Pour ces derniers jours au Chili, nous décidons de terminer par où nous avons commencé. Avant de gagner les grandes villes, nous repassons donc par la petite vallée de Colliguay, qui fut notre premier point de chute au Chili.
Nous retournons en premier lieu à Agua Madrina, où nous avions effectué un volontariat d’un mois. C’est ici que nous avions appris à construire des murs en adobe, à défricher de la ciguë ou à composter au marteau-pilon. Contact pris avec Gabriel, le propriétaire, nous sommes attendus pour découvrir les avancées depuis notre départ. On laisse Olinda en bas de la propriété et on grimpe pour trouver cinq volontaires, occupés à extraire de la terre à coup de barre à mine. Voilà qui nous replonge dans nos souvenirs… Peu après, Gabriel apparait et tout ce petit monde en profite pour faire une pause. On raconte rapidement notre voyage, nos découvertes et nos ressentis. Gabriel nous trouve beaucoup plus détendus et souriants que la première fois ! Il faut croire qu’un an en Amérique du Sud, ça vous change un homme (enfin, un canard et un cochon).
On se balade ensuite pour constater les progrès dans les différents chantiers : la nouvelle maison en terre sur laquelle nous avions travaillée est presque terminée, un four à pain a été construit sur le relief que nous avions défriché, le poulailler a changé de place, les canaux d’irrigation sont toujours présents même s’ils auraient besoin d’un petit coup de pioche… On serait bien restés un peu plus pour retrouver cette ambiance à la fois rude par tout le travail à abattre et enrichissante par tous les apprentissages possibles, mais nous avons un autre rendez-vous à honorer !
Nous sommes en effet attendus chez Josefina et Seva, qui ont été les premiers à nous accueillir dans ce nouveau pays. Nous les retrouvons chez eux, où ils ont eu la gentillesse de nous inviter pour quelques jours avant notre départ. Quelle sensation étrange, un peu comme un retour à la maison ! Nous sommes à nouveau reçus comme des membres de la famille. Josefina et Seva sont en pleine forme, toujours souriants. On retrouve également les chats fans des gratouilles, et les chiens qui ont changé (le vieux Rey, un peu diminué, passe désormais ses journées allongé, tandis que le chiot Tin-Tin est devenu un grand gaillard toujours aussi foufou).
C’est avec beaucoup de tristesse que nous apprenons le décès, il y a quelques jours à peine, de Diego, le cousin de Josefina. Nous avions eu la chance de le rencontrer lors de notre volontariat à Agua Madrina. Gabriel et ses volontaires viennent en effet régulièrement donner des coups de main à ce voisin. Avec nos compagnons d’alors, nous avions passé la journée à travailler dans sa propriété. Pour nous remercier, il nous avait offert des planches en bois de sa création (Diego était un artisan ébéniste). Nous rentrerons en France avec ces cadeaux pour faire vivre la mémoire de son œuvre. Avec Josefina, nous sommes passés saluer Liz, la veuve de Diego.
Durant notre séjour, nous donnons des coups de main à la maison de nos hôtes : couper les lavandes, déblayer du bois ou des encombrants, retirer les orties du jardin, cuisiner… On retrouve la vie saine et simple de notre premier séjour à Colliguay. Chaque repas est l’occasion de raconter notre folle année. Nos anecdotes et rencontres amusent ou émerveillent Josefina et Seva. Ils nous partagent également les moments forts de leur année. Josefina revient ainsi sur les terribles incendies qui ont eu lieu et toutes les actions d’entraide qui en sont sorties renforcées, sans parler des nouveaux projets pour mieux faire face en cas de prochain épisode.
Un matin, il est déjà l’heure de partir… nous disons adieu à Josefina et à Seva. Leur aide et leur gentillesse, du début à la fin, auront vraiment fait la différence dans notre périple. Le vieux Rey, sentant l’ambiance, jappe tristement alors que nous nous éloignons, et même le foufou Tin-Tin a la mine basse. Canard et Cochon, de leur côté, ont du mal à retenir leurs larmes…
Nous quittons Colliguay en admirant une dernière fois la vallée verdoyante. Nous voici à présent en pleine cambrousse, à plusieurs kilomètres de la première habitation. Nous sommes chacun perdus dans nos pensées, un peu tristes. Heureusement, Olinda a prévu une dernière surprise pour nous changer les idées : d’un coup, notre câble d’accélérateur se rompt et la pédale ne répond plus. Panique à bord et arrêt en plein virage sur une montée. Impossible désormais d’avancer. Nous sommes coincés au milieu de nulle part !
Bon, au moins nous n’avons pas le temps de nous appesantir. Une première voiture s’arrête, puis d’autres. Finalement, une demi-douzaine de bonhommes vient pour pousser Olinda jusqu’à un bas-côté assez stable. Parmi eux, l'un a des notions de mécanique. Il nous bricole le moteur pour continuer notre route : il bloque manuellement l’accélérateur sur une vitesse depuis le carburateur. Olinda peut repartir, à 15 kilomètres/heure, pour atteindre une ville. Marion reprend le volant. Nous sommes officiellement la voiture la plus lente du continent, mais au moins on avance…
Pour s’assurer que notre vieux tacot ne s’arrête pas en montée, Quentin saute à plusieurs reprises, en pleine marche, pour aller pousser. Dès qu'un plat est atteint, il doit revenir en courant et bondir dans l’habitacle, puisque Marion ne peut pas s’arrêter. Encore une première pour nous... Quelle aventure burlesque !
Finalement, on atteint une zone habitée avec du réseau Internet. Par sécurité, nous décidons de nous arrêter ici, car poursuivre nous engagerait sur une nationale. Olinda posée bien à plat, on contacte un mécano spécialisé en combi à Villa Alemana, à quelques kilomètres d’ici. On est dimanche et on doute que quelqu’un répondra. Réponse du mécano dans la minute qui suit la réception du message : « Bonjour. J’arrive tout de suite, envoyez moi votre localisation » ! 30 minutes plus tard, voici Patricio, qui nous change le câble en un rien de temps. Il en profite pour ajuster notre embrayage, et jeter un œil sur le moteur. Il confirme le diagnostic du garagiste de Mendoza : nous avons un bruit inhabituel, probablement dû à l’usure du vilebrequin. La décision est prise : pour vendre Olinda, il faudra faire rectifier le moteur.
Seul problème : cela peut prendre des semaines, et nous quittons le pays bientôt. Nous contactons aussitôt Juan Pablo de l'agence Overandes, qui se chargera de la vente pour nous. On lui explique la situation, en lui demandant si un mécano peut travailler sur Olinda et lui apporter le van après notre départ : « aucun problème, c’est même une très bonne idée : un moteur rectifié sera un excellent argument pour la vente ». Ouf, tout semble bien se goupiller malgré les rebondissements de dernière minute.
Nous prenons donc rendez-vous avec le mécano Patricio dans quelques jours. Nous avons encore en effet besoin du van pour nous rendre à Viña del Mar pour dire au revoir à d’autres personnes.