Une nouvelle aventure qui me mène cette fois au Kenya, pour une 1ère expérience de volontariat dans une école, à Taru, à 80km de Mombasa.
Du 22 janvier au 1er avril 2020
10 semaines
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23
janv

Après une dizaine d'heures de voyage (via Amsterdam, avec KLM), nous avons atterri hier soir sur le sol kényan. Le passage de la frontière se fait assez rapidement grâce au e-visa obtenu par Internet en amont ( et c'est vivement conseillé, car, s'il est possible d'obtenir le visa sur place, la file d'attente est longue). Nous récupérons nos bagages, nous avançons nos montres de 2 heures et nous sortons enfin de l'aéroport.

Première sensation : un air doux, avec une légère brise - ni trop chaud, ni trop froid, la température parfaite ! Et oui, si nous sommes tout juste sous l'équateur, Nairobi, la capitale kényane, se situe à plus de 1600 mètres d'altitude, ce qui évite une chaleur humide et suffocante.

Nous cherchons tout de suite un distributeur pour obtenir des shillings kényans, mais les deux de l'aéroport sont en panne... Mais, aucun problème pour prendre un taxi : l'aéroport de Nairobi a un wifi qui fonctionne, ce qui nous permet de commande un VTC (Uber et Bolt sont très utilisés ici) pour moins de 10€. Notre chauffeur nous amène dans la zone ouest de Nairobi, dans le quartier de Kilimani, où se trouve notre Airbnb.

Alors que quelques gouttes commencent à tomber, nous récupérons très vite les clés situés dans un petit boîtier à code. Mais c'est alors que ça se complique. Nous sommes face à un portail sans serrure... nous cherchons quelques secondes avant de trouver le cadenas qui se trouve de l'autre côté et auquel on accède aveuglement par un trou permettant de passer uniquement la main. Dans ces conditions (sachant que la rue n'est pas éclairée), ce n'est pas évident d'ouvrir le cadenas... et c'est ainsi que les clés tombent de l'autre côté ! Mes petites mains me permettent de les récupérer par le petit espace entre la porte et le sol... Finalement, nous arrivons à ouvrir la petite porte du portail. Et alors que je me faufile pour aller ouvrir le cadenas de la porte d'entrée du logement (aussi à l'aveugle), Fernando se cogne la tête dans l'encablure de la porte qui semble être faite pour les nains et se blesse... Voilà une aventure qui commence bien !

Après une courte nuit, nous nous apprêtons à découvrir la ville. J'ai toujours aimé arriver de nuit dans un endroit nouveau, car, le lendemain matin, c'est la surprise. Nous découvrons notre nouvel environnement : en sortant de notre résidence gardée, trottoirs de terre (ou boue vu qu'il a plut toute la nuit...) rouge, végétation luxuriante, baraquements en tôle...

Dans notre rue 

Nous repérons un centre commercial tout près : c'est un bon point de départ pour un petit-déjeuner et un distributeur. Ensuite, nous embarquons à bord d'un matatu, ces minibus colorés partagés. Celui-ci nous emmène jusqu'au centre-ville pour moins de 0,5€ ! Étrangement, malgré la circulation dense, le trafic n'est pas chaotique et plutôt organisé, avec des feux plus ou moins respectés, peu de deux-roues et pas de klaxons.

Dans les matatu 

Nous descendons sur Kenyatta Avenue, l'avenue principale de la ville. Nous commençons notre tour dans cette jungle urbaine d'immeubles bétonnés disgracieux : la mosquée Jamia, le marché central, la tour KICC et sa vue à 360° sur la ville depuis son toit, le parlement (duquel il est interdit de faire des photos, sous peine de se faire réprimander par un militaire - c'est du vécu - et c'est bien dommage car c'est certainement le seul bâtiment de la ville qui mérite d'être pris en photo), la basilique de la Sainte-Famille (de laquelle il est également interdit de prendre des photos - c'est aussi du vécu - mais de toute façon elle est très moche)... Et pour chaque visite, il faut passer un (voire plusieurs) portiques de sécurité et une fouille de sac, même pour entrer dans les centres commerciaux. En effet, le Kenya a été victime de plusieurs attentats terroristes ces dernières années (de la part des shebabs de Somalie) et les précautions de sécurité sont devenues drastiques.

Parlement, basilique, mosquée, marché 
KICC Tower 

Bon, soyons honnêtes : Nairobi n'a pas vraiment de charme. Du passé colonial, il ne reste rien, car tout a été bétonné après l'indépendance en 1963. Nairobi est une ville à vivre et non à visiter. Oh, il y a bien un musée national et un parc national dans lequel on peut faire un safari, mais étant donné l'offre de safari à faire dans le pays, nous préférons nous réserver pour d'autres parcs. Pour les fans de "Out of Africa", il est possible d'aller sur les traces de Karen Blixen à la sortie de la ville, mais, a priori, cela ne nous emballe pas vraiment. Cependant, il est plutôt agréable de se promener dans les rues pour s'imprégner de l'ambiance et pour observer la vie kényane : les cireurs de chaussures (dont les clients sont installés dans de confortables sièges surélevés), les agents de voyage qui font rabatteurs (nous avons été accostés au moins 4 fois !), les vendeurs de fruits, de vêtements, de valises ou d'électronique, les hommes d'affaires... Nous remarquons aussi un style vestimentaire très occidental, loin du cliché "boubou coloré".

Aperçu de Nairobi 

Pour le déjeuner, nous choisissons un restaurant traditionnel et local, dans un quartier populaire. Au menu : tilapia du lac Nakuru, riz, poulet biryani... Cela vous semble un peu indien ? Et oui, il y a quelques influences indiennes ici ! D'ailleurs, par certains aspects, Nairobi me rappelle un peu Mumbai, je ne saurai trop dire pourquoi, peut-être quelques détails par-ci, par-là... Mais, depuis la colonisation, la communauté indienne est importante ici : ce sont les colons britanniques qui ont fait venir des Indiens comme travailleurs pour construire le chemin de fer reliant Mombasa à Kampala (capitale de l'Ouganda) et ces derniers sont restés...

Tilapia, rix et jus de tamarin 

Nous traversons le parc Uhuru (il faut aussi ouvrir son sac pour entrer !) avant de quitter le centre-ville et de revenir dans notre quartier. Nous repassons par le centre commercial pour obtenir notre précieuse carte sim (car nous n'aurons pas de wifi plus tard).

Uhuru park 

En soirée, nous nous déplaçons en VTC. C'est ce qui est vivement recommandé par les locaux, par les guides et par les autres voyageurs. Non pas que nous ayons ressenti de l'insécurité pendant la journée, mais c'est préférable. Pour notre premier dîner, dégustation d'une autre spécialité : viande grillée ( de chèvre et de poulet) et ugali (farine /semoule de maïs agglomérée).

Viande grillée (nyoma choma) et ugali 
24
janv

Aujourd'hui, nous nous consacrons à un quartier particulier de Nairobi : le bidonville de Kibera ! Considéré comme le plus grand bidonville d'Afrique avec une population estimée à près d'un million d'habitants (estimation des ONG; selon le gouvernement, moins de 200.000 habitants...), Kibera s'étale sur à peine 2,5km², ce qui lui confère une densité de population très élevée (on estime une moyenne de 8 habitants par cahute).

La visite d'un bidonville est toujours délicate : il ne s'agit pas de faire du voyeurisme, ni d'offenser les habitants, mais plutôt de tenter d'appréhender une réalité dure à imaginer... Pour cela, le choix du guide est primordial. Bien sûr, on pourrait y aller seul, mais comme dans tout bidonville, il y a des quartiers à éviter et nous ne les connaissons pas. En tant que touristes, il est fortement déconseillé de s'aventurer dans Kibera seul. Nous passons donc par Explore Kibera, une ONG reconnue et responsable, reversant une partie des bénéfices à des initiatives locales et employant uniquement des guides natifs de Kibera.

C'est donc accompagnés de Abzed, Yussuf et Babu (oui, 3 guides juste pour nous 2) que nous entrons dans cette immensité de taule et de boue. Il s'agit d'un labyrinthe de rues et de ruelles en terre battue, inégales et boueuses, bordées d'abris de fortune. Et au milieu, les égouts à ciel ouvert contaminant l'eau de diverses maladies telles que le choléra et la typhoïde. Les conditions d'hygiène sont plus que déplorables. L'accès à l'eau, non-potable, est payant. L'accès aux toilettes, créées par des communautés locales, l'est aussi. Et il en manque considérablement (un sanitaire pour 50 habitations). Quant à l’accès à l’électricité, il est principalement financé par les Nations Unies et concerne 20% de la population. Outre les problèmes sanitaires, les habitants sont confrontés à la violence, au chômage, à l’illettrisme, au SIDA (qui touche 20% de la population), à l'alcoolisme (ils boivent du changaa, une boisson illégale, faite maison, contenant du méthanol), à la consommation de drogue, aux grossesses non désirées... Bref, une situation telle que même le mot "misère" ne suffit pas à la décrire. Ici, les habitants ne vivent pas dans la pauvreté, ils tentent de survivre. Franchement, à côté, les favelas de Rio semblent être un vrai luxe. Et si je compare avec Dharavi, le bidonville de Mumbai, je pense que nous sommes au même niveau d'insalubrité mais avec encore plus de pauvreté.

Dans les rues de Kibera 

Cependant, comme dans tout visite de bidonville, les guides ne veulent pas s'attarder sur ces conditions déplorables. Bien au contraire, ils veulent nous montrer que, malgré le fait que le gouvernement semble totalement oublier et ignorer Kibera, les habitants ne pleurent pas sur leur sort et prennent les choses en main. Ils nous emmènent donc à la rencontre de quelques uns d'entre eux qui sont à l'initiative d'un projet de développement ou d'aide :

  • une femme ayant recueilli deux orphelins chez elle et tentant désespérément de trouver des dons pour les élever
  • la "clinique" ou plutôt le "centre de santé" : il s'agit d'un local minuscule où exercent un médecin et deux infirmières pour environ 150.000 habitants... Ce local sert pour toute urgence et pour les accouchements. Ils sont dépendants des dons de médicaments. Les services effectués ne sont pas gratuits (car le médecin et les infirmières ont aussi une famille à nourrir) mais le coût est moindre. Et ironie du sort : dans la salle de consultation, un portrait de l'actuel président est accroché au mur. Un des guides nous explique que la constitution oblige tous les commerces à afficher ce portrait ! Peut-être pour se rappeler que celui qui a été élu du peuple se contrefout du peuple lui-même !!!!
Le centre de santé 
  • l'école, d'initiative privée donc : nous y sommes accueillis chaleureusement par les enfants sagement assis à leur bureau. Ils sont une trentaine, de 3 à 10 ans; orphelins pour la plupart et complètement livrés à eux-mêmes. L'école leur évite donc de traîner dans les rues et de sombrer dans la violence. Pour ceux qui ont des parents, une petite participation financière est demandée pour couvrir les coûts de fonctionnement. Cette visite nous touche particulièrement car elle nous plonge dans une réalité qui va bientôt devenir notre quotidien...
L'école 
  • le centre d'émancipation des femmes : constitué de 10 femmes séropositives, il leur donne une chance de gagner un petit revenu en faisant de l'artisanat (à partir de produits recyclés) et en gardant des enfants.
Le centre d'artisanat 
  • les bijoutiers d'os : ils créent des bijoux à partir d'os de dromadaires, de chèvre, de bœuf et à partir de cadenas
  • le marché : vêtements; chaussures, charbon, fruits...
Le marché 

Lors de notre visite, nous nous sentons plutôt très bien accueillis : on nous salue, on nous sourit... et personne ne vient nous demander de l'argent ou nous dévisage.

Le bidonville est traversé par les rails de chemin de fer de la ligne reliant Mombasa à Kisumu (sur le lac Victoria). Des amas de détritus s'accumulent sur les côtés. Pour la petite anecdote, le gouvernement a interdit les sacs en plastique dans le pays. Mais il existe un marché noir de sacs en plastique, en provenance des pays. Attention tout de même : être en possession d'un sac plastique est un motif pour aller en prison ! Nous croisons également quelques tuk-tuks importés d'Inde et du Pakistan : ceux-ci sont également interdits dans le centre de Nairobi.

Pour la petite histoire, la création de Kibera remonte à la colonisation : les Britanniques y avaient installé les soldats nubiens (soudanais) qui avaient servi lors de la Première Guerre Mondiale (Kibera signifie forêt en nubien), de manière informelle, sans leur donner de titre de propriété. Le quartier a grandi rapidement pendant des années, sans contrôle. Puis, après l'indépendance, le gouvernement a exproprié les habitants. Mais, les propriétaires (des habitations et non du terrain) ont continué à louer leur cahute à de plus en plus de locataires, totalement illégalement. Et les faibles loyers (moins de 10€/mois) attirent de nombreux Kenyans venus des campagnes. Aujourd'hui, ce sont plus de 40 ethnies qui cohabitent (en majorité des Luos et des Luhyas, venant de l'ouest), chrétiens et musulmans.

La visite dure 3 heures. Face à ces conditions, notre réalité française d'assistés se teinte de ridicule : toujours à critiquer le gouvernement, toujours à réclamer plus d'aide de l'état, toujours à râler et à pleurnicher... Mais de quoi se plaint-on ?????

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Pour le déjeuner, nous trouvons un autre restaurant traditionnel : comme c'est délicieux, je reprends du tilapia, avec de l'ugali. Prix total du repas pour deux, avec un jus de fruits frais : 10€ ! J'ai oublié de préciser : ici, même au restaurant, on mange avec les mains. Comme nous sommes des étrangers, on nous apporte de temps en temps une cuillère, mais pas de couteau, ni de fourchette. L'idée, c'est de mélanger le poisson ou la viande avec l'ugali pour en faire une petite boule. Dans chaque restaurant, il y a toujours un petit lavabo pour se laver les mains avant et après.

Dégustation de tilapia avec de l'ugali 
25
janv

Ce matin, direction le centre de Nairobi pour aller au fameux marché "maasaï". Il s'agit d'un marché d'artisanat maasaï (les maasaïs est un tribu d'éleveurs semi-nomades vivant dans le sud-ouest du pays) dont la localisation change tous les jours. Le samedi, il se tient sur le parking de la cour suprême, tout proche de la tour KICC. Nous sommes encore à 50 mètres de l'entrée qu'un homme nous aborde déjà pour nous "guider". Nous avons beau lui dire que nous n'allons rien acheter (parce que les prix sont élevés et que nous avons encore 2 mois au Kenya...) mais il insiste : impossible de s'en débarrasser. Mais nous étions prévenu : c'est un lieu très touristique et ces "guides" se rémunèrent avec une commission auprès des vendeurs; en échange, ils négocient pour les touristes (enfin, soi-disant). Nous entrons donc dans ce grand souk. C'est indéniable, il y a de très beaux articles : des tissus colorés (dont je suis complètement fan...), des bijoux en perles (donc les gros colliers maasaï), des tongs, des sacs, de belles peintures... On achèterait tout ! Mais, nous nous sentons tellement oppressés que nous ne voulons même pas demander les prix, par peur de devoir entrer dans un processus de négociation fastidieux alors que nous souhaitons uniquement avoir une idée de prix pour la suite du voyage. Nous ressortons donc sans achat (nous avons résisté) et le guide comprend alors que ce n'est pas avec nous qu'il fera des affaires.

Marché maasaï 

Puis, nous nous dirigeons ensuite vers le marché Kenyatta : un marché bien plus local connu pour ses coiffeurs et ses bouchers. Nous y allons en VTC, qui reste un excellent moyen de se déplacer dans la ville à moindre coût lorsque nous ne savons pas où vont les bus. Nous ne sommes pas encore descendus de la voiture que déjà nous attendent des "bouchers" avec leur blouse blanche pour nous amener à leur stand. Nous refusons et prenons la direction opposée pour nous engouffrer dans les allées de coiffeurs. Ici, des dizaines d'échoppes de coiffeuses qui me proposent de me tresser les cheveux, de me poser des extensions colorées ou de me faire les ongles. Nous trouvons également une petite vendeuse de samossas, saucisses et frites, pour moins de 2€.

Marché Kenyattz 

Finalement, nous décidons de tenter l'allée des bouchers, car c'est une des attractions principales du marché. Nous sommes à peine entrés dans l'allée que nous nous retrouvons encerclés par 5 bouchers qui hurlent pour que nous allions à leur stand respectif. Ils ne sont pas méchants, mais nous nous sentons un peu agressés : quand nous regardons vers l'un, les autres hurlent "no, no, here", "no, no, go there, better". La situation est inconfortable, nous n'arrivons même pas à communiquer entre nous. Nous choisissons donc d'entrer dans le premier, le plus proche, pour mettre fin à cette pagaille. Nous nous installons à un table, derrière le grill. Tout juste assis, on nous apporte une grande planche de viande grillée que le boucher commence à découper devant nos yeux. Bon, il semblerait donc que nous n'ayons pas vraiment le choix... Nous acceptons donc ce qu'on nous apporte. La viande est bonne mais le morceau contient beaucoup de gras. La viande vient accompagnée d'une salade et d'épinards.

Boucherie de Kenyatta 

C'est au moment de demander l'addition que nous faisons face à notre première mauvaise expérience kenyane... Le boucher nous apporte un papier et nous montre la somme. Rapidement, nous voyons 500 shillings (ce qui équivaut à presque 4€), ce qui nous paraît très bon marché. Mais lorsque nous tendons un billet de 1000, le boucher nous montre à nouveau la note : j'avais mal lu, il y avait un zéro en plus... soit 5000 shillings, ou environ 50€!!!! Notre réaction est immédiate : nous contestons ce prix totalement absurde ! Alors, un autre boucher vient et refait la note en détail avec nous : nous arrivons à 3200 shillings... c'est mieux, mais c'est toujours bien au-dessus du prix. Comment nous le savons ? Nous n'avons jamais payé un repas plus de 2000 shillings, avec boisson, dans de vrais restaurants !!! Alors, commence une discussion de sourds. Je lui explique que c'est inadmissible et injuste et que nous ne paierons pas ce prix. Il fait la sourde oreille et continue ses activités. Nous voilà coincés. Nous ne savons pas vraiment comment il peut réagir si nous laissons moins. Ils sont 3 ou 4 à travailler dans ce stand, ils ont des couteaux de boucher... et nous sentons un sentiment anti-blanc... D'ailleurs, je lui ai demandé ouvertement si c'est parce que nous étions blancs qu'il faisait cela. Alors qu'il continue de servir d'autres clients, nous restons assis à notre table pour penser ce que nous allons faire. Il est hors de question de payer le prix demandé, d'autant que le morceau de viande servi était plein de gras (ce qui n'est pas le cas des autres clients, comme par hasard) et que nous ne l'avons même pas choisi (rappelons qu'ils nous ont servi d'office à table, sans rien nous demander - nous aurions du réagir à ce moment-là, mais nous pensions que c'était normal; et nous étions un peu perturbés notre entrée compliquée dans le restaurant). Nous avons évalué la situation et nous sommes d'accord pour laisser 2200 shillings, ce qui certes reste cher (le double du prix selon nos estimations) mais qui est un bon compromis (car nous avons bien compris que nous ne réussirons pas à avoir le tarif normal). A côté de nous s'installent deux hommes parlant anglais entre eux : un est local et l'autre non. Nous demandons donc au local son avis et le prix qu'il paye : il ne nous répond pas mais nous fait comprendre que nous avons raison. Nous patientons encore un peu... nous appelons de nouveau le boucher pour lui dire ce que nous allons payer et là il ne démord pas. Cela me rend folle de rage ! En effet, dans nombreux pays, les touristes se font arnaqués, c'est commun. Mais quand l'arnaque est mise à jour, les vendeurs, généralement, s'avouent vaincus. C'est un jeu : tu tentes; tu joues, tu gagnes ou tu perds. Mais pour lui, ce n'est pas un jeu. AU bout d'un moment, nous décidons de nous lever et de laisser la somme de 2200 shillings et de partir. Il refuse, nous rend l'argent et continue d'argumenter. C'est alors qu'enfin, d'autres clients du restaurant se lèvent... nous ne savons pas tout de suite quel parti ils vont prendre et nous sommes peu rassurés... Rapidement, nous comprenons qu'ils prennent notre parti !!! Et alors, l'autre boucher (pas le gros c**, son collègue) me refait la note... et nous arrivons à 2300. Je lui donne les 2200 et il accepte. Nous quittons le restaurant au pas de course. Je pense que si nous étions restés un peu, avec le soutien des autres clients, nous serions arrivés au prix juste. Mais cela faisait une heure que nous étions en pur-parler et nous voulions partir le plus vite possible.

Bref, tout est bien qui finit bien. Mais, je dois avouer que nous n'étions pas tranquilles et que c'est la première fois que je passe par une situation si délicate. En tout cas, leçon apprise : à partir de maintenant, on refusera tout plat sans en avoir demandé le prix avant !!! Cela paraît idiot, mais nous avons fait confiance car jusqu'à maintenant, tout le monde a été honnête avec nous (même dans les bus).

En soirée, nous nous offrons un beau dîner au restaurant Carnivore, qui, comme son nom l'indique, n'est pas fait pour les végétariens. A l'origine, le restaurant a bâti sa réputation sur les viandes de gibier (zèbre, antilope...) qu'il proposait. Depuis 2004, une loi interdit la consommation de ces viandes. Mais cela reste un excellent restaurant qui propose une formule unique à 3600 shillings pour un buffet illimité de viandes grillées classiques (boeuf, poulet...) et moins classiques (crocodile, autruche...) dans un cadre agréable.

Dégustation de viandes 

C'est ainsi que nous terminons notre séjour à Nairobi. Demain, commence l'aventure, la vraie !

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Conseils et informations pratiques à Nairobi :

  • faire la demande de visa en ligne, en amont (e-visa) : il coûte 50$ et est prêt en 2 jours. Cela évite une longue file d'attente à l'aéroport
  • en journée, tenter l'expérience du "matatu", les bus locaux
  • le soir, se déplacer en VTC (Bolt est moins cher que Uber), c'est simple, pratique et bon marché
  • éviter de se promener seul le soir, en particulier dans le centre-ville; et il n'y a aucun intérêt d'y être hébergé
  • pour retirer l'argent, préférer les distributeurs des banques NCBA et Equity; les autres prennent une commission entre 400 et 500 shillings
  • obtenir une carte sim chez l'opérateur Safaricom est simple et rapide mais il faut être muni de son passeport (original, les copies ne sont pas acceptées). Il faut compter 50 shillings pour la carte et 2000 shillings pour 15GB à consommer sur un mois
  • faire la visite guidée de Kibera, avec Explore Kibera
  • décalage horaire : + 1 heure en été; + 2 heures en hiver
  • monnaie : le shilling kenyan - 1€ = 110 shillings

Où manger à Nairobi ?

  • Malindi Dishes, dans le centre, pour des plats locaux et très bon marché
  • Mama Oliech, pour le meilleur tilapia de la ville ( plusieurs adresses)
  • Roadhouse Grill, pour d'excellentes viandes grillées (plusieurs adresses), mais prévoir 1 heure d'attente
  • Carnivore, pour un buffet à volonté de viande - budget de 40€ par personne

Comme je l'ai déjà dit, Nairobi n'est pas une ville touristique. C'est le point d'entrée principal du Kenya; on peut y rester un ou deux jours, pour démarrer son séjour avant de partir dans les parcs nationaux pour un safari ou sur la côte. Il y a peu de choses à faire / à voir, mais c'est un bon point de départ pour s'immerger dans la culture locale. Et pour ceux qui n'ont que quelques jours à Nairobi, sans avoir l'opportunité de faire un safari ailleurs, il y a le parc national de Nairobi où il est possible de rencontrer des lions et des rhinocéros.

26
janv

C’est le grand jour : aujourd’hui, direction Taru ! Nous nous levons aux aurores pour nous rendre à la nouvelle gare de Nairobi, en face de l’aéroport. Le bâtiment est très moderne. Pour entrer dans la gare, nous devons passer de nombreux contrôles de sécurité. Et c’est ainsi que nous faisons face à notre deuxième mésaventure…

Premier contrôle : le détecteur de métal le long du corps, check !

Deuxième contrôle : le chien renifleur sur le sac, check !

Troisième contrôle : les rayons x avec tapis roulant pour le sac… Le mien passe, la valise de Fernando est mise de côté. Sur le moniteur apparaît un couteau : il s’agit de son couteau multifonctions Leatherman qu’il a reçu à Noël. Sauf que l’homme de la sécurité, en voyant la marque (c’est un objet de bonne qualité et assez cher) nous explique que les couteaux sont interdits à bord, car c’est une arme (comme dans les avions…) et met l’objet dans sa poche. Et sans vouloir être parano, je remarque que les seules personnes « arrêtées » sont des blancs et ils se font tous confisquer quelque chose. Nous nous regardons estomaqués : nulle part ailleurs dans le monde il est interdit de prendre le train avec un couteau !!! Et lors de l’achat du billet de train par Internet, c’est écrit nulle part. Alors nous commençons à argumenter, une fois de plus, en expliquant que c’est un cadeau et que nous allons en avoir besoin dans l’école où nous allons vivre 2 mois car il n’y a rien là-bas. On discute bien 5 minutes avant qu’il ne fasse appel au militaire qui regarde la scène. Le militaire explique que ce sont des mesures de sécurité et qu’il ne peut pas faire d’exception… Enfin, si on insiste, il peut nous « escorter » dans le train (c’est-à-dire qu’il propose de nous retrouver plus tard dans le train et de nous le rendre). On commence à voir venir le truc…

Mais l’heure tourne et nous perdons du temps, nous avons un train à prendre. Entre temps, je laisse Fernando pour récupérer nos billets de train auprès des machines.

Nous acceptons finalement que le militaire nous « escorte », sans avoir la certitude qu’il nous rejoindra, comme promis, dans le train. Il va pour récupérer l’outil auprès du premier homme, mais celui-ci vient vers nous pour nous demander de l’argent ! Et oui, exactement ce qu’on pensait : la corruption fait rage dans les pays africains, pas uniquement au niveau des gouvernements, mais à tous les niveaux de la population. Ce n’est pas la première fois que je voyage dans un pays corrompu, mais en général, cela reste interne et n’affecte pas les touristes. Etant plutôt intransigeante avec les règles, je refuse de lui donner quoi que ce soit et de participer à ce système. C’est parce que les gens acceptent de payer que cela se propage et gangrène le pays. En effet, si tout le monde se laisse corrompre ou accepte la corruption, alors cela devient l'anarchie totale où règne la loi du plus riche. Je fais donc l’idiote en faisant mine de ne pas comprendre ce qu'il veut. D’autant que même en lui donnant un billet, nous n’avons aucune garantie que le militaire montera dans le train après. L’homme comprend bien et ne s’adresse donc qu’à Fernando. Voyant qu’il n’obtiendra rien de nous deux, il abandonne finalement et donne l’outil au militaire. Celui-ci nous dit qu’il nous le rendra dans le train et nous indique maintenant d’entrer dans la gare pour embarquer.

Quatrième contrôle : billet et passeport. Nous sommes fous de rage car nous savons que nous ne reverrons pas notre outil, non pas parce que nous n’avons pas respecté les règles de sécurité mais parce que nous avons refusé de corrompre le garde. Je suis hors de moi : nous venons pour aider, et voilà comment nous sommes reçus. Nous investissons temps et argent dans ce projet de volontariat. Ça ne donne pas très envie de continuer.

Cinquième contrôle : de nouveau, les rayons x… Bon, il n’y a plus rien à nous prendre, donc on passe tranquillement. Mais nous avons bien fait de ne pas donner d’argent au premier, car on nous aurait certainement fait le même coup ici !

Sixième contrôle : encore le billet, pour passer le portique qui mène au quai.

Voilà, nous sommes enfin dans le train, plutôt spacieux, confortable, moderne et propre. Et surtout très ponctuel ! Nous avons payé moins de 9€ par personne, donc vraiment rien à redire. Le train se met en marche et nous traversons des immenses plaines vertes : à part quelques troupeaux de vaches et de chèvres, il n’y a que quelques rares habitations. Pendant le trajet, une hôtesse passe avec un chariot pour vendre boissons et snacks, comme dans l'avion.

Au bout de 30 minutes apparaît, sans y croire, le fameux militaire : il s’assoit en face et nous et pose l’outil sur la table. Nous sommes stupéfaits !!!! Il nous regarde et nous explique que ce sont les règles de sécurité. Nous comprenons, mais nous ne savions pas et c’est indiqué nulle part. Je le remercie pour son aide. Puis, il regarde Fernando et demande à s’isoler avec lui pour lui parler… Il a compris qu’avec moi, il n’aura rien… Fernando revient 10 minutes plus tard. Lui est plus coutumier du fait que moi étant brésilien. L’homme lui a expliqué qu’il voulait juste un peu d’aide, Fernando lui a répondu que nous n’étions pas riches et que nous sommes là pour un volontariat. Mais il a cédé et lui a donné un petit quelque chose. Nous sommes tous les deux en désaccord sur cela, mais nous avons une culture et une histoire différente, alors c’est un point compliqué à défendre. Bref, nous avons récupéré notre bien et nous avons appris une nouvelle leçon : pas de couteau dans le train ! Quand nous aurons besoin de nous déplacer avec, nous opterons pour le bus.

Le voyage continue sans encombre. Nous sommes un peu déçus de ne pas voir d’animaux sauvages en chemin, à part trois zèbres.

• • •

Nous débarquons à Miaseny 4h30 plus tard, en début d’après-midi, sous une pluie battante qui ne durera pas. A la sortie de la gare, nous attendent Eunice, la fondatrice du projet vivant avec Paul, son mari en Angleterre ; Caroline, la directrice de l’école ; et Bradley, le chauffeur et homme à tout faire. Ils ont l’air tout aussi contents que nous de nous rencontrer. Eunice est très bavarde et nous nous sentons très bien accueillis. Nous rejoignons le village de Taru en voiture, après 20 minutes sur la route principale reliant Nairobi à Mombasa.

Il s’agit d’un village assez étendu, divisé en deux par la route. Les rues sont en terre rouge ; il y a quelques commerces. Avant de faire un tour, nous découvrons notre maison : une chambre spacieuse, une belle salle de bains et une petite cuisine. Nous sommes installés confortablement. Eunice nous emmène ensuite dans le village pour repérer la supérette, le marché qui a lieu tous les dimanches, le dispensaire, le bar… Et biens sûr, pour visiter l'école qui a ouvert il y a 3 ans et qui aujourd'hui accueille plus de 200 enfants, à moindre coût (entre 20 et 35€ par trimestre, incluant 2 repas par jour) ou sponsorisés par des donateurs.

L'école et notre maison 

A la maison, il y a Agnes (alias Mama Chori) qui est là pour prendre soin de nous : ménage, lessives, cuisine... En soirée, nous dînons avec Eunice autour d'un plat de riz et haricots. Elle nous raconte comment le projet est né et son évolution depuis. Nous sommes ravis d'apporter notre pierre à l'édifice.

Demain, nous faisons notre rentrée scolaire et nous avons hâte !!!

PS : pour tous ceux qui ne savent pas encore ce que nous allons faire à Taru ou pour tous ceux qui veulent aider, n'hésitez à faire un tour ici.

27
janv

Cela faisait quelques années que nous n'avions pas fait de rentrée scolaire, et nous voilà de retour sur les bancs de l'école.

Lever du soleil 

Notre journée débute à 7 heures du matin (heureusement, nous habitons juste à côté de l'école). A cette heure, la majorité des élèves sont déjà arrivés. Ils arrivent de manière échelonnée, selon où ils vivent : certains marchent 1 heure pour arriver à l'école. A leur arrivée, ils vont sagement s'installer dans leur classe et font quelques exercices. Ils sont très disciplinés et peuvent rester seuls en classe sans faire le bazar. Pendant ce temps, nous nous réunissons avec les professeurs : Caroline, la directrice de l'école, nous présente et nous souhaite la bienvenue. Aujourd'hui, nous allons observer et nous verrons plus tard comment nous intégrerons le programme.

La journée commence avec une assemblée dans la cour, en rang par classe. Une professeure fait des annonces générales, puis appellent 3 élèves pour hisser le drapeau tel des militaires (seulement le lundi et le vendredi) avant de chanter l'hymne national. Une prière est dite également, enfin plutôt chantée et dansée. Ensuite, Caroline nous présente à nouveau et nous laisse la parole (ce qui n'était pas prévu). Nous voilà face à 250 élèves, à bredouiller quelques mots. Nous remarquons que les élèves sont très heureux de nous voir et sont aussi très disciplinés. "Good morning teacher, how are you teacher" chantent-ils en coeur.

A la fin de l'assemblée, tous retournent dans leur classe et les cours commencent. Ce sont des cours de 35 minutes, avec une pause tous les 2 cours. On y enseigne l'anglais, le kiswahili, les maths, l'histoire-géographie, la religion, les arts, le sport, les sciences... Dans les classes, ils sont entre 15 et 30 élèves, selon le niveau et nous notons qu'il a bien plus de filles que de garçons. Nous assistons d'abord à un cours de soustractions avec les "grade 4" (l'équivalent de notre CM1 je crois - lorsque l'école a ouvert, ce sont ces élèves qui ont commencé la 1ère classe) puis à un cours de sciences de la vie. Nous sommes surpris par la motivation des enfants à apprendre et leur participation active. Ils se battent presque pour répondre aux questions des professeurs. Tous lèvent la main et hurlent "teacher, teacher". Après une courte pause, nous changeons de classe, avec les "grade 5" pour un cours d'anglais puis un cours de sport. Pour le sport, nous sortons de l'école pour occuper le terrain d'en face. La prof profite de notre présence : elle nous donne le ballon et nous demande de faire le cours ! Nous sommes pris de cours, il faut improviser. On fait un petit échauffement avant de se mettre au foot. Avec cette chaleur, nous avons du mal à suivre.

Matinée sportive à Taru 

Vient ensuite l'heure du petit-déjeuner, servi classe par classe : une tasse de porridge (eau chaude, farine et sucre). Puis nous poursuivons avec les grade 8 (la classe la plus élevée) pour un cours de maths sur les racines carrées puis un cours de religion. Pour ce cours, la classe est séparée : les musulmans d'un côté, les chrétiens de l'autre. Nous restons avec les chrétiens. dans ce cours, le professeur leur raconte la création selon la Bible, mais aussi selon les religions de chaque tribu du Kenya (les Luo, les Kikuyu...). C'est intéressant. Le cours se termine par une chanson gospel qui met la patate.

Le petit-déjeuner 

Pour le déjeuner, nous avons 1h30 de pause pour une assiette de riz et de haricots, avant de reprendre. Nous passons dans la classe des grade 4. Aucun professeur ne s'y trouve mais les enfants nous disent d'entrer. Nous improvisons un cours d'agriculture (c'est le livre qu'ils nous ont donné). Puis un professeur arrive pour commencer un cours sur la santé. C'est la même que celle du cours de sport (à noter qu'ici les professeurs s'occupent de toutes les matières et de tous les niveaux) et elle nous donne le livre et nous demande de faire la leçon. C'est la première fois que nous nous retrouvons dans cette situation... Nous prenons les choses en main (livre et craie) et commençons le cours. Heureusement, les élèves sont très enthousiastes et cela devient facile. Pendant ce temps, les plus petits font la sieste.

La sieste des plus petits 

L'école se termine à 15h. Mais les élèves restent encore une heure pour des activités extra-scolaires. C'est assez nouveau et donc pas encore vraiment au point... Aujourd'hui, des débats sont organisés dans les classes mais ça ne marche pas vraiment. On sent que les professeurs ne sont pas à l'aise quand il s'agit d'être en dehors du programme et les élèves n'ont pas l'habitude de ne pas être scolaire.

En fin de journée, nous nous retrouvons avec Caroline pour faire un point sur ce que nous allons pouvoir faire les jours à venir... Nous ne sommes pas prêts à 100% (pour ceux qui ne le savent pas, nous ne sommes pas profs et nous n'avons jamais travaillé avec des enfants) mais les enfants sont tellement heureux de nous voir que nous allons nous lancer !!!

28
janv

Ça y est, on y est, il faut se lancer ! Et comme Fernando a été malade toute la nuit, ce matin, j'attaque seule les cours. Et pour commencer la journée, cours d'anglais avec les "grade 8" (les plus grands), le cours que devait assurer Fernando. La veille, Caroline nous a refilé ce cours un peu à l'improviste et donc nous n'avons pas vraiment eu le temps de le préparer. Donc, pour cette première fois, nous allons suivre leur livre scolaire. Par chance, les élèves sont tellement sages, disciplinés et motivés, que c'est un réel plaisir de travailler avec eux. C'est le cadre idéal pour débuter. Dans un autre contexte, les élèves auraient vu d'emblée mon manque d'assurance et en auraient profité pour faire le bazar. Mais ici, ils se rendent compte que nous venons de loin et que c'est une chance de nous avoir.

Après 35 minutes de cours, j'enchaîne avec mon premier cours de yoga. Et pas des moindres, car celui-ci se fait avec une quarantaine d'élèves, en mélangeant les grades 4 et 8... Pas évident donc de monopoliser leur attention. Nous sommes installés sur un terrain vague en dehors de l'école, avec des "tapis nattes". Aussi, les filles sont en jupe longue, ce qui est loin d'être la tenue la plus pratique pour faire du yoga (d'autant qu'elles sont très pudiques et qu'on leur répète à longueur de journée de faire attention à leur tenue). Même s'il est difficile de maintenir l'ordre et l'attention de tous, j'arrive à faire le cours jusqu'au bout en attisant leur curiosité sur cette nouvelle discipline dont la plupart n'a jamais entendu parlé. Le cours se termine par un foot...

Heureusement, j'ai le temps de perfectionner mon enseignement, car j'enchaîne 3 autres cours de yoga (et dois-je vous rappeler que nous sommes en plein soleil par plus de 30 degrés...?), mais plus facilement car j'ai une classe à la fois (donc une quinzaine d'élèves par groupe) ce qui rend la tâche bien plus facile. Je peux prêter plus d'attention à chacun et les corriger. J'ai particulièrement réussi avec les "grade 5" (11 ans en moyenne) qui semble se divertir beaucoup (vidéo à l'appui)

Yoga 

Après ces 4 cours de yoga, je suis bien épuisée (et avec quelques coups de soleil). J'ai donc mon après-midi "libre", ou presque. Alors que Fernando se repose toujours, j’entreprends de faire fonctionner l'ordinateur et le projecteur qui ont été donnés à l'école pour qu'ils puissent servir aux enseignants. Il y a quelques challenges car il n'y a pas de prises de courant dans toutes les salles (donc si on veut s'en servir il faudra permuter les classes), il n'y a pas Internet (donc on utilise un modem portable avec carte sim), la salle n'est pas occultable (donc on récupère des rideaux où on peut)... Bref, je sens que mes compétences à résoudre des problèmes imprévus acquises par mon ancien travail (organisation d'événements) sont utilisées à bon escient. Et lorsqu'en fin de journée, j'annonce à Caroline que tout fonctionne et qu'on peut se servir de ce nouveau matériel, ses yeux s'illuminent (comme si j'étais une ingénieur bac + 10).

Du coup, elle veut qu'on s'en serve tout de suite et me demande d'improviser une petite séance "film" après les cours (il y a un temps d'activité extra-scolaire de 15h à 16h). Comme nous ne pouvons pas mettre tout le monde dans la même salle, nous divisons l'école en 2 : les plus grands feront les jeux initialement prévus; et les petits verront un dessin-animé. Je reste perplexe car il faut quand même faire rentrer 100 petits bouts dans une seule classe... Mais en Afrique, rien n'est impossible semble-t-il... On entasse les petits dans tous les sens : sur les bancs, par terre, debout, sous les bureaux... Je ne vous raconte même pas la chaleur dans la salle... Je lance le dessin-animé et les yeux des enfants s’écarquillent. Pour certains, c'est la première fois qu'ils voient des images s'animer. Malgré la chaleur et l'inconfort, ils restent relativement sages pendant 20 minutes (sachant que les plus jeunes ont 4 ans).

Séance dessin animé avec 100 petits bouts 

Caroline et Eunice sont ravies de cette première séance. Nous allons maintenant pouvoir en organiser une ainsi chaque jour, avec moins de monde (disons 2 classes par 2 classes).

La journée se termine. Comme l'école manque un peu d'organisation, je demande à Caroline quels seront mes cours du lendemain. Je sens qu'elle veut m'en donner beaucoup, mais je ne peux pas préparer correctement la veille pour le lendemain. Alors, nous nous asseyons pour organiser un emploi du temps sur le long terme. Je préfère en avoir moins mais bien faire. Nous nous mettons d'accord sur le programme suivant :

  • Sport (de grade 4 à 8) : je donnerai un cours de yoga par niveau, par semaine (pour éviter que ce soit trop répétitif) et Fernando assurera aussi un cours de sport par niveau, par semaine
  • Anglais (de grade 4 à 8) : avec des cours originaux, hors des programmes scolaires que nous trouvons trop old school (nous voulons sortir les enfants des livres et leur donner de nouvelles compétences telles que faire une présentation en public, présenter une scène de théâtre, savoir résumer...)
  • "Life skills" (oui c'est étrange mais c'est au programme) - comprenez "compétences de vie" : ici, nous intégrerons des bases d'informatique
  • Les activités extra-scolaires comme les films, le soutien scolaire...

Voilà une bonne journée bien remplie !!

Au cours de la journée, j'ai l'impression que cela fait déjà plusieurs semaines que je suis ici : les enfants me saluent, m'appellent, certains me demandent de leur donner cours... On se sent vraiment comme chez nous !

PS : Fernando va mieux et il devrait pouvoir donner des cours demain (en attendant, il s'est perfectionné dans la chasse aux criquets) !

PS 2 : quelques vidéos sur la chaîne Youtube

PS 3 : la cagnotte en ligne pour participer au projet est ici !

29
janv

Je commence à prendre une routine. Le réveil sonne tôt; au lever, je croise quelques criquets bruyants dans la chambre; je descends à l'école; je croise quelques élèves qui me saluent; je passe par la salle des profs pour confirmer les cours que je vais donner; et j'entre en scène ! Ce matin, c'est cours d'anglais avec les grade 4 et cours de yoga avec les grade 3. Pour les cours d'anglais, nous avons décidé de faire des activités hors du livre. En effet, nous avons remarqué que les enfants étaient très scolaires : ils ont tendance à écrire tout ce qui est au tableau et à répéter mot pour mot ce que dit le professeur. Mais quand il s'agit d'utiliser leur imagination et leur créativité, c'est plus difficile. Alors on encourage l'expression écrite et orale pour développer ces compétences.

Dans la journée, j'ai remarqué, depuis hier, qu'il y a des parents qui passent pour inscrire leur enfant : l'école accepte encore de nouveaux élèves (l'année a commencé début janvier). Il semblerait qu'elle devient de plus en plus populaire.

Je vais aussi passer du temps avec les plus petites classes car je n'ai pas encore rencontré tout le monde : je fais donc un tour par les Pre-Primary 1 (ils ont 4 ans - c'est la 1ère classe) qui apprennent à écrire les lettres, et reconnaissent les nombres. En classe, l'interaction est limitée car, même si l'enseignante leur parle en anglais, ils ne comprennent pas tout encore (l'anglais est leur seconde langue). Cela sera plus facile d'interagir avec des jeux et des chansons. En tout cas, ils sont sages et on ne les entend jamais pleurer, râler ou faire des caprices !

Tellement mignon... 

Je m'aventure aussi dans la classe des "grade 2" (normalement 7-8 ans, mais il y en a quelques uns qui ont 10 ans). C'est la classe la plus nombreuse, ils sont 35... et donc la plus dissipée. L'enseignant arrive à maintenir l'ordre, mais la moitié du fond n'est pas vraiment concentrée sur ce qu'il dit. Et quand vient le moment de me poser des questions, c'est la cacophonie générale !

L'après-midi, Fernando me rejoint enfin, il a retrouvé la forme. Nous donnons notre premier cours d'informatique ! La plupart des élèves n'ont jamais vu d'ordinateur et ils n'ont donc aucune idée de son utilisation. Nous voulons leur apprendre à se servir d'Internet, car cela peut être un excellent outil pour découvrir le monde et apprendre par soi-même. On prétexte donc des recherches sur le Brésil et la France pour s'entraîner; cela leur permet de découvrir d'où on vient. Et vous devriez voir leurs têtes quand ils voient pour la toute première fois une photo de la tour Eiffel et Copacabana ! Les profs approuvent totalement notre démarche; eux-mêmes savent à peine utiliser Internet.

Cours d'informatique 

Nous terminons la journée par notre première vraie séance cinéma bien organisée (avec 2 classes uniquement) : les enfants sont émerveillés et les rires volent dans tous les sens.

Séance de cinéma 

A la fin de la journée, nous allons "en ville" pour "faire des courses" dans la toute petite supérette. C'est assez drôle car nous sommes déjà connus et on nous salue dans la rue. Nous nous sentons vraiment comme chez nous ! D'ailleurs, les adultes sont moins timides et nous intègrent de plus en plus dans leur quotidien, comme Mama Chiro par exemple (la dame qui s'occupe de nous à la maison : ménage, linge, repas...).

C'est avec elle que nous allons à la veillée de prière car Eunice n'est pas là ce soir. A Taru, il y a une grande communauté chrétienne (on ne sait pas trop si évangéliste ou pentecôtiste) et la veillée a lieu tous les soirs dans la maison du pasteur. Nous voulons y assister car tout le village s'y retrouve... Nous traversons la nuit étoilée pour arriver sur la propriété du pasteur. En arrivant, nous ne savons pas si nous sommes bien chez lui ou à la ferme : un troupeau de chèvres et de vaches (avec l'odeur qui va avec) nous accueille. Derrière , la maison du pasteur. Une grande salle au rez-de chaussée accueille les croyants. Les femmes sont à gauche, les hommes sont à droite. Tous sont en train d'entonner des prières (ou incantations) à haute voix; au milieu, les enfants vont et viennent et jouer avec les dizaines de criquets au sol... L'ambiance est spéciale. Certaines femmes semblent pleurer ou gémir. La plupart ont la tête couverte d'un turban blanc éclatant : j'avais déjà remarqué qu'ici, à Taru, de nombreuses femmes portent ce turban (Caroline et Mama Chiro par exemple). Cela leur va si bien et il semble tenir impeccablement toute la journée. Il s'agit d'une volonté religieuse (rien d'obligatoire). Les moments de prière sont entrecoupés par des chansons gospel dynamiques. Vient ensuite un sermon, par un homme qui n'est pas le pasteur, en kiswahili. Les seuls mots que je comprends sont alléluia et amen, que les fidèles crient de temps à autre. A la fin de la session, nous rencontrons le pasteur, la figure du village. Car, pour le coup, il s'agit d'un bon pasteur : il accueille dans sa maison ou sur son terrain de nombreuses familles n'ayant nulle part où aller, dont certains enfants de l'école. D'ailleurs, il est très impliqué dans la création et la vie de l'école. C'est donc un homme très respecté. Et si ce n'est pas lui qui faisait le sermon, c'est parce qu'il était en train d'aider sur un chantier en construction sur son terrain (oui, de nuit, à la lumière du téléphone). Derrière la maison, dans une autre pièce, se trouve sa femme, aussi très connue et respectée. Elle aide beaucoup la communauté. Nous croisons quelques enfants de l'école qui nous saluent, contents qu'on soit venu; ainsi que des professeurs. Je pense que notre présence ici a été appréciée et cela semble être important pour eux qu'on soit venu. Outre ces soirées quotidiennes de prière, il y a aussi une messe donnée le dimanche à l'église du village : nous essaierons d'y assister une fois, mais pas ce week-end car nous avons déjà d'autres plans !

Veillée de prière à Taru 
30
janv

Ce matin, pas de cours à la première heure, donc on en profite pour dormir un peu plus longtemps. Je prends mon petit-déjeuner avec Eunice. Nous ne la voyons pas beaucoup car elle est très prise par les démarches administratives à effectuer pour ouvrir une nouvelle classe, qui permettrait de poursuivre la scolarité des plus grands dans le secondaire (l'équivalent de notre lycée). Et cela semble bien compliqué dans ce pays où règnent corruption et bureaucratie ! Et oui, même quand il s'agit d'ouvrir une école, on se retrouve confronté aux fonctionnaires corrompus... J'échange avec elle aussi sur nos premiers ressentis à Taru, nos missions à l'école, l'emploi du temps mis en place... Elle nous est déjà très reconnaissante. Même si nous sommes ici comme volontaire, nous recevons beaucoup en échange : l'accueil qui nous est réservé, l'hospitalité et les enfants souriants et disciplinés. On parle également des enfants, qui sont maintenant plus en confiance avec nous, même si quelques uns sont encore très timides. Sauf qu'il ne faut pas oublier que sous leur apparence d'enfants "normaux", ce sont des enfants qui ont beaucoup souffert ou qui souffrent encore. Certains ont d'ailleurs perdu leur regard d'enfant. Eunice me raconte que certains sont séropositifs, d'autres ont subi toute sorte de violence et d'abus, et d'autres encore sont plus heureux à l'école que chez eux car c'est le seul endroit où ils peuvent s'amuser.

Aujourd'hui, au programme, nous avons :

  • un cours d'anglais pour les grade 6 : je les fais travailler sur le thème de "si j'étais président, je changerais / j'aimerais...". Au début, ils sont un peu dubitatifs car il est rare qu'on leur demande leur avis (ils ont plutôt l'habitude de réciter par cœur ce qu'on leur enseigne). Mais, les réponses sont édifiantes : on parle d'éducation, de santé, d'infrastructures, de corruption, de drogue, de l'accès à l'eau...
Si j'étais président... 
  • un cours de sport pour les grade 3 et 4, animé par Fernando. Nous leur faisons faire des jeux. Et le cours se termine à grands éclats de rire. Ce sont eux qui nous enseignent le jeu de "combat de coq" : en duel, il faut s'affronter, accroupis, en sautant et en se poussant sur les mains. Fernando et moi-même décidons de nous "combattre" tels des coqs; les garçons supportent Fernando et les filles me supportent. Lorsque nous commençons, ils nous entourent, en hurlant comme des supporters de foot. Je ne prends pas la peine de mentionner qui a gagné...
Tel un animateur du Club Med 
  • 2 cours d'informatique : nous avons toujours beaucoup de succès avec celui-ci
  • une séance de cinéma pour les plus grands : nous regardons la première moitié de l'excellent " Le Garçon qui dompta le vent".

Après notre journée, Kamal (le frère d'Eunice) nous accompagne chez le coiffeur de Taru : Fernando a besoin d'une coupe plus courte. Alors, il tente courageusement : le coiffeur de Taru ne doit pas avoir l'habitude de couper des cheveux de "blanc" et au Kenya, les hommes ont plutôt les cheveux très, très courts... Le coiffeur est ravi de le recevoir. Après quelques petits coups de tondeuses, Fernando obtient une coupe relativement réussie (il ne repart pas avec la boule à zéro) et à un prix imbattable ! 100 shillings, soit moins d'un euro !

Pas rassuré chez le coiffeur de Taru 
31
janv

En ce vendredi matin, l'ambiance à l'école est un peu différente pour deux raisons. Tout d'abord, la première demie-heure de "cours " est dédiée au "programme pastoral" : les élèves dansent et chantent des chants religieux en classe. Quand on arrive à l'école, ça chante de tous les côtés : c'est joyeux et enthousiasmant. Les quelques enfants de culte musulman sont aussi réunis et chantent d'autres chansons. Il faut savoir que lorsque l'école a ouvert il y a 3 ans, il n'y avait que des chrétiens. Mais, au fur et à mesure, arrivent quelques musulmans. Et bien que le projet est fortement soutenu par l'église locale, les enfants peuvent pratiquer leur religion sans aucun problème. Lorsqu'il y a cours de "religion", les chrétiens et les musulmans se séparent pour suivre le cour qui leur correspond. C'est un bel exemple de cohabitation ! L'autre raison pour laquelle l'école est un effervescence est la venue d'un fonctionnaire qui vient "contrôler" l'école pour autoriser ou non l'ouverte de la nouvelle classe correspondant au niveau de lycée. Eunice travaille dessus depuis plusieurs semaines et le projet devrait pouvoir se réaliser dans les jours à venir. Pour que ce fonctionnaire valide le projet et signe le papier nécessaire, il doit évaluer l'école actuelle. Les 8-9 élèves qui peuvent prétendre suivre cette nouvelle classe sont donc présents aujourd'hui et suivent un cours, pour montrer qu'il y a un vrai besoin et que pour le fonctionnaire (probablement corrompu) autorise l'ouverture de la classe. Si le projet est approuvé, nous reverserons certainement une partie de la cagnotte pour la création du lycée (construction de la salle de classe, bureaux, salaires des nouveaux professeurs...).

Notre semaine se termine par un cours d'anglais le matin. Dès 09h30 nous sommes en week-end ! Et pour ce premier week-end, direction Mombasa, la deuxième plus grande ville du pays, à 80km de Taru. Pour y aller, nous pouvons prendre un matatu (bus local) mais Eunice s'y rend également (le pasteur lui a prêté sa voiture, avec un chauffeur) alors nous nous joignons à elle : c'est plus confortable !

La route jusqu'à Mombasa est assez encombrée : il s'agit de l'axe principal entre Nairobi et Mombasa, avec seulement 2 voies et de nombreux camions. L'arrivée à Mombasa est embouteillée : ici, il y a de nombreux tuk-tuks, exactement les mêmes qu'en Inde. Il nous faut peu de temps pour comprendre que Mombasa est très différente de Nairobi. Commençons par l'architecture : ici, pas de gratte-ciel, mais de petits immeubles carrés, bleus et blancs et une architecture plus coloniale. Et des rues plus sales et plus défoncées... Ensuite, la population : si je devais résumer, ici, on n'est plus en Afrique mais au Moyen-Orient ! La population est majoritairement musulmane, et assez orthodoxe semble-t-il : les mosquées sont très nombreuses, la couleur de peau des habitants est plus claire, leurs traits sont différents, et les hommes sont en djellaba et portent le kufi, la plupart des femmes sont voilées et quelques unes sont en burqa. C'en est presque choquant, nous avons l'impression d'avoir changé de pays. En fait, pour être plus exacte, je dirais qu'on est entre l'Inde et le Moyen-Orient. Car il y aussi des temples hindous, quelques personnes au faciès indien et la circulation chaotique et bruyante me rappelle l'Inde... La situation géographique et l'histoire de Mombasa expliquent ces mélanges de cultures. Mombasa a été "découverte" par Vasco de Gama à fin du XVème siècle. Puis, après quelques années sous domination portugaise, elle est passée sous le contrôle du sultanat d'Oman (comme Zanzibar) avant d'être prise par les Britanniques. Lors de la période omanaise, le commerce des esclaves était en plein boom : les esclaves africains étaient vendus comme main d'oeuvre vers le Moyen-Orient (et je tiens à le souligner, car on parle toujours de nous, Européens, mais on parle moins de ce négoce d'esclaves...) : ce sont les Britanniques qui ont mis fin à cette pratique. Aussi, Mombasa, l'un des plus grands ports d'Afrique de l'Est, situé sur l'océan Indien, est un point stratégique pour le commerce entre l'Asie et l'Afrique. Déjà du temps des Portugais, c'était un point de passage obligatoire pour le commerce des épices et du thé venant d'Inde (Goa).

Mombasa a donc une vieille ville, dominée par son fort, le fort Jesus, plutôt en décrépitude. La vieille ville est un dédale de ruelles aux maisons colorées et coloniales (elles aussi en décrépitude), peu rassurantes (je ne m'y aventurerais pas la nuit) malgré les nombreuses boutiques touristiques. Les chauffeurs de tuk-tuk sont nombreux et insistants. Toutes les 5 minutes, il y en a un qui s'arrête à notre hauteur pour nous proposer une course. Dans ce brouhaha constant, nous trouvons un peu de calme dans un restaurant surplombant l'océan Indien d'un bleu turquoise éclatant. Cela donne envie d'y plonger. Si en matinée le ciel était gris, le soleil fait peu à peu son apparition et la chaleur, humide (pas comme à Taru), est plus difficile à supporter.

Fort de Mombasa 
Vieille ville de Mombasa 

Après avoir testé la "pizza de Mombasa", nous sortons de la vieille ville : nous passons devant un temple hindou, un temple jaïn et le marché aux épices (je n'ai pas fait de photos, car les commerçants étaient tellement insistants que nous avons préféré partir)... Nous allons jusqu'au parc Uhuru et les fameuses défenses d'éléphant qui ornent une grande avenue.

Déjeuner face à l'océan Indien 
Dans les rues de Mombasa 

Notre visite de Mombasa se termine ici. Comme on nous avait conseillé de rester plutôt en dehors de la ville, nous prenons la direction de la banlieue, vers Bamburi, plus sûre (mais avec un trafic tout aussi assourdissant et bordélique) et surtout proche de la plage... Nous sommes hébergés en Airbnb dans un appartement spacieux et moderne.

En soirée, nous dînons à Nyali, zone adjacente à Bamburi. Nous remarquons plusieurs hommes blancs, d'un certain âge, en compagnie de jeunes Kényanes... Encore un pays affecté par le tourisme sexuel...

1
fév

A Bamburi, l'ambiance est plus africaine qu'à Mombasa. D'un côté de la route se trouve la plage bordée par des dizaines de complexes hôteliers, plutôt luxueux; de l'autre, se trouve la ville, moins luxueuse, avec ses routes défoncées et ses petits commerces dans des cabanes (bien sûr, nous logeons de ce côté là...). Après une étape dans le centre commercial le plus proche pour nous ravitailler en snacks et biscuits pour la semaine, nous nous rendons sur la plage de Bamburi.

La plage s'étend du nord au sud sur environ 3 km : sable fin et blanc, eau turquoise à 27°, cocotiers... Tout au nord, Bamburi Beach, avec ses plus beaux hôtels et restaurants, ses dizaines de vendeurs de souvenirs, de tours en bateau et de balade à dos de chameau. Pour accéder à la plage, il faut passe par un restaurant. Sur la plage, il n'y a que les vendeurs et nous, car les autres touristes bronzent directement depuis les transats de leur hôtel... A peine arrivés sur la plage, nous sommes accostés par plusieurs "beach boys" : l'un veut nous vendre des porte-clés, l'autre une excursion à Wasani (dans le sud du pays), un autre encore un tour en bateau à fond de verre. Bien que sympathiques et toujours engageants la conversation (quand on leur dit qu'on fait un volontariat à Taru, ils n'en reviennent pas " Taru, là-bas, perdu dans le désert ?!"), ils sont quand même bien casse-pieds. On ne peut pas se promener tranquillement sans être dérangé. En début d'après-midi, le mer est peu profonde car elle se retire peu à peu vers l'horizon : les marées ont de grandes amplitudes.

Après le déjeuner et quelques limonades fraîches, nous marchons vers le sud de la plage : au bout, Jomo Kenyatta Beach, la plage publique, bien plus locale, avec beaucoup plus de monde profitant de la douceur de l'océan Indien. Si le matin le ciel est nuageux, dans l'après-midi, le soleil tape fort, surtout que nous sommes proches de l'Equateur. Alors après une après-midi sur la plage, nous avons déjà pris quelques couleurs.

Bamburi est idéal pour venir profiter de la plage, le week-end, après la semaine à l'école.

3
fév

Hier, nous sommes partis de Bamburi en début d'après-midi pour rentrer à Taru : une sacrée expédition ! Tout d'abord, notre chauffeur de VTC qui tombe en panne d'essence : il est allé chercher de l'essence à la station-service la plus proche avec une bouteille d'eau... Nous doutions d'arriver à faire les 6 km restants avec seulement 1 litre d'essence, mais il a réussi. Il nous a déposé à la "gare routière" ou plutôt le point d'où partent des dizaines de matatus vers Nairobi. Trouver un matatu pour Taru est assez facile : comme ils vont tous vers Nairobi, ils passent forcément par Taru. Il y a des dizaines de rabatteurs qui tentent de nous faire monter dans leur matatu; nous choisissons le premier car il nous a donné un prix juste. Il faut ensuite attendre 30 minutes, le temps que celui-ci se remplisse. Nous attendons, entassés, dans la chaleur, avec nos sacs sur les genoux. Enfin, le départ... et de la musique africaine dans les hauts-parleurs grésillants au-dessus de nos têtes. Nous débarquons à Taru deux heures plus tard. Nous sommes contents d'être rentrés chez nous, dans le calme, loin du brouhaha de la ville.

Lundi, de retour à l'école ! Aujourd'hui, la première classe de lycée a officiellement ouvert !!! Oui, ce fût rapide. Mais, ici, au Kenya, dès que la paperasse administrative est prête, tout va très vite. Pendant le week-end, Eunice a eu le temps de trouver de nouveaux professeurs pour l'école primaire et ainsi deux autres professeurs de l'école primaire, aussi qualifiés pour le secondaire, peuvent prendre en charge l'enseignement du lycée. On arrange les salles ; il ne manque plus que les bureaux, mais cela devrait arriver vite. En attendant, ils utilisent la grande table de la salle des professeurs. On fait comme on peut !

Après le rassemblement matinal du lundi, Eunice quitte l'école : après 2 mois à Taru, il est temps pour elle de rentrer en Angleterre. Nous ferons donc le suivi de l'ouverture du lycée avec Caroline directement.

Lundi est notre plus grosse journée : 3 cours d'anglais, 4 cours de sport (dont 2 de yoga), un cours d'informatique et la séance cinéma.

Sport à Taru 

Les enfants sont toujours aussi contents de nous voir et sont de plus en plus à l'aise avec nous. Comme nous avons passé pas mal de temps avec les grade 8 (les plus grands), les filles de cette classe ont décidé de m'apprendre à danser pendant l'heure du déjeuner. Et elles sont vraiment très fortes ! Je tente quelques mouvements et cela les fait bien rire !!! Puis, les garçons me donnent quelques bases de swahili. Ils sont ravis de cet échange culturel.

Quoi dire de plus ? Ici, le temps est comme les Kenyans : imprévisible et spontané ! En moins de quelques secondes, on peut passer d'un plein soleil tapant fort sur le sol poussiéreux rouge à une pluie battante inondant le terrain de l'école pour en faire une boue bien collante. La pluie s'arrête aussi vite qu'elle est arrivée. Et nous, nous sommes toujours sales, que ce soit de poussière ou de boue !

5
fév

A Taru, les jours se suivent mais ne se ressemblent pas.

Chaque jour, nous enseignons à des classes différentes, des matières différentes. Nous préparons nos cours la veille et essayons d'être créatifs pour proposer des activités hors programme scolaire. Il ne faut jamais être à court d'idée et toujours s'adapter aux conditions du jour. Par exemple, hier, il a plu abondamment et le terrain de sport est boueux. Impossible donc de faire du yoga dehors. On improvise donc le cours dans la salle de classe : on pousse les bureaux, on met les tapis et on utilise les murs pour travailler nos équilibres sur les mains.

Cours de yoga indoor 
Cours de yoga outdoor 

Et chaque jour, un nouveau film à trouver pour notre séance cinéma. Hier, c'était au tour des grade 1 et 2. Ce sont des classes que nous côtoyons moins alors ils sont très excités de passer du temps avec nous. Après environ 30 minutes de dessin animé, il faut les occuper. Ils sont nombreux, plein d'énergie et incontrôlables. On les fait danser dans la cour. Pour certains, nous sommes les seuls blancs qu'ils n'ont jamais vus. Ils sont donc très curieux. Je les laisse toucher mes cheveux, clairs et lisses : les petites filles les adorent. D'autres me touchent les bras avec insistance, pour vérifier que le blanc de ma peau est naturel. Avec les petits, on a l'impression d'être des stars.

Après la pluie... 

Nous vivons au rythme de l'école, avec ses petites anecdotes : une petite fille qui perd une dent en cours, un énorme (vraiment énorme) mille-pattes qui vient nous rendre visite en cours de yoga (heureusement, les enfants n'ont pas peur, le prennent avec les mains et le jettent au loin), les bureaux des lycéens en cours de construction, Caroline qui continue les démarches d'ouverture officielle du lycée à Nairobi, les dessins quotidiens des grade 4 (on doit l'avouer, ce sont nos préférés), l'arrivée de nouveaux élèves (ce qui est quotidien) et de nouveaux professeurs (pour les lycéens)...

Danse improvisée avec les grade 4 

Ce qui est remarquable à Taru, c'est que personne ne se plaint : ni les élèves de manger tous les jours le même repas, ni les professeurs de manquer terriblement de moyens (les professeurs en France devraient faire un tour par ici...). Au contraire, tout le monde est reconnaissant de ce qu'il y a . Et quand on apporte un peu de nouveauté (comme l'ordinateur), les visages s'illuminent. Tous apprécient les efforts de chacun.

Les enfants découvrent le site internet de l'école 

Maintenant que nous avons un emploi du temps bien établi dans l'école, et que les professeurs s'y sont habitués, nous devons y intégrer de nouveaux éléments, car à Taru, il y a toujours de quoi faire : former les professeurs aux bases de l'informatique (Internet et le pack Office), donner des cours aux lycéens, développer les compétences des élèves avec des projets hors programme. Bref, on a encore beaucoup à faire !

Fin de journée à Taru 

Heureusement, à la maison, nous n'avons rien à faire car Mama Chiro s'occupe bien de nous, comme une Maman : ménage, lessive, cuisine... Elle est toujours là pour prendre soin de nous. Elle insiste même pour que nous déjeunions pas tous les jours à l'école pour que nos repas soient variés. Plutôt discrète et timide, ce midi, elle nous raconte son histoire : elle vient de la région de Nakuru (dans l'ouest du pays). Elle s'est mariée et a donc quitté sa région natale pour venir plus à l'est. Après avoir eu deux enfants, dont l'aîné qui est sourd, son mari l'a quittée, la laissant seule, avec les enfants, sans aucune ressource financière. Ne sachant que faire, elle est venue à Taru où se trouve le pasteur de son église (elle suivait cette branche religieuse à Mombasa mais le QG de cette église est à Taru). Ce dernier l'a accueillie chez lui et l'a aidée. Elle nous raconte avec émotion comment la religion l'a sauvée alors qu'elle pensait mettre fin à ses jours. Parce que si être mère célibataire est une situation difficile en France, je vous laisse imaginer ici, au Kenya... Puis, lorsque l'école a vu le jour, Eunice l'a embauchée, tout d'abord comme cuisinière à l'école, puis comme employée de maison. C'est donc elle qui prend soin des volontaires. Par ailleurs, son aîné est parrainé par un donateur et est en pension dans une école spécialisée; et la deuxième, la petite Chiro (d'où Mama Chiro), est parrainée également et va à l'école de Taru. Si je partage cette histoire, c'est pour vous montrer que le projet de l'école va bien au-delà de l'éducation des enfants : l'école crée des emplois et aide de nombreux parents désespérés.

Mama Chiro nous fait des chapati !
9
fév

Le week-end est arrivé et il est donc temps pour nous de faire une petite pause et d'aller à la découverte de la faune kényane, c'est un incontournable !

Pour notre premier safari, nous choisissons le parc national de Tsavo, car en plus d'être le plus grand du Kenya, c'est aussi le plus proche de Taru (donc le plus pratique). Le parc Tsavo est divisé en deux par la ligne de chemin de fer : Tsavo Est et Tsavo Ouest. Il faut donc choisir lequel on veut visiter... et ce n'est pas une tâche facile, car il est difficile de savoir où sont les animaux. L'avantage de la partie est, c'est sa sécheresse et donc son paysage plat et dégagé permettant d'apercevoir plus facilement les animaux; son inconvénient, c'est qu'il est très grand et donc les animaux sont très dispersés. Dans la partie ouest, en revanche, les paysages sont très différents, ce qui compense une éventuelle déception de voir peu d'animaux. Nous avons longtemps hésité sur le parc à visiter. Finalement, c'est notre guide qui nous oriente plutôt sur la partie ouest.

Notre guide, justement, parlons-en... Faire un safari au Kenya est une activité assez coûteuse : le prix d'entrée des parcs est élevé (et ne vaut que pour 24 heures), le prix des lodges à l'intérieur des parcs est aussi exorbitant (par rapport à la qualité médiocre), et à cela il faut ajouter la location d'un véhicule et un chauffeur (car si nous pouvons conduire nous mêmes dans le parc, il serait totalement déconseillé de prendre les routes du pays seuls, vu la circulation dangereuse). Nous avions contacté plusieurs agences organisant des tours (ils partent en général depuis Mombasa, mais Taru est sur la route), mais c'était assez cher, sans avoir une garantie de qualité. Nous avons donc fait appel à notre joker : Fred ! Fred, c'est le meilleur ami de Fernando en France et Fred est Kényan ! Alors forcément, il peut nous aider... Il nous a donné le contact d'un de ses amis qui est guide. Et c'est ainsi que nous avons rencontré Edison. En quelques messages par Whatsapp, celui-ci nous a fait un package à un bon prix, alors nous avons accepté l'offre.

Edison vient donc nous chercher à Taru samedi matin. Grand et sympathique, Edison nous met tout de suite à l'aise avec son rire communicatif. Il nous explique que c'est bien la première fois qu'il vient chercher des clients à Taru... tu m'étonnes ! Mais c'est ainsi que nous lui racontons l'histoire de l'école : cela l'intéresse car de nombreux touristes lui demandent parfois de passer par une école pour distribuer du matériel scolaire; maintenant, il sait où aller !

Il nous faut 3 heures pour arriver à la porte principale du parc de Tsavo Ouest. Sur le chemin pour venir, nous avons déjà croisé des babouins et des zèbres, voilà un bon signe !

Sur la route vers Tsavo 
A l'entrée du parc 

Nous entrons enfin dans le parc. Comme prévu, la visibilité n'est pas idéale. Si janvier-février est l'une des meilleurs saisons pour faire un safari car c'est la saison sèche, cette année est un peu exceptionnelle : il pleut un peu tous les jours et donc la saison n'est pas si sèche. Par conséquent, le parc est touffu et feuillu : les herbes sont hautes et les animaux peuvent se cacher facilement; et il y a de la nourriture à foison donc les animaux chassent peu. Nous avançons donc sur la piste de sable rouge au milieu de cette végétation de brousse dense et fleurie. Rapidement, nous croisons des écureuils, des antilopes (dik-dik, impala, kudu), des zèbres et un sacré nombre de beaux oiseaux colorés (dont des choucadors d'un bleu moiré exceptionnel, des pintades et des calao - comme Zazu dans le Roi Lion). Puis, soudain, les premières girafes font leur apparition. Aussi, nous remarquons la présence d'excréments d'éléphants sur la route, ce qui est plutôt bon signe. Nous continuons notre chemin en direction de notre lodge. Et enfin, nous voyons les premiers éléphants "rouges" (du fait de la boue qu'ils se mettent sur le corps), de très près !!! Nous sommes ravis !

Notre arrivée à Tsavo 

Nous arrivons enfin au lodge, après 5 heures de route, pour le déjeuner. Au Kenya, les lodges sont vieillissants et mal entretenus, et malgré les prix élevés, on paye plus pour la localisation que pour le service. Et il faut dire que la vue depuis notre lodge, dominant les collines Ngulia, est fantastique. Nous apercevons même un éléphant au loin, depuis notre chambre.

Les animaux du lodge 

Après le déjeuner, nous repartons pour notre 1ère sortie safari, à la recherche d'autres animaux. A Tsavo, il y a des lions, des léopards, des rhinocéros noirs et des buffles. Bref, il est possible de voir les fameux Big Five. Nous partons donc en direction du Rhino Sanctuary, pour tenter de voir les quelques rhinocéros noirs du parc. Nous allons les chercher longtemps, nous avons même des informations d'autres guides qu'il y en a un qui a été vu, mais jamais nous ne le verrons. Nous sommes un peu déçus, mais cela fait partie du jeu. La nature est imprévisible. Et avec tant de feuillage, impossible de trouver les animaux les plus timides. Mais nous croiserons tout de même des girafes, éléphants, zèbres...

Les habitants de Tsavo 

De retour au lodge, nous profitons de la vue au coucher du soleil. Face au lodge, il y a un point d'eau où les animaux viennent se rafraîchir : mais étant donné que le parc est bien humide à cette époque, ils ne viendront pas cette année.

Pause au coucher du soleil 

Le lendemain, nous nous levons aux aurores pour partir tôt et profiter le plus possible du parc. Comme je le disais, l'avantage de Tsavo Ouest, c'est que même sans avoir beaucoup d'animaux, le parc a une grande diversité de paysages. Nous quittons donc les pistes rouges, pour emprunter une piste noire volcanique, après avoir quand même aperçu, au loin, un buffle !

Tsavo, volcanique 

Puis, nous nous rendons vers la source Mzima, grande source d'eau qui alimente Mombasa en eau ! Ici, nous pouvons faire une partie de la visite à pied, accompagné par un garde armé (car il y a quand même des animaux sauvages). Et nous avons la chance de croiser une colonie de babouins, un crocodile au loin et une famille d'hippopotames en train de se prélasser dans l'eau !

Mzima Springs 

Sur le chemin en quittant le parc, nous avons quand même la chance d'apercevoir une autre merveille naturelle : le sommet enneigé du Kilimanjaro, la plus haute montagne d'Afrique, culminant à plus de 5000 mètres. Celui-ci se situe en Tanzanie, mais nous sommes tout proches de la frontière.

Vue sur le Kilimanjaro 

Nous croisons nos derniers éléphants et dernières girafes, puis une grosse tortue, avant de quitter le parc.

Dernière journée à Tsavo 
12
fév
L'assemblée du lundi matin 

Notre troisième semaine à Taru est mouvementée et bouscule notre routine établie :

  • Il s'agit de la semaine avant les vacances de mi-trimestre, c'est donc aussi la semaine des examens - notre planning est donc bien bousculé, nous nous adaptons en faisant des cours plus ludiques. Avec les filles, je commence quelques cours de danse (c'est un enseignement réciproque).
On tente la pyramide humaine 
Samba pour les filles et foot pour les garçons 
  • Nous avons eu quelques blessés à l'école pendant les cours de sport, il a fallu gérer un petit bobo et quelques larmes. Parmi les larmes, il y a eu celles du petit (je dis "petit" car malgré ses 11 ans, il est haut comme 3 pommes) Daniel (un de nos petits chouchous), en grade 5. Deux fois dans la même semaine. Caroline nous avait dit qu'il avait besoin d'un attention particulière mais nous ne savions pas pourquoi. En règle générale, je préfère ne pas connaître l'histoire personnelle des enfants car je ne pense pas être assez solide pour entendre la dure réalité et par ailleurs, je ne veux pas associer les enfants à cette réalité à laquelle ils peuvent échapper quelques heures par jours en étant à l'école. Ils n'ont pas besoin de compassion mais d'affection et de rires. Comme Daniel pleure pour la deuxième fois cette semaine, je m'aventure à en savoir plus sur son cas, pour que nous puissions être plus à l'écoute. Voilà l'histoire cachée derrière la petite bouille de ce gamin : séropositif, orphelin de sa mère, abandonné par son père, il vit chez le pasteur. Voilà, il n'y a plus qu'à encaisser ! Caroline m'explique que Daniel a particulièrement besoin d'affection. Pour lui, l'école est sa seule famille, un environnement sûr et aimant. C'est le cas de nombreux enfants de Future of Taru, c'est pour cela qu'ils ne sont pas toujours très heureux quand il y a des jours fériés ou des vacances. Concernant le cas des enfants séropositifs, une "bonne" nouvelle tout de même : ils bénéficient d'un traitement financé par le gouvernement. Caroline veille à ce que les enfants prennent bien leurs médicaments. Caroline m'indique également que le petit Daniel a besoin d'un nouvel uniforme (en effet, le sien est plus que troué) : vu le prix (moins de 7€), avec Fernando, nous décidons de le lui offrir... Caroline nous emmène donc chez le pasteur, car c'est sa femme qui fait les uniformes. Quant au petit blessé, il s'agit de Christopher de grade 6 (aussi l'un de nos chouchous) : il est tombé et s'est bien égratigné la genou. Il faut donc arrêter le saignement et bien désinfecter. Il y a une trousse de premiers secours (assez basique) à l'école : nous le prenons donc en charge. Quand nous reportons l'incident à Caroline, elle nous explique aussi l'histoire de ce gamin. Je l'avais lue sur le Facebook de Future of Taru mais je ne savais pas qu'il s'agissait de Christopher. Il est arrivé il y a peu à Taru avec sa mère et ses 4 frères et soeurs, chez le pasteur. La mère y a laissé les enfants pour aller chercher du travail et elle n'est jamais revenue... Cette fratrie se retrouve donc livrée à elle-même, hébergée chez le pasteur. L'aînée est au lycée et le dernier est en grade 1. Christopher fait partie des plus vifs de sa classe (c'est pour cela que nous l'avions repéré). Derrière chaque petite tête de cette école se cache une histoire sombre et toujours difficile à entendre. Et cela devient notre quotidien.
Prise de mesures pour le nouvel uniforme de Daniel 
  • Avec la mort de l'ancien président Moi (qui a été au pouvoir pendant 24 ans...), un jour de deuil national a été déclaré pour l'enterrement (après avoir exposé le corps pendant 3 jours) : mardi, l'école est fermée. Nous en profitons pour faire un tour dans Taru, sous une chaleur de plomb.
Taru, un climat aride 
  • La semaine étant raccourcie avec ce jour en moins, il faut faire passer les examens rapidement. Nous voilà en charge de la surveillance et même de la correction de quelques épreuves. Les conditions d'examen ne sont pas idéales : un sujet pour deux ou trois, idem pour le matériel de géométrie, une chaleur épouvantable... Comme il s'agit de QCM, la correction est rapide. Pour les grade 8, cet examen correspond à notre brevet blanc. En corrigeant l'épreuve de maths (qui nous semble d'un niveau assez basique comparé à notre 3ème), nous nous apercevons du très faible niveau des élèves. Un seul élève atteint tout juste la moyenne. Nous allons devoir travailler en ce sens pour les semaines à venir !
Concentration maximale pour le contrôle de maths 
  • Mercredi, 3 jours avant la fin des inscriptions des grade 8 pour le brevet. Cela se fait en ligne et il s'agit d'une procédure bien fastidieuse. Caroline nous demande notre aide. Nous passons la fin de journée à entrer les noms et les informations des 28 élèves qui représenteront Future of Taru au brevet national cette année. Ceux qui le réussiront pourront ensuite poursuivre leur éducation secondaire.
  • Les bureaux des lycéens sont enfin prêts et la salle des profs va pouvoir récupérer sa table !
Les bureaux des lycéens 
  • Ce que je redoutais le plus de voir est arrivé... Un matin, l'un des professeurs est arrivé avec une élève dans la salle des profs, avec un bâton à la main... Il lui a dit quelque chose sèchement, en kiswahili, avant de lui asséner 4 violents coups sur les jambes. La petite fille, qui doit avoir à peine 6 ans hurlait. J'étais témoin de la scène, horrifiée. Il a ensuite envoyé la petite fille en classe. Puis, il s'est tourné vers moi et a dû voir ma tête pétrifiée, et il m'a expliqué qu'il s'agit de sa fille et que celle-ci était restée à la maison au lieu d'aller à l'école. Il avait donc dû aller la chercher. J'ai été, en partie, rassurée, car le châtiment corporel est interdit depuis peu à l'école au Kenya. Mais cela montre qu'à la maison, les enfants en subissent tout autant. Je ne suis pourtant pas de ceux qui sont contre les fessées, mais la différence de violence avec un bâton m'a choquée.

Quand on y pense, c'est ce qu'il se passait à l'école en France à l'époque de nos grands-parents. Mais, d'ailleurs, après 3 semaines à Taru, c'est une remarque que l'on peut généraliser : le système éducatif au Kenya ressemble à celui qu'on avait il y a 60 ans ! En effet, si les enfants sont très disciplinés, ils apprennent tout par cœur et répètent mot pour mot ce que leur enseignent les professeurs. Et je doute que tous comprennent ce qu'ils apprennent. Combien savent lire sans comprendre ce qu'ils lisent ? Il s'agit d'accumuler un maximum de connaissances et non de les comprendre. En France, l'éducation a beaucoup progressé sur ce point, surtout avec les nouvelles méthodes éducatives telles que Montessori : aujourd'hui, il s'agit plus d'apprendre à penser, à débattre, à réfléchir, à parler en public, à se présenter, à chercher des informations et surtout à apprendre par soi-même. C'est ainsi qu'on forme la prochaine génération, ce qui permet de stimuler l'entrepreneuriat et l'innovation. Au Kénya, on est encore loin de tout ça. Et on ne peut pas rejeter la faute sur les professeurs qui suivent le programme officiel. Par chance, Caroline est consciente de cela et a un réel souhait de sortir du cadre. Surtout que, ne l'oublions pas, la plupart des élèves de Taru ne suivra pas d'éducation secondaire : il est donc indispensable, s'ils veulent s'en sortir par la suite, de leur donner cette capacité d'apprendre en autonomie et de stimuler leur curiosité. Avec nos quelques cours hors programme scolaire, c'est ce que nous essayons de faire. Caroline nous encourage et nous soutient dans nos initiatives. Elle aimerait faire plus en ce sens, mais l'école manque cruellement de professeurs. Par conséquent, les 8 professeurs actuels n'ont pas le temps de créer des activités hors programme. Quant à Caroline, elle est débordée par toutes les fonctions qu'elle doit assumer en même temps : directrice d'école qui doit affronter, mère de plus de 270 élèves, manager d'équipe, jeune maman d'une petite fille de 7 mois qu'elle allaite... Mais, quand elle m'en parle, malgré la fatigue et la pression, elle a les yeux qui brillent : la passion et la foi l'animent.

Bref, ce ne sont pas les challenges qui manquent : l'agrandissement de l'école, l'ouverture du lycée, la qualité des cours, le recrutement, la nourriture, le suivi personnel de chaque enfant... et l'école ne vit que de dons et de faibles frais de scolarité que tous les parents n'ont pas encore payés. Après une longue discussion avec Paul, Eunice et Caroline, nous avons décidé que l'argent de notre cagnotte servira à payer la nourriture de l'école pour une semaine.

PS : Si vous avez donc tout suivi, nous partons dès jeudi après-midi pour quelques jours de vacances pour recharger nos batteries avant d'attaquer la deuxième partie du trimestre avec un nouvel emploi du temps et des nouveautés !!

17
fév

Après une dernière matinée d'examens à l'école, les vacances commencent. Nous avons une dizaine de jours et nous avons décidé d'aller découvrir la côte et de profiter de ses belles plages sur l'océan Indien.

Pour y arriver, il faut un peu de patience. Depuis Taru, il faut prendre un matatu (minibus) pour Mombasa. Le trajet dure environ 2 heures (pour 80km), sur cette route toujours encombrée de camions. Pour rappel, il s'agit de la principale route du pays et ce n'est qu'une 2 voies. Les dépassements sont fréquents mais toujours risqués... Jusqu'à présent, les matatus ont toujouts été honnêtes avec nous en nous donnant toujours le bon prix. Il faut dire que des touristes qui prennent un matatu, ce n'est pas chose courante. Nous sommes toujours les seuls blancs.

Une fois à Mombasa, direction la banlieue de Bamburi-Nyali (où nous avons déjà passé un week-end) pour y passer la nuit, ce qui nous évite un voyage trop long. Le lendemain matin, nous voilà de nouveau sur la route reliant Mombasa à Malindi pour attraper un autre matatu. Là encore le trajet dure 2 heures pour rejoindre Watamu. La route est en meilleur état, mais le trajet est long quand le véhicule s'arrête pour remplir les sièges vides. Nous traversons quelques villages avec de vraies cases en terre et des champs de palmiers. Après 2 heures, nous descendons du matatu à Gede d'où une route permet de rejoindre Watamu à 3km de là. Pour faire ce dernier tronçon, nous prenons un tuk-tuk.

Arrivée à Watamu en tuk-tuk 

1er jour

Notre arrivée à Watamu est un peu décevante. Tout d'abord, notre guesthouse est bien isolée du centre (il faut prendre une piste pour y accéder). Par ailleurs, si sur la carte apparaissait une route principale qui longeait la plage et où se concentraient les hôtels et autres points touristiques, la réalité est quelque peu différente. De cette fameuse route, on ne voit pas du tout la plage. Elle est en fait bordée de végétation et de resorts qui cachent totalement la vue de la mer. Il s'agit donc d'une route banale, très longue et avec beaucoup de circulation, donc peu agréable à marcher. Et aucun commerce. Bref, nous comprenons que pour quelque déplacement, nous allons devoir opter pour un tuk-tuk ou une moto, appelée boda-boda (oui, ça passe large à 3 !).

A 3 sur la moto 

Nous accédons finalement à la plage en passant par l'entrée d'un resort. Et le panorama nous réconcilie avec Watamu : sable fin et blanc qui s'étend sur des kilomètres, eau aux différents tons de bleu, et cocotiers !! Et contrairement à Bamburi, aucun rabatteur ni vendeur ne vient nous vendre quoique ce soit. On peut donc profiter tranquillement de la plage où se mêlent touristes des resorts, touristes plus modestes (comme nous) et locaux. A noter qu'ici, les marées sont très fortes et changent énormément le paysage. En marchant sur la plage jusqu'au bout, nous rejoignons finalement le petit centre ville de Watamu.

Plage de Watamu à marée basse

Watamu est une station balnéaire italienne : entre les pizzerias, les glaces et la quantité de touristes italiens, on se croirait presque en Sardaigne. On s'est demandé pourquoi et finalement, on a appris que l'Italie avait colonisé la Somalie, l'Erythrée et était descendue jusque sur la côté kényane avant de se faire dégagée par les Britanniques. Mais du coup, ils ont eu le temps de s'installer entre Watamu et Malindi. Par conséquent, même les locaux parlent quelques mots d'italien voire couramment. D'ailleurs, les vendeurs nous abordent en italien avant de passer à l'anglais. Mais, à part pour la gastronomie, je ne suis pas certaine que l'influence italienne soit très bonne sur la population locale : alcool, drogue, prostitution (on voit aussi bien des gros vieux avec de jeunes locales que des vieilles peaux avec leur "beach boy")... la mafia semble aussi être arrivée jusqu'ici.

L'Italie à Watamu 

Hormis cette présence italienne, Watamu me rappelle les villages des Philippines. Ici, pas de baraquements en tôle, mais plutôt en un mélange de terre (comme des cases traditionnelles), au milieu des palmiers et des poules.

Pour notre dîner de Saint-Valentin, direction le fameux restaurant Crab Shack, dont le crabe est la spécialité. Il est situé dans une mangrove, dans Mida Creek. C'est le gardien de nuit qui nous y emmène en moto, sous un ciel étoilé magique ! En arrivant, nous apprenons que le restaurant est fermé car il y a une soirée privée; mais face à notre déception, le manager nous trouve une table à l'écart. Dîner privé donc, dans un cadre magnifique et avec d'excellents produits de la mer.

Dîner au Crab Shack 

2ème jour

Nous avons rendez-vous aux aurores avec un guide pour une balade en kayak dans la mangrove de Mida Creek. L'eau est calme, le lieu est paisible. Nous naviguons dans cette immense mangrove, empruntant des canaux étroits, en passant entre les arbres. Un enchantement ! Sachant que nous sommes seuls... En milieu de parcours, nous faisons un arrêt pour marcher et s'enfoncer dans la mangrove et découvrir une plage avec des milliers de petits crabes. Nous en profitons pour se rafraîchir dans l'eau. Mida Creek est en réalité un bras de mer qui entre dans les terres; le paysage change plusieurs fois par jour selon les marées. Notre tour de 2 heures se termine sur une belle petite plage paradisiaque.

Kayak dans la mangrove de Mida Creek 

Après cette balade, direction le centre de conservation des tortues. A Watamu, il existe de nombreuses initiatives écologiques pour protéger l'environnement : ce centre en fait partie en sauvant les tortues, car la plage de Watamu est un lieu important de reproduction et de nidation. La visite commence par une introduction sur la pollution de la mer et les dangers humains pour les tortues. Mais nous n'irons pas plus loin... Je me sens tout à coup défaillir : je ne tiens plus sur mes jambes, je suis pâle, mes lèvres sont blanches... Je demande à m'asseoir. Par chance, à ce moment-là arrive Candace, la femme du manager du centre. Elle me fait asseoir et m'apporte de l'eau. J'ai tous les symptômes d'une grande déshydratation. Et pour cause, je n'ai quasiment rien bu de la matinée. Candace me donne également des sels de réhydratation. Le temps de me remettre sur pied, nous discutons un peu avec cette Sud-Africaine. Et Fernando a la bonne idée de lui parler de la piqûre que j'ai sur le bras. En effet, la veille au déjeuner, j'ai senti une vive piqûre; et ce matin, au réveil, c'était enflé, dur et rouge. Comme j'ai une tendance à réagir vivement aux piqûres, j'ai pris un anti-histaminique sans m'inquiéter plus que ça, en pensant que ça allait passer. Mais lorsque Candace jette un coup d'oeil, elle me conseille de me rendre immédiatement à l'hôpital : il s'agit d'une piqûre d'araignée et de par son expérience dans les pays tropicaux, j'ai besoin d'antibiotiques. Elle nous rassure sur la qualité des soins de l'hôpital de Watamu. L'idée de tester l'hôpital au Kenya me réjouit guère mais bon, il semblerait que ce soit plus raisonnable. Et pour une fois, je ne suis pas seule. Avant de partir, elle me donne aussi une petite fiole d'huiles essentielles à appliquer sur la piqûre. Il semblerait que Candace fasse partie de ces anges que je rencontre régulièrement sur ma route pour me protéger.

Nous voilà donc embarqués sur une moto direction l'hôpital. La structure est vieillotte mais convenable. Je suis accueillie par une infirmière froide et peu empathique; j'ai un peu l'impression de la déranger. Après avoir pris mon nom, prénom et âge, elle me prend la température et la tension. Puis, je rencontre la docteur, à peine plus aimable. Mais celle-ci me rassure : je ne suis pas en danger; si l'araignée avait été venimeuse, je serai à l'heure actuelle en bien plus mauvaise posture. Ma faiblesse de la matinée est bien dû à la déshydratation. En revanche, elle me prescrit quand même antibiotiques et cortisone pour la piqûre. Nous récupérons les médicaments à la pharmacie de l'hôpital, avec une pharmacienne tout aussi aimable que l'infirmière et que la docteur.

A l'hôpital de Watamu 

Le reste de la journée est donc bien compromis. Si je me sens mieux, je me sens encore très faible. Nous allons donc acheter de l'eau et déjeuner pour me requinquer. Heureusement, nous sommes dans une ville italienne : je trouve une bonne glace au chocolat pour me redonner le sourire !

Finalement, plus de peur que de mal ! Mais ce petit incident me fait mettre une croix sur la plongée que je prévoyais de faire dans le parc national maritime de Watamu, où on peut apercevoir des requins-baleines. Avec un traitement médical et une déshydratation, il ne serait pas prudent d'aller plonger. Un effet secondaire ou des vertiges, à 20 mètres de profondeur, mieux vaut éviter ! Ça me servira de leçon !

3ème jour

En revanche, aucune contre-indication pour une journée de snorkeling. C'est donc l'activité pour laquelle nous optons le dimanche. Après s'être acquittés des frais d'entrée de la réserve marine (parc national), nous montons à bord d'un bateau avec une vingtaine d'autres touristes pour un "safari" maritime. A Watamu, on vante la grande probabilité de voir des dauphins. Avec ma chance légendaire, je n'y crois pas trop (pour rappel, quand je suis allée en Nouvelle-Zélande, il y avait 99% de chance de les voir... et bien je faisais partie du 1% restant...). Quoiqu'il en soit, cela reste une bonne sortie en mer, c'est toujours agréable. Et tout à coup... on aperçoit des ailerons au loin. Le bateau fonce dans leur direction. Et là, c'est tout un groupe de dauphins que nous croisons. Et ils décident même de rester autour du bateau pour jouer. Ils sont vraiment très près. Le spectacle est merveilleux, j'en ai des frissons et les larmes aux yeux. Nous les observerons pendant plus de 15 minutes, avant qu'ils ne reprennent leur route. Ensuite, le bateau repart vers des spots de snorkeling. Bon, soyons honnêtes : certes, l'eau est très claire et la visibilité est bonne, il y a quelques beaux poissons, mais rien d'exceptionnel non plus. D'autant que nous sommes nombreux dans l'eau, donc on croise plus de grosses baleines blanches brûlées par le soleil que de beaux spécimens aquatiques.

Sortie en mer à la rencontre des dauphins
Si près de nous !!! 
Plage de Watamu à marée haute 

4ème jour

Pour notre dernière journée à Watamu, nous commençons par la visite des ruines de Gede, à quelques 5km de là. Il s'agit d'une cité swahilie disparue au XVIIème siècle, après plus de 5 siècles de vie. Les raisons de sa disparition ? Guerres, épidémie, famine, manque d'eau... autant de théories, mais on ne sait pas vraiment la vérité. Aujourd'hui, il n'en reste que quelques pierres au milieu de la forêt tropicale qui reprend ses droits (ça a un petit air d'Angkor Wat), sans grand intérêt. Le musée adjacent abrite les objets du monde entier qui y ont été retrouvés : porcelaine de Chine, objets d'Europe, pierres d'Inde... Bref, cette cité était cosmopolite.

Ruines de Gede 

Ensuite, direction le centre de conservation des tortues dont notre précédente visite avait été brusquement interrompue par mon état de santé. Nous reprenons notre visite où nous l'avions laissée, car il s'agit de la même guide. La visite consiste en quelques panneaux explicatifs ludiques, faits à base de matériaux recyclés trouvés sur la plage (bouchons de bouteilles, tongs...) et de "l'hôpital" où sont soignées les tortues malades avant de les remettre à la mer. Aujourd'hui, il n'y en a qu'une seule. Et ironie du sort : elle souffre de déshydratation elle-aussi ! Le centre est géré par une ONG locale qui a commencé son action en 1997 alors que la nidation des tortues sur les plages de Watamu était en danger. Aujourd'hui, son champ d'action est bien plus vaste : reforestation de la mangrove, nettoyage de plage, réhabilitation des tortues, éducation et engagement de la population locale, lutte contre le braconnage... Pour ceux que ça intéresse, vous trouverez plus d'informations ici. J'en profite pour remercier Candace et lui redonner son petit flacon d'huiles essentielles.

Centre de conservation des tortues 

Dans l'après-midi, nous reprenons le chemin de la plage. Fernando se teste à la planche à voile dans un cadre paradisiaque (il s'est très bien débrouillé !!!) pendant que je me dore la pilule tranquillement au soleil.

Activités de plage 

Sur cette plage, ce qui est un peu choquant, c'est la différence de niveau de vie entre les touristes ultra-riches allant dans ces resorts de luxe (certains arrivent même en hélicoptère - pour vous donner une idée du "ultra-riche") et les locaux, principalement des pêcheurs, survivant de leur activité.

Notre séjour à Watamu se termine dans notre restaurant italien quotidien (l'un des seuls qui soient vraiment abordables). Demain, nous partons un peu plus au nord !

PS : je vais beaucoup mieux. Je m'hydrate bien tous les jours et ma piqûre a bien désenflé. Je fais bien attention à moi, soyez rassurés !

18
fév

Après notre séjour actif à Watamu, nous reprenons la route vers le nord, direction Malindi, à seulement 30 minutes en matatu (avec porte qui se détache) de Watamu. Le matatu nous arrête tout juste devant notre hôtel, car ce dernier se situe sur la route principale, face à l'aéroport d'où nous décollerons le lendemain matin. Il s'agit donc plus d'une étape pratique que touristique. Mais comme on nous a souvent parlé de Malindi comme LA colonie italienne par excellence, nous pensions que ça valait le détour.

Mais dès que nous arrivons dans le centre, nous sommes pris dans le tumulte des tuk-tuks et du trafic bruyant, des gens nous saluant de toute part, certains par pure courtoisie, d'autres pour nous vendre n'importe quoi. On est bien loin de l'ambiance décontractée "chill" de Watamu. Avec son agitation, son grand nombre de mosquées et une influence musulmane notable, Malindi nous rappelle tout de suite Mombasa, en plus petit. Ici aussi, on peut remarquer l'influence portugaise. Et pour cause, Vasco de Gama a débarqué à Malindi 6 jours après avoir "découvert" Mombasa, en 1498. Un pilier à son nom, portant la croix de Lisbonne se dresse sur la mer pour nous le rappeler. D'ailleurs, la mer... Malindi a également une grande plage et une réserve marine. Mais quelle déception lorsque nous apercevons la couleur de la mer, sachant qu'à 30 km au sud, les plages sont paradisiaques. Nous continuons notre exploration sous un soleil de plomb, le long d'une route sablonneuse, avec le doux bruit des klaxons de tuk-tuk...Nous passons la petite chapelle portugaise ainsi qu'une maison à colonnes typiquement swahilie. Et voilà, nous avons fait le tour des points d'intérêt de la ville... Nous sommes maintenant en plein centre, vibrant et chaotique.

Monuments historiques de Malindi 
Dans les rues de Malindi 

Avant de nous rafraîchir avec un jus de fruits frais, nous passons par une boutique pour déposer de l'argent sur notre compte M-Pesa. N'ayant pas grand chose de plus à raconter sur Malindi, je vais donc faire un aparté sur ce système qui fait la fierté des Kényans. M-Pesa est un service de transfert d'argent par téléphone portable. Il fonctionne comme un compte en banque, sans frais. Via cette application, on peut déposer de l'argent sur son compte, transférer de l'argent vers un autre compte (et donc payer n'importe quelle prestation). L'usage de la carte de crédit est limité au Kénya et c'est le système M-Pesa qui le remplace. Avoir un compte M-Pesa est pratiquement indispensable pour un long séjour au Kénya. Comme la carte n'est pas acceptée partout et qu'il n'ya pas toujours de distributeurs des 3 banques qui ne nous prennent pas de frais, par précaution, nous retirons toujours de grosses sommes d'argent quand on le peut. Je dois dire que M-Pesa est assez pratique : plutôt que de se promener avec ces grosses sommes en liquide, on peut laisser notre argent sur ce compte virtuel et l'utiliser facilement pour régler n'importe qui. Car le système est très répandu dans le pays et presque tout le monde accepte les paiements par M-Pesa. Pour ouvrir un compte M-Pesa, il suffit tout simplement d'avoir une carte sim de l'opérateur principal, Safaricom. D'ailleurs, c'est aussi via ce système qu'on peut aussi recharger notre carte sim avec du crédit. C'est un système novateur et assez avancé pour un pays comme le Kénya. Son succès est tel qu'il s'est développé dans d'autres pays comme la Tanzanie ou la RDC.

Bref, revenons à Malindi ! Concernant l'influence italienne, cela était vrai il y a quelques années mais il semblerait que les Italiens aient décidé d'aller s'installer à Watamu. Alors certes, il y a quelques restaurants italiens (ce qui nous permet d'aller manger une glace), mais rien de plus qu'à Watamu.

C'est plus tard dans la journée que nous comprenons qu'il existe une autre plage, au sud du centre ville, où sont concentrés les gros resorts. Celle-ci devait certainement être jolie... Mais nous n'aurons pas le temps de vérifier.

Bon, vous l'aurez compris, Malindi ne nous a pas séduits. Heureusement, nous n'y restons pas : demain déjà, nous nous envolons ailleurs pour nos derniers jours de vacances !

23
fév

Après une nuit suffocante et pleine de moustiques, nous sommes heureux de quitter Malindi au plus vite. Pour cela, direction le petit aéroport, un simple bâtiment, avec un contrôle de sécurité rapide et 3 comptoirs d'enregistrement à peine informatisés. L'attente est longue à l'aéroport et notre vol a 30 minutes de retard, ce qui est un peu rageant quand on sait que le vol lui-même dure 30 minutes... Enfin, nous embarquons dans un petit appareil orange pour notre dernière étape : Lamu !

De Malindi à Lamu

Alors, avant tout, un petit point sur "Lamu" qui désigne à la fois un archipel, une île et une ville... L'archipel de Lamu est situé sur la côté nord du Kénya, tout proche de la frontière avec la Somalie. Il est composé de 4 îles principales, dont la plus grande appelée Lamu. Et sur l'île de Lamu, la ville principale est Lamu. J'espère que c'est clair !

Nous avons longtemps hésité à nous rendre à Lamu, car la destination est déconseillée en raison de la proximité avec la Somalie et l'activité terroriste du groupe Al-Shabab dans la région (visant surtout les militaires américains). Mais Lamu est aussi classée au patrimoine mondial de l'UNESCO et semble être un havre de paix. Alors, nous avons pesé le pour et le contre, nous nous sommes informés sur les dernières attaques et nous avons décidé de tenter.

1er jour

L'avion se pose sur l'île de Manda, juste en face de Lamu : une courte traversée en bateau permet de rejoindre la ville de Lamu. Arriver par la mer nous donne tout de suite un bel aperçu de la ville et de son architecture typiquement swahilie.

Arrivée à Lamu 

Nous débarquons sur l'île et arrivons directement à notre hôtel, swahili également, et donnant sur la mer. Un vrai luxe ! Il ne faut que quelques minutes pour se faire envoûter par le charme pittoresque de Lamu : pas de véhicule motorisé (enfin presque, seulement quelques rares motos), uniquement des ânes, une belle architecture, un panorama relaxant, une douce brise... Nous avons l'impression d'être ailleurs, et hors du temps. Si Lamu est patrimoine mondial, c'est justement pour son héritage swahili.

Vue de notre hôtel
Les ânes de Lamu 

Petit aparté sur le terme swahili : les Swahilis sont littéralement "les habitants de la côte "(sahil signifie côte en arabe), de langue bantoue, ayant adopté l'islam comme religion de par l'influence des marchands arabes (la côte de l'Afrique de l'Est étant un point de passage important dans le commerce). Les Swahilis parlent le kiswahili.

A notre arrivée, nous commençons par la visite de la vieille ville de Lamu : dédale de ruelles animées, belles bâtisses swahilies, portes en bois sculptées aux multiples influences, femmes voilées (intégralement) et hommes en djellabas, défilé de boutres (bateau traditionnel arabe) au large, rencontre avec les ânes (il faut faire attention où on met les pieds...). Lamu sait particulièrement bien mettre en valeur son patrimoine historique, avec, entre autre, son musée qui expose de nombreux objets de la culture swahilie. Nous visitons également le fort de Lamu, derrière le marché, qui aujourd'hui abrite une bibliothèque dans cette ancienne prison.

Portes de Lamu 
Dans les rues de Lamu 
Marché et fort de Lamu 

2ème jour

Nous continuons notre découverte de Lamu à pied, vers le sud de l'île, pour rejoindre la plage de Shela. Il faut environ 40 minutes pour rejoindre cette plage, par un chemin semi-bétonné, le long de la mer. Si les habitants de Lamu attachent de l'importance à mettre en valeur et à préserver leur culture, il n'en va pas de même pour l'environnement : la marée basse laisse des tas de déchets plastiques sur la rive... En revanche, nous remarquons la sympathie des habitants de l'île. Tous nous saluent et nous sourient, sans chercher à nous vendre quoique ce soit. Au début, nous hésitions à répondre de peur de ne pas pouvoir se débarrasser d'un quelconque vendeur; mais finalement, nous comprenons que c'est de la pure courtoisie. Ils semblent être contents d'avoir des touristes sur leur île. Et pourtant, en ville, de nombreux panneaux avisent les touristes d'adopter une tenue décente (c'est-à-dire éviter d'être en maillot de bain; et pour les femmes, ne pas trop en montrer...) pour respecter les traditions et croyances locales : je comprends tout à fait, mais il faut rappeler que nous sommes sur une île, avec de belles plages et qu'il fait 35°... alors difficile de ne pas se mettre en short et en débardeur ! Cependant, les habitants, malgré leur radicalisme religieux, paraissent être assez ouverts d'esprit : s'ils me regardent quand je passe dans la rue en short, je ne sens pas d'animosité ou de malveillance dans leur regard, mais plutôt de l'étonnement ou de la curiosité.

De Lamu à Shela 

Shela est le lieu le plus touristique, où sont les gros hôtels plus luxueux, loin de l'authentique Lamu. La plage s'étend sur plus de 10 km, alors il est assez facile de trouver un coin tranquille pour se poser et profiter de la mer. Ici, aucun rabatteur, aucun vendeur, seulement quelques passants. C'est donc très agréable pour se reposer. Quant au village, il est essentiellement composé d'hôtels et de maisons en roche corallienne.

Plage de Shela 
Dans les rues de Shela 

De retour à Lamu (ville) en fin d'après-midi, nous embarquons sur un boutre pour une petite croisière au coucher du soleil. Depuis notre arrivée, un homme, Babu, ne cesse de nous approcher dans la rue pour nous proposer une visite de la ville ou un tour en bateau. Nous étions sur la défensive, car les guides touristiques et les blogs préviennent qu'il y a de nombreuses arnaques à ce sujet : mieux vaut passer par une recommandation que par n'importe qui. Mais, comme il nous aborde pour la 3ème fois et qu'il nous propose cette croisière à un très bon prix, nous décidons d'accepter son offre : au pire, cela ne représente pas beaucoup d'argent; au mieux, on aura trouvé un capitaine pour d'autres excursions pour les jours à venir.

Et nous avons bien fait : nous profitons de 3 heures à bord, avec quelques samossas maison, en naviguant uniquement grâce au vent qui gonfle la grande voile en coton de ce boutre traditionnel et rustique en bois de mangrove. Les deux marins sont jeunes mais habiles et expérimentés : ils manient la voile avec adresse et force, sans aucune aide "technologique". Le bateau semble rafistolé de toute part, mais il est puissant et costaud. Les marins, qui sont, en réalité des pêcheurs, nous expliquent qu'ils font même des régates avec cette embarcation. Le soleil se couche peu à peu à l'horizon et nous sommes de plus en plus sous le charme de l'archipel.

Croisière en boutre

3ème jour

Journée à bord d'un boutre, encore plus simple que la veille ! C'est Babu qui nous a organisé la journée avec un pêcheur local, qui semble quelque peu sous effet de la marijuana qu'il fume... Nous naviguons dans le bras de mer entre l'île de Lamu et l'île de Manda. Le pêcheur me laisse la barre, lui s'occupe de la voile. Nous allons jusqu'à la plage de Manda pour faire du snorkeling (encore une fois, assez décevant), et nous baigner. Pendant ce temps, notre capitaine nous prépare un délicieux repas : gros maquereau grillé (tout frais de la pêche du matin), chapatis, sauce à la coco... Un vrai régal !!! Nous continuons la navigation dans l'après-midi, du côté de la mangrove de Manda.

Journée autour de Manda 

Pour le dîner, nous allons chez un ami de Babu, rencontré la veille : il nous a proposé de dîner chez lui, des repas locaux préparés par sa femme pour 1500 shillings. Comme c'est notre budget moyen pour un restaurant, nous avons accepté en nous disant que ça aidait sa famille. Nous le retrouvons donc chez son père. Nous nous installons par terre et il nous sert 6 plats différents et un thé au gingembre. Le repas est très bon et copieux. Il nous parle de sa vie à Lamu, de la baisse du tourisme liée au terrorisme, de la pauvreté des locaux... Et au moment de partir, nous sommes victimes d'une nouvelle arnaque ! Le prix convenu de 1500 shillings est doublé : il nous explique que nous avons mal compris et que c'est le prix par personne, ce qui revient à presque 30€, soit un très bon restaurant. Nous commençons à discuter, mais étant chez lui, nous ne sommes pas en position de force. Nous lui donnons donc ce qu'il demande, non sans lui dire ce que nous pensons : il dessert totalement le tourisme à Lamu, nous ferons de la mauvaise publicité et nous espérons qu'il fera bon usage de cet argent. Un peu plus tôt, il nous avait dit qu'il allait souvent prier pour espérer sortir de la pauvreté... Mais à quoi bon prier et aller à la mosquée / église si c'est pour voler par la suite ? Nous sommes très déçus, une fois de plus par cette attitude (d'autant qu'il sait que nous faisons du volontariat)... Nous avions oublié que nous n'étions pas à Taru mais dans un lieu touristique. Et comme dans de nombreux lieux touristiques, le tourisme pourrit la mentalité des locaux, surtout le tourisme de luxe qui accentue l'énorme différence de niveau de vie.

Repas local 

4ème jour

Pour notre dernière journée à Lamu, nous avions prévu une nouvelle excursion en bateau avec Babu. Mais avec l'arnaque de la veille, le coeur n'y est plus. Nous sommes déçus et nous n'avons plus confiance. Quand nous le croisons dans la matinée, nous lui expliquons ce qui s'est passé et que par conséquent, nous annulons notre sortie. Il est dépité, car c'est un manque à gagner pour lui... Et oui, voilà les conséquences des arnaques... Cela nuit plus aux autres locaux qu'aux touristes mêmes.

Nous restons donc dans Lamu, à nous promener; et dans l'après-midi, nous repartons profiter de la plage de Shela. Et ainsi, nous clôturons notre 1er mois au Kenya !

Nous devons maintenant repartir vers Taru pour reprende l'école demain. Un long voyage retour nous attend...

27
fév

Après 10 jours de vacances, nous revoilà à Taru. Pour être honnêtes, ça nous manquait un peu. C'est un vrai plaisir de rentrer "à la maison". A notre arrivée le dimanche soir, Mama Chiro est ravie de nous revoir : ça lui faisait un vide dans la maison et on lui avait manqué. Nous rencontrons son fils aîné, Kevin (celui qui est en pension dans une école spécialisée pour les sourds) qui est également en vacances. Ce petit garçon de 9 ans a un regard perçant, un sourire communicatif et fait preuve d'une grande curiosité.

A l'école aussi, notre retour est très apprécié : les enfants sont heureux de nous revoir, les professeurs aussi. Contrairement à chez nous, les enfants sont plus qu'heureux de reprendre l'école, car, pour eux, les vacances sont souvent ennuyeuses voire tristes. Certains préfèrent être à l'école que dans leur famille...

La rentrée est mouvementée et riche en événements :

  • Une compétition sportive entre écoles est organisée et elle dure 1 mois : les élèves doivent donc se préparer à affronter les autres écoles dans des disciplines athlétiques (course, lancer de javelot, saut en longueur...).
  • De notre côté, nous avons décidé de faire une fête pour notre départ dans 4 semaines : nous allons préparer un carnaval ! Certes, il aura lieu un peu tard, mais pour les enfants, c'est une première. La plupart ne connaisse même pas le concept d'un carnaval. Quand on leur annonce le projet, leur visage s'illumine d'une large sourire. Pour notre carnaval, on se débrouille avec le peu de moyens de l'école pour faire faire des masques aux plus grands (de grade 4 à 8). Nous sommes surpris par l'engouement général suscité par cette création : nous n'avons jamais vu les enfants aussi concentrés et silencieux; particulièrement les grade 7 qui sont généralement les élèves les plus dissipés. Mais, en effet, le dessin et le coloriage sont des techniques ancestrales de méditation (d'où la mode des mandalas) et il semblerait que ce soit très efficace avec eux !
Création de masques pour le carnaval 
  • Pour l'organisation du carnaval, nous impliquons également les plus petits avec de la danse !
Premier essai de danse avec les grade 3 
  • Comme promis, nous offrons, grâce à l'argent de la cagnotte, une semaine de nourriture pour l'école. Nous allons acheter les provisions chez Moha, l'épicier de Taru. Pour information, la cagnotte est toujours en ligne et l'argent récolté servira à la construction de nouvelles toilettes.
Achat de la nourriture chez Moha pour les repas de l'école 
  • Le petit Daniel a son nouvel uniforme !
  • Avec les grade 8, nous développons une relation de plus grande confiance. Après leur avoir raconté nos parcours respectifs ( Fernando et sa venue en France; moi et mes voyages), ils sont de plus en plus curieux et se rapprochent de nous. Ils nous demandent déjà de revenir l'année prochaine.
Avec les grade 8 
  • Une élection d'un conseil des élèves est mise en place, ce qui stimule l'esprit citoyen des enfants. Après 2 jours de campagne, les enfants sont appelés à voter pour 7 élèves qui formeront le conseil.
Élection du conseil des élèves 
Elections du conseil des élèves 
  • En milieu de semaine, les résultats des examens de mi-trimestre sont rendus. Pour l'occasion, tous les élèves sont rassemblés et les 3 premiers de chaque classe sont appelés pour être applaudis. Aussi, grâce au peu de matériel scolaire que nous avions amené avec nous (quelques crayons, stylos et gommes), ces élèves reçoivent une "récompense".
Rassemblememt général 
Le trio de tête de chaque classe 
  • Nous donnons aussi notre premier cours d'informatique aux professeurs pour qu'ils puissent, par la suite, utiliser Internet comme ressource d'enseignement.
Cours d'informatique pour les profs 

Nous terminons ainsi notre 4ème semaine à Taru. La semaine de rentrée a été chargée et nous sommes fatigués, d'autant que les nuits sont difficiles à cause de la chaleur pesante. Mais les enfants nous communiquent leur énergie quand nous en avons besoin !

1
mars

Ce week-end, nous prenons notre vendredi pour avoir un peu plus de temps, car nous nous rendons dans le parc national d'Amboseli et il est loin de Taru.

De Taru, direction Miaseny, la gare la plus proche (où nous sommes arrivés le premier jour). Nous pensions y aller en matatu, mais par chance, quand nous en avons parlé à Caroline, elle nous a fortement déconseillé cette solution : non seulement la gare de trouve à plus de 2km de la ville, mais en plus, le chemin qui y mène longe le parc de Tsavo Est et donc il est possible de rencontrer des animaux sauvages... et oui, parfois nous oublions que nous sommes en Afrique ! Caroline nous arrange donc une voiture avec chauffeur pour nous emmener à la gare. De Miaseny, nous avons 3 heures de train pour rejoindre Emali, qui se trouve à l'ouest, en direction de Nairobi. A Emali, nous retrouvons Edison, notre guide (c'est avec lui que nous avions fait Tsavo), accompagné d'Edmo, son ami qui conduit un gros 4x4 avec toit ouvrant, le véhicule idéal pour un safari.

D'Emali, nous empruntons une route qui mène vers la Tanzanie, au sud. Très vite, apparaît en arrière-plan, le cratère enneigé du Kilimanjaro. Après 1h30 de route asphaltée, le terrain change et la route devient cahoteuse, au milieu de la brousse.

Soudain, au milieu de la route, se dressent deux silouhettes, élancées et grandes, vêtues d'une "toge" rouge : deux Massaïs nous attendent pour nous emmener dans leur village. Me voilà une fois de plus dans un épisode de "Rendez-vous en Terre Inconnue" !

Dans cette zone frontalière avec la Tanzanie s'étend le territoire des Massaïs, la tribu la plus connue du Kenya et surtout la plus remarquable de par la tenue vestimentaire de son peuple. Depuis notre arrivée au Kenya, nous en avions déjà vu quelques uns, hors de leur territoire : il s'agit souvent de Massaïs partis vers les villes pour vendre des souvenirs aux touristes. Mais, où qu'ils soient, ils n'abandonnent jamais leur costume traditionnel. En général, la "toge" est accompagnée de multiples bijoux colorés en perles et d'un bâton de marcheur (souvent en ébène).

En terre massaï, il existe quelques villages qui accueillent les visiteurs, mais souvent très touristiques et peu authentiques. La plupart des touristes profitent d'un safari dans le Massai Mara, le parc national le plus connu et le plus fréquenté, pour passer dans ces villages. Pour ceux qui suivent mes voyages depuis longtemps, vous savez que c'est tout ce que je déteste. J'ai toujours très envie d'aller à la rencontre de ces peuples traditionnels, mais pas de manière superficielle. Edison nous a donc trouvé un village authentique, qui, certes, a l'habitude d'accueillir des touristes de temps à autre, mais qui ne vit pas du tourisme. Il s'agit d'un vrai village d'éleveurs (les Massaïs sont des bergers semi-nomades).

Dans ce village, nous sommes accueillis par James, Modes et Peter, trois frères qui parlent très bien anglais car ils sont tous allés à l'école. La caractéristique la plus surprenante chez les Massaïs est leur habilité à combiner modernité et traditions : ils arrivent à s'adapter au monde moderne, à évoluer avec leur temps tout en conservant des traditions ancestrales. Au Kenya, il est courant de voir un Massaï avec un smartphone. La plupart des Massaïs sont éduqués ; certains ont même été à l'université avant de revenir dans leur village.

Le village que nous visitons se trouve juste devant le Kilimanjaro. Il est composé d'une quarantaine de maisons de terre autour des enclos à vaches et à chèvres : 120 personnes mais seulement 4 familles... Car les Massaïs sont polygames ! Le père de nos hôtes a 5 femmes et 21 enfants ! Mais la nouvelle génération de tourne peu à peu vers la monogamie pour des raisons financières : les enfants allant maintenant tous à l'école, il serait difficile de payer l'éducation de tous.

Vue du village 

Avant d'entrer dans le village, nos hôtes nous font une petite introduction de bienvenue et nous invitent à poser toutes les questions que nous voulons durant notre séjour. Ils sont très ouverts et veulent partager leur culture. Ils ont bien intégré dans le tourisme comme moyen de développement.

Arrivée au village massaï 

Une fois dans le village, nous assistons à quelques rites traditionnels : l'allumage du feu avec une branche d'acacia et un peu de bouse d'éléphant, la danse typique où les Massaïs sautent haut, la prière (chrétienne)... Ils nous expliquent aussi comment ils utilisent les plantes pour se soigner, pourquoi ils ont des cicatrices sur le visage (c'est une marque faite quand ils sont petits, pour confirmer qu'ils ont été vaccinés), pourquoi ils ont une incisive inférieure manquante (ils l'arrachent pour pouvoir se nourrir avec une paille lorsqu'ils seront trop vieux pour utiliser leurs dents )...

Allumage du feu 
Danse avec les Massaïs 
Danse maasaï 

Mais tout ceci s'interrompt brusquement à cause de mon état de santé (encore !). Depuis le début de l'après-midi, j'ai un gros mal de tête et, en arrivant au village, des nausées sont apparues. J'essaie tant bien que mal d'en faire abstraction et de profiter de l'échange culturel, mais vient un moment où cela m'est impossible... Et je vomis en plein milieu du village (grande classe...). Pourquoi ? Je pense que c'est une combinaison de facteurs : nous avons peu mangé, nous sommes très fatigués car il a été quasiment impossible de dormir cette semaine à cause de la chaleur, le soleil tapant fort.. Les Massaïs, bienveillants, m'emmène donc me reposer dans une des maisons, sur le lit où nous dormirons le soir même. La maison (enfin, la case) est très sombre et il y fait plus frais. Je peux donc me reposer un peu. En y entrant, l'odeur subtile de bouse et de lait (boisson principale des Massaïs) me rappelle la Mongolie.

Après environ 2 heures, me revoilà sur pied et bien plus disposée à profiter de ce moment privilégié. Au dîner (riz, pommes de terre et viande de chèvre bouillie), nous continuons donc à discuter avec nos trois hôtes. Nous n'avons très peu de contact avec les femmes du village, qui s'occupent plutôt de la cuisine et des enfants.

Les Massaïs nous racontent qu'ils sont fiers d'accueillir des touristes pour expliquer leur culture, se moquent beaucoup des touristes chinois (ce qui nous fait bien rire, car malgré nos cultures éloignés, ils ont les mêmes idées que nous), nous posent de nombreuses questions sur nos pays respectifs...Aussi, c'est un peuple plutôt "riche" malgré leurs conditions de vie rustiques : avec leur bétail, ils ne manquent pas de nourriture et ce bétail est bien valorisé (une vache coûte entre 400 et 500 dollars). Nous qui avions peur d'entendre l'éternel refrain kényan pour nous demander un peu d'argent, nous sommes rassurés...

Avant d'aller nous coucher, nous nous l'avons les dents sous le ciel étoilé, un de mes petits plaisirs de la vie. Et nous nous faisons accompagnés aux "toilettes" par le "guerrier" veilleur de nuit. En effet, les toilettes, c'est la brousse en dehors du village. Et la nuit, il faut faire attention car il y a des animaux sauvages, tels que lions et éléphants, qui rôdent... Cependant, la cohabitation est en général très bonne. Le "guerrier" a pour fonction de protéger le village en cas d'attaque. Il se nourrit uniquement de lait et se promène toujours avec sa lance.

La nuit est peu confortable : malgré le vrai matelas (nous ne dormons pas au sol sur une peau de vache), le lit est étroit pour deux et surtout, je suis une attaque de moustiques. Et ceux-ci doivent être aussi Massaïs, car j'ai beau l'enduire d'anti-moustiques toute la nuit, je me réveille avec une trentaine de piqûres urticantes.

Au petit matin 

Heureusement, le réveil est égayé par la vue du Kilimanjaro et de délicieux chapatis s'apparentant à des crêpes. Quoi de plus pour me mettre en joie ?!

Chapatis au petit-déjeuner ! 

Puis, vient le moment fort de notre expérience : un safari à pied, dans la brousse, avec les Massaïs. Oui, vous avez bien lu, à pied !!! Imaginez donc le scénario : la brousse avec de hautes herbes, le Kilimandjaro enneigé en toile de fond, trois Massaïs comme guides et des animaux sauvages, en liberté, à quelques mètres de vous !!! Surréaliste et inoubliable ! Nous croisons des zèbres, des gnous, une autruche, des éléphants (nous restons loin par sécurité) et une quinzaine de girafes !

Safari à pied avec les Massaïs 

De retour au village, nous retrouvons Edison et Edmo (ah oui, ils n'étaient pas restés avec nous pour la nuit) pour poursuivre notre aventure. Nous faisons donc nos adieux aux Massaïs.

Les Massaïs et notre guide, Edison 

Nous entrons rapidement dans le parc national d'Amboseli. Nous l'avions choisi pour deux raisons : le décor (le Kilimanjaro) et la grande population d'éléphants. C'est l'un des parcs les plus visités du pays. A peine avons-nous passé la porte d'entrée que nous apercevons déjà à l'horizon un éléphant ! Et les éléphants de l'Amboseli sont bien différents de Tsavo : plus massifs, avec de très longues défenses et très gris. Et ils y sont vraiment très nombreux.

Les éléphants de l'Amboseli 

Le paysage est bien plus plat qu'à Tsavo : il s'agit d'une vraie savane qui s'étend à perte de vue. Il est donc plus facile de repérer les animaux, même si ceux-ci sont souvent plus éloignés. Nous croisons singes, gnous, antilopes et singes.

Arrivée à l'Amboseli 

Aussi, à notre arrivée, nous croisons un autre 4x4 dont le chauffeur nous indique la présence de lions dans les parages. Nous avançons donc au ralenti, à l'affût. Nous ne les avions pas vus à Tsavo et nous aimerions beaucoup les croiser aujourd'hui. Soudain, au loin, une touffe sable apparaît sous un arbre ! Un lion et sa lionne, en lune de miel, font leur apparition. Nous validons notre 3eme Big Five au Kenya !

Les lions !!! 

Nous nous rendons ensuite à notre lodge, le plus luxueux du parc (c'était le seul disponible) : après la nuit chez les Massaïs, le luxe n'est pas de refus.

Lodge à Amboseli 

Après une pause au bord de la piscine où les singes viennent s'abreuver, nous partons en fin de journée dans le parc, pour rejoindre un point d'observation avec un panorama sur la savane, la montagne et le lac. D'ici, nous apercevons 2 buffles, des hippopotames bruyants, et beaucoup d'oiseaux. Alors que les nuages jouent avec le sommet du Kili, le soleil se couche peu à peu sur l'horizon et nous profitons de la vue avec un gin tonic !

Amboseli en fin de journée 

Dimanche matin, après un petit-déjeuner royal (il y avait même des crêpes au Nutella !!!), nous quittons le parc par un autre chemin traversant des marécages, abritant de nombreuses espèces d'oiseaux, entre autres des flamnds roses.

Derniers instants à Amboseli 

Puis, nous repartons vers Emali où notre guide nous dépose, après un rapide passage au supermarché pour faire notre stock de snacks qu'on ne trouve pas à Taru. D'Emali, nous pensions trouvé facilement un matatu en direction de Mombasa. Mais, c'est plus compliqué que prévu malgré l'aide des locaux pour arrêter les véhicules sur la route. Finalement, après 20 bonnes minutes d'attente, une voiture s'arrête et nous propose de nous déposer à Taru. Le c-voiturage semble être chose courante ici car nous avions déjà fait en rentrant de l'aéroport de Mombasa la semaine passée. C'est légèrement plus cher que le matatu, mais le confort et la vitesse en valent la peine. Il nous faudra 4h15 pour arriver à Taru.

Nous sommes vraiment très contents de notre week-end, productif et chargé.

PS : si vous souhaitez partir au Kenya, voici le contact de notre guide Edison (de son vrai nom, Edgar Otieno) - Facebook; Instagram

4
mars

Cette nouvelle semaine est encore plein de rebondissements. A Taru, les semaines sont toujours imprévisibles. Moi qui aime l'organisation et que tout soit bien planifié, je dois me plier aux imprévus et à la spontanéité du Kenya.

Lundi, en arrivant à l'école, aucun enfant ! En ce jour, une réunion locale rassemble tous les professeurs du département. Cette réunion aurait du avoir lieu avant les vacances, mais elle avait été reportée. Et Caroline n'a été informée que le dimanche pour le lundi de la nouvelle date... (c'est très kényan ça...). Par conséquent, pas d'école pour nous non plus.

Mardi, en arrivant à l'école, de nombreux parents sont présents et font la queue pour parler avec Caroline. Et de nombreux élèves sont absents. La raison est simple : les frais de scolarité n'ont pas été payés (certains depuis l'année dernière), ce qui met en danger les finances de l'école (permettant, entre autres, de payer les profs). Comme c'est le début du mois, Caroline en profite pour mettre un petit coup de pression aux parents : les enfants dont les frais de scolarité n'ont pas été payés sont renvoyés chez eux pour la journée, dans le but d'alerter les parents (car, dans de nombreux cas, les frais ne sont pas payés car les enfants ne l'ont pas rappelé aux parents...). Et cela fonctionne : au cours de la journée, une partie des élèves renvoyés reviennent avec l'argent demandé. J'en profite pour vous rappeler que la moitié des enfants de l'école sont "parrainés" par des donateurs : ceux-ci n'ont donc rien à payer ! Il est toujours possible de parrainer un enfant pour 10£/mois.

Les professeurs doivent aussi gérer plusieurs cas critiques : les enfants qui ne se nourrissent pas chez eux; ceux qui décident d'aller travailler au lieu de venir à l'école... Bref, la dure réalité africaine n'est jamais très loin.

Les petits choupis 

Mercredi, journée de sélection pour participer à la compétition d'athlétisme inter-scolaire qui débute vendredi. Bon, pour être honnête, ce n'est pas un projet que je soutiens à 100%. Certes, l'idée est bonne et c'est toujours sympa pour les enfants de prendre part à ce genre de compétition. Mais, je vois plusieurs points négatifs. Tout d'abord, cela prend beaucoup de temps et réduit donc le temps en classe. La journée entière de mercredi est dédiée à cela (sachant qu'il n'y a pas eu cours lundi)... Est-ce vraiment la priorité ? Pas de mon point de vue ! Par ailleurs, si seuls les plus grands participent à cette compétition, tous les élèves sont obligés de participer à cette journée de sélection : les petits sont là pour regarder les plus grands. Mais, ne seraient-ils pas mieux en classe, à l'ombre, en train d'apprendre à écrire ? Ensuite, parlons des conditions d'entraînement. Il y a les conditions matérielles, qui, bien entendu, sont précaires, mais bon, on ne peut pas y faire grand chose : l'entraînement se passe sur un grand terrain en friche, public, sans aucune infrastructure (ce sont les profs qui matérialisent la piste de course). C'est sur ce terrain où passent vaches et chèvres que les enfants courent, au milieu d'herbes piquantes, et souvent pieds nus, car c'est plus facile qu'avec leurs chaussures d'école. A cela, il faut ajouter la chaleur. En encore, mercredi, les nuages nous protégeaient du soleil de plomb de Taru.

Le terrain de jeu 

Certains enfants sont épuisés ou n'ont tout simplement pas envie de participer à ces jeux. Et pour avoir détesté l'athlétisme à l'école, je les comprends du fond du coeur. C'est une discipline qui m'a dégoûtée du sport pendant des années. Et, dans le cadre d'une compétition, cela devrait être optionnel. Ce qui est drôle, c'est que, comme n'importe où ailleurs, les plus "intellos" sont les moins sportifs (enfin, si on considère qu'être sportif c'est être bon en athlétisme... parce que pendant des années j'ai cru ne pas être sportive car je n'aimais pas courir... et plus tard, j'ai découvert que je pouvais marcher des centaines de kilomètres ou grimper des montagnes de plus de 5000 mètres...) et les cancres sont ceux qui courent le plus vite, et sautent le plus haut ou le plus loin. Et c'est peut-être le seul vrai point positif que je vois à tout cela : le sport permet de redonner confiance à ceux qui ont plus de mal en classe.

Épreuve de saut en hauteur 

En ce mercredi, nous achetons enfin tout le matériel nécessaire pour finir les toilettes grâce aux dons de la cagnotte. Il reste encore à payer la main d'oeuvre, soit 36000 shillings (315€)... Mais bon, on fait avec ce qu'on a ! Vous avez encore 2 semaines pour participer à la cagnotte. Si ce n'est pas pour les toilettes, l'argent peut également servir pour payer les uniformes manquants des lycéens (soit environ 10€/ unité) ou les chaises en plastique des maternelles (30€ en tout). Nous avons, plus que jamais, besoin de votre aide ! Même une petite participation peut faire la différence !!

Dès jeudi matin, les travaux des toilettes se poursuivent. De notre côté, nous finissons les masques du carnaval : nous mettons les élastiques et les enfants peuvent enfin essayer leur masque. Le sourire qui s'affiche sur leur visage lorsqu'il le mette pour la première fois n'a pas de prix...

Les masques sont prêts ! 

Vendredi est donc consacré à la fameuse compétition sportive. Cette fois, les petits restent à l'école. Car la compétition a lieu dans un autre village, à environ 45 minutes de marche de Taru ! De notre côté, nous partons déjà en week-end...

Photos bonus de Taru 
8
mars

Depuis Taru, il ne faut pas moins de 4 heures et 5 véhicules pour arriver dans la station balnéaire de Diani Beach, sur la côte kényane, au sud de Mombasa, en direction de la Tanzanie : un matatu, une voiture, un ferry, un autre matatu et un tuk-tuk !!

Dès notre arrivée, cela nous fait penser à Watamu : une route principale, et des resorts qui longent la plage. Comme Watamu, Diani Beach est un repaire pour les touristes sexuels, mais Allemands et non Italiens... Mais Diani semble plus touristique, avec de nombreuses boutiques de souvenirs et des resorts encore plus nombreux. Diani c'est le lieu idéal pour se reposer un week-end sur la plage, face à l'océan Indien turquoise.

Au lieu de nous reposer, nous préférons prendre le large et découvrir le parc maritime de Visite, tout au sud, à ma frontière avec la Tanzanie, à bord d'un boutre. Le parc est réputé pour ses coraux. Comme à Watamu, la chance nous sourit, puisque nous croisons en chemin, quelques dauphins qui jouent autour du bateau. En revanche, le snorkeling est bien meilleur ici : à peine dans l'eau, nous apercevons de grands coraux bien conservés et une multitude de poissons colorés. Pieuvre, tortues, poisson-lion... Bref, c'est un vrai safari maritime ! Bon, il faut faire abstraction des nombreuses méduses...

Notre session de snorkeling atteint son apogée lorsque l'un des guides nous montre les dauphins jouant au loin et nous invite à aller en leur direction. Il faut nager vite avant qu'ils ne partent. Alors, on palme à toute vitesse, tête sous l'eau... Et soudain, une grosse silhouette et un aileron apparaissent... Nous n'avons avec les dauphins !!! L'un de mes rêves s'accomplit : nager avec des dauphins (pas en captivité bien sûr) ! Ils sont environ 5-6 dont une maman qui apprend à son petit à nager. Ils virevoltent autour de nous pendant plusieurs minutes. Quelle émotion !!! Je suis comblée ! En revanche, je n'ai pas d'image donc il faudra me croire sur parole...

Après deux bonnes sessions de snorkeling, nous débarquons sur l'île de Wasini pour déguster, face à la mer, de bons crabes frais...

Déjeuner à Wasini 

Dimanche, avant de repartir à Taru, nous profitons de la plage et des boutiques. Nous reviendrons certainement me week-end prochain !

Notre retour est encore plus long que l'aller : un tuk-tuk, un matatu, le ferry, un tuk-tuk, et deux autres matatus... et dans le dernier matatu, reggae à fond et 27 passagers pour 15 sièges...

9
mars

Et voici déjà notre avant-dernière semaine, et nous commençons à appréhender la fin...

Lundi commence avec l'assemblée générale hebdomadaire. Il y a toujours des informations intéressantes qui y sont données. Cette semaine, entre autre, sont annoncés les quelques élèves sélectionnés pour poursuivre la compétition d'athlétisme le vendredi suivant. La compétition a commencé le vendredi d'avant, à un niveau local (trois écoles) et terminera dans quelques semaines au niveau national. Pour ce vendredi, c'est au niveau du "cluster" (ici, le pays est divisé en "county", "sub-county", "cluster", "sub-cluster").

Nous poursuivons nos cours. Ce lundi commence avec l'absence de Christopher et de sa fratrie. Je vous en avais parlé, il s'agit des 5 enfants abandonnés chez le pasteur par leur mère. Caroline est toujours en contact avec la mère et celle-ci, qui s'est remariée, a exigé de voir ses enfants. Mais ne pouvant payer le voyage jusqu'à Taru (elle vit vers Diani), c'est Caroline qui a dû emmener les enfants là-bas. Elle doute des conditions dans lesquelles ils vont vivre : vont-ils avoir à manger, vont-ils aller à l'école ? Elle va suivre leur cas et mes ramènera à Taru si nécessaire. Mais le problème, c'est qu'ici, il n'y a personne pour s'occuper d'eux. En dehors de l'école, ces enfants sont totalement livrés à eux-mêmes... Toute cette histoire nous fend le cœur. Ne plus voir la petite bouille de Christopher nous fait beaucoup de peine. Nous espérons les revoir avant notre départ...

Heureusement, les autres élèves sont toujours là pour nous faire rire. Nous passons à la préparation de la danse pour le carnaval... Et les plus grands prennent l'initiative de choisir une musique locale qu'ils aiment et dansent. Certains timides se révèlent être d'excellents danseurs. Autant dire que, maintenant, on connaît tous les tubes kényans du moment !

Entraînement de danse pour la carnaval 

Mardi, rien de spécial ! La journée se déroule normalement. Le déjeuner est toujours animé par 4 professeurs qui aiment débattre de politique et de religion, et nous adorons assister à ces vives discussions. Je reprends un peu le yoga avec les enfants qui avait été un peu abandonné avec tous les changements de ces dernières semaines.

Aperçu du cours de yoga 
Jeu du pendu avec les Grade 4 

Mercredi, nous dépensons les derniers sous de notre cagnotte : 2 uniformes pour les lycéens et mise en place de prises électriques dans la classe des Grade 6, la plus sombre, donc celle qui est la plus adaptée pour utiliser le projecteur. La cagnotte est encore en ligne jusqu'à vendredi prochain : ce qui sera récolté en dernière minute fera office de dons à l'école. Nous continuons à former les professeurs à l'informatique et nous créons les documents administratifs papiers de l'école sur l'ordinateur : c'est quand même plus facile de gérer les listes d'admission, les frais de scolarité et les notes sur Excel qu'à la main, dans multiples cahiers. Les professeurs nous sollicitent de plus en plus pour diffuser de courtes vidéos en classe, en relation avec le thème étudié : cela vient d'eux spontanément et nous sommes ravis, car cela montre qu'ils voient un intérêt moderniser la méthode d'enseignement et à sortir des livres officiels. Nous espérons qu'ils continueront après notre départ.

Nous en apprenons plus sur Teacher Ongeri, le doyen des professeurs qui me fait toujours penser à un vieux sage. Derrière son humour bancal (un humour de Papa...) et sa veste bien trop grande se cache un grand cœur plein d'humilité. Père de 6 enfants, dont 4 parrainés à l'école de Taru, et 2 fois grand-père, il occupe son temps libre en donnant gratuitement des cours aux enfants de l'école. Il accueille, nourrit et loge aussi deux autres enfants abandonnés, dont l'un est le premier de sa classe au lycée. Il nourrit donc plus de 10 bouches chaque jour. Sa philosophie est simple : "j'ai la chance d'être aidé (par Paul et Eunice, par les sponsors des enfants...) alors moi aussi j'aide les autres en retour". C'est un enseignant passionné, qui exerce son métier avec son coeur. Il suffit de voir ses yeux briller quand il parle de son métier pour comprendre ce qui l'anime. Lui aussi a une foi solide : selon ses mots, il accomplit ce que Dieu a décidé pour lui. A Taru, la foi est indispensable pour accepter sa propre condition / situation, s'accrocher et aller de l'avant. Nous comprenons donc le rôle primordial du pasteur dans la communauté.

Professeur Ongeri  nous raconte son histoire

Jeudi, nous passons pas mal de temps avec les Grade 6. Nous leur montrons quelques vidéos de carnaval et une vidéo du Cirque du Soleil : yeux écarquillés, bouchés bées, ils n'ont jamais vu de cirque de leur vie. Leurs réactions sont hilarantes.

Avec les Grade 6 

Nous fêtons aussi l'anniversaire de la jeune Teacher Lilian, maîtresse des plus petits. Elle célèbre ses 21 ans. Les professeurs se réunissent autour d'un gâteau. Apparemment, la coutume veut que la personne fêtant son anniversaire nourrisse ses invités en leur donnant un morceau de gâteau dans la bouche. Le reste du gâteau est donné aux élèves qui se font une joie d'avoir une petite bouchée sucrée.

Anniversaire de Lilian 
Partage du gâteau 

Puis, Teacher Mary nous invite en Grade 2 pour leur enseigner à faire des bateaux en papier... Comme toujours ils sont surexcités. Et comme il pleut à versé, ils profitent des énormes flaques d'eau boueuses pour faire flotter leur bateau.

Atelier bateau en papier 

Vendredi, suite de la compétition sportive. Après le porridge, seuls les plus grands se rendent dans une autre école de Taru où les épreuves ont lieu. Nous les accompagnons pour les soutenir. A notre arrivée, des centaines enfants d'écoles différentes nous scrutent : ils sont étonnés de voir des blancs. Mais nos élèves nous rassurent en disant que nous faisons maintenant partis de leur famille et qu'ils sont fiers qu'on soit à leurs côtés.

Comme souvent, le manque d'organisation général entraîne un retard : les épreuves ne commencent que vers 12h (quand le soleil est à son plus chaud), après une heure d'attente sur le terrain. Nous rentrons donc car nous avons prévu de passer notre dernier week-end à Diani, sur la côte. Et vu la longueur du voyage, il nous faut partir...

Sur le terrain 

PS : En ces temps de panique (ou de folie ?) générale dans le monde, je tiens à vous rassurer : pas de coronavirus ici au Kenya (enfin presque car le 1er cas vient d'être détecté) seulement le paludisme, le SIDA, la fièvre jaune, la dengue, la typhoïde... Et la faim ! Ces plaies ne sont pas aussi contagieuses que le coronavirus mais bien plus mortelles. Mais, bon, comme ça ne concerne ni l'Europe, ni les USA, ça ne sert à rien d'en parler... Mais en Afrique, la vie ne s'arrête pas à cause de tout ça... Alors, peut-être qu'on pourrait reprendre nos esprits et être plus rationnels !

17
mars

Après un week-end sur la côte à Diani, à se relaxer loin de la panique générale, nous rentrons à Taru pour notre dernière semaine à l'école... Ou presque...

Lundi matin, en arrivant à l'école, aucun enfant. Surprise, je me demande bien pourquoi. Je m'attends à une raison banalement kényane, du genre il y a une réunion ou une compétition. Mais non, pas cette fois... Finalement, le coronavirus a eu raison de nous, et le gouvernement a décidé la veille au soir la fermeture de toutes les écoles pendant 1 mois. Nous n'arrivons pas à y croire. Cette maladie semblait si loin de nous, mais avec l'arrivée du premier cas jeudi dernier, les précautions sont de mise. Nous comprenons mais nous sommes pris de cours. Jusqu'à maintenant, malgré toutes les restrictions de voyage, nous n'avions pas du tout envisagé de changer nos plans. Mais, sans école, nous n'avons plus de raison de rester à Taru. Même notre fête de carnaval ne peut avoir lieu.

Après cette dernière semaine à Taru, nous devions aussi voyager une dizaine de jours dans l'ouest du pays jusqu'au lac Victoria. Mais nous craignons une restriction des déplacements et des activités touristiques dans les jours à venir. Par ailleurs, le Kenya vient également d'interdire l'entrée sur le territoire aux étrangers. La situation évolue vite et nous pourrions risquer de ne plus pouvoir sortir.

Très vite donc, la seule solution sage nous vient à l'esprit : nous devons repartir dès que possible.

Les compagnies aériennes ont assoupli leurs conditions de modification de vol et nous décidons donc de tenter notre chance. Sauf qu'elles sont saturées, et donc impossible de les joindre. Nous cogitons longtemps, cherchons d'autres vols, essayons plusieurs scénarios...

Finalement nous décidons d'aller à l'aéroport de Mombasa (le plus proche) et de voir directement avec le bureau de la compagnie qui opère notre vol. Caroline nous arrange un transport en voiture (ce serait trop long en matatu).

Comme nous allons en avoir pour l'après-midi entier, et que le lendemain, nous avons décidé de nous rendre à Nairobi, c'est donc le moment de faire nos adieux à l'équipe de professeurs... C'est là que la réalité me frappe. Nous allons tout quitter du jour au lendemain, sans même avoir revu les enfants. Nous savions que le départ allait être difficile, mais nous n'étions pas prêts pour un départ si brutal. Je fonds en larmes. Je vois chaque visage de chaque professeur pour la dernière fois. Ils faisaient partis de notre quotidien, nous formions une famille. Fernando leur adresse quelques mots de remerciements, moi je suis incapable de parler. Certains professeurs retiennent leurs larmes. Ils sont aussi tristes que nous. Nous nous étions attachés à eux et eux à nous. C'est un moment difficile pour tous. Nous avons le cœur brisé. Et quand nous pensons aux enfants... Ils vont croire que nous les avons abandonnés en partant sans rien dire. On leur avait promis une fête, avec un repas de fête (ah oui, parce qu'on a découvert qu'au Kenya, fête signifiait forcément gros repas avec pilau et chapatis) et ils s'en réjouissaient d'avance. On a vraiment l'impression de partir sans avoir terminé notre mission, c'est très frustrant. J'aurais tellement aimé revoir ces petites bouilles une dernière fois. Avec Fernando, nous nous faisons la promesse de revenir.

Avec Teacher Winnie et Teacher Mary 

Nous partons ensuite pour Mombasa. Deux heures de route pour arriver à l'aéroport où le changement se fait très facilement, sans rien avoir à payer, ni même une éventuelle différence tarifaire. C'est donc acté : nous rentrons jeudi. Il faut ensuite passer à la gare pour changer nos billets de train pour Nairobi, prévus initialement le samedi. Nous partirons le mardi et avons ainsi une dernière journée à Nairobi avant de partir.

Nous rentrons de Mombasa dans la soirée. Après un rapide dîner, nous décidons d'aller chez le pasteur parce que nous savons que de nombreux enfants s'y trouvent, ce qui nous laisse une chance de dire au revoir comme il se doit. Et nous avons vu juste : nous rencontrons des filles, de grade 4 à 8, ainsi que le coiffeur de Fernando, les cuisinières de l'école, quelques mamans, des profs... Et tous apprécient notre venue. Nous sentons que nous faisons partie de leur communauté. Nous expliquons aux enfants notre départ précipité : leur expression de déception me fait monter mes larmes aux yeux. Mais ils comprennent notre décision. Ils nous demandent si nous ferons la fête, nous leur promettons de la faire quand nous reviendrons. Cette soirée avec ces enfants me soulage énormément.

Chez  le pasteur , annonce de notre départ aux enfants

En rentrant, nous découvrons la seconde mauvaise nouvelle de la journée : l'Europe ferme ses frontières. Nous voilà donc dans le flou total. Va-t-on pouvoir rentrer ? Si oui, comment : avec notre vol commercial ou doit-on demander le rapatriement ? Mais personne ne nous informe car personne ne sait vraiment. Dans cette inquiétude, nous allons nous coucher en espérant avoir plus de précisions dans les heures à venir...

Le lendemain matin, alors que nous nous réveillons aux aurores, les enfants de la veille nous attendent. Ils sont venus passer une dernière heure avec nous. Nous leur donnons leurs masques et ils se mettent à danser... Cela fera office de fête. Derniers selfies... Et il est temps de se quitter pour de bon. Nous avons le droit à de gros câlins et à quelques larmes... Les adieux sont déchirants. Nous avons passé presque 2 mois à leurs côtés, nous avons beaucoup ri, et nous espérons leur avoir apporté quelque chose, leur laisser de bons souvenirs.

A notre départ 
Danse de départ sur les tubes locaux du moment 

Nous partons ensuite à la gare avec Caroline, en larmes elle aussi. Caroline a été comme une maman pour nous, mais nous l'avons aussi beaucoup écouté et soutenu, alors c'est sûr que la séparation est difficile, d'autant plus dans ce contexte d'incertitude pour les mois à venir. Que vont devenir ces enfants ? Tous ceux qui sont à Taru sans leurs parents doivent rentrer chez eux d'ici mercredi, selon les consignes du gouvernement. Seront-ils là à la réouverture de l'école ? Et comment les profs vont-ils vivre durant cette période ? Autant de questions préoccupantes mais auxquelles personne ne peut répondre pour le moment. Il va falloir se serrer les coudes et être fort. Mais pour ça, je n'ai pas de doute sur la capacité de résistance de cette communauté : être solidaire et faire face est leur quotidien, avec ou sans coronavirus.

Et voilà c'est ainsi que se termine cette fantastique aventure de volontariat dans l'école Future of Taru. Nous sommes venus pour enseigner, mais nous avons surtout beaucoup appris. Et nous revenons grandis, avec des souvenirs gravés pour toujours dans notre cœur. Je n'ai pas regretté ni un instant d'avoir fait le choix de quitter mon travail pour vivre ces 2 mois qui m'ont ouvert les yeux sur une réalité connue mais souvent lointaine. Tout n'a pas été facile, nous avons été confrontés à de nombreuses différences culturelles, pas toujours faciles à accepter, mais c'est ce qu'il y a de plus enrichissant. Apprendre à accepter la différence de l'autre sans juger. Et à l'heure où le monde se replie sur soi et que les pays agissent individuellement sans se coordonner (ce qui, selon moi, serait plus efficace), Taru nous aura appris une belle leçon d'ouverture, d'acceptation de l'autre et d'entraide.

Nous sommes maintenant sur notre chemin pour Nairobi, nous vous maintiendrons informés de notre évolution pour rentrer en France. Croisons les doigts !

18
mars

Notre arrivée à Nairobi est mouvementée. Alors que nous rejoignons notre logement près de l'aéroport, nous apprenons que notre vol de correspondance Amsterdam-Paris est annulé. Nous décidons donc de nous rendre au bureau de Kenya Airways à l'aéroport pour nous mettre sur un autre vol. Si Kenya Airways a été efficace à Mombasa, ce n'est pas le cas ici : sur leur système, le vol n'apparaît pas comme annulé et donc ils ne peuvent nous le changer. Ils nous redirigent donc vers le call center de KLM (qui ne répond pas...) et le bureau commercial de KLM dans le centre de Nairobi. Comme il est déjà tard, celui-ci est fermé.

Mercredi matin, nous nous rendons immédiatement à l'adresse donnée. Mais là encore, déception : ils ne peuvent rien faire et nous sommes dirigés vers un autre bureau KLM (qui semble gérer exclusivement ce genre de problème). Nous traversons la ville de long en large. Dans ce bureau "caché" dans les beaux quartiers résidentiels de la ville, nous sommes plusieurs touristes dans la même situation. Nous sommes rapidement pris en charge par une femme compétente qui nous trouve un nouveau vol, direct, partant samedi soir. Cela est la seule solution car tous les vols Amsterdam-Paris sont pleins. Les trains sont également complets, et il n'y a plus de bus.

Nous sommes plutôt contents de cette solution, car cela nous permet de profiter du Kenya encore quelques jours, et de ne pas partir précipitamment. D'autant qu'il semblerait que nous soyons plus en sécurité ici qu'en France. D'ailleurs, je tiens à dire que nous sommes agréablement surpris de la gestion du coronavirus. Le premier cas est arrivé jeudi dernier, des mesures ont été prises dès dimanche et ici, à Nairobi, on n'entre pas dans un commerce sans se laver les mains avec du gel hydroalcoolique. Nous sommes étonnés de la discipline des Kényans !

Puis, nous retrouvons Edison, notre fidèle guide, pour faire des achats au marché massaï. Nous l'avions prévu pour notre dernière journée, histoire de rapporter quelques souvenirs.

Comme nous avons maintenant 3 jours de plus au Kenya, nous lui demandons si nous pouvons reprogrammer une partie du voyage que nous avions organisé dimanche puis annulé lundi... Bien sûr, pour lui, c'est une sacrée aubaine. Avec l'annulation de notre voyage, cela lui faisait un manque à gagner, surtout en cette période de basse saison. Nous arrangeons donc les détails et nous revoilà à faire nos sacs pour un départ demain aux aurores !

Ces derniers jours sont intenses et épuisants : entre le stress, les changements permanents, l'impossibilité d'anticiper, l'ascenseur émotionnel... Mais bon, on fait avec et on tente de s'adapter au mieux.

A priori, vous aurez donc encore un peu de lecture pendant votre période de confinement !

20
mars

Comme convenu, Edison vient nous chercher de bon matin sous une pluie battante. En temps normal, j'aurais été un peu contrariée par ce temps sachant que toutes les activités prévues sont extérieures mais je suis tellement reconnaissante d'avoir ces quelques jours supplémentaires, que je reste positive.

La pluie finit par s'arrêter (il est bon de se rappeler, par ces temps anxiogènes, que rien ne dure jamais). Nous empruntons une route qui part vers l'ouest, construite par les prisonniers de guerre Italiens des Britanniques (Seconde Guerre Mondiale), ce qui se traduit par la présence d'une petite chapelle italienne sur la route.

Église catholique italienne 

Peu à peu, le temps se dégage alors que nous passons la vallée du Grand Rift, cet ensemble de failles et de volcans qui s'étend sur 6000 km du Mozambique au Moyen-Orient, en passant par la mer Rouge. Ici, le paysage est très différent des plaines arides de l'est.

Parmi les volcans du Grand Rift, il y a le Longonot culminant à 2776 mètres. Nous décidons de suivre le chemin de randonnée qui mène à son cratère : c'est une randonnée courte mais intense, avec une pente très raide. Après 2 mois au niveau de la mer et sans sport, nous nous rendons compte que nous n'avons plus la même condition physique... mais nous arrivons quand même à atteindre le sommet en moins d'une heure, ce qui est, selon notre guide, bien moins que la moyenne. En revanche, nous renonçons à faire le tour du cratère sur un chemin escarpé et encore raide. Nous avons une belle vue sur le rift et le lac Naivasha de là où nous sommes et cela nous suffit.

Mont Longonot 

De retour au pied du volcan, nous continuons vers la ville de Naivasha où nous allons restés pour la nuit. Il s'agit d'une ville paisible, servant de base pour visiter les différents points touristiques qu'il y a autour. Mais pour le reste de la journée, c'est repos dans notre charmante guesthouse.

Le lendemain, direction un autre parc national qui porte mal son nom : Hell's Gate. Celui-ci est particulier car on peut le découvrir à vélo ! Nous pédalons donc aux côtés des zèbres, antilopes, phacochères, buffles et girafes. Les animaux sont proches et peu farouches. C'est grisant d'être aussi près d'eux. Le terrain est relativement plat mais sablonneux, donc on sent bien nos cuisses. En milieu de parcours, nous faisons une pause à pied pour admirer un canyon et une des sources d'eau chaude du parc. En effet, nous sommes dans une région à forte activité géothermique, l'une des sources d'électricité du pays.

Hell's Gate 

Après 16 km à pédaler, nous repartons, en direction du lac Naivasha où nous dégustons un poisson grillé fraîchement péché. Ce lac, couvert en partie de jacinthes, abrite une large faune, qui l'on peut rencontrer en bateau : hippopotames (hors de l'eau), pélicans, hérons, ibis, cormorans, aigles...

Lac Naivasha 

Le lac Naivasha est une source qui alimente nombre de floricultures (particulièrement des roses) : en effet, l'exportation de fleurs vers l'Europe représente un gros marché pour le Kenya. On estime qu'environ 70% des fleurs vendues en Europe proviennent du Kenya...

Nous partons ensuite un peu plus à l'ouest, direction Nakuru, notre dernière destination avant notre départ...

21
mars

Dernière journée au Kenya, dernier safari... Au parc national du lac Nakuru. Avec cette crise du coronavirus, nous avons la chance d'être les seuls dans le parc. Nous profitons donc de ce paysage digne du Roi Lion, un lac immense au milieu des acacias. Et pour ce dernier safari, les animaux sont au rendez-vous : zèbres, antilopes, troupeaux de buffles, babouins, hyène... Ici, on a la chance de pouvoir les voir de très près. Ils n'ont pas du tout peur et restent souvent au milieu de la route. Vous pourrez en juger par mes photos, car mon appareil n'ayant plus de batterie, j'ai du utiliser mon téléphone dont le zoom est très moyen... Notre safari se termine en apothéose quand nous croisons une dizaine de rhinocéros, notre quatrième Big Five (il nous manque le léopard). Ils sont nombreux et eux aussi restent proche. Ce qui est très agréable au lac Nakuru, c'est de voir les animaux mélangés. A la différence des autres parcs, ici, ils sont tous ensemble dans la même zone.

Beautés du lac Nakuru 

Après 4 heures de safari, nous déjeunons dans un restaurant local de viande grillée (nyama choma), ce qu'on adore : c'est Edison qui nous recommande le lieu et je dois avouer que c'est l'un des meilleurs qu'on ait fait. On engouffre 2 kilos de viande...

Nyama Choma 

Puis, vient le moment de reprendre la route vers Nairobi pour prendre notre vol retour.

Nous nous équipons de masques dans une pharmacie (il faudra en faire 3 pour en trouver....) et prenons un dernier verre avec Edison, face au coucher du soleil.

Coucher du soleil à Nairobi 

Ainsi se termine notre folle aventure kényane qui restera gravée à jamais dans notre cœur. Nous nous sentons désormais un peu kényans. Nous retiendrons surtout l'hospitalité et le sourire des Kényans.

Pour ceux qui s'interrogent sur la suite de nos aventures : pour le moment, nous ne savons pas. Ces derniers jours nous ont démontré qu'on ne peut rien anticiper, la situation sanitaire mondiale évoluant rapidement chaque jour. Nous devions partir dans 2 semaines au Brésil pour 2 mois. A ce jour, ce n'est plus possible pour moi car le pays a fermé ses frontières aux étrangers. Nous allons donc attendre pour prendre une décision sur la suite de nos projets. Pour l'instant, nous avons du mal à évaluer la situation car nous étions si loin de tout cela...

Prêts à embarquer