À propos

Nous sommes Marion (Canard) et Quentin (Cochon). Nous voyageons depuis 2 ans, en sac à dos ou à bord de notre Combi, en Amérique du sud et en Asie. Embarquez avec nous pour suivre nos découvertes et aventures !

Le noroeste argentin

Le nord-ouest : haute altitude, vigognes à gogo, lamas à pompons, pistes sableuses et montagnes colorées... Nous serons encore une fois seuls au monde, dans un environnement rude mais superbe.
Avril 2023
7 jours
1

Nous approchons de Salta. Adieu les petites pistes poussiéreuses, nous roulons désormais sur du bitume entouré de végétation. Une voie, deux voies, trois voies… Nous atterrissons finalement sur un gigantesque périphérique qui n’a rien à envier à nos souvenirs parisiens. On se trompe d’ailleurs de sortie, en empruntant une voie de travaux heureusement déserte ! Voilà une chose qui nous ne nous avait pas manquée… C’est à la tombée de la nuit que nous atteignons San Lorenzo, petite banlieue résidentielle réputée plus tranquille que le centre-ville. Au dodo, Canard et Cochon.

 From Périph With Love

Comme nous sommes toujours préoccupés par la surchauffe récurrente de notre moteur, on a envoyé il y a quelques jours des messages et photos à Léo, le mécano de Puerto Montt. Celui-ci nous alerte qu’un tuyau du carburateur est branché au mauvais emplacement ! Oups, la faute à un précédent mécano qui n’était pas un spécialiste de combi ! Léo n’est pas très content : il nous avait bien prévenus de ne consulter que des pros et de ne pas se faire baratiner par des techniciens ordinaires. On se sent un peu idiots. Même avec notre maigre expérience, on est encore des novices en mécanique de combi… Léo nous avertit également que la surchauffe peut être due à un déréglage des soupapes. On prend la décision de faire réviser Olinda chez un vrai combinaute, trouvé sur notre application de vanlife. Le rendez-vous est pris pour le surlendemain.

Dans l’attente, nous partons visiter Salta. On laisse le combi à San Lorenzo pour éviter de circuler en ville avec. Après une tentative de rejoindre le centre en bus, on se déplace finalement en taxi : il fallait acheter une carte de bus… en centre-ville… en allant en centre-ville… en bus ! Allez, bref…

Nous commençons notre visite au marché municipal. De suite, nous sommes frappés par l’agitation. C’est que cela fait des semaines que nous vivons dans des lieux on ne peut plus reculés et déserts. Le changement d’ambiance est radical ! Ça grouille de partout dans des allées minuscules, ça sent le poisson, la viande ou les poubelles, la lumière des néons est agressive. Une ambiance typique des marchés latinoaméricains en somme. Nous réussissons à trouver une sortie dans ce dédale d’étals et parcourons quelques rues tout aussi animées avant de déboucher dans le centre historique.

La place principale est particulièrement agitée mais elle reste suffisamment grande pour que l’on puisse tout de même respirer un peu. Elle est ombragée par de grands arbres et parée de beaux édifices. Les anciens palais soulignent le faste de la ville à l’époque coloniale, lorsque la cité était un haut lieu de production de matières premières. Salta était la ville étape majeure entre le Vice-royaume de la Plata et le Vice-royaume du Pérou.

Inspiré du style français, évidemment 

La cathédrale rose est étonnement coincée entre des bâtiments coloniaux et des buildings modernes. L’intérieur baroque est chargé. Nous filons ensuite vers un autre édifice religieux. L’église San Francisco se voit de loin : haut clocher, couleurs criardes rouges et ocres et fioritures de la façade attirent indéniablement l’œil. On dirait presque une « fausse ». Plus loin, le couvent San Bernado tranche par sa simplicité. Des carmélites y vivent encore. C’est parmi les plus anciens bâtiments de la ville ; malheureusement il ne se visite pas.

La cathédrale 
 L'église
Le couvent 

Nous passerons aussi un petit moment assis dans la cour du musée historique. Ses salles nous ont paru dénué d’intérêt mais la visite permet tout de même d’admirer l’architecture typique des maisons seigneuriales de l’époque coloniale. Nous visiterons un autre musée bien plus passionnant : le musée Güemes. Il revient sur l’histoire du général Martin Miguel de Güemes, héros des guerres d’indépendance. Ce jeune homme fut à la tête d’une armée de gauchos et guérilleros paysans. San Martin lui confia la mission de défendre la région face aux fidèles de la Couronne Espagnole. Mission qu’il mena à bien jusqu’à sa fin tragique dans une embuscade, la veille du retrait espagnol.

 Aux armes citoyens !

La balade en ville nous a bien fatigués. Nous nous posons donc dans un café prendre de bons milkshakes. À la table d’à-côté, un vieil homme entame la conversation en français. Il s’appelle Raúl et a vécu en France pendant plus d’un an, en 1966 (« je suis arrivé dans le pays sous le général De Gaulle », précise-t-il) ! Il a travaillé comme ingénieur des mines pour le Commissariat à l’énergie atomique. On papote pendant un long moment de la France, de l’Argentine, de la politique, des voyages ou d’autre chose… À 93 ans, Raúl danse encore le tango, et nous enjoint à nous y mettre ! Faut croire que ça conserve…

Allez hop ! 
2

Comme prévu, le mécano Mauricio passe voir notre combi. Il s’installe sous la voiture et nous dit d’emblée que nos soupapes sont beaucoup trop ouvertes : le diamètre actuel est de 25 mm, alors qu’il devrait être de 15 mm. Mauricio nous apprend que les soupapes de combi doivent normalement se régler tous les mois, surtout si les conditions de voyage sont extrêmes (froid, chaleur, altitude… on les cumule toutes). Voilà autre chose qu’on ignorait, décidément ! On roule avec le même réglage depuis notre séjour chez Léo, il y a près de cinq mois… L’ajustement devant s’effectuer avec le moteur complément à froid, Mauricio repassera demain matin.

Ce même lendemain, Mauricio se pointe à la première heure. Il passe aussitôt sous le combi pour commencer le travail. On le regarde faire alors qu’il pleuviote. Il nous propose d’aller tester la voiture sur une bonne distance avant de passer à son atelier pour les réglages finaux. C’est parti pour une heure de grimpette en direction de Jujuy : on démarre bien mieux, et la voiture a enfin plus de puissance dans les montées. On s’arrête de temps en temps pour vérifier la température : pas de surchauffe. Ouf, ça semblait donc bien être les soupapes.

Arrivés devant chez Mauricio, on est surpris par le nombre de combis dans son garage ! On en compte au moins une quinzaine, dans tous les états possibles. Au moins pas de doute, on est tombé sur un vrai spécialiste ! Un autre couple d’Argentins fait également réviser son moteur : leur véhicule a la particularité d’être une ancienne ambulance, avec un énorme toit surélevé. On papote de nos voyages respectifs pendant que Mauricio nettoie le carburateur, change les joints et les gommes ou procède à des essais. On en apprend plus sur la vie de notre mécano. Mauricio est témoin de Jéhovah, il a vécu 10 ans en Bolivie pour prêcher dans un village particulièrement reclus, où la population – réfractaire à la technologie –n’utilisait que des voitures anciennes. C’est là qu’il a progressivement appris à désarmer les combis. À son retour en Argentine, il a maintenu cette activité et cela fait maintenant huit ans qu’il est mécanicien spécialisé. Quel drôle de parcours…

Olinda est désormais prête. Il est temps de dire au revoir à Salta. Quitter la ville est aussi compliqué que d’y entrer : on se mange des erreurs de GPS, des embouteillages, et on se trompe encore de sortie. On arrive tard dans un petit village de la région, où Quentin va acheter quelques bonnes empanadas pour le dîner.

3

Après une petite grasse matinée sous la bruine, il est temps de traverser la Quebrada del Toro. Cette dernière est étonnement verdoyante, et le ciel couvert renforce la sensation de tropicalité. Cette route a également la particularité de longer une voie ferrée, celle du fameux Train des nuages !

Le Tren de las nubes, dans la langue de Pénélope Cruz, est la portion locale d’un ensemble beaucoup plus vaste : celui d’un projet fou qui voulait traverser les Andes d’est en ouest. Les travaux débutèrent en 1921, pour s’achever en 1948, au terme de plusieurs centaines de kilomètres, 29 ponts, 21 tunnels et 13 viaducs ! Pour l’anecdote, le maréchal Tito travailla comme contremaître sur le chantier. Dans les années 1970, ce train se transforme en attraction touristique, mais le manque d’entretien réduit considérablement les portions exploitables : seuls 44 kilomètres peuvent encore se parcourir sur les voies ferrées. Le trajet en voiture nous permet de suivre en grande partie le tracé du train qui passe de manière impressionnante à flanc de collines ou carrément à travers elles. Nous atteindrons le point d’orgue du tracé ferroviaire le lendemain.

Pour l’heure, nous avons franchi le cap des 3 000 mètres d’altitude et le paysage se remet à changer. Adieu la forêt luxuriante, nous sommes de retour dans des paysages arides. Ça grimpe et ça tape : on boit régulièrement de l’eau et on mâchonne souvent de la coca. La pause de midi se fera dans un minuscule hameau blanc, doté d’une jolie église dont la charpente est en bois de cactus. Sur la route, on se fait arrêter par la police argentine pour une inspection en règle d’Olinda. Si le chef d’équipe s’attelle à sa besogne d’une façon assez bourrue, ses collègues nous renseignent sympathiquement sur l’état des routes et les attractions du coin.

On continue notre montée jusqu’à passer un col à 4 100 mètres d’altitude. Un panneau nous apprend qu’un record du monde y a été battu : ce fut le plus haut endroit jamais atteint par une automobile en 1915. On se laisse couler pendant plus d’une heure sur la redescente.

Alors que le paysage est de plus en plus sec, une ville se dessine au loin. C’est San Antonio de los Cobres, notre prochaine étape. On se pose sur le parking de l’office de tourisme. La lumière tombe en même temps que la température… Sous-couches thermiques, pull en alpaga, chaussettes, bonnet, couverture en laine : une nuit bien emmitouflés en perspective !

Au réveil, il fait sacrément froid ! On se rend compte qu’il y a de la glace sur les vitres, mais à l’intérieur ! C’est dur de sortir du lit… Olinda elle-même a du mal à démarrer ; il faudra la faire chauffer quinze minutes.

Encore cinq minutes...

Le soleil se lève enfin pour nous accompagner jusqu’au clou du spectacle du train des nuages, le viaduc de La Polvorilla. La route elle-même vaut, comme toujours, le déplacement. L’aridité, la poussière et les cactus nous tiennent compagnie. Nous passons également devant une mine, toujours en activité, qui ressemble pourtant à un chantier désaffecté avec ses édifices rouillés. Celle-ci jouxte un cimetière riquiqui, réservé aux mineurs et posé à flanc de montagnes.

Enfin, voilà le viaduc. Il culmine à 4 200 mètres d’altitude, la plus haute portion du Train des nuages. On s’imagine ce que peuvent ressentir les passagers quand le wagon s’engage sur ce passage impressionnant, long de 240 mètres et à 70 mètres du sol…

Avez-vous vu Quentin ? 

Après avoir allégrement lorgné cet ouvrage, nous repassons par San Antonio de los Cobres pour continuer notre remontée vers le nord.

4

Passé San Antonio, notre GPS fait des siennes en nous indiquant un « raccourci ». Bien benêts, nous lui faisons confiance. On roule 30 minutes sur une piste qui fait boing-boing et qui semble ne déboucher sur rien. En réalité, elle débouche bel et bien, mais sur un fleuve. Le gué est impossible à traverser : le niveau de l’eau est trop haut et il y a beaucoup de vase. Après notre aventure dans le sable, nous n’avons pas envie de tester les capacités amphibies d’Olinda. Demi-tour. C’est reparti pour une demi-heure de secousses. Quelle perte de temps. Heureusement, nous croisons sur le chemin des troupeaux d’ânes à croquer qui portent des pompons colorés aux oreilles. Canard est gaga…

On reprend la bonne route, qui s’avère tout aussi difficile que la mauvaise. Pendant des kilomètres, on roule sur des vaguelettes de terre qui tuent le dos, usent les suspensions et font faire un boucan d’enfer au van. On entend presque les cuillères et les fourchettes voler dans leur boîte dans le placard ! Mais nous sommes récompensés par les paysages et leurs habitants : on aperçoit des troupeaux de vigognes gracieuses et un nombre impressionnant d’ânes et de lamas, tous sertis de leurs petits pompons multicolores. Marion les mitraille à chaque passage.

Mais d’un coup : halte ! Devant nous, la route s’est effondrée ! Une tentative de remblayage a bien été faite, à coup de pierres et de branchage, mais il faut clairement un 4x4 pour oser passer ça. Pas question pour nous de s’enfoncer là-dedans et de prendre le risque de rester coincés ici. Encore une fois, il nous faut faire demi-tour. Nous allons devoir emprunter une autre route qui contourne les salines où nous nous rendons. Cela représente un détour de plusieurs heures par des pistes en mauvais état.

Heureusement, la vue sur la puna, les hauts plateaux andins, vaut le contre-temps. Les herbes rases et jaunies, les hautes montagnes colorées, les salines qui se dessinent vaguement au loin… Tout mérite le coup d’œil. Nous sommes seuls au monde, pas une voiture ou un humain croisé de toute la journée ! Mais des lamas, vigognes, bourriquets, vaches… nous tiennent compagnie. Quelle arche de Noé.

Au bout de plusieurs heures de route épuisantes entre sable et poussière, une immense tâche blanche nous éblouit. Nous sommes arrivés aux Salines Grandes. Il y a 10 millions d’années, les montagnes de la région captaient les pluies et l’activité volcanique les chargeait en minéraux, créant ainsi un immense lac salé fermé. Depuis, l’évaporation a joué son rôle, faisant apparaître ces déserts de sel.

Nos premiers pas sont étonnants : ça craque sous les chaussures. On marche sur des croûtes de sel qui forment de jolis motifs au sol. Au loin, des bassins sont alignés : les ouvriers ont creusé la surface jusqu’à tomber sur l’eau pour en extraire la fleur de sel. Le turquoise y est sublime.

Plusieurs panneaux rappellent qu’ici se joue une bataille importante : les communautés locales s’opposent à l’extraction du lithium contenu dans les salines au nom de l’environnement. Du coté chilien et bolivien, les multinationales s’en donnent à cœur joie. En Argentine, la résistance est en cours mais pour combien de temps encore ? Les compagnies minières déploient leurs arguments et tentent d’acheter les villages…

Après cette longue journée passée à plus de 4 000 mètres, nous descendons à Purmamarca à 2 500 mètres. La route tout en virages est superbe. Nous la parcourons en plus avec les lumières du coucher de soleil. Un bon repas dans un petit resto et au dodo !

5

De bon matin, nous partons à l’assaut des montagnes colorées qui encerclent Purmamarca. Une petite balade part du centre et permet de marcher dans les collines aux teintes multiples. On débouche ensuite sur la place centrale qui est recouverte d’étals : vêtements, chapeaux, peluches sont alignés. Une belle église à l’ombre d’arbres centenaires constitue un petit havre de tranquillité face à cette profusion commerciale.

Nous continuons notre chemin en direction de Tilcara. Arrivés au village, on apprend que la forteresse et le musée sont fermés aujourd’hui. Nos guides ne sont donc pas à jour… quel dommage, nous avions hâte de plonger à nouveau dans l’histoire précolombienne. À défaut de pouvoir découvrir les ruines, nous nous promenons dans le village et mangeons d’excellents chaussons achetés à une vendeuse ambulante.

Nous passons l’après-midi dans les environs d’Urquia. Le hameau est désert, ça change des ambiances touristiques de ce matin. Le canyon de las Señoritas est encore une fois haut en couleurs et en formations rocheuses étranges. Le vent et l’eau ont créé un impressionnant paysage. On s’engouffre notamment dans l'incroyable « amphithéâtre », étroit chemin qui serpente dans les falaises écarlates jusqu’à un cul-de-sac.

Nous passerons la nuit dans le village d’Humahuaca, porte d’entrée de la spectaculaire Serrania de Hornocal. Cette chaîne de montagnes, à 20 kilomètres de là, se mérite ! La piste qui y mène, toute en montée et virages en épingle, est difficile. Trous, vaguelettes, précipices obligent à une concentration sans faille. Malgré tout Olinda s’en sort bien, surtout quand on voit des gros pick-up caler en plein virage, alors que de notre côté on a réussi à maintenir notre vitesse jusqu’au bout (bon, en première vitesse certes…)

Nous sommes à 4 350 mètres d’altitude, devant une petite guitoune où l’on paye l’accès au site. Une énorme montée nous attend encore pour accéder au parking final. On tente, mais sans élan et avec une puissance réduite de 30% à cause de l’oxygène manquant, nous nous arrêtons en plein milieu de notre ascension. Impossible de continuer, la voiture ne suit plus… On se laisse donc couler en marche arrière. La route est loin d’être large et rectiligne, pas évident de manœuvrer ! On est très près (à quelques centimètres) d’un gros fossé. Si l’on tombe dedans, nous serons coincés. Le gérant du site le constate et vient vite à notre rescousse. Il met des énormes pierres derrière et nous guide pas à pas pour nous remettre un peu plus au centre du chemin et finir la descente. Merci encore à lui ! C’est la première fois en 5 mois qu’Olinda ne franchit pas une étape. Mais il faut bien avouer qu’on est plutôt fiers d’elle vu les conditions.

"Je suis proche ?" 

On se gare et des touristes israéliens acceptent de nous prendre en stop jusqu’à l’attraction située à seulement 2 kilomètres de là. Nous voilà enfin arrivés à bon port. La Serrania de Hornocal se dresse devant nous.

C’est le paysage de montagnes colorées le plus impressionnant que nous avons vu jusqu’à présent. Et pourtant, vous l’avez constaté, cela fait déjà plusieurs semaines que l’on évolue dans des paysages de ce type, tous plus époustouflants les uns que les autres. Mais, là, c’est un cran au-dessus. D’abord, la forme de la chaîne de montagnes est étonnante : tout en accordéon. Ensuite, les pentes striées sont immenses. Enfin, le site est entouré d’une puna verdoyante qui fait encore plus ressortir les teintes rouges et violettes. C’est à couper le souffle ! Et c’est d’ailleurs le cas, car l’altitude nous essouffle sacrément. On s’enfile quelques feuilles de coca pour se booster un peu et on déguste de délicieuses empanadas assis devant cette véritable palette de peintre. Le froid commence à nous engourdir, on laisse derrière nous ce lieu magique.

6

En route toujours plus près de la frontière chilienne, nous apprenons malheureusement que le vol de Martine et Claude, la maman de Marion et son compagnon, vient d’être annulé ! Ils devaient nous rejoindre au Chili, à San Pedro de Atacama, dans quatre jours ! Ce sera toute une aventure – et une bonne dose de stress – pour faire modifier leur vol. On vous épargne tous ces détails particulièrement pénibles et agaçants. Sachez juste qu’ils pourront finalement bien nous retrouver ; ce sera l’objet de notre prochain carnet !

 Une nouvelle "palette de peintre" sur la route

C'est avec ces soucis en tête que nous nous posons au village d'Abra Pampa en fin de journée. La nuit sera frisquette : on sent bien l’altitude ! Le matin, alors que l’on passe plusieurs heures devant le van afférés sur l’ordinateur à aider, à distance, Martine et Claude, les villageois s’arrêtent à notre hauteur : « c’est pour quelle démarche ici ? » Ils croient tous que nous sommes une antenne d’une quelconque administration. Cela nous fait bien rire !

On profite des discussions avec les locaux pour bien se renseigner sur l’état des pistes de la puna où l’on s’apprête à s’aventurer les deux prochains jours. Ils sont formels : la route est très mauvaise, plusieurs gués doivent être passés, il n’y a aucune couverture téléphonique dans le coin et l’altitude est très importante. Il nous faudra être prudents donc ! Avant de partir, on s’assure ainsi d’avoir assez d’eau, de nourriture, d’essence, de feuilles de coca et on prévient les familles de notre itinéraire.

Allez Canard, il faut sortir du lit ! 

C’est parti mon kiki ! Première étape : la laguna de los Pozuelos. Il s’agit d’une petite merveille de la puna : une lagune salée, site majeur de nidification et reproduction des oiseaux, classée comme réserve naturelle et réserve de biosphère. La route qui y mène est déjà superbe, et quasi déserte (on ne croisera que des tracteurs qui aplatissent la piste de terre). Les derniers mètres sont assez folkloriques : plusieurs barrières doivent être précautionneusement ouvertes et refermées. Encore une fois, on tombe en chemin sur des centaines de lamas et vigognes, toujours aussi adorables.

 Coucouuuuuu !

Devant nous, la lagune est immense : on n’en voit pas le bout. C’est effectivement le paradis des oiseaux : s’y entassent plusieurs milliers de canards, de flamants, et d’autres volatiles dont le nom nous échappe. Le plateau s’étend à perte de vue. Les montagnes au loin, pourtant immenses, nous paraissent comme écrasées par l’horizon. Les troupeaux de quadrupèdes cohabitent tranquillement avec les innombrables palmipèdes. Quel havre de paix ! Et toujours, quelle splendide solitude !

Après cette balade dans ce paysage marécageux et envoûtant, nous reprenons la route en fin d’après-midi. Comme on croise un vieux monsieur qui marche seul sur le bas-côté, on propose de le prendre en stop. On papote pendant un long moment. Il s’appelle Hugo, c’est un professeur qui a été muté dans une école rurale du coin et qui rentre chez lui. Il vit à plus de 2 h 30 de marche de son lieu de travail et fait l’aller-retour tous les jours ! On apprend aussi qu’en tant que représentant autochtone du peuple Atacama, il a été invité à un voyage en Bolivie par le président Evo Morales il y a plusieurs années. Nous le déposons dans son patelin. La nuit tombe ; on décide de s’arrêter dans les environs pour la nuit, qui sera encore bien froide !

Le lendemain, on continue notre route, qui n’est jamais monotone. C’est une succession sans cesse renouvelée de montagnes, plateaux, canyons, ruisseaux… et toujours ces troupeaux de lamas et de vigognes. On recroise à l’occasion des ânes à pompons, pour le plus grand bonheur de Marion. Enfin, il nous faut parfois traverser des gués assez profonds, qui ont sans doute vu plus de pick-up que de combis dans leur vie.

À croquer, on vous dit ! 

Le repas du midi se fait dans le village de Coranzueli. On a un peu l’impression d’arriver dans une ville fantôme : on n’y trouve pas âme qui vive. Quelques peintures murales et une jolie église lui donne pourtant un petit charme.

Durant le reste du trajet, nous ne croisons que des camions liés aux importantes activités minières de la zone. On se salue à chaque fois : ils ne doivent pas être habitués aux touristes ! On imagine qu’Olinda a dû être le soir-même le sujet de conversation des chauffeurs au coin du feu.

 Au loin, c'est un bassin de déchets...
7

Après deux jours incroyables passés au cœur de la puna argentine, nous sommes fiers d’avoir réussi à atteindre notre but, le village de Susques. C’est notre dernière soirée dans le pays : un petit repas et un bon dodo. La nuit a encore été sacrément fraîche : autour de nous, la moindre flaque d’eau a gelé ! Avant de nous diriger le lendemain vers la frontière, nous visitons rapidement le patelin, notamment son cimetière coloré et son église en bois de cactus.

Le passage frontière est assez détendu. Quelques formulaires, une petite fouille, et zou. Alors que nous grimpons nos ultimes kilomètres à 4 800 mètres d’altitude, on réalise qu’on quitte l’Argentine. Au revoir les empanadas, le maté, l’accent chuintant et autres joyeusetés locales. Pour Canard et Cochon, c’est un peu un retour aux sources : Chili, nous revoilà !

• • •

Suivez toutes nos aventures ici :

https://www.myatlas.com/CanardEtCochon/les-aventures-de-canard-et-cochon