Par Alou
Le Kivu comporte deux lacs ; l'un est un paisible lieu de baignade et de pêche, il s'agit du lac Kivu. L'autre, au sommet du volcan Nyiragongo, n'est autre que le plus grand lac de lave au monde.
Février 2018
12 jours
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Pour nous rendre dans la région du Kivu, située à l'Est du Congo Kinshasa, nous choisissons de passer par le Rwanda pour des raisons de distance et de sécurité. En effet, la RDC était plutôt sûre lorsque nous avons réservé nos billets d'avion mais entre temps, Kabila a posé quelques problèmes au niveau électoral, ce qui a conduit à une instabilité politique notamment dans la région du Kivu. Je schématise très vite. En réalité, la région est secouée par les conflits pour des raisons multiples. On dira qu'une nouvelle goutte d'eau s'est ajoutée à un vase déjà bien plein.

Une fois l'avion posé, nous nous rendons à la gare routière et sautons dans le premier bus public en direction de la frontière entre le Rwanda et la RDC au bord du lac Kivu, au niveau de la ville de Goma. Il est étrange de franchir cette frontière à pied. Je ne peux m'empêcher de penser à ceux, qui moins de vingt cinq ans auparavant se pressaient au niveau de la même barrière pour fuir le génocide.

Le contraste entre Rwanda et RDC est saisissant. Si le Rwanda est un pays tout propret, aux routes goudronnées, la RDC, ou du moins la région du Kivu, n'est que boue et constructions de bric et de broc. Par ailleurs, le Rwanda n'est pas en reste en ce qui concerne la présence militaire forte, un peu partout en ville et sur les routes. Il est par exemple impossible de pénétrer dans un lieu public comme un supermarché sans passer au détecteur de métaux sous la surveillance d'une personne armée. Cependant, la RDC est encore sur un autre registre. Dès le passage de la frontière, nous constatons la présence d'une délégation de l'ONU qui a fort à faire depuis plusieurs décennies. Mais il y a aussi des militaires partout, vraiment partout. Nous passerons sur la tentative des douaniers congolais d'obtenir un pot de vin de notre part ... çà fait partie du folklore ... Le voyage n'a pas encore commencé que l'on a déjà des images plein la tête.

Après l'avion, le bus et les joies du passage de frontière, nous nous lançons enfin à l’assaut de ce somptueux volcan culminant à presque 3500 mètres d'altitude.

Une bonne partie de la nuit est consacrée à la contemplation de cette éraflure laissant apparaître la chaire à vif de notre belle planète. Le plus grand lac de lave au monde. Il n'y a pas de mot pour décrire les sensations vécues là haut. Qu'importe les nuits sans sommeil, la difficulté du voyage, les dangers, la longueur de la marche, seule la sensation d'être exactement là où l'on doit être prévaut.

Il est difficile de décrire ce qu'il se passe dans un lac de lave, mais on peut consacrer des heures à la contemplations. Des éruptions se forment, des bulles explosent, des craquelures apparaissent, des îlots dérivent, s'entrechoquent. Je savais à quoi m'attendre, ayant déjà vu l'Erta Ale, et de plus près qu'ici en plus. Mais, l'émotion est toujours bien présente.

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Une fois descendu de notre beau volcan, nous partons, avec un guide du parc national, à la recherche de gorilles des montagnes. Il nous faudra trois heures de marche dans la jungle pour trouver une famille de ces primates ; assez de temps pour souffrir, en tout cas, des morsures de fourmis qui nous causèrent des douleurs assez terribles.

Nous découvrirons quelques jours plus tard, que les fourmis n'étaient vraiment pas le principal danger ce jour là. En effet, nous entendrons plusieurs coups de feu. Dans la jungle, il est difficile d'évaluer la distance, ni même la direction d'où provient un son. Notre guide se veut rassurant, expliquant que la chose est fréquente dans le coin ... De mon côté, ayant l'habitude des chasseurs bourrés à l'heure de mon jogging du dimanche matin dans nos belles forêts françaises, je ne me laisse pas trop impressionner... Bien que les chasseurs ne tirent pas à l'arme automatique par chez moi ... Plus tard, dans notre hôtel de Kigali nous prendrons connaissance d'un article de presse relatant des échanges de tirs entre armée rwandaise et forces congolaises (milice ou armée régulière, je ne suis pas sûre) faisant au moins six morts. C'était les tirs que nous avons entendu dans la forêt ... Et je suis très heureuse de n'avoir eu connaissance de cela qu'après avoir quitté le Kivu.

C'est encore une belle expérience qui s'offre à nous que de pouvoir observer ces êtres de si près. Même si nous le savions déjà en théorie, c'est vraiment bizarre de constater les similarités qu'il existe entre ces primates et nous, les sapiens.

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Un voyage n'aurait aucun sens si ce n'était pas l'occasion d'échanger avec les populations vivant dans les lieux explorés. Le lac Kivu est une région ou se pratique la pêche mais aussi l'extraction minière.

Lors d'une nuit passée au bord du lac, nous avons entendu des chants s'élevant dans la pénombre. Il s'agissait des pêcheurs qui, pour tenir la cadence et ne pas s'endormir, chantaient à tue-tête. Le lendemain, nous avons loué un bateau et sommes partis à leur rencontre.

Les réveils matinaux sont aussi l'occasion d'observer des oiseaux merveilleux.

Dans un registre nettement moins bucolique, nous avons aussi pu visiter une mine de coltan. On en extrait le tantale, matière très utilisée dans la confection de nos téléphones portables. J'étais plutôt bien documentée sur les conditions de travail de ces mineurs et sur l'inégale répartition des bénéfices tirés de la vente d'un téléphone portable entre tous les travailleurs entrant dans la conception d'un tel objet ; mais encore une fois, la réalité est bien plus frappante que tous les grands discours.


Sans vouloir vous tirer les larmes, la mine que j'ai pu visiter comportait quatre boyaux d'une profondeur d'environ quarante mètres. Je suis descendue dans deux boyaux. A partir de vingt mètres, la chaleur est difficile à supporter. Il devient compliqué de respirer à cause de petites particules qui se détachent des parois et flottent dans l'air. L'équipement des mineurs est minimaliste tant au niveau du système d'éclairage que des moyens de se protéger des divers risques. Ils arpentent les boyaux les pieds nus dans des galeries qui ne sont pas stabilisées et qui peuvent s'effondrer à tout moment. Ils travaillent à quatorze ou quinze dans le même boyau et dans une chaleur irrespirable.

Tout çà pour çà :

C'est ainsi que se termine ma découverte de la région du Kivu. Par la suite, nous remettrons le cap sur Kigali, feront un détour par l'est du Rwanda pour une journée dans la savane à la rencontre des éléphants, des girafes et des zèbres.

En conclusion, je dirai que la région du Kivu est vraiment fabuleuse à découvrir mais qu'il vaut mieux avoir le cœur bien accroché et avoir une petite expérience du bourlinguage avant de se lancer.