Après trois jours de voiture dans le désert, nous voilà tout proche de l'Erta Ale, un volcan au sommet duquel un lac de lave bouillonne continuellement. Même si nous emportons des masques pour nous protéger des émanations toxiques, le véritable danger provient de la proximité avec l'Erythrée. Seulement six kilomètres nous séparent de ce pays en guerre et pas vraiment amical avec l'Ethiopie. Des touristes ont déjà été tués ou pris en otage, c'est pourquoi nous sommes accompagnés de gardes armés qui ne savent pas magner les armes et qui me paraissent plus dangereux qu'autres choses ... Et puis à force de leur vomir sur les baskets (la cuisine locale ne me réussissant pas...), je me dis que çà pourrait vraiment finir par les énerver ... Mais çà les fait plutôt rigoler. Ils me donnent à mâcher du khat, ce qui n'arrange rien. Un éthiopien rachitique nous raconte ses sept jours en tant qu'otage des érythréens, çà ne donne pas envie d'essayer.
Mais malgré tout cela, le jeu en valait la chandelle.
Ils m'ont donné le plus vaillant du troupeau ! On dirait pas que je vomis toutes les heures depuis deux jours, hein ! Nuit blanche. Malheureusement après avoir vu cela, on craint ne plus pouvoir jamais s'émerveiller pour rien d'autre.
Mais l’Éthiopie est pleine de surprise. Après plusieurs heures de marche par 38°C, nous retrouvons le lieu de bivouac quitté la veille au soir pour passer la nuit à côté de la marmite. Nous mettons ensuite la cap sur un haut lieu de commerce entre Afars et Tigréens.
Bon, là il voit des voitures venir depuis l’Érythrée et il a déjà été otage là bas, il stresse un peu ... nous aussi du coup.
Les caravanes tigréennes arrivent pour charger le sel ramassé par les afars.Alors voilà comment les afars gagnent leur vie. Des heures à travailler en plein soleil par 40°C sans lunettes de soleil, parfois les pieds nus dans le sel presque pur. Impossible de ne pas penser à Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez. Dans le village de Macondo, il écrit avec sarcasme qu'il n'y a pas de cimetière puisque personne n'y est jamais encore mort. La raison : personne ne vient vieux dans ce village. Ici, en Ethiopie, je n'ai croisé aucune personne âgée de plus de quarante ans. Je commence à comprendre un peu pourquoi.
Une fois le sel ramassé et taillé à la maille par les afars, les tigréens chargent mules et dromadaires et partent pour six jours de marche à travers le désert pour négocier les plaques de sel en ville.