Après être partie en Indonésie avec mon ainée, était venu le temps pour la cadette de choisir sa destination pour un voyage en duo avec sa maman. Elle n'hésita pas longtemps avant de proposer l'Ecosse. C'est ainsi que nous nous levons ce mercredi à 3h15 du matin pour un décollage à 6h10 de Lyon.
En plein vol de nuit, Saturne se révèle à nous. Au simple zoom x4, nous avons pu visualiser ses anneaux, ne laissant aucun doute sur l’identité de cette "étoile" si lumineuse à côté de la lune si souriante. Après 1h30 de vol, nous faisons une escale à Amsterdam. Puis destination finale, Inverness, au nord de l'Ecosse.
Nous atterrissons sans encombre à 10h20 sous un soleil timide mais présent ! Les bagages repris, nous allons récupérer notre voiture de location dans le hall de l'aéroport. Trois personnes devant nous, nous attendons, impatientes de commencer notre road trip. Arrive enfin notre tour. A quel nom et permis de conduire. OUAH, l'accent écossais n'est pas une légende ! Bon de toute façon, j'ai tous les papiers, ça ne va être qu'une formalité. Je suis passée par une centrale de réservation sur internet pour que tout soit écrit en français et que je comprenne bien. J'ai pris une assurance complète pour la première fois, on ne sait jamais, je n'ai jamais conduit à gauche. Mais alors pourquoi le dame fronce les sourcils ...
Ce n'est pas le même nom... Je regarde : Ah ba oui, j'ai réservé avec mon nom marital. je suis mariée depuis 16 ans, c'est mon nom quoi ! Mon permis est à mon nom de jeune fille, je l'ai passé il y a plus de 20 ans, je n'étais pas mariée. Mais regardez, sur le passeport, il y a les 2 noms : nom de jeune fille et nom marital. Non non non, je ne peux pas vous laisser la voiture, c'est pas le même nom. Vous devez annuler votre réservation et en refaire une autre. Hein ??? Mais je n'ai pas de connexion internet, vous ne pouvez pas le faire ? Non non non, vous voyez avec votre centrale de réservation. Et elle prend le client d'après.
Me voilà à chercher dans mes papiers le téléphone de la centrale de réservation. J'appelle...numéro pas attribué... j'en essaie d'autres, rien ne fonctionne, mais c'est quoi cette arnaque. Le dame me donne un autre numéro, pas moyen ça ne fonctionne pas... Jusqu'à ce que je me rende compte qu'il fallait faire le 00 devant l'indicatif 44. Bon, OK. On va enfin avancer. Je rappelle, ça sonne...ça décroche...et ça parle français. Youpi !!! J'explique le problème, le gars va se renseigner, il revient me dire qu'il va envoyer un mail à l'agence, je lui passe alors notre charmante (ironique) hôtesse écossaise pour quelques explications, puis il me garde en ligne jusqu'à l'envoi des mails. Il me confirme que les mails sont bien partis. On raccroche donc. Je refais la queue.
Vient enfin mon tour... non non non, je n'ai pas reçu les mails. OK...on continue de patienter. 15 minutes plus tard, non non non, toujours pas. Non mais ça va maintenant, il m'a dit qu'ils étaient partis, on ne va pas y passer la journée. Et là qu'est ce qu'elle me sort... Bon, bon, je vais changer le nom sur l'ancien bon de réservation. Ahhhhh, la décence m'interdit ici de dire tous les mots qui me sont alors passés à travers la tête. Enfin, j'ai les clés de mon carrosse ! Je ne réalise même pas qu'elle ne me donne aucun papier, peut-être est-ce normal, je ne sais pas, j'ai la tête ailleurs. 1h30 de perdu ! Mais ceci n'était que le début d'une journée infernale !
Petit repas express dans la voiture. Pas besoin de faire le ménage de restitution, donc ma cocotte, ta voiture sera pleine de miettes ! Puis inspection des commandes : les essuies glaces, les feux, les clignotants et warnings. Le volant est inversé, à droite, mais tout le reste est pareil qu'en France. Les pédales et le levier de vitesse dans le même ordre. Tant mieux ! Je me colle un post-it sur le tableau de bord : ROULER A GAUCHE.
Et c'est parti, je roule à gauche, je passe les vitesse de la main gauche, je me concentre pour tenir ma gauche...et c'est super facile ! Le cerveau s'adapte sans problème. Bon, quelques fois je cherche le pommeau de vitesse à droite et je bute dans la portière. Le plus difficile est de ne pas trop serrer à gauche, j'ai tendance à manger le bord de route ! Il faut certes rester bien concentrer, mais ce n'est vraiment pas sorcier. Ma fille me sert de copilote et me surveille.
Nous traversons Inverness par la voie rapide puis descendons le long du Loch Ness. Cet étroit lac aux eaux troubles de 37 kilomètres de longueur est mondialement connu pour son monstre imaginaire mais on ne peut pas dire qu'il soit d'une beauté transcendante !
Nous faisons une halte au Château d’Urquhart, une grande forteresse en ruine au bord du loch Ness. Construit au 13° siècle, lieu stratégique de surveillance, il fut l'objet régulier de conquête entre anglais et écossais. Finalement détruit en 1692 par las anglais, afin que le bâtiment ne puisse jamais être pris par les Jacobites, il ne fut plus jamais reconstruit.
Le site est très touristique mais assez sympa, d'autant plus qu'un mariage y est célébré et que les hommes portent la tenue traditionnelle écossaise en kilt. Ma fille se retrouvera ainsi bien entourée par deux solides gaillards bien aimables !
Urquhart Castle au bord du Loch NessNous repartons pour un lieu plus tranquille : le Glen Affric, une réserve naturelle témoin de la forêt primaire écossaise. Pour y pénétrer, nous roulons sur une Single Track Road, très nombreuses en Ecosse : une petite route à voie unique, dotée régulièrement de passing place, un élargissement de la voie sur 5-10 mètres pour permettre le croisement.
Avec le temps perdu à l'aéroport, nous ne pourrons pas faire toutes les balades que j'avais repérées. De plus, après une multitude de micro-crampes dans la jambe droite, je finis par avoir la méga crampe, impossible à faire passer, chaque mouvement accentuant un peu plus la douleur. Je me gare en catastrophe sur la bas côté et après un temps qui m'a paru interminable et moultes massages, la douleur s'estompe enfin.
Après une pause photo au Loch Beinn a'Mheadhain, nous nous arrêtons à River Affric, tout au fond du Glen, pour faire une petite marche sur un sentier panoramique. Le ciel est couvert mais malgré le manque de soleil les couleurs d'automne nous livrent un tableau extraordinaire.
Le Loch Beinn a'MheadhainAm Meallan, viewpoint trail Nous repartons ensuite pour sortir de la vallée en prévoyant de faire une balade à Dog Falls. Mais le destin en décida autrement. Est-ce que j'ai trop mangé le bord gauche de la route, est-ce qu'il y avait quelque chose sur la chaussée ??? La voiture se met tout à coup à vibrer et le tableau de bord me somme de vérifier la pression du pneu. Je me gare sur un passing place, je sors de la voiture et constate avec désolation que le pneu avant gauche est à plat, crevé, kaput... Il est 16h30. Journée maudite ! Et la suite est encore pire !!!
Depuis le temps que je me dis qu'il faut que je m'entraine à changer une roue. Bah voilà, va falloir. Bon, où est la roue de secours...J'ouvre le coffre, on enlève nos bagages, on soulève la moquette, euh....pas de roue. OK, je me mets à genoux, oh non pas pour invoquer l'aide du tout puissant mais pour être plus terre à terre, fallait bien regarder sous la voiture...Ouais, ba toujours pas de roue de secours. Pendant ce temps, ma fille a arrêté la première voiture qui passait, des allemands en vacances. Le monsieur cherche avec moi, pas de roue de secours, pas de bombe anti-crevaison. Baa, on va appeler un dépanneur. Je sors mon téléphone...pas de réseau. Bon là, c'est plus très drôle. Le monsieur me dit de prendre en photo le modèle de pneu et il nous emmène avec nos bagages au bled le plus proche, Cannich, à 30 minutes tout de même, pour téléphoner.
Le monsieur se renseigne auprès du shop où est le garagiste le plus prêt : à 1 heure de route. Il veut bien nous emmener. Moi, je pense qu'il vaut mieux appeler le loueur. Je commence par la centrale de réservation, ils parlent français, ça sera plus commode ! Mais non, ça ne les concerne pas, il faut voir directement avec l'agence de location. Je vous passe les détails sur le temps interminable qu'il nous a fallu pour arriver à avoir le service de dépannage (le numéro que j'avais sur mon voucher de réservation n'était pas le bon), à leur expliquer dans un anglais approximatif le problème et le modèle de pneu à changer, un grand merci d'ailleurs aux allemands qui nous ont bien aidées à comprendre ce fort accent écossais. Bref on finit par nous dire qu'un dépanneur arrive dans 10 minutes. Les allemands nous larguent donc là devant le shop et nous patientons sur une table en bois à côté du magasin.
Les minutes passent et passent et personne ne vient. Après 1 heure 30, toujours personne. Je rappelle...ce n'est pas la même personne, il faut tout réexpliquer. On nous dit alors que si si, le van va arriver, dans 5 minutes. On patiente à nouveau...45 minutes. Toujours personne. 3° appel, encore une autre personne, encore tout redire. Je manque de vocabulaire en anglais pour leur dire ce que j'en pense, mais j'essaie de leur faire comprendre qu'il faut se bouger maintenant. On nous affirme qu'il est au coin de la rue, il arrive. Attendez, je l'appelle pour confirmer, qu'on me dit. Je reste en ligne plusieurs minutes...on me reprend...Ah, il s'est trompé de ville mais il arrive dans 5 minutes. AAAAAhhhh, arrêtez avec vos 5 minutes !!!! Si si il arrive, rappelez moi dans 5 minutes s'il n'est pas là...Evidemment personne à l'horizon. 4° appel, 10 minutes plus tard, encore une autre personne...encore tout réexpliquer, ça fait des heures qu'on attend, dehors dans la nuit et le froid, mais qui va enfin nous entendre ???
Matthieu et Sarah, des anglais, débarquent alors, curieux de nous voir dehors dans la nuit avec nos bagages. Je suis au téléphone, ma fille leur explique la situation, je n'arrive plus à trouver les mots, mon anglais n'est pas assez étoffé. Matthieu me propose alors de parler au téléphone et il se met à passer un savon au gars, en lui disant que c'est inacceptable, qu'ils doivent venir immédiatement et le reste je n'ai rien compris ! Sur ce, le van arrive enfin, c'est quasi 21h... Et là, on se dit que ça y est, on y est. Fin de l'histoire. Mais non, pas tout à fait...
Le dépanneur cherche la voiture des yeux. On lui dit que la voiture n'est pas là, mais à 30 minutes, ce qui avait bien été signalé lors de nos précédents appels...El là, il nous sort qu'il n'a pas le droit de prendre de passagers, qu'il ne peut pas nous emmener à la voiture !!! On n'a qu'à marcher devant et il nous suit avec son van. Ah ah ah ! 30 minutes en voiture, ça fait combien de temps à pied ??? Pincez-moi, je vais me réveiller ! Heureusement Matthieu prend les choses en main. Le dépanneur ne peut pas nous emmener ? Et bien il m’emmène, pas de soucis. Sa voiture n'a que 2 places, sa femme reste avec ma fille et elle lui laisse une couverture bien chaude. Matthieu conduit comme un dingue, je m'accroche au siège ! Nous arrivons enfin à la voiture. En 10 minutes, le pneu est changé et basta. Nous retournons au shop. Il est 22h20, les valises sont à nouveau dans le coffre et nous sommes prêtes à repartir.
Matthieu me demande alors si je loge dans le coin. Baa, non pas vraiment, je vais à Ullapool, 2h10 de route d'après Mappy. Ullapool, 2h10, jamais de la vie, c'est plein de virages, il faut 3-4 heures pour y arriver ! me rétorque-t-il. Bon, là je crois que j'ai commencé à me décomposer. L’hôtel sera fermé, je l'ai appelé pour l'avertir de mon retard, il m'attend jusqu'à 1h du matin dernier carra... Si vous voulez, vous pouvez venir dormir chez nous, c'est à 40 minutes. Des gens si gentils et si serviables, ça fait chaud au cœur. Proposition acceptée ! Et me voilà, 10 heures après mes débuts en conduite à gauche, à essayer de suivre dans la nuit et les virages un Shumacher écossais. Malgré ses efforts évident pour rouler plus doucement, je finis par le perdre, mais il a rentré son adresse dans mon GPS, donc pas de soucis !
Les virages finissent par brasser ma cadette qui me demande de m'arrêter TOUT de SUITE, elle va vomir...mais c'est impossible. Je tends la main sur la banquette arrière et chope à la volée le petit sac zip où se trouvaient nos tomates cerises d'à midi. Je me précipite pour lui donner et elle vomit direct dedans. On a sauvé la voiture et la couverture de Matthieu, à la seconde près. Mais que cette journée s'arrête ! Nous arrivons enfin vers 23h. Je rappelle l'hôtel pour les informer que nous n'arriverons que demain. Épuisées, nous nous couchons sans manger (même pas faim avec tout ça) mais sereines !