L'albergue est du type deuxième vie, retapée avec motivation et bonne volonté. Si on ne cherche pas à analyser les détails c'est vraiment très bien. Tout se passe à l'étage d'un bâtiment central de Poladura. Il faut dire que vue la taille du pueblo, soit c'est central, soit ça n'est pas. Il y a 6 lits superposés ( donc chacun 1 + le lit du haut qui sert pour le déballage). Une salle de bain par genre ancien (je rappelle : garçons et filles). Carolina a l'esprit ouvert et prête volontiers la sienne pour faire gagner du temps. Une petite cuisine tout à fait suffisante pour cuisiner un peu ( Ça permet de faire des économies, et c'est fait pour ça) Et le chauffage central avec d'énormes radiateurs dans toutes les pièces, notamment le dortoir. Donc, sentant bien la facilité de séchage qui se présente, chacun fait une lessive et nous dormons donc dans un bain turc à l'espagnole. Du point de vue santé c'est discutable, mais c'est très bon pour le moral.
Et ce matin chacun apparaît dans ses plus beaux atours. Ça fait plaisir.
Dans le cadre de l'entente cordiale évoquée hier nous avons décidé de tous nous réveiller à la même heure et de partir ensemble. Ça marche! Nous partons à 7h30, avec une demie heure de retard, mais tous ensemble. Les miracles païens sont possibles. Si les gouvernants regardaient vers nous ils pourraient bien prendre exemple. Le Monde dirait merci.
Certes cela monte mais c'est magnifique. On se fait mal au cou à force de tourner la tête dans tous les sens. Photo sur photo. Des ho, des ha. Nous n'avançons que très lentement, mais cela a à voir avec le bonheur, tellement le ressenti est haut placé dans l'échelle humaine. Naturellement le groupe change de forme, s'étire, les partenaires s'échangent, si j'ose dire et naturellement il y a des premiers et des derniers. L'américain du Colorado et moi-même sommes vraiment très devant, au bout de 7 8 kms, et à la faveur d'une longue montée je grimpe doucement mais sans m'arrêter, je finis par réaliser que ce garçon a disparu ( sans que la magie ni Majax n'aient rien à voir avec cela) . En rien de temps ... le temps se dégrade vraiment ; je décide de marcher lentement pour ne pas m'arrêter sous la neige. Il fait très froid; en dessous de 0, en tout cas. J'entreprends la descente prudemment ; les pierres roulent (non, pas de blague avec les Rolling Stones !) Je finis par franchir le Puerto de Pajares qui a pris un sérieux coup de blanc
Un petit noir et une chocolatine plus tard je re-décole. Pajares, leur objectif, 5 kms plus loin.
Je le traverse. Je descends profondément, avec une pente dont mes mollets et mes chevilles se souviendront. Je finis par me demander si je ne suis pas en train de descendre dans les enfers. Étonnant, me disé-je. La beauté de la nature est partout et le soleil est de retour. Coup d'œil sur mon GPS: je suis encore à plus de 720 mètres d'altitude. Donc sans doute trop haut pour les enfers. Vous voyez que tout cela répond à une analyse scientifiquement menée. Je suis rassuré. Il est vrai que, au début de cette équipée, nous frolâmes les 1470 mètres, sauf erreur.
Nous savions tous que cette scission nous guettait et qu'elle aurait lieu aujourd'hui. L'inconnu était: comment se passerait-ce. C'est la nature qui a pris les choses en main. Cela peut paraître un peu exagéré, mais ce n'est pas entièrement faux non plus.
Le chemin officiel serpente dans ce fond de vallée d'altitude. Rapidement je passe de l'autre côté du gave que je longe et n'ai d'autre choix que d'emprunter la sente qui irrésistiblement remonte, gagnant sur cette face ce que j'avais perdu sur l'autre. Ça arrache les poumons. Je dis tout haut que je regrette d'avoir fumé. Je râle. Je maudis le monde entier. Rien n'y fait. Mes regrets ne changent strictement rien à l'affaire.
Je finis par y arriver.
C'est à douter de beaucoup de choses. Mais de quoi, vraiment ? D'avoir mal fait ou de le regretter ? Nous en re-parlerons peut-être.
En tout cas j'y suis arrivé.
Grâce à cette petite rallonge de 6 ou 7 kms je lisse ce qui reste à faire sous forme de 3 x 18kms. Ça me plaît mieux comme ça.
Merci de m'avoir suivi jusqu'ici
À demain j'espère