13 étapes
9 commentaires
J'aime bien l'idée de commencement. Alors partir de la source et voir grandir ce fleuve jusqu'à la mer m'inspire. Ce sera aussi l'occasion de nature, d'histoire des Hommes et de rencontres.
Du 22 juillet au 2 août 2024
12 jours
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21
juil

Au printemps, j'avais des envies de marche au long cours. Je m'imaginais traverser la France de manière longitudinale, de Nantes à Besançon, sur la Via Ligeria. Et puis, j'ai revu cette marche estivale à la baisse. Rester dans ma région et marcher 2 semaines sur un chemin qu'habituellement j'aurais parcouru en 8 jours. Je vais reprendre près de Bohain en Vermandois, là où je m'étais arrêtée il y a deux ans.

Comme d'habitude, le sac est vite prêt, l'itinéraire aussi. Il y a de quoi camper facilement. Bernard est depuis 5 semaines dans ses Pyrénées sur le GR 10. Moi, je vais tester le dénivelé zéro ! Longer la Somme, de sa source jusqu'à la mer. Et puis, il n'y a pas que Compostelle dans la vie, quoi que...

22
juil

Levée à l'aube, je prends le métro avec ceux que l'on ne voit pas. En face de moi, un homme habillé tout en noir, casquette et Rayban. Sur son sweat, un heaume stylisé aux couleurs bleu, blanc, rouge. Il a les oreilles bouchées par ses écouteurs et les yeux rivés sur son téléphone. J'attrape mon sac à dos et rejoins la gare pour prendre le TER de Saint Quentin. Sur le quai, un couple partage un café. Seule la femme monte dans le train. Je la surprendrai en train de petit-déjeuner avec son bol breton en faience où est écrit Aline. Je descends à Fresnoy-le-Grand après être passée par Douai, Montigny-en-Ostrevent, Somain, Cambrai, Caudry, Busigny, Bohain en Vermandois. La petite gare est fermée et j'entends Simone faire ses annonces : le TER en provenance... J'installe le chariot et me mets en route.


Je passe devant l'usine qui fabrique les cocottes en fonte, puis celle des bas et collants. Le Creuset et Le Bourget, c'est dans les Hauts de France !! Pas de place pour faire des achats dans les magasins d'usine.

Je suis sur le GR 655, chemin de Compostelle qui part de Bruxelles et va à Paris puis Tours. Je quitte Fresnoy par une belle côte qui se transforme rapidement en chemin. Champs de blé, féverolles, petits bois. L'alouette est au rendez-vous. Je croise un couple de marcheurs. Je prends le temps de la rencontre.

Un long chemin herbeux m'emmène jusqu'à Fonsomme. Une abbaye cistercienne était implantée au bord de la source. Elle sera détruite 3 fois.

Je suis toujours émue en découvrant des sources, cette eau qui sourd de nulle part. Ici, les couleurs sont superbes.

Je choisis de suivre cette rivière naissante et ne traverse pas Fonsomme.

La Somme, à l'origine

Déjà le chemin la quitte et me fais longer la rigole du Noirieux. Je fais s'envoler des libellules. Je surprends un héron. J'ai un message de Mélitine m'annonçant que j'ai oublié ma monoculaire. Adieu l'observation des oiseaux, chapiteaux et vitraux des cathédrales, phoques...

Le marais au bord de la rigole.

Le chemin bifurque à travers champs. Ce sont des papillons, des paons du jour, qui me suivent. J'aperçois au loin la flèche de la Basilique. Cela me rappelle Chartes. On voit ses 2 flèches à plus de 15 km et on finit par trouver le chemin long ! Ici, rien de tel.

J'arrive au pont sur le canal de Saint Quentin.

Je mets la toile au camping parmi les centres aérés. Ce sera intéressant à observer...


Le canal de Saint Quentin

23 km, vent de face pratiquement tout le long, soleil et nuages, chaud. 1/2 heure aller-retour supplémentaire pour ravitailler.

23
juil

23h et bouchons d'oreilles. Dehors, ça cavale, ça crie. Autant bivouaquer au bord d'un torrent de montagne ou d'un étang où les grenouilles s'en donnent à cœur joie.

J'entends des gouttes tomber sur la toile. Il n'est pas 6 h... je me lève, mets le chariot sous la table de camping, vais aux toilettes. Le randonneur arrivé tard hier soir est en train de remballer. Il s'agit de cette petite pluie qui nous fait toujours hésiter : cape de pluie ou pas cape de pluie mais qui finit par mouiller. Je décide de me recoucher. Je retends la tente, bousculée hier soir par une jeune. Il est huit heures trente quand je quitte le camping. J'avais décidé de ne pas traverser les grandes villes. Mais j'ai envie de revoir la basilique. Je rejoins donc le centre-ville en longeant le canal jusqu'au pont.

Le pont avec ses 2 phares pylônes, la Basilique

La basilique est déserte. Le labyrinthe est devant moi. Je décide de le parcourir. Je marche sur la ligne noire et me rapproche du centre. J'en suis surprise, puis je m'en écarte. Et cela plusieurs fois. Connaissant la symbolique du labyrinthe, je réalise ce que cela signifie. J'en suis chamboulée. En tout cas, j'observe qu'il s'est passé quelque chose en moi. J'arrive au centre. J'ai chaud, je transpire. Quel pèlerinage !!

Je poursuis la visite de la Basilique. Je l'avais fait un peu au pas de charge il y a 5 ans, étant attendue pour visiter le buffet art déco de la gare. J'admire les voûtes, retrouve le vitrail art déco consacré à Ste Thérèse.

Je quitte la basilique et vais à l'office de tourisme. J'y dépose mon chariot et ressors avec un dépliant pour explorer les façades art déco. Je déambule et lève la tête.

Subsistent d'autres façades...

Le crachin s'invite à la fin de ma visite. Je récupère mon sac et remercie les 2 jeunes filles. Elles me proposent de suivre les coquilles pour sortir de la ville. Ce que je fais et je rejoins une sente qui m'amène au canal et à un chemin peu entretenu.

Et c'est parti pour plusieurs km de chemins avec des hautes herbes, orties et ronces. Je ne comprends pas pourquoi le GR passe là alors qu'en face, il y a le chemin de halage. Bref, comme d'habitude, le chariot passe. J'arrive à un pont où je vais pouvoir passer sur l'autre berge. Avant, j'ai l'œil attiré par un clocher. Je fais le détour.

Chapelle Art Déco d'Oestre.

Je passe le pont et vais retrouver le chemin préféré de mon chariot, un vent de face que j'avais peu sur l'autre rive, protégée par la végétation. Il faut savoir ce que l'on veut !

Puis j'arrive à l'écluse de Fontaine-les-Clercs. Et là, en apercevant le petit banc, un flot de souvenirs surgit. La sieste sur ce banc, il y a 5 ans. J'étais en route pour la Suisse sur la via Francigena. Je m'étais posée là et j'avais fait des photos des nuages qui défilaient. J'avais déjà le vent de face !

Je poursuis, prise dans mes souvenirs. Je me demande si c'est bien de refaire les mêmes choses, les mêmes chemins. Je ne suis pas dans le présent. Des pêcheurs vont se charger de m'y ramener. Sur l'autre rive, l'un d'eux me fait signe, je lui réponds. Son collègue me crie :"vous allez loin ?" Je lui réponds :"jusqu'à mer ". Il éclate de rire. Et pourtant, c'est vrai ! Je leur fais un signe d'adieu. J'ai le sourire aux lèvres, les cheveux au vent et devant moi, un jeune chevreuil qui ne m'a pas sentie. Merci le vent de face ! Quelle rencontre ! Il continue d'avancer quand moi je me suis arrêtée. Cela va me paraître long. Prudemment, je fais deux pas. Il s'arrête, le museau en l'air, puis bifurque dans le fourré.

Ah que j'aime ces rencontres animales ! C'est un vrai cadeau. Je suis en joie. Sur ma gauche, j'aperçois enfin la Somme que je longe depuis Saint Quentin mais qui était cachée par les bois et les fourrés. Me voilà à Séraucourt.

Cette étape pourrait s'intituler pèlerinages, avec un s. D'abord, ce labyrinthe que les croyants parcouraient à genoux en remplacement du pèlerinage, puis cette étape que j'ai déjà faite, enfin ce tronçon commun à 3 chemins, pour aller au choix à Compostelle, Rome ou la mer.

Quelle étape !


19 km dont 7 en vadrouille dans Saint-Quentin, vent de face plus présent qu'hier, un peu de crachin et ciel nuageux.


24
juil

Levée avec le soleil, j'utilise la logistique du camping : rambarde pour faire sécher la tente, bouilloire électrique pour chauffer l'eau, la poule pour les croûtes de fromage. Je prends mon petit déjeuner en regardant le soleil se lever. Je passe près de l'étang avant de quitter le camping. Je m'aperçois qu'il n'y a que des Hollandais, Allemands ou Britanniques.

Je traverse le village. Il a été complètement détruit lors de la première guerre mondiale et reconstruit avec cette architecture typique.

Le pharmacien prend sa retraite et n'a trouvé aucun repreneur. Un sentier m'emmène sur le plateau. Une légère brume se lève. C'est beau.

Le chemin est complètement innondé par une fuite de la station de pompage. Je grimpe le talus et marche dans un champ déchaumé. Ça cavale dans les champs : lièvres dans les chaumes, chevreuil dans les betteraves. La via Francigena part à gauche et moi je prends à droite.

Après être passée au pied d'éoliennes et d'une entreprise qui fabrique les pelouses toutes prêtes, je retrouve le canal de Saint Quentin puis la Somme. Cet endroit n'est plus très entretenu, plein de plantes aquatiques ont envahi le bief. Puis je rejoins la Somme et son canal. Des travaux sont prévus.


C'est complètement sauvage. On dirait que personne n'est venu là depuis longtemps. Un ballet de libellule me devance. J'en dénombre une dizaine d'espèces. Je me géo-localise pour me rendre compte à quoi ça ressemble.

Je me retrouve entre le canal de la Somme et la Somme. Le chemin me fait quitter le canal à cause des travaux de déboisement des berges. Je passe par Dury puis Pithon à travers champs. On arrose les pommes de terre.


A Pithon, je suis en terrain connu. Le chemin m'emmène de nouveau sur les berges du canal, les engins forestiers sont passés par là. Des énormes peupliers ont été coupés. Des jeunes descendent le canal en paddle. J'arrive finalement à Ham.

Je ravitaille pour ce soir et demain matin car il n'y a pas commerces. Je traverse la ville sans faire de tourisme. Ham a été une ville industrielle et cité sucrière. Je prends en photo quelques façades. Il y a aussi un château d'après les panneaux.

Je me pause en face des restes de l'abbaye Notre-Dame. Je suis effarée du nombre de poids lourds qui passent. Il y a une expo photos disséminée dans la ville.


Le chemin de Compostelle se sépare du GR 800. Il descend sur Noyon et Compiègne. Moi, je suis vite sur un chemin agricole qui longe une réserve d'eau gigantesque. Un chevreuil me surprend en détalant du fourré. Puis, le balisage ne correspond pas à ma carte. Dilemme. Y a-t-il une raison à cela ? Je décide de suivre la carte. Et mal m'en a pris. Je me retrouve sur la berge du canal absolument pas entretenue. Je tire le chariot, j'avance vite, en plein soleil. Grenouilles et autres bestioles me passent entre les jambes. J'en ai d'après la carte pour 2,5 km. Quelle galère ! Mais au bout d'1,4 km, je vois une passerelle sur ma gauche. Je saisie l'occasion. Je tombe sur un magnifique corps de ferme et des maisons art déco.

Puis je rejoins la route. Je décide de finir l'étape par le goudron pour rejoindre Voyennes et planter ma tente au bord de l'étang. Je vais avoir droit au concert ce soir !

28 km, ciel bleu ce matin, couvert l'après-midi, pas de vent, lourd et très chaud. Et mon chariot passe vraiment partout ! Ça permet de faire du cardio sur chemin plat !

25
juil

La moissonneuse a remplacé les grenouilles. Pas de rosée. Tout est vite remballé. En déjeunant, je repense à hier soir. Une famille avec 2 jeunes garçons est arrivée vers 17h. L'aîné des deux s'est précipité pour aller pêcher. Un pêcheur dont j'avais photographié la prise va être pris d'assaut par les questions de l'enfant. Qu'est ce que tu lances ? Pourquoi ta canne ...? Et comment on attrape....? A l'accent de la mère, j'en déduis que la famille est suisse. Nous faisons rapidement connaissance mais je les laisse s'installer. J'aurais confirmation qu'ils viennent du Valais et ont fait une partie du GR 800 à vélo. C'est surtout à ce qui s'est passé que je repense. Une dispute entre père et fils au sujet du fil dans le moulinet et la réflexion du garçon " tu me prends pour un con. Je sais que je suis con." Et le père qui ne contredit pas ces affirmations. Je laisserais bien un 4 feuilles à ce garçon pour qu'il réussisse à la pêche et avec son père...

7h15. En route.


Comme cela devient l'habitude, je franchis le canal puis la Somme. Je suis le chemin à travers champs.

Je vais traverser plusieurs villages qui ont tous été détruits lors de la première guerre. Ce sont aussi des villages où ont été retrouvés beaucoup de vestiges romains.

La mairie, l'Église de Villecourt, les marais

Falvy, avec son église du XIIÈME, imposante mais plus en rapport avec la dimension du village.

Je passe sous l'autoroute puis j'arrive à Saint Christ Friost. Ce village est connu pour la pisciculture.

Église St Jules

Le chemin me fait passer 2 ponts, un au dessus de la Somme, un au dessus du grand canal dit du nord. Entre les deux, un calvaire...

Je vais récupérer le chemin de halage que j'avais pris il y a 6 ans pour descendre à Compostelle. Je vais le prendre dans l'autre sens. La berge est au soleil, du goudron et un peu moins de 3 km à faire avant de retraverser un pont.

Je suis vigilante à l'approche du pont afin de pouvoir le récupérer. Je ne trouve pas le chemin. Je me géo-localise, je l'ai dépassé. Je fais demi tour, vais jusqu'à l'endroit repéré sur la carte et rien ! Pas de chemin ni la possibilité de traverser. Ah , je n'ai pas du tout envie d'aller jusqu'à Péronne par le halage !! Arrivée à la pile du pont, il y a une balise indiquant le chemin. Décidément, ce GR 800 a des soucis avec le balisage. Depuis ce matin, je n'arrête pas de sortir mon téléphone aux intersections car rien n'est indiqué ! J'en suis agacée. Le pont franchi, je suis à Brie et suis attirée par le curieux clocher. Des travaux importants sont en cours. Un des ouvriers me laisse entrer pour voir l'intérieur.

L'architecte de l'époque s'est inspiré de Notre Dame de Rancy. J'en profite pour faire la pause déjeuner.

Je bricole avec le chemin pour terminer l'étape. J'arrive à Péronne et découvre des remparts Vauban et la porte de Bretagne.

La porte de Bretagne est en fait 2 tours

J'ai marché 29km. Je suis fourbue. Il fait très chaud et la pluie est annoncée. Je voulais faire ce chemin tranquillement, je constate que j'ai gardé mes habitudes... Le camping propose de quoi se restaurer. Je ravitaillerai donc demain.

26
juil

Il a plu toute la nuit. J'ai partagé ma tente avec des moustiques que je n'ai pas entendus. Pas de dégât. Vraiment depuis 6 ans, ma tente m'est fidèle. Je prends le temps ce matin. Je traverse Péronne, ravitaille pour la suite, passe devant le musée.

Puis je visite l'église St Jean-Baptiste. J'aime bien l'autel au milieu. Le chemin de Croix fait très art déco. Il y a une magnifique fresque datant de 1601

Puis j'arrive devant l'Historial de la Grande guerre. Il est installé dans le château fort datant du XIIème. " Incendiée, pillée lors des incursions des Vikings, gravement endommagée lors du siège des Espagnols, dévastée par les Allemands en 1870, totalement détruite en 1917 durant la Première Guerre mondiale, bombardée et incendiée en mai 1940 par l'aviation allemande durant la Seconde Guerre mondiale, Péronne porte en son blason deux Croix de guerre. ncendiée, pillée lors des incursions des Vikings, gravement endommagée lors du siège des Espagnols, dévastée par les Allemands en 1870, totalement détruite en 1917 durant la Première Guerre mondiale, bombardée et incendiée en mai 1940 par l'aviation allemande durant la Seconde Guerre mondiale, Péronne porte en son blason deux Croix de guerre." Wikipedia


Péronne est bordée d'eau. De nouveau, je traverse la Somme, aperçois les marais puis rejoins le canal.

L'étape va alterner entre canal et campagne. Après quelques kilomètres le long du canal, je bifurque et vais me retrouver en lisière de bois, un beau chemin qui change du canal. Je l'aperçois par moment entre les arbres. La pluie de la nuit a fait chuter la température. C'est agréable, odorant. Le tronçon le long de canal me fait du bien. C'est calme, apaisant. La reine des prés égaye le bas côté.

Je traverse Feuilleres et reprend le canal au pont mobile.

L'église et la mairie, le pont tournant

A Frise, grand déballage ! Pique-nique, séchage de tente, rangement des courses, sieste... Le village de Frise a été coupé en 2 lors de la percée du canal. C'est aussi à Frise que Blaise Cendrars a passé une grande partie de la guerre 14-18, relatée dans son livre "La Main coupée".


Entre Frise inférieure et Frise supérieure, un héron va faire des envols/pauses à chaque fois que je me rapproche de lui. A l'écluse suivante, un dispositif curieux. Je me demande s'il ne s'agit pas d'un passage pour les poissons.

Puis le chemin me fait monter sur "le haut de la montagne ". Chemin escarpé. Je suis obligée de passer en mode portage à cause des barrières. Et là, superbe panorama sur la Somme et les marais.

Puis de nouveau le canal jusqu'à Eclusier-Vaux. L'eau est transparente. Je vois une multitude de poissons. Tous les marais ont été façonnés par l'homme. Les moines au XIÈME siècle en créant les marais ont innondé la vallée. La Somme est comme mélangée aux marais. Le faible dénivelé entre la source et la mer a été propice.

Le chemin propose de repartir dans la campagne. J'hésite. Le début est sur la route, sans bas côtés. Par le canal, 4 km. Je prends l'option canal. Et là je rencontre Jacqueline, 70 ans avec son vélo sans assistance électrique. Partie de Besançon, elle va en Bretagne mais fait un détour par la Somme pour voir la Baie. Elle prend en photo le chariot. Nous échangeons autour de la marche et du vélo. Je lui confie que des escapades à vélo me tentent. Elle me raconte le Cap Nord l'an dernier, sa méconnaissance de la mécanique et son dégoût des côtes qu'elle monte à pied. Ah, ça me laisse des perspectives ! Nous échangeons nos numéros. Jacqueline m'annonce qu'un marcheur parti de Strasbourg me suit. Je lui demande ce qu'il fait comme chemin, elle me répond qu'il veut voir la mer !

Jacqueline

J'arrive enfin à Cappy où je vais loger chez Dany car le camping n'accepte plus les campeurs.

Le port, l'église St Nicolas

Un peu plus de 22 km. Météo agréable pour marcher. Le ciel étant couvert, je n'ai pas mis de crème solaire... aie.

27
juil

Dany est déjà occupé au bar. Les habitués sont là. Une dame vient chercher du pain. Cet endroit fait du lien. Une dernière blague, un salut aux piliers de bar et je quitte Cappy vers 8h30. Je traverse la petite voie ferrée du train touristique de la Haute Somme. Ce train a servi pour le ravitaillement pendant la première guerre puis pour le transport des betteraves. Je grimpe sur le coteau par un chemin. Je prends de la hauteur, 78 m. Cela me permets d'avoir une vue d'ensemble sur la Somme.

Je passe au bord d'un grand champ de blé qui n'a pas encore été fauché. Je m'arrête pour écouter l'alouette et là j'entends un drôle de bruit. On dirait que les épis crépitent ! En plus, avec la pluie de la nuit, le champ dégage une odeur. Je n'avais jamais remarqué cela avant.


Le sentier devient gras, j'accumule de la boue sous les chaussures, les roues du chariot aussi. Le chemin devient herbeux et nous nettoie. Puis il bifurque. Le balisage disparaît. Je longe maintenant un champ de maïs. Je vérifie, je suis bien sur le chemin. Je ne suis pas la seule, je vois plein d'empreintes d'animaux. J'arrive au bout du champ de maïs et là ça va être au petit bonheur la chance pour rejoindre le chemin en bas en lisière de bois. Je vais tracer dans les hautes herbes le chemin pour d'autres !

Je vais longer des marais et étangs qui ont été créés pour extraire la tourbe. J'entends tac,tac,tac. Un groupe de marcheurs avec leurs bâtons. Je ne verrai pas le chevreuil ! Je finis par m'octroyer une pause. La vue est belle, c'est d'un calme ! Juste le cri rapeux du héron, quelques aigrettes garzettes qui volent au loin.

Je me remets en route. Je suis stone ! Je m'égare. En fait, le chemin était tout proche de mon lieu de pause mais il a été obstrué par des branchages. 2ème passage délicat ! Pas de balisage ! Toujours le nez sur la carte. Je rejoins le canal à Méricourt puis poursuis à travers marais. C'est samedi, les pêcheurs sont là. Il y a du matos ! Le chemin s'engage sur un n nième chemin noir, je fais demi-tour et prends la petite route ! Je grimpe au belvédère du camp de César où j'ai une vue sur toute la vallée. J'y reste pour un pique-nique frugal.

Vue du Camp de César

Je rejoins Chipilly puis Cerisy après avoir traversé le canal. Pour la première fois depuis le début de cette marche, je découvre des signes de la Grande guerre : un monument aux morts et une nécropole.

A Chipilly, Monument pour la 58 ème division britannique, 990 soldats français sont enterrés à Cerisy.

Je rejoins à travers champs le canal à Gailly. Il me reste 2,4 km jusqu'à Sailly. Je suis sur la veloroute, entre marais et canal.


Je termine par le canal, ne pouvant pas prendre le chemin... Décidément !

21,6 km pour aujourd'hui, temps couvert, à peine 3 km de canal. Après discussion avec le gérant du camping, je change mes plans pour l'étape de demain.

Ce soir, je suis HS, plus de jus ! Je ne sais pas si c'est ce paysage, ce calme, le manque de vent aujourd'hui. Même le linge a du mal à sécher.

28
juil

Je suis réveillée par le froid qui tombe. C'est la première fois que je dors dans mon duvet, que je mets mon bonnet pour remballer. La nature n'a pas été de main morte avec la rosée ! Je pars vers 7h15. Sailly-le-Sec est le lieu où fut abattu l'as de l'aviation allemande Manfred von Richthofen dit le Baron Rouge. Le village fut aussi en partie détruit.

Le GR passe par 800m de chemin noir puis c'est la vélo route. Je rejoins directement le canal au moins j'aurais les pieds au sec !

Ça sent la menthe. Sur l'eau, une légère brume. Pas de pêcheurs, pas de cyclistes. Je suis seule.



Ça va être magique. Je me sens bien. Plusieurs fois, mon cerveau sera en mode pause et mes jambes fonctionneront toutes seules. Derrière le rideau d'arbres, j'entends les canards, des bruits de branches, des ploufs, toute une vie que je ne peux pas voir. Je traverse un banc de brume. Drôle d'ambiance. J'imagine le canal à l'automne. J'en connais qui aime ce temps brumeux.

Je vois passer une rousselotte, plusieurs hérons. Vraiment ce calme et la beauté tranquille du paysage me transportent.

Puis brusquement, la brume disparaît.

La Reine des prés, la grande valériane, l'onagre à grandes fleurs, la salivaire colorent la berge. Le houblon en fleurs s'accroche aux branches des aulnes. Tant d'espèces, de formes, de couleurs...

Au loin, la colline Sainte Colette, devant moi un immense marais creusé par les moines du XIÈME pour avoir du poisson.

La carte est plus parlante. Puis j'arrive à Corbie.

Belle découverte que cette petite ville riche de l'histoire des hommes depuis la préhistoire. J'ai une petite heure pour en faire le tour. La mairie et ses tourelles, la police dans un vieux bâtiment.

J'avise les tours de l'abbatiale St Pierre. Dommage, c'est fermé ! Pas d'office.

Puis je passe devant l'ancienne Collégiale St Étienne. Et au détour d'une rue, j'arrive au portail monumental de l'abbaye.

Je rejoins la gare et en 13 minutes, je suis à Amiens. Je ravitaille puis je me dirige vers les hortillonnages. Comme j'ai zappé cette étape, je m'étais dit que j'en ferai un petit bout à pied.

Mauvaise idée. Le soleil est là, c'est dimanche et il est 11h. Trop de monde, je me fais même rembrouer à cause du chariot.

Chaque parcelle a son style de passerelle.

Je fais demi-tour et squatte le seul banc à l'ombre. Il est recherché. Un couple de retraités s'installe sur celui en plein soleil. Je suis en train de pique-niquer, j'ai étalé mes affaires partout. Je fais remarquer à la dame que je peux partager mon banc. Monsieur :"on ne voudrait pas vous déranger". Et voilà que je fais de la place, le couple s'installe. Et belle rencontre ! On a parlé retraite, randonnée, bien vieillir, travail, disputes de couple.... Mon repas terminé, je laisse ce charmant couple de Lens à l'ombre et me rend à la Cathédrale. J'ai hésité. Je connais Amiens, pourquoi m'y attarder ?

J'entre quand-même. Je retrouve le labyrinthe et les différents pavages.

Puis je traverse le quartier St Leu...

Et rejoins la Somme avec quelques difficultés.

Me revoilà au calme. 3km de canal ombragé puis je peux m'installer. Arrivée à 15h, je plante ma tente à l'ombre. Ma grande parcelle va agacer plus d'un lors du rush des arrivées. Une si petite tente... et nous, et nous...

22km, heureusement que j'ai pris le train ! Ciel bleu, la température monte. Après l'accent du nord ce midi avec mes retraités, ce soir j'ai celui de Toulouse et les JO en prime ! Mes voisins crient victoire pour le champion toulousain de natation.

29
juil

Réveillée à 5h45 par le passage d'un hélicoptère, je me lève et pars peu après 7h. Je ne retrouve pas la magie d'hier, ni les émotions ressenties. C'est illusoire d'ailleurs de chercher à retrouver ce qui a été vécu, plutôt être disponible à vivre autre chose.


Je vais avoir l'autoroute en bruit de fond pendant une bonne partie de l'étape.

Environ 6 km de canal, tranquille, en passant par Dreuil les Amiens, puis Ailly sur Somme.

Sur la berge opposée, se trouvent des habitations d'ouvriers des industries textiles du XIXeme. Un écossais, James Carmichaël, va bâtir un empire industriel avec les filatures de lin. Il va aussi mettre en place tout un système paternaliste pour garder ses ouvriers : crèches, dispensaires, écoles,...

Puis je traverse le pont pour rejoindre St Sauveur, longe le marais, pénètre dans un bois et finis par grimper sur le coteau. Au point culminant (54 m), je fais une petite pause. J'ai une vue sur toute la vallée et en me retournant, j'aperçois au loin la cathédrale d'Amiens. J'ai une brise légère dans le dos.

Je vais passer "la porte de fer", porte principale du camp de César. C'est le passage entre les deux buttes.

Puis le GR me fait traverser Samara. Les enfants y étaient allés en sortie scolaire.

Je retrouve le canal asphalté, bien roulant pour le chariot. J'aperçois le clocher de la Collégiale de Picquigny.

Il est 11h30 quand j'arrive au camping. Je vais être à l'ombre tout l'après-midi, au bord d'un ruisseau avec les canards. Je vais aussi parler anglais avec un couple très original venu s'installer à côté. Belle rencontre mais qui une fois de plus me rappelle qu'une langue ça se pratique sinon,... oh my God !

Après avoir mangé et fait la sieste, je pars visiter la Collégiale. C'est à Picquigny que fut signé la fin de la guerre de 100 ans. Je grimpe un très long escalier pour rejoindre la Collégiale qui était en fait l'église du château.

Je suis accueillie par une bénévole de l'association locale. Une famille originaire de Caudry est là aussi et le jeune garçon demande s'il peut jouer de l'orgue. Ma visite sera accompagnée par les fugues et toccata de Bach !

Saint Roch en haut à gauche à été retrouvé dans les marais !

En sortant, je passe par un porche entre deux grandes murailles. Le château devait être immense.

18 km en tenant compte de la visite et du ravitaillement. Il commence à faire très chaud. J'essaie de revoir le découpage de mes étapes en conséquence. Pas facile. Comme toujours, ce sera lié aux hébergements et point de ravitaillement !

30
juil

A peine 7 heures quand je quitte Picquigny et déjà je sais que cela va être dur. J'ai fait le plein d'eau en conséquence. A la sortie du camping, je vois une borne que l'on pose après les inondations puis je passe au dessus du spot de kayak réputé.

J'ai le choix de suivre le GR 800 qui me fera longer la voie de chemin de fer ou bien suivre le GR 123 qui est sur l'autre berge, en hauteur et apparemment ombragé. Je vais hésiter jusqu'au dernier moment. Et je choisis le 123 ! Et ne regrette pas. Effectivement, je vais grimper le coteau, à la fraîche et à l'ombre. Des champs de lin, je vais grimper à travers les champs de blé. Le chemin sera d'abord petite route, puis chemin agricole, et enfin chemin noir.

J'arrive au point culminant ( 98 m). Il ne reste plus qu'à redescendre ! Je suis surprise de trouver du tournesol !

Un chevreuil au loin

J'arrive à Bourdon où se rejoignent les 2 sentiers. J'ai parcouru 11km en 2h30. Je m'octroie une pause sous un beau marronnier, devant un ancien calvaire.

Je traverse Bourdon et rejoins le canal.

4 km de canal presque en ligne droite, avec des arbres plantés à même distance. Ça fait lumière, ombre ; chaleur, fraîcheur !

J'ai la chance de voir passer un martin pêcheur ! J'aime bien la légende qui raconte que le martin pêcheur est avec la colombe et le corbeau, le premier oiseau à quitter l'arche de Noe. Il était gris et s'est dirigé vers le soleil. C'est comme cela qu'il a ces belles couleurs bleue et orangée.

Puis je passe au dessus de la Nièvre, l'un des 20 affluents de la Somme.

La Nièvre se jetant dans la Somme

J'arrive devant les anciennes filatures de chanvre et là aussi il y a trace de l'habitat collectif créé par un patron au paternalisme social. C'est devenu aujourd'hui un dépôt du Relais.

Le chemin me fait grimper en haut de l'Etoile. Il subsiste les ruines de St Jacques le majeur. Il faut une chaleur ! Et je redescends par une volée d'escalier.

Il reste moins de 5 km avant d'arriver à Long. Mais ça va être très chaud et long ! Je grimpe le coteau qui est en plein soleil. Ça moissonne, c'est poussiéreux et il n'y a pas d'ombre. Puis je remarque une petite haie de pruneliers. Un peu d'ombre donne dans le champ. Je grimpe la bordure et me mets à l'ombre. Je connais l'intérêt des haies mais là je fais l'expérience du frais que cela procure. J'ai devant un ventilateur naturel. Un peu d'air frais passe entre les branches !

Mon ventilateur !

Je laisse redescendre le cardio, bois la moitié de la bouteille de secours. Reste à finir l'étape. Au loin j'aperçois la Somme, puis le clocher de Long. Je traverse le village. C'est très beau.

Je rejoins la Somme, longe le magnifique château du XVIIIÈME avec ses serres.

Puis je vais planter ma tente à l'ombre ! En d'autres circonstances, c'est à dire avec des températures moins élevées, j'avais prévu la visite du château. A 19h, il fait encore 30 degrés ressenti 38 dit la météo. Je n'ai pas eu le courage d'aller manger à la gargote du coin, je fais les fonds de sac !

J'ai marché 23 km aujourd'hui. Demain Abbeville, sans doute sous l'orage.

31
juil

L'orage éclate dans la soirée. Le nombre d'éclairs est stupéfiant ! Je ressors pour vérifier ma tente. J'avais pris grand soin du lieu et du montage. La chaleur est insupportable. Je ruisselle littéralement. Il commence à pleuvoir, le vent monte. Et voilà, l'orage se rapproche. La foudre n'est pas tombée loin. Quel vacarme ! On aurait qu'un géant avait jeté un meuble dans l'escalier, le bruit rebondissait, rebondissait,...

J'ai quand même dormi. Je me réveille vers 5h30. Il ne pleut plus. Pas de problème, la tente a tenu. Je regarde la météo. Je décide de plier la tente et de tout ramener aux sanitaires.

La tente au petit matin...

Je vois passer un homme avec un sac à dos et un chapeau et je me rappelle ce que m'a dit Jacqueline. Je hèle "Dominique ?". L'homme se retourne "Oui ?" "Jacqueline m'a parlé de vous". Et nous faisons connaissance. Nous décidons de faire l'étape ensemble. J'ai réservé hier soir un hôtel à Abbeville. Dominique fera de même. Le choix du canal s'impose, la météo n'étant pas terrible. Je sors pour la première fois mes bâtons de marche. Nous passons sur le déversoir où il y a un passage à poisson et un pour les aiguilles.

Nous allons passer l'étape à échanger sur le chemin, les étapes communes, sur ce qui nous fait marcher, sur nos vies, sur La Vie,...

Nous avalons les km, une pause pour manger une viennoiserie, une autre pour présecher les tentes. En route, quelques châteaux...

Ruines du château de Pont Remy

Nous arrivons à Abbeville vers midi, 17 km vite expédiés. Nous nous installons à l'hôtel. Celui-ci ne paie pas de mine mais c'est propre et l'accueil est là. Après une douche, petite lessive et séchage des tentes, nous nous retrouvons pour aller manger et visiter la ville. Crêperie et son cidre local devant la Collégiale St Vulfran.

Dominique m'a parlé ce matin des vitraux de Manessier qu'il désire aller voir. Nous passons devant le beffroi et ce centre-ville reconstruit après guerre.

Les vitraux se trouvent dans l'église du Saint Sépulcre. J'y étais venue avec Brigitte il y a bien 20 ans ! Nous avions randonné dans les marais de Ault. Ces vitraux me donnent une réelle sensation d'apaisement.

Les vitraux ont pour thème la Passion et la Résurrection du Christ, 300 m² de vitraux

Puis nous terminons par Saint Vulfran. Elle possède une voûte en pierre et une voûte en bois.

Je déniche une statue de Saint Jacques

La façade est magnifique. Gothique flamboyant du XIIème.

Une autre statue de Saint Jacques

Il fait toujours aussi chaud, de l'orage est encore annoncé.

Demain, la Somme canalisée rejoindra la mer.

1
août

La nuit a été étouffante, pas reposante du tout. L'orage ! Réveillée à 5h30, je reprends une douche, prépare mon sac. A 6h30, je suis prête et Dominique me rejoint. Il a fallu soulever la clenche pour ouvrir les portes et sortir de l'hôtel. Nous trouvons une boulangerie pour le petit déjeuner. Il se met à tomber des cordes et on va squatter pendant une demi heure dans la boulangerie qui fait le meilleur gâteau battu de la région. La boulangère est extra et Dominique amuse la galerie avec les clients.

Il y a 13,5 km pour Saint Valery par le canal. Tout droit !

Il y aura de nouveau quelques coups de tonnerre, un peu de pluie puis le temps s'améliore et se met définitivement au beau. Je sens l'émotion de Dominique qui va arriver au bord de la mer après 24 jours de marche. Nous passons par une petite réserve ornithologique. Nous voyons seulement quelques cygneaux. Dominique tentera la marche pieds nus sur le chemin noir et moi du surf avec le chariot.

Ça y est, l'énorme écluse est en vue, c'est le fin (ou le début ) du canal de la Somme.

La borne d'arrivé qui fait écho à la plaque de la maison éclusière à Saint Simon

Nous entrons dans Saint Valéry, trouvons une gargote pour manger face aux molières et Le Crotoy. Ce sera fish and chips et bière.

Nous passons par la vieille ville, l'église St et redescendons sur Cap Hornu.

Nous poursuivons par la digue de la gaité jusqu'au Houdel. Le lilas de mer est en fleurs, cela fait des tâches mauves. Le temps est splendide.

Le Crotoy à gauche, Cap Hornu à droite.

Puis c'est l'arrivée sur la baie ! Magique ! La mer s'est complètement retirée. L'association de préservation des phoques a installé des lunettes. A tour de rôle, on observe les colonies de phoques se prélasser au soleil. Je suis bien. Vraiment. J'ai rarement ressenti une telle sérénité.

Nous poursuivons sur les galets puis prenons la route blanche distance de 3 km longeant la côte pour rejoindre Cayeux sur mer.

Arrivée à Cayeux

Cayeux et le plus long chemin de plage d'Europe soit 2km près de 400 cabines de plage. Je monte à Dominique les falaises de Ault, où il sera demain.

Encore une vingtaine de minutes pour rejoindre le camping qui a bien voulu nous accueillir. Il est passé 19h et nous avons marcher plus de 37 km.

Quelle journée ! Quelle étape !

Ce matin, quand je me suis levée, je ne savais pas que je serai à Cayeux ce soir. La météo, ce qui s'est présenté sur le chemin, ce que j'ai vécu depuis que je suis partie, le compagnonnage avec Dominique en fin de marche m'ont amenée là.

" On dit qu’avant d’entrer dans la mer, une rivière tremble de peur.

Elle regarde en arrière le chemin qu’elle a parcouru, depuis les sommets,

les montagnes, la longue route sinueuse qui traverse des forêts et des villages,

et voit devant elle un océan si vaste qu’y pénétrer ne paraît rien d’autre que devoir disparaître à jamais.

Mais il n’y a pas d’autre moyen.

La rivière ne peut pas revenir en arrière.

Personne ne peut revenir en arrière.

Revenir en arrière est impossible dans l’existence.

La rivière a besoin de prendre le risque et d’entrer dans l’océan.

Ce n’est qu’en entrant dans l’océan que la peur disparaîtra,

parce que c’est alors seulement que la rivière saura

qu’il ne s’agit pas de disparaître dans l’océan, mais de devenir océan."

Khalil Gibran

2
août
2
août

J'ai prévu de prendre un bus jusqu'à Abbeville. Nous prenons le petit déjeuner au camping puis Dominique m'accompagne à l'arrêt de bus tout proche. L'autocar n'est jamais passé...

Forcément, j'avais regardé les horaires pour jeudi ! Nous nous disons au revoir et je me dirige vers le centre de Cayeux. Le bus passera à 13h10 à la mairie.

Je pars donc au bord de la mer. Je vais passer 3 heures assise sur ce banc, face à la mer. Ce sera magique : les couleurs de la mer continuellement changeantes, le ballet des mouettes et goélands, le ciel bleu puis pâlissant. Un immobilisme entouré de mouvement. Méditation, joie, sérénité.

Puis je me fais interpeller par une vieille dame avec une canne. " Vous faites quoi avec ce gros sac ?" Je fais la connaissance d'Élisa. Quelle rencontre ! Nous voilà toutes les 2 assises sur ce banc, face à la mer. Elle me trouvera très sereine " ça se voit sur votre visage, tout ce vécu intériorisé", me dit-elle. Il est midi. Elisa rentre chez elle en me laissant son adresse si un jour je reviens à Cayeux !

Il y a du monde à l'arrêt de bus. C'est bon signe ! Me voilà de nouveau à Abbeville. Je ne réalise pas que j'y étais hier matin. J'ai une distorsion du temps. J'ai l'impression que c'était il y a... J'ai du temps avant le train pour Lille. Je vais alors faire la visite visite guidée de la Collégiale St Vulfran puis acheter un gâteau battu à la boulangerie qui nous a si bien accueillis lors de cette pluie battante.

Le retour en train sera un retour à une réalité : retard des trains, gendarmerie, migrants, ados sympathiques, adultes râleurs.

Comme à chaque marche, j'ai emporté de la lecture sur ma liseuse. J'ai découvert une autrice, Jeanne Benameur, et lu "La patience des traces". J'avais juste été attirée par le titre. Quelle lecture !

J'ai en moi la beauté des paysages, la beauté des rencontres : Dany de la chambre d'hôtes, le gérant du camping de Sailly-le-Sec, le couple du bassin minier, mes voisins de camping.

Mais surtout Jacqueline et son vélo : ancienne directrice d'école, qui avec ses 70 ans se rend à vélo de Besançon à Carnac et fait un crochet par la baie de Somme parce que ses amies lui ont dit que c'était beau.

Dominique : mon âge, prof d'EPS et 6ème Dan de judo (respect, Maître) parti de Strasbourg pour voir la mer en longeant les canaux et avec qui j'ai marché les deux derniers jours de mon voyage, comme une évidence de la rencontre.

Élisa : 76 ans, ancienne professeure d'allemand, en villégiature à Cayeux, d'une ouverture d'esprit extra.

Ah drôle de coïncidence, tous des profs !

Ces rencontres et celles des précédentes marches m'accompagnent. Je ne suis jamais seule sur les chemins.

J'ai parcouru 278 km, soit en moyenne 25 km par jour et Jeannik mon chariot a franchi les 1000 km !