Je quitte donc la Polynésie française, au départ de Papeete, avec le vol hebdomadaire pour l’île de Pâques à 4 heure du matin, qui poursuit ensuite son chemin vers le continent, jusqu'à Santiago de Chile. Quelques cinq heures de vol plus tard, quatre fuseaux horaires traversés, j’arrive à Hanga Roa, le chef-lieu et capitale de l'île de Pâques. Bien que restant toujours en Polynésie, je prends conscience que j’ai parcouru la moitié du globe et me sens déjà un pied sur le continent d’Amérique du Sud à devoir parler espagnol.
J’arrive sous la pluie. Avant de descendre de l’avion, j’enfile mon poncho toujours à porter de main, pour traverser le tarmac de cet aéroport de taille « micro-insulaire ». En jetant un coup d’œil aux prévisions météorologiques, je découvre que la météo sera ensoleillée deux jours, puis se dégradera à partir du deuxième jour, pour pleuvoir fortement. Alors que j’avais prévu 4 jours entiers pour avoir le temps de visiter tranquillement l’île, je réserve deux tours pour les deux jours de météo favorable avec l’agence de tourisme Rapa Nui, avec un très bon guide bilingue anglais-espagnol.
L'île de Pâques, en Rapa Nui (« la grande Rapa » en référence à Rapa Iti « la petite Rapa »), en espagnol Isla de Pascua, est une ile du Chili dans le sud-est de l’océan Pacifique, particulièrement connue pour ses statues monumentales, les Moaï, et son écriture océanienne unique, le Rongorongo. L’île de forme triangulaire, d'environ 24 kilomètres dans sa plus grande dimension, couvre 161,8 km2. La population était estimée à 6'370 habitants en 2015. Elle doit son nom à la découverte par le navigateur néerlandais Jacob Roggeveen, le jour de Pâques, le 6 avril 1722. Elle fut annexée par l’Espagne en 1770 sous le nom d'isla San Carlos, mais l'Espagne s'en désintéressa par la suite ; des Français s'y installèrent après 1864 et l'île devint une possession chilienne en 1888. En août 2018, la chambre des députés chilienne adopte le double nom de Rapa Nui - Isla de Pascua, mais le sénat chilien doit encore confirmer cette disposition.
Le centre-ville de Hanga Roa s’articule autour de la rue principale « Atamu Tekena », où se trouvent la majorité des restaurants, tours opérateurs, mini supermarché, boutique souvenirs. De charmants restaurants se trouvent en bord de mer également, vers les locaux de plongée et du petit port où l’on peut apercevoir des tortues vertes.
Pour ce qui est des spécialités locales, tous les plats à base de thon frais sont délicieux, et notamment le Ceviche (thon cru citronné mélangé à des oignons, tomates, poivrons), accompagné d’une bière locale, la Mahina ou Taina, et de Patates douces comme le Camote.
Tous les mardi, jeudi et samedi, ont lieu des représentations de danse au Ma’ara Nui du ballet Kari Kari de renommée internationale. Le spectacle est magnifique. Les danseurs, accompagnés de musiciens, sont très nombreux sur scène et vêtus de costumes « riquiqui ». On retrouve le style des danses et des musiques polynésiennes. En introduction du spectacle, une vidéo relate l’histoire du ballet Kari-Kari de l’île Rapa Nui. Je reste dubitative devant cet héritage, alors qu’au XVIIIème siècle, les habitants de Rapa Nui étaient réduits à une poignée d’une centaine d’habitants.
Chaque année, les habitants de l’île de Pâques, les Pascuans, font revivre leurs traditions au travers d’épreuves artisanales et sportives, du 30 janvier au 14 février lors de la fête de Tapati Rapa Nui. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ces festivités n’existent pas depuis des siècles mais depuis une quarantaine d’années. Pour autant, elles sont l’occasion chaque année de transmettre les coutumes et savoirs ancestraux des habitants de l’île.
Le troisième jour de mon séjour à Rapa Nui, la météo s’est dégradée très rapidement, comme prévu. La pluie n’arrête pas de tomber et parfois par trombes d’eau, accompagnée de vent. Les amis de l‘auberge de jeunesse, devant partir ce jour, se retrouvent bloqués sur l’île, tous les vols étant suspendus. En effet, la liaison quotidienne Santiago de Chile- Hanga Roa se retrouve coupée, le vol de Santiago ayant fait demi-tour après deux heures de vol aux vues de la météo qui ne s’arrangeait pas et avant d’atteindre le point de non-retour (où il n’est plus possible de faire demi-tour, car le plein de kérosène ne le permet pas). Avec une liaison aérienne coupée, une connexion wifi très très aléatoire, je prends pleinement conscience de la notion d’isolement insulaire !
Par mauvais temps, les activités se limitent à la visite du musée anthropologique Sebastian Englert de Hanga Roa ou alors à la visite de la brasserie (Mahina/ Taina). J’opte pour la première option, qui se trouve à la limite du village.
Nommé d'après le missionnaire d'origine bavaroise, le frère franciscain Sebastian Englert, le musée a été fondé en 1973 et se consacre à la conservation du patrimoine culturel Haumaka et Rapa Nui. Le musée abrite le seul moaï clairement identifié comme féminin. Ce moaï avec des traits féminins tels que des seins proéminents ou une vulve sculptée, est l’un des douze moaï femelles découverts sur l’île de Pâques. Le torse a été découvert par Thor Heyerdahl en 1956 à Anakena et se trouvait au musée Kon Tiki à Oslo jusqu’à ce que la tête soit retrouvée en 1988, date à laquelle il a été rendu, ce qui a permis d’exposer la sculpture complète.
La collection actuelle du musée comprend environ 15 000 objets, dont la plupart sont des outils lithiques tels que le toki (herminette) et la houe (couteau), ainsi que d’autres artefacts en os – aiguilles, ornements et mangai (crochets), coraux et bois. Cependant, dans le hall d’exposition permanent (construit grâce aux dons du Japon), on ne peut voir qu’un petit échantillon de cette collection. Outre les panneaux d’information détaillés qui retracent l’histoire de l’île de Pâques depuis sa formation géologique, l’une des pièces les plus remarquables de l’exposition est l’œil de Moai. Cet œil a été découvert lors de la restauration de l’Ahu Nau sur la plage d’Anakena, en 1978. Il est fait de corail blanc avec une pupille de scorie rouge. On sait que les yeux se plaçaient sur le moai alors qu’il se trouvait déjà sur son ahu, mais il y a encore des discussions sur s’ils étaient placés de manière permanente ou uniquement lors de cérémonies spéciales.