Petit mal de tête pour moi au lever ce matin-là, après une nuit de sommeil dans les courants d'air du lodge. Peut-être parce qu'on n'a pas respecté la règle en altitude, monter 200m plus haut que l'endroit où l'on va dormir, puis redescendre pour passer une meilleure nuit. Heureusement la douleur passera vite après avoir profité du lever de soleil sur le Manaslu, et après un bon petit-déjeuner.
Suite à deux jours où nous sommes bien montés en altitude, cette journée doit nous permettre de nous acclimater. Le but sera d'avancer au prochain village, Samagaun (3480m), pour réserver un lodge et poser les sacs (Ramsingh est toujours stressé qu'il n'y ait plus de place à cause des "big groups" potentiels), puis de revenir sur nos pas pour monter vers le Pong Gyen Gompa, monastère juché à 4070m d'altitude où nous ne sommes pas certains de trouver âme qui vive.
Le groupe de trois Français voulait initialement faire la même chose, mais l'un d'eux se sent très mal ce matin-là, probablement à cause d'une intoxication alimentaire, et ils choisissent de rester un jour de plus à Shyala. Il faut dire que les conditions d'hygiène au Népal pour la préparation de nourriture et le lavage de la vaisselle laissent à désirer, il ne faut pas être difficile 😀. Pour l'une des Françaises, le dhal bhat de la veille contenait des bouts de savon !
La première partie de la marche se passe bien, mais en commençant la montée vers le gompa, Betty a un mal de tête lancinant, et à mesure des 200 premiers mètres de dénivelé, ça devient carrément insupportable. Nous devons finalement nous arrêter à seulement 3700m d'altitude, ça n'est pas vraiment rassurant sachant que les 4 ou 5 prochains jours seront à des altitudes supérieures.
D'ailleurs Ramsingh nous fait directement comprendre qu'il est très inquiet et voudrait faire demi-tour pour rentrer à Kathmandu, car il ne veut pas avoir de problèmes ! Sa réaction nous fait beaucoup plus peur que le mal de tête de Betty, mais depuis quelques jours, on a réalisé qu'il n'est pas vraiment guide assermenté (voir plus bas), et on se dit que c'est probablement pour cela qu'il a peur que le moindre souci arrive. Bref ne paniquons pas non plus, on n'est pas venu jusque là pour faire demi-tour au premier souci rencontré, et on arrive à le convaincre qu'il faut juste prendre du temps pour s'acclimater. On est peut-être juste monté trop rapidement jusque-là, on va déjà essayer de ralentir et se reposer.
On redescend donc tout doucement à Samagaun où Betty prend le premier Doliprane d'une longue série à venir, ce qui calme le mal de tête pour la fin de journée. Par contre pas question d'aller plus haut demain comme le prévoyait le programme, on retentera la journée d'acclimatation prévue ce jour-ci. Cela nous oblige donc à ajouter une journée au programme, et met un premier frein au plan d'enchaîner avec les Annapurnas.
Dans le lodge du jour, nous rencontrons plusieurs groupes avec qui nous discuterons et apprendrons de nouveaux jeux de cartes. Notamment Cecio, Italien vivant en Espagne et voyagant avec deux Allemands et un Bulgare (ça ne s'invente pas), nous apprendra le jeu "Cambio", aussi connu sous le nom de "Tenerife" dans d'autres pays. Nous aurons aussi l'occasion de discuter avec les guides anglophones des autres groupes, qui seront beaucoup plus rassurants que le notre sur les maux de tête de Betty.
Quelques mois plus tard, je rajoute une petite parenthèse sur l'affaire de notre guide, au demeurant très sympathique mais moyennement compétent. Je ne voulais pas en parler à chaud après le trek en écrivant ce blog, mais a posteriori je réalise que quelques personnes lisent ces lignes et je me dis que ça peut servir à d'autres, car on avait quand même ruminé cela pendant plusieurs jours.
Après quelques jours de marche et quelques indices qui nous avaient aiguillés vers cette conclusion, on avait compris qu'il n'était pas réellement guide assermenté. Une fois le sujet sur la table il nous avait avoué qu'il avait été porteur toute sa vie, et que c'était la première fois qu'il était "guide" sachant qu'il n'avait jamais eu de formation et n'avait donc pas de certificat. Ca aurait pu paraître anodin, mais d'une part on a un peu eu le sentiment de s'être fait avoir, et d'autre part pour les checkposts du Manaslu ça a son importance, ou bien comme nous vous devrez vous rattacher à d'autres groupes, et perdre du temps à chaque checkpost. Et vu la réaction de Ramsingh au mal d'altitude de Betty, alors qu'il a passé toute sa vie en montagne, le lien avec le manque de formation (ou d'expérience en tant que guide) est vite fait. Pour des personnes totalement néophytes par rapport à ces problèmes de MAM, ça aurait même pu être très inquiétant. C'est aussi dommage, car au lieu d'un guide qui partage son savoir sur les coutumes, les sommets, la faune et la flore, on cumule juste des regrets en comparant avec les guides des autres groupes. Quelques conseils donc, pour tous ceux qui liront ce blog, si vous devez un jour choisir un guide au Népal :
1. Comparez plusieurs agences pour avoir une idée réaliste des prix. Le moins cher n'est pas forcément le mieux, mais le plus cher non plus, ou bien il faut avoir des assurances sur le guide en question. Pour la saison 2018, a priori les prix étaient de 25 à 35€ par jour pour un guide. On a vu des gens qui ont négocié guide + porteur pour 35€ et sont mieux tombés que nous.
2. Lors de votre choix, assurez-vous que votre guide parle bien anglais ou Français, au risque de tomber sur un qui ne connait que 4 mots... Idéalement il faut le rencontrer et lui parler avant de partir, a priori c'est ce qui se fait le plus souvent.
3. C'est bête, mais demandez à voir le certificat du guide qui vous accompagnera.
Dans notre cas, vu que le changement a eu lieu à 23h la veille du départ qui était prévu à 6h du matin, je ne sais pas ce que l'on aurait pu faire sans perdre des jours supplémentaires à Kathmandu et compromettre notre plan initial. Bref, parenthèse terminée, on a quand même bien profité du trek et aujourd'hui on retient surtout le positif !
Après une bonne nuit de sommeil sans courant d'air, on se lève doucement et on tente de repartir vers l'objectif de la veille, alors que les autres groupes avancent vers le village suivant de Samdo (3860m).
Après quelques centaines de mètres de montée, le mal de tête de Betty revient comme la veille, mais elle s'accroche et tient jusqu'au Gompa pour son baptême des 4000m, avant de devoir prendre un nouveau Doliprane.
Le gompa est finalement inoccupé, et nous ne pourrons pas le visiter, mais au moins l'admirer de l'extérieur, et faire quelques belles photos, avec des bâtiments construits à flanc de falaise, au pied du Manaslu (qui culmine mine de rien encore 4000m au-dessus de nos têtes, c'est assez dur à imaginer). Au passage on retrouve les Français laissés la veille, remis de leur intoxication alimentaire.
A la fin de la journée, mes chaussures sont de nouveau ouvertes, le tube de glue aura tenu 2 jours ! Il faudra donc refaire un atelier nettoyage et collage, où vont passer 3 tubes cette fois-ci, ainsi qu'un mètre de scotch en toile.