et ces images resteront pour toujours gravées dans ma mémoire. J'ai, depuis, le sentiment que plus je découvre de nouveaux déserts, plus ce monde silencieux et ces paysages de sable à perte de vue me fascinent et plus j'ai envie d'en découvrir! Passer ensuite dans un paysage tout aussi désertique, mais en bord de mer, à Chañaral, puis aux généreuses régions viticoles de Vicuña et de Santiago, avant d'atterrir dans la magnifique région des lacs, pure et mystérieuse, me donne le tournis rien qu'à revoir les photos! Depuis l'Argentine et plus particulièrement depuis mon séjour dans la Fundación CAdeNA, j'ai commencé à me sentir très à l'aise en parlant espagnol et j'ai l'impression que le Chili a vraiment été un séjour de plaisir uniquement: plaisir à parler avec les locaux et à jongler avec la langue (voire à sauter d'une langue à l'autre), plaisir à visiter à un rythme moins soutenu, plaisir à rencontrer d'autres voyageurs, plaisir à profiter de la météo, des paysages, de la vie tout simplement. Enfin, mes deux séjours dans les étoiles ont été plus qu'enrichissants. J'y allais au départ par curiosité, pour dire d'explorer un nouveau domaine, et j'y ai découvert un univers absolument passionnant qui m'a donné envie d'en apprendre plus! Je trouve que contempler les étoiles apporte beaucoup de sérénité et d'humilité, quand on se rend compte à quel point on est minuscule par rapport à cette dimension parallèle. Je ne regarde plus le ciel de la même façon depuis.