Après seulement 3h de vol nous arrivons à Port Vila. C'est étonnant d'arriver dans une île tropicale sans décalage horaire (à peine 2h) et sans être fatigués d'un long vol. Nous rejoignons l'aéroport domestique à deux pas de là et nous embarquons pour l'île de Espiritu Santo, plus communément appelée tout simplement Santo.
Au Vanuatu, il y a 3 langues officielles: le bislama, l'anglais et le français. Dans certains coins de Santo les gens parlent anglais, dans d'autres, français, mais tous parlent le bislama (et pas bismillah), langue dérivée de l'anglais qui est née alors que les travailleurs (forcés) venus du Pacifique en Australie eurent besoin d'une langue commune pour se comprendre et développèrent ce créole anglais, ce dernier a ensuite été adopté par tout le Vanuatu car il permettait de faciliter les échanges avec les pays voisins mais aussi entre les Ni-Vanuatu, Vanuatu étant un pays contenant de nombreuses langues (plus de 110 dialectes pour 250 000 habitants)
Nous logeons non loin de la capitale de l'île, Luganville, où, après le bislama, l'anglais est la seconde langue parlée. Luganville, bien qu'étant la seconde ville du Vanuatu, est assez petite mais comporte un nombre impressionnant de magasins/supermarchés, tous tenus par des chinois! On trouve également un très beau petit marché aux fruits et légumes qui donnent bien envie d'être mangés: régimes de bananes et de noix de coco, mangues, énormes papayes, oranges et pamplemousse, gros bouquets d'arachides... Nous remarquons que tous les paniers sont fait avec des feuilles de bananier et on ne voit aucun sac plastique. Ici tous les consommables en plastique, assiettes, pailles, sacs, sont bannis depuis plusieurs années et l'amende est très lourde pour qui en utilise ou en vend.
Nous profitons d'une journée bien ensoleillée pour louer des kayaks et remonter la rivière Matava jusqu'à atteindre le Matevulu Blue Hole qui est un trou bleu magnifique, ce sont les eaux souterraines provenant de l'intérieur de l'île qui sont filtrés dans le sol et ressortent par ce trous bleus avec une clarté impressionnante.
L'île de Santo possède une seule route principale qui couvre la côte Sud et Est. Tout le reste de l'île et ses villages ne sont accessibles qu'à pied, à parfois plusieurs jours de marche. Nous nous aventurons jusqu'au bout de la route au Nord, à Port Olry, commune francophone et catholique de 3000 personnes, un très gentil habitant nous montre tout le village, ainsi qu'une partie des plantations ainsi que le fonctionnement d'un four à noix de coco. La chair de la noix de coco est séchée dans ce type de four pour donner ce que l'on appelle de coprah, le coprah sert ensuite à la fabrication d'huile de coco. On sent d'ailleurs partout l'odeur de noix de coco, c'est très agréable.
Nous nous arrêtons manger langouste et poisson sur une plage splendide où l'on peut rencontrer des crabes de cocotiers, énormes crabes appelés de la sorte pour la capacité à casser des noix de coco avec leurs pinces et qui atteignent leur taille adulte d'environ 40 cm après 40 à 60 ans.
Les Ni-Vanuatu sont très sympas et nous parlent facilement de leur pays et de leurs coutumes. On s'arrête plusieurs fois sur le bord de la route pour goûter des noix de coco, du cacao et des pamplemousses géants, et aussi pour boire le kava, sorte d'infusion que les gens préparent et boivent en fin de journée et qui a un goût très amer qui dégomme les gencives. D'ailleurs, comme dans un rituel, les gens boivent le kava cul sec et se rincent ensuite la bouche avec de l'eau tout en crachant partout, c'est assez surprenant la première fois!
Nous avons été attirés par Santo surtout pour la réputation de ses plongées, nous nous inscrivons donc pour plonger sur deux sites emblématiques de l'île: Le SS President Coolidge et Million Dollar Point. A la différence de toutes les autres plongées que nous avons pu faire, celles-ci revêtent un aspect historique intéressant qui nous est expliqué en début de plongée.
Le SS President Coolidge était un navire de transport de passagers qui reliait San Francisco à Manille dans les années 30. Puis vint la seconde guerre mondiale, L'armée américaine utilisa Vanuatu en tant que base militaire et le navire fut réquisitionné et transformé en bateau de guerre. Le port de Santo était à l'époque truffé de mines sous marine, ne laissant qu'un seul accès sécurisé depuis la mer. Un jour alors que la navire rentrait au port de Santo, il ne reçut pas de réponse radio de la port de la base et, pensant qu'il y avait peut être un sous marin en embuscade, le capitaine décida d'emprunter une autre route, celle des mines dont il ne connaissait à priori pas l'existence. Et malheureusement le bateau heurta une mine et la coque se fendit en deux endroits, laissant ainsi sombrer le navire. La lieux du naufrage étant proche de la côte, quasiment tous les passagers survécurent mais le jeune capitaine de 28 ans périt en retournant chercher d'autres hommes qu'il réussit tout de même à sauver. Plus tard l'armée américaine envoya des plongeurs récupérer les os du capitaine pour lui donner une sépulture digne de ce nom.
Nous nous approchons donc de cette épave monumentale que nous voyons apparaître tout d'un coup à 20m de profondeur. On reconnaît des treuils, des tourelles, des fusils d'assaut et même une marmite de cuisine remplie de curieux objets comme un masque à gaz, des chaussures, des bouteilles. Lorsque nous entrons dans l'une des cales de stockage, c'est comme si nous entrions dans les entrailles du bateau, très impressionnant tout comme le reste de l'épave.
Pour la seconde plongée, nous rejoignons le site de Million Dollar Point qui, bien que se situant à la même époque, possède une histoire tout à fait différente.
Toujours donc pendant la seconde guerre mondiale, l'armée américaine construit plusieurs aéroports, des kilomètres de route et une ville pour sa base militaire du pacifique située à Vanuatu. Ils font donc venir de nombreux engins et matériels pour leur construction. A la fin de la guerre, n’ayant que faire de tous ces équipements ne voulant pas les rapatrier, ils proposent de les vendre aux français et anglais qui gouvernent conjointement la région mais ces derniers refusent le prix jugé trop élevé par deux fois. Ni une ni deux, l'armée américaine construit une jetée au bout de laquelle ils vont balancer tous leurs engins, puis ils prennent soin de faire exploser la jetée pour que personne ne puisse les récupérer. On trouve donc aujourd'hui un amas de camions, remorques, tractopelle, barges qui débordent jusqu'à la plage. Cela en fait un site de plongée très déroutant et assez unique, la vie s'est formée autour de ces machines et l'on voit du corail recouvrir peu à peu le métal. Notre guide de plongée nous explique que ce n'est pas le seul endroit qui à servi de poubelle à l'armée et que toute l'île est truffée d'objets enterrés, il arrive que des gens déterrent des grenades, des armes qui avait été enfouies pour les mêmes raisons.
Ces sites de plongées sont très atypiques et nous referons d'ailleurs par deux fois des plongées sur l'épave du Coolidge, l'une pour visiter un peu plus l'intérieur (bien qu'il faudrait y retourner plus de 50 fois et être habilité pour descendre dans de grandes profondeur pour tout visiter) et une autre de nuit pour y découvrir les espèces habitant les environs de l'épave. Cette dernière plongée est époustouflante, on se retrouve dans l'épave, lampes éteintes, dans le noir complet, à contempler des poissons lumineux. On ne sait plus si on est dans l'eau ou dans l'air à regarder des étoiles, c'est un spectacle unique.
Nos quelques jours à Santo s'achèvent mais le périple au Vanuatu continue...