Après 14 heures de bus, j'arrive en milieu de matinée à Valparaíso. Ayant repéré que mon auberge était assez loin de la station de bus, je prends un taxi pour m'y rendre. Sur le trajet, le chauffeur me demande si j'ai déjà payé mes nuits à l'auberge. Je lui mens et confirme pour le décourager d'essayer de m'envoyer vers une auberge où il connait des gens, comme c'est monnaie courante, puis lui demande pourquoi il veut savoir ça. En fait plein de bonnes intentions, il m'explique que le quartier de mon auberge n'est pas très sûr et qu'il faut que je sois prudente, surtout si je sors quand il fait noir. Mmh pas top, l'entrée en matière! Apparemment arrivés à la bonne adresse, je ne suis pas très rassurée en voyant cette bâtisse un peu délabrée et finis par me demander si ce n'est pas un gros bobard, ce qui arrive pourtant assez rarement sur booking.com. Le chauffeur a plutôt l'air de mon avis et, en voyant un gars rentrer dans le bâtiment, il lui demande s'il s'agit bien de l'auberge et si je peux l'accompagner. Le gars dit oui. Après avoir encore reçu d'autres recommandations de sécurité de mon gentil chauffeur, je prends mes affaires et rejoins l'autre gars. Mon chauffeur, lui, surveille que je rentre bien dans le bâtiment avant de redémarrer. A l'intérieur, je me demande où j'ai atterri: je suis dans un espèce de grand espace genre sous-sol délabré couvert de graffitis et dont les fenêtres sont barricadées. Je ne suis vraiment pas rassurée. Nous montons à l'étage et là, nous arrivons à la vraie auberge. Ouf!! Certes c'est vraiment défraîchi mais déjà un peu moins glauque et je suis chaleureusement accueillie par Pablo, un jeune argentin qui tient la réception, qui m'amène à mon dortoir. Il s'avère qu'en fait, le rez-de-chaussée est un espace d'exposition pour les jeunes du quartier. Je comprends un peu mieux! Dans la chambre, je rencontre Mariela et Laura, deux cousines chiliennes venues fêter le nouvel an à Valpo, ainsi que Laïa, espagnole, et Sixtine, française, deux voyageuses solo qui viennent d'arriver aussi. Je partage avec les filles les mises en garde de mon chauffeur et elles me confirment qu'elles ont reçu des propos identiques! Nous décidons alors de rester ensemble, non seulement pour le nouvel an mais, pourquoi pas, en journée aussi. Me voilà ragaillardie et rassurée! :D Néanmoins, la connexion wifi n'a pas l'air top à l'auberge et, en apprenant que mes nouvelles copines quittent Valpo peu après le réveillon, je décide d'écourter mon séjour et de retourner à Santiago le 1er janvier pour travailler dans de meilleures conditions sur le blog et puisque c'est de toute façon de la capitale que quitte mon avion pour Lima, le 5. Et nous partons ainsi Sixtine, Laïa et moi faire un petit tour pour découvrir la ville.
La baie de Valparaíso forme un vaste amphithéâtre en forme de demi-lune, adossé à 45 collines (cerros), naguère sauvages, aujourd'hui toutes urbanisées. Où que l'on soit, c'est l'océan Pacifique qui attire le regard! Aujourd'hui, après une longue période de déclin et de paupérisation, la ville semble entrée dans une phase de renaissance. Depuis les années 2000, le vieux Valparaíso des hauteurs est progressivement réhabilité par des architectes; les immeubles sont restaurés et magnifiés par des designers et des artistes inspirés. Ville étonnante, artistique, inventive et bohème, elle a retrouvé une bonne santé et des couleurs vives, tout en conservant son caractère d'antan. On peut dire que la description du Routard est vendeuse! :) Nous commençons par les cerros Concepción et Alegre (classés par l'UNESCO) qui ont été métamorphosés en quartiers branchés et alternatifs grâce à une politique municipale et ambitieuse et à l'imagination de leurs habitants. On y accède par des funiculaires très rétro, ou par des escaliers pentus, on flâne à pied dans des passages et des ruelles pavées qui forment un labyrinthe insolite où l'on découvre au hasard d'innombrables peintures murales qui couvrent les murs et les façades. C'est vraiment, vraiment chouette! Malheureusement, comme si je ne voyageais pas depuis assez longtemps, je commets l'erreur de débutant d'oublier la batterie de l'appareil photo à l'auberge et dois me contenter de la résolution du vieux mais quand même brave GSM d'Adam ^^ Après une belle après-midi à faire connaissance avec la ville mais également les unes avec les autres, nous finissons par faire un crochet par le supermarché pour les courses du souper puis par rentrer, épuisées, à l'auberge.
Le lendemain, je décide de repasser par les différents coins que nous avons vus la veille, avec la batterie dans l'appareil photo, cette fois! Je dois d'abord aller chercher mon ticket de bus pour le retour à Santiago donc je traverse la ville pour aller à la station de bus puis reviens sur mes pas. Dans ces quartiers moins touristiques, j'ai l'occasion de mieux me plonger dans l'ambiance de la ville et, plus précisément, dans l'excitation du passage en 2018! Partout on vend chapeaux, lunettes, cotillons, et... sous-vêtements jaunes (photo 4)! Eh oui, selon une tradition locale, porter des sous-vêtements jaunes le jour du réveillon apporte prospérité, amour, chance et argent pour l’année à venir. Il paraît même que les porter à l’envers doublerait les chances de réussite :D héhé Plus sérieusement, le jaune ferait traditionnellement référence au soleil, comme symbole d'éternité et de prospérité. Mais le Chili n'est pas le seul à sacrifier à cette tradition des sous-vêtements jaunes, également observée au Mexique, au Pérou et en Equateur, avec parfois quelques nuances: la lingerie doit être rouge si c'est l'amour et non la richesse que l'on recherche. En Uruguay, en Argentine et au Brésil, ce sont des dessous roses qu'il faut porter pour célébrer l'arrivée de l'année nouvelle. C'est vraiment marrant! En retournant vers le centre touristique, je tombe par hasard sur la superbe église du Collège de la Congregación de los Sagrados Corazones, fondé en 1837. Je décide de pousser la porte et je ne le regrette pas: passée par le superbe porche ouvragé, je découvre ensuite l'intérieur, tout aussi beau et travaillé! Mais le clou du spectacle, c'est pour moi le plafond bleu foncé parsemé d'étoiles dorées. C'est tellement apaisant! Je finis par décoller mes yeux de la voûte et ressors pour continuer ma visite. Je reviens à la Plaza Victoria (photos 10-11), puis essaie de retrouver l'ascencor Florida (photo 12) qui peut m'amener au cerro Bellavista afin d'accéder au Museo a Cielo Abierto (= musée à ciel ouvert) créé en 1992 sur l'initiative d'un peintre local. Il s'agit en fait d'un parcours que l'on fait à pied en sillonnant le cerro Bellavista et où l'on peut admirer une vingtaine de grandes fresques murales. Mais, en m'éloignant de la place, les rues se font plus désertes et je me fais aborder par un monsieur qui me conseille de ranger mon appareil photo dans mon sac et de faire attention où je vais. Malgré l'envie de visiter, le doute s'installe dans mon esprit. Je range l'appareil photo et poursuis quand même ma route. Mais malheureusement, le funiculaire est hors d'usage et les rues, qui sont en fait des escaliers étroits et plus ou moins déserts et qui mènent en haut du cerro, ne semblent pas très rassurantes. Pas très contente et un peu déçue, je finis quand même par redescendre, et décide de monter sur les cerros par le côté plus touristique que nous avons emprunté la veille.
Heureusement, je suis quand même réconfortée par les superbes fresques que je trouve sur mon chemin, et finis par oublier ce petit revers et repars pleine d'entrain. Je monte par le cerro Concepción et me retrouve avec plaisir dans le même dédale de ruelles que la veille.
Sur les deux dernières heures, le temps s'est couvert et quand j'arrive au paseo Gervasoni, la vue sur la baie est complètement bouchée! Ayant vu le résultat sans nuages la veille, je décide de me poser sur un banc et d'attendre que le ciel se dégage. En effet, le paseo Gervasoni est une promenade élégante, bordée de maisons du XIXe siècle, avec vue époustouflante sur la ville. Je ne veux pas me priver et garde espoir! Et ça marche, au bout d'une heure, le soleil commence à se pointer et les nuages s'en vont gentiment. Je passe ensuite au Paseo Atkinson (photo 6), avec ses petites maisons mitoyennes et colorées du début du XXe s (la majorité de style anglais). Au loin, j'aperçois les Cementerios n°1 et 2 (photo 12), situés sur le cerro Panteón et séparés de seulement quelques mètres. Dans le premier (celui des catholiques), les mausolées enrichis de sculptures et de vitraux rivalisent de faste. Le second, appelé Cementerio de Dissidentes n°2, était réservé aux protestants. En effet, à la suite de l'épidémie de peste bubonique du début du XIXe s, le gouvernement décide de construire un cimetière en dehors de l'agglomération. Les catholiques ne pouvant pas envisager de "cohabiter" avec des voisins d'une autre confession religieuse, les immigrants européens et américains, souvent protestants, durent aller se faire enterrer ailleurs, dans le cimetière n°2! Alléchée par la description du Routard et par le petit aperçu que j'en ai de loin, j'ai vraiment envie d'aller m'y balader. Je décide d'y aller après avoir fini d'arpenter le cerro Alegre.
En regardant l'étalage de bijoux d'une vendeuse dans la rue, je fais connaissance avec un couple de pensionnés français bien sympathiques qui sont aussi en train de faire un tour du monde. Coïncidence de plus, ils viennent d'arriver en Amérique du Sud après un séjour en Asie! Nous échangeons sur nos expériences respectives et ils me font part de leur surprise, d'autant plus grande qu'ils arrivent d'Asie, quant à l'insécurité qui règne à Valparaíso. Ils me parlent d'un gars qu'ils ont rencontré la veille qui s'est fait agressé et à qui on a volé l'appareil photo, tout près du centre touristique. Eux aussi me recommandent d'être prudente. Je poursuis ma route parmi les jolies rues colorées et redescends du cerro Alegre pour rejoindre le cerro Panteón et visiter les deux cimetières. Une fois descendue, les rues se font plus désertes et de nouveau, le doute s'installe. J'ai vraiment très envie d'aller voir les cimetières mais... et si je me fais agresser? Et si, en plus du traumatisme de l'agression, on me vole mon appareil photo?... Cette fois-ci vraiment en colère et me sentant tout à fait impuissante face à cette injustice de ne même pas me sentir suffisamment en sécurité pour visiter cette si belle ville, je choisis une nouvelle fois la voie de la raison et rebrousse chemin. Pour me consoler, je décide de remonter sur le cerro par l'ascensor Reina Victoria, qui date de 1902 (photos 9-10). Les funiculaires de la ville datent tous de la fin du XIXe et du début du XXe siècle et partent à l'assaut des collines ceinturant Valparaíso. Si tous sont aujourd'hui classés Monumentos históricos, chacun possède son petit caractère propre :) Je me balade encore un petit peu sur le cerro avant de redescendre vers la place principale, la Plaza Sotomayor.
La Plaza Sotomayor, au cœur de Valparaíso, est la place où débuta l'expansion de la ville. Ouverte sur le port, elle est entourée de bâtiments officiels: académie navale, palais de justice (photo 1), etc. Et parmi eux, au centre de la place, le pompeux monument aux héros de Iquique (photo 2), tombés au combat le 21 mai 1879 lors de la guerre du Pacifique (entre le Chili et le Pérou). Au bout de la place, le petit port de plaisance, Muelle Prat (photos 3-4), très animé. Je me dirige ensuite vers l'ascensor Artillería, datant de 1893, qui suit l'un des plus longs parcours (175 m) et qui amène au joli Paseo 21 Mayo. C'est de là qu'on a le plus beau point de vue sur les collines, la ville basse et le port, avec ses quais, ses cargos, ses conteneurs, ses grues, les dockers à terre et les mouettes qui piaillent dans le ciel. On est bien dans un port vivant et actif, même s'il n'est apparemment plus que l'ombre de ce qu'il était à son âge d'or, fin du XIXe siècle. Enfin, je redescends et rentre gentiment à l'auberge où je retrouve mes amis.
Le lendemain, journée peinarde pour moi. Au programme: skype avec la sista et puis début des festivités du Nouvel An vers 15-16h! En effet, Pablo a mobilisé les troupes: on constitue une cagnotte pour les courses et puis on cuisine tous ensemble pour préparer le BBQ/buffet! La majorité des gens qui dort à l'auberge (entre 20 et 25 personnes) est là pour le repas :D Et nous nous sommes délectés! En plus, c'était l'occasion de se retrouver tous ensemble et de mieux faire connaissance. En plus de Laura, Mariela, Laïa, Sixtine et Henk et Tom (deux hollandais que nous nous amusions à appeler "Tom Hanks"^^) que je connaissais déjà, il y avait aussi Eva et Frederik, un couple de hollandais, Timours, un bruxellois (!), et un couple de suisses, Valerie et Moritz, avec qui j'ai sympathisé. A 20 heures, ce sont les 12 coups de minuit en Europe, mais pour nous, c'est comme s'il était déjà minuit au Chili. Nous nous souhaitons bonne année et suivons la tradition espagnole (et sud-américaine, depuis la Conquête espagnole) en avalant les 12 grains de raisin (un par mois de la nouvelle année) que Laura et Mariela nous avaient réservés. Vers 23 heures, nous quittons l'auberge en différents groupes et essayons de trouver un point de vue pas trop mauvais sur un cerro pour assister aux fameux feux d'artifice sur la baie, puisqu'ils sont réputés partout dans le monde! Et en effet, ça valait la peine!! Pas d'effets spéciaux, mais rien que le décor, ça faisait déjà tout. Et après ça, nous rentrons gentiment à l'auberge. Quelle chance d'avoir eu ce si chouette groupe pour partager cette soirée et quelle incroyable façon de terminer 2017!! :D Sur la photo 7, le groupe: de gauche à droite moi, Valerie et Moritz derrière, puis Sixtine, Mariela en-dessous et enfin, Laura et Laïa. Sur la photo 8: une photo d'internet du spectacle de cette année, pour donner une idée.
Le lendemain, il ne s'agit pas de laisser passer l'heure puisque je quitte Valpo avec le bus de 10h40! Quand je me réveille, pas âme qui vive, bien sûr! :D Je fais vite mon sac et déjeune, en me demandant comment je vais trouver un taxi aujourd'hui. Mais chance! Quand je rentre chercher mes affaires dans la chambre, Mariela et Laura sont aussi en train de plier bagages et m'annoncent qu'elles partent à la station de bus et qu'elles savent quel bus on doit prendre! Trop chouette :) J'ai quand même l'occasion de dire au revoir à Laïa et Sixtine avant de partir, mais je sais qu'on va se retrouver à Santiago dans les jours suivants, avant mon départ pour le Pérou. Et au terminal de bus, après avoir fait mes adieux à Laura et Mariela, je monte dans mon bus et vais bien vite rejoindre Morphée pour les deux heures de trajet qui m'attendent.