Le réveil à 1 heure 45 du matin est, comme on peut s'y attendre, difficile. Je suis en train de me lever à l'heure où d'habitude je me couche, quelle horreur.
Nous avions eu la judicieuse idée de prendre à emporter un Nasi Goreng (du riz aux oeufs, poulet et soja, pour ceux qui ont oublié) depuis Ubud, ce qui nous permet d'avoir quelque chose dans le ventre avant de partir. Nous devons attendre notre voiture à 2h du matin devant l'hôtel. Au dehors, c'est bien calme, on entend le sifflement du vent dans les feuilles et... Un chien qui se met à nous aboyer dessus.
Il n'arrête pas et réveille celui qui est sans doute son propriétaire, qui vient à notre rencontre. Il s'agit de Leon, le gérant de l'hôtel. En pyjama, il s'enquiert de savoir qui nous sommes avant de comprendre que nous attendons une navette. Il décide de rester avec nous, et nous parlons pendant 45 minutes de Bali... Il nous explique que l'île est en perpétuelle évolution. Elle s'adapte au tourisme grandissant chaque année, développant toujours plus d'activités pour ses visiteurs. Ici, à l'inverse de Java qui possède des mines, de l'agriculture, tout est pensé pour le tourisme. Cela créé des problèmes à bien des égards, comme au niveau de la loi, car des accidents ont eu lieu sur des activités qui n'étaient pas réglementées (car nouvelles). Comme bien souvent, les incidents ont fait jurisprudence - comme par exemple, un accident mortel sur les balançoires que l'on avait fait la veille !
Heureusement que Leon est venu discuter, sans lui, le temps d'attente aurait été bien long. Encore une fois, notre chauffeur honore le délai à la balinaise.
En route !Nous montons dans un van partagé avec un couple de Belges. Au bout d'un petit quart d'heure de route, nous faisons un arrêt dans un campement proche du mont Batur. L'étape consiste à boire un café et manger une crêpe, mais surtout payer notre voyage et le droit d'entrée sur le mont Batur. Nous sommes séparés de nos nouveaux amis belges : évidemment, ils ne veulent pas que l'on communique combien chacun a payé. Après avoir réglé notre dette, nous remontons à bord du van qui compte maintenant en plus un couple d'Allemands.
Nous mettons pied à terre au niveau de la base du mont Batur, dont le sommet culmine à 1717 mètres. Nous avons 800 mètres de dénivelé à gravir en une randonnée d'environ 3 kilomètres. Ça va grimper, donc.
En sortant de la voiture, on rencontre notre guide, Budi, qui va mener notre petit groupe d'européens de l'ouest en haut du volcan. Il est environ 4h10, le but est d'arriver avant 6h du matin, heure a laquelle le soleil se lève.
Sur le papier, rien d'insurmontable, 2 petites heures pour faire 3 kilomètres, aussi pentus soient-ils, cela me semble largement à notre portée. Et pourtant... Dès la sortie du parking, nous prenons conscience de l'ampleur du succès de cette ascension. Des hordes de touristes, lampe frontale attachée, marchent d'un pas décidé vers le sentier.
Nous sommes touristes et nous sommes légionsDès les premières difficultés de la montée, au bout de dix minutes de marche, les embouteillages se font déjà sentir. Le chemin est étroit, glissant, et ne laisse pas la place au dépassement. Nous faisons un pas après l'autre, mètre après mètre selon l'avancement de notre voisin de devant.
Au loin, on distingue toute une procession de lampes torches dans la nuit, laissant deviner ce qu'il reste encore à gravir. Le nombre de personnes voulant monter un volcan en tongs ou en Crocs est bien trop important.
Notre guide nous fait prendre un raccourci plus pentu pour gagner du temps, mais là encore, nous sommes limités par l'avancement d'autres groupes.
Le fond de l'air est frais, et malgré le rythme de marche lent, on devient vite trempé avec l'humidité. Ce n'est définitivement pas agréable de progresser si lentement car le chemin pentu oblige à prendre des appuis instables sur lesquels nous devons tenir en équilibre, le temps qu'enfin, ça avance.
Au bout d'une heure et quart, une hutte nous propose Bintangs et gâteaux. Je l'ai pris pour l'arrivée, mais la piste suit son cours. Nous avons perdus en route une Allemande ; il faut tout de même une condition physique correcte pour monter. Le guide est resté avec elle, mais impossible de se tromper de chemin, il suffit de suivre les lampes torches. On se suit religieusement à la manière de chenilles processionnaires.
Le dernier quart d'heure s'effectue dans le brouillard complet, avant de discerner dans la nuit les premiers reflets du soleil qui commencent à envoyer des couleurs.
Vite, il faut atteindre le sommet. Les gens se perdent à regarder la nuit qui commence à laisser sa place, alors qu'il faut avancer, nous ne sommes plus très loin ! Je plaide coupable de leur avoir envoyé dans les yeux quelques reflets de lampe torche pour les remobiliser.
Sur les coups de 5h50, nous sommes enfin au sommet. On se pose avec le couple de Belges sur un petit monticule de terre, et on apprécie le spectacle.
C'était très beau, je dois avouerÀ l'horizon, le soleil se lève sur une mer de nuages. Avant de distinguer le premier croissant, ce sont les lumières bleues d'abord foncées, puis claires, qui font leur apparition. L'orange arrive plus tard, suivi du rouge. La mer se dissipe, laissant apparaître les loupiotes des villages que l'on domine. Le mont Agung, haut de 3000 mètres, nous surplombe de face.
C'est l'heure de prendre des photos, évidemment.
Print !C'est aussi l'heure de mettre un pull, parce que les premiers tissus sont trempés et il fait bien froid là-haut. Je regrette peut-être un peu le short.
À côté de nous, un Espagnol a amené une guitare et joue une mélodie sympathique. D'autres étrangers l'accompagnent en chantant.
L'ambiance est chaleureuse, nous sommes certainement tous heureux de s'être levés pour la toile de maître qui se dessine devant nous.
Pour ma part, je n'arrive pas à apprécier autant que je l'aimerais le lever du soleil : je suis nauséeux à cause de la fatigue. Eloa a l'air en forme, je suis content de partager le moment avec elle.
Budi nous rejoint avec l'Allemande que nous avions perdu plus tôt, une fois le soleil déjà un peu levé. Il nous apporte ensuite un petit déjeuner bienvenu : un sandwich à la banane et un oeuf dur.
Particularité de cet œuf : il a été cuit à la vapeur du volcan !
Nous marquons une pause dans notre contemplation, en l'espace de quelques secondes, on ne voit plus rien : un épais brouillard est venu obstruer le champ de vision.
L'occasion de discuter avec notre guide : cela fait 1 an qu'il monte puis descend le mont Batur avec des touristes, tous les jours. Il connaît quelques mots de français, appris au gré de ses rencontres.
Le brouillard cesse. Nous pouvons distinguer de l'autre côté de notre point de vue sur le lever du soleil, l'intérieur du cratère sur lequel nous sommes. Encore en activité, d'épaisses fumées sortent de différents points, le rendant difficile à photographier.
Le cratère du mont BaturOn amorce la descente, et c'est le moment pour moi de débrancher mon cerveau et de passer en pilotage automatique. Je me contente de suivre la personne devant moi, et j'essaie d'ignorer mon ventre qui me crie de laisser les choses qu'il contient sortir.
Un instant d'inattention, et CRAC, j'ai laissé ma cheville droite sur un caillou. Pas le temps d'avoir mal : je serre très fort la chaussure, et les dents par la suite. Il reste trente minutes de marche, il va falloir tenir comme cela. Budi propose son aide, mais ça ira. Je boîte mais on rejoint notre chauffeur garé sur le parking. Dans la voiture, je ferme les yeux et c'est ma tête heurtant les parois de la voiture qui me réveille. Au bout de quelques sommeils incessamment interrompus, nous regagnons l'hôtel et notre chambre. Une douche, et nous nous reposons pendant 3 petites heures.
Tous les deux, on tombe de fatigue. C'était une expérience à faire que cette ascension. Si c'était à refaire, je ne le referais pas avec plaisir, mais je la referai quand même. Ça valait le coup.
Dédicace aux potes belges Juliette et Lucien avec qui c'était sympa de monter !Vers 14 heures, on déguste au restaurant de l'hôtel des ''spaghettis à la sauce tomate et au poulet'', quelque chose d'européen pour être sûr d'avoir le ventre tranquille.
Une erreur que d'avoir commandé ce plat. À la vue et au goût de la sauce orange vif, le cuistot ne sait sans doute pas à quoi ressemble une tomate. Dans l'après-midi, je profite de mon état apathique, comme en lendemain de soirée, pour relater la journée précédente pendant qu'Eloa bouquine au bord de la piscine.
Nous sommes rapidement rattrapés par la pluie qui nous rapatrie de force dans notre chambre.
Tiraillés par la faim quelques heures plus tard, on se revient au restaurant mais cette fois, on mange indonésien ! Des pluies diluviennes accompagnent notre repas. En regagnant notre chambre, nous avons le droit à une douche avant l'heure.
Cette fois, plus d'erreur, en Indonésie on mange indonésienUn épisode de Witcher, et au lit ! On aura sacrifié la journée d'aujourd'hui pour avoir vécu la nuit dernière. On espère passer une nuit reposante pour demain finir de visiter Ubud. Il faut, car l'heure de rentrer approche et nous ne voulons pas partir avec un sentiment d'inachevé.