C’est parti pour une nouvelle journée d’aventures ! Nous mettrons trois heures pour faire 35 kilomètres. Il nous faut d’abord dévaler toute la montagne de Jalca Grande, puis reprendre la route principale défoncée et enfin bifurquer en direction d’une autre montagne. Là, c'est une montée continue qui nous attend jusqu'au village de San Bartolo, perché à 2 800 mètres d'altitude. Le trajet, une nouvelle fois tout en zigzags, nous donne des sueurs froides. Surtout la dernière partie, qui traverse des patelins aux rues minuscules et aux virages épouvantables.
Finalement, on atteint San Bartolo, et nous sommes étonnés de voir une jolie place centrale, avec sa petite église et ses maisons basses, au bout de ce trajet improbable. Olinda peut faire une bonne pause ; de notre côté nous nous rendons à la nécropole de Revash.
Nous sommes accompagnées par une étudiante en tourisme qui fait son stage de fin d’étude ici. Cette dernière nous fait un topo sur le site et sa région durant le chemin. Elle pose régulièrement des questions aux habitants pour s’assurer de nous donner le bon nom de tel arbre ou telle fleur.
Après une agréable balade, nous arrivons devant la nécropole de Revash qui daterait des années 1300 après J.-C. Voici l’un des sites les plus célèbres de la culture chachapoya. Des sortes de maisonnettes sont creusées à flanc d’une falaise abrupte. Avant que les pilleurs ne débarquent, elles abritaient des momies de la haute société. Certains ensembles sont peints en rouge et beige et d'autres ont des motifs étranges, encore non déchiffrés. Quel endroit étonnant, mais superbe, pour des tombes ! On se demande vraiment comment cette civilisation put réussir à bâtir ces monuments dans un endroit aussi peu accessible. Une chose est sûre : de là où ils reposaient les défunts jouissaient d’une vue incroyable sur toute la vallée.
Sur le retour, nous nous arrêtons devant une maison traditionnelle construite selon la technique locale dite muesca. Quasiment tout village est bâti ainsi. Il s’agit d’une superstructure faite de troncs d’arbre imbriqués tels des Kaplas. Les troncs sont taillés pour reposer les uns sur les autres ; pas besoin d’autres outils. Le tout est ensuite rempli d’adobe. En cas de secousse sismique, seule la terre séchée s’effrite, le reste de la charpente reste debout. Cette méthode est à l’épreuve des faits : nous apprenons que cette habitation a plus de cent ans !
La propriétaire de la maison nous explique patiemment cette technique de construction à l’aide d’une petite maquette qu’elle nous invite à refaire pour s’assurer que nous avons bien compris. Très accueillante, elle nous propose de nous reposer dans son jardin et nous offre du maïs bouilli, des œufs frais et un jus d’un fruit local appelé pepino dulce (concombre sucré), tout en discutant. Autour de nous gambadent allégrement des poules, dindons, chiens, cuys… On doit prendre garde aux poussins qui tentent de manger nos grains de maïs ! Típico !
De retour sur la place centrale, on nous propose de garer Olinda sous l’abri de l’office de tourisme. On s’exécute avec plaisir. Nous avons même droit à de l’électricité et des toilettes. Il pleuvra toute la nuit, et serons sommes bien contents d’être abrités pour cuisiner.
Le lendemain nous quittons cet agréable hameau. Les villageois nous informent qu’une nouvelle route, qui ne figure pas encore sur les cartes, vient d’être tracée. C’est plus rapide pour rejoindre notre prochaine destination. « Il y a un peu de montée au départ, mais après, ce n’est que de la descente ». On s’embarque sur un chemin, terra incognita de notre GPS. On s’en mord rapidement les doigts. La « route » est en réalité une piste réservée au 4x4, aux dénivelés faramineux et à la tenue chaotique.
Sur une montée, Olinda cale ! C’est la première fois depuis plusieurs mois. Quentin sort mettre des pierres et pousser. Ouf, on repart. Mais d’un coup : horreur ! Une vaste pente se dessine et nous avons vraiment peur de ne pas réussir à la gravir avec les trous et le gravier qui nous font perdre notre élan. Ici, difficile de se laisser couler : c’est un coup à finir dans le fossé (au mieux) ou dans le vide (au pire). Alors, nous prenons la décision d’alléger au maximum Olinda : exit les bidons d’eau, d’essence, les caisses de matériel… et même Cochon (on soulage donc le van d’un peu plus de 100 kg) ! Tout ça est mis en bord de route le temps d’effectuer la montée. Marion passe la première, avec Quentin qui court derrière pour pousser en cas de ralenti. Ouf, c’est bon on a réussi ! Marion fait reposer le moteur sur du plat. Quant à Quentin, il n’a plus qu’à aller chercher à pied tout ce que nous avons laissé en contrebas…
La descente arrive enfin. Mais le soulagement est de courte durée. La route dessine d’interminables lacets. On frôle souvent les précipices et on rase les murs dans les hameaux traversés. Nous ferons une pause bien méritée pour le déjeuner dans l'un des villages. Sa place centrale est gigantesque par rapport aux quelques bâtiments qui l'entourent. Puis, on termine par une autre série de zigzags que nous apercevions au loin depuis Jalca Grande, sans se douter un instant que nous finirions par emprunter ce trajet de l’enfer.
Ouf, nous voici à nouveau sur la route principale. Il n’y a plus qu’à suivre la rivière, en évitant les centaines de trous qui parsèment le chemin et obligent à faire du 20 kilomètres/heure. Vraiment, quelles routes !