De retour à Chau Doc, il nous reste à explorer les villages chams qui sont installés sur les rives du fleuve. Un matin, on part donc faire du repérage pour une balade en bateau dans l’après-midi. Sur les quais, on se fait alpaguer par un pilote. « Je vous propose un tour à 500 000 dongs pour vous deux ! ». Merci pour l’info, mais on va d’abord visiter le centre-ville. « Haaa, bon je comprends, alors écoutez, je vous le fais à 450 000 ». Heu, merci, mais vraiment, là on fait d’abord un tour en ville. « Hoo, bon, écoutez, je peux descendre à 400 000 mais pas plus ». NON MAIS VRAIMENT ON VEUT D’ABORD… tu sais quoi ? Allez, vendu, si y’a que ça pour te faire plaisir. On change nos plans, direction le bateau dès maintenant. On ne voudrait pas froisser ce pauvre pilote…
Jean-Michel Paduran-Naffaire Allez, hop ! La ville étant peu touristique, nous sommes les seuls à bord. Nous commençons par longer un grand bras de fleuve, bordé par de nombreuses maisons. La plupart sont en tôle, mais avec une particularité : elles sont regroupées en fonction de leur couleur. Il y a donc un quartier mauve, un quartier jaune, un quartier rouge… Comme c’est surprenant. Alors que nous pensons d’abord avoir affaire à des maisons sur pilotis, nous nous rendons compte en nous approchant qu’il s’agit en réalité de maisons flottantes. La plupart dispose d’un bateau accroché devant leur demeure et d’un petit espace qui fait office de terrasse. C’est tout un quartier qui vit sur l’eau et de l’eau.
Notre guide nous apprend que la plupart des villageois ont comme activité principale la pisciculture. Nous faisons d’ailleurs une petite pause dans l’une des maisons : au milieu de la demeure, des trappes au sol permettent d’accéder aux cages où sont élevés les poissons. Des centaines d’entre-eux s’agitent quand on jette une poignée de graines. Nous voici face à un univers vraiment unique.
Direction ensuite un autre village, celui-ci sur la terre ferme. On accoste difficilement dans les plantes aquatiques épaisses qui colonisent les rives. C'est l'occasion de constater que certaines familles, probablement plus pauvres, vivent tout simplement dans leur embarcation, et non dans des maisons.
Au loin, on aperçoit un grand minaret dominer les environs. Nous sommes en effet dans la communauté musulmane des Chams, une minorité ethnique du Sud-est asiatique, autrefois à l’origine d’un royaume. Vous vous rappelez qu’ils furent les grands ennemis de l’empire d’Angkor. Ils ont également été combattus par les Viêt. Aujourd’hui, ils ne possèdent plus de pays en propre et sont éclatés sur différents territoires, conservant leur religion et leur particularisme. La petite balade dans le village nous plonge dans un environnement vraiment à part du reste du Vietnam : les femmes sont voilées, les hommes portent de longs sarongs, des calots et des tentatives de barbes. On atteint finalement la mosquée, épicentre communautaire.
Les musulmans ne sont pas la seule minorité religieuse. Au cours de notre découverte du delta du Mékong, nous tomberons souvent sur d’imposantes églises catholiques et sur des centres évangéliques.
Photo prise dans une autre ville, pour l'exemple Nous terminons notre tour en bateau vers le centre de Chau Doc. Cette fois, ce sont bien des maisons sur pilotis que nous trouvons. Le trafic fluvial est ici plus intense. On croise même une station-service flottante. Voilà une balade qui nous a permis de nous immerger dans la vie quotidienne dans cette région amphibie qu’est le delta du Mékong.
Chau Doc et sa région sont une porte d'entrée originale pour le Vietnam, encore à l'écart des grands circuits touristiques et des métropoles bouillonnantes. C'est l'occasion de vivre au même rythme que les habitants et de s'imprégner des particularités de ce nouveau pays. Nous allons continuer notre découverte du delta un peu peu plus au sud. D'ici là, nous vous laissons avec une petite vidéo :