07 00, branle-bas de combat sous la tente !
Une longue ligne droite nous attend jusqu'au poste frontière de Kazungula.
La route autrefois parsemée de nids de poule est maintenant aussi lisse que la peau d'un brugnon.
Il reste cependant prudent de ne pas faire les fous du volant car éléphants, zèbres ou girafes sont toujours susceptibles de la traverser sans se soucier d'une quelconque priorité...
Nous observons ça et là des campements précaires.
Quelques huttes de paille, quelques planches, quelques tôles.
La frontière avec le Zimbabwe est toute proche. Sont-ce des réfugiés ?
Ou bien les ouvriers agricoles de cette immense exploitation surgie de nulle part ?
La circulation s'intensifie puis c'est l'arrêt.
Nous sommes arrivés aux confins nord du Botswana et une interminable file de camions bouche l'horizon.
Le goudron s'achève au bord du Zambèze qui, lui, est bien en eaux.
Aucun pont ne permet de franchir l'obstacle et seuls quelques ferrys assurent la traversée.
Une ou deux voitures et un camion à chaque passage...
Les routiers patientent donc des heures, certainement des jours, pour arriver en tête de file et passer.
Nous serons plus chanceux.
Les véhicules ont leur propre file, bien peu garnie.
Je vais procéder aux formalités de sortie du territoire et vous attends près du fleuve.
Dépêchez-vous, le bac arrive !
Les faciliteurs de frontière aussi...
Le Camion grimpe prudemment sur le ferry suivi d'un autre. Les piétons se précipitent, les faciliteurs aussi...
Nous voici au milieu du fleuve.
Les pluies d'été ont gonflé le Zambèze mais nous apprendrons par la suite que le niveau des eaux est, cette année, bien bas.
Trop bas.
Les centrales hydrauliques peinent à fournir de l'électricité et chaque quartier se voit privé de courant tour à tour.
Je me dirige alors vers le guichet (Les faciliteurs aussi...) pour payer la traversée : 20 dollars, 150 kwachas, 200 pulas ou 220 rands.
Va pour les rands, le taux semble bon.
Nous arrivons maintenant à quai, les faciliteurs aussi...
Nos deux faciliteurs attitrés nous indiquent, malgré notre volonté clairement exprimée de nous débrouiller seuls, qu'il faut d'abord se rendre au bureau des visas.
Le poste frontière est constitué de plusieurs cabanes, cabanons, entrepôts, bicoques...
Sans indications...
Il est où le bureau des visas ?
Les deux gaillards nous attendent un peu plus loin en faisant de grands signes.
Ça doit être là.
Un guichet est dédié aux hôtes payants. Le prix s'affiche clairement : 50 $ le visa simple entrée.
Le fonctionnaire nous fait bon accueil, encaisse l'argent, farfouille dans son coffre, fait une page d'écriture puis colle le sésame.
Nous savons qu'il nous faut maintenant déclarer le véhicule et acquitter diverses taxes mais pas un panneau, pas une affiche n'indique comment procéder...
Nous cédons donc à la facilité.
La facilité nous entraîne dans un autre bâtiment, passe quelques portes et se dirige vers un bureau entrouvert.
Un homme remplit un grand cahier sous l'œil vigilant d'un autre confortablement assis derrière son clavier.
C'est maintenant à notre tour.
Nom, prénom du chauffeur, numéro du passeport, numéro d'immatriculation, numéro du chassis, numéro du...
Plus qu'une case et une signature. Ouf !
L'homme ne jette pas un œil au cahier puis nous brandit un formulaire carboné où les demandes se corsent.
Prix du véhicule, nom du propriétaire, adresse, nom de l'assureur...
Nous comprenons rapidement pourquoi le loueur nous a fourni une grosse pochette remplie de toute une masse de documents alors que, pour d'autres frontières, une simple autorisation à circuler suffit.
La dernière ligne remplie, la dernière signature apposée, nous rendons à l'employé le fruit de notre labeur.
Quelques tapotis sur le clavier et une attestation sort de l'imprimante.
L'homme écrit quelques mots, ajoute quelques coups de tampons et nous indique que l'ordinateur qui délivre la taxe carbone est en panne et que nous la paierons donc en sortant.
Nous pensons en avoir presque fini...
C'est sans compter le petit bureau à 100 mètres à droite où nous serons délestés de 30 kwachas, kwachas que nous ne possédons pas et que nos faciliteurs nous fourniront aimablement en échange de quelques pulas et d'une commission de 10 %...
C'est aussi sans compter l'indispensable road taxe dont le montant s'acquitte, en dollars cette fois-ci, dans un préfabriqué situé un peu plus loin.
20 dollars.
Nous nous en tirons à bon compte au vu du billet de 100 dollars que doivent donner les routiers...
Nos deux accompagnateurs nous invitent alors à récupérer notre véhicule, passer la douane et les attendre à la sortie de la frontière devant le bureau des assurances.
Aussitôt dit, aussitôt fait !
Nous montrons tous les documents accumulés au douanier qui se contente de vérifier que nous avons tout payé mais qui se moque royalement de contrôler si les données rentrées correspondent bien à nos papiers et au numéro gravé sur le moteur du Camion...
Nos bagages et leur contenu ne l'intéresseront pas plus et c'est en 3 secondes que nous franchirons la dernière barrière qui nous sépare du territoire zambien !
Bon, allons nous assurer maintenant.
Nous nous garons sur le parking où taxis et minibus attendent leurs passagers puis entrons, suivis de nos faciliteurs, dans le cabanon d'un assureur.
Nous papotons pendant que les papiers se remplissent puis demandons le prix de l'assurance.
391 kwachas, nous annonce le courtier avec un grand sourire.
Vous remarquerez le 1 qui donne au chiffre annoncé tout son poids. Un tarif pareil ne peut s'inventer...
Je quitte alors ma casquette de copilote pour endosser ma féroce tenue de cost killeuse.
391 ? C'est trop cher. Les tarifs devraient tourner autour de 150 rands !
Je me souvenais du prix des assurances au Mozambique et me doutais qu'il fallait bien que les faciliteurs se paient quelque part...
L'homme n'en démord pas.
Je lui assène donc mon dernier argument : nous allons dans la boutique d'à côté.
L'assureur regarde sa police remplie jusqu'à la dernière ligne, jusqu'au dernier chiffre et lâche dépité : 116 kwachas.
C'est justement le nombre confusément perçu lors de l'irruption d'un autre client quelques minutes auparavant...
Nous sortons quelques billets et le certificat rejoint la précieuse pochette de documents.
Comme certaines personnes l'ont indiqué ici et ailleurs, il faut bien que tout le monde vive. Nous ne tiendrons donc pas trop rigueur aux faciliteurs de leur arnaque et les paierons 20 pulas, sermon compris, chacun pour le service rendu.
Nous pouvons maintenant poursuivre notre route, direction Livingstone.
Du bitume et des arbres, des arbres et du bitume...
Un barrage de police.Le premier d'une longue série...
Le policier nous souhaite le bonjour, s'enquiert de notre santé.
Puis demande le permis de conduire du chauffeur.
Mon conjoint lui tend l'international puis le national.
Seules les photos semblent l'intéresser, bavarder aussi.
Les journées doivent être bien longues au bord de cette route...
Le véhicule sera ainsi arrêté à de multiples reprises à ces barrières qui jalonnent les routes zambiennes.
Particulièrement sur la portion Livingstone-Lusaka.
Généralement, il suffit de présenter la road taxe et l'assurance pour passer.
Tous ces contrôles routiers ne sont pas au faciès et jamais il n'y aura intention de nous piéger pour obtenir quelques kwachas.
Sauf par une autre sorte de police mais ceci est une autre histoire...
Une heure passe, Livingstone se profile à l'horizon.
Une rue commerçante traverse la ville du nord au sud, de Lusaka aux fameuses Chutes Victoria, Mosi-oa-Tunya, la fumée qui gronde.
Il nous faut trouver de l'argent, les quelques kwachas échangés à la frontière ne tiendront pas plus que le temps d'une bière ou d'un Savanna.
Ça tombe bien, il y a plein de distributeurs dans le coin !
Je reste dans le véhicule, j'attends, j'attends, j'attends...
Trouver une banque acceptant la Mastercard tient de l'exploit !
Je conseille aux futurs voyageurs de mettre directement le cap sur les DAB de la Standard Chartered ou, à défaut, de la Barclays...
Le distributeur pillé, le porte monnaie ne ferme plus.
Même s'il existe un billet de 100 kwachas, la grosse coupure la plus fréquente est celle de 50.
Je vous laisse maintenant le soin de calculer l'épaisseur d'une liasse correspondant à un retrait de 4000 kwachas ainsi que de convertir ce montant en Euros, Dollars et Tugriks pendant que nous recherchons le Maramba River Lodge !
Le Camion tourne sur la piste qui mène au lodge puis trouve sa place sur la verte pelouse du camping.
La tente est montée en un clin d'oeil, nous sommes devenus des professionnels...
La luminosité décline, l'envie d'une boisson fraîche à contempler les bords de la Maramba me tenaille.
Des feus sont bientôt allumés, à la fois pour réchauffer l'atmosphère mais aussi pour éclairer les lieux.Ce soir, l'électricité sera coupée de 17 00 à 22 00 pour cause de pénurie tournante.
La soif repue, c'est aux estomacs de gronder.Quelques pas nous séparent du restaurant, quelques lignes de lecture, du repas.
Je vous souhaite un bon appétit et gare aux hippopotames sur le chemin du retour !