Dernier réveil à Alter do Chão. C’est, un peu tristes, qu’on quitte cet endroit qui nous a vraiment enchantés. On rejoint Santarem en taxi, étant donnée l’expérience dans le bus de l’enfer à l’aller. C’est reparti pour un tour à bord d’un ferry pour finir la descente de l’Amazone. Nous avons 3 heures d’avance. Pourtant le ferry qu’on voit au loin nous semble déjà bien rempli. Et en effet, il est plein à craquer. Et surtout il est petit, bien plus petit que celui de la dernière fois… Le réfectoire, riquiqui, sert un plat unique (le tragique riz-haricot-spaghetti avec du poulet), il y a peu de toilettes, peu d’endroits pour se dégourdir les jambes… Bref, on se dit que le trajet risque d’être assez long. Mais c’est ce qu’on est venu chercher dans cette expérience alors on reste heureux d’embarquer et de vivre cette nouvelle aventure.
Mais on tourne, un peu inquiets, pour trouver deux places acceptables. On finit par s’incruster entre plusieurs personnes. Notre voisin nous apprend à faire des nœuds pour fixer le hamac sur les barres du plafond (le précédent ferry avait des crochets). On est les pieds dans la tête des uns et des autres ou épaules contre épaules, au choix ! A 13h, les moteurs se mettent à ronronner, les derniers vendeurs ambulants quittent le pont, les derniers hamacs s’accrochent. C’est parti…
Le bateau plus petit nous fait aussi davantage ressentir les vagues. Le moindre tangage fait un effet domino. Le propos du Brésilien du précédent bateau (« c’était espacé et confortable ») prend tout son sens. Tout comme le mot « promiscuité » ! Allez, c’est l’aventure. Et puis, trois jours de bateau pour 35 euros, nous ne nous attendions pas au Club Mer On The Sea de toute façon.
A nos côtés, deux hommes originaires de Belém nous conseillent sur les visites à faire et les endroits où manger. Les premières heures s’écoulent assez semblablement à celles du précédent ferry. C’est du repos, de la lecture, les paysages qui défilent… A 18h30, c’est déjà l’heure du repas : on se force un peu mais on commence à saturer du riz-haricot-spaghetti.
En fin de journée, nous nous arrêtons au port de Monte Alegre pour charger des citrons verts. C’est visiblement la spécialité du coin. Le spectacle est impressionnant : des centaines et des centaines de caisses s’empilent sur des dizaines de mètres au quai. Il doit y avoir des millions de citrons ! Les dockers chargent non-stop pendant une heure, deux heures, trois heures… sous l’œil attentif des passagers qui assistent à la scène. Des citrons tombent parfois dans l’eau. Ça sent le citron sur tout le pont inférieur. De temps en temps, les marins lancent des citrons aux gens du pont supérieur, qui tentent de les attraper au vol. Au bout de la sixième heure de chargement de citrons, on va se coucher. Il ne nous reste plus qu’à faire des beaux citrons… heu, des beaux rêves !
Le lendemain, nous sommes comme d’habitude réveillés, lors d’une escale, par les vendeurs ambulants à qui on achète des gâteaux et des chips. Notre voisin nous informe que le chargement de citrons la veille aura finalement duré plus de 8 heures, et que nous sommes repartis à minuit ! Ce n’était visiblement pas prévu, on sait donc qu’on aura déjà autant de temps de retard.
Marion profite du temps libre pour monter la vidéo sur les chutes d’Iguaçu, Quentin pour lire. Dring, 11 heures ! C’est le moment de se (re)farcir du riz-haricot-spaghetti. On mâchonne. On déglutit. Mais on peine. Nous n’arrivons même pas à finir un plat pour deux. On conclura le repas par nos salvatrices chips de banane. Marion expérimente la douche à bord qui se prend dans les WC qui sont tous équipés d’un pommeau fixé au plafond. Puis sieste et encore du repos. Nous sommes comme « hors du temps ».
Dans l’après-midi, nous constatons que d’innombrables asticots blancs, visiblement échappés d’un sac de nourriture avariée, se répandent sur le sol et rampent allégrement tout autour de nous. On est bien content d’être en hamacs, mais on s’inquiète un peu pour les bagages. On gardera un œil sur la situation, écrasant les malandrins qui s’aventurent trop près de nos effets personnels.
Sur le bateau, des buffles !En fin de journée, on assiste à un spectacle assez incroyable : plusieurs pirogues s’attachent à notre ferry pour tenter de vendre des crevettes, de l’açai ou des cœurs de palmier. Marion passe presque une heure à regarder ce trafic. Certaines pirogues sont pilotées par des enfants. Tous manient à la perfection leur embarcation pour se mettre à la même allure que notre ferry puis l’accrocher aux bouées du ferry et enfin escalader les ponts avec, dans les bras, des paniers de crevettes ou bocaux de palmiers. C’est assez effrayant de les voir faire, à tout moment ils peuvent faire un mauvais mouvement et tomber à l’eau ou sur leur moteur… Notre voisin nous explique que cette zone de l’Amazone est connue pour la qualité de ces produits. C’est ainsi que la plupart des gens à bord vont effectivement se ravitailler.
Puis nous assistons encore à un merveilleux coucher de soleil comme tous ceux qu’on a pu voir depuis qu’on est en Amazonie. La nuit, on se cogne un peu les uns aux autres mais on finit par s’endormir, bercés par le vent et le ronronnement des machines.
Voici le troisième jour de bateau qui pointe le bout de son nez. Les asticots sont toujours là. Les paysages commencent à changer : on a quitté le très large fleuve Amazone pour prendre une multitude de petits affluents. On regarde d’ailleurs sur notre application GPS où l’on est tellement on semble perdu dans un dédale de cours d’eau. Les rives ici sont par conséquent pus proches, ce qui nous permet de mieux les admirer. Quelques maisons sur pilotis en bord de fleuve, quelques pirogues parties pêcher, quelques lagunes ou lacs qui se forment, des envols d’oiseaux, etc. Le paysage est toujours aussi captivant.
Mais au bout d’un moment, cette journée finit par nous sembler un peu longue. On a hâte d’arriver et on commence à s’ennuyer. Des enfants jouent vers nos bagages sous nos hamacs et se servent de la valise de notre voisin comme table pour faire de la pâte à modeler. C’est l’animation de notre journée ! A 11h, on manque de mettre un coup de boule à une gamelle de riz-haricot-spaghetti qui nous passe sous le nez. On préfèrera manger les quelques fruits qu’on avait apportés (des fruits de la passion et des pommes) et se gaver de chips et de biscuits industriels au sirop de glucose et à l’huile de palme, c’est dire notre état d’écœurement !
Finalement, des grues et des gratte-ciels se dessinent au loin. Le port de Belém est enfin en vue. Il est presque 14h et nous avons 6h de retard. Nous aurons passé 56 heures sur ce bateau.
Arrivés à l’hôtel, on se douche en profondeur et on vérifie qu’aucun asticot ne s’est glissé en douce dans nos sacs. La ville de Belém et l’île fluviale de Marajo nous attendent. L’aventure continue…