De Grenoble à Nice, 525 km, 8400 m D+, par les petites routes de montagnes. Un challenge perso pour s'offrir une parenthèse de décompression, se dépasser et se retrouver.
Mai 2022
8 jours
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41 km, D+ 1110m

Départ en vélo de la maison sous un magnifique soleil ! Direction la gare de proximité où le TER me dépose à Grenoble.

La traversée de la ville fut à ma grande surprise plutôt agréable grâce à la présence de nombreuses pistes cyclables.

Ensuite ce sera 16 km de montée non stop. Le plus difficile fut la circulation. Les voitures qui ont oublié la distance de sécurité d'1m50 pour doubler les cyclistes, mais surtout, les très très nombreuses motos, qui font vrombir leurs moteurs et qui me déchargent de nombreuses "petites cuillères" à chaque fois !

Heureusement, d'autres personnes m'ont redonné des cuillères, par leur admiration.

Un cycliste, en me doublant, me félicite chaleureusement et me dit qu'il serait bien incapable de monter avec mon VTC et mes sacoches.

Un monsieur côté passager a sorti son bras de la fenêtre pour me faire un signe pouce vers le haut.

Une autre voiture m'a klaxonnée un peu plus loin. Bon là, le bruit du klaxon ne m'a pas aidé, mais ça partait d'une bonne intention !

Habituellement, quand je fais du vélo, peu de cyclistes aguerris me saluent. Là, ils m'ont tous dit bonjour en me doublant. Je crois que dans une montée difficile, les sacoches forcent le respect !

Sur le parcours, j'ai fait une petite pause au Mémorial de la Résistance. Ici 100 résistants du Vercors sont enterrés. J'ai marché dans les allées. Les stèles portent le nom des défunts, leur âge et leur fonction. C'est très émouvant.

Arrivée à St Nizier de Moucherotte, je me suis octroyée une petite récompense. Je l'avais bien méritée. Sur la place du village, j'ai commandé une gaufre à la myrtille. Ensuite je suis repartie jusqu'à mon hébergement.

Trouver où dormir sur ce parcours a été une véritable galère. Tout a été pris d'assaut avec le weekend de l'Ascension. Ce soir, je loue une chambre chez un habitant ( il y a 4 chambres louées). Il est gentil, mais c'est tout crado !


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87 km, D+ 1200m

Départ dans la fraîcheur matinale pour cette deuxième journée.

Je rejoins la Via Vercors jusqu'à Villard de Lans. Bien emmitouflée dans mes gants et mes pulls, je m'engouffre sur un sentier de caillasses, pas vraiment adapté à mon vélo. Je roule au pas, voire pose le pied à terre dans les descentes bien marquées. Heureusement la forêt environnante est très agréable, et j'apprécie finalement cette petite incursion.

Je traverse ensuite les spectaculaires gorges de la Bourne. Impressionnant canyon !

Il y fait si sombre que tous les cyclistes ont des petites loupiotes à l'arrière de leur vélo, pour être sûr d'être bien vu des voitures. La route n'est pas large et la cohabitation n'est pas toujours très commode. J'ai bien allumé également mes petites lumières.

La descente des gorges est vraiment très plaisante. Mais difficile de s'arrêter pour faire des photos. Et le rendu photographique n'est clairement pas à la hauteur du ressenti .

Le Vercors, haut lieu de la Résistance, a de nombreux mémoriaux et nécropoles. A la Chapelle en Vercors, le mur des fusillés nous rappelle l'histoire de 16 jeunes assassinés par les nazis.

La traversée du plateau est très ressourçante.

Du vert, beaucoup de vert ! Des forêts bicolores, des falaises de calcaire, de la caillasses et au loin, le relief atypique du versant Est.

C'est là, en ne roulant pas vraiment droit à force de vouloir admirer la paysage, qu'est arrivée Brigitte, sur son vélo de course. Elle m'a branchée sur mes sacoches, évidemment ! C'est mieux que les bébés et les chiens pour se faire accoster ! Deux sacoches sur un vélo, au milieu des montagnes, et hop, une Brigitte 😂 !

Elle habite Toulon et vient en famille à une sortie / compétition de VTT. Son mari et sa fille sont à fond vélo, elle un peu moins. Du coup, elle se fait des petites balades seules plus tranquilles. On a parlé vélo 15 minutes, puis elle a poursuivi sa route. Merci Brigitte pour m'avoir rechargée en petites cuillères !

Arrivée au col du Rousset, il faut croire que je n'en avais encore pas assez, je remarque une petite route qui s'élève. En regardant sur le plan, je vois qu'elle mène à des remontées mécaniques. Bercée d'espoir d'y découvrir un beau point de vue, je m'élance sur cette montée qui me semble interminable. Presqu'à la fin, je constate qu'il n'y a rien d'extraordinaire sur cette route... Un coup pour rien. Tant pis, je fais demi tour et arrive à un tunnel étroit et mal éclairé, qui débouche sur la vallée de Die. C'est grandiose !

La très longue descente avec ses innombrables lacets me conforte bien dans cet avis : je DETESTE les motos. Mais quel vacarme infernal !!!

Descente vraiment spectaculaire. A cet endroit le vent souffle particulièrement fort. Dans le dos d'abord, puis de face, et ainsi de suite à chaque virage. De face, le vent me glace et m'oblige à pédaler dans la descente !

On palpe la Provence ici, avec les maisons de pierres et les champs de lavande. Arrivée à Die, petite trempette des pieds dans la rivière. C'est bien agréable ! J'attends l'arrivée de mon hôte. Comme les hébergements étaient tous complets, je me suis inscrite sur Warmshowers. C'est une communauté de cyclistes qui se reçoivent entre eux. C'est ainsi que j'ai fait la connaissance d'Anouk , qui m'offre le gîte et le couvert. Une femme d'une grande gentillesse et générosité !

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72 km, D+1100m

Aujourd'hui, dur dur d'être cycliste !

Dès le départ, j'ai les jambes lourdes. Je suis si fatiguée de mes mauvaises nuits, que j'ai envie de dormir sur mon vélo ! Je me dis que la journée va être longue, et elle fut longue ! Je me traîne, la moindre montée est une épreuve.

Je dis au revoir à Die et à Anouk. Les nuages au loin s'accrochent au Vercors.

Apres une petite causette de 5 minutes avec deux Grenoblois venus faire du VTT, et qui sont en admiration devant mon vélo allemand et la selle en cuir Brooks ( !), je passe devant ce qui de loin ressemblait à des yourtes.

En fait, ce sont bien des petites yourtes, mais pour cochons ! Leur cabane en sorte. Je n'ai malheureusement pas pu prendre de photos mais ils étaient sacrément bien installés ces bestiaux. Il y avait une dizaine d'enclos très spacieux avec au milieu de chacun une petite yourte pour abriter 4- 5 cochons. Un très bel aménagement.

Je n'ai pu m'empêcher de penser à ces pauvres bêtes entassées dans les élevages industriels.

J'arrive péniblement au Claps de Luc-en-Diois. Ici eu lieu en 1442 un important éboulement de la montagne dans la rivière Drôme en contrebas. Les blocs sont vraiment très spectaculaires. Désormais, c'est un site de baignade en famille et d'escalade.

Ensuite direction Valdrôme et le col de Carabès. Une vraie galère ! Ça monte sec, je n'ai pas la forme, je mets un temps fou pour grignoter chaque mètre. Je pousse le vélo quand les pentes dépassent 12 %, et j'en bave, mais j'avance ! La route est magnifique. Il n'y a presque personne et surtout, pas de motos !!!

Ça y est, j'ai franchi le col je suis sauvée ! Maintenant, ça ne sera quasi plus que de la descente. J'enfile mon pull. Les descentes refroidissent vite le corps avec les déplacements d'air.

Au final, j'aurai traversé 3 départements aujourd'hui : Isère, Drôme, Hautes-Alpes.

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76 km, D+ 820 m

Ce matin au réveil, les jambes sont moins lourdes, ouf !

J'ai dormi dans une chambre d'hôte très mignonne, que je vous recommande ( "les hirondelles"). Je suis seule. La petite mamie a envie de parler et vient me taper la causette pendant mon petit déjeuner ! Bon, moi, le matin, j'aime bien être au calme, dans ma bulle !!! Mais c'était marrant. Elle m'a dit qu'elle était passionnée de danse country ! J'aime bien ça, être surprise par les gens ! Qui aurait pu l' imaginer ! Elle va danser tous les mercredis soirs à 19h precise et elle a toute la panoplie : les santiags, le chapeau de cow-boy et le gros ceinturon !

Je quitte donc Serres un peu plus tard que prévu, et roule tranquille sur mes petites routes du soleil.

A Lagrand, je bifurque vers l'ouest et repasse dans la Drôme pour traverser les Baronnies. Je fais ma cure détox : du vert, rien que du vert ! Passage par Laborel puis le col Saint-Jean. Une montée comme je les aime : un long faux plat montant de 3%, histoire de s'échauffer en douceur, puis l'ascension du col, juste 6 km de bonne montée. Les papillons s'amusent à faire la course avec moi. Je vous laisse deviner qui gagne !

Arrivée en haut, magnifique vue sur le massif des Baronnies et les Ecrins au loin.

Au col, je rencontre un suisse (germanique). Il ne parle pas francais ( je croyais que les suisses parlaient tous les 3 langues officielles du pays). Il est arrivé tout en sueur sur son vélo électrique ! Là, du coup, j'ai dû admettre dans ma tête que je n'étais plus niveau débutante !

Il vérifie que mon vélo n'est pas électrique avant de me féliciter ! On échange un peu en anglais. Il est en vacances 8 jours dans un camping avec un pote, et fait des escapades à la journée. Il aurait bien envie d'échanger plus mais son anglais est pire que le mien, alors on a vite été bloqué ! On se dit au revoir en se souhaitant une bonne journée.

Le descente du col est un vrai bonheur. Une route en lacet, une vue dégagée, personne ou presque !

La balade continue ensuite dans les gorges de Méouges. Ici, il y a beaucoup plus de monde. Les gens viennent se rafraîchir dans la rivière. C'est absolument somptueux ! J'aurai bien fait trempette également.

Encore quelques bons coûts de pédales, et je termine à Sisteron en fin d'après-midi. J'arrive à l'hôtel exactement en même temps qu'un autre cycliste, en gravel.

On se parle dans le couloir des chambres. C'est un anglais, il va à Nice également ! Il est parti d'Angleterre à vélo !!! Là pour le coup, j'aurai bien aimé le recroiser pour parler de son roadtrip.

Après la douche, je vais visiter un peu la ville et prendre en photo le fameux rocher de la Baume. Puis ce sera resto, pas le choix, tout est fermé le dimanche soir ! Et en dessert, tarte au citron meringuée, mon petit péché mignon !

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63 km, D+ 1220 m

Au programme aujourd'hui 3 cols à gravir.

Mais tout d'abord, ce matin au petit-déjeuner, j'ai eu le plaisir de revoir l'anglais rencontré hier soir. Après lui avoir dit bonjour et m'être installée à une table, il me rejoint et me demande s'il peut s'asseoir avec moi. Avec grand plaisir !

J'ai donc pu en apprendre plus sur son périple. David est parti il y a 12 jours de Manchester en Angleterre. Son objectif est de tracer le plus vite possible jusqu'à Nice. Donc il n'emprunte pas les petites routes de montagne, comme moi, mais les grands axes pour aller au plus vite. Il roule environ 200 km par jour !

"C'est facile" me dit-il "c'est tout plat"!

Pour lui, ce n'est qu'un échauffement ! Arrivé à Nice, il se posera quelques jours puis repartira pour un parcours plus intense, dans les montagnes. Il espère d'ailleurs arriver à Nice dès ce soir !!!

David a beaucoup voyagé en vélo et a parfois rencontré des situations incroyables ! Pas plus tard qu'avant-hier, il arrive tardivement dans un village et cherche où se loger. Une dame l'aperçoit et lui agite un torchon à la fenêtre pour attirer son attention. Elle lui demande ce qu'il veut. Il répond un endroit où dormir et elle lui propose direct de venir chez elle.Un peu hésitant, il la suit tout même. Il découvre alors un appartement totalement surréaliste.La madame n'est pas seule, il y a son mari, ce qui le rend plus à l'aise !

Deux originaux, érudits, philosophes, passionnés de littérature. Il a photographié sa chambre et me montre les photos. Il y a des bibliothèques, sur tous les murs et des livres jusqu'au plafond. Et de multiples objets divers et variés d'une autre époque (machine à écrire, tourne-disque, cassettes, carnets, multiples objets,...). Un vrai musée.

Des jeunes du village sont venus jouer de la musique sous sa fenêtre. Puis, ses hôtes voulaient discuter encore et encore, mais David était fatigué et leur a dit qu'il préférait aller dormir !

Ma journée commençait bien ! Une belle rencontre avec une chouette discussion. Il m'a posé des questions sur mon parcours, par les petites routes. Et tout ça en anglais ! Nous nous disons au revoir et chacun reprend sa route.

Pas de temps d'échauffement aujourd'hui. En quittant Sisteron, j'attaque directement une très très longue montée de 26 km.

J'entre dans la réserve naturelle géologique des Alpes de Hautes-Provence. La route que j'emprunte a un très joli nom : la route du Temps. Il s'y trouve une surprenante inscription gallo-romaine gravée directement dans la roche et datant du V ème siècle.

Je prends le rythme de la montée. Ca va bien. J'aperçois un peu plus loin un troupeau de moutons et j'entends des chiens japper. Je vois alors débarouler trois gros Patous qui foncent vers moi en m'aboyant dessus. J'ai le mince espoir que le grillage les contienne mais vue la taille des bêtes, j'ai un doute. Et deux d'entre eux passent effectivement sans problème. Juste, ils passent dessous en s'aplatissant comme des crêpes au lieu de sauter par dessus. Mais bon, ils sont là à me foncer dessus...

Je descends de vélo et me mets derrière mon fidèle destrier. Je tente une approche amicale et dis d'une voix toute légère " et ben le chien, tout va bien !" Mais sans succès, l'un d'eux essaie de passer derrière moi pour m' encercler. Je positionne mon vélo en travers et de ma voix la plus grave et la plus ferme possible, je lui crie "NON !" Il s'arrête deux secondes et repart à la charge, en essayant à nouveau de passer derrière et en me grognant dessus. Je fais la même manœuvre du non, en avançant tout doucement et ainsi de suite 4 fois, jusqu'à ce qu'ils estiment que j'étais assez loin. Ils repartent dans leur champ et moi je déguerpis sur mon vélo. Fiouuu ! Petit coup de stress quand même ! Heureusement, les paysages somptueux m'aident à recharger mes petites cuillères !

J'arrive enfin au col Fontbelle vers 13h et me fais ma pose casse croûte au milieu d'une magnifique forêt.

Je repars sous une petite pluie. Descente hyper agréable, il n'y a personne, c'est incroyable.

J'en profite pour aller à fond. En pleine vitesse, je rentre soudainement en collision avec un IVNI ( insecte volant non identifié), qui me percute violemment au niveau de la joue ! Je pense que cette malheureuse bestiole n'aura pas survécu à l'impact, rip... Je récolte pour ma part une petite entaille à la joue ! Être cycliste est une activité à risque !

J'atteins rapidement le col d'Hysope et là, je suis ébahie par la vue panoramique qui s'offre à moi. Y a pas à dire, les grands espaces, les montagnes, c'est vraiment mon élément, ça me requinque !

Je rejoins la vallée après une longue descente er repars vers le dernier col. 6 km de montée, ça va, ce n'est pas toujours facile, mais je gère. J'ai quand même le tête dans le guidon, ça m'évite de voir la pente ! Mes yeux suivent ma roue avant, et c'est, non pas, un pas après l'autre mais une roue après l'autre ! Une voiture approche en face, le conducteur lève le pouce en haut 👍! C'est trop gentil ! Et le petit col du Pas de Bonnet est gravi à son tour. Je renfile mon pull et mon buff autour des oreilles, et c'est parti pour la dernière descente jusqu'à Digne.

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57 km, D+ 1000m

Etape moins importante sur le papier mais qui m'en a quand même bien fait baver ! Sinon, pas de rencontres aujourd'hui...Ca m'a manqué !

Je prends mon temps ce matin pour quitter l'hôtel sans âme de Digne. Il pluviotte un peu, j'attends une probable amélioration annoncée.

Je traverse la ville, qui est comme mon hôtel, sans âme...c'est moche (le bout que j'en vois tout du moins) ! Seule cette petite perspective du clocher avec les montagnes derrière est sympathique.

Et ça repart direct pour 20 km de montée non stop. Les 10 premiers kilomètres sont tranquilles, je chauffe la mécanique. Mais les 10 suivants sont vraiment difficiles. Des pentes de 8 à 15 % ! C'est éprouvant !

Régulièrement, je m'arrête 1 ou 2 minutes pour faire redescendre le cardio qui pulse un peu trop fort. A la reprise, à chaque fois, après 4 mètres, les muscles de mes cuisses se tétanisent et deviennent extrêmement douloureux. Cela dure 15 secondes, et puis ça cesse d'un coup, systématiquement. Je serre les dents en comptant les secondes, je sais que ça va passer. Mais quelle épreuve !

J'avance à la vitesse époustouflante de 5,5 km/h. J'en bave au sens propre et figuré ! Je respire bouche grande ouverte pour capter le maximum d'oxygène. Je n'ai heureusement gobé aucun IVNI ( pour rappel : Insecte Volant non identifié) !

Moi qui n'ai pas l'habitude de faire du dénivelé en vélo, je suis servie et resservie !

Je remercie d'ailleurs Céline Dion, Zaz, Florent Pagny et tous leurs copains de m' avoir accompagnée sur ses pentes difficiles, en me donnant du rythme et de l'énergie !

J'arrive enfin au col de Pierre Basse. Le ciel est bien chargé et incertain. Un petit replat dans la forêt me permet de souffler un peu avant de remettre ça. J'en bave tout autant pour arriver au col du Corobin.

Vers 13h, je me pose pour déjeuner, au milieu d'un champ, plat, tondu et à la vue panoramique ! Mieux que le resto !

La route que j'emprunte pour descendre est coupée à la circulation pour travaux. Évidemment, avec mon petit vélo, je n'allais sûrement pas faire demi-tour, donc je suis passée au milieu des ouvriers en leur faisant un grand sourire pendant qu'ils s'attellent à réparer le pont. Je suis seule sur la route. Mais c'est une vraie galère car elle est recouverte de gravillons fraichement posés. Je freine non stop pour ne surtout pas prendre de vitesse et ne pas déraper. C'est vraiment limite !

Quand soudain, j'entends une voiture monter à fond la caisse. Je la vois prendre son virage et accélérer droit sur moi... La route est étroite, sinueuse, dérapante, bref, dangereuse et il roule comme un malade. Je ne freine pas brusquement pour m'arrêter de peur de déraper et me serre le plus possible à droite contre la falaise. Il passe littéralement en me frôlant !

Je n'ai pu m'empêcher de retenir un "connard !" venu du fond des tripes ! Je ne sais même pas s'il m'a vue. 10 cuillères parties d'un coup !!! Mais je repars au plus vite, hâte d'en finir avec cette route.

En passant dans le village de Barême, je remarque cette inscription sur le coin d'une maison : "Ici, Napoléon passa la nuit du 3 au 4 mars 1815". Me voilà donc sur les pas de notre empereur ! D'ailleurs, la route Napoléon passe par ici. Je photographie également la serrure de la porte. Très originale !

Je continue ma route avec une dernière longue et douce montée. 3 %, c'est rien, mais avec le vent de face et les jambes fatiguées, sur 22 km, ça devient difficile ! Le soleil revient, encore de somptueux paysages. Les vaches me regardent passer, je dois être la seule attraction de l'heure. Je leur dis qu'elles sont belles, parce qu'elles le sont ! Un peu plus loin, je découvre une jolie petite église en pierre datant du 12ème siècle, étonnamment construite en dehors du village.

J'arrive au gîte. Je suis la seule pensionnaire ( 28 places en tout) !!! Ce n'est pas ce soir que je vais m'entraîner au social 😀 !

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67 km, D+ 1120m

Superbe journée !

Départ sous un soleil radieux ! Et c'est reparti pour une montée de 8 km. Le corps est frais, ça se fait, à ma grande surprise, sans trop de difficultés. Je suis régulièrement entourée de jolis papillons blancs. Je les remercie de m'accompagner ainsi sur mon chemin. Bon, je sais bien qu'en réalité, ils sont attirés par ma transpiration, mais qu'importe, j'apprécie cette sympathique compagnie !

J'arrive assez rapidement au col du Défens. Je commence tranquillement la descente quand soudain un chien apparaît et court vers moi... Je n'ai pas assez de vitesse pour le distancer donc pour ne pas l'exciter, je descends de vélo et j'observe très attentivement son comportement. Le border collie vient me sentir, fait le tour du vélo et repart rassuré. Comme quoi, on peut faire son boulot sans agressivité, non mais ! Le berger arrive en vélo 2 minutes après. Il me demande si je suis perdue ! Il ne doit pas souvent voir passer des sacoches ! Je lui réponds que non, je me balade !

Belle descente, sans véhicules, quel plaisir ! Je rejoins une vallée encaissée où la route côtoie longuement un petit torrent.

Je rentre dans le parc naturel régional du Verdon et je découvre le lac de Castillon, lac artificiel créé par un barrage qui retient les eaux du Verdon. Magnifique couleur bleue, qui contraste avec les collines verdoyantes.

A Saint Julien du Verdon, j'essaie de rejoindre les rives du lac. Je suis un chemin de cailloux très abrupt qui s'avère être barré tout en bas, juste avant d'arriver ! Impossible de passer. Il me faut rebrousser chemin et pousser le vélo pour remonter, je dérape et je râle. Je rejoins enfin, plus loin, ce joli bout de lac pour une pause déjeuner bien méritée !

En repartant, je longe le lac un moment puis je bifurque pour LA grosse difficulté de la journée. Ca grimpe vraiment beaucoup, il fait très chaud et il n'y a pas un brin de vent. Je mets ma musique et je branche le pilotage automatique : roue après roue, tout doucement, le tête dans le guidon. Je fais mes petites pauses pour faire redescendre le cardio. Je prends rapidement de la hauteur.

La chaleur est vraiment pesante et pourtant je me rationne en eau car je crains de manquer ensuite. La route est inhabitée. Je protège mon téléphone avec mon buff. Il est fixé sur le guidon car il me sert de GPS, j'ai peur qu'il prenne un coup de chaud.

Je m'arrête un instant sur une petite aire pour contempler la vue. Un camping car vient juste de se garer. Un couple de retraités en sort. Et c'est LA rencontre du jour ! Serge et Annie, du Lot et Garonne !

On se dit bonjour et le monsieur me demande si j'ai besoin d'eau. Ca tombe vraiment à point, incroyable ! La dame revient avec une bouteille et fait le plein de mes gourdes. On engage la conversation sur les vélos, je leur parle de mon trajet, ils me parlent du leur en camping-car. Ils me demandent si je roule souvent en montagne. Je leur dis que non. Je fais 3 sorties vélo par mois, sur du plat. J'ai juste essayé de faire le col du grand Colombier (D+ 1330 m) une semaine avant le départ, et comme j'y suis arrivée, je me suis dit, pourquoi pas !

Puis j'ai droit aux histoires de famille, sur leurs 4 enfants et 8 petits- enfants ! Ils sont trop mignons ! On découvre que j'ai le même âge que leur fille. Ils me disent que je ne les fais pas ! Quand je vous dis qu'ils sont trop bien ! Sur ce, ils me proposent un jus d'orange frais. On trinque ainsi, tous les 3, au bord de la route. Quel beau moment de partage éphémère ! Et chacun reprend son chemin.

La première partie de cette montée se termine enfin, c'était chaud ! La deuxième partie est un peu moins pentue, et avec le vent qui réapparaît pour me rafraîchir, ça semble plus facile ! Mes amis les papillons reviennent virevolter autour de moi. What else ?!

J'arrive ainsi au col de St Barnabé et m'octroie une petite pause dans l'herbe.

Après l'effort, le réconfort ! Une agréable descente s'offre enfin à moi jusqu'au refuge de Saint-Auban. Ma sœur m'y rejoindra ce soir et nous ferons la dernière étape ensemble demain.

Le refuge est totalement vide ici aussi. Nous sommes les 2 seules pensionnaires. Nous prenons notre repas du soir au soleil sur la terrasse. Un moment bien agréable !

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61 km, D+ 800 m

Dernière journée raccourcie, pour profiter tranquillement entre sisters.

L'arrivée ne se fera pas à Nice mais à Cagnes-sur-Mer, juste à côté, où habite ma sœur. Nous prenons notre temps ce matin et levons l'ancre à 10h. Il fait déjà bien chaud. Nous attaquons rapidement la première montée. 6 à 8 % , tranquille, c'est régulier, c'est forestier, c'est toujours aussi ravissant.

A mi- parcours, au détour d'un virage, un incroyable paysage se révèle. Moment de pure contemplation ! Les massifs boisés et le Mercantour en toile de fond.

Ca recharge une cycliste ça madame !

Nous atteignons le col de Bleine et enchaînons avec une longue descente.

Découverte insolite, nous longeons la Réserve Naturelle des Monts Azur, et observons des troupeaux de chevaux de Przewalski (petit cheval massif des steppes d'Asie) et de bisons d'Europe, broutant paisiblement ou se baignant dans un étang. Le parc est un modèle de réensauvagement et se visite.

Nous dévalons ensuite une époustouflante route en corniche avec très peu de circulation, que du bonheur !

Nous arrivons ainsi au petit village de Gréolière. Ma sœur m'emmène manger dans un petit restaurant qu'elle connaît. Situé dans une petite ruelle à l'écart, c'est calme. Nous nous installons en terrasse. Un charmant cycliste italien finit son repas et repart tranquillement sur un air de Brassens. La Dolce Vita !

Bien repues, la reprise est difficile ! Nous terminons la descente et enchaînons avec le 2ème col de la journée, dernière difficulté de mon voyage. Finalement, ça va plutôt bien, lentement mais sûrement ! Les papillons sont de retour, pour mon plus grand plaisir. Je m'imbibe des derniers paysages de forêts.

Le terrain est désormais plus aride. Une fois le col de Vence franchi, on aperçoit au loin la mer, Nice et son aéroport gagné sur l'eau.

Je me laisse emporter par ma dernière descente. Le vent fouette mes joues réchauffées par la douce chaleur du soleil. J'apprécie chaque sensation. Je profite de chaque seconde. La parenthèse se referme. J'ai savouré chaque instant : les longues heures à pédaler qui vident la tête, les imprévus du quotidien, les rencontres éphémères, les montées difficiles qui me rappellent que tout est possible et la magnificence de dame Nature tant ressourçante et énergisante.


Les petites routes du soleil en chiffres : 5 départements traversés ( Isère, Drôme, Hautes-Alpes, Alpes de Hautes-Provence, Alpes-Maritimes), 8 jours, 525 km, 8400 m D+, pour découvrir les jolis coins de France !