Retour en Étrurie interne, l'Étrurie padane est bien loin. J'ai deux petits jours pour découvrir Volterra, cité étrusque, elle trône sur une hauteur surplombant les collines environnantes cultivées, érodées, qui prennent des formes abruptes et douces à la fois.
Sur la route vers Volterra Aujourd’hui la ville étrusque est enfouie sous les maisons médiévales et les palais. Au-delà des remparts, les petites rues (et le flux des touristes) me mènent à la place principale du Palais des Priori. Pas d’étrusques au programme aujourd’hui ou plutôt je manque l’ouverture du site... Je vadrouille donc dans la cité, à la découverte de son riche patrimoine.
Le Palais des Priori date du XIIIème, il ne faut pas se méprendre, les jolies peintures colorées qui l'ornent sont du XIXème siècle! On note tout de même au milieu une énième représentation de l’Annonciation du XIVème ).
Palais des Priori Son plus grand intérêt se trouve peut-être au sommet, dans la Torre Civica. Après une ascension sur un petit escalier, on se retrouve sous une lourde cloche de bronze (qui sonne toujours les heures et demi-heures, la montée est donc interdite à ces moments-ci). De là, la ville et ses toits orangés, les collines vertes et dorées s’offrent à notre vue. On peut même distinguer tout au fond la mer scintillante.
Avisant un office de tourisme en face, je vais y prendre quelques renseignements sur les nécropoles étrusques. Désespoir, plus aucune n’est visible au dire de la guide ! Il reste toujours l’acropole et ses temples étrusques ainsi que le théâtre et les thermes romains.
Et les remparts !
Volterra fut une cité fortifiée comme les autres cités étrusques, on en conserve que de rares traces. L’enceinte a la particularité d’être double, elle était d’abord sur le tracé actuel de la cité (au VI s. BCE) avant de s’étendre, signe de la prospérité de la cité à la période hellénistique. Dans le parcours de la muraille actuelle, il reste une porte étrusque célèbre pour les trois têtes sculptées qui l’ornaient, malheureusement en plus de 2000 ans, elles se sont totalement érodées et il est impossible de reconnaître les personnages.
Porte des trois têtes à Volterra Au cours du VIIème s. BCE, les divers sites villanoviens (âge du Fer) qui occupaient et entouraient la colline principale s’agglomèrent en une « ville » unique qui se concentre autour du sommet, le cœur de la cité, l’acropole. Il n’en reste que quelques murs de temple, le haut de la colline ayant été détruit pour faire place au XV ème s. à la grande forteresse. En outre, comme beaucoup de constructions étrusques, l’élévation des temples devait être en matériaux périssables : bois et argiles crues
Acropole La ville se "romanise" à partir du IIIème, mais lors de la guerre sociale (90-88 BCE), comme beaucoup de cités d’Etrurie, Volterra prend le parti des alliés et vaincue, subit de graves dommages, la ville n’est reconstruite qu’ à partir de l’époque augustéenne (dernier quart Ier s. BCE). De cette époque on peut admirer le théâtre romain. Il a été construit en contrebas de la cité, les gradins appuyés sur le relief.
Saut temporel !
Une fête médiévale se prépare, Volterra va plonger durant quelques jours dans l’ambiance des années 1398, saltimbanques, pages, danseurs et musiciens animent les rues de leur costume colorés, chansons et rires. Cela fait un ensemble joyeux étonnant au côté des vestiges étrusques !
Aujourd’hui l’acropole est de nouveau ouverte, je peux donc admirer l’entremêlement des fondations : temples du VI ème, temple du III ème BCE, églises médiévales… Les techniques de constructions (petite pierre jointées médiévales, gros appareil archaïque...) sont très différentes donc, il est facile de reconnaître les différentes phases, mais quel méli-mélo !
L'acropole de Volterra Finalement, contrairement à ce que m’avait annoncé l’office de tourisme on peut encore voir deux tombes !! c’est mieux que rien. Pour cela on passe la deuxième porte étrusque encore debout de Volterra, un peu plus bas. Deux tombes hypogées hellénistiques (fin IV ème s. BCE) de la nécropole du Portone en loc. Marmini ont une à plusieurs chambres et l’autre ronde ce qui est une forme très rare pour une chambre funéraire.
Pour les autres, le musée donne un petit aperçu.
Tombe hypogée à chambre ronde (IV-Ier s. BCE)
Le musée de Volterra fait partie de ces musées pour érudits du XIX ème siècle avec de petites salles remplies d’objets du sol au plafond classé par types : une salle de vases communs à pâte claire, une salle de bucchero et de vernis noir, des salles de bronze… et au milieu de cet amoncellement une pièce vide à l’exception d’un objet : l’Ombre du soir . La statuette longiligne en bronze doit son nom a une ressemblance avec l’allongement des ombres dans la lumière vespérale, une silhouette étrangement similaire aux sculptures d’Alberto Giacometti.
Ombre du soir et typologie d'anses en bronze Musée Guarnacci Sinon, Volterra est aussi réputée pour ses urnes. Encore! on n’en a pas assez vues à Chiusi et Pérouse ! Le musée présente donc son lot conséquent, avec peut-être une plus grande diversité de type. Ces urnes destinées à recevoir les cendres du défunt, le représentent parfois dans la position du banqueteur, les hommes ont une patère (sorte de petite assiette creuse utilisée pour les libations) ou une corne à boire (rhyton) à la main et les femmes un éventail, tandis que la caisse est ornée de représentation d’éléments végétaux ou animaux, (scène de chasse) ou de bestiaires fantastiques ou encore de scènes mythologiques… La diversité est grande, et la particularité de Volterra est d’avoir des urnes en albâtre qui sont très finement sculptées. Nombres d’entre elles présentent des traces de peinture et dorure, vestige d’un éclat passé. L’apogée de cette production se situe à la fin du III ème s. BCE. Ces urnes se propagent aussi dans le territoire de la cité et la variation de cette production est un des marqueurs des changements de la cité : ainsi au milieu du Ier siècle BCE, les urnes disparaissent du territoire et ne sont présentes qu’à Volterra, montrant une mutation dans la gestion du territoire.
Toujours plus d'urnes ! Volterra a une production céramique propre : la figure rouge étrusque dont on reconnait les losanges sur le col des kelebes (IV-III ème s. BCe) et le vernis noir imité du vernis noir grec, il s’agit d’une production de qualité très noir avec des reflets bleutés, des reliefs (parfois volumineux) décorent les vases. (IV ème s. BCE). On retrouve cette production bien au-delà du seul territoire de la cité
Vases à figure rouge de Volterra + vernis noir (atelier Malacena)Et encore beaucoup, beaucoup, beaucoup de mobilier et de vestiges à développer !
Musée de Volterra - vrac